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Dossier : 2007-2583(IT)G

ENTRE :

PETER SOMMERER,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE] ____________________________________________________________________

Appels entendus les 6, 7, 8, 9 et 10 décembre 2010,

les 25 et 26 janvier 2011 et les 7 et 8 février 2011, à Ottawa (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge Campbell J. Miller

 

Comparutions :

 

Avocats de l’appelant :

Mes Roger Taylor, Daniel Sandler et Louis Tassé

Avocats de l’intimée :

Mes Luther P. Chambers, c.r., et

Ryan Hall

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT MODIFIÉ

          Les appels des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 1996,1997, 1998, 1999 et 2000 sont accueillis et les nouvelles cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

          Les dépens sont adjugés à l’appelant.

 

          Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de mai 2011.

 

 

« Campbell J. Miller »

Juge C. Miller

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 6e jour d’octobre 2011.

 

 

 

 

François Brunet, réviseur


 

 

 

 

Référence : 2011 CCI 212

Date : 20110513

Dossier : 2007-2583(IT)G

ENTRE :

PETER SOMMERER,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT MODIFIÉS

 

Le juge C. Miller

 

[1]              M. Sommerer est l’un de ces hommes énergiques dont l’esprit déborde d’idées sur le plan commercial, des idées plus précisément liées à l’industrie de la haute technologie, qu’il ne semble pas pouvoir réaliser aussi rapidement qu’il le voudrait. Il m’a donné l’impression de ne pouvoir rester longtemps sans bouger, comme le montre le fait qu’il est resté debout pendant les trois journées et demie qu’a duré son témoignage. Il démarre un projet et passe immédiatement à un autre projet, allant d’une entreprise commerciale à un doctorat. Compte tenu des liens étroits qui le rattachent à l’Autriche, M. Sommerer a su tirer parti avec son père de la nouvelle législation édictée en Autriche en matière de fondations privées et, en 1996, le père de M. Sommerer a créé la Fondation privée Sommerer (la « FPS »). La question dont je suis ici saisi se rapporte au traitement fiscal, au Canada, des gains subséquents réalisés lors de la vente d’actions détenues par la FPS, qui avait acheté ces actions de M. Sommerer à leur juste valeur marchande. Le fisc a établi une cotisation en se fondant sur le fait qu’il existait une fiducie en Autriche et que, selon les règles d’attribution (paragraphe 75(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »)), les gains se rattachant à la vente des actions devaient être attribués à M. Sommerer ou à son épouse. L’appelant affirme qu’il n’existait pas de fiducie et que, de toute façon, s’il en existait une, le paragraphe 75(2) de la Loi ne s’appliquait néanmoins pas. En outre, même si le paragraphe 75(2) de la Loi s’appliquait, la Convention Canada-Autriche en matière d’impôt sur le revenu (la « Convention ») empêchait le Canada d’imposer les gains réalisés lors de la disposition des actions. Subsidiairement, l’intimée fait valoir que la FPS a agit à titre de mandataire de M. Sommerer lors de la disposition des actions, ce qui avait pour effet de déclencher entre les mains de M. Sommerer l’impôt sur le gain tiré de la vente des actions. Enfin, une question se pose quant au moment où M. Sommerer a vendu les actions à la FPS, ce point ne faisant toutefois pas partie de la position initialement prise par l’intimée quant à la cotisation. Il se pose toute une gamme de questions en ce qui concerne les fiducies, les sociétés, le mandat, la définition de ce qu’est une action, l’interprétation de conventions et la législation autrichienne, questions dont dépend la détermination du bien-fondé des cotisations dont je suis ici saisi.

 

Les faits

 

[2]              M. Sommerer a été élevé en Autriche; il était l’aîné de six enfants. Il a été agréé à titre d’ingénieur et, à la fin des années 1960, il a commencé à travailler pour IT&T en Autriche. Tout en travaillant, il étudiait en vue d’obtenir un diplôme correspondant à un MBA, qu’il a obtenu de l’University of World Trade, en 1975. En 1974, M. Sommerer a épousé une citoyenne du Royaume-Uni qui avait un enfant et ensemble ils ont eu deux enfants, nés en Autriche en 1975 et en 1977. Les Sommerer habitaient initialement un appartement, mais la famille s’étant agrandie, ils se sont installés dans un logement coopératif plus spacieux.

 

[3]              Pendant qu’il travaillait en Autriche pour IT &T, M. Sommerer a entendu parler de Nortel. La façon nord-américaine de faire des affaires éveillait son intérêt. En 1977, M. Sommerer a présenté une demande en vue de venir au Canada à titre d’immigrant admis et, en 1978, la famille Sommerer s’est installée au Canada. M. Sommerer a déclaré qu’ils avaient tout vendu, mais qu’ils avaient conservé le droit de vivre dans le logement coopératif en Autriche pendant un an, au cas où il ne réussirait pas à trouver du travail au Canada. Il a été renoncé à ce droit au bout d’un an. M. Sommerer a conservé un compte bancaire en Autriche afin de couvrir les dépenses supportées pendant les vacances. Il a également conservé son permis de conduire autrichien, qui est valide à vie. Il a conservé sa citoyenneté autrichienne, mais il est devenu citoyen canadien en 1993.

 

[4]              M. Sommerer a obtenu un emploi à Kanata; il travaillait pour M. Terry Matthews, chez Mitel. Il est finalement devenu gestionnaire de projet pour un système de commutation qui a fait monter en flèche la fortune de Mitel. On lui a demandé de se rendre en Allemagne pour établir une filiale de Mitel, ce qu’il a fait de 1981 à 1984. Il a conservé sa maison à Ottawa et l’a simplement louée. Au cours de la période où il travaillait pour Mitel au Canada et en Allemagne, M. Sommerer se rendait parfois en Autriche.

