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Dossier : 2014-2631(IT)I

ENTRE :

CATHRYN MCBRIDE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

Appel entendu le 8 janvier 2015, à Toronto (Ontario)

Devant : L’honorable juge John R. Owen


Comparutions :

 

Pour l’appelante :

L’appelante elle-même

Avocates de l’intimée :

Me Kaylee Silver

Me Rita Araujo

 

JUGEMENT

L’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2012, dont l’avis est daté du 6 mars 2014, est rejeté sans frais, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour de février 2015.

« J.R. Owen »

Juge Owen

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de mai 2015.

 

M.-C. Gervais


Référence : 2015 CCI 31

Date : 20150216

Dossier : 2014-2631(IT)I

ENTRE :

CATHRYN MCBRIDE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Owen

I. Introduction

[1]             Il s’agit d’un appel interjeté par Cathryn McBride à l’encontre d’une nouvelle cotisation établie à l’égard de son année d’imposition 2012, au moyen d’un avis de nouvelle cotisation daté du 6 mars 2014. La nouvelle cotisation incluait dans le revenu de Mme McBride un montant de 13 964 $ compte tenu du fait que ce montant constituait une « pension alimentaire » au sens du paragraphe 56.1(4) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), que Mme McBride a reçue au cours de l’année 2012. Le montant de 13 964 $ en cause comprenait 12 paiements mensuels de 1 163,70 $.

II. Les faits

[2]             Madame McBride a témoigné pour son propre compte. Mme McBride a fourni à la Cour un ensemble de documents, dont un accord de séparation signé par son ex‑époux, accompagné d’une lettre d’envoi de la part de l’avocat de ce dernier, un avis de conférence pour une conférence relative à la cause, un mémoire de conférence et un état des biens familiaux nets et deux ordonnances de la Cour supérieure de justice. À l’exception de l’état des biens familiaux nets, l’intimée a fourni les mêmes documents dans son recueil de documents. Mme McBride a aussi fourni la copie d’un affidavit rédigé à l’appui d’une requête pour outrage au tribunal qu’elle a déposée contre son ex‑époux, une décision de la Cour supérieure de justice à l’égard de cette requête, un état de compte du Bureau des obligations familiales du ministère des Services sociaux et communautaires, daté du 11 août 2014, qui contient un résumé des paiements qu’elle a reçus de son ex‑époux jusqu’au 1er août 2014.

[3]             Après la clôture de l’audience le 8 janvier 2015, j’ai conclu que la première ordonnance de la Cour supérieure de justice présentée en preuve par les deux parties renvoyait au procès‑verbal de règlement amiable (voir l’extrait de l’ordonnance reproduit plus bas). De même, l’affidavit à l’appui de la requête pour outrage au tribunal renvoyait à une copie du procès-verbal de règlement amiable qui y était jointe sous la cote A, et la décision renvoyait au procès‑verbal du règlement amiable à titre de fondement pour le libellé de la première ordonnance. Aucune partie n’a présenté le procès-verbal à l’audience, mais Mme McBride en a fourni une copie après qu’il eut été demandé aux parties de le fournir.

[4]             Le procès-verbal est rédigé sur un formulaire type et est signé par Mme McBride (le 27 septembre 2010) et son ex‑époux (le 24 septembre 2010) (le « procès verbal de règlement amiable »). Compte tenu des nombreux renvois à ce procès-verbal dans les documents présentés en preuve à l’audience et du rôle du procès-verbal précisé par la Cour supérieure de justice dans la décision, et vu le paragraphe 18.15(3) de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt, j’ai pris en compte ce procès‑verbal pour tirer mes conclusions dans le présent appel.

