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Dossier : 2012-3027(GST)G

ENTRE :

HIGH-CREST ENTERPRISES LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 26 février 2014, à Halifax (Nouvelle‑Écosse)

Devant : L'honorable juge Gaston Jorré

Jugement rendu par l'honorable juge John R. Owen


Comparutions :

Avocat de l'appelante :

Me Maurice P. Chiasson, c.r.

Avocat de l'intimée :

Me Jan Jensen

 

JUGEMENT

Conformément aux motifs du jugement ci‑joints, l'appel relatif à la cotisation établie en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise pour la période de déclaration du 1er janvier 2010 au 31 mars 2010, dont l'avis est daté du 16 juillet 2010, est rejeté, avec dépens en faveur de l'intimée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 30e jour de septembre 2015.

« J.R. Owen »

Le juge Owen


Référence : 2015 CCI 230

Date : 20150930

Dossier : 2012-3027(GST)G

ENTRE :

HIGH-CREST ENTERPRISES LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Owen

I. Introduction

[1]             Les présents motifs ont trait à un appel de High‑Crest Enterprises Limited (« High‑Crest ») interjeté à l'encontre d'une cotisation (la « cotisation ») établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. 1985, ch. E‑15 (la « LTA »), par un avis de cotisation du 16 juillet 2010 applicable à la période de déclaration du 1er janvier 2010 au 31 mars 2010 (la « période de déclaration »). L'appel a d'abord été entendu par le juge Jorré de la Cour. Avec le consentement des deux parties, ce sera moi qui trancherai l'affaire, sur le fondement de la transcription et du dossier.

[2]             La cotisation a imposé à High‑Crest un montant de taxe de vente harmonisée (« TVH ») à l'égard d'une annexe, ou « adjonction », de 20 lits à un établissement de soins de longue durée lui appartenant et situé à Springhill (Nouvelle‑Écosse). Ce montant a été calculé en appliquant les dispositions de l'article 191.1 de la LTA à la fourniture taxable (la « fourniture à soi‑même ») réputée avoir été faite et reçue par High‑Crest au cours de la période de déclaration, aux termes du paragraphe 191(4) de la LTA.

[3]             Selon High‑Crest, la TVH sur la fourniture à soi‑même aurait dû être calculée selon la règle de la juste valeur marchande qui est énoncée au paragraphe 191(4) de la LTA, et non selon la règle énoncée à l'article 191.1 de la LTA. La juste valeur marchande de l'adjonction ainsi que le montant de la taxe à payer en vertu du paragraphe 191(4) de la LTA ne sont pas contestés; l'unique question en litige dans le présent appel consiste à savoir si la règle énoncée à l'article 191.1 s'applique à la fourniture à soi‑même.

[4]             Monsieur Shannon Stephenson a témoigné pour le compte de High‑Crest, dont il est le président depuis 1994.

II. Les faits

A. Le contexte

[5]             High‑Crest est une société à but lucratif qui possède et exploite cinq établissements de soins de longue durée pour personnes âgées dans la province de la Nouvelle‑Écosse. Deux de ces établissements sont des foyers de soins de longue durée et les trois autres sont des maisons de retraite. L'établissement de Springhill (Nouvelle‑Écosse) (l'« établissement ») est l'un des deux foyers de soins de longue durée.

[6]             L'établissement a été bâti en 1993 et, avant que soit terminée l'adjonction de 20 lits décrite ci-après, il comptait en tout 56 lits, dont un pour les soins de relève. Dix des 55 lits à plein temps sont occupés par des personnes relevant de la compétence du ministère des Anciens combattants du Canada et les 45 autres lits à plein temps, de même que celui destiné aux soins de relève, sont occupés par des personnes relevant de la compétence du ministère de la Santé de la Nouvelle‑Écosse (le « Ministère »).

B. La demande de propositions

[7]             En mars 2007, la Continuing Care Branch (la « Direction des soins continus ») du Ministère a lancé une demande de propositions (la « DP »)[1] dans le but de [TRADUCTION] « choisir une ou plusieurs organisations qui fourniront les installations et les services requis à l'appui de 594 lits de foyers de soins de longue durée de niveau II et de 210 lits de maisons de retraite sur tout le territoire de la province »[2]. L'article 1.2 de la DP, intitulé [TRADUCTION] « Contexte », indique en partie ceci :

[TRADUCTION]

En mai 2006, le gouvernement de la Nouvelle‑Écosse a approuvé la « Stratégie de soins continus de la Nouvelle‑Écosse — Prévoir l'avenir des soins continus » (la stratégie). Dans la stratégie, il s'est engagé à construire de nouveaux établissements de soins de longue durée en vue d'appuyer la vision du « bien vivre dans un milieu qu'on peut appeler son foyer ». Les deux documents intitulés « Exigences du programme des soins de longue durée » et « Exigences en matière de superficie et de conception » se complètent l'un l'autre et ont été créés en vue d'orienter l'aménagement de ces nouveaux établissements de soins de longue durée du point de vue des soins et des services, ainsi que du milieu physique.

[...]

Nous nous orientons vers la création, à l'intention des personnes âgées, de milieux vivants et protecteurs qui contribueront à éliminer la solitude, l'impuissance et l'ennui. L'accent est mis sur de petits espaces habitables dotés de caractéristiques résidentielles, telles qu'une chambre à coucher et une salle de bains privées, un salon agrémenté d'un foyer central, une salle de cuisine et de repas ouverte adjacente, ainsi que de courts couloirs menant aux salons et aux salles de repas. L'organisation des soins et des activités est axée sur le résidant et non sur le programme de l'établissement. [...]

[8]             La DP renvoyait à plusieurs annexes, qui ont été diffusées sous forme définitive le 25 juillet 2007. L'annexe B[3] et l'annexe C[4], intitulées [TRADUCTION] « Exigences des établissements de soins de longue durée » et [TRADUCTION] « Exigences des programmes des établissements de soins de longue durée » respectivement, décrivaient de manière très détaillée les exigences matérielles et opérationnelles des nouveaux établissements de soins de longue durée. Voici ce qu'on peut lire à l'article 3.0 de l'annexe B :

[TRADUCTION]

Le fournisseur de services est engagé pour fournir des soins aux résidants. Le présent document énonce les exigences minimales qui se rapportent aux établissements et n'est pas un inventaire complet. Il incombe au fournisseur de services de veiller à disposer des locaux, du matériel et du mobilier qui sont nécessaires pour fournir les services contractuels.

[9]             Le paragraphe 2.3.4 de la DP indique que celle‑ci mènera à la conclusion de deux ententes avec les soumissionnaires retenus : une entente d'aménagement et une entente de services. Le texte des deux ententes n'était pas joint à la DP initiale, mais il a été diffusé sous forme définitive le 25 juillet 2007, en tant qu'annexes E1 et E2 de la DP[5].

[10]        Selon le paragraphe 2.3.4 de la DP, l'entente d'aménagement vise la période de conception et de construction du nouvel établissement, et l'entente de services, renouvelable chaque année, a une durée de 25 ans et porte sur le fonctionnement de l'établissement. Le soumissionnaire retenu est désigné dans chacune des ententes comme étant le [TRADUCTION] « fournisseur de services ».

[11]        Selon le paragraphe 3.2.2 de la DP, les [TRADUCTION] « exigences en matière de proposition financière seront communiquées aux fournisseurs sous forme d'ébauche le 13 juin 2007 et sous forme définitive le 25 juillet 2007 ».

[12]        Monsieur Stephenson a expliqué que la rétribution d'un fournisseur de services revêtait la forme d'un tarif journalier qui pouvait être facturé pour l'occupation d'un lit fourni conformément à la DP. Le calcul de ce tarif est analysé ci‑après, lors de la description de l'entente de services. Outre le tarif journalier, un fournisseur de services recevait également un paiement annuel appelé [TRADUCTION] « provision pour renouvellement des immobilisations ».

[13]        High‑Crest a répondu à la DP en soumettant une proposition concernant une adjonction de 20 lits à l'établissement (l'« adjonction »), qui répondrait aux exigences relatives aux foyers de soins de longue durée de niveau II. Le Ministère a retenu la proposition par une lettre du 7 janvier 2008[6]. Une annexe jointe à cette lettre (l'« annexe relative au tarif journalier ») expliquait les éléments du tarif journalier de 264,47 $ que High‑Crest pouvait facturer pour l'occupation d'un lit situé dans l'adjonction. Par une lettre du 15 janvier 2008[7], High‑Crest a accepté ce tarif journalier et a déclaré que l'adjonction de 20 lits serait construite d'une manière conforme aux exigences des établissements énoncées à l'annexe B de la DP.

