Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Dossiers : 2014-895(IT)G

2014-896(IT)G

ENTRE :

SIFTO CANADA CORP. et

SIFTO CANADA CORP.

(À TITRE DE SOCIÉTÉ REMPLAÇANT SIFTO CANADA INC.),

appelantes,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appels entendus les 11, 12, 13 et 14 juillet 2016, à Toronto (Ontario).

Observations écrites reçues le 8 août 2016 et le 9 septembre 2016

Devant : L’honorable juge John R. Owen


Comparutions :

Avocats des appelantes :

Me Al Meghji, Me Ian MacGregor,

Me Al-Nawaz Nanji et Me Ilana Ludwin

 

Avocates de l’intimée :

Me Naomi Goldstein,

Me Alexandra Humphrey, Me Rishma Bhimji et Me Alisa Apostle

 

JUGEMENT

Conformément aux motifs du jugement ci-joints, les appels relatifs à la question décrite au paragraphe 3 des motifs du jugement ci-joints sont accueillis et les nouvelles cotisations établies sous le régime de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition prenant fin le 31 décembre 2004, le 23 novembre 2005, le 31 décembre 2005 et le 31 décembre 2006 (les « années d’imposition visées »), dont les avis sont datés du 1er août 2012, sont renvoyées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, étant entendu que les revenus que les appelantes ont tirés de la vente de sel gemme à la North American Salt Company au cours des années d’imposition visées doivent être déterminés de façon à ce qu’ils concordent avec les accords (définis au paragraphe 166 des motifs du jugement ci-joints). Les parties auront 30 jours à compter de la date du jugement rendu dans les présents appels pour présenter, au sujet des dépens, des observations d’une longueur maximale de dix pages.

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de mars 2017.

« J.R. Owen »

Le juge Owen

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de juin 2018.

Mario Lagacé, jurilinguiste


Référence : 2017 CCI 37

Date : 20170310

Dossiers : 2014-895(IT)G

2014-896(IT)G

ENTRE :

SIFTO CANADA CORP. et

SIFTO CANADA CORP.

(À TITRE DE SOCIÉTÉ REMPLAÇANT SIFTO CANADA INC.),

appelantes,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Owen

I. Introduction

[1]  Les présents motifs ont trait à une question qui a été soulevée dans les appels que Sifto Canada Corp. [1] (l’« appelante ») a interjetés à l’encontre de nouvelles cotisations datées du 1er août 2012 (collectivement, les « nouvelles cotisations »), relativement à ses années d’imposition prenant fin le 31 décembre 2004, le 23 novembre 2005, le 31 décembre 2005 et le 31 décembre 2006 (collectivement, les « années d’imposition visées »). Les appels relatifs à cette unique question ont été instruits sur preuve commune. La nature de la question est telle que, si je me prononce en faveur des appelantes, les appels relatifs aux nouvelles cotisations doivent être accueillis.

II. La question en litige

[2]  Les appels soulèvent trois questions concernant les années d’imposition visées : 1) si le ministre du Revenu national (le « ministre ») était en droit d’établir les nouvelles cotisations; dans l’affirmative, 2) si le prix de transfert pris en compte dans les nouvelles cotisations était exact; et 3) si le ministre était en droit d’imposer des pénalités en application du paragraphe 247(3) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR »).

[3]  À la demande écrite des parties, la Cour a ordonné que ces questions soient scindées conformément au paragraphe 171(2) de la LIR et que la première fasse l’objet d’une audience distincte. Les parties ont formulé cette question en ces termes :

[TRADUCTION]

Était-il interdit au ministre d’établir les nouvelles cotisations du 1er août 2012 du fait d’un accord quelconque (dont l’existence est contestée), de la Convention fiscale Canada-États-Unis ou de la Loi de l’impôt sur le revenu [2] ?

[4]  Les circonstances à l’origine de cette question peuvent se résumer brièvement comme suit. L’appelante a déterminé que, pour les années 2002 à 2006, elle avait sous-estimé les revenus qu’elle avait tirés de la vente de sel gemme à une société liée résidant aux États-Unis. Pour corriger la situation, elle a fait à l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») une divulgation volontaire qui ajustait ses revenus à la hausse pour ces années-là. L’ARC a accepté l’ajustement à la hausse des revenus qui était demandé dans la divulgation volontaire et, de ce fait, une nouvelle cotisation a été établie à l’endroit de l’appelante pour ses années d’imposition 2002 à 2006. L’appelante et une société américaine liée se sont ensuite adressées à leurs autorités compétentes respectives pour demander une réduction correspondante des revenus reconnus aux États-Unis. Les autorités compétentes ont conclu deux accords qui ont été constatés dans deux lettres distinctes, et l’autorité compétente canadienne a demandé à l’appelante de souscrire aux conditions de ces lettres, ce qu’elle a fait. L’ARC a par la suite procédé à une vérification de l’appelante et établi une nouvelle cotisation pour les années d’imposition visées de façon à augmenter davantage les revenus que l’appelante avait tirés de la vente de sel gemme à la société américaine liée.

III. Les faits

A. L’exposé conjoint des faits (partiel)

[5]  Au début de l’audience, les parties ont produit un exposé conjoint des faits (partiel) (l’« ECF ») et un recueil conjoint de documents, comprenant deux volumes à reliure spirale (collectivement, le « RCD »). Les faits exposés dans l’ECF sont reproduits à l’annexe A jointe aux présents motifs.

[6]  Le RCD n’incluait que les documents mentionnés dans l’ECF. Ce dernier indique ceci :

[TRADUCTION]

Les parties à la présente instance reconnaissent, pour les besoins de la présente instance uniquement, la véracité des faits qui suivent ainsi que l’authenticité des documents mentionnés dans l’exposé conjoint des faits (partiel), au sens où ce terme est défini dans les Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale).

Les parties ne reconnaissent pas la véracité du contenu des documents mentionnés dans l’exposé conjoint des faits (partiel) et peuvent contester l’exactitude de tout énoncé contenu dans ces documents.

B. Les témoins

[7]  Au début de l’audience, l’appelante a produit un rapport d’expert portant sur deux questions. J’ai rejeté ce rapport au motif que son contenu n’était ni pertinent, ni nécessaire [3] . L’appelante n’a appelé aucun témoin.

[8]  L’intimée a appelé quatre témoins. Le premier était M. Timothy R. Mertz, qui est le vice-président de la fiscalité à Compass Minerals International Inc. (« Compass »), la société mère indirecte de l’appelante et une société américaine cotée en bourse [4] .

[9]  Les trois autres témoins étaient M. Daniel Quinn, qui exerce les fonctions de gestionnaire au sein de la Section de la Procédure amiable – Arrangements préalables en matière de prix de transfert de la Division des services de l’autorité compétente (la « DSAC ») de l’ARC; M. Shaun Harkin, qui est vérificateur international principal à la Section de la Procédure amiable – Arrangements préalables en matière de prix de transfert de la DSAC; et M. Darryl Boychuk, qui est le directeur de la Section de la Procédure amiable – Dossiers techniques de la DSAC. J’appellerai parfois ces trois personnes les « témoins de l’ARC ».

[10]  M. Quinn et M. Harkin avaient une connaissance directe du dossier de l’appelante auprès de la DSAC et ils ont témoigné en conséquence. M. Boychuk n’avait pas une telle connaissance du dossier et n’a témoigné qu’au sujet des pratiques et des procédures de son groupe au sein de la DSAC.

[11]  Peu après que M. Quinn a commencé à témoigner, l’avocat de l’appelante s’est opposé au témoignage des témoins de l’ARC en disant que toute preuve de l’intention subjective de la DSAC/ARC ou de ses employés quant à ses rapports avec l’Internal Revenue Service (l’« IRS ») des États-Unis et avec l’appelante ne permettait pas de trancher la question de savoir s’il existait des accords et, le cas échéant, de les interpréter. L’avocat a laissé entendre que, pour cette raison, les témoins de l’ARC ne devaient pas être autorisés à témoigner.

[12]  J’ai permis aux témoins de l’ARC de témoigner parce que je ne pouvais pas trancher la question de l’importance et de la pertinence avant d’entendre leur témoignage et que je traiterais, dans le contexte de mon analyse du droit applicable, de toute question relative à l’importance et à la pertinence de n’importe quel témoignage autorisé qui décrivait l’intention subjective. J’ai également indiqué à l’avocat de l’appelante qu’il lui était loisible de s’opposer à un témoignage en particulier comme bon lui semblait.

[13]  L’avocat de l’appelante s’est opposé à ce que M. Boychuk témoigne parce que celui-ci n’avait aucune connaissance personnelle du dossier de l’appelante que tenait la DSAC et que les pratiques et les procédures de la Section de  la Procédure amiable – Dossiers techniques de la DSAC n’étaient pas importantes ou pertinentes quant à la question en litige, car ce groupe n’était pas intervenu dans le dossier de l’appelante.

[14]  J’ai permis à M. Boychuk de témoigner parce que la question que les parties ont définie consiste, notamment, à savoir si le ministre et l’appelante ont conclu des accords et que son témoignage pourrait fort bien étoffer le contexte entourant les circonstances décrites par les deux premiers témoins de l’ARC. L’avocat de l’appelante a réitéré son opposition à plusieurs reprises lors du témoignage de M. Boychuk. Je traite de l’importance de ce témoignage à la section IV, intitulée « Analyse ».

C. Sommaire des faits

1) Contexte

[15]  L’appelante est une société canadienne résidant au Canada et une filiale indirecte de Compass. Elle possède et exploite une mine de sel à Goderich, en Ontario.

[16]  Au cours des années d’imposition visées, l’appelante a vendu environ 50 % de sa production annuelle de sel gemme à North American Salt Company (« NASC »), une société américaine résidant aux États-Unis pour l’application de la Convention fiscale Canada-États-Unis (la « Convention »). À l’époque de la vente de sel gemme, NASC était une filiale indirecte de Compass, de sorte que, pour l’application de l’article IX de la Convention, l’appelante et Compass étaient liées au sens du paragraphe (2) de cet article.

[17]  L’appelante a déclaré les ventes de sel gemme à NASC dans les déclarations de revenus T2 qu’elle a produites pour les années d’imposition visées. Compass a déclaré les achats de sel de NASC dans ses déclarations de revenus consolidées des États-Unis pour la période visée par les années d’imposition.

2) La divulgation volontaire

[18]  En 2006, M. Gary Gose a été embauché par Compass à titre de directeur de la fiscalité internationale, un poste subordonné à celui de M. Mertz [5] . M. Gose et d’autres personnes ont fait état de leurs doutes au sujet du prix de transfert du sel gemme que l’appelante vendait à NASC. Ce prix, semble-t-il, était fondé sur un rapport relatif au prix de transfert et les méthodes employées dans ce document étaient remises en question [6] . Quelque temps après 2006, KPMG a produit un nouveau rapport relatif au prix de transfert (le « RPT 2002-2006 »), qui analysait les ventes de sel gemme de l’appelante à NASC pour la période de 2002 à 2006. M. Mertz a appelé le RPT 2002-2006 le rapport de 2002 à 2006 [7] .

[19]  En raison du RPT 2002-2006, l’appelante et NASC sont arrivées à la conclusion que le prix de transfert servant à déterminer les revenus que l’appelante avait tirés de ses ventes de sel gemme à NASC durant les années d’imposition prenant fin au cours de la période de 2002 à 2006 était inférieur à un prix de pleine concurrence.

[20]  Par une lettre datée du 11 avril 2007, l’appelante a présenté une demande anonyme dans le cadre du Programme des divulgations volontaires (le « PDV ») de l’ARC. Cette dernière a accusé réception de cette demande par une lettre datée du 19 avril 2007. L’appelante a par la suite présenté une demande identifiée au PDV par une lettre datée du 13 août 2007, assortie d’une pièce jointe (la « demande soumise au PDV ») [8] .

[21]  Dans la demande soumise au PDV, l’appelante a divulgué l’existence d’une erreur comptable de 2 470 272 $ pour son année d’imposition 2006, de même que les montants de revenu supplémentaires indiqués ci-dessous, relativement à ses ventes de sel gemme à NASC pour ses années d’imposition prenant fin au cours de la période de 2002 à 2006 (la « période soumise au PDV ») :

Année d’imposition terminée le :

Revenus supplémentaires divulgués

31 décembre 2002

1 899 577 $

31 décembre 2003

4 206 408 $

31 décembre 2004

4 306 553 $

23 novembre 2005 et

31 décembre 2005 combinés

841 745 $

31 décembre 2006

2 082 036 $

[22]  La pièce jointe à la lettre de demande soumise au PDV est un document de 51 pages qui, sur la page d’accompagnement, comporte les indications suivantes : [TRADUCTION] « Prix de transfert Sifto Canada Inc. Présentation au Programme des divulgations volontaires Exercices 2002 à 2006 » (le « document soumis au PDV »). La section 2.3 de ce document indique ce qui suit :

[TRADUCTION]

Il y a essentiellement une seule opération à inclure dans le cadre du PDV : au cours de la période soumise au PDV, Sifto a agi comme simple extracteur de matière première (du sel) de sa mine de sel de Goderich et a vendu ce sel à NASC. La question consiste à savoir si Sifto a vendu ce sel à NASC à un prix de pleine concurrence et, sinon, dans quelle mesure le prix du sel doit être ajusté en vue de refléter le prix de pleine concurrence.

[23]  Les sections 3 à 9 du document soumis au PDV et ses trois annexes (environ 39 pages en tout), traitent du prix de pleine concurrence, la section 10 traite des pénalités, la section 11 traite de l’erreur comptable concernant 2006, la section 12 décrit les exigences relatives à une divulgation volontaire et la section 14 est intitulée [TRADUCTION] « Conclusion ». La section 13 décrit l’allègement demandé en ces termes :

[TRADUCTION]

Sifto demande :

1 Que l’ARC accepte les ajustements de ses revenus qu’elle propose dans chacune des années incluses dans la période soumise au PDV.

2 Que l’ARC lève ou supprime toutes les pénalités applicables relativement aux opérations susmentionnées.

[24]  Dans le cadre du processus relatif au PDV, l’appelante a produit des déclarations de revenus T2 modifiées pour ses années d’imposition prenant fin dans la période soumise au PDV (les « années d’imposition soumises au PDV ») de façon à tenir compte des ajustements de revenu indiqués dans la demande soumise au PDV.

[25]  Par une lettre datée du 13 mars 2008, le ministre a informé l’appelante que la demande soumise au PDV avait été acceptée et que l’on établirait de nouvelles cotisations pour les années d’imposition soumises au PDV en vue de prendre en compte les revenus supplémentaires divulgués dans la demande.

[26]  Les 21 et 22 avril 2008, le ministre a établi les avis de nouvelle cotisation à l’endroit de l’appelante pour les années d’imposition soumises au PDV (les « nouvelles cotisations de 2008 »). Les nouvelles cotisations de 2008 tenaient compte des revenus supplémentaires que l’appelante avait divulgués dans la demande soumise au PDV et qu’elle avait inclus dans les déclarations de revenus T2 modifiées produites pour les années d’imposition soumises au PDV. L’ARC n’a pas procédé à une vérification de l’appelante avant d’établir les nouvelles cotisations de 2008.

3) La demande présentée à l’autorité compétente canadienne

[27]  À cause des nouvelles cotisations de 2008, les revenus découlant de l’ajustement du prix de transfert du sel gemme que l’appelante avait vendu à NASC au cours de la période soumise au PDV ont été imposés deux fois : une fois au Canada et une fois aux États-Unis. Cette incidence d’une double imposition économique ne pouvait être éliminée que par une augmentation correspondante du coût pour NASC, aux fins de l’impôt américain, du sel que l’appelante lui avait vendu au cours de la période soumise au PDV. Étant donné que NASC faisait partie d’un groupe consolidé aux fins de l’impôt sur le revenu américain, l’ajustement de revenu à la baisse qui en découlerait se refléterait dans la déclaration de revenus consolidée de Compass. De ce fait, la contribuable américaine pertinente était Compass.

[28]  L’appelante a présenté une demande à l’autorité compétente canadienne (l’« ACC ») et Compass a présenté une demande à l’autorité compétente américaine (l’« ACA ») en vue d’obtenir un allègement à l’égard de la double imposition aux termes des articles IX et XXVI de la Convention. L’IRS est l’ACA [9] et le ministre est l’ACC. À l’époque des demandes, Mme Patricia Spice était la représentante autorisée du ministre [10] .

[29]  La demande que l’appelante a présentée à l’ACC (la « demande à l’ACC [11]  ») a été transmise par une lettre datée du 30 avril 2008. Une copie du document soumis au PDV était jointe à cette demande. Celle-ci indiquait en partie ce qui suit :

[TRADUCTION]

Nous écrivons pour demander l’aide de l’autorité compétente au nom de notre cliente, Sifto Canada Inc. (« Sifto »), au sujet d’avis de nouvelle cotisation qui ont été postés le 21 avril 2008, relativement à l’année d’imposition de Sifto ayant pris fin le 31 décembre 2006 et le 22 avril 2008, relativement aux années d’imposition de Sifto ayant pris fin les 31 décembre 2002, 2003 et 2004 ainsi que le 23 novembre 2005. Conformément au paragraphe 19 de la Circulaire d’information IC71-17R5 (la « CI »), nous fournissons les renseignements applicables de Sifto, en italiques, ci-après :

[…]

q) les opinions de la contribuable sur tout fondement possible qui permettrait de régler les questions en litige.

Par suite des avis de nouvelle cotisation susmentionnés, Sifto demande à l’autorité compétente canadienne de demander à l’autorité compétente américaine d’autoriser une déduction correspondante du revenu imposable de NASC de façon à éviter la double imposition [12] .

[En italique dans l’original.]

[30]  À l’époque où la demande a été présentée, M. Quinn exerçait les fonctions de gestionnaire à la DSAC. Il a attribué le dossier à un analyste de la DSAC, M. David Dougherty. Après que M. Dougherty eut quitté la DSAC, vers le 16 février 2009 [13] , le dossier a été attribué à M. Harkin, lui aussi analyste à la DSAC.

[31]  M. Quinn a décrit le rôle qu’il avait joué dans le dossier de l’ACC de l’appelante, ainsi que le rôle de l’ACC en général :

[TRADUCTION]

Mon rôle consistait à superviser les décisions prises, à signer des lettres, à assister à des conversations avec la contribuable et avec l’IRS, et à suivre tout simplement de façon régulière l’évolution du dossier [14] .

[…]

L’autorité compétente s’efforce de régler les questions fiscales qui sont contraires à nos conventions fiscales, comme la double imposition. Nous entrons en rapport avec d’autres autorités fiscales en vertu de l’article portant sur la procédure amiable et nous nous efforçons de régler les problèmes de double imposition avec d’autres autorités fiscales pour le compte de contribuables [15] .

[32]  M. Quinn a expliqué que l’ACC intervenait dans le dossier d’un contribuable une fois que celui-ci présentait une demande de procédure amiable (la « PA ») en vertu de l’une des conventions fiscales bilatérales du Canada. Il a confirmé que la demande à l’ACC avait été présentée aux termes de l’article XXVI de la Convention. Il a décrit de façon générale les mesures que prenait la DSAC en réponse à une demande de PA d’un contribuable :

[TRADUCTION]

Lorsque nous recevons une demande de PA, nous l’enregistrons dans notre système de cas et elle est attribuée à un groupe qui, ensuite, la confie à un analyste. Cet analyste détermine ensuite s’il y a un impôt contraire à la Convention et prend les mesures nécessaires pour accuser réception de la demande auprès du contribuable, entrer en contact avec l’autre autorité fiscale et s’efforcer de régler le problème [16] .

[33]  M. Quinn a décrit le processus suivi avec l’autorité compétente de l’autre pays dans le cadre de l’échange suivant avec l’avocate de l’intimée :

[TRADUCTION]

Q.  M. Quinn, pour poursuivre, pouvez-vous nous dire comment on discute entre deux pays des dossiers soumis à une autorité compétente?