[5]             Dans son témoignage, Mme McBride a déclaré qu’elle s’était séparée de son époux en 2009 et qu’elle avait retenu les services d’un avocat pour la représenter dans l’action en divorce. Au cours de la première moitié de 2010, un accord de séparation a été rédigé et celui-ci portait uniquement sur l’égalisation des biens familiaux nets. Mme McBride a présenté une copie de l’accord (l’« accord de séparation »), accompagnée d’une lettre d’envoi de la part de l’avocat de son ex‑époux, datée du 4 juin 2010. La lettre d’envoi déclarait en partie ce qui suit :

[traduction] Comme gage de sa bonne foi concernant son désir de résoudre les questions litigieuses, je vous envoie par la poste quatre copies d’un accord de séparation signé à l’égard de l’égalisation uniquement, dont une copie est jointe.

[6]             La copie de l’accord de séparation présentée par les deux parties était signée par l’ex‑époux, mais non par Mme McBride. Mme McBride a déclaré dans son témoignage qu’elle avait également signé l’accord. L’article 3 de l’accord de séparation est rédigé ainsi :

[traduction] À la réalisation de la vente du foyer matrimonial, Eric versera à Cathryn un paiement d’égalisation de 38 995,89 $ provenant du produit de la vente.

[7]             L’article 4 de l’accord de séparation portait sur la dette du couple. Mme McBride devait être responsable de la moitié des sommes dues au moment de la séparation et son ex‑époux devait assumer la responsabilité du solde (y compris toute avance sur la ligne de crédit faite après la séparation).

[8]             L’article 5 de l’accord de séparation est rédigé ainsi :

[traduction] Eric et Cathryn reconnaissent qu’ils négocient pour leur permettre de résoudre les autres questions non réglées, notamment les questions liées à la pension alimentaire.

[9]             Mme McBride a déclaré dans son témoignage qu’elle ne demandait pas de pension alimentaire et que le paiement d’égalisation et le partage de la dette constituaient la seule indemnité qu’elle sollicitait de son ex‑époux.

[10]        L’ex‑époux n’a pas effectué le paiement d’égalisation exigé par l’article 3 de l’accord de séparation et Mme McBride a dû s’adresser à la cour pour faire exécuter son droit à ce paiement. Elle a présenté la copie d’un avis de conférence relative à la cause qui prévoyait une audience de conférence relative à la cause devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario le 28 septembre 2010. L’avis précisait que la conférence était tenue à la demande de la requérante (c’est‑à‑dire Mme McBride) pour traiter des questions suivantes : [traduction] « Égalisation des biens familiaux nets; pension alimentaire ». Mme McBride a également présenté une copie du mémoire de conférence relative à la cause, accompagnée d’une lettre d’envoi de la part de son avocat, datée du 21 septembre 2010 (pièce A‑3). La lettre d’envoi était en partie rédigée en ces termes :

[traduction] Veuillez confirmer qu’Eric reconnaît que sa part du produit net de la vente du foyer matrimonial représentant un montant de 6 669,90 $ sera remise immédiatement à Cathryn.

Veuillez trouver sous ce pli une copie de notre mémoire de conférence relative à la cause signifiée à Eric [...] hier par service de messagerie à l’adresse mentionnée dans ses actes de procédure.

Lorsque vous aurez précisé la position d’Eric concernant le produit de la maison, je l’examinerai en compagnie de ma cliente avec votre lettre datée du 17 septembre 2010 et je vous informerai de sa position.

[11]        Le mémoire de conférence relative à la cause précise à l’article 6 de la partie 2 que les questions suivantes n’avaient pas encore été réglées : [traduction] « la pension alimentaire », « l’égalisation des biens familiaux nets », « le remboursement de la carte de crédit Visa conjointe de la Banque Scotia et de la ligne de crédit conjointe de la Banque Scotia », « le maintien de l’assurance‑vie à titre de garantie pour la pension alimentaire et le paiement d’égalisation » et « les frais ». À l’article 11 de la partie 3 du mémoire de conférence relative à la cause, les questions en vue de la conférence relative à la cause sont décrites ainsi :

[traduction]

1. Le paiement d’égalisation.

2. Le paiement des dettes conjointes dues à la Banque Scotia pour la ligne de crédit et la carte de crédit Visa.

3. La pension alimentaire.

[12]        Le mémoire de conférence relative à la cause fournit ensuite des précisions concernant ces questions dans une série de phrases numérotées incluses à l’article 11. Selon la position concernant le paiement d’égalisation, les parties avaient convenu que l’ex‑époux verserait un paiement d’égalisation de 38 995,89 $ à Mme McBride. Selon la proposition présentée par Mme McBride, la part de l’ex‑époux correspondant à 50 % du produit de la vente du foyer matrimonial de 13 339, 81 $ (c’est-à-dire 6 669,90 $) serait appliquée pour réduire le montant d’égalisation à 32 325,99 $. La moitié du produit de l’époux serait versée à Mme McBride immédiatement.

