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Dossier : 2012-1779(GST)G

ENTRE :

FORD DU CANADA LIMITÉE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 


Adjudication des dépens concernant l’ordonnance et les motifs de l’ordonnance rendus le 18 février 2015 relativement à la requête instruite le 23 janvier 2015, à Toronto (Ontario).

Devant : L’honorable juge Patrick Boyle

Comparutions :

Avocats de l’appelante :

Me Robert G. Kreklewetz

Me John G. Bassindale

Avocate de l’intimée :

Me Catherine M.G. McIntyre

 

ORDONNANCE

Après avoir reçu les observations écrites des parties sur la question des dépens dans la présente affaire;  

LA COUR ORDONNE :

a)     que les dépens relatifs à la requête en radiation présentée par la Couronne soient adjugés à l’appelante et soient payés quelle que soit l’issue de la cause, pour une somme égale au total des montants suivants :

(i)                40 000 $ en ce qui a trait à la préparation et à l’audition de la requête;

(ii)             75 % des frais réels raisonnables supportés par l’appelante pour chercher à régler la question des dépens, depuis la date du prononcé de l’ordonnance relative à la requête en radiation,

le tout, en conformité avec les motifs de l’ordonnance relative aux dépens ci-joints.

Signé à Montréal (Québec), ce 16e jour de juillet 2015.

« Patrick Boyle »

Juge Boyle

 


Référence : 2015 CCI 185

Date : 20150716

Dossier : 2012-1779(GST)G

ENTRE :

FORD DU CANADA LIMITÉE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DE L’ORDONNANCE RELATIVE AUX DÉPENS

Le juge Boyle

[1]             Les présents motifs concernent l’adjudication des dépens relativement à la décision que j’ai rendue dans l’affaire Ford du Canada Limitée 2012-1779(GST)G en février dernier. La requête en radiation présentée par la Couronne a été rejetée. Dans la décision principale, j’ai adjugé les dépens à l’appelante, qui a eu entièrement gain de cause, et j’ai donné 30 jours aux parties pour s’entendre sur le montant de ceux-ci, à défaut de quoi je leur ai donné un délai supplémentaire de 30 jours pour déposer des observations écrites. Les parties ne sont pas parvenues à s’entendre, et leurs observations écrites ont été reçues.

[2]             Durant la journée d’audience consacrée à la requête contestée, la position de la Couronne, concernant deux des trois questions soulevées dans l’avis d’appel modifié, était pour l’essentiel que les parties de l’opposition portant sur ces questions ne décrivaient pas raisonnablement ou suffisamment celles-ci, de sorte qu’absolument rien ne pouvait être soulevé dans l’avis d’appel présenté à la Cour à cet égard.

[3]             Dans les motifs que j’ai prononcés antérieurement quant à la requête en radiation, j’ai conclu ce qui suit aux paragraphes 57, 58, 59 et 70 :

(i)                la preuve en l’espèce me convainc tout à fait, à la fois objectivement et subjectivement, que le ministre du Revenu national (le « ministre ») aurait dû comprendre, et qu’il a compris, que l’opposition de l’appelante visait ces deux questions précises qui avaient été précisément soulevées au cours de la vérification qui a donné lieu à l’établissement de la nouvelle cotisation;

(ii)             j’étais entièrement convaincu que les deux questions soulevées dans l’avis d’appel modifié étaient clairement les mêmes deux questions précises qui ont été décrites d’une manière suffisante et raisonnable dans l’avis d’opposition.

[4]             J’ai poursuivi, au paragraphe 68, en rejetant l’idée qu’il était nécessaire de fournir des listes déterminantes de chaque opération relative aux intrants pour laquelle on demande un crédit de taxe pour intrant (« CTI ») n’ayant pas encore été demandé et de chaque intrant relatif aux fournitures exprimé en monnaies étrangères, car cela irait au-delà du niveau suffisant et raisonnable exigé pour que le ministre reconnaisse ou comprenne raisonnablement les questions faisant l’objet de l’opposition.

[5]             Au paragraphe 73, j’ai souligné qu’il semblait s’agir d’un cas où la Couronne tentait, par opportunisme, d’utiliser comme arme contre l’appelante contribuable les règles relatives à la personne déterminée ou aux  grandes sociétés, bien que leur objet et leur conception visent à protéger et à mettre à l’abri le fisc.