C. L'entente d'aménagement

[14]        En février 2009, High‑Crest a conclu l'entente d'aménagement avec la province de la Nouvelle‑Écosse, représentée par le ministre de la Santé[8]. L'article 2.1 de cette entente exigeait que High‑Crest bâtisse l'adjonction d'une manière conforme à l'entente, aux annexes qui y étaient jointes et aux lois applicables, et qu'elle exploite les 20 lits de l'adjonction et y fournisse des services[9], conformément aux dispositions de l'entente de services.

[15]        L'article 2.3 de l'entente d'aménagement exigeait que High‑Crest obtienne un prêt hypothécaire, conformément à l'annexe « A », au taux fixé par la Nova Scotia Housing Development Corporation (Société de construction domiciliaire de la Nouvelle‑Écosse) (« NSHDC ») le 1er août 2007, soit 5,12 % par année. Une feuille de calcul jointe à l'ébauche d'entente d'aménagement fait état d'un capital de base du prêt de 5 532 842 $ (dont un montant de 620 775 $ de TVH, à un taux de 13 %), d'une durée de 300 mois et d'un taux d'intérêt de 5,12 % par année. Cette feuille fait également état d'une provision pour renouvellement des immobilisations, à payer par le Ministère à High‑Crest, d'un montant de 62 700 $ par année.

[16]        Monsieur Stephenson a expliqué que High‑Crest n'était pas tenue d'obtenir ce financement d'une source particulière, pour autant qu'il soit assorti du taux d'intérêt approuvé sur 25 ans. Malgré cela, High‑Crest a obtenu les fonds nécessaires pour financer le coût de l'adjonction de NSHDC, garantis par une hypothèque de premier rang sur l'établissement.

[17]        Selon le budget approuvé que le Ministère a établi et qui était en vigueur à partir du 29 janvier 2010 (le « budget de 2010 »), l'hypothèque souscrite auprès de NSHDC avait une durée de 300 mois et un capital de 5 533 250 $[10]. Les paiements hypothécaires annuels s'élevaient à 395 938 $. Comme nous le verrons, ce coût annuel a été inclus dans la détermination du tarif journalier.

[18]        En plus de financer la construction de l'adjonction, les fonds avancés par NSHDC ont servi à acquitter une somme totale de 2 027 926,33 $ que High‑Crest devait à la Banque Toronto‑Dominion, ainsi qu'à payer à NSHDC un montant de 40 992,90 $ que celle-ci, a déclaré M. Stephenson, avait avancé antérieurement à High‑Crest[11].

[19]        L'article 4 de l'entente d'aménagement décrit les obligations de High‑Crest à l'égard de l'entente de services. L'article 4.1 exige que High‑Crest signe l'entente de services, dont la forme est essentiellement celle que fournira le ministre de la Santé. L'entente de services (ainsi que toute entente de remplacement) devait inclure une obligation continue expresse, imposée au ministre de la Santé, de fournir un budget approuvé et des conditions de financement. Elle devait de plus inclure une obligation continue expresse, imposée à High‑Crest, d'exploiter l'établissement et de fournir des services à ses résidants.

[20]        Les conditions de financement sont décrites à l'article 4.2 de l'entente d'aménagement :

[TRADUCTION]

4.2       Conditions de financement

a)         Le ministre confirme le budget approuvé du fournisseur de services, conformément à la proposition de ce dernier présentée à l'annexe « B », sous réserve de ce qui suit :

(i)         une entente de services signée;

(ii)        la délivrance d'un permis au fournisseur de services, conformément à l'article 3.3.

b)         Si les conditions énoncées à l'alinéa 4.2a) sont remplies, le fournisseur de services reçoit une aide financière annuelle du ministre et il peut percevoir les frais d'hébergement autorisés. Si le fournisseur de services répond aux exigences des sous‑alinéas 4.2a)(i) et (ii) avant la date d'occupation, il est en droit de recevoir l'aide financière annuelle et de percevoir les frais d'hébergement autorisés à la date antérieure.

c)         Le ministre convient que, si la date d'occupation du fournisseur de services est reportée conformément à l'alinéa 2.4f), il versera l'aide financière annuelle à compter de la date d'occupation. Pour plus de certitude, le présent alinéa n'entre en vigueur que si le report de la date d'occupation est égal au nombre de jours pendant lesquels le ministre a dépassé les délais de réponse.

Aux termes de l'entente d'aménagement, les frais d'hébergement autorisés désignent la [TRADUCTION] « part des frais d'hébergement applicables aux soins de longue durée qu'un résidant est autorisé à payer, conformément à la politique sur les frais perçus des résidants, qui figure dans le guide des politiques ». Le terme [TRADUCTION] « budget approuvé » est défini dans l'entente d'aménagement, et il s'agit du [TRADUCTION] « budget total combiné qui s'applique aux postes budgétaires protégés et non protégés ». Ces termes, ainsi que d'autres termes applicables au financement et à l'exploitation de l'adjonction, sont analysés ci‑après, lors de l'examen de l'entente de services.

D. L'entente de services

[21]        High‑Crest et le ministre de la Santé ont signé l'entente de services le 24 février 2009. La copie de l'entente et des annexes qui a été déposée en preuve compte 335 pages[12].

[22]        À l'article 1.1 de cette entente figurent les définitions suivantes, qui sont importantes pour comprendre l'entente :

[TRADUCTION]

« Aide financière annuelle » Le total des fonds mis à la disposition du fournisseur de services pendant chaque période annuelle de la présente entente; ces fonds sont fournis par l'entremise des postes budgétaires protégés, des postes budgétaires non protégés et de la provision pour renouvellement des immobilisations.

« Budget approuvé » Le budget total combiné qui s'applique aux postes budgétaires protégés et non protégés.

« Occupation » L'admission de la première personne à titre de résidant de l'établissement, et le début de la fourniture des services.

« Postes budgétaires non protégés » La partie du budget approuvé qui correspond au coût de l'établissement et des services d'hébergement qui est financée à un taux non prescrit conformément à l'annexe « E ».

« Postes budgétaires protégés » La partie du budget approuvé qui correspond au coût des soins de santé et au coût des aliments qui est financée aux taux approuvés prescrits par le ministère de la Santé conformément à l'annexe « D ».

« Provision pour renouvellement des immobilisations » La provision reçue et investie par le fournisseur de services en vue de soutenir chaque établissement lors du remplacement d'un de ses éléments, après que la durée théorique de cet élément de l'établissement, définie dans la politique, a été atteinte, conformément au processus et aux définitions que comporte l'annexe « F ».

« Services » Inclut les locaux, les programmes, les services alimentaires, les biens, les services sociaux, les services de kinésithérapie et d'ergothérapie, ainsi que les soins infirmiers personnels et spécialisés.

[23]        L'article 2.1 de l'entente de services exige que High‑Crest exploite 20 lits de soins de longue durée à l'établissement et qu'elle exploite ce dernier et y fournisse les services prescrits.

[24]        Selon l'article 3.1 de l'entente de services, le ministre de la Santé est tenu d'établir pour High‑Crest un budget approuvé, lequel peut être rajusté de temps à autre conformément aux modalités de l'entente. L'article 3.2 indique que le budget approuvé détermine l'aide financière annuelle qui est mise à la disposition de High‑Crest. L'aide financière annuelle est le total des fonds mis à la disposition de High‑Crest aux termes de l'entente de services et, pour ce qui est de l'adjonction, il comprend le tarif journalier que High‑Crest peut facturer pour un lit de l'adjonction et la provision annuelle pour renouvellement des immobilisations.

[25]        Le tarif journalier est fondé sur le budget approuvé, lequel comporte les budgets établis par le Ministère pour les postes budgétaires protégés et non protégés.

[26]        De façon générale, le Ministère paie à High‑Crest au moins les deux tiers du tarif journalier. Le solde de ce tarif, s'il y en a, est acquitté par la personne qui occupe le lit. Le montant que paye l'occupant est fixé par le Ministère conformément à la politique sur les frais perçus des résidants, laquelle fait partie du guide des politiques concernant les soins de longue durée du Ministère, et ce guide est joint à l'entente de services comme annexe C. Cette politique est analysée sous la rubrique suivante.

[27]        Les règles relatives à la détermination du budget concernant les services visés par les postes budgétaires protégés sont énoncées dans la politique sur le financement des postes budgétaires protégés, jointe en tant qu'annexe D à l'entente de services. De façon générale, le budget des services visés par les postes budgétaires protégés comprend deux éléments.

[28]        Le premier élément est le coût des aliments qui sont nécessaires pour nourrir les occupants de l'adjonction. Le second élément se compose des salaires, des avantages sociaux et des frais d'exploitation liés à la fourniture de soins de santé professionnels aux occupants de l'adjonction. Ces soins comprennent les soins infirmiers professionnels, les soins continus que dispensent les aides en soins continus, ainsi que les services de soutien des diététiciens, des kinésithérapeutes et des ergothérapeutes[13].