R.  Oui. On en parle par téléphone, par lettre et dans des réunions en personne. Des réunions régulières ont lieu avec les autorités fiscales avec lesquelles nous faisons beaucoup de travail. Donc, dans le cas des États-Unis, nous rencontrions régulièrement l’IRS, deux ou trois fois par année. Et, à part cela, nous parlions avec eux au téléphone de façon régulière.

Q.  Et qui prend part à ces discussions?

R.  Pour Sifto ou en général?

Q.  En général, et ensuite pour Sifto.

R.  Eh bien, de façon générale, l’analyste chargé du dossier s’en occuperait au téléphone. S’il y avait une réunion, dans ce cas l’analyste et moi-même, à titre de gestionnaire, serions normalement présents à la réunion. Parfois je participais aux conférences téléphoniques. Et, du côté des États-Unis, ce serait la même chose. Ce serait l’analyste et le gestionnaire qui prendraient part aux réunions, et les conversations téléphoniques se dérouleraient habituellement entre les analystes seulement.

Q.  Et les contribuables participent-ils à ces discussions?

R.  Pas directement. Ils le font dans la mesure où ils doivent fournir des informations, comme ils le feraient dans le cadre de leur demande initiale. Et si les autorités fiscales ont des demandes de renseignements supplémentaires, là encore ils sont obligés de les fournir aux deux autorités fiscales. Et on les tient au courant de l’évolution des discussions.

Q.  Qu’arrive-t-il si les autorités compétentes arrivent à une entente?

R.  Si nous arrivons à une entente, nous la constatons généralement dans une lettre ou un échange de lettres. Nous avisons le contribuable de l’entente, des conditions de l’entente. Habituellement, nous le faisons de vive voix et, ensuite, nous envoyons habituellement une lettre décrivant l’entente en question. Et, par la suite, nous en faisons part à nos bureaux locaux. S’il y a une opposition en jeu, nous en faisons part à notre bureau des appels, et nous en faisons part aussi à notre Bureau des services fiscaux, notre Division de la vérification habituellement.

[34]  La demande de Compass à l’ACA (la « demande à l’ACA ») [17] a été présentée par une lettre datée du 13 mai 2008. Divers documents y étaient joints, dont des copies des nouvelles cotisations de 2008 ainsi qu’une copie du document soumis au PDV.

[35]  Par une lettre datée du 12 août 2008 que la DSAC a reçue le 29 août 2008 [18] , M. Barry Shott a demandé à Mme Spice de lui fournir [TRADUCTION] « les détails de [sa] position au sujet des ajustements afin qu’[il] puiss[e] évaluer la question en vue d’envisager un allègement à l’égard de la double imposition économique ». À l’époque, M. Shott était l’autorité compétente des États-Unis, Commissaire adjoint (Affaires internationales), Grandes et moyennes entreprises. La lettre portait l’en‑tête du département du Trésor, IRS.

[36]  En contre-interrogatoire, M. Quinn a admis que l’ACC savait que l’IRS effectuerait une évaluation. Cependant, il a évité l’affirmation selon laquelle l’évaluation était celle de la position du Canada au sujet du prix de transfert du sel gemme que l’appelante avait vendu à NASC au cours de la période soumise au PDV. Il a plutôt laissé entendre que l’ACA avait besoin de confirmer que l’ARC avait établi une nouvelle cotisation à l’endroit de l’appelante, ainsi qu’il était indiqué dans la demande que Compass avait soumise à l’ACA [19] .

[37]  Dans deux lettres qu’elle a envoyées à M. Shott en date du 20 novembre 2008 et du 16 février 2009 [20] respectivement, Mme Spice décrit de façon générale les circonstances qui ont amené l’appelante à demander à l’autorité compétente un allègement en vertu de la disposition en matière de PA de la Convention :

[TRADUCTION]

La demande a pris naissance après qu’on a accepté Sifto dans le Programme des divulgations volontaires du Canada. L’ajustement concerne les opérations intersociétés de Sifto avec une partie liée, North American Salt Company, située à Overland Park, au Kansas, pour les années d’imposition prenant fin au cours de la période de 2002 à 2006.

[38]  Mme Spice écrit ensuite :

[Lettre du 20 novembre 2008]


[TRADUCTION]

Nous vous fournirons dans l’avenir rapproché des détails sur notre position au sujet de ces ajustements, dans le but d’accorder un allègement correspondant à l’égard de la double imposition économique.

[Lettre du 16 février 2009]

[TRADUCTION]

[…] Vous trouverez ci-joint notre exposé de position portant sur les nouvelles cotisations que l’ARC a établies à la suite de la divulgation volontaire.

Une fois que vous aurez eu l’occasion d’examiner cet exposé, veuillez communiquer avec Dan Quinn, qu’il est possible de joindre à […]

[39]  M. Dougherty a écrit la lettre du 20 novembre 2008 et M. Quinn l’a lue [21] . M. Quinn a écrit la lettre du 16 février 2009 et M. Dougherty a rédigé l’exposé de position qui y était joint [22] , lequel décrivait la position adoptée par l’appelante dans le document soumis au PDV.

[40]  M. Quinn a déclaré que l’ARC n’avait pas procédé à une vérification de l’appelante au sujet du prix de transfert et que l’exposé de position était [TRADUCTION] « essentiellement un sommaire de la divulgation volontaire de la contribuable » et qu’il était « fondé sur la divulgation volontaire de la contribuable [23]  ». M. Harkin a déclaré que l’exposé de position n’était pas « caractéristique » et que ce document « présent[ait]  la position de la contribuable en vue de l’examen de l’IRS [24]  ». M. Harkin a expliqué :

[TRADUCTION]

La position caractéristique d’une autorité compétente découlerait habituellement du contexte de la vérification et les vérificateurs de l’ARC auraient procédé à une analyse approfondie. Et l’exposé de position indiquerait davantage : « Ceci est notre opinion », ce qui veut dire à notre avis, de l’avis de l’autorité compétente. « Voici quel devrait être l’ajustement » [25] .

[41]  M. Harkin a rencontré les représentants de l’ACA le 22 octobre 2009 et il était disposé à présenter et à expliquer l’exposé de position à cette réunion [26] . Cependant, l’ACA a entrepris de discuter de la nature des divulgations volontaires et des ajustements proposés par les contribuables et, de ce fait, l’ACC [TRADUCTION] « n’a jamais réellement parlé des détails de l’exposé de position » avec l’ACA [27] . À la réunion, l’ACC n’a pas fait part d’une opinion sur les ajustements proposés par les contribuables [28] . La réunion s’est terminée par une indication que l’ACA ferait part ultérieurement à l’ACC de la manière dont il fallait traiter les ajustements proposés par les contribuables [29] .

[42]  L’ACA a effectivement communiqué de nouveau avec l’ACC le 11 mai 2010, quand Mme Indu Subbiah, une analyste de l’ACA [30] , a téléphoné à M. Harkin pour l’informer que l’ACA accorderait un allègement à l’égard de la double imposition, sous réserve d’une évaluation complémentaire de la série comparable [31] . On a demandé à M. Harkin quelle était l’ampleur des négociations avec l’ACA :

[TRADUCTION]

Q.  Quelle était l’ampleur des négociations que vous meniez avec l’IRS au sujet de la demande de PA de Sifto?

R.  Il n’y avait pas de négociations. J’ai utilisé le mot « négocié » dans cette entrée, l’entrée faite dans le SSAC [Système de suivi de l’autorité compétente], mais c’est – dans l’autorité compétente, habituellement chaque fois que nous rencontrons une autre autorité compétente, nous considérons cela comme une négociation. Nous ne faisons qu’employer ce mot, « négociation », mais un terme plus juste – souvent nous les rencontrons et nous ne négocions pas, nous parlons tout simplement de l’état des dossiers. Ou, dans certains cas, comme celui-ci, nous ne faisons que présenter une position. Cela veut dire que, dans ce dossier, il n’y a pas eu de véritable négociation du tout [32] .

[43]  L’ACA a par la suite souscrit aux ajustements faits par le Canada aux revenus de l’appelante pour toutes les années, sauf l’année d’imposition 2002. Le 10 novembre 2010, Mme Spice a écrit au successeur de M. Shott, M. Michael Danilack, et elle a décrit les conditions du règlement [33] . La lettre indique en partie ce qui suit :

[TRADUCTION]

La présente a pour but de confirmer le règlement que nos représentants ont récemment négocié dans le dossier susmentionné.

La double imposition est attribuable aux ajustements effectués à l’initiative de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») relativement à la vente de biens tangibles de Sifto à sa société mère américaine, North American Salt Company (« NASC »), pour les années d’imposition 2002 à 2006.

Les ajustements que l’ARC a effectués sont les suivants :

1)  ajustement des revenus d’exploitation de Sifto en vue d’obtenir un retour sur le coût total qui soit égal au point le plus bas des observations moyennes pondérées tirées des données d’entreprises comparables :

[…]

Selon les conditions du règlement de l’autorité compétente :

  1. L’Internal Revenue Service (« IRS ») accordera un allègement correspondant en autorisant NASC à réduire ses revenus pour les années d’imposition 2003 à 2006 de la manière suivante :

[…]

2.  L’IRS a autorisé NASC à rembourser à Sifto la somme de 11 090 756 $ US en franchise de toute retenue d’impôt américain […].

3.  Il est entendu que ce règlement ne vise pas à créer un précédent pour toute année ultérieure qui mettrait en cause ces contribuables ou pour tout autre dossier.

Nous considérons maintenant que ce dossier est clos et nous ferons part à Sifto des conditions du présent règlement […]

[44]  Par une lettre datée du 25 janvier 2011 que la DSAC a reçue le 11 février 2001, M. Danilack a répondu ceci à Mme Spice [34]  :

[TRADUCTION]

La présente fait suite à la procédure amiable concernant Compass Minerals International, Inc. et sa filiale canadienne Sifto Canada Inc. À titre d’autorité compétente américaine, je confirme par la présente, pour le compte de l’Internal Revenue Service des États-Unis, les conditions de l’entente constatée par votre lettre du 23 novembre [sic] 2010 [35] . Cet échange de lettres constitue un accord amiable au sens de l’article 26 de la Convention fiscale États‑Unis‑Canada.

Nous informerons Compass Minerals International, Inc. de notre décision et nous fournirons à notre directeur de l’Industrie de la construction et des Ressources naturelles les instructions nécessaires pour que l’on mette en œuvre notre entente. Nous considérons maintenant que le présent dossier est clos.

[45]  Le même jour, M. Danilack a écrit une lettre à Compass indiquant ce qui suit au deuxième paragraphe :

[TRADUCTION]

Un accord amiable a été conclu au sujet du prix de transfert de l’opération entre Compass et Sifto Canada Inc. (« Sifto »). À la suite de nos discussions, l’autorité compétente américaine a convenu d’accorder, à titre d’allègement correspondant intégral, les montants indiqués dans le tableau ci-dessous [36] .

[46]  M. Quinn a témoigné que l’ACC a considéré l’échange des lettres du 10 novembre 2010 et du 25 janvier 2011 comme un accord amiable au sens de l’article XXVI de la Convention [37] .

[47]  Mme Spice a informé l’avocat de l’appelante de l’accord conclu entre l’ACC et l’ACA par une lettre datée du 10 novembre 2010 [38] . Cette lettre décrit les conditions liées au règlement convenu entre les autorités compétentes, tel qu’il est décrit dans la lettre du 10 novembre 2010 adressée à M. Danilack, et indique ensuite :

[TRADUCTION]

Nous vous saurions gré de faire savoir à notre bureau, dans les 30 jours suivant la date de la présente lettre, si Sifto est disposée à souscrire aux conditions du règlement convenu entre les autorités compétentes, décrit ci-dessus. Une fois que nous aurons reçu votre acceptation, nous donnerons instruction à notre Bureau des services fiscaux de Toronto-Ouest d’ajuster vos déclarations de revenus en fonction de ce règlement.

[48]  M. Quinn a témoigné que c’était M. Harkin qui avait écrit la lettre, que ce paragraphe était une [TRADUCTION] « formule type dans nos lettres de clôture » et qu’il était « en fait erroné [39]  » Il a déclaré aussi qu’il avait lu cette lettre avant qu’elle soit envoyée à l’avocat de l’appelante [40] .

[49]  L’appelante a répondu à cette lettre par une lettre datée du 1er décembre 2010 [41] , à laquelle était jointe une [TRADUCTION] « acceptation signée des conditions contenues dans la lettre de votre bureau datée du 10 novembre 2010, à l’intention de Sifto Canada Corp. (anciennement Sifto Canada Inc.) ». La pièce jointe était une copie de la lettre du 10 novembre 2010 de Mme Spice à l’avocat de l’appelante, assortie de la mention « lu et accepté par », en lettres majuscules, sous le titre de Mme Spice, au bas de la lettre. Sous cet énoncé apparaît la signature de M. Rodney L. Underdown et le titre de « vice-président et directeur financier ».

[50]  Le 2 décembre 2010, à 13 h 56, M. Craig Reeder, de KPMG, a envoyé à M. Quinn le courriel suivant :

[TRADUCTION]

Nous croyons savoir que Shaun n’est pas au bureau cette semaine et nous avons pensé vous transmettre aussi une copie de l’acceptation de Sifto Canada Corp. à l’égard du règlement convenu entre les autorités compétentes. Prière de confirmer que vous avez reçu ce document et que vous êtes satisfait de son contenu, à titre d’acceptation, par Sifto Canada Corp., du règlement convenu entre les autorités compétentes [42] .

[51]  Le même jour, à 13 h 59, M. Quinn a répondu à ce courriel comme suit :

[TRADUCTION]

Bien reçu Craig, et c’est exactement ce qu’il nous faut. Merci [43] .

[52]  En contre-interrogatoire, M. Quinn a reconnu ne pas avoir avisé l’appelante qu’il n’y avait pas d’entente entre cette dernière et l’ACC [44] .

[53]  La DSAC a informé M. Kamlesh Kumar, directeur adjoint, Vérification et M. Arun Khanna, chef des Appels, tous deux au Bureau des services fiscaux de Toronto-Ouest, de l’entente conclue avec l’IRS par des notes de service de la part de M. Harkin, datées du 17 décembre 2010 [45] . Ces notes de service portaient chacune la signature de M. Quinn.

[54]  À la note de service adressée à M. Kumar était jointe une copie d’un [TRADUCTION] « sommaire de décision interne » ainsi qu’une copie de la lettre du 10 novembre 2010 de Mme Spice à l’avocat de l’appelante, avec, au bas du document, l’acceptation de M. Underdown. Sous la rubrique « JUSTIFICATION », le dernier paragraphe du sommaire de décision interne indique ce qui suit :

[TRADUCTION]

Après de nombreuses négociations, l’IRS a souscrit aux ajustements présentés dans le cadre de la divulgation volontaire. L’IRS a admis que les ajustements sont conformes au principe de pleine concurrence. Les ajustements redressent les revenus d’exploitation de Sifto de façon à obtenir un retour sur le coût total qui soit égal au point le plus bas des observations moyennes pondérées tirées des données d’entreprises comparables.

[55]  Le premier accord conclu dans le cadre de la PA auquel sont parvenues l’ACC et l’ACA n’a pas porté sur l’exercice 2002 de l’appelante parce que l’ACA était d’avis que la demande d’accord amiable de NASC avait été présentée trop tard pour s’appliquer à cette année-là [46] . Cependant, l’ACA a revu sa position et un second accord amiable, englobant l’année 2002, a été conclu en avril 2011 [47] .

[56]  Une lettre du successeur de Mme Spice, M. André Lamarche [48] , adressée à M. Danilack et datée du 7 avril 2011 [49] , indique ce qui suit dans le paragraphe introductif :

[TRADUCTION]

La présente confirme le règlement que nos représentants ont récemment négocié au sujet du dossier susmentionné, et elle est postérieure à notre lettre du 10 novembre 2010, par suite du fait que l’Internal Revenue Service (« IRS ») a maintenant accordé un allègement correspondant pour l’exercice 2002.

[57]  La lettre décrit ensuite les détails du règlement et conclut :

[TRADUCTION]

Nous considérons maintenant que ce dossier est clos et nous ferons part à Sifto des conditions liées à ce règlement.

[58]  M. Quinn a témoigné que c’est M. Harkin qui a écrit la lettre du 7 avril 2011 à l’IRS, qu’il a lui-même lu cette lettre et que M. Lamarche l’a signée [50] . Il a qualifié cette lettre de [TRADUCTION] « lettre de clôture type [51]  ».

[59]  M. Lamarche a informé l’avocat de l’appelante du second accord amiable par une lettre datée du 7 avril 2011 [52] , et l’appelante a souscrit aux conditions de cet accord de la même façon qu’elle l’avait fait pour le premier règlement, au moyen d’une lettre datée du 19 avril 2011 et destinée à M. Lamarche [53] .

[60]  La DSAC a informé M. Khanna et M. Paul Kohut, vérificateur, Impôt international, au Bureau des services fiscaux de Toronto-Ouest, de la conclusion du second accord amiable par une note de service datée du 7 avril 2011 et écrite par M. Harkin, mais signée par M. Quinn. La note de service adressée à M. Khanna incluait une copie du [TRADUCTION] « sommaire de décision interne » de la DSAC ainsi qu’une copie de la lettre que M. Lamarche avait envoyée à l’avocat de l’appelante. Le sommaire de décision interne comprenait, sous la rubrique « JUSTIFICATION » le même dernier paragraphe que celui qui est reproduit ci‑dessus.

[61]  M. Quinn a décrit comme suit ces notes de service et les pièces qui y étaient jointes :

[TRADUCTION]

Il s’agit de lettres finales, de notes de service de l’autorité compétente à notre BSF de Toronto-Ouest ainsi qu’à la Division des appels de Toronto-Ouest, et elles résument le résultat de nos discussions avec l’IRS. Et quelques lettres y sont jointes. Les dernières lettres dont nous avons déjà parlé sont jointes [54] .

[62]  M. Quinn a qualifié le paragraphe qui suivait la rubrique « JUSTIFICATION » de [TRADUCTION] « [f]ormule type dans [leurs] sommaires de décision [55]  ». Il a également indiqué à plusieurs reprises qu’à cette époque, une négociation entreprise dans le cadre de la PA à la suite d’une divulgation volontaire était un fait singulier [56] . Pour ce qui est de la référence faite dans le paragraphe à un prix de pleine concurrence, voici l’échange qu’il y a eu avec l’avocate de l’intimée :

[TRADUCTION]

Q.  Et le dernier point dont je voudrais que nous parlions est le sommaire de décision que nous venons tout juste d’évoquer.

L’autorité compétente canadienne avait-elle une opinion sur le prix de transfert de pleine concurrence?

R.  Non, nous n’en avions pas. Nous ne savions pas du tout si le prix de transfert était de pleine concurrence parce que nous ne sommes pas mandatés pour procéder à une vérification, et que, dans ce dossier, il n’y avait aucune vérification. L’accord amiable était que l’IRS accorderait un allègement à l’égard des ajustements que la contribuable avait proposés et que l’ARC avait traités dans le cadre de notre programme des divulgations volontaires. Mais, pour ce qui était du prix de transfert, nous n’avions aucun avis sur le sujet. Nous avons simplement soumis les ajustements à l’IRS en vue d’obtenir un allègement à l’égard de la double imposition [57] .

4) La vérification de l’appelante au sujet du prix de transfert

[63]  Selon une chaîne de courriels envoyés entre le 20 et le 25 mai 2010 [58] , en date du 20 mai 2010, M. Quinn et M. Harkin étaient au courant de la tenue d’une éventuelle vérification du prix de transfert concernant les années d’imposition de l’appelante prenant fin au cours de la période de 2004 à 2008 (les « années d’imposition visées par la vérification »).