I. La méthode adoptée par la Cour concernant les dépens

[6]             Dans l’affaire Spruce Credit Union c. La Reine[1], j’ai décrit de façon exhaustive la méthode adoptée par la Cour et la Cour d’appel fédérale en ce qui concerne l’adjudication des dépens en vertu des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (les « Règles »). Les paragraphes et alinéas pertinents de l’article 147 des Règles sont reproduits en annexe.   

[7]             Voici un résumé de la méthode qu’il convient d’adopter relativement à l’adjudication des dépens à la Cour canadienne de l’impôt :

1)    La Cour a compétence pour adjuger des dépens sur la base procureur‑client. En règle générale, les dépens sur la base procureur-client ne sont accordés que dans des cas appropriés, c’est-à-dire s’il y a eu conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante d’une partie. Même en de pareilles circonstances, une adjudication de dépens sur la base procureur-client n’est pas systématique, et la décision à cet égard demeure discrétionnaire[2].

2)    La Cour dispose d’un large pouvoir discrétionnaire dans la fixation des dépens, à condition que ce pouvoir discrétionnaire soit toujours exercé avec prudence, et non pas de manière arbitraire[3], et selon des principes établis[4] et après audition des parties. Il ne s’agit pas d’une science exacte, ni d’un exercice de comptabilité[5].

3)    La méthode adoptée par la Cour pour fixer les dépens devrait être compensatoire et contributive, et non punitive ou extravagante. La question qu’il convient de se poser est la suivante : quelle serait la contribution appropriée de la partie déboutée aux dépens de la partie ayant eu gain de cause dans l’appel où la position de cette dernière l’a emporté[6]?

4)    La Cour n’est pas tenue de se conformer au tarif en l’absence de circonstances inhabituelles ou exceptionnelles d’inconduite[7]. La Cour devrait toujours suivre une méthode fondée sur des principes pour établir la contribution appropriée de la partie déboutée aux dépens de la partie ayant eu gain de cause dans les circonstances particulières de l’instance. Il s’agit notamment de prendre en compte et de soupeser tous les facteurs pertinents, y compris ceux énumérés dans les Règles, qui se rapportent aux circonstances particulières de l’affaire.

5)    Les actes posés par une partie et les événements antérieurs au commencement de la procédure judiciaire peuvent, dans des circonstances appropriées, être pris en compte dans l’adjudication des dépens. Le montant des dépens adjugés ne peut être supérieur aux frais supportés après le début de la préparation de l’avis d’appel[8].

6)    Les frais réels de la partie ayant eu gain de cause peuvent être considérés dans des situations appropriées[9]. Il peut en être de même pour les frais réels, approximatifs ou estimés de la partie déboutée[10].

7)    « En général, le degré d’indemnisation que représentent les indemnités partielles varie entre 50 % et 75 % des dépens d’indemnisation substantielle ou taxés sur la base procureur-client », par la juge D. Campbell dans l’affaire Zeller c. La Reine, 2009 CCI 135, après qu’elle ait fait référence à Mark Orkin, The Law of Costs, 2e éd., vol. 1 (Aurora, Canada Law Book, 2008), aux pages 2 et 3. Des références similaires ont été faites dans l’affaire Dickie v. The Queen, 2012 TCC 327 (juge Pizzitelli) (confirmée par la Cour d’appel fédérale, 2014 CAF 40) et Spruce Credit Union.

8)    Tel que l’a déclaré le juge en chef actuel de la Cour dans l’affaire Velcro, les facteurs énoncés au paragraphe 147(3) des Règles de la Cour constituent les éléments clés dont la Cour doit tenir compte aux fins de l’adjudication des dépens, pour décider si le tarif correspondrait à un montant approprié et pour fixer le montant qu’il convient d’accorder.

II. Les facteurs énoncés au paragraphe 147(3)

[8]             L’appelante demande que les dépens soient fixés à 50 000 $ en ce qui a trait à la présente requête, sans qu’il soit porté atteinte à son droit de demander des dépens concernant l’issue des autres requêtes en radiation similaires déposées par la Couronne relativement aux appels connexes présentés par Ford du Canada.

[9]             La Couronne estime qu’il n’y a pas eu de conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante de sa part et, en conséquence, qu’il n’y a pas lieu de déroger au tarif.