[29]        Pour établir le budget relatif aux postes budgétaires protégés, le Ministère se sert de taux prescrits pour déterminer le coût des services qui relèvent de ces postes budgétaires.

[30]        Le budget relatif aux postes budgétaires protégés est ensuite converti en un tarif journalier par lit, basé sur un taux d'occupation présumé. Si le tarif journalier établi pour les services relevant des postes budgétaires protégés se révèle trop élevé, High‑Crest est tenue de rembourser l'excédent qu'elle a déjà reçu. S'il se révèle trop faible, High‑Crest est tenue de supporter l'excédent[14].

[31]        Les règles régissant l'établissement du budget relatif aux services visés par les postes budgétaires non protégés sont énoncées dans la politique sur le financement des postes budgétaires non protégés, jointe en tant qu'annexe E à l'entente de services.

[32]        De façon générale, le budget relatif aux services visés par les postes budgétaires non protégés comporte deux éléments. Le premier élément est la somme de 395 938 $ au titre du capital et des intérêts que High‑Crest est tenue de payer chaque année à NSHDC.

[33]        Le second élément est appelé le [TRADUCTION] « coût des services d'hébergement », et il comporte les salaires, les avantages sociaux et les frais d'exploitation liés à l'administration, à l'entretien et à la gestion de l'adjonction, ainsi qu'à la fourniture de tous les services d'alimentation, de lessive et d'entretien ménager qui se rapportent aux occupants de l'adjonction[15]. Les coûts des services d'alimentation ne comprennent pas le coût des aliments, qui est inclus dans le budget relatif aux postes budgétaires protégés.

[34]        Le paragraphe 4.2(1) de l'entente de services a fixé le tarif journalier applicable aux postes budgétaires non protégés à 113,03 $, soit 0,14 $ de moins que le tarif journalier indiqué dans l'annexe relative au tarif journalier. Cette dernière indique que les paiements au titre du capital et des intérêts faits chaque année à NSHDC représentaient une somme de 54,64 $ sur le tarif journalier initial de 113,17 $. Le solde, soit 58,53 $, représentait le coût des services d'hébergement.

[35]        Pour établir le budget relatif aux postes budgétaires non protégés, le Ministère se sert de taux non prescrits pour déterminer le coût des services qui relèvent de ces postes budgétaires.

[36]        Le budget relatif aux postes budgétaires non protégés est ensuite converti en un tarif journalier par lit, basé sur le taux d'occupation présumé. Si le tarif journalier établi pour les postes budgétaires non protégés se révèle trop élevé, High‑Crest a le droit de conserver l'excédent. S'il se révèle trop faible, High‑Crest est tenue de supporter l'excédent[16].

[37]        Le droit de conserver l'excédent offrait à High‑Crest la possibilité de tirer un bénéfice de la prestation des services relevant des postes budgétaires non protégés. Comme le coût annuel du prêt hypothécaire était fixe, tout bénéfice découlerait de la fourniture efficace des services visés par la définition du coût des services d'hébergement.

[38]        Aux termes de l'article 5.2 de l'entente de services, la provision pour renouvellement des immobilisations est payable d'une manière conforme à la politique sur les provisions pour renouvellement des immobilisations, laquelle est jointe à l'entente en tant qu'annexe F. High‑Crest était tenue d'utiliser ces fonds annuels pour remplacer les éléments de l'établissement qui étaient défaillants ou qui étaient sur le point de l'être[17]. Le terme [TRADUCTION] « élément de l'établissement » est défini à l'article 3.0 de la politique comme étant [TRADUCTION] « un élément qui est habituellement inscrit à l'actif comme faisant partie de la construction initiale ou qui sert généralement à fournir des services pendant une période de plus d'un an ». High‑Crest n'est pas tenue de rembourser les montants reçus au titre de la provision pour renouvellement des immobilisations, et ce, même si l'entente de services expire ou est résiliée[18].

E. Les fonds fournis par le Ministère aux résidants

[39]        Les fonds que le Ministère fournit aux occupants d'un établissement de soins de longue durée, tel qu'un foyer de soins de longue durée, sont expliqués en détail dans la politique sur les frais perçus des résidants. Le document fait état de trois catégories d'établissements de soins de longue durée : les foyers de soins de longue durée, les maisons de retraite, et les habitations dans la communauté. L'établissement dont il est question ici figure dans la catégorie des foyers de soins de longue durée.

[40]        La politique sur les frais perçus des résidants répartit le coût du séjour dans un établissement de soins de longue durée en deux volets : les coûts liés aux soins de santé et les coûts d'hébergement. Bien que l'on se serve de termes différents de ceux qui figurent dans l'entente de services, il semble que les coûts liés aux soins de santé soient ceux qui relèvent des postes budgétaires protégés et que les coûts d'hébergement soient ceux qui relèvent des postes budgétaires non protégés[19].

[41]        La politique sur les frais perçus des résidants indique que, sous réserve d'exceptions restreintes, le Ministère finance les coûts des soins de santé et la personne qui occupe un lit de l'établissement supporte les frais d'hébergement[20]. Cependant, l'occupant peut avoir droit à une subvention du Ministère qui couvre une partie ou la totalité de ses coûts d'hébergement. De plus, le montant maximal que l'occupant doit payer n'est pas fondé sur les coûts d'hébergement réels de l'établissement, mais sur une moyenne des coûts d'hébergement de tous les établissements de la province qui font partie de la même catégorie. Dans le cas de l'établissement dont il est question ici, les coûts d'hébergement moyens sont inférieurs aux coûts d'hébergement réels.

[42]        Pour déterminer les coûts d'hébergement moyens, le Ministère examine tout d'abord le budget détaillé de chaque établissement de soins de longue durée de la province et il fixe ensuite, pour chaque établissement, un tarif journalier par lit qui est suffisant pour couvrir les coûts liés aux soins de santé et les coûts d'hébergement de cet établissement. Dans le cas de High‑Crest, le tarif journalier pour un lit de l'adjonction a tout d'abord été fixé à 264,47 $, mais ce tarif a été porté à 286,41 $ par le budget de 2010 établi à l'époque de la première occupation des lits de l'adjonction, en janvier 2010.

[43]        Le Ministère fixe ensuite la moyenne des coûts d'hébergement de chacune des trois catégories d'établissements. Cette moyenne sert à déterminer ce que l'on appelle les [TRADUCTION] « frais d'hébergement types » pour chaque catégorie d'établissements. À compter du 1er novembre 2008, les frais d'hébergement types applicables à un lit d'un foyer de soins de longue durée étaient de 86,50 $ par jour[21]. Les frais d'hébergement types sont modifiés le 1er novembre de chaque année[22].

[44]        Selon la politique sur les frais perçus des résidants, toutes les personnes qui demandent à être admises dans un établissement de soins de longue durée en Nouvelle‑Écosse sont tenues de présenter une demande au Ministère[23]. Les personnes qui sont admises dans un établissement de soins de longue durée, mais qui ne demandent pas une aide financière du Ministère, sont tenues de payer à l'établissement les frais d'hébergement types qui s'appliquent à cette catégorie d'établissements.

[45]        Une personne qui obtient une aide financière du Ministère est tenue de payer les frais d'hébergement types à l'établissement, moins le montant de l'aide que le Ministère a accordée à cette personne. Le Ministère paie le solde directement à l'établissement. Le montant payé par l'occupant porte le nom de [TRADUCTION] « frais d'hébergement autorisés », et il semble correspondre aux frais d'hébergement autorisés qui sont définis dans l'entente d'aménagement.

F. Les paiements faits à High‑Crest

[46]        Le budget de 2010 a fixé les frais annuels relatifs aux postes budgétaires non protégés et aux postes budgétaires protégés qui s'appliquent à l'adjonction à 855 620 $ et à 1 218 596 $ respectivement, ce qui donne, pour l'adjonction, un budget approuvé de 2 074 216 $ pour l'année. Le budget relatif aux postes budgétaires non protégés inclut le paiement de 395 938 $ au titre du capital et des intérêts qui est fait à NSHDC.

[47]        Le budget de 2010 se fonde sur un taux d'occupation présumé de 99,2 % pour arriver à un tarif journalier de 286,41 $ pour l'occupation d'un lit de l'adjonction. Ce tarif a été ajouté au tarif journalier que High‑Crest pouvait percevoir pour les lits du reste de l'établissement qui sont financés par le Ministère, soit 207,41 $, ce qui donne un tarif journalier moyen de 229,23 $ par lit de l'établissement.