 

[5]              M. Sommerer a relaté les mésaventures chez Mitel, lorsqu’il est revenu à Ottawa, en 1984, et il s’est avec bonheur joint à M. Matthews dans une nouvelle entreprise, Newbridge. M. Sommerer était responsable de la gestion du produit et les recettes de Newbridge ont monté en flèche. À la fin des années 1980, M. Sommerer a proposé à Newbridge de se lancer dans les produits pour Internet. Lorsqu’elle est devenue une société publique, Newbridge a fait face à certains problèmes techniques que M. Sommerer a été chargé de régler. Il est devenu directeur de l’exploitation en 1990. Au cours des quelques années suivantes, les recettes ont atteint un milliard de dollars.

 

[6]              À la fin des années 1990, un certain nombre de sociétés affiliées à Newbridge ont été établies, l’une d’elles étant Vienna Systems Corporation (« Vienna »), qui était positionnée en vue d’exploiter les systèmes vocaux sur des réseaux Internet. La société a été constituée en personne morale au mois d’août 1995. M. Sommerer a acquis 25 p. 100 des actions ordinaires de Vienna (1 770 000 actions). Il partageait son temps entre Newbridge et Vienna. Il a embauché un président‑directeur général pour Vienna. Il a quitté Newbridge en 1998 et il a cherché quelque chose de nouveau, qu’il a trouvé dans un autre type d’entreprise sur Internet, Coventus.

 

[7]              De 2004 à 2007, M. Sommerer a poursuivi ses études et obtenu un doctorat d’une université, à Vienne. Il a acheté un appartement à Vienne, où il passait du temps pendant qu’il effectuait ses études. Il a également acquis une maison dans les montagnes, en Autriche, en 1995. Il possédait sa résidence, à Ottawa, ainsi qu’un chalet, à Pakenham (Ontario), et un IRLM, à Kingston. Il n’a manifesté aucun intérêt lorsqu’il s’agissait de retourner vivre en Autriche.

 

La Fondation privée Sommerer (la « FPS »)

 

[8]              En 1996, M. Sommerer et son père ont discuté de la possibilité de créer une fondation privée, en Autriche. Pareilles fondations étaient autorisées en vertu de la Loi autrichienne sur les fondations privées de 1993 (la « LAFP »). Le 3 octobre 1996, une déclaration constitutive de fondation a été signée par le père de M. Sommerer, Herbert Sommerer, qui a versé de sa poche, dans un compte de fondation, un montant d’un million de schillings autrichiens. La déclaration constitutive de fondation n’est pas longue et il vaut la peine de la reproduire au complet :

 

[traduction]

 

§ 1 Nom et siège social

 

(1)        La Fondation est une fondation privée créée en vertu de la loi autrichienne, désignée sous le nom de----

 

La Fondation privée Sommerer

 

(2)               Le siège social de la Fondation est situé à Mitterbach----

 

(3)               Le fondateur de la Fondation est M. Herbert SOMMERER----

 

§ 2 Objet, bénéficiaires

 

L’objet de la Fondation est de promouvoir les intérêts des personnes désignées dans l’acte supplémentaire à l’aide du revenu généré par les fonds de la Fondation.

 

La participation à des activités de placement, en particulier l’achat d’actions à crédit, est également conforme à cet objet.

 

Les bénéficiaires et les personnes qui pourront le devenir compte tenu de l’objet de la Fondation n’ont aucun droit à des subventions de la Fondation.

 

§ 3 Actifs

 

 

(1)        Les actifs de la Fondation au moment de sa création étaient composés d’un montant en espèces d’un million de schillings autrichiens, ce montant étant inscrit à titre de capital dans le solde d’ouverture de la Fondation. Les règles de la Loi sur les sociétés relatives au capital-actions s’appliquent à ces actifs.---

 

(2)        La Fondation est autorisée à acquérir et à détenir des biens meubles et immeubles ainsi que des droits de tout genre (y compris des valeurs mobilières), dans le pays et à l’étranger, en vue de conclure des opérations juridiques de quelque genre que ce soit, ainsi qu’à accepter tout apport et à contracter toute dette nécessaire ou utile aux fins du maintien ou de la gestion de ses actifs.----

 

§ 4 Organes de la Fondation

 

Les organes de la Fondation comprennent : ----

 

a)       le conseil exécutif ---------------------------------------------------------------

b)      le vérificateur de la Fondation -----------------------------------------------------------

c)       le conseil consultatif ----------------------------------------------------------------

 

§ 5 Conseil exécutif

 

(1)               Le conseil exécutif est composé de trois membres.----

 

(2)               Les membres du conseil exécutif sont nommés et destitués de leurs fonctions par le fondateur de la Fondation tant qu’il est vivant et en mesure de gérer les affaires de la Fondation. En cas de départ d’un membre, le conseil exécutif désigne un successeur. Le mandat d’un membre peut être renouvelé.----

 

(3)               Le conseil exécutif gère les affaires de la Fondation en faisant preuve de la diligence requise d’un gestionnaire compétent et consciencieux conformément à la déclaration constitutive de la Fondation, à tout acte supplémentaire et aux règles de procédure qu’il adopte. Il représente à tous les égards la Fondation auprès des tiers; deux représentants sont autorisés à agir conjointement à des fins de représentation.----

 

(4)               Les membres du conseil exécutif quittent le conseil :----

 

-           à l’expiration de leur mandat, la durée de ce mandat devant être fixée;----

-           au moment de leur démission, présentée par écrit au président du conseil ou à l’adjoint du président, sans qu’il soit nécessaire d’en préciser les motifs;

-           par suite de leur décès, d’une incapacité ou de leur faillite;

-           par suite de leur destitution par le fondateur ou par le conseil exécutif lui‑même; le conseil exécutif décide par scrutin secret de la destitution, laquelle doit être fondée sur un motif important; le membre qui doit être destitué n’a pas droit de vote en pareil cas;----

-           par suite d’une décision rendue par le tribunal conformément au § 27 (paragraphe 27) de la LFP (la Loi sur les fondations privées).