[64]  Dans un courriel qu’il a envoyé à Mme Tiina Wainman le 25 mai 2010 à 14 h 50 [59] , M. Quinn écrit :

[TRADUCTION]

Je tiens juste à préciser que la demande de la contribuable à l’autorité compétente englobait les années d’imposition 2002 à 2006. La contribuable a fait l’objet d’une nouvelle cotisation de la part de l’ARC pour toutes ces années et elle se retrouve dans une situation de double imposition. Nous avons soumis les ajustements à l’examen de l’IRS en vue d’obtenir un allègement. Si vous procédez à une vérification qui englobera les années 2004 à 2006, nous le ferons savoir à l’IRS. Nous ignorons quelle sera la réaction de l’IRS (c.-à-d., nous ne savons pas si l’IRS mettra fin aux discussions relatives à certaines années ou à toutes les années, et nous ignorons si l’IRS acceptera le même dossier une seconde fois en vertu de l’article concernant les accords amiables, advenant que l’ARC apporte d’autres ajustements). Nous voulions que vous soyez au courant du risque accru que la contribuable fasse l’objet d’une double imposition pendant une période plus longue (le temps qu’il faudra pour finaliser votre vérification) et peut-être de façon permanente (suivant la manière dont l’IRS réagira).

[65]  M. Harkin a déclaré que, le 28 mai 2010, il avait eu une conversation téléphonique avec Mme Indu Subbiah au cours de laquelle il lui avait fait part des années d’imposition de l’appelante qui allaient faire l’objet d’une vérification [60] . M. Harkin a eu une autre conversation téléphonique avec Mme Subbiah le 7 juin 2010, et il a décrit la teneur de cette conversation en ces termes :

[TRADUCTION]

Il s’agit d’un appel téléphonique de suivi avec Indu environ 10 jours après l’appel précédent, après leur avoir fait part des années qui feraient l’objet d’une vérification.

Et Indu a dit que nous devions, essentiellement, régler la question de la double imposition. Elle s’inquiétait du fait que la date de l’arbitrage approchait, et aussi du fait que la vérification pourrait durer longtemps et que la contribuable aurait à subir une double imposition pendant un temps prolongé.

Elle a aussi dit que, s’il fallait établir un autre accord amiable après la vérification de l’ARC, l’IRS ne serait pas réceptive à une autre méthode d’établissement du prix de transfert. Ils auraient plus ou moins – leur méthode d’établissement du prix de transfert serait celle qui avait été présentée dans la divulgation volontaire de la contribuable [61] .

[…]

Eh bien, dans l’appel téléphonique subséquent avec Indu, celle-ci a dit que, s’il allait y avoir une seconde demande dans le cadre de la PA, la méthode d’établissement du prix de transfert qu’ils mettraient de l’avant serait celle qui était décrite dans la divulgation volontaire. Je suppose qu’ils n’ont pas dit directement s’ils allaient accepter un second dossier, mais ils ont dit que s’il y avait une seconde demande, ce serait là leur position, leur méthode d’établissement du prix de transfert [62] .

[66]  En contre-interrogatoire, M. Quinn a reconnu que le fait d’apporter d’autres ajustements au prix de transfert par suite d’une vérification aurait exposé l’appelante au risque d’une double imposition permanente si l’ACA ne souscrivait pas à un second accord amiable [63] . Il a été demandé à M. Quinn quelles avaient été les mesures précises que l’ACC avait prises au sujet de la vérification imminente :

[TRADUCTION]

Q.  […] Que faites-vous à ce stade-là? Avez-vous envisagé un certain nombre d’options afin de mettre en suspens l’examen que vous faisiez?

R.  Ce que nous avons fait, c’est consulter en premier l’IRS et lui faire part de la situation. Mettre la demande en suspens n’était pas une option viable parce que ce dossier devenait admissible à l’arbitrage en décembre 2010, et ils auraient pu invoquer l’arbitrage à ce moment-là. Et il n’y avait aucune garantie que la vérification serait terminée à ce moment-là. C’est donc là le problème que pose le fait de faire intervenir la Vérification quand nous avons un dossier à l’étude devant l’autorité compétente [64] .

[…]

Q.  Je crois comprendre que le dossier a été réglé. Mais, n’avez-vous jamais informé l’IRS que vous vouliez suspendre les discussions?

R.  Nous ne lui avons pas dit que nous voulions le faire. Ce que nous lui avons dit, c’est que nos vérificateurs s’occupaient de ces années-là et nous voulions savoir ce qui, selon eux, était la meilleure façon de procéder étant donné que, étant donné qu’il y aurait peut-être d’autres nouvelles cotisations. Et leur avis était qu’ils voulaient clore le dossier, dans l’état où il se trouvait [65] .

[…]

Q.  Quelqu’un du Canada n’a-t-il jamais pris le téléphone et dit à l’IRS : « Nous devons mettre ce dossier en suspens. C’est ce que le Canada veut faire. Nous devons le mettre en suspens »?

R.  Non [66] .

[…]

Q.  Très bien. 2011. Revenons donc à 2010. N’avez-vous jamais obtenu une confirmation de l’IRS qu’elle accepterait un autre accord amiable à ce stade?

R.  Non [67] .

[67]  Dans un courriel de Mme Wainman à M. Quinn, envoyé le 17 décembre 2010 à 10 h 39, Mme Wainman écrit :

[TRADUCTION]

Nous avons reçu un appel un peu frénétique du vérificateur chargé du dossier dont je vous ai parlé il y a de cela plusieurs mois. [Il s’agit du] dossier de divulgation volontaire – mon souvenir est que même si l’AC était sur le point d’entamer une discussion avec l’IRS pour régler le problème de la double imposition, vous alliez suspendre le dossier car vous aviez pris connaissance de la vérification en cours, qui englobait certaines des années visées par la DV. Je crois que l’AC allait informer l’IRS de cette décision [68] .

[68]  M. Quinn a répondu à ce courriel à 10 h 43 :

[TRADUCTION]

Oui, nous avons informé l’IRS de la vérification en cours, ainsi que de la possibilité qu’il y ait d’autres ajustements. Cependant, je me souviens que l’IRS avait déjà accepté d’accorder un allègement intégral et elle ne l’a pas retiré quand nous lui avons fait part de la vérification, ainsi que des ajustements supplémentaires possibles [69] .

[69]  M. Quinn a répondu de nouveau à 10 h 48 :

[TRADUCTION]

Et je viens tout juste (il y a une seconde de cela) de signer la note de service de clôture, destinée à Kamlesh Kumar (DAV) […] Elle résume la situation [70] .

[70]  Une chaîne ultérieure de courriels entre Mme Spice et M. Harkin, datée du 31 mai 2011 [71] , indique que Mme Spice s’inquiétait de la vérification des années d’imposition en question après la conclusion de l’accord amiable. Dans le premier courriel de cette chaîne, que M. Harkin a envoyé à Mme Spice, le 31 mai 2011 à 11 h 00, M. Harkin écrit :

[TRADUCTION]

C’est lors des discussions du 28 mai 2010 que j’ai informé l’IRS de l’intention qu’avait peut-être l’ARC de vérifier les années 2004-2008. La possibilité d’une vérification de l’ARC avait tout juste été portée à notre attention avant l’appel téléphonique du 28 mai. C’était tard dans le processus de négociation, un moment où un accord était imminent. L’IRS a jugé qu’étant donné que la contribuable faisait présentement face à une double imposition, nous devions nous efforcer de régler l’affaire. L’IRS n’a pas fait de commentaires directs sur la question de savoir si elle accepterait un second dossier. Elle a indiqué que si nous présentions un second dossier dans le cadre de la PA, sa position serait vraisemblablement celle qu’elle était sur le point d’accepter. Ces avis ont été émis de vive voix.

[71]  Dans le deuxième courriel de la chaîne, Mme Spice demande : [TRADUCTION] « À quel stade savions-nous qu’une vérification avait été entreprise? ». M. Harkin répond :

[TRADUCTION]

J’ai pris connaissance des années visées par la vérification le 20 mai 2010. J’ai cru comprendre que la vérification n’avait pas encore commencé. Pour clarifier la situation, j’ai informé l’IRS, le 28 mai 2010, que les années 2004-2008 allaient faire l’objet d’une vérification et qu’il se pouvait que cela donne lieu à des ajustements du prix de transfert de l’opération dont on discutait.

Je ne me souviens d’aucune discussion avec la contribuable, avant le règlement, quant au fait de faire l’objet d’une vérification. La contribuable a été informée de notre accord avec l’IRS peu après que l’accord a été conclu le 7 juin 2010 par téléphone et, ensuite, par la lettre de clôture.

[72]  Le Système de suivi de l’autorité compétente (le « SSAC ») [72] fait état d’une conversation téléphonique entre M. Harkin et Mme Indu Subbiah le 28 mai 2010. L’entrée faite dans le système indique :

[TRADUCTION]

J’ai discuté de nouveau du dossier avec Indu. Elle a indiqué qu’ils accorderaient un allègement. J’ai dit que notre secteur de la vérification a l’intention de vérifier les années 2004-2008. Indu a répondu qu’elle prendra ce fait en considération et qu’elle communiquera de nouveau avec nous.

[73]  Dans le quatrième courriel de la chaîne, Mme Spice demande à M. Harkin : [TRADUCTION] « Puis-je obtenir une copie de l’accord de la contribuable à l’égard du règlement s’il-vous-plait [73] ? ». Réponse de M. Harkin : [TRADUCTION] « Je vous fournirai des copies de l’accord de la contribuable à l’égard du règlement [74]  ».

[74]  Une chaîne de courriels se terminant par un courriel de Mme Spice envoyé le 22 novembre 2011, à 14 h 47, révèle que celle‑ci continue de se soucier de la nouvelle cotisation proposée à l’égard des années d’imposition 2004 à 2008 de l’appelante, nouvelle cotisation fondée sur une vérification du prix de transfert. Mme Spice indique, en partie :

[TRADUCTION]

Bonjour Geri et Tiina et Jennifer – Shaun a suggéré que nous indiquions que seules quelques-unes des années visées par le PDV font l’objet d’une vérification pour qu’un changement soit effectué.

J’ai apporté d’autres révisions qui, je pense, vont de soi […]

Suivi des modifications et versions révisées ci-jointes [75] .

[75]  Sont jointes à la chaîne de courriels une version annotée et une version « propre » d’un document intitulé [TRADUCTION] « NOTE DE SERVICE À TERRANCE McAULEY SIFTO CANADA CORP. (Pour information seulement) [76]  ». À l’époque, M. McAuley était commissaire adjoint de la conformité, Direction générale des programmes.

[76]  À la fin du document apparaît le nom de Lucie Bergevin qui, à l’époque, exerçait les fonctions de directrice générale, Direction du secteur international et des grandes entreprises. Le corps de la version « propre » du document indique ceci, à la première page :

[TRADUCTION]

La présente note de service a pour objet de vous fournir des informations sur une vérification litigieuse ainsi que sur l’envoi de lettres de proposition le 16 novembre 2011.

Cette vérification concerne la contribuable susmentionnée et des ajustements de l’Agence du revenu du Canada (ARC) qui ont antérieurement fait l’objet d’un règlement conclu dans le cadre de la procédure amiable (PA) avec l’Internal Revenue Service (IRS). Ces ajustements de l’ARC en matière de prix de transfert étaient fondés sur la divulgation volontaire que la contribuable avait faite dans le cadre du Programme des divulgations volontaires (PDV) de l’ARC. Sachez qu’il y a des préoccupations, principalement soulevées par la Division des services de l’autorité compétente (DSAC) [expurgé] au sujet des conséquences susceptibles de découler de la (seconde) nouvelle cotisation qu’il est proposé d’établir sur la même question et pour les mêmes années que celles visées par la divulgation volontaire et le règlement conclu dans le cadre de la PA.

[Expurgé]

[Expurgé] il y aussi un risque sur le plan relationnel. Les négociations entourant la PA sont conclues en étant entendu qu’elles sont définitives et qu’elles lient les deux partenaires de convention et, si les contribuables sont d’accord, les contribuables. À ma connaissance, il n’est jamais arrivé qu’un partenaire de convention conclue un règlement dans le cadre de la PA et, ensuite, tente de rouvrir le même dossier. Ce serait là un gaspillage de ressources pour les deux pays et cela minerait la crédibilité du pays responsable de la seconde série d’ajustements servant de fondement au second dossier. [Expurgé] La présentation, par l’ARC, du second dossier dans le cadre de la PA pourrait avoir une incidence négative sur les relations avec notre partenaire de convention. [Expurgé] [77]

[77]  M. Quinn a reconnu avoir reçu le courriel de Mme Spice auquel étaient jointes les versions « propre » et « annotée » de ce document, et il a déclaré qu’à sa connaissance, il n’avait pas indiqué qu’il était en désaccord avec cette version [78] .

[78]  Dans un courriel de la chaîne, que M. Quinn avait envoyé plus tôt à Mme Spice le 22 novembre 2011 à 12 h 00, M. Quinn écrit :

[TRADUCTION]

Je l’ai lu. Il m’a l’air bien.

[79]  M. Quinn n’a pas pu se souvenir de la version du document à laquelle ce commentaire s’appliquait, mais il a signalé que le courriel qu’il avait envoyé à Mme Spice précédait celui de cette dernière [79] .

5) La discussion de principe sur les divulgations volontaires

[80]  En contre-interrogatoire, M. Quinn a été interrogé sur une réunion de discussion de principe qui a eu lieu le 21 janvier 2009, ainsi que sur deux séries de courriels connexes : l’une de Mme Spice, datée du 30 mai 2011, et l’autre de M. Quinn, composée de courriels datés du 15 juin 2009 et du 23 juin 2009 [80] .

[81]  Les courriels et le résumé écrit de la réunion indiquent que la DSAC a discuté de la manière de traiter une demande d’accord amiable à la suite d’une divulgation volontaire. Dans le résumé écrit de la discussion de principe, voici ce qu’on peut lire sous la rubrique [TRADUCTION] « Décision » :

[TRADUCTION]

Ces demandes seraient visées par l’article portant sur la PA. [Expurgé] C’est donc dire que la DSAC acceptera les demandes et consultera l’IRS pour déterminer s’ils sont d’accord pour accepter les demandes et aussi pour déterminer les procédures réciproques qui conviennent au traitement des dossiers de cette nature. La DSAC entrera aussi en rapport avec le BSF, le cas échéant. [Expurgé] Dans le cas d’une divulgation volontaire faite au Canada (exemple 2), la DSAC communiquera avec le BSF pour obtenir le travail de vérification de base qui a été fait sur la demande d’ajustement à la baisse et, si le travail de vérification de fond concernant la vérification de l’ajustement n’a pas été fait, la DSAC demandera au BSF de le faire.

[82]  Dans un des deux courriels de Mme Spice datés du 30 mai 2011 et envoyés à 14 h 18, celle-ci écrit :

[TRADUCTION]

Bonjour à tous – J’étais juste en train de vérifier mes dossiers sur la position que nous avons adoptée en 2009 et je joins le courriel et l’exposé de position qui, d’après ce que j’ai compris, seraient encore pertinents aujourd’hui. Je crois qu’il y a une erreur dans l’exposé de position au sujet du scénario no 2 et je pense que le texte aurait dû être (le changement est souligné) :

Dans le cas d’une divulgation volontaire faite au Canada (exemple 2), la DSAC communiquera avec le BSF pour obtenir le travail de vérification de base qui a été fait sur la demande d’ajustement à la hausse et, si le travail de vérification de fond concernant la vérification de l’ajustement n’a pas été fait, la DSAC demandera au BSF de le faire.

[83]  M. Quinn a déclaré que, indépendamment de la rubrique qui précède le paragraphe que Mme Spice a corrigé, la DSAC n’a pas adopté la politique indiquée dans le paragraphe et n’a pas communiqué avec le BSF pour qu’il procède à une vérification des ajustements du prix de transfert que l’ARC avait faits dans les nouvelles cotisations de 2008 [81] . Il a déclaré qu’au lieu que ce soit la DSAC qui adopte la politique établie lors de la réunion de discussion de politique du 21 janvier 2009, l’ARC a, dans les dernières années, modifié sa politique de divulgation volontaire pour prévoir que les divulgations volontaires en matière de prix de transfert ne seront acceptées que si elles ont été examinées au préalable par les services de vérification [82] .

IV. La thèse de l’appelante

[84]  L’appelante soutient que le ministre et elle ont conclu une entente exécutoire qui a fixé le prix de transfert du sel gemme que l’appelante avait vendu à NASC au cours des années d’imposition visées. Une personne raisonnable qui examinerait la conduite des parties (y compris les termes utilisés dans les communications écrites applicables) se dirait que les parties entendaient conclure une telle entente. L’état d’esprit et l’intention subjective du ministre ne sont pas pertinents, car l’intention doit être établie à la lumière de la conduite, ce qui inclut les termes que les parties ont choisis.

[85]  L’appelante soutient que les circonstances objectives établissent l’existence de l’entente et que cette dernière est, d’une part, exécutoire à l’encontre du ministre à titre d’accord de règlement et, d’autre part, exécutoire en vertu de la Convention et de l’article 115.1 de la LIR.

V. La thèse de l’intimée

[86]  Le ministre soutient que l’appelante n’a pas établi qu’il ne peut légalement pas établir les nouvelles cotisations. Les lettres que se sont échangées l’ACC et l’ACA, lesquelles ont mis fin à leur examen des demandes soumises à l’autorité compétente de l’appelante et de Compass, ne font pas référence à un prix de transfert pour le sel que l’appelante a vendu à NASC au cours des années d’imposition visées et ne représentent pas une entente que l’ACC et l’ACA ont conclue sur le prix de transfert de pleine concurrence de ce sel. L’intimée est d’avis que l’objet du règlement que l’ACC et l’ACA ont conclu consistait à savoir si, et à quelles conditions, les autorités compétentes étaient disposées à accorder l’allègement à l’égard de la double imposition que demandaient l’appelante et Compass. Le rôle de l’ACC consistait à indiquer à l’ACA si, dans ces circonstances particulières, elle croyait qu’il était possible d’accorder un allègement à l’égard de la double imposition sous le régime de la Convention. Les lettres que l’ACC et l’ACA se sont échangées représentaient un accord amiable au sens de la Convention en vue d’accorder un allègement à l’égard de la double imposition. L’ACA a mis l’accord en œuvre en autorisant Compass à réduire ses revenus aux fins de l’impôt américain [83] .

[87]  L’intimée soutient que le ministre n’a pas conclu un accord de règlement avec l’appelante. L’ACC a accepté la demande d’allègement à l’égard de la double imposition de l’appelante, a soumis cette demande à l’ACA, a obtenu l’accord de l’ACA pour ce qui était d’accorder l’allègement et a communiqué le résultat à l’appelante. Rien dans les faits ne dénote que le ministre ou l’appelante avait l’intention de créer une relation contractuelle exécutoire. Plus précisément, il n’y a eu aucune contrepartie, aucune condition déterminée et aucune communication d’une intention de fixer le prix de transfert du sel. De plus, même s’il y avait un accord, il ne s’agissait pas d’un accord destiné à fixer le prix de transfert du sel. C’est ce que confirment le fondement factuel ou les circonstances de l’affaire.

[88]  L’intimée est d’avis que le ministre est tenu de faire appliquer la LIR, ce qui l’oblige à le faire comme il le conçoit, et aux faits tels qu’ils sont. En exécutant cette obligation d’établir à l’endroit de chaque contribuable une cotisation d’une manière conforme à la LIR, le ministre n’est pas lié par les déclarations de revenus que le contribuable a produites ou par des cotisations antérieures qui ont été établies à son endroit. L’obligation du ministre consiste à faire appliquer la LIR dans sa forme actuelle, sous réserve seulement des délais que la LIR impose. Le ministre a établi les nouvelles cotisations à la suite d’une vérification de l’appelante, dans laquelle il a déterminé que les faits dénotaient l’existence d’un prix de transfert de pleine concurrence qui était différent du prix indiqué dans les nouvelles cotisations de 2008. Dans les circonstances, le ministre se devait d’établir les nouvelles cotisations.