[48]        Monsieur Stephenson a déclaré que le Ministère verse à High‑Crest, aux deux semaines, des paiements qui sont fondés sur le tarif journalier par lit, moins le montant que High‑Crest est censée percevoir des occupants de l'établissement sous forme de frais d'hébergement[24]. Les paiements aux deux semaines sont rajustés trimestriellement, pour tenir compte de la situation réelle de High‑Crest[25].

[49]        En faisant abstraction des cas spéciaux, le Ministère paie à High‑Crest les montants suivants :

                    l'élément du tarif journalier correspondant aux soins de santé;

                    pour chaque occupant qui est subventionné, la partie subventionnée des frais d'hébergement types;

                    la partie du tarif journalier qui représente la différence entre les frais d'hébergement réels prévus pour les lits de l'adjonction et les frais d'hébergement types qui s'appliquent à un lit d'un foyer de soins de longue durée.

[50]        L'occupant paie à High‑Crest les frais d'hébergement types moins le montant subventionné que le Ministère lui accorde.

[51]        Le paiement, par l'occupant, des frais d'hébergement autorisés est prévu dans le contrat type conclu entre High‑Crest et l'occupant[26]. L'article 2.05 de ce contrat indique :

[TRADUCTION]

Le résidant et le garant conviennent conjointement de payer les frais d'hébergement quotidiens que le ministère de la Santé fixe de temps à autre.

[52]        Outre le tarif journalier, le Ministère paie à High‑Crest la provision pour renouvellement des immobilisations, qui est fixée à 62 700 $ par année.

G. Autres faits

[53]        High‑Crest a retenu les services d'un architecte et d'un entrepreneur pour concevoir et bâtir l'adjonction conformément au cahier des charges annexé à la DP et à l'entente d'aménagement. L'adjonction a été achevée en grande partie en janvier 2010, et, ce mois‑là, des personnes âgées ont commencé à occuper les unités (appelées « habitations » dans la LTA) de l'adjonction.

[54]        L'établissement emploie environ 110 personnes, qui y travaillent partout. Ses occupants sont presque tous âgés de plus de 65 ans. Tous ont besoin de soins infirmiers, mais le degré de soins varie d'une personne à une autre.

[55]        Le Ministère délivre chaque année à High‑Crest un permis d'exploitation de l'établissement. High‑Crest doit détenir un permis pour exploiter l'établissement ainsi que pour recevoir des paiements du Ministère.

H. La thèse de l'appelante

[56]        Selon High‑Crest, pour que les paiements que verse le Ministère à l'égard de l'adjonction de 20 lits soient une « subvention » au sens du paragraphe 191.1(1) de la LTA, il faut que les montants soient payés ou payables à seule fin de mettre des habitations de l'adjonction à la disposition d'aînés. Elle reconnaît que les lits de l'adjonction étaient des habitations mises à la disposition d'aînés, mais elle ajoute que le caractère prédominant de sa fourniture est la prestation des services visés par l'entente de services et que l'hébergement est un élément auxiliaire des services fournis en contrepartie des paiements.

[57]        High‑Crest est d'avis que l'article 2.1 de l'entente de services et l'article 3.0 de l'annexe B de la DP confirment qu'elle devait fournir les services et qu'il lui incombait de veiller à disposer d'un établissement convenable à cette fin. L'adjonction n'était pas bâtie à l'époque du lancement de la DP et, une fois que le Ministère a approuvé High‑Crest comme fournisseur de services, il lui a fallu engager un architecte et un entrepreneur pour bâtir l'adjonction à ses propres frais. Pour financer les travaux de construction, elle a dû obtenir un prêt hypothécaire de NSHDC. Elle seule était exposée à des risques pour ce qui était de ces frais.

[58]        High‑Crest signale que la DP exigeait qu'elle conclue l'entente d'aménagement, qui visait la période au cours de laquelle l'adjonction a été bâtie, de même que l'entente de services, qui visait la période au cours de laquelle l'adjonction devait être exploitée. L'entente d'aménagement ne prévoyait le versement d'aucun paiement à High‑Crest. Cela n'était prévu que dans l'entente de services. Même si cette dernière était d'une durée initiale de 25 ans, l'une de ses conditions était l'existence d'un permis délivré par le Ministère, renouvelable chaque année. Le droit qu'avait High‑Crest à des paiements était donc d'une durée annuelle, car les services étaient fournis en vertu du permis annuel.

[59]        High‑Crest fait valoir que l'article 191.1 de la LTA n'est pas destiné à s'appliquer à une situation dans laquelle le subventionneur paie une contrepartie pour la fourniture de quelque chose, c'est‑à‑dire, en l'occurrence, les services. Le thème sous‑jacent de cette disposition est que le subventionneur procure au constructeur un avantage quelconque. Dans le cas présent, il n'y a pas eu d'avantage, uniquement une contrepartie.

[60]        L'absence d'un avantage ressort clairement lorsqu'on examine les divers éléments du tarif journalier. Le Ministère paie les frais liés aux soins de santé, comme il est tenu de le faire pour toutes les personnes résidant dans la province. Ces paiements ne profitent pas à High‑Crest, car celle‑ci fournit les services de santé en échange des paiements. Les frais d'hébergement sont financés à des degrés divers par le Ministère, mais, là encore, High‑Crest fournit les services d'hébergement en échange de ces paiements. Toute subvention liée aux frais d'hébergement est accordée à l'occupant et non à High‑Crest. Enfin, la provision pour renouvellement des immobilisations est versée afin de garantir que High‑Crest puisse continuer de fournir les services.

I. La thèse de l'intimée

[61]        L'intimée soutient que l'objectif que visait la province en lançant la DP était la construction de nouveaux établissements de soins de longue durée. Les modalités de la DP indiquaient clairement de quelle façon l'aide financière du Ministère serait structurée. En janvier 2008, High‑Crest s'est vu offrir et a accepté un tarif journalier, après quoi elle a entrepris de bâtir l'adjonction.

[62]        L'intimée est d'avis que l'offre d'un financement journalier dépendait clairement du fait que High‑Crest bâtisse l'adjonction de l'établissement. Le tarif journalier comprenait la possibilité de réaliser un bénéfice, ce qui, à son tour, a incité High‑Crest à présenter une offre concernant la construction de l'adjonction. De plus, le tarif journalier comportait un élément de capital destiné à couvrir le montant annuel de capital et d'intérêts à payer sur l'hypothèque que High‑Crest a contractée auprès de NSHDC et qui a servi à financer les travaux de construction. Bien que les mots employés dans la définition d'une « subvention » soient d'une portée suffisamment large pour englober les financements qui ne comportent pas un élément de capital, cet élément étaye l'opinion selon laquelle, en l'espèce, les paiements étaient une « subvention ».

[63]        L'intimée ajoute que le droit de High‑Crest à la subvention a été établi bien avant la fourniture réputée à soi‑même en janvier 2010. En conséquence, en janvier 2010, High‑Crest pouvait raisonnablement s'attendre à recevoir une subvention à l'égard de l'adjonction, comme l'exige le sous‑alinéa 191.1(2)c) de la LTA.

III. Les dispositions légales applicables

[64]        Les dispositions de la LTA qui sont pertinentes en l'espèce sont reproduites à l'annexe A des présents motifs.

IV. Analyse

[65]        Pour situer le contexte général, l'acquéreur de produits ou de services paie la taxe sur les produits et services. Dans la plupart des cas, c'est le fournisseur des produits ou des services qui doit percevoir cette taxe. Si l'acquéreur se sert de ces produits ou de ces services dans le cadre d'une activité commerciale, il a le droit, à son tour, de demander un crédit de taxe sur les intrants en vue de compenser la taxe qu'il a payée pour l'acquisition des produits ou des services. Le résultat visé est que la taxe soit imposée sur la valeur ajoutée à chaque étape de la fourniture des produits ou des services jusqu'à ce qu'ils atteignent l'utilisateur ou le consommateur ultime, qui supporte le plein fardeau économique de la taxe. Lorsque la fourniture a lieu dans une province participante, comme la Nouvelle‑Écosse, la taxe qu'impose la LTA est appelée « taxe de vente harmonisée », ou TVH, plutôt que « taxe sur les produits et services », ou TPS.

[66]        Les articles 190 à 192 de la LTA présentent une série de règles spéciales qui s'appliquent aux immeubles. De façon générale, le paragraphe 191(4) de la LTA a trait à la situation dans laquelle le constructeur d'une nouvelle adjonction à un immeuble d'habitation à logements multiples[27] qui est achevée en grande partie transfère à une personne la possession ou l'utilisation d'une habitation de cette adjonction aux termes d'un bail, d'une licence ou d'un accord semblable en vue de l'occupation de l'habitation à titre résidentiel et cette personne est la première à occuper l'habitation. Dans les cas où le paragraphe 191(4) s'applique, le constructeur est réputé avoir effectué et reçu la fourniture taxable de l'adjonction et il est réputé avoir acquitté et perçu la TVH, calculée sur la juste valeur marchande de l'adjonction au moment de la fourniture réputée.