 

 

§ 6 Principes de gestion des actifs

 

(1)        Les organes de la Fondation font tous leurs efforts afin de maintenir la valeur des actifs de la Fondation. Le conseil exécutif, avec le consentement du conseil consultatif, décide du niveau et de l’attribution des subventions ainsi que des bénéficiaires.----

 

(2)        Les membres des organes ont droit à une rémunération proportionnée à leurs activités et conforme au revenu de la Fondation. En outre, ils ont le droit d’obtenir remboursement de toute dépense en argent nécessaire qu’ils ont faite. Le vérificateur de la Fondation est tenu chaque année, dans son rapport, d’exprimer son opinion au sujet du bien-fondé de la rémunération.----

 

§ 7 Comptabilité, rapports et vérification

 

(1)        Le conseil exécutif fixe l’exercice de la Fondation.----

 

(2)        Le conseil exécutif prépare les états financiers et le rapport de gestion annuels et les présente au vérificateur de la Fondation dans les cinq mois qui suivent la fin de l’exercice. Le conseil exécutif rend compte, dans le rapport de gestion, du rendement de la Fondation et indique les bénéficiaires, ainsi que les activités et les subventions prévues pour l’année suivante.

 

(3)        Le vérificateur de la Fondation est désigné par le tribunal, sur recommandation du conseil exécutif, pour une période de trois ans. Son mandat peut être renouvelé.

 

§ 8 Modifications apportées à la déclaration constitutive de la Fondation

 

(1)        Le fondateur est autorisé, sa vie durant, à révoquer la Fondation et à apporter des modifications à la déclaration constitutive de la Fondation, avec le consentement du conseil consultatif.----

 

(2)        En cas de décès ou d’incapacité du fondateur de la Fondation, le conseil exécutif est autorisé à décider de modifier les statuts si les deux tiers des membres y consentent, ainsi qu’à présenter pareille modification au tribunal. Il obtient au préalable l’opinion du conseil consultatif. Il est uniquement permis de modifier l’objet initial de la Fondation si, par suite d’un changement de circonstances (nouvelles circonstances économiques ou sociales, changement des principes moraux généraux ou changement de la situation juridique, en particulier sur le plan du droit fiscal), la poursuite de l’objet de la Fondation, en l’absence d’une modification, ne correspondrait plus à l’intention présumée du fondateur. Il est permis d’effectuer un rajustement afin d’assurer une situation fiscale plus avantageuse, de façon à maintenir la valeur des actifs de la Fondation.----

 

§ 9 Acte supplémentaire

 

Le fondateur de la Fondation peut établir un acte supplémentaire.----

 

§ 10 Durée, liquidation

 

(1)        La Fondation est établie pour une période indéfinie.----

 

(2)        Le conseil exécutif peut décider de liquider la Fondation sur résolution unanime et sur approbation du conseil consultatif dans le cas où l’objet de la Fondation, tel qu’il est envisagé par le fondateur, ne peut plus être réalisé, s’il semble que cet objet ne puisse pas être atteint au moyen d’une modification de la déclaration constitutive de la Fondation.----

 

[9]              Le 4 octobre 1996, M. Herbert Sommerer a signé un acte supplémentaire, qu’il vaut également la peine de reproduire en entier :

 

            [traduction]

 

§ 1 Répartition des actifs

 

M. Herbert SOMMERER a en ce jour établi la Fondation privée Sommerer au moyen d’un acte notarié.----

 

§ 2 Bénéficiaires

 

Les bénéficiaires sont M. Peter SOMMERER, son épouse, Mme Dawn Elizabeth SOMMERER, ainsi que les enfants issus de leur mariage, jusqu’à leur dix-huitième anniversaire de naissance, et, en cas de décès, les descendants de ces derniers, à condition qu’ils résident en Autriche.----

 

§ 3 Bénéficiaires ultimes

 

(1)        En cas de liquidation de la Fondation en vertu du § 34 (paragraphe trente‑quatre) de la Privatstiftungsgesetz (la Loi sur les fondations privées), M. Peter SOMMERER et Mme Dawn Elizabeth SOMMERER sont les bénéficiaires ultimes selon le § 36 (paragraphe trente-six), article 4 (quatre) de la Loi sur les fondations privées.----

 

(2)        Dans tous les autres cas de liquidation, les descendants de M. Peter SOMMERER et de Mme Dawn Elizabeth SOMMERER sont les bénéficiaires ultimes. S’il y a plusieurs descendants, la répartition est faite par personne; toutefois, les descendants des enfants encore vivants n’y participent pas. Dans le cas où aucun enfant ou petit-enfant du fondateur n’existe ou ne peut être trouvé, les actifs qui restent doivent être transférés à parts égales aux collectivités de St. Sebastian, de Styria et de Wootton Basset (Wiltshire), en Angleterre, à condition que ces actifs servent à financer une infrastructure accessible au grand public.----

 

§ 4 Révocation ou modification de l’acte supplémentaire

 

L’acte supplémentaire peut être révoqué par le conseil exécutif sur approbation unanime du conseil consultatif; des modifications ou des ajouts peuvent être apportés aux dispositions de cet acte.----

 

§ Conseil consultatif

 

Le conseil consultatif, qui est composé de trois membres, conseille le conseil exécutif lorsqu’il s’agit de décider des subventions à accorder aux bénéficiaires; il est autorisé à superviser les activités du conseil exécutif.----

 

Les deux bénéficiaires les plus âgés et le fondateur sont membres du conseil consultatif.----

 

[10]         Conformément aux dispositions de la déclaration constitutive de la FPS, M. Herbert Sommerer a nommé M. Ketzer, un compagnon de collège de M. Peter Sommerer, M. Krammer, que M. Peter Sommerer ne connaissait pas, bien qu’il ait déclaré que les compétences de ce dernier lui inspiraient confiance, et M. Grossbacher, un banquier que M. Peter Sommerer connaissait bien, à titre de membres du conseil exécutif de la FPS.