VI. Les dispositions de la Loi et de la Convention

[89]  Les dispositions de la LIR et de la Convention qui ont trait à la question en litige sont reproduites intégralement à l’annexe B jointe aux présents motifs. Par souci de commodité, je reproduis également ici une partie des dispositions applicables :

Article 115.1 de la LIR

115.1(1) Conventions entre autorités compétentes — Malgré les autres dispositions de la présente loi, les montants déterminés et les décisions prises en conformité avec une convention qui est conclue entre le ministre et une autre personne, en conformité avec une disposition de quelque convention ou accord fiscal entre le Canada et un autre pays qui a force de loi au Canada, et qui vise l’imposition de l’autre personne, sont réputés conformes à la présente loi.

Article IX de la Convention, intitulé « Personnes liées »

1. Lorsqu’une personne dans un État contractant et une personne dans l’autre État contractant sont liées et lorsque les arrangements entre elles diffèrent de ceux qui seraient convenus entre des personnes non liées, chaque État peut ajuster le montant des revenus, pertes ou impôts exigibles de façon à refléter les revenus, déductions, crédits ou allégements qui, sans ces arrangements, auraient été pris en considération dans le calcul de ces revenus, pertes ou impôts.

2. Au sens du présent article, une personne est considérée comme liée à une autre personne si elle participe directement ou indirectement à la direction ou au contrôle de l’autre ou si une ou plusieurs tierces personnes participent directement ou indirectement à la direction ou au contrôle des deux personnes.

3. Lorsqu’un ajustement est fait, ou est à faire, par un État contractant conformément au paragraphe 1, l’autre État contractant procède (nonobstant toute restriction relative aux délais ou à la procédure du droit interne de cet autre État) à un ajustement correspondant des revenus, pertes ou impôts de la personne liée dans cet autre État si :

a) Il est d’accord avec le premier ajustement; et

b) L’autorité compétente de l’autre État a été avisée du premier ajustement dans un délai de six ans à compter de la fin de l’année d’imposition à laquelle le premier ajustement est relié. Toutefois, l’autorité compétente peut accepter d’examiner les cas où l’ajustement correspondant ne serait pas autrement prescrit en vertu des délais ou empêché par la procédure du droit interne dans l’autre État, même si l’avis n’a pas été donné dans le délai de six ans.

4. Si l’avis visé au paragraphe 3 n’est pas donné dans les délais visés audit paragraphe et si l’autorité compétente n’a pas accepté d’examiner le cas conformément au paragraphe 3b), l’autorité compétente de l’État contractant qui a fait, ou va faire, le premier ajustement peut éviter la double imposition lorsque le cas s’y prête.

5. Les dispositions des paragraphes 3 et 4 ne s’appliquent pas en cas de fraude, d’omission volontaire ou de négligence ou de faute lourde.

Article XXVI de la Convention, intitulé « Procédure amiable »

1. Lorsqu’une personne estime que les mesures prises par un État contractant ou par les deux États contractants entraînent ou entraîneront pour elle une imposition non conforme aux dispositions de la présente Convention, elle peut, indépendamment des recours prévus par le droit interne de ces États, soumettre son cas par écrit à l’autorité compétente de l’État contractant dont elle est un résident ou, si elle n’est pas un résident d’aucun des États contractants, à celle de l’État contractant dont elle possède la nationalité.

2. L’autorité compétente de l’État contractant à qui le cas a été soumis s’efforce, si la réclamation lui paraît fondée et si elle n’est pas elle-même en mesure d’y apporter une solution satisfaisante, de résoudre le cas par voie d’accord amiable avec l’autorité compétente de l’autre État contractant, en vue d’éviter une imposition non conforme à la Convention. Sauf lorsque les dispositions de l’article IX (Personnes liées) s’appliquent, l’accord est appliqué quels que soient les restrictions relatives au temps ou à la procédure prévues par le droit interne des États contractants pourvu que l’autorité compétente de l’autre État contractant ait reçu, dans un délai de six ans à compter de la fin de l’année d’imposition à laquelle le cas s’applique, avis qu’un tel cas existe.

[…]

5. Les autorités compétentes des États contractants peuvent communiquer directement entre elles en vue de parvenir à un accord comme il est indiqué aux paragraphes précédents.

  1. Analyse

    1. Introduction

  • [90] L’appelante et l’intimée ont mis de l’avant deux interprétations des faits tout à fait différentes. Selon l’appelante, le processus d’examen par l’autorité compétente a donné lieu à un accord exécutoire, entre l’appelante et le ministre, qui a fixé le prix de transfert de pleine concurrence du sel gemme que l’appelante avait vendu à NASC au cours des années d’imposition visées (le « sel »). Selon l’intimée, il n’existe aucun accord de cette nature et, même s’il y en a un entre l’appelante et le ministre, il ne fixe pas le prix de transfert de pleine concurrence du sel. Dans les circonstances, le ministre était non seulement autorisé, mais tenu par la LIR d’établir les nouvelles cotisations une fois qu’il avait en main les faits que sa vérification de l’appelante avait mis au jour.

  1. Le fondement factuel

  • [91] Pour trancher la question que posent les parties, il me faut d’abord examiner les dispositions applicables de la Convention, car c’est sous le régime de celle-ci que le processus d’examen des autorités compétentes s’est déroulé et que les deux accords établis sous le régime de la PA (les « accords amiables » ont été conclus. Cette information fait partie du fondement factuel qui permet de comprendre les conditions des accords amiables que l’ACC et l’ACA ont conclus. Dans l’arrêt Sattva Capital Corp. c. Creston Moly Corp., 2014 CSC 53, [2014] 2 RCS 633 (« Sattva »), la Cour suprême du Canada a décrit en ces termes l’importance que revêt le fondement factuel :

La tendance à délaisser l’approche historique au Canada semble s’expliquer par deux changements. Le premier est l’adoption d’une méthode d’interprétation contractuelle qui oblige le tribunal à tenir compte des circonstances — que l’on appelle souvent le fondement factuel — dans l’interprétation d’un contrat écrit [citations omises].

Relativement au premier changement, l’interprétation des contrats a évolué vers une démarche pratique, axée sur le bon sens plutôt que sur des règles de forme en matière d’interprétation. La question prédominante consiste à discerner « l’intention des parties et la portée de l’entente » [citations omises]. Pour ce faire, le décideur doit interpréter le contrat dans son ensemble, en donnant aux mots y figurant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec les circonstances dont les parties avaient connaissance au moment de la conclusion du contrat. Par l’examen des circonstances, on reconnaît qu’il peut être difficile de déterminer l’intention contractuelle à partir des seuls mots, car les mots en soi n’ont pas un sens immuable ou absolu :

[TRADUCTION] Aucun contrat n’est conclu dans l’abstrait : les contrats s’inscrivent toujours dans un contexte. [. . .] Lorsqu’un contrat commercial est en cause, le tribunal devrait certes connaître son objet sur le plan commercial, ce qui présuppose d’autre part une connaissance de l’origine de l’opération, de l’historique, du contexte, du marché dans lequel les parties exercent leurs activités.

(Reardon Smith Line, à la p. 574, lord Wilberforce) [84]

  • [92] Pour ce qui est de l’interprétation de la Convention, dans l’arrêt Crown Forest Industries Ltd. c. Canada, [1995] 2 RCS 802 (« Crown Forest »), la Cour suprême du Canada a affirmé que, lorsqu’on interprète un traité, l’objectif primordial consiste :

[…] à trouver le sens des termes en question. Il convient donc de considérer le langage utilisé ainsi que l’intention des parties [85] .

  • [93] En gardant cela à l’esprit, examinons maintenant le paragraphe 1 de l’article IX de la Convention, qui prévoit que, lorsque des personnes sont liées et que les arrangements entre elles diffèrent de ceux dont auraient convenu des personnes non liées, chaque État peut ajuster le montant des revenus, pertes ou impôts exigibles de façon à refléter les revenus, déductions, crédits ou allègements qui, sans ces arrangements, auraient été pris en compte dans le calcul de ses revenus, pertes ou impôts. Il ne fait aucun doute qu’au cours des années d’imposition visées, l’appelante et NASC étaient liées.

  • [94] Le paragraphe 3 de l’article IX de la Convention prévoit que, lorsqu’un ajustement est fait par un État contractant, l’autre État contractant procède à un ajustement correspondant des revenus de la personne liée dans cet autre État s’il est d’accord avec l’ajustement et si certaines exigences en matière de notification sont remplies.

  • [95] Les paragraphes (1) et (2) de l’article XXVI de la Convention prévoient tous deux que, lorsqu’une personne estime que les mesures prises par un État contractant ou par les deux États contractants entraînent une imposition non conforme à la Convention, cette personne peut soumettre son cas à l’autorité compétente de l’État dont elle est un résident et, si l’opposition semble justifiée et ne peut être réglée unilatéralement par l’autorité compétente, cet État contractant doit s’efforcer de régler l’affaire par voie d’accord amiable avec l’autorité compétente de l’autre État contractant.

  • [96] La procédure amiable décrite aux paragraphes (1) et (2) de l’article XXVI de la Convention ne s’applique que si une personne croit qu’elle est imposée d’une manière non conforme à la Convention et si l’État contractant dont elle est un résident est d’avis que la position est justifiée. Le Commentaire (le « Commentaire de l’OCDE ») sur les dispositions du Modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune de l’OCDE (le « Modèle de convention de l’OCDE ») décrit cet aspect de l’article quasi identique du Modèle de convention de l’OCDE, comme suit :

[…] cette procédure apparaît comme exorbitante du droit interne. Il s’ensuit qu’elle peut être mise en œuvre exclusivement dans les cas qui entrent dans les prévisions du paragraphe 1, c’est-à-dire dans les cas où une imposition a été établie ou doit être établie en méconnaissance des dispositions de la Convention. Ainsi, lorsqu’une imposition a été établie contrairement à la Convention et au droit interne à la fois, elle n’est justifiable de la procédure amiable que dans la mesure où la Convention est en cause, à moins qu’il n’existe un lien de connexité entre les règles conventionnelles et les règles de droit interne ayant été appliquées à tort [86] .

[Non souligné dans l’original.]

  • [97] L’appelante et Compass [87] ont soumis chacune leur dossier à l’autorité compétente du pays dont elles étaient des résidentes. Le dossier présenté portait principalement sur le fait que l’ajustement unilatéral, par le ministre, des revenus de l’appelante avait donné lieu à une double imposition économique et il demandait que cette double imposition économique soit éliminée. Le dossier présenté soulevait nécessairement la question de savoir si les ajustements que le ministre avait apportés aux revenus de l’appelante étaient conformes au paragraphe (1) de l’article IX de la Convention. Le paragraphe (3) de l’article IX prescrivait que l’IRS procède à des ajustements correspondants des revenus de Compass uniquement si l’IRS convenait que les ajustements du ministre étaient conformes au paragraphe (1) de l’article IX de la Convention.

  • [98] L’importance de la procédure amiable dans les affaires de prix de transfert est mentionnée dans la version de 1992 du Commentaire de l’OCDE :

9.  L’article 25 fournit également aux autorités compétentes un mécanisme leur permettant de se concerter en vue de résoudre dans le contexte des prix de transfert non seulement les cas de double imposition juridique, mais aussi les problèmes de double imposition économique et particulièrement ceux qui résultent des réintégrations effectuées dans les bénéfices des entreprises associées en vertu du paragraphe 1 de l’article 9; les ajustements à opérer corrélativement en application du paragraphe 2 du même article [le paragraphe (3) de l’article IX de la Convention] relèvent donc de la procédure amiable, aussi bien pour l’appréciation du bien-fondé du redressement que pour la détermination de son montant.

10.  En effet, ceci résulte des termes mêmes du paragraphe 2 de l’article 9 lorsqu’une clause de ce genre figure dans la convention bilatérale en cause [88] .

[Non souligné dans l’original.]

  • [99] L’explication technique qu’a présentée en 1984 le Département du Trésor des États-Unis à propos du paragraphe (2) de l’article XXVI de la Convention souligne également l’importance de la procédure amiable dans les cas où l’article IX s’applique :

[TRADUCTION]

Le paragraphe 2 prévoit que l’autorité compétente de l’État contractant auquel le cas est soumis doit s’efforcer de régler ce dernier par voie d’accord amiable avec l’autorité compétente de l’autre État contractant, sauf s’il croit que l’opposition n’est pas justifiée ou s’il est en mesure d’arriver à une solution unilatérale satisfaisante. Tout accord conclu entre les autorités compétentes du Canada et des États-Unis doit être mis en œuvre, indépendamment de tout délai ou de toute autre limite procédurale que contiennent les lois internes des États contractants […] Dans un cas où les dispositions de l’article IX s’appliquent, les dispositions des paragraphes 3, 4 et 5 de cet article font autorité pour ce qui est des ajustements et des ajustements correspondants des revenus, des pertes ou des impôts ainsi que de l’effet de la Convention sur les limites temporelles ou procédurales du droit interne. En conséquence, si un allègement n’est pas disponible en vertu de l’article IX en raison d’une fraude, les dispositions du paragraphe 2 ou de l’article XXVI n’autorisent pas indépendamment un tel allègement [89] .

[Non souligné dans l’original.]

  1. Qu’est-ce que les accords amiables ont réglé?

  • [100] M. Quinn a déclaré à plusieurs reprises, et c’est ce que fait valoir l’intimée, que tout ce que l’ACC a fait dans le cadre du traitement du dossier que l’appelante avait soumis à l’autorité compétente a été de transmettre à l’ACA les ajustements que l’appelante avait demandés dans sa divulgation volontaire et de demander un allègement à l’égard de la double imposition. Cette description fait écho à l’objet général des conventions fiscales – éliminer la double imposition – mais elle omet de reconnaître la raison précise pour laquelle la disposition relative à l’accord amiable est entrée en jeu dans ce cas-ci : une imposition non conforme à la Convention.

  • [101] Selon les modalités applicables de la Convention, la question que les deux autorités compétentes avaient à régler était les ajustements qu’autorise le paragraphe (1) de l’article IX ou qu’exige le paragraphe (3) de l’article IX de la Convention. L’ACC a fourni à l’ACA un exposé de position qui expliquait la raison pour laquelle l’appelante voulait que l’on ajuste ses revenus. Ces ajustements avaient été acceptés par le ministre et pris en compte dans les nouvelles cotisations de 2008 [90] .

  • [102] En présentant l’exposé de position à l’ACA, l’ACC a nécessairement adopté la position selon laquelle les ajustements des revenus de l’appelante étaient conformes au paragraphe (1) de l’article IX de la Convention. L’ACA a analysé les ajustements du Canada et a conclu qu’elle y souscrivait. Le paragraphe (3) de l’article IX exigeait donc que l’ACA effectue un ajustement correspondant aux revenus de Compass, ce qu’elle a convenu de faire dans les accords amiables. Ces derniers ont réglé la question de l’application des paragraphes (1) et (3) de l’article IX à l’appelante et à Compass respectivement, et cela a donc donné lieu à une imposition conforme à la Convention.

  • [103] L’ACC et l’ACA ont conclu à deux reprises un accord amiable en vertu du paragraphe (2) de l’article XXVI de la Convention, relativement aux ajustements à apporter aux revenus de l’appelante et de Compass aux termes des paragraphes (1) et (3) de l’article IX de la Convention [91] . Le premier accord portait sur les ajustements relatifs à la période de 2003 à 2006 et le second a ajouté un ajustement pour 2002. Dans chaque cas, il a été demandé à l’appelante d’indiquer à l’ACC si elle souscrivait aux conditions de l’accord amiable et l’appelante a répondu par écrit que c’était le cas.

  • [104] Les conditions des accords amiables sont décrites dans les lettres que l’ACC a envoyées à l’appelante le 10 novembre 2010 [92] et le 7 avril 2011 [93] (collectivement, les « lettres d’ACC »). Les lettres d’ACC font tout d’abord état des ajustements que le ministre a apportés aux revenus de l’appelante lors de l’établissement des nouvelles cotisations de 2008. Elles décrivent ensuite les ajustements correspondant que l’ACA apportera aux revenus de Compass. Les ajustements apportés aux revenus de Compass sont du même montant que les ajustements apportés aux revenus de l’appelante, sauf qu’ils sont à la baisse plutôt qu’à la hausse.

  • [105] Considérées dans leur ensemble dans le contexte du fondement factuel pertinent, les lettres de l’ACC reflètent l’accord de l’IRS à l’égard des ajustements que le ministre a apportés aux revenus de l’appelante et elles décrivent l’allègement découlant de cet accord que l’IRS accordera. Autrement dit, les lettres de l’ACC reflètent l’accord du ministre et de l’IRS selon lequel les ajustements apportés aux revenus de l’appelante et de Compass qui y sont exposés sont conformes aux paragraphes (1) et (3) de l’article IX de la Convention, respectivement. Laisser entendre que les accords amiables portaient simplement sur la double imposition de Compass fait abstraction du contexte factuel dans lequel les accords ont été conclus par le ministre et l’IRS, par l’entremise de leurs représentants respectifs.

  1. L’acceptation, par l’appelante, des accords amiables constitue-t-elle un accord de règlement?

  • [106] Aux dires de l’intimée, le fait que l’appelante a accepté les deux accords amiables n’a pas créé une relation contractuelle exécutoire entre le ministre et elle parce qu’il n’y a eu aucune contrepartie, aucune condition déterminée et aucune communication d’une intention de fixer le prix de transfert du sel. L’intimée soutient que, même s’il y avait un accord exécutoire entre l’appelante et le ministre, il s’agirait d’un accord concernant l’allègement à accorder par l’ACA à l’égard de la double imposition. Il ne s’agirait pas d’un accord de règlement concernant le prix de transfert du sel.

  • 1) Le droit relatif aux accords de règlement

  • [107] Récemment, dans l’arrêt Apotex Inc. c. Allergan, Inc., 2016 CAF 155, la Cour d’appel fédérale a présenté le cadre juridique suivant, qui permet d’évaluer s’il existe ou non un accord de règlement (appelé dans cet arrêt « transaction ») (citations omises) :

[21] Premièrement, le juge doit conclure, selon les éléments de preuve qui lui sont présentés, que, objectivement, les parties avaient l’intention commune de créer des rapports juridiques.

[22] Le critère consiste à rechercher si un témoin raisonnable qui observe les parties conclurait que les deux parties, en faisant une offre de transaction et en l’acceptant, avaient l’intention de créer des rapports juridiques […]

[…]

[25] Deuxièmement, comme toutes les autres ententes, une transaction doit répondre à l’exigence de contrepartie découlant d’une promesse. En matière de transaction, cela n’est certainement presque jamais un problème – par définition, les transactions sont des compromis, donc il y a une contrepartie allant dans les deux sens.

[26] Le juge doit aussi conclure, sur le plan objectif, que les conditions de l’accord sont suffisamment certaines […] Lorsque les parties [TRADUCTION] « s’expriment de telle façon que leurs intentions ne peuvent pas être comprises par la cour [...] l’accord ne tient pas faute de certitude des conditions » […] Autrement dit, le juge doit conclure que les parties étaient objectivement d’accord ou que, objectivement, les parties avaient une volonté commune.

[27] Il ne revient pas au juge de modifier l’offre et l’acceptation des parties et de rendre les conditions certaines. Le juge ne fera pas une [TRADUCTION] « nouvelle entente pour les parties » alors si elles [TRADUCTION] « n’ont jamais été d’accord » […]

[28] Cela dit, lorsque les parties avaient objectivement une volonté commune et [TRADUCTION] « avaient l’intention de créer des rapports juridiques entre elles », souvent leurs attentes raisonnables peuvent être discernées et [TRADUCTION] « le juge cherchera en général à [leur] donner effet » […]

[29] L’absence de certitude des conditions menant à la conclusion qu’il n’y avait pas d’entente est quelque chose de très différent de la présence, dans une entente, de mots qui ont plusieurs sens. Par exemple, des mots comme « dénigrer » ou « scientifique » peuvent avoir plusieurs sens, mais du moment que la cour peut donner un sens à ces conditions dans tel ou tel cas, l’entente n’est pas nulle en raison de son incertitude […]

[30] Nulle entente n’est conclue avant qu’il y ait une offre et une acceptation correspondante de toutes les conditions qui lui sont essentielles […] Un désaccord, apprécié objectivement, sur une condition essentielle, signifie qu’il n’y a pas entente […]

[31] Comment le juge détermine-t-il quelles conditions sont essentielles et quelles conditions ne le sont pas?