[67]        La règle énoncée au paragraphe 191(4) de la LTA est communément appelée la règle de la fourniture à soi‑même, car le constructeur est à la fois le fournisseur et l'acquéreur de la fourniture en vue du calcul et de la perception de la TVH à l'égard de l'adjonction. La règle impose au constructeur le fardeau financier de la TVH[28]. Cependant, celui‑ci peut demander des crédits de taxe sur les intrants à l'égard du coût de la construction de l'adjonction, car l'adjonction est réputée être l'objet d'une fourniture taxable.

[68]        High‑Crest convient que la règle de la fourniture à soi‑même qui est énoncée au paragraphe 191(4) s'appliquait à elle en janvier 2010, quand l'adjonction a été achevée en grande partie et qu'elle a accueilli ses premiers occupants. La question en litige consiste à savoir si la règle déterminative énoncée au paragraphe 191.1(2) de la LTA s'applique à la fourniture à soi‑même de l'adjonction. Dans l'affirmative, la TVH que doit payer High‑Crest sur la fourniture à soi‑même en application du paragraphe 191(4) de la LTA est réputée être égale au plus élevé des deux montants suivants : la TVH calculée sur la juste valeur marchande de l'adjonction au moment de la fourniture à soi‑même, ou la TVH à payer par High‑Crest à l'égard de la construction de l'adjonction[29]. Les parties conviennent que le premier montant s'élève à 350 000 $, et le second à 646 304 $.

[69]        High‑Crest convient que les conditions précisées aux alinéas 191.1(2)a) et b) sont remplies à l'égard de l'adjonction. Plus précisément :

              l'établissement est un immeuble d'habitation et l'adjonction est une adjonction à un immeuble d'habitation;

              High‑Crest est le constructeur de l'adjonction;

              aux termes du paragraphe 191(4) de la LTA, High‑Crest est réputée avoir effectué et reçu la fourniture de l'adjonction en janvier 2010;

              la possession ou l'utilisation d'au moins 10 % des habitations de l'établissement est destinée à être transférée afin que des aînés puissent occuper les habitations à titre résidentiel ou à titre d'hébergement.

[70]        Il ne reste plus qu'à savoir si High‑Crest a reçu ou pouvait raisonnablement s'attendre à recevoir une « subvention relativement à l'immeuble d'habitation » au moment où la fourniture à soi‑même a eu lieu, c'est-à-dire en janvier 2010[30].

[71]        La définition du mot « subvention », au paragraphe 191.1(1) de la LTA, est la suivante :

« subvention » Quant à un immeuble d'habitation, somme d'argent (y compris un prêt à remboursement conditionnel mais à l'exclusion de tout autre prêt et des remboursements ou crédits au titre des frais, droits ou taxes imposés par une loi) payée ou payable par l'une des personnes suivantes au constructeur de l'immeuble ou d'une adjonction à celui‑ci pour que des habitations de l'immeuble soient mises à la disposition de personnes visées à l'alinéa (2)b) :

a) un subventionneur;

b) une organisation qui a reçu la somme d'un subventionneur ou d'une autre organisation qui a reçu la somme d'un subventionneur.

[72]        Il est possible de diviser cette définition en plusieurs exigences :

A.      Il doit y avoir un immeuble d'habitation à l'égard duquel la définition s'applique. Selon le paragraphe 123(1) de la LTA, un « immeuble d'habitation » désigne, notamment, la partie constitutive d'un bâtiment qui comporte au moins une « habitation ». La définition d'une « habitation » fait expressément référence à une chambre dans une résidence d'aînés, de personnes handicapées ou d'autres particuliers[31]. L'établissement de High‑Crest est un immeuble d'habitation.

B.      Il doit y avoir une somme d'argent. Le mot « montant » est défini au paragraphe 123(1) de la LTA; il signifie « argent, ou bien ou service exprimé sous forme d'un montant d'argent ou d'une valeur en argent ». Le mot « argent » est défini au paragraphe 123(1) de la LTA; y sont assimilés « la monnaie, les chèques, les billets à ordre, les lettres de crédit, les traites, les chèques de voyage, les lettres de change, les bons de poste, les mandats‑poste, les versements postaux et tout autre effet, canadien ou étranger, de même nature ». Comme la définition du mot « argent » est inclusive, le sens ordinaire de ce mot s'applique également.

Les définitions des termes « montant » et « argent » se chevauchent, car un montant signifie de l'argent. Cependant, il est raisonnable de conclure que la définition au paragraphe 191.1(1) ne vise que les montants payés ou payables sous forme d'argent. Elle ne vise pas les montants payés ou payables sous forme de biens[32] ou de services, même s'ils sont exprimés sous la forme d'une somme d'argent.

Une « somme d'argent » inclut un prêt à remboursement conditionnel. Cependant, ce terme exclut tout autre prêt ainsi que les remboursements ou les crédits au titre des frais, des droits ou des taxes imposés par une loi.

Le prêt que NSHDC a consenti à High‑Crest n'est pas un prêt à remboursement conditionnel et il ne s'agit donc pas d'une somme d'argent. En revanche, il ne fait aucun doute que les paiements que le Ministère verse aux deux semaines à High‑Crest en vertu de l'entente de services sont une somme d'argent.

C.      La somme d'argent doit être payée ou payable soit par le subventionneur, soit par une organisation qui a reçu la somme d'un subventionneur ou d'une autre organisation qui a reçu la somme d'un subventionneur. Le mot « subventionneur » désigne, notamment, un gouvernement ou une municipalité, à l'exclusion de certaines personnes morales[33]. Le Ministère est un ministère du gouvernement de la Nouvelle‑Écosse et est représenté dans l'entente de services par le ministre de la Santé de la Nouvelle‑Écosse. Il est donc un subventionneur.

D.      La somme d'argent doit être payée ou payable soit au constructeur de l'immeuble d'habitation à l'égard duquel la définition est appliquée, soit au constructeur d'une adjonction à cet immeuble. Les paiements faits aux deux semaines sont versés par le Ministère à High‑Crest, le constructeur de l'adjonction. C'est donc dire que la somme d'argent est payée et payable au constructeur d'une adjonction à un immeuble d'habitation à l'égard duquel la définition est appliquée.

E.      La somme d'argent doit être payée ou payable au constructeur par le subventionneur ou l'organisation pour que des habitations de l'immeuble soient mises à la disposition de personnes visées à l'alinéa 191.1(2)b) de la LTA.

[73]        High‑Crest convient que les exigences de la définition qui sont décrites aux points A à D qui précèdent sont remplies, mais, fait‑elle valoir, pas l'exigence décrite au point E. Plus précisément, elle dit que toute somme d'argent qui lui était payable en janvier 2010 aux termes de l'entente de services n'était pas payable par le Ministère pour que des habitations de l'établissement soient mises à la disposition d'aînés. La somme d'argent était plutôt payable dans le but d'obtenir les services que High‑Crest était tenue de fournir aux termes de l'entente de services.

[74]        High‑Crest soutient qu'il y a trois faits importants qui étayent cette conclusion. Premièrement, pour pouvoir recevoir les paiements, elle devait renouveler avec succès le permis annuel que délivre le Ministère. Sans ce permis, elle ne pouvait pas exploiter l'établissement et ne recevrait donc aucun paiement du Ministère. C'est donc dire que les paiements étaient inextricablement liés à la fourniture constante des services, et non au fait de mettre des habitations de l'adjonction à la disposition d'aînés.

[75]        Deuxièmement, l'entente d'aménagement traitait directement de la construction de l'adjonction, mais elle ne prévoyait aucun financement pour cette construction. Tout le financement de l'adjonction a été assuré par High‑Crest au moyen du prêt hypothécaire que lui a consenti NSHDC.

[76]        Troisièmement, les occupants de l'adjonction étaient redevables des frais d'hébergement types, et toute subvention relative à ces frais était versée aux occupants et non à High‑Crest. Ces frais comprenaient un montant fondé sur le coût amorti moyen de la construction d'établissements de soins de longue durée en Nouvelle‑Écosse. En conséquence, tous les fonds payables à High‑Crest pour les services d'hébergement fournis dans l'adjonction étaient payables par l'occupant, et non par le Ministère pour que des habitations de l'adjonction soient mises à la disposition d'aînés.

[77]        Pour examiner la thèse de l'appelante, il est nécessaire d'examiner de manière assez détaillée le terme « pour que » (« for the purpose of », dans la version anglaise de la loi) que comporte la définition. Le mot anglais « purpose » (fin) est défini dans le dictionnaire Oxford English Dictionary (2e éd.) :

[TRADUCTION]

Ce que l'on fixe pour soi en tant que chose à faire ou à atteindre; l'objet que l'on envisage.