[13]        En ce qui a trait aux deux dettes (la ligne de crédit de la Banque Scotia et la carte de crédit Visa de la Banque Scotia), Mme McBride a sollicité une ordonnance relative à leur refinancement et enjoignant à chaque partie d’assumer la responsabilité exclusive de la moitié de chaque dette.

[14]        En ce qui a trait à la pension alimentaire, le mémoire déclare ce qui suit : [traduction] « L’intimé gagne beaucoup plus d’argent que la requérante et peut se permettre de verser une pension alimentaire. » Le mémoire précise ensuite le revenu respectif de chaque partie. En contre‑interrogatoire, Mme McBride a déclaré que, dans son esprit, elle ne sollicitait aucunement une pension alimentaire et que l’inclusion de celle-ci dans le mémoire était tout simplement une question de stratégie.

[15]        Le paragraphe 14 de l’article 11 du mémoire fait état d’une police d’assurance‑vie que détenait l’ex‑époux. Mme McBride a demandé des précisions concernant la police et une ordonnance enjoignant à son ex-époux de maintenir la police pour son bénéfice afin de garantir son [traduction] « obligation alimentaire et [son] obligation de verser le paiement d’égalisation. »

[16]        À l’article 12 du mémoire, Mme McBride sollicite ce qui suit afin de résoudre les questions litigieuses :

[traduction]

 

a) Une ordonnance portant que la part de 6 669,90 $ de l’intimé relativement au produit net de la vente du foyer matrimonial sera remise immédiatement à la requérante et le solde du paiement d’égalisation s’élevant à 32 325,99 $ sera être versé selon les modalités qu’ordonnera la cour.

b) Une ordonnance portant que la ligne de crédit conjointe de la Banque Scotia et la carte de crédit Visa conjointe de la Banque Scotia seront refinancées en deux prêts distincts, chaque partie assumant la responsabilité de la moitié de chaque dette.

c) Une ordonnance portant que l’intimé versera une pension alimentaire de 1 000 $ par mois[.]

d) Une ordonnance portant que l’intimé maintiendra la requérante à titre de bénéficiaire irrévocable de sa police d’assurance-vie collective pour garantir toute obligation alimentaire.

[17]        La Cour supérieure de justice a prononcé une ordonnance (l’« ordonnance ») datée du 28 septembre 2010. L’ordonnance est ainsi rédigée :

[traduction] [...] après avoir lu le procès-verbal de règlement amiable signé,

la cour ordonne :

1.         Le produit net de la vente du foyer matrimonial de 14 348,45 $ est immédiatement remis à la requérante.

2.         La ligne de crédit conjointe de la Banque Scotia et le compte conjoint Visa de la Banque Scotia no 942 039 sont refinancés par les parties de sorte que chaque partie assume la responsabilité de la moitié du solde actuellement dû à l’égard de chacune des dettes susmentionnées. Les parties procèdent immédiatement au refinancement des dettes susmentionnées et, au plus tard le 4 octobre 2010, chacune présente à l’autre une preuve du fait que la moitié de sa part de chaque dette susmentionnée a été remboursée ou refinancée moyennant un prêt dont elle est exclusivement responsable.

3.         L’intimé verse à la requérante une pension alimentaire non modifiable et non imposable de 685,58 $ par mois pour une période de 48 mois à compter du 1er octobre 2010 jusqu’au 1er septembre 2014 inclusivement.