[32] Le juge doit examiner objectivement les faits précis de l’affaire à la lumière des circonstances concrètes et demander si les parties avaient l’intention d’être liées juridiquement par ce qui avait été déjà convenu ou, en d’autres termes, si [TRADUCTION] « un homme ou une femme d’affaire honnête et raisonnable, en examinant objectivement le comportement des parties, pourrait raisonnablement conclure que les parties avaient l’intention d’être liées ou non » par les conditions arrêtées […] Autrement dit, du point de vue d’hommes ou de femmes d’affaires raisonnables, qui se mettent à la place des parties, et non de celui d’avocats, y avait-il une autre question essentielle à régler? […] Autrement dit, il faut rechercher de quelle manière [TRADUCTION] « une personne raisonnable, versée dans la matière, aurait compris les échanges entre les parties » […]

[33]   Lorsque le juge conclut qu’il y a eu entente sur les conditions essentielles, il dégage, souvent par implication, des conditions non essentielles de l’entente […] Même en cas d’absence d’entente sur les conditions non essentielles, il est loisible au juge de constater l’existence d’une entente. […]

  • 2) La preuve d’intention commune

  • [108] La première question à examiner est celle de savoir s’il existe une preuve objective que les parties avaient une intention commune de créer des rapports juridiques. Les lettres de l’ACC énoncent chacune les conditions de l’entente qu’ont conclue l’ACC et l’ACA au sujet des ajustements à apporter aux termes des paragraphes (1) et (3) de l’article IX de la Convention, ainsi qu’au sujet de questions connexes, telles que le rapatriement des profits au Canada. L’avant‑dernier paragraphe de chacune des lettres indique ce qui suit :

[TRADUCTION]

Nous vous saurions gré de faire savoir à notre bureau, dans les 30 jours suivant la date de la présente lettre, si Sifto est disposée à souscrire aux conditions du règlement convenu entre les autorités compétentes, décrit ci-dessus. Une fois que nous aurons reçu votre acceptation, nous donnerons instruction à notre Bureau des services fiscaux de Toronto-Ouest d’ajuster vos déclarations de revenus en fonction de ce règlement.

[109]  M. Quinn a témoigné que ce paragraphe était une formule type et qu’il était [TRADUCTION] « erroné », car l’appelante n’avait rien à accepter, en ce sens que les ajustements découlant de l’accord amiable n’étaient apportés qu’aux revenus de Compass. M. Quinn n’a pas expliqué pourquoi, en lisant les lettres de l’ACC, il n’a pas modifié ou supprimé le paragraphe si ce dernier était bel et bien « erroné » et n’indiquait donc pas l’intention de l’ACC. M. Quinn semble aussi avoir négligé le fait que l’accord amiable, s’il était mis en œuvre, ce serait soldé par le retour à l’appelante, libres de toute retenue d’impôt des États-Unis, des profits de 11 090 756 $ US initialement attribués à NASC et inclus dans les revenus consolidés de Compass.

  • [110] À mon avis, le paragraphe type n’était pas erroné; il reflétait de manière exacte la situation que l’ACC et l’ACA avaient réglée en vertu du paragraphe (2) de l’article XXVI de la Convention. Les deux autorités compétentes ont négocié [94] et ont convenu en fin de compte que les ajustements des revenus de l’appelante étaient conformes au paragraphe (1) de l’article IX de la Convention. Cet accord exigeait à son tour que l’ACA apporte aux revenus de Compass les ajustements correspondant qu’exigeait le paragraphe (3) de l’article IX de la Convention. L’accord amiable réglait donc la question que l’appelante et Compass avaient nécessairement soulevée en vue de faire entrer en jeu, au départ, la disposition relative à l’accord amiable; c’est-à-dire, qu’il y avait une imposition qui n’était pas conforme aux paragraphes (1) et (3) de l’article IX de la Convention [95] .

  • [111] L’appelante et Compass ont toutes deux bénéficié de l’acceptation de l’accord amiable, car l’appelante aurait une certaine certitude quant au prix de transfert du sel et recevrait la somme de 11 090 756 $US libre de toute retenue d’impôt des États-Unis et Compass serait autorisée à réduire ses revenus aux fins de l’impôt sur le revenu des États-Unis de façon à refléter le prix de transfert convenu, ce qui éliminerait ainsi la double imposition économique. Ces résultats contredisent ce que M. Quinn a laissé entendre, à savoir qu’il n’y avait rien auquel l’appelante pouvait souscrire.

  • [112] L’inclusion de l’avant-dernier paragraphe des lettres d’ACC concorde aussi avec la propre description que fait l’ARC du processus des autorités compétentes et avec la manière dont divers auteurs le conçoivent. Dans son texte de 1994 sur les conventions en matière de double imposition, Philip Baker fait remarquer :

[TRADUCTION]

[…] Il est possible que l’on demande au contribuable s’il souscrit aux résultats de l’accord; si c’est le cas, il est possible que cet accord soit obligatoire pour lui, comme le serait un contrat. Au Canada, un contribuable n’est lié par un accord mutuel que s’il y souscrit [96] .

  • [113] M. Baker cite le paragraphe 18 de la Circulaire d’information 71-17R3 à l’appui de cette dernière thèse [97] . Les paragraphes importants de la Circulaire d’information 71-17R5 qui est actuellement en vigueur sont les suivants :

53. Les accords entre les autorités compétentes ne créent pas de précédents dont le contribuable ou l’ARC peut se servir lors de l’établissement de cotisations ou nouvelles cotisations pour des années ultérieures ou lors de négociations entre les autorités compétentes concernant des questions identiques. Cela s’explique par le fait que l’accord conclu par les autorités compétentes peut être fondé sur les faits touchant un contribuable précis, de même que sur les différences qui existent entre les dispositions des lois fiscales des pays concernés et sur les répercussions des indicateurs économiques sur les opérations en cause à un moment précis. L’établissement d’une cotisation ou nouvelle cotisation pour les années ultérieures doit reposer sur les circonstances, les faits et les pièces justificatives particuliers qui existent pour ces années-là.

54. Un contribuable ne peut choisir d’accepter uniquement les modalités de l’accord qui se rapportent à des questions ou à des années d’imposition particulières, étant donné qu’au départ le contribuable aurait demandé de l’aide pour toutes les questions et toutes les années d’imposition en cause et que les autorités compétentes auraient englobé dans leurs négociations toutes les questions et toutes les années.

55. Un contribuable qui n’est pas satisfait de l’accord négocié par les autorités compétentes peut rejeter l’accord. S’il le rejette, les autorités compétentes considèrent le cas comme clos, et elles en avisent le contribuable. Lorsqu’il s’agit d’une cotisation ou nouvelle cotisation établie au Canada, le contribuable peut toujours, s’il a déposé un avis d’opposition ou un appel valide, se prévaloir du processus d’appel et (ou) soumettre le cas à la Cour canadienne de l’impôt. Si la Direction générale des appels ou la Cour n’annule pas le redressement en totalité, une double imposition peut subsister. L’autorité compétente du Canada acceptera une autre demande présentée par le même contribuable à ce sujet, mais se contentera de soumettre le cas à l’autorité compétente de l’autre pays, et elle n’entreprendra pas de négociations une seconde fois.

[114]  La propre Circulaire d’information de l’ARC prévoit manifestement que le contribuable peut accepter ou rejeter l’accord des autorités compétentes [98] . Mme Spice semble avoir compris l’approche générale énoncée dans la Circulaire d’information, car elle a demandé à M. Harkin une [TRADUCTION] « copie de l’accord de la contribuable à l’égard du règlement » dans un courriel qu’elle lui a adressé le 31 mai 2011 [99] . M. Harkin semble être du même avis parce qu’il a répondu qu’il fournirait à Mme Spice des [TRADUCTION] « copies de l’accord de la contribuable à l’égard du règlement ». Bien que ni l’une ni l’autre de ces déclarations ne soit pertinente à l’égard de l’intention contractuelle à l’époque où les lettres de l’ACC ont été envoyées et retournées signées, on peut en déduire que Mme Spice et M. Harkin ne considéraient pas que les avant-derniers paragraphes des lettres de l’ACC étaient erronés [100] .

[115]  L’ACC exerçait un contrôle total sur le libellé des lettres de l’ACC, lesquelles ont été présentées à l’appelante sous une forme « à prendre ou à laisser ». Le libellé des lettres n’était pas ambigu. Les termes employés décrivaient clairement les conditions de l’accord amiable que l’ACC et l’ACA avaient conclu et ils demandaient à l’appelante d’accepter ou de refuser ces conditions [101] . L’appelante a accepté chacune des offres par écrit et a même fait un suivi auprès de M. Quinn, après avoir répondu à la première lettre de l’ACC, dans le but de vérifier si sa réponse avait été reçue et s’il y avait quoi que ce soit d’autre à faire. M. Quinn a répondu : [TRADUCTION] « Bien reçu, Craig, et c’est exactement ce qu’il nous faut. Merci [102] . » Cette réponse va à l’encontre de ce que M. Quinn a laissé entendre, à savoir que l’avant-dernier paragraphe des lettres de l’ACC était erroné et dénué de sens dans les circonstances.

  • [116] Il ne fait aucun doute dans mon esprit qu’une personne raisonnable qui lirait les lettres que l’ACC a envoyées à l’appelante et l’acceptation, par cette dernière, des conditions de ces lettres, conclurait que l’ACC a offert à l’appelante d’accepter les conditions de l’accord amiable que l’ACC avait conclu avec l’ACA et que l’appelante a accepté cette offre. Le fondement factuel pertinent, qui inclut le processus amiable prescrit par la Convention et la propre explication publique de l’ARC au sujet du processus des autorités compétentes, ne contribue qu’à renforcer cette conclusion. La description subjective que M. Quinn a faite des lettres d’ACC, après coup, n’est ni pertinente ni convaincante pour ce qui est de fonder une conclusion différente.

  • 3) La contrepartie mutuelle

  • [117] La deuxième exigence est qu’il doit y avoir entre les parties un échange de contreparties. La contrepartie de l’appelante est l’entente implicite de ne pas poursuivre la question plus avant en recourant à d’autres voies disponibles. Cette contrepartie n’est pas différente de celle qui existe dans n’importe quelle affaire où un contribuable convient avec le ministre de régler une question en matière d’impôt sur le revenu qui est en suspens. Même si, dans certains cas, comme ceux sur lesquels porte le paragraphe 169(2.2), l’entente du contribuable de ne pas faire opposition ou appel serait plus explicite, le fait que l’ACC n’ait pas inclus dans ses lettres un libellé plus explicite ne veut pas dire que l’appelante n’a donné aucune contrepartie en souscrivant aux conditions énoncées dans ces lettres. Le paragraphe 169(2.2) lui-même précise : « il est entendu que […] » et cela ne veut pas dire qu’une contrepartie est accordée uniquement s’il y a une renonciation écrite.

[118]  La contrepartie de l’ACC est l’entente de mettre en œuvre le règlement des autorités compétentes si l’appelante y souscrit. Plus précisément, l’avant‑dernier paragraphe des lettres de l’ACC indique : [TRADUCTION] « Une fois que nous aurons reçu votre acceptation, nous donnerons instruction à notre Bureau des services fiscaux de Toronto-Ouest d’ajuster vos déclarations de revenus en fonction de ce règlement. » Cet énoncé concorde avec le texte du paragraphe 55 de la Circulaire d’information 71-17R5, qui indique que, si le contribuable n’accepte pas le règlement, les autorités compétentes considéreront que l’affaire est close et elles ne prendront pas d’autres mesures.

  • [119] Après avoir reçu de l’appelante l’acceptation du premier accord amiable, la DSAC a informé M. Kamlesh Kumar, directeur adjoint, Vérification et M. Arun Khanna, chef des Appels, tous deux du Bureau des services fiscaux de Toronto-Ouest, du règlement conclu avec l’IRS, et ce, au moyen de notes de service datées du 17 décembre 2010 (les « notes de service »). Les notes de service remplissent la promesse de l’ACC qui est décrite à la dernière phrase des avant‑derniers paragraphes des lettres de l’ACC. Pour sa part, l’appelante n’a pris aucune autre mesure avant l’établissement des nouvelles cotisations qui s’écartaient de l’accord amiable. Dans le cas du second accord amiable, un processus semblable a eu lieu.

  • 4) Des conditions suffisamment sûres

  • [120] La troisième exigence est que les conditions de l’accord doivent être suffisamment sûres. Ici, comme il a déjà été mentionné, les conditions des accords amiables sont clairement énoncées dans les lettres de l’ACC. Le fait que l’appelante ait souscrit à ces conditions est clairement indiqué dans les lettres qui ont été retournées signées à l’ACC [103] .

  1. Les accords de règlement ont-ils fixé le prix de transfert du sel?

  • [121] L’intimée soutient que, même s’il y a eu accord entre le ministre et l’appelante, cet accord ne fixe pas le prix de transfert du sel.

[122]  Les lettres de l’ACC décrivent en détail les ajustements qui ont été faits en conformité avec les paragraphes (1) et (3) de l’article IX de la Convention. Le témoignage de M. Harkin au sujet de l’une des conversations qu’il avait eues avec l’ACA indique que cette dernière s’intéressait à la question de savoir si l’ajustement des revenus de l’appelante était conforme au paragraphe (1) de l’article IX. Plus précisément, selon l’extrait du SSAC déposé en tant que pièce R‑3, Mme Indu Subbiah a déclaré dans une conversation téléphonique avec M. Harkin, le 11 mai 2010, qu’elle voulait [TRADUCTION] « analyser l’effet de certaines des grandes entreprises à revenus élevés qui figurent dans la série comparable ». Dans les notes manuscrites de M. Harkin prises lors de la même conversation, ce dernier écrit, sous la rubrique « Indu » :

[TRADUCTION]

- considère en général que l’allègement est bon, mais veut analyser l’effet de certaines des grandes entreprises figurant dans la série comparable.

- veut voir si des ajustements sont nécessaires [104] .

  • [123] M. Harkin a témoigné à peu près dans le même sens [105] . Même si les déclarations attribuées à Mme Subbiah, qui sont présentées pour en établir la véracité, constituent du ouï-dire, le fait que M. Harkin ait consigné les déclarations dans ses notes et, sous forme sommaire, dans le SSAC indique qu’il les a acceptées telles quelles. Compte tenu des circonstances dans lesquelles ces communications ont eu lieu (c.-à-d., un dialogue officiel entre l’ACC et l’ACA), il n’y a, selon moi, aucune raison de douter que l’ACA faisait exactement ce que Mme Subbiah avait suggéré dans sa conversation avec M. Harkin – examiner soigneusement la méthode d’établissement du prix de transfert utilisée afin de déterminer les ajustements des revenus de l’appelante [106] .

  • [124] L’appelante avait adopté la méthode de la marge nette de transaction (« MMNT »), qui, de façon générale, détermine un niveau de profit approprié pour un contribuable, en se fondant sur des données de pleine concurrence comparables. Contrairement à, par exemple, la méthode du prix de marché comparable (« PMC »), cette approche ne se fonde pas sur un prix de vente particulier pour le sel. Il est toutefois possible de déterminer un prix de transfert implicite qui soit fondé sur le profit réalisé sur la vente du sel. C’est donc dire qu’en examinant soigneusement la méthode employée, l’ACA déterminait en fait si elle était favorable au prix de transfert implicite que produisait cette méthode. Cela n’est pas surprenant, car les ajustements autorisés par le paragraphe (1) de l’article IX de la Convention et le prix de transfert qui avait donné lieu aux ajustements étaient inextricablement liés, de sorte qu’une entente à l’égard des ajustements était également une entente à l’égard du prix de transfert implicite qui découlait de ces ajustements.

  • [125] Le lien direct entre le prix de transfert des opérations conclues entre l’appelante et NASC et les ajustements apportés aux revenus de l’appelante est souligné dans une lettre datée du 25 janvier 2011 que l’ACA a envoyée à Compass [107]  :

[TRADUCTION]

Nous avons conclu nos discussions avec l’autorité compétente canadienne au sujet de la demande de Compass Minerals International, Inc. (« Compass) en vue d’un examen par l’autorité compétente portant sur les années d’imposition prenant fin les 28 février de 2002 à 2017.

Un accord amiable a été conclu au sujet du prix de transfert de l’opération entre Compass et Sifto Canada Inc. (« Sifto »). À la suite de nos discussions, l’autorité compétente américaine a convenu d’accorder, à titre d’allègement correspondant intégral, les montants indiqués dans le tableau ci-dessous.

[Non souligné dans l’original.]

  • [126] L’ACA informe Compass qu’un accord amiable a été conclu à propos du prix de transfert des opérations au cours de la période mentionnée. Ce fait reconnaît à juste titre que les ajustements des revenus qu’autorise le paragraphe (1) de l’article IX de la Convention sont le résultat d’un prix de transfert et qu’il est impossible de souscrire aux ajustements des revenus de l’appelante sans souscrire aussi au prix de transfert implicite qui découle de ces ajustements.

  • [127] Dans le même ordre d’idées, la section JUSTIFICATION du sommaire de décision interne de la DSAC indique :

[TRADUCTION]

Après de nombreuses négociations, l’IRS a souscrit aux ajustements présentés dans le cadre de la divulgation volontaire. L’IRS a admis que les ajustements sont conformes au principe de pleine concurrence. Les ajustements redressent les revenus d’exploitation de Sifto de façon à obtenir un retour sur le coût total qui soit égal au point le plus bas des observations moyennes pondérées tirées des données d’entreprises comparables [108] .

  • [128] Cette description reconnaît que les ajustements apportés aux revenus de l’appelante qui ont été mis en œuvre par les nouvelles cotisations de 2008 étaient conformes au paragraphe (1) de l’article IX de la Convention parce qu’ils cadraient avec le principe de pleine concurrence. Dans l’arrêt Marzen Artistic Aluminum Ltd. c. Canada, 2016 CAF 34 (« Marzen Artistic Aluminum »), la Cour d’appel fédérale a décrit ce principe dans le contexte de la règle canadienne concernant les prix de transfert internes :

[15]  Depuis 1939, la Loi comprend des dispositions en vertu desquelles un contribuable canadien peut faire l’objet d’une nouvelle cotisation afin d’inclure dans son revenu canadien la différence entre le prix payé pour un bien ou pour un service à un non‑résident avec lequel il a un lien de dépendance et le prix qu’il aurait payé s’il n’avait pas eu de lien de dépendance. Le paragraphe 247(2) de la Loi a succédé au paragraphe 69(2), lequel a été abrogé en 1998 (L.C. 1998, ch. 19, paragraphe 107(1)).

[16]  Une entreprise transnationale est libre de fixer le prix d’une opération entre deux sociétés sous son contrôle suivant des juridictions fiscales différentes. L’expression « prix de transfert » désigne le fait de fixer un prix entre sociétés liées. Le principe sous-jacent du prix de transfert est la détermination de la juste valeur marchande d’une opération entre sociétés liées. Cette détermination exige qu’on compare ce que des parties sans lien de dépendance auraient pris en considération.

[17]  Le libellé de l’article 247 ne renferme aucun critère et n’indique aucune méthode permettant de déterminer le montant raisonnable que des parties sans lien de dépendance auraient payé lors d’une opération donnée assujettie aux principes du prix de transfert. Par conséquent, les cours canadiennes se sont appuyées sur les Principes de l’OCDE de 1995 (les principes), les jugeant utiles dans de tels cas.