[78]        La question qui se pose est donc la suivante : quelle était la fin que le Ministère souhaitait atteindre quand il a convenu de payer à High‑Crest les sommes d'argent déterminées selon les modalités de l'entente de services? Était-il question d'obtenir les services, comme le soutient l'appelante, ou de mettre des habitations de l'immeuble à la disposition d'aînés, comme le soutient l'intimée?

[79]        La difficulté que présente la réponse à cette question réside dans le fait que le Ministère, en convenant de payer à High‑Crest les sommes précisées dans l'entente de services, a obtenu les deux résultats. Chacun est un résultat important, qui n'est ni accessoire ni indirect. À mon avis, toutefois, il n'y en a qu'un seul qui reflète la fin qui sous‑tend les ententes, ainsi que les paiements faits par le Ministère à High‑Crest qui en font partie intégrante. L'autre résultat reflète simplement le moyen par lequel cette fin a été réalisée.

[80]        Avant que j'explique ce commentaire, il est utile de considérer le texte, le contexte et l'objet de la définition d'une « subvention ». Comme je l'ai déjà indiqué, le libellé de la définition oblige la Cour à se concentrer sur la fin (« the purpose », dans la version anglaise de la définition) pour laquelle une somme d'argent a été payée ou est payable par le subventionneur ou l'organisation au constructeur. Compte tenu de l'accent qui est mis sur la fin que vise le subventionneur ou l'organisation, l'emploi, dans la version anglaise de la définition, de l'article défini « the » avant le mot « purpose » donne à penser que la définition oblige à déterminer quelle est la fin principale ou dominante du subventionneur ou de l'organisation. Sans cela, le constructeur serait confronté à la tâche quasi impossible d'exclure toutes les autres fins possibles.

[81]        Le contexte de la définition est qu'elle fait partie de l'article 191.1 de la LTA et que le terme défini est employé à l'alinéa 191.1(2)c) de la LTA. La définition a pour objet d'indiquer le genre de « subvention » que le constructeur doit recevoir ou doit raisonnablement s'attendre à recevoir afin de répondre à la condition précisée à l'alinéa 191.1(2)c) de la LTA.

[82]        Si les conditions précisées au paragraphe 191.1(2) sont remplies, le constructeur doit alors fixer lui‑même le montant de la TVH d'une manière qui déroge à la règle habituelle de la juste valeur marchande, énoncée aux paragraphes 191(1) à (4) de la LTA. Comme la définition est d'une importance capitale pour déterminer quand il convient de déroger à la règle habituelle de la juste valeur marchande, il est préférable que la définition comporte un degré raisonnable de certitude plutôt que de faire l'objet d'une interprétation exagérément large qui admette un degré quelconque de fin de la part du subventionneur ou de l'organisation. Une telle interprétation concorde également avec la thèse générale selon laquelle la certitude, la prévisibilité et l'équité sont les résultats que l'on privilégie lorsqu'on interprète une loi fiscale. En fait, le contexte et l'objet confirment que la « fin » doit être considérée comme la fin dominante du subventionneur ou de l'organisation[34].

[83]        Pour ce qui est de la manière de déterminer la fin poursuivie dans une affaire donnée, la Cour suprême du Canada a déclaré, dans l'arrêt Entreprises Ludco[35] :

[...] Dans l'interprétation de la Loi, tout comme dans d'autres domaines du droit, les tribunaux appelés à dégager l'objet d'une mesure ou l'intention de son auteur doivent déterminer objectivement la nature de la fin poursuivie en tenant compte à la fois des éléments subjectifs et objectifs pertinents [...]

[84]        Dans la présente affaire, vu la nature diffuse du subventionneur et l'absence de témoignage de la part d'un représentant de ce dernier, la détermination de la fin poursuivie repose nécessairement sur l'ensemble des circonstances qui ont mené à l'occupation de l'adjonction par des aînés, en janvier 2010. Cela inclut, notamment, la teneur de la DP, l'entente d'aménagement et l'entente de services, ainsi que les diverses annexes jointes à ces documents, de même que les communications entre le Ministère et High‑Crest au sujet de l'adjonction.

[85]        Pour en revenir à ce que j'ai déclaré plus tôt au sujet des deux résultats réalisés par les ententes imposées par le Ministère, il est important de reconnaître que la définition d'une « subvention » ne prescrit aucun moyen particulier de réaliser la fin décrite. La définition est plutôt axée sur la question de savoir si la fin poursuivie par le subventionneur (c'est‑à‑dire son objectif ou son objet) à l'égard de la somme d'argent qui a été payée ou était payable au constructeur était de mettre des habitations d'un immeuble d'habitation à la disposition de personnes visées à l'alinéa 191.1(2)b) de la LTA. Si cette fin est à l'origine de la conclusion d'ententes visant des paiements faits par le subventionneur au constructeur, la seule conclusion raisonnable que l'on puisse tirer est que les paiements visent la même fin ou le même objectif que les ententes.

[86]        L'objectif pour lequel le Ministère a conclu les ententes avec High‑Crest est décrit dans la DP, dans la section « Contexte » :

[TRADUCTION]

En mai 2006, le gouvernement de la Nouvelle‑Écosse a approuvé la « Stratégie de soins continus de la Nouvelle‑Écosse — Prévoir l'avenir des soins continus » (la stratégie). Dans la stratégie, il s'est engagé à construire de nouveaux établissements de soins de longue durée en vue d'appuyer la vision du « bien vivre dans un milieu qu'on peut appeler son foyer ». Les deux documents intitulés « Exigences du programme des soins de longue durée » et « Exigences en matière de superficie et de conception » se complètent l'un l'autre et ont été créés en vue d'orienter l'aménagement de ces nouveaux établissements de soins de longue durée du point de vue des soins et des services, ainsi que du milieu physique. [Non souligné dans l'original.]

[87]        La DP mentionne aussi que le processus suivi a pour but de [TRADUCTION] « choisir une ou plusieurs organisations qui fourniront les installations et les services requis à l'appui de 594 lits de foyers de soins de longue durée de niveau II et de 210 lits de maisons de retraite sur tout le territoire de la province ». En d'autres termes, la province a décidé d'utiliser les ententes décrites dans la DP, l'entente d'aménagement et l'entente de services pour atteindre son objectif, soit la construction de nouveaux établissements de soins de longue durée en Nouvelle‑Écosse. Ces ententes comportaient le versement de paiements aux soumissionnaires retenus pour la fourniture de lits de foyers de soins de longue durée et des services connexes. Dans cette situation, on ne peut aisément dissocier la fin des ententes de la fin des paiements versés aux termes de ces ententes.

[88]        Il est vrai que le moyen par lequel le gouvernement a atteint son objectif de fournir d'autres lits de soins de longue durée aux personnes âgées de la province ne comportait pas le financement direct du coût de l'adjonction. Cependant, la définition du mot « subvention » n'exige pas que l'on finance directement ce coût. Comme il a déjà été mentionné, elle exige que l'on détermine si la fin poursuivie par le subventionneur était de mettre des habitations d'un immeuble d'habitation à la disposition d'aînés.

[89]        Dans le cas présent, l'objectif déclaré du Ministère pour ce qui était de la conclusion d'ententes avec des soumissionnaires était de [TRADUCTION] « construire de nouveaux établissements de soins de longue durée en vue d'appuyer la vision du “bien vivre dans un milieu qu'on peut appeler son foyer” ». Cet objectif a été atteint grâce aux ententes énoncées dans la DP, l'entente d'aménagement et l'entente de services, et ces ententes prévoient que le Ministère versera des sommes importantes à High‑Crest.

[90]        Les modalités des ententes que le Ministère a prescrites dans la DP sont extrêmement détaillées, mais leur élément central est la fourniture de nouveaux lits de soins de longue durée par le soumissionnaire retenu, ainsi que la fixation d'un tarif journalier pour l'occupation des nouveaux lits, un tarif qui devait être payé en grande partie par le Ministère. Par exemple, l'offre faite par le Ministère à High‑Crest le 7 janvier 2008 accorde à cette dernière l'adjonction de 20 lits à son établissement de Springhill et décrit en détail le tarif journalier payable pour l'occupation de ces lits. High‑Crest est tenue d'accepter le tarif journalier par écrit, dans la semaine suivant la date de l'offre. Dans sa lettre du 15 janvier 2008, High‑Crest accepte le tarif journalier et convient de bâtir une installation conforme au cahier des charges à l'annexe B de la DP.