4.         L’intimé maintient une police ou des polices d’assurance-vie dont la valeur nominale est d’au moins 35 000 $ désignant la requérante comme bénéficiaire irrévocable tant qu’il est tenu de payer une pension alimentaire à cette dernière. L’intimé fournit à l’avocat de la requérante une preuve de cette protection dans un délai de 14 jours, au plus tard le 8 octobre 2010. Si l’intimé décède sans que l’assurance-vie exigée par la présente disposition soit en vigueur, son obligation alimentaire à l’égard de la requérante constitue une charge de premier rang sur sa succession.

5.         À moins que l’ordonnance de pension alimentaire ne soit retirée du Bureau des obligations familiales, elle est exécutée par le directeur et les sommes dues aux termes de l’ordonnance lui sont payées et le directeur les verse à la personne à laquelle elles sont dues. Une ordonnance de retenue des aliments sera prononcée.

6.         L’intimé retire immédiatement sa réponse et la requérante donne suite au divorce sans qu’il soit contesté.

7.         Chaque partie paie ses propres frais dans la présente instance.

8.         La présente ordonnance porte des intérêts postérieurs au jugement au taux prévu par la Loi sur les tribunaux judiciaires, à compter de la date de la présente ordonnance. En cas de défaut de paiement, le paiement en défaut porte intérêt uniquement à compter de la date de défaut.

[18]        Le procès-verbal de règlement amiable prévoit ce qui suit :

[traduction] Les parties acceptent de régler toutes les questions de la présente affaire de manière finale, de la manière suivante :

1.         Le produit net de la vente du foyer matrimonial de 14 348,45 $ est immédiatement remis à la requérante.

2.         La ligne de crédit conjointe de la Banque Scotia et le compte conjoint Visa de la Banque Scotia n942 039 sont refinancés par les parties de sorte que chaque partie assume la responsabilité de la moitié du solde actuellement dû à l’égard de chacune des dettes susmentionnées. Les parties procèdent immédiatement au refinancement des dettes susmentionnées et, au plus tard le 4 octobre 2010, chacune présente à l’autre une preuve du fait que la moitié de sa part de chaque dette susmentionnée a été remboursée ou refinancée moyennant un prêt dont elle est exclusivement responsable.

3.         L’intimé verse à la requérante une pension alimentaire non modifiable et non imposable de 685,58 $ par mois pour une période de 48 mois à compter du 1er octobre 2010 jusqu’au 1er septembre 2014 inclusivement.

4.         Sous réserve du paiement complet de la pension alimentaire due par l’intimé conformément au paragraphe 3 des présentes et sous réserve de la conformité de chaque partie au paragraphe 2 des présentes, chaque partie accorde à l’autre une quittance et décharge à l’égard de tout droit à un paiement d’égalisation au titre de la partie 1 de la Loi sur le droit de la famille.

5.         L’intimé maintient une police ou des polices d’assurance-vie dont la valeur nominale est d’au moins 35 000 $ désignant la requérante comme bénéficiaire irrévocable tant qu’il est tenu de payer une pension alimentaire à cette dernière. L’intimé fournit à l’avocat de la requérante une preuve de cette protection dans les 14 jours suivant la signature du présent procès-verbal de règlement amiable. Si l’intimé décède sans que l’assurance-vie exigée par la présente disposition soit en vigueur, son obligation alimentaire à l’égard de la requérante constitue une charge de premier rang sur sa succession.

6.         La pension alimentaire est exécutée par le directeur et les sommes dues aux termes de l’ordonnance lui sont payées et le directeur les verse à la personne à laquelle elles sont dues. Une ordonnance de retenue des aliments sera prononcée.

7.         L’intimé retire immédiatement sa réponse et la requérante donne suite au divorce sans qu’il soit contesté.

8.         Chaque partie paie ses propres frais dans la présente instance.

[19]        Dans l’ordonnance, les paragraphes 1, 2, 3, 5, 7 et 8 du procès-verbal de règlement amiable sont adoptés essentiellement sans modification. De même, le paragraphe 6 est adopté dans l’ordonnance sous réserve uniquement de la mise en garde concernant le retrait de l’ordonnance.

