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Dossiers : 2001-4533(IT)G

2001-4534(GST)G

ENTRE :

SANDRO (ALEX) SCAVUZZO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Appels entendus avec les appels de Jack Scavuzzo (2001-4535(IT)G) et 2001-4536(GST)G) les 27 et 28 avril 2004, le 22 novembre 2004, du 11 au 13 juillet 2005, les 3, 4, 5, 10, 11 et 12 août 2005 et le 30 janvier 2006, à Toronto (Ontario).

Devant : L'honorable juge en chef D. G. H. Bowman

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Stevan Novoselac

Avocate de l'intimée :

Me Marie-Thérèse Boris

JUGEMENT

          La Cour ordonne que les appels à l'encontre des cotisations établies en vertu de l'article 227.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu et de l'article 323 de la Loi sur la taxe d'accise soient accueillis et que les cotisations soient annulées.

          Les dépens de l'appelant et de Jack Scavuzzo pour les quatre appels sont fixés à 275 000 $ pour les deux appelants.

Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de février 2006.

« D. G. H. Bowman »

Le juge en chef Bowman

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de décembre 2006.

Yves Bellefeuille, réviseur


Dossiers : 2001-4535(IT)G

2001-4536(GST)G

ENTRE :

JACK SCAVUZZO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Appels entendus avec les appels de Sandro Alex Scavuzzo (2001-4533(IT)G) et 2001-4534(GST)G) les 27 et 28 avril 2004, le 22 novembre 2004, du 11 au 13 juillet 2005, les 3, 4, 5, 10, 11 et 12 août 2005 et le 30 janvier 2006, à Toronto (Ontario).

Devant : L'honorable juge en chef D. G. H. Bowman

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Stevan Novoselac

Avocate de l'intimée :

Me Marie-Thérèse Boris

JUGEMENT

          La Cour ordonne que les appels à l'encontre des cotisations établies en vertu de l'article 227.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu et de l'article 323 de la Loi sur la taxe d'accise soient accueillis et que les cotisations soient annulées.

          Les dépens de l'appelant et de Sandro (Alex) Scavuzzo pour les quatre appels sont fixés à 275 000 $ pour les deux appelants

Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de février 2006.

« D. G. H. Bowman »

Le juge en chef Bowman

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de décembre 2006.

Yves Bellefeuille, réviseur


Référence : 2006CCI90

Date : 20060214

Dossiers : 2001-4533(IT)G

2001-4534(GST)G

ENTRE :

SANDRO (ALEX) SCAVUZZO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

ET

Dossiers : 2001-4535(IT)G

2001-4536(GST)G

ENTRE :

JACK SCAVUZZO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DE L'ORDONNANCE RELATIVE AUX DÉPENS

Le juge en chef Bowman

[1]      À la fin des motifs de mon jugement, j'ai précisé que j'attendrais de recevoir des observations sur les dépens avant de signer un jugement formel. La raison initiale de penser qu'il pourrait y avoir des dispositions spéciales pour les dépens est qu'au deuxième jour du procès, l'ancien avocat des appelants, Me Irving, a conclu qu'il se trouvait en situation de conflit d'intérêts et qu'il devait se retirer en tant qu'avocat. Il a donc fallu ajourner l'audience. À la reprise de l'instance, le nouvel avocat des appelants, Me Novoselac, a présenté une requête en modification de l'avis d'appel pour soulever un certain nombre de nouvelles questions. L'intimée s'est opposée à la requête, mais j'y ai fait droit et j'ai dit que la Couronne ne subissait aucun préjudice qui ne pouvait pas être compensé par des dépens. En raison de cette observation, qui semblait anodine, la question des dépens a pris des proportions inattendues et a été débattue en profondeur le 30 janvier 2006.

[2]      L'avocat des appelants cherche essentiellement à ce que les dépens soient adjugés sur une base procureur-client. Avant que je me penche sur cette demande, je devrais mentionner deux ou trois points pertinents :

(1)      « Les dépens comme entre procureur et client ne sont généralement accordés que s'il y a eu conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante d'une des parties. » (Young c. Young, [1993] 4 R.C.S. 3, à la page 134.)