[91]        Le tarif journalier établi en vertu des ententes prescrites par le Ministère englobe le coût de la construction et de l'exploitation de la nouvelle installation et offre à High‑Crest une possibilité de réaliser un bénéfice pour les activités qui ne sont pas liées aux soins de santé. Au moment où l'offre a été faite à High‑Crest, en janvier 2008, le tarif journalier était fixé à 264,47 $. Les frais d'hébergement types (c'est‑à‑dire la part du tarif journalier qui incombait à l'occupant), le 1er novembre 2008, étaient de 86,50 $, selon la politique sur les frais perçus des résidants à l'annexe C de l'entente de services. En conséquence, dès le départ, le Ministère avait convenu de payer directement à High-Crest au moins 67,3 % du tarif journalier. En outre, il avait convenu de verser à High‑Crest toute subvention qu'il accordait à un occupant, de même que la provision pour renouvellement des immobilisations.

[92]        High‑Crest a fait valoir que l'occupant était responsable des frais d'hébergement et que ce fait étayait la thèse selon laquelle les montants payés par le Ministère n'avaient pas pour but de mettre d'autres lits de foyers de soins de longue durée à la disposition de personnes âgées. Cependant, il reste que le Ministère a tout payé à High‑Crest, sauf les frais d'hébergement autorisés (c'est‑à‑dire les frais d'hébergement types moins toute subvention versée à l'occupant). L'entente entre High‑Crest et l'occupant reflétait cette réalité, car elle exigeait que l'occupant ne paie que le montant que le Ministère autorisait High‑Crest à imposer à cet occupant en particulier. Quoi qu'il en soit, la définition du mot « subvention » n'exige pas que l'on fasse le suivi de l'emploi particulier de la somme d'argent payée ou payable par le subventionneur au constructeur : elle requiert seulement que l'on détermine la fin pour laquelle une somme d'argent est payée ou payable au constructeur.

[93]        Il est aussi vrai que High‑Crest était tenue de fournir les services en contrepartie des paiements qu'elle recevait du Ministère. Cependant, cela ne change pas le fait que la fin dominante pour laquelle le Ministère a conclu ces ententes et a convenu d'effectuer ces paiements était d'obtenir d'autres lits de soins de longue durée pour des personnes âgées en Nouvelle‑Écosse. Le résultat immédiat des paiements a peut‑être bien été la fourniture des services, mais il ne s'agissait pas là de la fin qui sous‑tendait les paiements.

[94]        En résumé, la fin des ententes prescrites par le Ministère est claire. Le gouvernement de la Nouvelle‑Écosse, représenté par le Ministère, avait besoin de nouveaux établissements de soins de longue durée et a choisi de s'associer avec le secteur privé pour mener à bien cet objectif. Le moyen de réaliser l'objectif souhaité était d'offrir aux soumissionnaires retenus un niveau garanti de financement, payable en vertu des modalités d'un contrat de services. Ce moyen ne change pas l'objectif que le gouvernement souhaitait atteindre en concluant unilatéralement les ententes avec les soumissionnaires retenus.

[95]        Le fait que High‑Crest était tenue d'obtenir chaque année un permis ne change pas la fin pour laquelle le financement a été fourni par le Ministère à High‑Crest. La condition du permis annuel est simplement un moyen de garantir que l'on se conforme en tout temps aux conditions d'exploitation très détaillées qu'impose le Ministère dans la DP, l'entente d'aménagement et l'entente de services.

[96]        De plus, le fait que l'entente d'aménagement ne prévoyait pas elle‑même le financement de l'adjonction n'indique pas quelle était la fin des paiements selon l'entente de services. La DP et l'entente d'aménagement envisageaient chacune la conclusion de l'entente de services, et l'article 4.2 de l'entente d'aménagement décrivait les conditions de financement. Ensemble, ces trois documents et les nombreuses annexes qui y sont jointes reflètent le moyen par lequel le Ministère a atteint son objectif de faire construire de nouveaux établissements de soins de longue durée en Nouvelle‑Écosse, et ce moyen comportait le versement, par le Ministère, de sommes importantes à High‑Crest.

[97]        Pour les motifs qui précèdent, l'appel de High‑Crest est rejeté, avec dépens en faveur de l'intimée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 30e jour de septembre 2015.

« J.R. Owen »

Le juge Owen



Annexe A

Dispositions légales applicables

123(1) – Définitions

« argent » Y sont assimilés la monnaie, les chèques, les billets à ordre, les lettres de crédit, les traites, les chèques de voyage, les lettres de change, les bons de poste, les mandats‑poste, les versements postaux et tout autre effet, canadien ou étranger, de même nature. La présente définition exclut la monnaie dont la juste valeur marchande dépasse la valeur nominale dans le pays d'origine et celle fournie ou détenue pour sa valeur numismatique.

« constructeur » Est constructeur d'un immeuble d'habitation ou d'une adjonction à un immeuble d'habitation à logements multiples la personne qui, selon le cas :

aréalise, elle‑même ou par un intermédiaire, à un moment où elle a un droit sur l'immeuble sur lequel l'immeuble d'habitation est situé :

(i) dans le cas d'une adjonction à un immeuble d'habitation à logements multiples, la construction de l'adjonction,

(ii) [abrogé]

(iii) dans les autres cas, la construction ou des rénovations majeures de l'immeuble d'habitation;

[...]

« habitation » Maison individuelle, jumelée ou en rangée, unité en copropriété, maison mobile, maison flottante, appartement, chambre d'hôtel, de motel, d'auberge ou de pension, chambre dans une résidence d'étudiants, d'aînés, de personnes handicapées ou d'autres particuliers ou tout gîte semblable, ou toute partie de ceux‑ci, qui est, selon le cas :

a) occupée à titre résidentiel ou d'hébergement;

b) fournie par bail, licence ou accord semblable, pour être utilisée à titre résidentiel ou d'hébergement;

c) vacante et dont la dernière occupation ou fourniture était à titre résidentiel ou d'hébergement;

d) destinée à servir à titre résidentiel ou d'hébergement sans avoir servi à une fin quelconque.

« immeuble d'habitation »

a) la partie constitutive d'un bâtiment qui comporte au moins une habitation, y compris :

(i) la fraction des parties communes et des dépendances et du fonds contigu au bâtiment qui est raisonnablement nécessaire à l'usage résidentiel du bâtiment,

(ii) la proportion du fonds sous‑jacent au bâtiment correspondant au rapport entre cette partie constitutive et l'ensemble du bâtiment,

[...]

« immeuble d'habitation à logements multiples » Immeuble d'habitation, à l'exclusion d'un immeuble d'habitation en copropriété, qui contient au moins deux habitations.

« montant » Argent, ou bien ou service exprimé sous forme d'un montant d'argent ou d'une valeur en argent.

191(4) Fourniture à soi‑même d'une adjonction à un immeuble d'habitation à logements multiples — Pour l'application de la présente partie, lorsque les conditions suivantes sont réunies :

ala construction d'une adjonction à un immeuble d'habitation à logements multiples est achevée en grande partie,

b) le constructeur de l'adjonction, selon le cas :

(i) transfère à une personne, qui n'est pas l'acheteur en vertu du contrat de vente visant l'immeuble, la possession ou l'utilisation d'une habitation de l'adjonction aux termes d'un bail, d'une licence ou d'un accord semblable conclu en vue de l'occupation de l'habitation à titre résidentiel,

(i.1) transfère à une personne la possession ou l'utilisation d'une habitation de l'adjonction aux termes d'une convention prévoyant :

(A) d'une part, la fourniture par vente de tout ou partie du bâtiment faisant partie de l'immeuble,

(B) d'autre part, la fourniture par bail du fonds faisant partie de l'immeuble ou la fourniture d'un tel bail par cession,

(ii) étant un particulier, occupe lui‑même une telle habitation à titre résidentiel,

cle constructeur, la personne ou tout particulier qui a conclu avec celle‑ci un bail, une licence ou un accord semblable visant une habitation de l'adjonction est le premier à occuper une telle habitation à titre résidentiel après que les travaux sont achevés en grande partie,

le constructeur est réputé :

davoir effectué et reçu, par vente, la fourniture taxable de l'adjonction le jour où les travaux sont achevés en grande partie ou, s'il est postérieur, le jour où la possession ou l'utilisation de l'habitation est transférée à la personne ou l'habitation est occupée par lui;

eavoir payé à titre d'acquéreur et perçu à titre de fournisseur, au dernier en date de ces jours, la taxe relative à la fourniture, calculée sur la juste valeur marchande de l'adjonction ce jour‑là.

191.1(1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article.

« subvention » Quant à un immeuble d'habitation, somme d'argent (y compris un prêt à remboursement conditionnel mais à l'exclusion de tout autre prêt et des remboursements ou crédits au titre des frais, droits ou taxes imposés par une loi) payée ou payable par l'une des personnes suivantes au constructeur de l'immeuble ou d'une adjonction à celui‑ci pour que des habitations de l'immeuble soient mises à la disposition de personnes visées à l'alinéa (2)b) :

a) un subventionneur;

b) une organisation qui a reçu la somme d'un subventionneur ou d'une autre organisation qui a reçu la somme d'un subventionneur.