[10]        L’appelante a eu entièrement gain de cause dans sa défense contre la requête présentée par l’intimée en vue de faire radier des parties très importantes de son avis d’appel modifié. Dans mes motifs principaux, j’ai adjugé les dépens à l’appelante concernant la requête en radiation. Aucune offre de règlement n’a été faite, et il n’était pas raisonnable de s’attendre à ce qu’une telle offre soit présentée compte tenu des circonstances. Aucun expert n’a été appelé à témoigner. Par conséquent, les alinéas 147(3) a), d) et i.1) des Règles ne sont pas pris en compte dans ma décision relative au montant des dépens qu’il convient d’adjuger à l’appelante dans ces circonstances.

a)     Les sommes en cause

b)    L’importance des questions en litige

[11]        L’appelante, et un certain nombre de sociétés Ford du Canada liées, ont présenté un total de 13 appels similaires en matière de TPS et de TVH à la Cour concernant les années allant de 1996 à 2008. Ces 13 appels concernent 36 questions différentes et portent sur une somme d’environ 37 millions de dollars en taxes, en intérêts et en pénalités. L’intimée a demandé la radiation de 31 de ces 36 questions, notamment des deux questions visées par la requête principale en radiation en l’espèce, en se fondant sur des règles applicables aux personnes déterminées ou aux grandes sociétés. Ces questions, dont la Cour est saisie, portent sur une somme d’environ 33 millions de dollars, ou 90 % du total en taxes, en intérêts et en pénalités. 

[12]        Dans la présente affaire en particulier, l’intimée a cherché à empêcher l’appelante de débattre du bien‑fondé des demandes portant sur environ 2,3 millions de dollars en taxes et en intérêts établis. Ce montant serait d’environ 5 millions de dollars si l’on tient compte des intérêts courus après l’établissement de la nouvelle cotisation[11].

[13]        Compte tenu de ce qui précède, il était entièrement raisonnable et approprié que l’appelante prenne très au sérieux chacune des requêtes de l’intimée et qu’elle défende entièrement et activement son droit de faire instruire son appel sur le fond par la Cour. Dans le contexte de la préparation et de la défense portant sur la présente requête en particulier, il était certainement approprié de travailler en posant l’hypothèse que, même s’il ne s’agit pas officiellement une cause type, la décision relative à la présente requête devrait fournir le cadre nécessaire au règlement des 12 autres requêtes en radiation présentées par l’intimée et connexes à la présente. Les observations déposées montrent clairement que ces étapes étaient en cours suivant la décision principale.

c)     La charge de travail (qui comprend la prise en compte des frais réellement supportés);

d)    La complexité des questions en litige

[14]        Les frais estimés de Ford du Canada (à la date des observations écrites) pour assurer une défense à l’encontre des 13 requêtes en radiation présentées par la Couronne se chiffrent à plus de 300 000 $. Ford du Canada a préparé et déposé 10 affidavits en ce qui a trait à ces requêtes, dont l’un est lié à la requête qui a été tranchée. Le coût estimé pour ces 10 affidavits était légèrement supérieur à 100 000 $. Comme un seul affidavit a été présenté dans le cadre de la présente requête en particulier, je présumerai qu’il a coûté 10 000 $. Il s’agissait d’un long affidavit, énonçant et décrivant en détail chaque question relative à la vérification, à l’opposition, à la décision concernant l’opposition, à l’avis d’appel et à l’avis d’appel modifié, et des annexes détaillées y étaient jointes.

[15]        Les frais réels estimés de préparation et de participation liés à l’audience de janvier quant à la présente requête et à la requête connexe ajournée étaient d’environ 91 500 $. De cette somme, environ 53 000 $ peuvent être attribués à la présente requête, et le reste à la requête ajournée en cours d’audience.

[16]        L’ensemble des frais supportés par l’appelante pour préparer l’affidavit utilisé dans la présente requête et pour se préparer à l’audition de celle-ci et y assister sont, par conséquent, d’environ 63 000 $.

[17]        L’audience a duré une journée entière et a porté en grande partie sur la présente requête. Les questions et les arguments ont été bien présentés à la Cour, et ce, de façon exhaustive. Les motifs de la Cour rejetant la requête en radiation présentée par la Couronne comportent 46 pages.