[18]  Dans l’arrêt Canada c. GlaxoSmithKline Inc., 2012 CSC 52, [2012] 3 R.C.S. 3 (Glaxo), aux paragraphes 20 et 21, la Cour suprême a déclaré que les principes de 1995 « n’ont pas la même force contraignante qu’une loi canadienne », mais qu’ils sont utiles pour déterminer le montant qu’un commerçant raisonnable qui est partie à une opération aurait payé si aucun lien de dépendance n’avait existé. La Cour a aussi affirmé qu’une analyse du prix de transfert est intrinsèquement fondée sur des faits.

  • [129] On trouve une description semblable dans la Circulaire d’information 87-2R, datée du 27 septembre 1999 (la « CI 87-2R ») :

7. Les dispositions législatives canadiennes en matière de prix de transfert :

  incorporent le principe de pleine concurrence; et

  exigent que, aux fins de l’impôt, les conditions convenues par des parties ayant un lien de dépendance dans le cadre de leurs relations financières ou commerciales, soient celles auxquelles on pourrait s’attendre si les parties n’avaient aucun lien de dépendance.

Ces dispositions permettent de veiller à ce que les contribuables qui sont membres d’un groupe lié et qui effectuent des opérations entre eux, déclarent à peu près le même montant de revenu qu’ils auraient déclaré s’il n’y avait entre eux aucun lien de dépendance.

8 L’OCDE et le Canada continuent d’endosser le principe de pleine concurrence comme règle fondamentale régissant le traitement fiscal des opérations transfrontalières entre parties ayant un lien de dépendance.

9. Le principe de pleine concurrence :

  exige de traiter toutes les parties ayant un lien de dépendance d’un groupe comme des entités distinctes, plutôt que comme des parties inséparables d’une seule entreprise unifiée;

  est généralement fondé sur une comparaison entre :

  • - les prix ou les marges entre des parties ayant un lien de dépendance pour des opérations transfrontalières (« opérations contrôlées »); et

  • - les prix ou les marges pour des opérations similaires effectuées entre des parties n’ayant aucun lien de dépendance (« opérations non contrôlées »).

  • [130] En conséquence, pour déterminer si un ajustement des revenus de l’appelante reflétait le principe de pleine concurrence qu’intègre le paragraphe (1) de l’article IX de la Convention, il est nécessaire de suivre la même approche générale que celle qu’impose la règle canadienne en matière de prix de transfert internes. Pour dire les choses simplement, le principe de pleine concurrence oblige à effectuer une analyse de l’établissement du prix de transfert. Il n’est donc pas surprenant que l’ACA ait mis l’accent sur l’analyse du prix de transfert dans le document soumis au PDV et dans l’exposé de position de l’ACC en vue de déterminer s’il fallait souscrire aux ajustements des revenus de l’appelante faits par le ministre.

  • [131] M. Quinn a déclaré à maintes reprises que les ajustements que l’ACC avait soumis à l’ACA étaient inusités parce qu’ils découlaient d’une divulgation volontaire et que l’ACC n’avait adopté aucune position à l’égard de ces ajustements. L’intimée a fait valoir que l’ACC n’avait fait rien de plus qu’accepter la demande de l’appelante en vue d’obtenir un allègement à l’égard de la double imposition, soumettre la demande de l’appelante à l’ACA, obtenir de cette dernière son accord pour accorder un allègement à l’égard de la double imposition et communiquer le résultat à l’appelante.

  • [132] Le fait que les ajustements des revenus de l’appelante, dans les nouvelles cotisations de 2008, découlaient d’une divulgation volontaire de l’appelante et le fait que l’ARC avait décidé de ne pas vérifier ces ajustements avant d’établir les nouvelles cotisations de 2008 ne change pas le fait que l’accord amiable conclu entre l’ACC et l’ACA a nécessairement déterminé le prix de transfert des opérations applicables, lequel reflétait les ajustements des revenus de l’appelante et de Compass.

  • [133] Si l’ARC avait un problème avec les ajustements que l’appelante avait suggérés dans sa divulgation volontaire, elle aurait pu facilement procéder à une vérification de l’appelante avant d’établir les nouvelles cotisations relatives aux années d’imposition soumises au PDV. Au lieu de cela, l’ARC a décidé d’établir les nouvelles cotisations de 2008 sans procéder à une vérification. Dans le même ordre d’idées, en apprenant la vérification imminente de certaines des années qui faisaient l’objet d’une négociation avec l’ACA, l’ACC aurait pu décider de reporter ces négociations, voire y mettre fin. Au lieu de cela, elle a décidé de poursuivre ses négociations en matière d’accord amiable avec l’ACA et ces dernières se sont soldées par deux accords amiables. Il semble que la dernière décision découlait de la préoccupation selon laquelle le dossier serait admissible à l’arbitrage en décembre 2010 [109] .

  1. La forme des accords de règlement

  • [134] L’intimée a laissé entendre que les lettres de l’ACC ne sont pas conformes à un accord de règlement caractéristique. Cependant, comme il a été mentionné dans l’arrêt Apotex, il n’est pas obligatoire qu’un tel accord revête une forme particulière :

[23] L’exigence d’une intention mutuelle objective de créer des rapports juridiques ne signifie pas qu’est nécessaire le formalisme. Il n’est pas obligatoire que les transactions soient conclues par l’intermédiaire d’un avocat ou lors de discussions officielles préalablement planifiées.

[24] En effet, on remarque dans de nombreux cas, parfois à la grande surprise des clients et des avocats – qu’une conversation banale en apparence peut avoir des conséquences juridiques contraignantes. Les transactions peuvent découler de communications à bâtons rompus impromptues dans un contexte détendu et non commercial.

  • [135] Dans la présente espèce, la forme de l’accord de règlement conclu avec l’appelante dépendait entièrement de la volonté de l’ACC. Cette dernière a décidé d’écrire à l’appelante, de lui décrire les conditions de l’accord amiable conclu avec l’ACA et de lui demander si elle y souscrivait. Comme il a déjà été mentionné, il n’y avait aucune ambiguïté dans le libellé des lettres de l’ACC, et l’appelante a clairement souscrit à leurs conditions. Je ne vois pas pourquoi, dans de telles circonstances, il ne faudrait pas considérer les lettres d’ACC et le retour de ces lettres signées comme un accord de règlement à l’égard de la question que l’ACC et l’ACA avaient résolue, à savoir les ajustements des revenus en vertu des paragraphes (1) et (3) de l’article IX de la Convention et le prix de transfert du sel qui était implicite dans ces ajustements. L’ACA a considéré à juste titre l’objet de l’accord amiable comme la détermination du prix de transfert, ainsi qu’en fait foi la lettre du 25 janvier 2011 qu’elle a envoyée à Compass.

  1. Le ministre est-il tenu d’établir une nouvelle cotisation à l’endroit des appelantes, indépendamment des accords de règlement?

  • [136] L’intimée fait valoir qu’indépendamment de tout accord pouvant exister entre le ministre et l’appelante, le ministre était tenu par les dispositions de la LIR d’établir une nouvelle cotisation à l’endroit de l’appelante pour les années d’imposition visées une fois qu’il avait déterminé, dans le cadre d’une vérification, que le prix de transfert appliqué par l’ACC et l’ACA pour déterminer les bons ajustements aux termes du paragraphe (1) de l’article IX de la Convention était inexact.

  • [137] Cette position soulève trois questions. Premièrement, l’accord de règlement lie-t-il le ministre, de sorte que ce dernier ne peut pas établir une nouvelle cotisation qui soit contraire à l’accord? Deuxièmement, si l’accord de règlement ne lie pas le ministre vis-à-vis de l’appelante, le ministre est‑il néanmoins tenu par la Convention de donner effet à l’accord amiable au moment de soumettre l’appelante à une cotisation? Troisièmement, si la Convention à elle seule n’exige pas que le ministre soumette l’appelante à une cotisation, conformément à l’accord amiable, quel effet l’article 115.1 a-t-il sur le droit qu’a le ministre de passer outre à cet accord?

  • 1) Les accords de règlement lient-ils le ministre?

  • [138] L’essentiel de l’argument qu’invoque l’intimée est que le ministre est tenu de fonder la cotisation de l’appelante sur l’application du droit aux faits et qu’un accord conclu avec l’appelante n’a pas d’incidence sur cette obligation. Dans l’arrêt Galway c. M.R.N., [1974] 1 C.F. 600, la Cour d’appel fédérale a écrit :

[…] le Ministre a l’obligation, aux termes de la Loi, de fixer le montant de l’impôt exigible d’après les faits qu’il établit et en conformité de son interprétation de la loi. Il s’ensuit qu’il ne peut établir une cotisation pour un certain montant fixé afin de donner effet à un compromis et que, lorsque la Division de première instance ou la présente cour d’appel défère une cotisation au Ministre pour nouvelle cotisation, cela ne peut s’effectuer que d’après les faits et en conformité de la loi, et non pour donner effet à un compromis [110] .

  • [139] Fait important, l’arrêt Galway n’exclut pas la possibilité que le ministre puisse convenir avec un contribuable de régler une affaire de nature fiscale. La Cour écrit (à la p. 603) :

[…] Dans ces circonstances, il n’y a aucune raison de s’opposer à une nouvelle demande des parties se fondant sur un jugement sur consentement visant à donner effet à leur accord sur la façon d’établir la cotisation en appliquant la loi aux faits […]

  • [140] L’arrêt Galway ne laisse pas entendre que tout règlement est inopposable au ministre à cause de l’obligation qu’a ce dernier d’appliquer le droit aux faits. Dans cet arrêt, la Cour reconnaît simplement que les conditions du règlement doivent être de nature telle qu’un tribunal pourrait rendre jugement sur le même fondement que le règlement. Si le tribunal ne peut pas rendre jugement dans les circonstances, le règlement est donc illégal et ne lie pas le ministre [111] .

  • [141] Dans l’arrêt CIBC World Markets Inc. c. La Reine, 2012 CAF 3, la Cour d’appel fédérale amplifie ces points, comme suit :

CIBC World Markets invoque le paragraphe 36 de 1390758 Ontario Corporation c. The Queen, 2010 CCI 572, et Smerchanski c. Ministre du Revenu national [1977] 2 R.C.S. 23, à l’appui de la thèse que les tribunaux judiciaires ont donné effet à des transactions appliquant le droit fiscal à des faits convenus. Cette proposition est vraie. Mais le ministre ne peut convenir de faits que dans les limites du principe de Galway : il ne lui est pas permis de donner son accord à une cotisation injustifiable en fait et en droit. Aucun élément de 1390758 Ontario ni de Smerchanski n’infirme le principe de Galway.

Pour l’instant, la Loi sur la taxe d’accise ne contient aucune disposition qui autoriserait le ministre à conclure des règlements sur la seule base de compromis, plutôt que de s’en tenir aux faits et au droit tels qu’il les interprète ou pourrait raisonnablement les invoquer. Autrement dit et avec plus de concision, aucune disposition législative n’a annulé Galway.

[…]

[…] malgré Galway une forte proportion des différends fiscaux n’atteint pas le stade du jugement. Il arrive souvent que les négociations et discussions révèlent des faits nouveaux, permettent de mieux définir la situation d’ensemble et enrichissent l’interprétation du droit applicable. Et ces négociations et discussions peuvent aboutir à un règlement auquel il sera loisible au ministre de donner suite en établissant une nouvelle cotisation sur le fondement d’une interprétation défendable des faits et du droit [112] .

[Non souligné dans l’original, caractères gras ajoutés.]

  • [142] Dans la présente affaire, le ministre et l’IRS ont convenu que les ajustements étaient conformes au principe de pleine concurrence qui est appliqué au paragraphe (1) de l’article IX de la Convention ainsi que dans la règle canadienne de l’établissement des prix de transfert internes [113] . L’appelante a souscrit à l’entente entre le ministre et l’IRS. Rien ne me permet de conclure que l’accord que le ministre et l’IRS ont conclu était injustifiable en fait et en droit. L’ACC a présenté le rapport sur le prix de transfert de l’appelante à l’ACA et cette dernière a passé en revue les données et conclu, semble-t-il, que le prix que l’appelante avait adopté pour les opérations satisfaisait au principe de pleine concurrence. Cette conclusion a été signalée par l’ACC au Bureau des services fiscaux de Toronto‑Ouest, dans la section JUSTIFICATION des deux sommaires de décision [114] . L’ACA a également indiqué qu’elle ne s’écarterait pas de sa position relative au prix de transfert, même si le ministre décidait de soumettre l’appelante à une nouvelle cotisation [115] .

  • [143] Je n’ai pas eu l’avantage d’une preuve d’expert sur le prix de transfert fixé par les accords amiables, mais la MMNT que l’appelante a appliquée et que le ministre et l’ACA ont acceptée est certes un moyen raisonnable de déterminer un prix de transfert de pleine concurrence. Le fait que la marge nette que l’appelante a choisie et que le ministre a soumise à une nouvelle cotisation se situait à l’extrémité inférieure de la fourchette comparable, n’est certes pas un fondement qui permet de conclure que le prix était injustifiable en fait et en droit.

  • [144] Les ajustements que le ministre a apportés aux revenus de l’appelante ont été acceptés par l’IRS, même s’ils avaient pour effet de réduire l’impôt à payer aux États-Unis. Il est raisonnable de présumer que l’IRS n’aurait pas accepté de tels ajustements si elle ne considérait pas qu’ils reflétaient le principe de pleine concurrence. Cette hypothèse concorde avec l’approche générale suivie au paragraphe (3) de l’article IX de la Convention (paragraphe 9(2) du Modèle de convention de l’OCDE), décrit à la partie II des Principes de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert de 1995, au paragraphe 151 :

151. L’ajustement corrélatif n’est pas obligatoire, la règle étant que les administrations fiscales ne sont pas tenues de parvenir à un accord dans le cadre de la procédure amiable. En vertu de l’article 9 paragraphe 2, une administration fiscale ne devrait procéder à un ajustement corrélatif que dans la mesure où elle considère que l’ajustement initial est justifié à la fois dans son principe et dans son montant. Il est indispensable que l’ajustement corrélatif ne soit pas obligatoire, afin qu’une administration fiscale ne soit pas obligée d’accepter les conséquences d’un ajustement arbitraire ou fantaisiste opéré par un autre État. Il est par ailleurs essentiel de préserver la souveraineté fiscale de chaque pays Membre.

[Soulignement et caractères gras ajoutés.]

  • [145] Dans les circonstances, rien ne me permet de conclure que l’entente conclue entre l’ACC et l’ACA et acceptée par l’appelante et Compass était injustifiable en fait et en droit. Le fait que l’ARC a unilatéralement décidé de soumettre l’appelante à une nouvelle cotisation en vue de modifier le prix de transfert n’est pas une preuve que les ajustements dont il était question dans les accords amiables étaient injustifiables en fait et en droit. En revanche, le fait que deux administrations fiscales sans lien de dépendance aient souscrit aux ajustements dans les lettres de l’ACC dénote, selon moi, que ces ajustements sont bel et bien justifiables en fait et en droit. Par conséquent, les conditions de la lettre du 7 avril 2011 qui a été envoyée à l’appelante lient le ministre et l’appelante à titre d’accord de règlement. Elles fixent les revenus que l’appelante a tirés des opérations conclues avec NASC au cours des années d’imposition visées.

  • 2) Les accords amiables lient-ils le ministre?

  • [146] Si je me trompe dans cette conclusion, je suis également d’avis que les accords conclus entre l’ACC et l’ACA liaient le ministre à titre d’accords mutuels conclus aux termes du paragraphe (2) de l’article XXVI de la Convention et que le ministre n’est pas autorisé à établir une cotisation d’une manière qui n’est pas conforme aux accords.

  • [147] Les articles 26 et 27 de la Convention de Vienne (référence citée à la note de bas de page no 85, précitée) indiquent :

Article 26

Pacta sunt servanda

Tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi.

Article 27

Droit interne et respect des traités

Une partie ne peut invoquer les dispositions de son droit interne comme justifiant la non-exécution d’un traité. Cette règle est sans préjudice de l’article 46.

  • [148] Le Canada a ratifié la Convention de Vienne par adhésion le 14 octobre 1970, et celle-ci est entrée en vigueur le 27 janvier 1980. Les États‑Unis ont signé la Convention de Vienne le 24 avril 1970, mais ils ne l’ont jamais ratifiée. Cependant, cela ne change pas les obligations du Canada aux termes de la Convention de Vienne ou de la Convention.

  • [149] Dans l’arrêt Divito c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 47, [2013] 3 RCS 157, la Cour suprême a reconnu que les traités internationaux que ratifie le Canada ont force obligatoire :

On considère habituellement que le par. 6(1) de la Charte s’inspire, en droit international, de l’art. 12 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, R.T. Can. 1976 no 47 (« PIDCP »), qui a été ratifié par 167 pays, dont le Canada […]

S’agissant d’un traité dont le Canada est signataire, le PIDCP lie les parties [116] .

  • [150] La Convention et la Convention de Vienne sont toutes deux des traités que le Canada a ratifiés. Par ailleurs, la Loi de 1984 sur la Convention Canada-États‑Unis en matière d’impôts, S.C. 1984, ch. 20 (la « LCCEUMI ») a donné force de loi à la Convention au Canada. Les paragraphes 3(1) à (2.1) de la LCCEUMI sont les suivants :

3 (1) La Convention est approuvée et a force de loi au Canada pendant la durée de validité prévue par son dispositif.

(2) Les dispositions de la présente loi et la Convention l’emportent sur les dispositions incompatibles de toute autre loi.

(2.1) Les dispositions de la Loi sur l’interprétation des conventions en matière d’impôts sur le revenu l’emportent sur les dispositions incompatibles de la Convention.

  • [151] Le paragraphe 3(2) de la LCCEUMI confère un effet juridique interne à l’article 27 de la Convention de Vienne en veillant à ce que tout conflit entre les dispositions du droit interne et celles de la Convention soit réglé en faveur des dispositions de la Convention. Une exception est prévue pour les dispositions de la Loi sur l’interprétation des conventions en matière d’impôts sur le revenu [117] (la « LICMIR »), mais aucune disposition de cette dernière n’est pertinente à l’égard de la question qui est analysée dans les présents motifs.

  • [152] En l’espèce, le ministre a conclu deux accords amiables avec l’IRS aux termes du paragraphe (2) de l’article XXVI de la Convention. Ces accords ont déterminé les revenus que l’appelante et Compass avaient tirés d’opérations mettant en cause la vente et l’achat de sel gemme. Les décisions concernant le revenu ont été prises d’une manière conforme aux paragraphes (1) et (3) de l’article IX de la Convention.

  • [153] Le ministre a par la suite décidé de ne pas respecter les accords amiables en établissant une nouvelle cotisation à l’endroit de l’appelante de façon à majorer les revenus qu’elle avait tirés des opérations applicables conclues avec NASC. L’intimée est d’avis qu’il n’y a rien dans la Convention ou le droit interne du Canada qui empêcherait le ministre d’établir les nouvelles cotisations.

  • [154] Je ne suis pas d’accord. En établissant une nouvelle cotisation à l’endroit de l’appelante de façon à majorer les revenus tirés des opérations applicables et attribués au Canada, le ministre a contrevenu aux obligations que la Convention impose au Canada en omettant de donner un effet continu aux accords amiables conclus avec les États‑Unis aux termes du paragraphe (2) de l’article XXVI de la Convention.

  • [155] Le ministre se fonde sur les pouvoirs de cotisation que lui confère la LIR pour justifier cet écart. Il est vrai que les dispositions de la LIR ne limitent pas la capacité qu’a le ministre d’établir une nouvelle cotisation à l’endroit de l’appelante dans les circonstances. Cependant, l’établissement des nouvelles cotisations est assujetti au paragraphe 3(2) de la LCCEUMI ainsi qu’à l’article 27 de la Convention de Vienne, qui donnent préséance aux dispositions de la Convention. De plus, l’article 26 de la Convention de Vienne exige que le Canada exécute la Convention de bonne foi.