« subventionneur »

aGouvernement ou municipalité, à l'exclusion d'une personne morale dont la totalité, ou presque, des activités consistent à exercer des activités commerciales ou à fournir des services financiers, ou à faire les deux;

[...]

(2) Immeubles d'habitation subventionnés — Pour l'application des paragraphes 191(1) à (4), dans le cas où les conditions suivantes sont réunies :

ale constructeur d'un immeuble d'habitation ou d'une adjonction à celui‑ci est réputé par l'un des paragraphes 191(1) à (4) avoir effectué et reçu la fourniture de l'immeuble ou de l'adjonction à un moment donné,

bla possession ou l'utilisation d'au moins 10 % des habitations de l'immeuble d'habitation est destinée à être transférée afin que l'un ou plusieurs des groupes ci‑après puissent occuper les habitations à titre résidentiel ou d'hébergement :

(i) les aînés,

[...]

cle constructeur, sauf s'il est un gouvernement ou une municipalité, a reçu ou peut raisonnablement s'attendre à recevoir, au moment donné ou antérieurement, une subvention relativement à l'immeuble d'habitation,

la taxe relative à la fourniture, calculée sur la juste valeur marchande de l'immeuble d'habitation ou de l'adjonction, selon le cas, est réputée égale au plus élevé des montants suivants :

dle montant qui, si ce n'était le présent paragraphe, correspondrait à la taxe calculée sur cette juste valeur marchande;

ele total des montants représentant chacun la taxe payable par le constructeur relativement :

(i) soit à un immeuble qui fait partie de l'immeuble d'habitation ou de l'adjonction,

(ii) soit à des améliorations apportées à cet immeuble.


RÉFÉRENCE :

2015 CCI 230

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2012-3027(GST)G

INTITULÉ :

HIGH-CREST ENTERPRISES LIMITED c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :

Halifax (Nouvelle-Écosse)

DATE DE L'AUDIENCE :

Le 26 février 2014

MOTIFS DU JUGEMENT :

L'honorable juge John R. Owen

DATE DU JUGEMENT :

Le 30 septembre 2015

COMPARUTIONS :

Avocat de l'appelante :

Me Maurice P. Chiasson, c.r.

 

Avocat de l'intimée :

Me Jan Jensen

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l'appelante :

Nom :

Me Maurice P. Chiasson, c.r.

 

Cabinet :

Stewart McKelvey

Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

Pour l'intimée :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 



[1]           La DP figure à l'onglet 2 de la pièce A‑1.

[2]           Page 1 de la DP, sous la rubrique [TRADUCTION] « Introduction ».

[3]           Onglet 1A de la pièce A‑1.

[4]           Onglet 1B de la pièce A‑1.

[5]           La version définitive des ententes figure aux onglets 1C et 1D de la pièce A‑1.

[6]           Onglet 20 de la pièce A‑3.

[7]           Onglet 20 de la pièce A‑3.

[8]           Une ébauche de cette entente, du 4 février 2009, figure à l'onglet 5 de la pièce A‑2. M. Stephenson a déclaré qu'il n'avait pas pu trouver la version signée de l'entente, mais il a dit que l'ébauche était [TRADUCTION] « essentiellement semblable » à la version signée, car elle avait servi de modèle à cette dernière.

[9] Le mot [TRADUCTION] « services » est défini dans l'entente d'aménagement et il inclut : [TRADUCTION] « la fourniture de locaux, de programmes, de biens et de services sociaux, ainsi que de services de kinésithérapie et d'ergothérapie et, dans le cas des foyers de soins de longue durée, des soins infirmiers personnels et spécialisés ». Ce terme est défini de façon semblable, mais non identique, dans l'entente de services.

[10]          Pièce R‑1, à la page 3 sur 7. Le document est intitulé [TRADUCTION] « Foyers de soins de longue durée et foyers pour personnes âgées — Budget approuvé et tarif journalier ».

[11]          Les paiements sont décrits dans une lettre de NSHDC à l'avocat de High‑Crest du 22 avril 2009; cette lettre figure à l'onglet 29 de la pièce A‑3.

[12]          Onglet 6 de la pièce A‑2.

[13]          High‑Crest avait à faire un choix entre deux modèles de détermination des coûts pour fixer les coûts des soins de santé. Elle a opté pour le modèle appelé [TRADUCTION] « modèle traditionnel majoré du coût des aides aux soins continus directs ».

[14]          Article 5.4 de la politique sur le financement des postes budgétaires protégés, onglet 6, page 257 de la pièce A‑2.

[15]          À l'instar du coût des soins de santé, le coût des services d'hébergement était fondé sur le modèle traditionnel majoré du coût des aides aux soins continus directs.

[16]          Article 5.3 de la politique sur le financement des postes budgétaires non protégés, onglet 6, page 254 de la pièce A‑2.

[17]          Article 6.2 de la politique sur les provisions pour renouvellement des immobilisations, onglet 6, page 328 de la pièce A‑2.

[18]          Paragraphe 6.2.9 de la politique sur les provisions pour renouvellement des immobilisations, onglet 6, page 329 de la pièce A‑2.

[19]          Paragraphes 4.1.2 et 4.1.3 de la politique sur les frais perçus des résidants, onglet 6, page 128 de la pièce A‑2.

[20]          Paragraphe 4.3.4 de la politique sur les frais perçus des résidants, qui figure à l'onglet 6, page 130 de la pièce A‑2. Certaines personnes visées par des ententes ou par d'autres lois ou relevant d'autres organismes gouvernementaux sont tenues de payer la totalité du tarif journalier qui s'applique à l'établissement de soins de longue durée particulier : paragraphes 4.2.1 et 4.2.2 de la politique sur les frais perçus des résidants, qui figure à l'onglet 6, page 129 de la pièce A‑2.

[21]          Paragraphe 4.3.3 de la politique sur les frais perçus des résidants, onglet 6, page 130 de la pièce A‑2.

[22]          M. Stephenson a parlé de frais d'hébergement de 104 $ par jour pour les résidants de l'adjonction, ce qui semble être les frais d'hébergement types qui s'appliquent à la période d'un an commencée le 1er novembre 2013. Le montant réel des frais d'hébergement types qui s'applique à une année donnée n'a aucune incidence.

[23]          Paragraphe 5.2.1 de la politique sur les frais perçus des résidants, onglet 6, page 131 de la pièce A‑2.

[24]          Lignes 2 à 6 de la page 45 de la transcription.

[25]          Lignes 7 à 12 de la page 45 de la transcription.

[26]          Pièce A‑4.

[27]          Un immeuble d'habitation à logements multiples est un immeuble d'habitation, à l'exclusion d'un immeuble d'habitation en copropriété, qui contient au moins deux habitations.

[28]          Les loyers résidentiels sont généralement exonérés de la TPS en vertu de la partie I de l'annexe V de la LTA. C'est donc dire que si le fardeau du paiement de la TPS n'était pas imposé au constructeur, il n'y aurait aucun montant de TPS à payer à l'égard de l'adjonction.

[29] L'alinéa 191.1(2)e) a été modifié pour les fournitures à soi‑même visées par les paragraphes 191(1) à (4) effectuées à partir du 1er avril 2013.

[30] Je signale que le texte de l'alinéa 191.1(2)c) fait référence à une « subvention relativement à l'immeuble d'habitation », ce qui englobe l'ensemble de l'établissement et pas seulement l'adjonction.

[31]          La Cour d'appel fédérale a reconnu la portée de la définition d'une « habitation » dans l'arrêt North Shore Health Region c. Canada, 2008 CAF 2, au paragraphe 47.

[32]          La définition d'un « bien », au paragraphe 123(1) de la LTA, n'inclut pas l'argent.

[33]          Les personnes morales dont la totalité, ou presque, des activités consistent à exercer des activités commerciales ou à fournir des services financiers, ou à faire les deux, sont exclues.

[34]          Dans l'arrêt Entreprises Ludco Ltée c. Canada, [2001] 2 R.C.S. 1082, 2001 CSC 62, la Cour suprême du Canada est arrivée à une conclusion différente au sujet du critère de la « fin » que l'on trouve au sous‑alinéa 20(1)c)(i) de la Loi de l'impôt sur le revenu (Canada). Cependant, cette disposition était axée sur la « fin » visée par la contribuable (et non par une autre partie) et, outre le fait qu'elle faisait partie d'une loi différente, son contexte et sa fin étaient tout à fait différents.

[35]          Précité, note de bas de page no 34, au paragraphe 54.

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