 

[11]         M. Sommerer a expliqué que la FPS avait été établie pour les raisons suivantes :

 

a)       il souscrivait entièrement à la notion de fondation privée, qui visait à endiguer les sorties de capitaux de l’Autriche vers d’autres pays européens et à attirer des capitaux étrangers, assurant les mouvements du stock de capital (par exemple, les actions de Vienna) vers l’Autriche;

 

b)      de l’avis de M. Herbert Sommerer, des liens familiaux de rattachement à l’Autriche seraient établis par l’intermédiaire de la FPS, en prévision du retour de la famille dans ce pays;

 

c)       le financement par endettement serait facilité en Autriche;

 

d)      un refuge serait assuré aux placements;

 

e)       de l’avis de M. Sommerer, l’Autriche devait être de quelque façon indemnisée compte tenu de l’éducation qu’il y avait reçue; de plus, des capitaux de démarrage seraient mis à la disposition des nouvelles entreprises, quelque chose serait créé pour ses enfants et le revenu serait utilisé à des fins caritatives.

 

[12]         Le 4 octobre 1996, en même temps que la création de la FPS, M. Sommerer, en sa qualité de vendeur, a conclu avec la FPS, en sa qualité d’acheteuse, une convention de vente qui stipulait notamment ce qui suit :

 

[traduction]

 

1.         Objet de la convention

 

1.         Le vendeur détient des actions enregistrées de Vienna Systems Corporation, à Kanata (Ontario), Canada, (ci‑après appelée la « société »).

 

2.         Le vendeur vend par la présente convention à l’acheteuse 1 770 000 actions des actions susmentionnées. Le vendeur conserve le droit de vote, le droit aux dividendes et tout droit de souscription.

 

2.         Prix d’achat

 

1.         Le prix d’achat des actions visées par la présente convention est de 1 177 050 $CAN. [...]

 

3.         Transfert et garantie

 

1.         L’acheteuse acquiert les actions visées par la présente convention, le droit de vote, le droit aux dividendes et le droit de souscription n’étant toutefois pas inclus. [...]

 

4.         Conditions générales

 

            […]

 

2.         Dans le cas où certaines dispositions individuelles du présent contrat sont ou deviennent inexécutoires, les autres dispositions continueront à s’appliquer. En pareil cas, les parties à la convention remplaceront pareille disposition par une nouvelle disposition reflétant l’objet commercial de la disposition initiale.

 

[13]         La FPS a versé en espèces à M. Sommerer un montant de 117 705 $, le solde du prix d’achat de 1 059 345 $ étant un montant exigible portant intérêt. Certains passages du procès-verbal de la réunion du conseil d’administration de Vienna qui a eu lieu le 20 septembre 1996 indiquent ce qui suit :

 

[traduction]

 

Sur motion dûment présentée, appuyée et adoptée, il est résolu d’approuver par les présentes le transfert de 1 770 001 actions ordinaires de la société, de Peter Sommerer en faveur de la Fondation privée Sommerer.

 

En outre, des certificats d’actions ont finalement été délivrés au nom de la FPS, quoique bien après le mois d’octobre 1996.

 

[14]         M. Sommerer a mentionné qu’il voulait conserver le droit de vote afin de pouvoir exercer une influence sur l’avenir de Vienna. Il croyait que les actions, en l’absence du droit de vote, du droit aux dividendes et du droit de souscription, devaient être évaluées à la moitié de leur valeur de 1,33 $ l’action (l’appelant et l’intimée conviennent qu’à ce moment‑là, la juste valeur marchande des actions était de 1,33 $ l’action), de sorte que le prix était de 0,665 $ l’action. Lors de l’interrogatoire préalable, M. Sommerer avait invoqué un autre motif possible de conserver le droit de vote, à savoir éviter la possibilité que Vienna perde son statut de société privée sous contrôle canadien (« SPCC ») étant donné qu’un tel risque existait si la FPS non‑résidente et la société publique Newbridge détenaient plus de 50 p. 100 des actions. Il vaut la peine de reproduire le témoignage que M. Sommerer a présenté sur ce point :

 

[traduction]

 

[…]

 

Q.        Vous avez également reconnu avoir vendu les actions à la Fondation, à l’exclusion du droit de vote, en 1996, en vue de maintenir le statut de Vienna Systems à titre de SPCC.

 

R.         Je ne l’ai pas reconnu. Quand ai-je dit cela? Je crois avoir mentionné que je voulais conserver le droit de vote afin de continuer à avoir voix de chapitre quant à l’orientation prise par la société.

 

Q.        Je lirai de nouveau le passage de l’interrogatoire préalable. Il figure dans le premier volume de la transcription. À la page 152, vous dites ce qui suit, en réponse à la question, page 152, ligne 2 :

 

            « Q.     Une société privée?

 

            R.                     Une société privée. En effet, Vienna Systems était une société privée.

 

            Q.                    Vous reconnaissez toutefois qu’il en découle certains avantages fiscaux?

 

            R.                     Sans aucun doute, je suis au courant des avantages fiscaux qu’offre le statut de SPCC.

 

            Q.                    Que vous ne vouliez pas perdre?

 

            R.                     La société ne voulait certes pas le perdre, compte tenu de la R&D.

 

            Q.                    Oui. Est-ce la raison pour laquelle vous vouliez conserver le droit de vote se rattachant aux actions?

 

            R.                     Cela pouvait fort bien être l’une des raisons. »

 

Telle est la réponse que vous nous avez donnée.