[20]        L’ex-époux ne s’est pas acquitté de ses obligations aux termes de l’ordonnance et Mme McBride a dû présenter une requête pour outrage à la Cour supérieure de justice au motif que l’ex-époux ne s’était pas conformé aux paragraphes 2 et 4 de l’ordonnance. La requête a été entendue le 6 janvier 2011, et la Cour supérieure de justice a rendu une décision le 7 janvier 2011 (2011 ONSC 174). La Cour supérieure de justice a déclaré l’ex-époux coupable d’outrage à l’égard du paragraphe 2 de l’ordonnance et a ordonné aux parties de se représenter devant la Cour le 13 janvier 2011 pour les fins suivantes :

[traduction]

i)          établir si l’intimé s’est depuis lors conformé au paragraphe 4 de l’ordonnance;

ii)         établir si l’intimé est en mesure de faire amende honorable en se conformant au paragraphe 2 de l’ordonnance;

iii)        décider de l’ordonnance qui sera imposée pour répondre à l’outrage de l’intimé;

iv)        fixer les dépens de la présente requête.

En ce qui a trait à l’alinéa (iii), j’invite les avocats à présenter des observations concernant la réparation possible invoquée par la Cour à la fin des arguments quant à la présente requête et qui, en sus de toute autre ordonnance autorisée en vertu du paragraphe 31(5) des Règles, pourrait être l’adjudication de dommages‑intérêts à la requérante pour manquement à l’accord, lesquels seraient versés à titre de paiement de pension alimentaire.

[21]        Le 13 janvier 2011, la Cour supérieure de justice a prononcé une nouvelle ordonnance (la « nouvelle ordonnance ») qui prévoyait ce qui suit :

[traduction]

1.         L’intimé verse à la requérante une pension alimentaire non modifiable et non imposable de 1 163,70 $ par mois pour une période de 48 mois à compter du 1er octobre 2010 jusqu’au 1er septembre 2014 inclusivement, et l’ordonnance du 28 septembre 2010 est modifiée en conséquence.

2.         L’intimé continue de désigner la requérante comme bénéficiaire de sa police d’assurance‑vie collective jusqu’à hauteur d’une protection de 35 000 $. S’il ne peut plus bénéficier de cette police, il souscrit une police la remplaçant pour le même montant de protection et fournit une preuve de cette nouvelle protection dans les 20 jours de la perte de sa police existante.

3.         Si l’intimé décède sans que cette assurance soit en vigueur, les montants de pension alimentaire qui demeurent exigibles en vertu de la présente ordonnance constituent une charge de premier rang sur sa succession.

4.         L’intimé paie des dépens de 5 189 $ dans un délai de 30 jours.

5.         À moins que l’ordonnance de pension alimentaire ne soit retirée du Bureau des obligations familiales, elle est exécutée par le directeur et les sommes dues aux termes de l’ordonnance lui sont payées et le directeur les verse à la personne à laquelle elles sont dues. Une ordonnance de retenue des aliments sera prononcée.

6.         La présente ordonnance porte des intérêts postérieurs au jugement au taux prévu par la Loi sur les tribunaux judiciaires, à compter de la date de la présente ordonnance. En cas de défaut de paiement, le paiement en défaut porte intérêt uniquement à compter de la date de défaut.

[22]        La nouvelle ordonnance vise la part de la dette familiale de l’époux en faisant passer les paiements mensuels versés à Mme McBride de 685,58 $ à 1 163,70 $. L’augmentation de 478 $ est égale à la moitié du montant de la dette due à la Banque Scotia mentionnée au paragraphe 21 de la décision, divisée par 48. La démarche visant à ajouter la part de la dette familiale de l’époux aux paiements de pension alimentaire est compatible avec la démarche générale précisée dans le dernier paragraphe de la décision.