(2)      Il peut être tenu compte de la conduite adoptée par une personne avant le début de l'instance lorsqu'il est question de la taxation des dépens : Merchant c. La Reine, no 95-3729(IT)G, 14 avril 1998, 98 D.T.C. 1734, conf. par 2001 CAF 19, 2001 D.T.C. 5245 (C.A.F.), Banque de Nouvelle-Écosse c. Fraser, 2001 CAF 267, 12 C.C.E.L. (3e) 1 (C.A.F.). Dans l'affaire Lau c. La Reine, no 2000-1594(GST)G, 21 janvier 2003, [2004] 1 G.S.T.C. 5-3 (conf. par la C.A.F., 2004 CAF 10, [2004] G.S.T.C. 5), j'ai adjugé les dépens au-delà du tarif en partie à cause de la conduite adoptée par l'agent de recouvrement avant que l'affaire soit portée devant la Cour.

(3)      La Cour jouit d'un vaste pouvoir discrétionnaire lorsqu'il s'agit d'adjuger les dépens. L'article 147 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) (les « Règles » ) est ainsi libellé :

Règles générales

147(1) Sous réserve des dispositions de la Loi, la Cour a entière discrétion pour adjuger les frais et dépens aux parties à une instance, pour en déterminer la somme, pour les répartir et pour désigner les personnes qui doivent les supporter.

(2)         Des dépens peuvent être adjugés à la Couronne ou contre elle.

(3)         En exerçant sa discrétion conformément au paragraphe (1), la Cour peut tenir compte :

a) du résultat de l'instance;

b) des sommes en cause;

c) de l'importance des questions en litige;

d) de toute offre de règlement présentée par écrit;

e) de la charge de travail;

f) de la complexité des questions en litige;

g) de la conduite d'une partie qui aurait abrégé ou prolongé inutilement la durée de l'instance;

h) de la dénégation d'un fait par une partie ou de sa négligence ou de son refus de l'admettre, lorsque ce fait aurait dû être admis;

i) de la question de savoir si une étape de l'instance,

(i) était inappropriée, vexatoire ou inutile,

(ii) a été accomplie de manière négligente, par erreur ou avec trop de circonspection;

j) de toute autre question pouvant influer sur la détermination des dépens.

(4)         La Cour peut fixer la totalité ou partie des dépens en tenant compte ou non du tarif B de l'annexe II et peut adjuger une somme globale au lieu ou en sus des dépens taxés.

(5)         Nonobstant toute autre disposition des présentes règles, la Cour peut, à sa discrétion :

a) adjuger ou refuser d'adjuger les dépens à l'égard d'une question ou d'une partie de l'instance particulière;

b) adjuger l'ensemble ou un pourcentage des dépens taxés jusqu'à et y compris une certaine étape de l'instance;

c) adjuger la totalité ou partie des dépens sur une base procureur-client.

(6)         La Cour peut, dans toute instance, donner des directives à l'officier taxateur, notamment en vue :

a) d'accorder des sommes supplémentaires à celles prévues pour les postes mentionnés au tarif B de l'annexe II;

b) de tenir compte des services rendus ou des débours effectués qui ne sont pas inclus dans le tarif B de l'annexe II;

c) de permettre à l'officier taxateur de prendre en considération, pour la taxation des dépens, des facteurs autres que ceux précisés à l'article 154.

(7)         Une partie peut :

a) dans les trente jours suivant la date à laquelle elle a pris connaissance du jugement;

b) après que la Cour a décidé du jugement à prononcer, au moment de la présentation de la requête pour jugement,

que le jugement règle ou non la question des dépens, demander à la Cour que des directives soient données à l'officier taxateur à l'égard des questions visées au présent article ou aux articles 148 à 152 ou qu'elle reconsidère son adjudication des dépens.