 

R.         Il y est dit que cela pouvait être l’une des raisons.

 

Q.        Mais ce n’était pas l’une des raisons?

 

R.         Pardon?

 

Q.        Ce n’était pas l’une des raisons?

 

R.         En 1996, non.

 

[…]

 

[15]         Ayant obtenu au Canada un avis professionnel selon lequel il n’était pas possible de diviser les droits se rattachant à des actions, M. Sommerer et la FPS ont préparé un addenda daté du 3 mars 1997, lequel était ainsi libellé :

 

            [traduction]

 

Addenda à la convention d’achat datée du 4 octobre 1996

 

Compte tenu d’une convention d’achat datée du 4 octobre 1996, la Fondation privée Sommerer, Waldrandsiedlung 5, 3224 Mitterbach, a acquis 1 770 000 actions de Vienna Systems Corporation de M. Peter Sommerer, 8, Murphy Court, Kanata (Ontario), Canada, à l’exclusion du droit de vote, du droit aux dividendes et du droit de souscription.

 

Les deux parties contractantes conviennent par les présentes que les droits susmentionnés ont en principe été transférés.

 

La Fondation privée Sommerer transfère expressément à M. Peter Sommerer tous ces droits (droit de vote, droit aux dividendes et droit de souscription).

 

M. Peter Sommerer autorise la Fondation privée Sommerer à transférer le droit de vote, le droit aux dividendes et le droit de souscription sur paiement d’une contrepartie de 0,66 $CAN l’action.

 

Vienne, 3 mars 1997.

 

[16]         On ne sait pas trop pourquoi ce document est daté du 3 mars 1997 puisque le procès-verbal du conseil exécutif de la FPS donne à penser que l’addenda a finalement été mis en place après le mois de juin 1998 et peut-être même aussi tard qu’au mois de novembre 1998. De fait, le procès-verbal de la réunion du 27 novembre 1998 indiquait un certain nombre de choses :

 

            [traduction]

 

            5. Droit de vote, droit aux dividendes et droit de souscription se rattachant aux actions de Vienna

 

M. Krammer a expliqué que la modification de la convention concernant l’achat d’actions de Vienna Systems Corporation n’avait pas encore été mise en œuvre et il a fait remarquer qu’il enverrait bientôt à M. Peter Sommerer, pour qu’il le signe, un projet de modification.

 

            […]

 

            10.       Offre d’acquisition de Vienna Systems

 

M. Sommerer a informé les personnes présentes que la société Nokia avait communiqué avec la société Vienna afin d’acheter toutes les actions en circulation de cette dernière. Il a remis au conseil exécutif une copie d’une décision qu’avait prise le conseil consultatif de recommander au conseil exécutif d’accepter une offre possible de Nokia et d’offrir en vente toutes les actions de Vienna Systems qui étaient en la possession de la Fondation, à condition que le prix s’élève à environ 9 $CAN l’action (pièce jointe G).

 

            Le conseil exécutif a accepté à l’unanimité de donner suite à cette recommandation.

 

            M. Peter Sommerer a en outre expliqué que l’on prévoyait que Nokia demande qu’une offre de vente signée du conseil exécutif de la Fondation privée soit présentée avant le 18 décembre pour que l’achat puisse avoir lieu avant la fin de l’exercice 1998.

 

            Le conseil exécutif a en outre accepté à l’unanimité de racheter le droit de vote, le droit aux dividendes et le droit de souscription se rattachant aux actions de Vienna Systems que M. Peter Sommerer possédait encore si Nokia acceptait l’offre de vente.

 

[…]

 

[17]         Les parties conviennent qu’au mois d’octobre 1996, la juste valeur marchande des actions de Vienna était de 1,33 $ l’action.

 

[18]         Au mois d’avril 1997, M. Sommerer, en sa qualité de membre du conseil consultatif de la FPS, a recommandé au conseil exécutif de vendre 150 000 actions de Vienna, mais le conseil exécutif a décidé de ne pas procéder à la vente à ce moment‑là, étant donné que M. Krammer croyait, selon le procès-verbal du conseil exécutif, que les actions [traduction] « pouvaient encore augmenter de valeur ». Au mois de décembre 1997, le conseil exécutif, encore une fois sur la recommandation de M. Sommerer en sa qualité de membre du conseil consultatif, a résolu de vendre 150 000 actions de Vienna à M. Mikutta, 33 333 actions à M. Jenkins et 33 333 actions à M. Madsen, au prix de 4,50 $CAN l’action. Il est intéressant de mentionner la lettre que M. Sommerer a envoyée à M. Jenkins le 30 novembre 1997 au sujet de la vente des actions de Vienna :

 

[traduction]

 

Sur délivrance du certificat d’actions à votre nom, je vous transférerai le droit aux dividendes et le droit à l’attribution d’actions. Je conserverai uniquement le droit de vote se rattachant à ces actions. Le droit de vote s’appliquera aux actions que vous aurez obtenues au moyen de dividendes en actions et du fractionnement d’actions ainsi qu’à toute action acquise, sous réserve de tout droit d’attribution au prorata pour les actions nouvellement émises. Immédiatement avant une offre publique initiale, je vous transférerai le droit de vote se rattachant à toute action que vous détenez à l’égard de laquelle je possède un droit de vote.

 

[19]         Le 23 novembre 1998, les administrateurs de Vienna ont examiné une offre de Nokia concernant l’achat de Vienna moyennant le versement d’un montant de 134 000 000 $. Quatre jours plus tard, le conseil consultatif de la FPS a recommandé au conseil exécutif d’accepter l’offre de Nokia au prix de 9 $CAN l’action. (Voir l’extrait du procès-verbal, paragraphe 16 des présents motifs.) Le 18 décembre 1998, la convention de vente d’actions conclue avec Nokia a été signée par M. Grossbacher pour le compte de la FPS.

 

[20]         Le 21 décembre 1998, M. Sommerer avait répondu à la demande que la FPS avait faite aux fins de la rétrocession du droit de vote, du droit aux dividendes et du droit de souscription se rattachant aux 1 770 000 actions de Vienna, en cédant immédiatement ces droits à la FPS au prix de 0,665 $ l’action. Cela semble conforme au dernier paragraphe de l’addenda du 4 octobre 1996.