[18]        La quantité de travail que l’appelante a dû accomplir pour se préparer à l’audience a considérablement été augmentée du fait que l’intimée n’a pas déposé d’observations écrites ou d’autre préavis relativement aux arguments qu’elle entendait faire valoir. Cela n’est pas toujours requis mais, en l’espèce, l’avocate de l’intimée s’est engagée au moins deux fois, de façon claire et non équivoque, à déposer des observations écrites lors d’une conférence de gestion de cas, en janvier 2013[12]. Elle s’était engagée à le faire à une date plus rapprochée de la date d’audition des requêtes. La juge Woods, chargée de la gestion de l’instance, a souligné que l’avis relatif aux arguments devait être présenté [traduction« suffisamment à l’avance », et l’avocate de l’intimée était d’accord avec elle. Les avocats de l’appelante ont rappelé ce point à l’avocate de l’intimée six semaines avant la date de l’audience. Dans sa réponse, l’intimée a souligné qu’il n’existait pas d’exigence concernant le dépôt d’observations, mais qu’elle espérait déposer les siennes sept jours avant l’audience. Lorsque les avocats de l’appelante ont effectué un autre suivi auprès de l’avocate de l’intimée au cours de la semaine précédant l’audience, celle-ci a répondu qu’elle préférait habituellement déposer un document avant l’audience, mais que cela n’était pas toujours possible, ce qui s’était produit dans ce cas-ci. Aucune autre explication ou excuse n’a été présentée à la Cour.

[19]        Le fait que l’avocate de l’intimée n’ait pas présenté d’observations signifiait que l’appelante ne pouvait pas préparer et déposer une réponse aux observations écrites. Cela a nécessairement et raisonnablement obligé l’appelante à se préparer pleinement à étayer ses arguments et à les faire valoir en réponse à tous ceux qui allaient possiblement découler des motifs généraux énoncés dans l’avis de requête. Certains des arguments possibles étaient, à n’en pas douter, plus complexes que d’autres et que ceux qui ont de fait été présentés à l’audience. Cette omission a eu pour conséquence de prolonger la durée de l’audience.

e)     La conduite d’une partie qui aurait abrégé ou prolongé inutilement la durée de l’instance;

f)      La dénégation d’un fait par une partie ou sa négligence ou son refus de l’admettre, lorsque ce fait aurait dû être admis;

g)     La question de savoir si une étape de l’instance, (i) était inappropriée, vexatoire ou inutile, (ii) a été accomplie de manière négligente, par erreur ou avec trop de circonspection.

[20]        Nous avons mentionné précédemment le fait que l’intimée n’a malheureusement pas déposé d’observations écrites sous quelque forme que ce soit pour communiquer au préalable les arguments qui allaient être soulevés. La gestion de l’instance joue un rôle important dans le déroulement du procès devant la Cour. Les engagements pris par les avocats lors d’une conférence de gestion de l’instance ne font pas l’objet d’une ordonnance et devraient être pris au sérieux. Il ne s’agissait pas en l’espèce d’un oubli, d’une crise imprévue à la dernière minute ou d’une urgence. C’est une situation qui n’est pas très favorable à l’intimée. Il s’agit d’un facteur important à prendre en compte aux fins de l’adjudication des dépens.

[21]        D’autres facteurs généralement classés sous ces titres se trouvent dans les motifs principaux que j’ai rendus concernant la requête en radiation :

(i) La jurisprudence portant sur les règles relatives aux personnes déterminées ou aux grandes sociétés et les règles relatives aux grandes sociétés similaires prévues dans la Loi de l’impôt sur le revenu était cohérente, claire et récente, et provenait en grande partie de la Cour d’appel fédérale;   
(ii) La preuve que le ministre a compris le motif de l’opposition et qu’il a été en mesure d’y répondre était également claire et cohérente;
(iii) L’intimée tentait, par opportunisme, d’utiliser les règles - relatives aux personnes déterminées ou aux grandes sociétés - comme arme plutôt qu’en conformité avec leur objet et leur conception, qui sont de protéger le fisc et à le mettre à l’abri.

III. Conclusion

[22]        Vu la méthode fondée sur des principes de la Cour consistant à généralement suivre l’article 147 des Règles en matière d’adjudication des dépens, je suis convaincu que les sommes fondées sur le tarif seraient inappropriées, insuffisantes et insatisfaisantes en l’espèce.