[3]      L'avocat des appelants a fait de sérieuses allégations au sujet de la conduite de l'intimée. En fait, la conduite répréhensible alléguée était celle du ministre du Revenu national, quoique l'avocate de l'intimée était aussi visée dans une certaine mesure. Les allégations étaient contenues dans un résumé qui était ainsi libellé :

[TRADUCTION]

PARTIE I - RÉSUMÉ

1.          Contrairement à son devoir de faire preuve de la plus grande bonne foi à l'égard des appelants, l'intimée a adopté une conduite répréhensible tout au long de l'instance. J'estime donc avec égards que les appelants ne devraient pas avoir à supporter leurs importants dépens dans ces circonstances et qu'il serait dans le meilleur intérêt de la justice qu'ils soient indemnisés de la totalité de leurs dépens.

2.          Voici quelques exemples de la conduite répréhensible de l'intimée :

a)          se servir de cotisations sous-jacentes établies contre Resici Group Inc. ( « Resici » ) pour justifier les cotisations dérivées établies à l'égard des appelants, même si elle a plus tard admis que les cotisations sous-jacentes étaient non fondées et illégales;

b)          faire des allégations non fondées et non corroborées de conduite criminelle au sujet des appelants;

c)          ne pas respecter sa propre politique;

d)          ne pas tenir compte du fait important que l'appelant Jack Scavuzzo ( « Jack » ) avait démissionné de son poste d'administrateur plus de deux ans avant que la cotisation soit établie à son égard;

e)          établir des cotisations et prendre des mesures de recouvrement en utilisant, de pleine force, une approche coercitive embrouillée et incohérente;

f)           obtenir et faire exécuter une ordonnance de recouvrement de protection en se fondant sur un affidavit qui n'indiquait pas que Jack avait quitté son poste d'administrateur et omettre ensuite de respecter les modalités de l'ordonnance de recouvrement de protection;

g)          formuler des hypothèses manifestement fausses dans ses réponses aux avis d'appel et, dans ces mêmes réponses, négliger de formuler des hypothèses véridiques;

h)          employer régulièrement des tactiques d'obstruction dans le but d'entraver ou d'empêcher la résolution équitable des appels sur le fond;

i)           rejeter l'offre de règlement des appelants, qui a été faite aussitôt que les documents nécessaires ont été produits, et ce, seulement après que la Cour ait rendu une ordonnance à ce sujet;

j)           proposer, en réponse à l'offre de règlement des appelants, de régler les questions en litige au moyen d'une entente selon laquelle l'intimée garderait tous les montants et tous les biens saisis de Jack en vertu de l'ordonnance de recouvrement de protection qui était entachée d'irrégularités;

k)          poursuivre les appels même s'ils étaient manifestement sans fondement;

l)           appliquer à mauvais escient les paiements reçus de Resici;

m)         poursuivre les appels, même après avoir apparemment détruit les documents à l'appui des cotisations établies à l'égard de 121 et de 132 (qui, dit-on, ont été utilisées pour justifier les cotisations sous-jacentes établies contre Resici) et ne révéler cet élément d'information qu'à la veille du procès;

n)          prolonger inutilement la durée de l'instance.

3.          Nous estimons que les faits justifient nettement que la Cour exerce son pouvoir discrétionnaire pour adjuger les dépens aux appelants sur une base procureur-client.

[4]      Malgré l'argumentation très énergique de Me Novoselac, je ne suis pas disposé à adjuger les dépens sur une base procureur-client. La conduite de la Couronne n'est pas suffisamment répréhensible, scandaleuse ou outrageante pour justifier une telle adjudication. En date du 31 décembre 2005, les honoraires facturés, y compris les débours et la TPS, s'élevaient à 549 738 $. Ce montant comprend des « frais reportés » de 189 654,33 $ (honoraires calculés à l'heure qui ne sont facturés que si les appelants obtiennent gain de cause dans leurs appels) et une prime de 107 000 $.

[5]      Je n'ai pas calculé les dépens partie-partie. Ils pourraient s'élever à environ 50 000 $.