 

Les actions de Cambrian

 

[21]         En ce qui concerne les actions de Cambrian Systems Corporation (« Cambrian »), M. Sommerer a conclu avec Cambrian, le 30 septembre 1997, un accord écrit de souscription en vue de l’achat de 57 143 actions ordinaires de cette société, au prix de 100 000 $.

 

[22]         Dans une lettre datée du 26 mars 1998, envoyée à M. Sommerer par M. Grossbacher, président du conseil exécutif de la FPS, il était dit ce qui suit :

 

[traduction]

 

Je vous envoie une décision indiquant que nous avons suivi la recommandation du conseil consultatif concernant l’acquisition de 57 143 actions de la société Cambrian Systems Corp. au prix de 100 000 $CAN. J’aimerais que les mesures suivantes soient prises :

 

            -           rédaction du contrat d’acquisition;

 

-           détermination du numéro de compte dans lequel les fonds seront transférés.

 

Le 5 avril 1998, M. Sommerer a remis à M. Grossbacher le certificat d’actions se rapportant aux 57 143 actions de Cambrian.

 

[23]         Malgré la position qu’il avait antérieurement prise, l’appelant a reconnu à l’instruction qu’il y avait eu un transfert des actions de Cambrian de M. Sommerer à la FPS en 1998.

 

[24]         Le 4 décembre 1998, Nortel a soumis aux actionnaires de Cambrian une offre concernant l’acquisition de leurs actions au prix de 14,97 $US l’action au moment de la conclusion de l’opération, un montant additionnel de 4,12 $ l’action devant être versé si certaines étapes étaient franchies en 1999. La FPS a reçu deux chèques de 316 584 $ et de 539 007 $ à l’égard de cette vente.

 

Modifications apportées à la FPS

 

[25]         Un certain nombre de modifications ont été apportées à la FPS après l’année 1998. Ces modifications ne s’appliquent pas à la période qui est ici pertinente, mais elles servent à montrer ce qui s’est par la suite passé et donnent une idée des intentions des personnes en cause ainsi que de l’objet de la FPS. J’examinerai donc brièvement certaines de ces modifications.

 

[26]         Lors de la réunion que le conseil exécutif de la FPS a tenue le 17 juin 1998, à laquelle assistaient les trois membres du conseil consultatif, soit M. Sommerer, M. Herbert Sommerer et Mme Sommerer, la modification de l’acte supplémentaire a fait l’objet de discussions. Le procès-verbal indique ce qui suit :

 

[traduction]

 

8.         Modification de l’acte supplémentaire

 

[…]

 

M. Krammer a déclaré être prêt à donner suite à un projet de modification de l’acte supplémentaire, à le présenter au conseil consultatif et au conseil exécutif dès que possible pour le faire approuver et à mettre en œuvre la modification notariée nécessaire. Il a été convenu que le nouvel acte supplémentaire de la Fondation (1’« ASF ») devait inclure les modifications suivantes :

 

·        l’ajout d’organismes à but non lucratif à titre de bénéficiaires au § 2 de l’ASF comme le conseil consultatif le proposait à l’unanimité;

·        la modification de la condition relative au lieu de résidence en Autriche, au § 2 de l’ASF, cette condition devant être modifiée de façon à prévoir un lieu de résidence dans un pays qui serait désigné par le conseil consultatif, le Canada étant irrévocablement exclu en tant que lieu de résidence;

·        l’ajout de la même condition relative au domicile, au paragraphe premier et au paragraphe 2 du § 3 de l’ASF, de façon qu’ils s’appliquent d’une façon analogue aux fins de la détermination des bénéficiaires ultimes;

·        l’élimination du droit expressément accordé au conseil consultatif, au premier paragraphe du § 5 de l’ASF, quant à la supervision des activités du conseil exécutif.

 

[27]         Le 22 janvier 1999, l’acte supplémentaire a de fait été modifié en vue de donner suite à ces recommandations. Il n’était plus fait mention du rôle de supervision accordé au conseil consultatif.

 

[28]         Le 6 décembre 1999, après avoir obtenu un avis professionnel, et après que l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») eut communiqué avec lui au sujet de ses déclarations de 1998, M. Sommerer a écrit ce qui suit à M. Krammer :

 

[traduction]

 

[…]

 

Les modifications visent à éviter que les bénéficiaires soient expressément désignés. Le nouvel addenda ne devrait comporter que trois paragraphes :

 

§ 1.      Les bénéficiaires doivent être des organismes à but non lucratif désignés par le comité consultatif.

 

§ 2.      Le présent addenda peut être révoqué par le conseil exécutif sur approbation unanime du conseil consultatif; des modifications peuvent y être apportées sur tous les points.

 

§ 3.      Le conseil consultatif désigné dans les présentes est composé de trois membres; il doit conseiller le conseil exécutif lorsqu’il s’agit de décider des dons à consentir aux bénéficiaires. Le comité consultatif est composé des personnes les plus âgées parmi les personnes suivantes : le fondateur, Mme Dawn E. Sommerer, M. Peter Sommerer, ainsi que les enfants et les petits-enfants de Peter Sommerer et de Dawn E. Sommerer.

 

[29]         Cette lettre a donné lieu à la préparation d’un acte supplémentaire modifié de nouveau en date du 7 janvier 2000. Je note en particulier ce qui suit :

 

[traduction]

 

Deuxièmement :

 

Les bénéficiaires sont des organismes de bienfaisance précis;

 

Troisièmement :

 

1.         En cas de liquidation en vertu du § 34 de la Privatstiftungsgesetz (la Loi sur les fondations privées), Mme Dawn Elizabeth SOMMERER est la bénéficiaire ultime au sens du § 36, article 4, de la Loi sur les fondations privées, à condition de résider dans l’un des pays désignés par le conseil consultatif, à l’exclusion du Canada. La clause relative à la résidence est irrévocable.