[23]        Mme McBride a déclaré dans son témoignage que les paiements mensuels prévus au paragraphe 3 de l’ordonnance étaient destinés à lui fournir l’équivalent d’un paiement d’égalisation. De même, les paiements mensuels prévus au paragraphe 1 de la nouvelle ordonnance étaient destinés à lui fournir l’équivalent d’un paiement d’égalisation et la part de la dette familiale de son ex‑époux. En contre‑interrogatoire, Mme McBride a reconnu que les paiements mensuels étaient désignés dans les deux ordonnances comme étant une [traduction] « pension alimentaire » et que les paiements mensuels n’étaient assujettis à aucune restriction quant à leur utilisation.

A. La position de l’appelante

[24]        L’appelante a soutenu que les 48 paiements mensuels prescrits par le paragraphe 1 de la nouvelle ordonnance étaient simplement une autre façon de payer le paiement d’égalisation et la part de la dette familiale de son ex‑époux. Elle a fait valoir que les deux ordonnances devaient être lues dans leur intégralité et que la nouvelle ordonnance prévoyait essentiellement le paiement de ces deux montants au fil du temps. L’appelante a de plus soutenu que, si le paiement d’égalisation et la part de la dette familiale de son ex‑époux étaient payés sous forme de montant forfaitaire, ils ne seraient pas imposables entre ses mains et que le paiement de ces montants au fil du temps ne devrait pas être traité différemment. Selon la prétention de l’appelante, le libellé des deux ordonnances prévoyant que les montants mensuels étaient [traduction] « non modifiables et non imposables » était destiné à refléter ce fait.

B. La position de l’intimée

[25]        L’intimée a cité l’arrêt Gagnon c. La Reine, [1986] 1 R.C.S. 264, à la page 267, à l’appui de l’existence de quatre conditions pour qu’une somme soit considérée comme une « pension alimentaire » au sens du paragraphe 56.1(4) de la LIR :

[...] Premièrement, la somme payée par le contribuable doit l’être en vertu d’un arrêt, d’une ordonnance ou d’un jugement rendu par un tribunal compétent ou en vertu d’un accord écrit. Deuxièmement, la somme payée doit l’être à titre de pension alimentaire ou autre allocation payable pour subvenir aux besoins du bénéficiaire, des enfants issus du mariage ou à la fois du bénéficiaire et des enfants issus du mariage. Troisièmement, la somme doit être payée périodiquement. Quatrièmement, le jour où le paiement a été effectué et durant le reste de l’année, le contribuable doit vivre séparé, en vertu d’un divorce, d’une séparation judiciaire ou d’un accord écrit de séparation, du conjoint ou de l’ex‑conjoint à qui il était tenu de faire le paiement.

[26]        L’intimée a soutenu que les modalités de l’ordonnance et de la nouvelle ordonnance étaient claires et tranchaient la question, puisque les ordonnances prévoyaient le versement de paiements mensuels de pension alimentaire que l’appelante pouvait utiliser à son gré et qu’elle a reçus alors qu’elle et son ex‑époux étaient divorcés et vivaient séparément. À la lumière du libellé clair employé dans l’ordonnance, les paiements ne pouvaient pas être considérés comme des paiements d’égalisation ou comme le paiement de la dette. L’intimée a fait valoir que, dans le cas de l’ordonnance, cette interprétation était étayée par le fait que le total des 48 paiements de pension alimentaire qui y étaient prévus ne correspondait pas au montant qui avait été tout d’abord proposé comme paiement d’égalisation.

[27]        L’intimée a soutenu que la première demande présentée à la Cour supérieure de justice sollicitait un paiement d’égalisation et une pension alimentaire et que le paiement d’une pension alimentaire était par conséquent envisagé par les parties. L’intimée a également souligné que l’appelante était représentée par avocat dans l’action en divorce. Si l’appelante avait eu des doutes concernant le libellé des ordonnances, le recours était alors d’interjeter appel du libellé des ordonnances. L’intimée a cité la décision Yourkin c. La Reine, 2008 CCI 686, pour affirmer que la Cour canadienne de l’impôt n’a pas le pouvoir d’attaquer indirectement ou de modifier une ordonnance de la Cour supérieure de justice.