[6]      Je crois toutefois, compte tenu d'un certain nombre de facteurs que je mentionnerai ci-après, que les appelants, et plus particulièrement M. Jack Scavuzzo, ont droit à des dépens au-delà des dépens partie-partie prévus par le tarif. Je vais toutefois commencer par me pencher sur les allégations de conduite répréhensible faites par l'avocat des appelants. Je suivrai l'ordre des paragraphes du résumé reproduit ci-dessus :

a)        En ce qui concerne les cotisations sous-jacentes établies contre Resici qui constituaient le fondement des cotisations dérivées à l'égard des appelants, il n'est pas [TRADUCTION] « admis que les cotisations sous-jacentes étaient non fondées et illégales » . La Cour a conclu qu'elles étaient erronées, et, par conséquent, elles ont été annulées. Étant donné qu'aucun avis d'opposition n'avait été signifié, il n'était pas déraisonnable que la direction du recouvrement agisse en présumant que les contribuables ne s'opposaient pas aux cotisations et, par conséquent, qu'elle établisse les cotisations dérivées. Je ne me souviens pas que l'un des avocats ou un témoin ait admis que les cotisations étaient « non fondées et illégales » , bien que le répartiteur ait admis que les « cotisations solidaires » n'étaient pas conformes à la Loi.

b)       Aucune allégation de conduite criminelle n'a été faite contre les appelants. L'affirmation selon laquelle des allégations de conduite criminelle avaient été faites contre les appelants était fondée sur le raisonnement quelque peu douteux voulant qu'étant donné que les sociétés pourraient être poursuivies pour avoir omis de faire des versements, les administrateurs pourraient l'être également. Cette logique est fallacieuse. Il n'a jamais été dit que des poursuites criminelles contre les sociétés ou les administrateurs étaient envisagées.

c)        Je dois présumer que le répartiteur pensait, à tort, que la politique de l'Agence du revenu du Canada ( « ARC » ) relativement aux administrateurs de fait était respectée. Le fait qu'un fonctionnaire de l'ARC ait mal appliqué une politique de l'organisme n'est pas à lui seul une raison d'adjuger les dépens sur une base procureur-client.

d)       Je prévois tenir compte du fait que la démission de Jack Scavuzzo n'a pas été prise en considération.

e)        Il y a des incohérences dans l'approche adoptée par le ministre, mais ces incohérences ne sont pas inacceptables au point de justifier l'adjudication des dépens sur une base procureur-client. Il est indéniable que ces incohérences ont ajouté au fardeau imposé aux appelants, ce dont je vais tenir compte au moment d'adjuger les dépens.

f)        À mon avis, l'ordonnance de recouvrement de protection était arbitraire et oppressive, et l'omission de divulguer au juge que Jack avait démissionné de son poste est sans aucun doute un facteur dont je vais tenir compte, bien que l'avocate de l'intimée ait signalé qu'aucune requête en annulation de l'ordonnance de recouvrement de protection n'avait été présentée.

g)        Il y a une distinction essentielle entre le fait d'alléguer des hypothèses qui sont fausses et le fait d'arguer que le ministre a allégué des hypothèses de fait qu'il n'a pas réellement faites. Dans la présente affaire, le ministre a présumé à tort que Jack Scavuzzo était administrateur. L'argument était fondé sur une fausse hypothèse sur laquelle le ministre s'était fondé au moment de prendre des mesures. C'était l'hypothèse, et non l'acte de procédure, qui était fausse. Le fait d'arguer que le ministre a fait des hypothèses de fait qu'il n'a pas réellement faites est répréhensible et doit être sanctionné dans l'adjudication des dépens. Toutefois, cela n'est pas ce qui s'est produit dans la présente affaire.

h)        Cette plainte vise l'avocate de l'intimée. Je ne pense pas que Me Boris ait fait de l'obstruction. Comme d'habitude, elle a défendu la position du gouvernement avec vigueur, mais elle a toujours respecté les règles.

i)         Il n'y a aucun doute que les appelants ont présenté une offre de règlement à l'intimée et que l'offre a été rejetée. Si l'offre avait été acceptée, nous n'aurions pas eu ce long et coûteux procès. Il n'y a pas de règle inflexible sur l'incidence des offres de règlement. L'alinéa 147(3)d) des Règles prévoit simplement que la Cour peut tenir compte des offres de règlement, ce que j'ai l'intention de faire.