 

[30]         Par la suite, en l’an 2000, M. Sommerer a cru que, compte tenu des questions que soulevaient la déclaration constitutive de la Fondation et l’acte supplémentaire ainsi que de la façon dont la FPS gérait ses affaires, il convenait de rédiger certaines règles de procédure à l’intention du conseil exécutif et du conseil consultatif, de sorte que certaines modifications ont été apportées à la déclaration constitutive de la Fondation, lesquelles ont pris effet le 24 juillet 2000, principalement en vue d’ajouter une disposition prévoyant que la FPS [traduction] « encouragera[it] l’établissement ou l’expansion de sociétés appartenant à des personnes qui pourr[aient] être retenues comme membres du conseil consultatif [...] ».

 

[31]         L’acte supplémentaire a également en même temps fait l’objet de certaines modifications :

 

a)         les bénéficiaires susceptibles d’être désignés par le conseil exécutif comprenaient désormais des organismes de bienfaisance ainsi que des groupes de personnes susceptibles d’être nommées à titre de membres du conseil consultatif, pareille nomination ne pouvant toutefois pas être effectuée si elle « changeait la situation fiscale (sur le plan de l’impôt) de la Fondation privée ou de ces personnes sans que des apports aient été faits »;

 

b)         en ce qui concerne les bénéficiaires ultimes, la disposition y afférente a également été modifiée, les bénéficiaires devant être des personnes susceptibles d’être nommées à titre de membres du conseil consultatif [...] à parts égales, sous réserve encore une fois de la condition relative à la résidence.

 

[32]         La disposition concernant le conseil consultatif a fait l’objet d’un remaniement majeur, de façon à renfermer un code plus précis applicable à ce conseil. L’objet du conseil consultatif consistait encore [traduction] « à conseiller le conseil exécutif sur certaines questions, ou à approuver ou refuser d’approuver certaines décisions du conseil exécutif ».

 

[33]         D’autres modifications ont été effectuées en 2007, lorsque M. Torggler a commencé à s’intéresser à l’affaire. Cela s’est passé bien après la période qui est ici pertinente et ne tire pas à conséquence.

 

Les interactions entre le conseil exécutif et le conseil consultatif

 

[34]         Les deux parties ont passé énormément de temps à examiner les procès‑verbaux du conseil exécutif afin de me donner une idée au sujet de la question de savoir qui exerçait un contrôle sur la FPS. Je n’ai pas l’intention de m’attarder à cette question; je me contenterai de faire un certain nombre d’observations :

 

a)       À part le procès-verbal du 22 février 2000, qui indiquait que l’on communiquait avec lui par téléphone, M. Sommerer a assisté aux 25 réunions du conseil exécutif pour lesquelles des procès-verbaux ont été présentés à l’instruction; dans bien des cas, tous les membres du conseil consultatif avaient assisté à ces réunions;

 

b)      M. Sommerer agissait à titre de secrétaire du conseil exécutif lors des réunions, et il préparait les procès-verbaux;

 

c)       M. Sommerer présentait fréquemment des stratégies et des recommandations quant aux investissements. Le procès-verbal de la réunion que le conseil exécutif a tenue le 2novembre 1998 en constitue un bon exemple; M. Sommerer a alors recommandé l’acquisition des options d’achat d’actions de Bridgewater ainsi que la vente à Nokia des actions de Vienna. Le conseil a accepté ces recommandations à l’unanimité;

 

          d)      Le conseil exécutif a eu besoin de conseils en matière d’investissements, en particulier après que la FPS eut reçu le produit de la vente des actions de Vienna. Ainsi, le conseil consultatif a communiqué la décision suivante au conseil exécutif à l’automne 1999 :

 

[traduction]

 

Décision du conseil consultatif de la Fondation privée Sommerer concernant la gestion des actifs de la Fondation.

 

Le conseil consultatif aimerait par les présentes faire part des idées suivantes au sujet de la gestion des actifs de la Fondation privée Sommerer :

 

1.         Tous les produits tirés de la vente des actifs de la Fondation au cours de l’année, y compris les bénéfices possibles tirés de la spéculation, doivent être réinvestis à bref délai, tout en respectant la structure planifiée des actifs de la Fondation.

 

2.         Tous les revenus en intérêts ou les revenus de dividendes en argent reçus au cours de l’année doivent être conservés à titre de liquidités à court terme. Le montant global des intérêts et des dividendes doit être déterminé dans les trois mois suivant la fin de l’exercice.

 

3.         Le conseil exécutif, en collaboration avec le conseil consultatif, mettra de côté, sur ce montant global, un montant correspondant à titre de réserve liquide aux fins du paiement des obligations de quelque genre que ce soit (impôts, autres frais).

 

4.         Le montant qui reste doit être versé aux bénéficiaires en collaboration avec le conseil consultatif.

 

5.         Tout montant restant éventuel doit être réinvesti d’une façon qui correspond le plus possible à la structure cible des actifs de la Fondation.

 

6.         Le conseil consultatif informera le conseil exécutif avant le début de chaque exercice de la structure cible des actifs de la Fondation et, au besoin ou si on le désire, il proposera toute restructuration d’investissements précis.

 

e)       C’était le conseil consultatif qui avait proposé les distributions. M. Sommerer a mentionné qu’il évaluait chaque année le capital de la Fondation en vue d’attirer l’attention du conseil exécutif sur les montants disponibles aux fins des distributions. Il s’agissait en fait d’un critère à deux volets selon lequel il était tenu compte du revenu et de la valeur des actifs de la FPS compte tenu de l’inflation;

 

f)       Les procès-verbaux du conseil exécutif indiquent que celui‑ci, en collaboration avec la banque Erste, s’occupait de la gestion des placements de portefeuille.

 

Les experts

 

[35]         Avant d’examiner les témoignages des deux experts, M. Torggler et M. Plesser, il importe de se rappeler les dispositions pertinentes de la LAFP, telle qu’elle a été édictée au mois d’octobre 1993. Cette loi est reproduite à l’annexe A des présents motifs.