[23]        Compte tenu des circonstances relatives à la présente requête, et des préoccupations et des facteurs susmentionnés, j’établirais la contribution appropriée de l’intimée aux honoraires d’avocats de l’appelante à 40 000 $, payable quelque soit l’issue de l’affaire. Cela équivaut à environ 63 % de l’ensemble des frais estimés de l’appelante pouvant être attribués à la présente requête. Ces dépens se situent vers le milieu de la fourchette définie par Mark Orkin et d’autres auteurs. J’estime que cela correspond bien à la portée et à la nature des préoccupations et des facteurs soulevés dans la présente affaire.

[24]        La présente ordonnance relative aux dépens ne porte que sur l’adjudication des dépens se rapportant à la présente requête. Elle ne porte pas atteinte au droit des parties de réclamer des dépens en ce qui a trait aux autres requêtes au fur et à mesure qu’elles sont tranchées[13].

[25]        J’adjuge également des dépens additionnels en faveur de l’appelante pour sa participation au règlement de la présente adjudication de dépens par la Cour relativement à la requête en radiation. Pratiquement la totalité des observations de l’intimée sur les dépens portaient sur le fait que l’adjudication de dépens majorés au-delà du tarif n’était pas justifiée, car il n’y avait pas eu conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante de la part de la Couronne dans le cadre du litige. Comme je l’ai souligné plus haut, un nombre important de décisions ont clairement établi que le tarif n’a pas été créé dans le but de fixer des montants de dépens par défaut en l’absence de circonstances inhabituelles ou exceptionnelles d’inconduite[14]. Il n’est pas acceptable que la Couronne cite cet ancien extrait, clairement tiré hors de son contexte suivant un examen approfondi, sans même reconnaître qu’il existe une importante jurisprudence à l’effet contraire, et encore moins qu’elle tente en fait de contester cette jurisprudence. Je présume que cela pourrait avoir été en partie la raison pour laquelle les parties ne pouvaient s’entendre sur les dépens et pour laquelle elles ont dû revenir devant la Cour. Dans les circonstances, j’adjuge en l’espèce des dépens équivalents à 75 % à des frais raisonnables réels que l’appelante a supportés en cherchant à résoudre la question des dépens, depuis la date de l’ordonnance relative à la requête en radiation. Si les parties ne peuvent s’entendre sur un montant, elles peuvent communiquer avec la Cour pour que je fixe aussi ce montant pour elles.

Signé à Montréal (Québec), ce 16e jour de juillet 2015.

« Patrick Boyle »

Juge Boyle

Traduction certifiée conforme

ce 2e jour de septembre 2015.

Johanne Matte, LL.L, D.D.N., B.A. Trad.


ANNEXE

FRAIS ET DÉPENS

RÈGLES GÉNÉRALES

147.(1) La Cour peut fixer les frais et dépens, les répartir et désigner les personnes qui doivent les supporter.

(2) Des dépens peuvent être adjugés à la Couronne ou contre elle.

(3) En exerçant sa discrétion conformément au paragraphe (1), la Cour peut tenir compte :

a) du résultat de l’instance;

b) des sommes en cause;

c) de l’importance des questions en litige;

d) de toute offre de règlement présentée par écrit;

e) de la charge de travail;

f) de la complexité des questions en litige;

g) de la conduite d’une partie qui aurait abrégé ou prolongé inutilement la durée de l’instance;

h) de la dénégation d’un fait par une partie ou de sa négligence ou de son refus de l’admettre, lorsque ce fait aurait dû être admis;

i) de la question de savoir si une étape de l’instance,

(i) était inappropriée, vexatoire ou inutile,

(ii) a été accomplie de manière négligente, par erreur ou avec trop de circonspection;

i.1) de la question de savoir si les dépenses engagées pour la déposition d’un témoin expert étaient justifiées compte tenu de l’un ou l’autre des facteurs suivants :

(i) la nature du litige, son importance pour le public et la nécessité de clarifier le droit,

(ii) le nombre, la complexité ou la nature des questions en litige,

(iii) la somme en litige;

j) de toute autre question pouvant influer sur la détermination des dépens.