j)         La contre-offre comportait des lacunes, mais elle n'était pas répréhensible. Une concession faite dans le contexte des négociations en vue d'arriver à un règlement ne peut pas être considérée comme un aveu.

k)        Il se trouve que les appelants ont eu gain de cause dans la présente affaire. Toutefois, il est exagéré de dire que la cause de l'intimée était « manifestement sans fondement » . Par exemple, la question de savoir si la décision Gaucher c. La Reine, no A-275-00, 16 novembre 2000, 2000 D.T.C. 6678, s'appliquait aux cotisations fondées sur la responsabilité des administrateurs avait été soulevée. Je crois fermement que la réponse à cette question est oui, mais d'autres juges ne partagent pas mon opinion, et les avis d'appel qui ont été déposés initialement n'indiquaient rien au sujet de la validité des cotisations sous-jacentes établies contre Resici.

l)         Il ressort que les paiements auraient dû être appliqués en réduction des obligations de 1212726 Ontario Ltd. ( « 121 » ) et de 1328156 Ontario Ltd. ( « 132 » ). Malgré cela, l'agent de recouvrement ne savait pas à ce moment-là qu'il serait jugé que les cotisations établies à l'égard de Resici étaient inexactes. En fait, les cotisations établies à l'égard de Resici n'étaient pas contestées. De plus, il n'est pas du tout clair que la règle selon laquelle un débiteur peut demander qu'un paiement soit appliqué en réduction d'une obligation en particulier s'applique aux paiements faits par un tiers en vertu d'une saisie-arrêt. Peut-être que oui. La question n'a pas été débattue. Toutefois, le défaut de deviner la bonne réponse à cette question juridique obscure ne justifie pas une adjudication exceptionnelle des dépens.

m)       Lorsque aucune opposition n'a été présentée relativement à des cotisations, on ne peut pas reprocher à l'ARC d'avoir détruit les dossiers selon sa procédure habituelle. De plus, les appelants n'ont subi aucun préjudice relativement au fait qu'il était impossible de trouver les cotisations établies à l'égard de 121 et de 132, et l'affaire n'a pas été tranchée en fonction de ce point.

[7]      Il est évident que je n'ai pas l'intention d'adjuger les dépens sur la base procureur-client. Malgré cela, selon les arguments présentés, je conclus que des dépens supplémentaires peuvent être adjugés.

[8]      Les dépens des appelants s'élèvent à 549 738,45 $, ce qui comprend un montant de 326 566 $, dans lequel sont compris des frais reportés de 189 654 $ (montant facturable qui n'est pas immédiatement facturé, mais qui le sera si les appelants obtiennent gain de cause) et une prime de 107 000 $ (une prime si les appelants ont gain de cause, conformément à l'entente d'honoraires conditionnels).

[9]      Voici, entre autres, les facteurs dont je tiens compte pour adjuger des dépens supplémentaires :

a)        Le niveau de difficulté, la complexité et l'importance des affaires. Les affaires étaient extrêmement complexes sur les plans juridique et factuel. Voici certaines des questions juridiques en cause :

(i) les décisions incompatibles rendues dans les affaires Zaborniak c. La Reine, 2004 CCI 560, et Gaucher, précitée;

(ii) le concept d'une société mandataire;

(iii) la question difficile des administrateurs de fait;

(iv) les nouvelles notions de « cotisations solidaires » et d' « employeur réputé » proposées par le ministre.