[28]        Enfin, l’intimée a cité le paragraphe 16 de la décision Bates c. La Reine, [1998] A.C.I. no 660 (QL), 98 DTC 1919, pour affirmer que les dispositions des ordonnances selon lesquelles les paiements de pension alimentaire sont [traduction] « non imposables » ne lient pas la Cour canadienne de l’impôt.

III. Le droit

[29]        L’alinéa 56(1)b) de la LIR est en partie rédigé en ces termes :

Sans préjudice de la portée générale de l’article 3, sont à inclure dans le calcul du revenu d’un contribuable pour une année d’imposition :

[...]

b)    le total des montants représentant chacun le résultat du calcul suivant :

A – (B+C)

où :

A         représente le total des montants représentant chacun une pension alimentaire que le contribuable a reçue après 1996 et avant la fin de l’année d’une personne donnée dont il vivait séparé au moment de la réception de la pension,

[B et C ne sont pas pertinents en l’espèce.]

[30]        Le paragraphe 56.1(4) définit l’expression « pension alimentaire » ainsi :

« pension alimentaire » Montant payable ou à recevoir à titre d’allocation périodique pour subvenir aux besoins du bénéficiaire, d’enfants de celui-ci ou à la fois du bénéficiaire et de ces enfants, si le bénéficiaire peut utiliser le montant à sa discrétion et, selon le cas :

a) le bénéficiaire est l’époux ou le conjoint de fait ou l’ex-époux ou l’ancien conjoint de fait du payeur et vit séparé de celui-ci pour cause d’échec de leur mariage ou union de fait et le montant est à recevoir aux termes de l’ordonnance d’un tribunal compétent ou d’un accord écrit;

b) le payeur est légalement le père ou la mère d’un enfant du bénéficiaire et le montant est à recevoir aux termes de l’ordonnance d’un tribunal compétent rendue en conformité avec les lois d’une province.

IV. Analyse

[31]        La nouvelle ordonnance prévoit le versement d’une pension alimentaire mensuelle de 1 163,70 $ à Mme McBride. Mme McBride a reconnu que l’utilisation de ces paiements mensuels n’était assujettie à aucune restriction.

[32]        Le procès-verbal de règlement amiable mentionne qu’immédiatement avant l’audience du 28 septembre 2010, Mme McBride et son ex‑époux ont négocié un règlement amiable aux termes duquel Mme McBride renonçait à son droit au paiement d’égalisation auparavant convenu en contrepartie des paiements mensuels décrits au paragraphe 3 du procès-verbal. Le libellé décrivant les paiements dans le procès-verbal de règlement amiable a été adopté sans modification au paragraphe 3 de l’ordonnance.

[33]        Le procès-verbal de règlement amiable mentionne de plus que des paiements mensuels de pension alimentaire devaient être versés plutôt qu’un paiement d’égalisation. Cela ressort clairement du paragraphe 4 dans lequel chaque partie accorde à l’autre une quittance et décharge à l’égard de [traduction] « tout droit à un paiement d’égalisation ». Cette interprétation est également étayée par le fait que les montants totaux ne correspondent pas : le paiement d’égalisation à verser aux termes de l’accord de séparation s’élève à 31 821,67 $ (c’est-à-dire 38 995,89 $ moins la moitié de 14 348,45 $), alors que la somme des paiements mensuels prévus par l’ordonnance s’élève à 32 907,84 $. Mme McBride n’a pas été en mesure d’expliquer la raison de cet écart.

[34]        Le paragraphe 1 de la nouvelle ordonnance prévoit une augmentation de 478 $ du paiement mensuel de pension alimentaire pour indemniser Mme McBride de la part de la dette familiale de son ex-époux. Le dernier paragraphe de la décision, reproduit ci‑dessous, précise le raisonnement qui sous‑tend cette approche :

[traduction] En ce qui a trait à l’alinéa (iii), j’invite les avocats à présenter des observations concernant la réparation possible invoquée par la Cour à la fin des arguments quant à la présente requête et qui, en sus de toute autre ordonnance autorisée en vertu du paragraphe 31(5) des Règles, pourrait être l’adjudication de dommages‑intérêts à la requérante pour manquement à l’accord, lesquels seraient versés à titre de paiement de pension alimentaire.