[156]  Dans la décision Gladden (succession) c. Canada, [1985] ACF no 31, [1985] 1 C.T.C. 163, la Cour fédérale (Section de 1re instance) a fait remarquer ce qui suit :

Le traité a été adopté, approuvé et inscrit dans les lois fiscales internes du Canada par la Loi de 1943 sur la Convention relative à l’impôt entre le Canada et les États-Unis d’Amérique, 7 George VI chap. 21. Il est évident que puisqu’un traité est un contrat, le Canada ne peut unilatéralement modifier sa législation fiscale contraire au traité sauf en modifiant cette loi en particulier qui a adopté le traité. En outre, ce principe général de droit est souligné et inscrit à l’article 3 de cette loi qui prévoit précisément qu’en cas d’incompatibilité entre toute partie du traité et l’application de toute autre loi du Canada celui-ci doit l’emporter [118] .

  • [157] Il est tout aussi évident que le ministre ne peut pas conclure un accord avec l’IRS aux termes du paragraphe (2) de l’article XXVI de la Convention et, ensuite, décider tout simplement de ne pas en tenir compte. L’article XXVI n’indique peut‑être pas explicitement que les accords amiables lient les parties, mais cela ne veut pas dire que ces accords n’ont pas force exécutoire. Les conventions fiscales ne doivent pas être interprétées d’une manière aussi légaliste :

Contrairement à une loi fiscale ordinaire, un traité ou une convention en matière d’impôt doit être interprété de façon libérale, de manière à appliquer les véritables intentions des parties.  Il faut éviter une interprétation littérale ou légaliste lorsque l’objet fondamental du traité pourrait être rejeté ou contrecarré dans la mesure où le point particulier à l’étude est visé [119] .

  • [158] L’objet manifeste de l’article XXVI de la Convention, dans le contexte de l’établissement des prix de transfert, est de régler par voie d’accord amiable des questions d’imposition juridique et économique [120] . Une question n’est pas résolue s’il est loisible à un État de faire simplement abstraction de l’accord amiable qui règle la question. Il est également contraire à la notion même d’un accord conclu entre deux partenaires d’une convention que de laisser entendre que l’une ou l’autre des parties peut tout simplement décider de ne pas tenir compte de cet accord. Non seulement est-ce contraire au bon sens, mais l’adoption d’un tel principe neutraliserait concrètement la procédure d’accord amiable non seulement dans la Convention, mais aussi dans toutes les conventions fiscales du Canada. Après tout, pourquoi une partie à une Convention souscrirait-elle au règlement d’une question relevant d’une convention fiscale si le Canada pouvait tout simplement faire abstraction de ce règlement et établir la cotisation comme bon lui semble [121] ?

  • [159] Sur un plan plus technique, le paragraphe 3(2) de la LCCEUMI donne préséance aux dispositions de la Convention quand ces dernières sont incompatibles avec celles de la LIR. Dans la présente affaire, le pouvoir qu’a le ministre de soumettre de nouveau l’appelante à une nouvelle cotisation sous le régime de la LIR est incompatible avec le pouvoir qu’ont l’ACC et l’ACA de régler les cas par voie d’accord amiable en vertu de l’article XXVI de la Convention. En conséquence, il y a lieu de donner préséance à l’effet des dispositions de la Convention par rapport à celui des dispositions de la LIR.

  • 3) L’article 115.1 de la LIR

  • [160] L’appelante a également cherché à se fonder sur l’article 115.1 de la LIR. Un accord décrit au paragraphe 115.1(1) est réputé être conforme à la LIR. Le texte du paragraphe 115.1(1) est le suivant :

Malgré les autres dispositions de la présente loi, les montants déterminés et les décisions prises en conformité avec une convention qui est conclue entre le ministre et une autre personne, en conformité avec une disposition de quelque convention ou accord fiscal entre le Canada et un autre pays qui a force de loi au Canada, et qui vise l’imposition de l’autre personne, sont réputés conformes à la présente loi.

  • [161] Les lettres de l’ACC décrivent les conditions de l’accord amiable que l’ACC et l’ACA ont conclu conformément à l’article XXVI de la Convention. Le ministre a expressément demandé à l’appelante d’y souscrire comme condition à la mise en œuvre de l’accord amiable. Pour les raisons déjà données, les lettres de l’ACC représentent un accord auquel le ministre et l’appelante sont parties du fait de l’acceptation, par l’appelante, des conditions de l’accord amiable.

  • [162] M. Boychuk a témoigné au sujet de la forme caractéristique des accords fondés sur l’article 115.1 que signe le ministre. Ce que ce témoignage implique, c’est que les lettres de l’ACC ne correspondent pas à la forme caractéristique de ces accords. À mon avis, ce témoignage est tout simplement une autre façon de laisser entendre que le ministre n’avait pas l’intention subjective de conclure un accord auquel s’appliquait l’article 115.1.

  • [163] L’intention subjective du ministre n’est pas pertinente pour ce qui est de savoir si le ministre et l’appelante ont conclu un accord. Par ailleurs, le paragraphe 115.1(1) ne prescrit pas qu’une entente doive être d’une forme particulière pour que ce paragraphe s’applique. Les exigences de ce dernier sont les suivantes :

1. Le ministre et une autre personne ont conclu une entente;

2. L’entente a été conclue en vertu d’une disposition contenue dans une convention ou un accord de nature fiscale avec un autre pays qui a force de loi au Canada;

3. L’entente vise l’imposition de l’autre personne.

  • [164] Les accords amiables ont été conclus par le ministre et l’IRS aux termes du paragraphe (2) de l’article XXVI de la Convention, et l’appelante a souscrit aux conditions de ces accords et a donc convenu d’être liée par elles. Les accords amiables concernent l’imposition de l’appelante et de Compass aux termes des paragraphes (1) et (3) de l’article IX de la Convention. Par conséquent, aux termes du paragraphe 115.1(1), toutes les décisions prises en conformité avec les conditions des accords amiables sont réputées conformes à la LIR.

  • [165] Les nouvelles cotisations de 2008 sont réputées, en vertu du paragraphe 115.1(1), conformes à la LIR, mais ce paragraphe ne traite pas de la capacité qu’a le ministre de soumettre de nouveau l’appelante à une nouvelle cotisation de façon à imposer un prix de transfert différent de celui que le ministre et l’IRS ont convenu et que l’appelante a accepté. Je conclus donc que cette disposition ne permet pas à l’appelante de savoir si le ministre pouvait établir une nouvelle cotisation à l’égard des années d’imposition visées.


  1. Conclusion

  • [166] Compte tenu de ce qui précède, j’ai conclu que les nouvelles cotisations sont incompatibles avec les accords de règlement conclus entre le ministre et l’appelante ainsi qu’avec les accords amiables conclus entre le ministre et l’IRS (collectivement, les « accords »). Les accords lient le ministre pour les raisons indiquées. En conséquence, les appels relatifs à la question décrite au paragraphe 3 des présents motifs du jugement sont accueillis et les nouvelles cotisations sont renvoyées au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation, étant entendu que les revenus que les appelantes ont tirés de la vente de sel gemme à NASC au cours des années d’imposition visées doivent être déterminés de façon à ce qu’ils concordent avec les accords. Les parties auront 30 jours à compter de la date du jugement pour présenter, au sujet des dépens, des observations d’une longueur maximale de 10 pages.

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de mars 2017.

« J.R. Owen »

Le juge Owen

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de juin 2018.

Mario Lagacé, jurilinguiste


ANNEXE A

Sifto Canada Corp.

  1. Sifto Canada Corp. (« Sifto ») est une société canadienne résidant au Canada pour l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu, et une résidente du Canada pour l’application de la Convention fiscale Canada-États-Unis (1980) (la « Convention »). Sifto possède et exploite une mine de sel à Goderich, en Ontario.

  2. Sifto est une filiale canadienne indirecte de Compass Minerals International, Inc. (« Compass »), une société américaine cotée en bourse. La société-mère ultime de Sifto est Compass.

  3. L’une des filiales indirectes de Compass est la North American Salt Company (« NASC »), une société américaine résidant aux États-Unis pour l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu et de la Convention.

Sifto vend du sel gemme à NASC

  1. Au cours des années d’imposition 2002 à 2006, Sifto a vendu environ 50 % de sa production annuelle de sel gemme à NASC.

  2. Dans ses déclarations T2, Sifto a déclaré les ventes brutes de sel gemme qui suivent à NASC au cours des années d’imposition indiquées :

Année d’imposition terminée le

 

31 déc. 2004

23 nov. 2005 et 31 déc. 2005

combinées

31 déc. 2006

Ventes brutes déclarées

42 840 212 $

49 002 316 $

48 887 869 $

6.  Les achats de sel gemme que NASC a effectués auprès de Sifto ont été déclarés par Compass dans ses déclarations de revenus consolidées américaines.


Sifto présente une demande au Programme des divulgations volontaires

  1. Par une lettre datée du 11 avril 2007, Sifto a présenté une demande anonyme au Programme des divulgations volontaires de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »).

  2. Par une lettre datée du 19 avril 2077, l’ARC a accusé réception de la demande anonyme de divulgation volontaire.

  3. Sous couvert d’une lettre datée du 13 août 2007, Sifto a présenté une demande identifiée au PDV (la « demande soumise au PDV »). Dans la demande soumise au PDV, Sifto a fait état de ce qui suit : a) une erreur comptable de 2 470 272 $ pour l’année d’imposition 2006 et b) les montants de revenus supplémentaires mentionnés ci-dessous à l’égard de ses ventes de sel gemme à NASC :

Année d’imposition terminée le

Revenus supplémentaires divulgués

31 décembre 2002

1 899 577 $

31 décembre 2003

4 206 408 $

31 décembre 2004

4 306 553 $

23 novembre 2005 et

31 décembre 2005 combinées

 

841 745 $

31 décembre 2006

2 082 036 $

10.  Par une lettre datée du 13 mars 2008, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a informé Sifto que sa demande soumise au PDV avait été acceptée et que de nouvelles cotisations seraient établies pour les années d’imposition 2002 à 2006 de façon à inclure dans ses revenus les montants supplémentaires qu’elle avait divulgués dans le cadre de la demande soumise au PDV.

  1. Dans le cadre de la procédure applicable au Programme des divulgations volontaires, Sifto a produit auprès de l’ARC des déclarations T2 modifiées pour les années d’imposition applicables et faisant état des revenus qu’elle avait divulgués dans le cadre de la demande soumise au PDV.

Les nouvelles cotisations d’avril 2008

  1. Les 21 et 22 avril 2008, le ministre a établi pour les années d’imposition 2002 à 2006 de Sifto des avis de nouvelle cotisation qui incluaient dans ses revenus les montants qu’elle avait divulgués dans le cadre de la demande soumise au PDV et inclus dans ses déclarations T2 modifiées (les « nouvelles cotisations d’avril 2008 »).

La procédure amiable

  1. Par suite des nouvelles cotisations d’avril 2008, Sifto et NASC se sont retrouvées dans une situation de double imposition parce que Sifto s’était vu imposer de l’impôt canadien à l’égard de montants de revenu que Compass avait déjà inclus dans ses déclarations de revenus consolidées des États-Unis.

  2. La procédure amiable (la « PA ») de la Convention autorise les contribuables à demander à leurs autorités compétentes respectives une aide pour régler les cas de double imposition.

  3. Le ministre est l’autorité compétente du Canada au titre de la Convention (l’« autorité compétente canadienne »).

  4. Le représentant autorisé du ministre pour régler les demandes d’aide soumises aux autorités compétentes conformément aux conventions fiscales du Canada est le directeur de la Division des services de l’autorité compétente (la « DSAC ») de l’ARC.

  5. L’Internal Revenue Service (l’« IRS ») est l’autorité compétente des États‑Unis au titre de la Convention (l’« autorité compétente américaine »).

Sifto et Compass sollicitent l’aide des autorités compétentes

  1. Par une lettre datée du 30 avril 2008, Sifto a présenté une demande à l’autorité compétente canadienne en vertu des articles 9 et 26 de la Convention.

  2. Par une lettre datée du 13 mai 2008, Compass a présenté une demande à l’autorité compétente des États-Unis en vertu des articles 9 et 26 de la Convention (la « demande d’accord amiable de Compass »).

  3. Par une lettre datée du 12 août 2008, l’autorité compétente américaine a informé l’autorité compétente canadienne qu’elle avait reçu la demande d’accord amiable de Compass et avait demandé à l’autorité compétente canadienne de faire part de sa position.

  4. Par une lettre datée du 20 novembre 2008, l’autorité compétente canadienne a informé l’autorité compétente américaine que les détails relatifs à sa position suivraient.

  5. Sous couvert d’une lettre datée du 16 février 2009, l’autorité compétente canadienne a envoyé un exposé de position à l’autorité compétente américaine.

  6. Sifto n’a pas été partie aux discussions entre les autorités compétentes américaine et canadienne.

  7. NASC et Compass n’ont pas été parties aux discussions entre les autorités compétentes américaine et canadienne.

  8. Le 30 juillet 2010, l’autorité compétente canadienne a envoyé par télécopieur une ébauche de lettre de clôture à l’autorité compétente américaine.

  9. Le 10 novembre 2010, l’autorité compétente canadienne a envoyé une lettre à l’autorité compétente américaine.

  10. Le 10 novembre 2010, l’autorité compétente canadienne a envoyé une lettre au représentant de Sifto.

  11. Le 1er décembre 2010, ou aux environs de cette date, Sifto a envoyé une lettre à l’autorité compétente canadienne.

  12. Le 17 décembre 2010, ou aux environs de cette date, la DSAC a envoyé une note de service au directeur adjoint de la Vérification et une note de service au chef des Appels du Bureau des services fiscaux de Toronto-Ouest.

  13. Le 25 janvier 2011, ou aux environs de cette date, l’autorité compétente américaine a envoyé une lettre à l’autorité compétente canadienne.

  14. Le 25 janvier 2011, ou aux environs de cette date, l’autorité compétente américaine a aussi envoyé une lettre à Compass.

  15. Par une lettre datée du 7 avril 2011, l’autorité compétente canadienne a envoyé une lettre à l’autorité compétente américaine.

  16. Le 7 avril 2011, l’autorité compétente canadienne a envoyé une lettre au représentant de Sifto.

  17. Le 7 avril 2011, ou aux environs de cette date, la DSAC a envoyé une note de service à M. Paul Kohut, de la Division de la vérification internationale, et une note de service au chef des Appels du Bureau des services fiscaux de Toronto-Ouest.

  18. Le 19 avril 2011, Sifto a envoyé une lettre à l’autorité compétente canadienne.

Les nouvelles cotisations du 1er août 2012

  1. Par des avis datés du 1er août 2012, le ministre a établi une nouvelle cotisation à l’endroit de Sifto à l’égard de ses années d’imposition 2004 à 2006, de façon à inclure les revenus supplémentaires que, d’après l’ARC, Sifto avait tirés de ses ventes de sel gemme à NASC, conformément au paragraphe 247(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu. Plus précisément, les montants suivants ont été ajoutés aux revenus imposables de Sifto :

Années d’imposition terminées le

Revenus ajoutés par les nouvelles cotisations du 1er août 2012

31 décembre 2004

61 179 395 $

23 novembre 2005 et

31 décembre 2005 combinées

46 923 182 $

31 décembre 2006

26 896 235 $



ANNEXE B

LIR

115.1 (1) Conventions [fiscales] entre autorités compétentes — Malgré les autres dispositions de la présente loi, les montants déterminés et les décisions prises en conformité avec une convention qui est conclue entre le ministre et une autre personne, en conformité avec une disposition de quelque convention ou accord fiscal entre le Canada et un autre pays qui a force de loi au Canada, et qui vise l’imposition de l’autre personne, sont réputés conformes à la présente loi.

(2) Transfert de droits et d’obligations — La personne à laquelle les droits et obligations prévus par la convention visée au paragraphe (1) sont transférés avec le consentement du ministre est réputée, pour l’application de ce paragraphe, avoir conclu la convention avec le ministre.

La Convention

Article IX  Personnes liées

1. Lorsqu’une personne dans un État contractant et une personne dans l’autre État contractant sont liées et lorsque les arrangements entre elles diffèrent de ceux qui seraient convenus entre des personnes non liées, chaque État peut ajuster le montant des revenus, pertes ou impôts exigibles de façon à refléter les revenus, déductions, crédits ou allégements qui, sans ces arrangements, auraient été pris en considération dans le calcul de ces revenus, pertes ou impôts.

2. Au sens du présent article, une personne est considérée comme liée à une autre personne si elle participe directement ou indirectement à la direction ou au contrôle de l’autre ou si une ou plusieurs tierces personnes participent directement ou indirectement à la direction ou au contrôle des deux personnes.

3. Lorsqu’un ajustement est fait, ou est à faire, par un État contractant conformément au paragraphe 1, l’autre État contractant procède (nonobstant toute restriction relative aux délais ou à la procédure du droit interne de cet autre État) à un ajustement correspondant des revenus, pertes ou impôts de la personne liée dans cet autre État si :

a) Il est d’accord avec le premier ajustement; et

b) L’autorité compétente de l’autre État a été avisée du premier ajustement dans un délai de six ans à compter de la fin de l’année d’imposition à laquelle le premier ajustement est relié. Toutefois, l’autorité compétente peut accepter d’examiner les cas où l’ajustement correspondant ne serait pas autrement prescrit en vertu des délais ou empêché par la procédure du droit interne dans l’autre État, même si l’avis n’a pas été donné dans le délai de six ans.

4. Si l’avis visé au paragraphe 3 n’est pas donné dans les délais visés audit paragraphe et si l’autorité compétente n’a pas accepté d’examiner le cas conformément au paragraphe 3b), l’autorité compétente de l’État contractant qui a fait, ou va faire, le premier ajustement peut éviter la double imposition lorsque le cas s’y prête.

5. Les dispositions des paragraphes 3 et 4 ne s’appliquent pas en cas de fraude, d’omission volontaire ou de négligence ou de faute lourde.

Article XXVI Procédure amiable

1. Lorsqu’une personne estime que les mesures prises par un État contractant ou par les deux États contractants entraînent ou entraîneront pour elle une imposition non conforme aux dispositions de la présente Convention, elle peut, indépendamment des recours prévus par le droit interne de ces États, soumettre son cas par écrit à l’autorité compétente de l’État contractant dont elle est un résident ou, si elle n’est pas un résident d’aucun des États contractants, à celle de l’État contractant dont elle possède la nationalité.

2. L’autorité compétente de l’État contractant à qui le cas a été soumis s’efforce, si la réclamation lui paraît fondée et si elle n’est pas elle-même en mesure d’y apporter une solution satisfaisante, de résoudre le cas par voie d’accord amiable avec l’autorité compétente de l’autre État contractant, en vue d’éviter une imposition non conforme à la Convention. Sauf lorsque les dispositions de l’article IX (Personnes liées) s’appliquent, l’accord est appliqué quels que soient les restrictions relatives au temps ou à la procédure prévues par le droit interne des États contractants pourvu que l’autorité compétente de l’autre État contractant ait reçu, dans un délai de six ans à compter de la fin de l’année d’imposition à laquelle le cas s’applique, avis qu’un tel cas existe.

 

3. Les autorités compétentes des États contractants s’efforcent, par voie d’accord amiable, de résoudre les difficultés ou de dissiper les doutes auxquels peuvent donner lieu l’interprétation ou l’application de la Convention. En particulier, les autorités compétentes des États contractants peuvent parvenir à un accord:

a) Pour que les bénéfices revenant à un résident d’un État contractant et à son établissement stable situé dans l’autre État contractant soient imputés d’une manière identique;

b) Pour que les revenus, déductions, crédits ou allocations revenant à des personnes soient attribués d’une manière identique;

c) Pour que la source d’éléments spécifiques de revenu et la nature de ces éléments soient déterminées d’une manière identique;

d) Pour que tout terme utilisé dans la Convention ait un sens commun;

e) Pour l’élimination de la double imposition à l’égard des revenus distribués par une succession ou une fiducie;

f) Pour l’élimination de la double imposition à l’égard d’une société de personnes;

g) Pour l’élimination de la double imposition résultant de l’application de l’impôt sur les successions perçu par les États-Unis ou de l’impôt canadien en raison d’une distribution ou disposition de biens par une fiducie qui est une fiducie américaine admissible (qualified domestic trust) au sens de l’article 2056A de l’Internal Revenue Code ou une fiducie visée par le paragraphe 70(6) de la Loi de l’impôt sur le revenu, ou qui est traitée comme telle en vertu du paragraphe 5 de l’article XXIX B (Impôts perçus en cas de décès), dans le cas où aucun allégement n’est par ailleurs disponible; ou

h) Pour augmenter tout montant exprimé en dollars visé dans la Convention de façon à refléter l’évolution économique ou monétaire.