[…]

(4) La Cour peut fixer la totalité ou partie des dépens en tenant compte ou non du tarif B de l’annexe II et peut adjuger une somme globale au lieu ou en sus des dépens taxés.

(5) Nonobstant toute autre disposition des présentes règles, la Cour peut, à sa discrétion :

a) adjuger ou refuser d’adjuger les dépens à l’égard d’une question ou d’une partie de l’instance particulière;

b) adjuger l’ensemble ou un pourcentage des dépens taxés jusqu’à et y compris une certaine étape de l’instance;

c) adjuger la totalité ou partie des dépens sur une base procureur-client.

[…]


RÉFÉRENCE :

2015 CCI 185

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :

2012-1779(GST)G

INTITULÉ :

FORD DU CANADA LIMITÉE ET LA REINE

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

L’honorable juge Patrick Boyle

DATE DE L’ORDONNANCE :

Le 16 juillet 2015

COMPARUTIONS :

Avocats de l’appelante :

Me Robert G. Kreklewetz

Me John G. Bassindale

Avocate de l’intimée :

Me Catherine M.G. McIntyre

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Pour l’appelante :

Nom :

Robert G. Kreklewetz

John G. Bassindale

 

Cabinet :

Miller Kreklewetz LLP

24, rue Duncan, 3e étage

Toronto (Ontario)  M5V 2B8

 

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 



[1] 2014 CCI 42. La Couronne a retiré son appel à la Cour d’appel fédérale en ce qui a trait à l’ordonnance relative aux dépens dans l’affaire Spruce Credit Union.

[2] Voir par exemple, McGorman v. The Queen, 99 DTC 591, Canderel Limited v.The Queen, 94 DTC 1426, Bruhm v. The Queen, 94 DTC 1400, et les affaires auxquelles il est fait référence dans ces affaires.

[3] Sommerer c. La Reine, 2011 CCI 212, Jolly Farmer Products Inc. c. Sa Majesté la Reine, 2008 CCI 693.

[4] Canada c. Lau, 2004 CAF 10, et Canada c. Landry, 2010 CAF 135.

[5] Consorzio del prosciutto di Parma c. Maple Leaf Meats Inc., 2002 CAF 417.

[6] Voir Consorzio, Velcro Canada Inc. c. Sa Majesté la Reine, 2012 CCI 273 (juge en chef adjoint Rossiter), General Electric Capital Canada Inc. c. R., 2010 CCI 490 (juge Hogan), Sommerer (juge C. Miller), Teelucksingh c. The Queen, 2011 TCC 253 (juge Miller), Jolly Farmer Products Inc. (juge Boyle), Aird c. Country Park Village Properties (Mainland) Ltd., 2004 CF 945, [2004] A.C.F. n˚ 1153.

[7] Voir Consorzio, Velcro, General Electric, Sommerer, Blackburn Radio Inc. c. La Reine, 2013 CC I 98 (juge Woods), Daishowa-Marubeni International Ltd. c. La Reine, 2013 CCI 275 (juge C. Miller), Spruce Credit Union, O’Dwyer c. The Queen, 2014 TCC 90 (juge Bocock), The Queen c. Repsol Canada Ltd., 2015 TCC 154 (juge C. Miller).

[8] Martin c. La Reine, 2014 CCI 50 (CAF).

[9] Consorzio.

[10] Velcro.

[11] Une autre des 31 requêtes de la Couronne devait être instruite avec la présente. J’étais saisi de cette requête, et de la présente, mais les parties ont convenu de la reporter pour permettre à la présente requête d’être entièrement présentée par les parties le jour de l’audience, et d’être tranchée en premier par la Cour.

[12] Les avis d’appels ont initialement été déposés en 2012, et les requêtes de la Couronne ont initialement été déposées à la fin de 2012.

[13] Je souligne que l’appelante a aussi supporté 90 000 $ pour les affidavits dans les 12 autres requêtes en radiation présentées par la Couronne, de même que d’autres dépenses d’environ 39 000 $ pour se préparer et participer à l’audition de l’autre requête, que j’ai ajournée.  

[14] Même si c’était le cas, il faudrait examiner sérieusement la question compte tenu du fait que l’intimée n’a pas présenté d’observations écrites pour communiquer au préalable ses arguments après s’être engagée à le faire auprès de la juge de gestion de l’instance et de l’appelante.

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