De plus, les faits relatifs aux activités de Jack et de Sandro étaient complexes, de même que la pratique commerciale de constituer en société des sociétés employeuses distinctes.

b)       Le montant en cause était considérable. Il s'agissait d'un montant de plus de 2 000 000 $.

c)        Il ne s'agissait pas d'une seule affaire avec un seul appelant. Il y avait deux appelants qui avaient chacun deux appels, lesquels comprenaient de nombreuses questions en litige.

d)       Après le retrait du premier avocat des appelants et le règlement de la question très controversée de la modification des avis d'appel, il a fallu procéder à la communication d'un grand nombre de documents. Étant donné que la Couronne semblait peu disposée à produire plus que ce qui était strictement nécessaire, j'ai rendu une ordonnance de communication intégrale en vertu de l'article 82 des Règles. L'ordonnance a donné lieu à la production d'une multitude de documents qui ont aidé la cause des appelants. Sans ces documents, les appelants auraient été sérieusement désavantagés. Toutefois, il a fallu énormément de temps pour examiner la nouvelle documentation.

e)        Une ordonnance de recouvrement de protection a été rendue à l'égard de M. Scavuzzo en raison d'un affidavit qui n'indiquait pas qu'il avait démissionné de son poste d'administrateur. Les prestations d'invalidité de Jack ainsi qu'un bateau et d'autres biens ont été saisis et, à ce que je sache, le gouvernement n'a toujours pas restitué les éléments saisis. Rien ne peut justifier que l'on mette cet homme âgé et malade dans une situation aussi infernale. Je ne saurais trop exprimer ma désapprobation à l'égard du comportement du gouvernement.

f)        Une offre de règlement a été faite. Selon celle-ci, les appels auraient été accueillis, les cotisations auraient été annulées et les appelants auraient reçu un remboursement partiel de leurs dépens. Cette offre aurait dû être acceptée. Selon la contre-offre, le gouvernement aurait gardé ce qu'il avait saisi, mais n'aurait pris aucune autre mesure de recouvrement. Quel que soit le droit du gouvernement de proposer des solutions arbitraires pour le règlement des différends, la contre-offre n'avait aucun fondement juridique ou factuel.

g)        La somme des frais (facturés et reportés) engagés après la facture du 30 juin 2005 (à peu près la date à laquelle l'offre de règlement a été faite) est d'environ 191 600 $. Ce montant ne comprend pas la prime de 107 000 $. Si nous ajoutons la prime, nous obtenons un montant d'environ 300 000 $.

[10]     Après avoir tenu compte de tout ce qui précède, je fixe les dépens à adjuger aux appelants à 275 000 $. Il s'agit d'un remboursement partiel de leurs dépenses. Le montant a été établi en partie en fonction des montants en litige, du niveau de difficulté, de la complexité et de l'importance des affaires, des dépens engagés à partir du moment où l'offre de règlement a été faite, du comportement inhabituel lors de l'obtention de l'ordonnance de recouvrement de protection et des autres facteurs que j'ai exposés ci-dessus. Le montant correspond à environ 50 % du montant total facturé. Je sais qu'un certain allègement peut être obtenu en vertu de
l'alinéa 60o) de la Loi de l'impôt sur le revenu, au moins dans la mesure où les appels se rapportent à cette loi.

Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de février 2006.

« D. G. H. Bowman »

Le juge en chef Bowman

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de décembre 2006.

Yves Bellefeuille, réviseur


RÉFÉRENCE :

2006CCI90

NOS DES DOSSIERS :

2001-4533(IT)G et 2001-4534(GST)G

2001-4535(IT)G et 2001-4536(GST)G

INTITULÉ :

Sandro (Alex) Scavuzzo

et Jack Scavuzzo c. Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATES DE L'AUDIENCE :

Les 27 et 28 avril 2004; le 22 novembre 2004; du 11 au 13 juillet 2005; les 3, 4, 5, 10, 11 et 12 août 2005 et le 30 janvier 2006

MOTIFS DE L'ORDONNANCE RELATIVE AUX DÉPENS :

L'honorable D.G.H. Bowman, juge en chef

DATE DES MOTIFS DE L'ORDONNANCE :

Le 14 février 2006

COMPARUTIONS :

Avocat des appelants :

Me Stevan Novoselac

Avocate de l'intimée :

Me Marie-Thérèse Boris

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour les appelants :

Nom :

Me Stevan Novoselac

Cabinet :

Cassels, Brock & Blackwell

Avocats

Scotia Plaza

Bureau 2100, 40, rue King Ouest

Toronto (Ontario) M5H 3C2

Pour l'intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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