Elles peuvent aussi se concerter en vue d’éliminer la double imposition dans les cas non prévus par la Convention.

4. Chacun des États contractants s’efforcera de percevoir pour le compte de l’autre État contractant les montants nécessaires afin d’assurer que les allégements d’impôt accordés dans cet autre État conformément à la Convention ne s’appliquent pas au bénéfice de personnes qui n’y ont pas droit. Toutefois, aucune disposition du présent paragraphe ne peut être interprétée comme imposant à l’un ou l’autre État contractant l’obligation de prendre des dispositions administratives de nature différente de celles utilisées pour la perception de ses propres impôts ou contraires à l’ordre public dans cet État.

5. Les autorités compétentes des États contractants peuvent communiquer directement entre elles en vue de parvenir à un accord comme il est indiqué aux paragraphes précédents.

6. Si les difficultés ou les doutes auxquels peuvent donner lieu l’interprétation ou l’application de la Convention ne peuvent être réglés par les autorités compétentes conformément aux paragraphes précédents du présent article, le cas peut, avec l’accord des deux autorités compétentes et du contribuable, être soumis à l’arbitrage, pourvu que le contribuable consente par écrit à être lié par la décision de la commission d’arbitrage. La décision de la commission d’arbitrage dans une affaire donnée lie les deux États à l’égard de cette affaire. La procédure à suivre sera précisée dans un échange de notes entre les États contractants. Les dispositions du présent paragraphe seront applicables lorsque les États contractants se seront entendus sur ce point par l’échange de notes.


RÉFÉRENCE :

2017 CCI 37

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR :

2014-895(IT)G et 2014-896(IT)G

INTITULÉ :

SIFTO CANADA CORP. et SIFTO CANADA CORP. (À TITRE DE SOCIÉTÉ REMPLAÇANT SIFTO CANADA INC.) c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATES DES AUDIENCES :

DATES DE RÉCEPTION DES OBSERVATIONS ÉCRITES :

Les 11, 12, 13 et 14 juillet 2016

 

Le 8 août et le 9 septembre 2016

JUGEMENT ET MOTIFS :

L’honorable juge John R. Owen

DATE DU JUGEMENT:

Le 10 mars 2017

COMPARUTIONS :

Avocats des appelantes :

Me Al Meghji, Me Ian MacGregor,

Me Al-Nawaz Nanji et Me Ilana Ludwin

 

Avocates de l’intimée :

Me Naomi Goldstein,

Me Alexandra Humphrey, Me Rishma Bhimji et Me Alisa Apostle

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour les appelantes :

Nom :

Al Meghji, Ian MacGregor,

Al-Nawaz Nanji et Ilana Ludwin

Cabinet :

Osler, Hoskin & Harcourt LLP, avocats

Toronto (Ontario)

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 



[1]  Pour les années prenant fin le 31 décembre 2004 et le 23 novembre 2005, la contribuable était Sifto Canada Inc., la société que l’appelante a remplacée.

[2]  La description de la question est présentée dans une lettre datée du 26 août 2015 que les parties ont envoyée à la Cour. Cette lettre a été transmise en réponse à une ordonnance de la Cour exigeant des parties qu’elles définissent la question afin qu’elle puisse accepter ou rejeter la demande visant à faire scinder l’affaire.

[3]  L’exigence selon laquelle une preuve d’expert doit être pertinente et nécessaire a récemment été confirmée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt White Burgess Langille Inman c. Abbott and Haliburton Co., 2015 CSC 23, [2015] 2 RCS 182.

[4]  ECF, paragraphe 2.

[5]  Lignes 3 à 10 de la p. 84 de la transcription des audiences tenues du 11 au 14 juillet 2016, à Toronto (la « transcription »).

[6]  Lignes 25 à 28 de la p. 84 et lignes 1 à 4 de la p. 85 de la transcription.

[7]  Lignes 5 à 13 de la p. 85 de la transcription.

[8]  Une copie de la lettre et de la pièce jointe figure à l’onglet C du RCD.

[9]  Paragraphe 17 de l’ECF.

[10]  Paragraphe 15 de l’ECF, ainsi que lignes 9 à 16 de la page 197 de la transcription.

[11]  Onglet F du RCD.

[12]  Onglet F du RCD, pages 1 et 4.

[13]  Lignes 11 à 13 de la page 170 de la transcription.

[14]  Lignes 11 à 15 de la page 154 de la transcription.

[15]  Lignes 18 à 23 de la page 154 de la transcription.

[16]  Lignes 1 à 7 de la page 156 de la transcription.

[17]  Onglet G du RCD.

[18]  Onglet H du RCD.

[19]  Lignes 1 à 11 de la page 187 de la transcription.

[20]  Onglets I et J du RCD.

[21]  Lignes 19 à 24 de la page 207 de la transcription.

[22]  Lignes 2 à 14 de la page 170 de la transcription.

[23]  Lignes 4 à 5 et 17 à 22 de la page 170 de la transcription.

[24]  Lignes 7 à 8 de la page 278 de la transcription.

[25]  Lignes 9 à 14 de la page 278 de la transcription.

[26]  Lignes 4 à 10 de la page 279 de la transcription. Les réunions entre l’ACC et l’ACA ont eu lieu du 19 au 23 octobre 2009, et la situation de l’appelante n’était qu’une question parmi tant d’autres à l’ordre du jour : pièce A‑4, aux 27e et 28e pages, lignes 17 à 19 de la page 223, lignes 26 à 28 de la page 227 et lignes 1 à 10 de la page 228 de la transcription.

[27]  Lignes 10 à 14 de la page 279 de la transcription.

[28]  Lignes 15 à 20 de la page 279 de la transcription.

[29]  Lignes 21 à 23 de la page 279 de la transcription et la pièce R-3, entrée consignée le 2009-10-22.

[30]  Lignes 17 à 23 de la page 225 de la transcription.

[31]  Lignes 1 à 6 de la page 281 de la transcription; la pièce R-3, entrée consignée le 2010-05-11; et la pièce R-7.

[32]  Lignes 9 à 20 de la page 282 de la transcription.

[33]  Onglet L du RCD.

[34]  Onglet Q du RCD.

[35]  M. Danilack s’est trompé au sujet de la date de la lettre de Mme Spice, qui était le 10 novembre 2010, comme l’a confirmé la lettre de son successeur, à l’onglet S du RCD. Voir aussi les lignes 17 à 22 de la page 180 de la transcription.

[36]  Onglet R du RCD.

[37]  Lignes 3 à 6 de la page 186 de la transcription.

[38] Onglet M du RCD.

[39]  Lignes 12 à 19 de la page 178 de la transcription.

[40]  Lignes 2 à 4 de la page 178 de la transcription.

[41]  Onglet N du RCD.

[42]  Pièce A-8.

[43]  Pièce A-8.

[44]  Lignes 21 à 28 de la page 251 et lignes 1 à 5 de la page 252 de la transcription.

[45]  Onglet O et onglet P du RCD.

[46]  Lignes 22 à 27 de la page 178 de la transcription.

[47]  Lignes 7 à 10 de la page 179 de la transcription.

[48]  M. Lamarche a été nommé directeur par intérim de la DSAC après que Mme Spice ait quitté le poste de directrice : lignes 21 à 24 de la page 268 de la transcription.

[49]  Onglet S du RCD.

[50]  Lignes 14 à 15 de la page 179 de la transcription.

[51]  Lignes 4 à 5 de la page 179 de la transcription.

[52]  Onglet T du RCD.

[53]  Onglet W du RCD. Cette fois-ci, le texte ajouté par l’appelante a été dactylographié plutôt qu’écrit à la main.

[54]  Lignes 19 à 24 de la page 182 de la transcription.

[55]  Lignes 16 à 17 de la page 183 de la transcription.

[56]  Voir, par exemple, les lignes 18 à 24 de la page 195, les lignes 12 à 21 de la page 196 ainsi que les lignes 24 à 26 de la page 212 de la transcription.

[57]  Lignes 26 à 28 de la page 186 et lignes 1 à 11 de la page 187 de la transcription.

[58]  Pièces R-4, R-5 et R-6, et pièces A-5 et A-6.

[59]  Pièce R-6.

[60]  Lignes 15 à 19 de la page 283 de la transcription.

[61]  Lignes 10 à 24 de la page 284 de la transcription.

[62]  Lignes 16 à 23 de la page 286 de la transcription.

[63]  Page 240 et lignes 1 à 10 de la page 241 de la transcription.

[64]  Lignes 15 à 25 de la page 241 de la transcription.

[65]  Lignes 12 à 20 de la page 242 de la transcription.

[66]  Lignes 17 à 20 de la page 243 de la transcription.

[67]  Lignes 11 à 14 de la page 244 de la transcription.

[68]  Pièce A-9.

[69]  Pièce A-9.

[70]  Pièce A-10.

[71]  Pièce A-7.

[72]  Pièce R-3.

[73]  Courriel de Mme Spice à M. Harkin, envoyé le 31 mai 2011, à 12 h 18 : pièce A-7.

[74]  Courriel de M. Harkin à Mme Spice, envoyé le 31 mai 2011, à 12 h 26 : pièce A-7.

[75]  Pièce A-11.

[76]  Pièce A-11.

[77]  Pièce A-11.

[78]  Lignes 23 à 25 de la page 272 et lignes 1 à 3 de la page 273 de la transcription.

[79]  Lignes 18 à 22 de la page 272 de la transcription.

[80]  Les courriels et le résumé écrit de la réunion de discussion de politique constituent la pièce A-3.

[81]  Lignes 3 à 25 de la page 219 de la transcription.

[82]  Lignes 26 à 28 de la page 219 et lignes 1 à 14 de la page 220 de la transcription.

[83]  Je crois comprendre que l’ajustement a été apporté au revenu de Compass parce que celle-ci produit auprès de l’IRS une déclaration consolidée qui englobe le revenu de NASC.

[84] Arrêt Sattva, aux paragraphes 46 et 47. Le fondement factuel est moins important dans le cas des contrats types : Ledcor Construction Ltd. c. Northbridge Indemnity Insurance Co., 2016 CSC 37. Un accord amiable n’est pas un contrat type.

[85] Paragraphe 22. Le paragraphe 31(1) de la Convention de Vienne sur le droit des traités (23 mai 1969, R.T. Can. 1980 no 37) (la « Convention de Vienne »), dont le Canada est signataire, indique ce qui suit : « Un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but ». Les États-Unis ne sont pas signataires de la Convention de Vienne. Cependant, dans l’arrêt Crown Forest, la Cour suprême du Canada a fait référence aux articles 31 et 32 de cette convention à l’appui de l’utilisation de documents extrinsèques permettant d’aider à l’interpréter.

[86] Modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune (Version abrégée) de l’OCDE, juillet 2010, page 355, paragraphe 8. Ce commentaire n’a pas changé depuis 1977 : Modèle de convention de double imposition concernant le revenu et la fortune du Comité des affaires fiscales de l’OCDE, 1977, page 176, paragraphe 7. Dans l’arrêt Crown Forest, au paragraphe 57, la Cour suprême du Canada a fait référence au commentaire sur le Modèle de convention de l’OCDE en interprétant l’article IV de la Convention, souscrivant ainsi de manière implicite au fait d’utiliser le Commentaire de l’OCDE comme aide à l’interprétation des conventions fiscales. Dans l’arrêt Prévost Car Inc. c. La Reine, 2009 CAF 57, [2010] 2 RCF 65, la Cour d’appel fédérale a déclaré, au paragraphe 10 :

La reconnaissance mondiale des dispositions du Modèle de convention et leur intégration dans la plupart des conventions bilatérales ont fait des Commentaires sur les dispositions du Modèle de convention de l’OCDE un guide largement reconnu en matière d’application et d’interprétation des conventions fiscales bilatérales […]

Voir aussi le paragraphe 55 de l’arrêt Crown Forest relativement à la valeur interprétative du Modèle de convention de l’OCDE dans le contexte de la Convention.

[87] C’est Compass et non NASC qui a soumis le dossier à l’IRS, car Compass, en raison de la déclaration de revenus consolidée, était la contribuable aux États-Unis.

[88] Ces paragraphes ont été ajoutés au Commentaire de l’OCDE par le rapport de 1992 intitulé « Révision du Modèle de convention ». Modèle de convention, version complète, pages 1035-1036.

[89] L’Explication technique de 1984 ne tient pas compte des modifications aux paragraphes (3) et (4) de l’article IX de la Convention qui ont été mises en œuvre par le Troisième protocole révisé, L.C. 1995, ch. 34. Ces modifications ont éliminé l’obligation, pour un État contractant, de retirer un ajustement si certaines exigences en matière de notification n’étaient pas remplies, et elles ne sont pas pertinentes à l’égard de la question qui est en litige dans les présents appels. Voir aussi l’Explication technique de l’article 4 du Troisième protocole.

[90] Voir le deuxième paragraphe de la lettre que Mme Spice a envoyée le 10 novembre 2010 à M. Danilack : l’onglet L du RCD.

[91] Nul ne conteste que l’ACC et l’ACA ont conclu deux accords amiables, lesquels sont documentés aux onglets L, Q et S du RCD.

[92] Onglet M du RCD.

[93] Onglet T du RCD.

[94] M. Harkin a proposé une interprétation singulière du mot « négociation ». Quoi qu’il en soit, l’ACC a négocié un règlement de la question que l’appelante et Compass avaient soulevée.

[95] Bien que ce ne soit pas déterminant pour ce qui est des exigences qu’impose la Convention, il est intéressant de signaler que l’ARC, aux paragraphes 3 et 41 de la Circulaire d’information 71‑17R5, indique :

3. Les conventions fiscales conclues par le Canada ont principalement pour objet d’éliminer la double imposition et de prévenir l’évitement de l’impôt et l’évasion fiscale. En pratique, une convention fiscale permet également de répartir les recettes fiscales découlant des opérations conclues par les résidents des pays signataires. À ces fins, une convention fiscale peut contenir des règles permettant de déterminer ce qui suit :

[…]

  la façon dont les cas d’imposition non conforme à la convention doivent être réglés.

[…]

41. Si un contribuable estime que la décision rendue par la Direction générale des appels n’entraîne pas l’élimination de l’imposition qui n’est pas conforme à la convention fiscale, il peut soumettre le cas à l’autorité compétente ou, s’il l’a déjà fait, demander que la procédure de recours à l’autorité compétente soit reprise.

[96] Philip Baker, Double Taxation Conventions and International Tax Law, 2e éd. (Londres : Sweet & Maxwell, 1994) à 25-09.

[97] Le paragraphe 18 a été remplacé depuis par le paragraphe 55 de la Circulaire d’information 71-17R5, qui ne change pas l’objectif général du paragraphe original, mais explique de manière plus détaillée ce qui se passe si le contribuable rejette le règlement.

[98] C’est l’approche que suggère le Commentaire de l’OCDE depuis 1977 : Modèle de Convention de double imposition concernant le revenu et la fortune, Rapport du Comité des affaires fiscales de l’OCDE, 1977, page 180, paragraphe 28.

[99] Courriel de Mme Spice à M. Harkin, envoyé le 31 mai 2011 à 12 h 18. Pièce A-7.

[100] Il vaut également la peine de signaler les commentaires que l’ACC a faits dans la [TRADUCTION] « Note de service à Terrance McAuley » (pièce A-11) :

[TRADUCTION]

« Les négociations en matière de procédure amiable sont conclues sur le fondement qu’elles sont finales et exécutoires pour les deux partenaires de la convention, et si les contribuables y souscrivent, pour les contribuables. »

[101] Même si le libellé des lettres a été considéré comme ambigu, le principe contra proferentem donnerait à penser que l’ACC ne pourrait pas se servir de son propre libellé pour suggérer un sens que l’appelante ne pourrait pas distinguer clairement de la simple lecture du libellé.

[102] Pièce A-8.

[103] Les paragraphes 169(2.2) et (3) de la LIR envisagent la conclusion de règlements entre le ministre et les contribuables, même si ces dispositions ne s’appliquent pas en l’espèce.

[104] Pièce R-7.

[105] Lignes 1 à 6 de la page 281 de la transcription.

[106] De plus, le fait que M. Harkin ait adopté et énoncé les déclarations de Mme Subbiah peut être considéré comme une admission et donc une exception à la règle du ouï-dire : voir, de façon générale, les paragraphes 6.408 à 6.416 de l’ouvrage intitulé Sopinka, Lederman & Bryant: The Law of Evidence in Canada, 4e éd., par Sidney N. Lederman, Alan W. Bryant et Michelle K. Fuerst (Markham, Ont.), LexisNexis, 2014).

[107] Onglet R du RCD.

[108] M. Quinn a laissé entendre que ce paragraphe était un texte type, mais cela va à l’encontre de la référence précise qui est faite à la méthode d’établissement du prix de transfert qu’a utilisée l’appelante pour se conformer au principe de pleine concurrence.

[109] Lignes 15 à 25 de la page 241 de la transcription.

[110] Page 602. Voir aussi : Cohen (N) c. R., [1980] C.T.C. 318 (CAF) et Harris c. Canada, [2000] 4 CF 37 (CAF).

[111] Voir aussi la décision Hammill c. Canada, 2005 CAF 252, qui, au paragraphe 31, traite des admissions de fait et de la capacité des parties de dicter par voie d’accord l’issue d’un appel en matière d’impôt.

[112] Paragraphes 24, 25 et 27.

[113] Voir l’extrait tiré de l’arrêt Marzen Artistic Aluminum, précité, et Canada c. GlaxoSmithKline Inc., 2012 CSC 52, [2012] 3 RCS 3, aux paragraphes 17 à 23. Les lignes directrices en matière d’établissement de prix de transfert dont il est question dans ces décisions ont été mises au point par l’OCDE en vue d’aider à appliquer l’article IX du Modèle de convention de l’OCDE. Voir aussi les paragraphes 28 à 30 de la CI 87-2R ainsi que le Protocole d’entente entre les autorités compétentes du Canada et des États-Unis relativement à la procédure d’accord amiable, daté du 3 juin 2005, sous la rubrique 3 (« Questions de fond dans les affaires visées par la PA »).

[114] Onglets O et U du RCD.

[115] Lignes 10 à 24 de la page 284 de la transcription.

[116] Paragraphes 24 et 25. Au paragraphe 54 de l’arrêt Crown Forest, la Cour suprême du Canada a cité la Convention de Vienne à titre d’autorité pour le fait d’utiliser des documents extrinsèques comme moyen d’aider à interpréter la Convention.

[117] L.R.C. 1985, ch. I-4.

[118] Au paragraphe 10 des C.T.C.

[119] Arrêt Crown Forest, au paragraphe 43, citant la décision Gladden Estate.

[120] Cet objectif est mis en lumière par les paragraphes 9 et 10 du Commentaire de l’OCDE sur l’article 25 du Modèle de Convention de l’OCDE de 1992 (paragraphes 10 et 11 du Commentaire de 2010) ainsi que par l’Explication technique de 1984 du Département du Trésor des États-Unis sur le paragraphe (2) de l’article XXVI de la Convention.

[121] L’ACC a reconnu les conséquences évidentes d’un accord amiable quand elle a décrit à Terrance McAuley le problème que posait la vérification proposée de l’appelante (pièce A-11) :

[TRADUCTION]

« Les négociations entourant la PA sont conclues en étant entendu qu’elles sont définitives et qu’elles lient les deux partenaires de convention et, si les contribuables sont d’accord, les contribuables. »

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.