[35]        Compte tenu de l’ensemble de la preuve, je conclus que les parties ont accepté la suggestion de la cour selon laquelle la part de la dette familiale de l’ex‑époux devrait être payée au moyen de paiements de pension alimentaire supplémentaires. Il ne fait pas de doute que Mme McBride n’a pas contesté cette suggestion, parce que les paiements étaient décrits comme étant [traduction] « non imposables » dans le procès-verbal de règlement amiable et dans les deux ordonnances.

[36]        Les paiements mensuels versés à Mme McBride en 2012 conformément au paragraphe 1 de la nouvelle ordonnance relèvent directement dans la définition de « pension alimentaire » figurant au paragraphe 56.1(4) de la LIR. Les paiements devaient être versés à tous les mois (c’est-à-dire sur une base périodique) à Mme McBride. La nouvelle ordonnance décrit les paiements comme une « pension alimentaire » et leur utilisation n’est assujettie à aucune restriction. Pris ensemble, ces facteurs donnent à penser que les paiements étaient une allocation pour subvenir aux besoins de Mme McBride et qu’ils n’avaient aucune autre fin précise. Les paiements ont été versés à Mme McBride par son ex‑époux en vertu d’une ordonnance de la Cour supérieure de justice. Mme McBride a reçu les paiements alors qu’elle vivait séparée de son ex‑époux en raison de l’échec de leur mariage. Je constate également que les paiements étaient faits et exécutés par l’entremise du directeur du Bureau des obligations familiales et l’état de ce bureau daté du 11 août 2014 décrit chaque paiement comme un [traduction] « montant d’obligation alimentaire récurrente découlant d’une ordonnance judiciaire ou d’un contrat ».

[37]        Les ordonnances de la Cour supérieure de justice mentionnent en effet que les paiements mensuels de pension alimentaire ne sont pas imposables, mais une telle déclaration ne permet pas de conclure que les paiements au titre de la LIR sont des rentrées imposables ou non imposables. Dans la décision Bates c. La Reine, précitée, la Cour canadienne de l’impôt s’est reportée à une décision antérieure de la Cour fédérale, 1re instance (comme on l’appelait à ce moment-là), puis a déclaré ce qui suit au paragraphe 13 :

À mon avis, le juge en chef adjoint Jerome a correctement résumé l’état du droit en disant que l’assujettissement à l’impôt ne découle pas d’un accord de séparation ou d’une ordonnance d’un tribunal. L’assujettissement à l’impôt est établi par les dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu, et plus particulièrement par l’article 56.

[38]        Dans les circonstances, je conclus que les 12 paiements mensuels qu’a reçus Mme McBride de son ex‑époux en 2012 conformément à l’ordonnance de la Cour supérieure de justice datée du 13 janvier 2011 et dont le montant total s’élève à 13 964 $ doivent être inclus dans son revenu pour cette année d’imposition en vertu de l’alinéa 56(1)b) de la LIR parce que chacun des 12 paiements est une « pension alimentaire » au sens du paragraphe 56.1(4) de la LIR.

[39]        Pour les motifs qui précèdent, l’appel est rejeté sans frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour de février 2015.

« J.R. Owen »

Juge Owen

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de mai 2015.

 

M.-C. Gervais


RÉFÉRENCE :

2015 CCI 31

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2014-2631(IT)I

INTITULÉ :

Cathryn McBride c. Sa Majesté la Reine

Lieu de l’audience :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 8 janvier 2015

Motifs du jugement :

L’honorable juge John R. Owen

DATE DU JUGEMENT :

Le 16 février 2015

Comparutions :

Pour l’appelante :

L’appelante elle-même

Avocates de l’intimée :

Me Kaylee Silver

Me Rita Araujo

Avocats inscrits au dossier :

Pour l’appelante :

Nom :

 

Cabinet :

 

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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