 

[36]         En particulier, j’aimerais mentionner expressément un certain nombre d’éléments de la LAFP :

 

a)       la Fondation privée est une entité juridique;

 

b)      la déclaration constitutive de la Fondation, sous la forme d’un acte, doit être inscrite au registre des sociétés;

 

c)       les documents supplémentaires n’ont pas à être inscrits, mais les dates de l’acte et des modifications doivent l’être;

 

d)      les bénéficiaires peuvent être désignés dans la déclaration constitutive de la Fondation ou par une personne ou un organisme (stelle) désigné à cette fin par le fondateur, ou dans un cas autre qu’un organisme (stelle), par le conseil d’administration (le conseil exécutif);

 

e)       les bénéficiaires ultimes ont droit à tous les actifs qui restent au moment de la dissolution;

 

f)       une disposition de la LAFP prévoit le recours à un conseil de supervision dans des circonstances précises (ces circonstances n’existent pas dans l’affaire dont je suis ici saisi);

 

g)       la déclaration constitutive de la Fondation peut prévoir la constitution d’autres organes de la Fondation;

 

h)       le conseil exécutif veille à ce que l’objet de la Fondation soit atteint; il doit exercer ses fonctions à moindres frais et en faisant preuve de prudence;

 

i)        le fondateur peut se réserver le droit de modifier la déclaration constitutive de la Fondation ou de la révoquer; en l’espèce, le fondateur a réservé son droit de révoquer la déclaration;

 

j)        les bénéficiaires ont droit à des renseignements et peuvent demander une inspection.

 

[37]         M. Torggler et M. Plesser possédaient tous deux la compétence voulue pour m’aider à comprendre les lois autrichiennes concernant les fondations privées autrichiennes.

 

[38]         M. Torggler agissait à titre de témoin expert; de plus, en 2007, ses services avaient été retenus par la FPS pour qu’il examine la déclaration constitutive de la Fondation. Avant de faire des commentaires précis au sujet de la FPS, il a exprimé l’opinion suivante :

 

a)       la Fondation privée est une « personne »;

 

b)      le conseil exécutif a uniquement des obligations envers la Fondation privée et n’a aucune obligation fiduciaire envers les bénéficiaires, sauf stipulation contraire de la déclaration constitutive de la Fondation;

 

c)       un conseil consultatif qui est un organe additionnel ne peut pas, selon la Cour supérieure autrichienne, être contrôlé par des bénéficiaires, si les droits et les obligations de pareil organe sont assimilables à ceux d’un conseil de supervision;

 

d)      la législation établit une distinction entre les bénéficiaires et les bénéficiaires ultimes. Les tribunaux autrichiens ont également fait une distinction entre les bénéficiaires actuels et les bénéficiaires éventuels. Les bénéficiaires sont considérés comme des bénéficiaires actuels uniquement à compter du moment où ils ont droit aux dotations. Les bénéficiaires ultimes sont considérés comme des bénéficiaires actuels uniquement à compter du moment où le conseil exécutif adopte une résolution en vue de dissoudre la Fondation privée;

 

e)       les fondations privées autrichiennes sont assujetties à l’impôt sur le revenu des sociétés autrichien à titre de personnes juridiques distinctes, et notamment à un impôt de spéculation sur la disposition d’actions détenues pendant moins d’une année.

 

[39]         M. Plesser souscrivait aux commentaires susmentionnés.

 

[40]         En ce qui concerne la FPS, M. Torggler a exprimé l’opinion suivante :

 

a)       Peter Sommerer (ainsi que son épouse et ses enfants) étaient uniquement des bénéficiaires éventuels puisqu’ils ne résidaient pas en Autriche et qu’aucune résolution n’avait été adoptée en vue de dissoudre la Fondation. M. Plesser souscrit à cette opinion;

 

b)      M. Sommerer ne possédait aucun droit à titre de bénéficiaire en vertu des articles 29, 30 et 31 de la LAFP puisqu’il était uniquement un bénéficiaire éventuel, mais certains droits lui étaient reconnus en vertu des paragraphes 35(3) et (4) au moment de la dissolution de la Fondation. M. Plesser souscrit à cette opinion;

 

c)       M. Sommerer ne possédait aucun droit de propriété sur les biens de la FPS. M. Plesser souscrit à cette opinion;

 

d)      M. Sommerer ne peut pas transférer son statut de bénéficiaire à une autre personne. M. Plesser souscrit à cette opinion;

 

e)       aucun conseil de supervision n’avait été constitué à titre d’organe de la FPS;

 

f)       en 1998, le conseil consultatif n’était pas validement établi et il ne possédait donc aucun pouvoir étant donné que sa création n’était pas prévue dans la déclaration constitutive de la Fondation, mais qu’il en était uniquement fait mention; ce n’est qu’après qu’une modification eut par la suite été effectuée que ce conseil a validement été établi et constitué;

 

g)       les sommes distribuées par la FPS se rapportaient uniquement au revenu tiré des biens et non aux biens eux-mêmes. Il y a eu énormément de discussions à cet égard, mais je conclus que les sommes distribuées se rapportaient au revenu.

 

[41]         Il existait une importante divergence de points de vue entre M. Plesser et M. Torggler au sujet des pouvoirs du conseil consultatif. M. Plesser convenait que ce conseil n’avait pas été établi à titre d’organe de la FPS. Cependant, il a exprimé l’opinion selon laquelle il pouvait s’agir d’un stelle (organisme autorisé à désigner les bénéficiaires dont il est fait mention à l’article 5 de la LAFP), mais uniquement en collaboration avec le conseil exécutif, ou qu’il pouvait s’agir d’une personne à qui des responsabilités spéciales étaient confiées, conformément aux paragraphes 9(2) et (4) de la LAFP.

 

[42]         M. Plesser a exprimé l’opinion selon laquelle :

 

-        il fallait obtenir le consentement du conseil consultatif aux fins de la détermination du montant des subventions et de la désignation des bénéficiaires (article 6 de la déclaration constitutive de la Fondation);

 

-        il fallait obtenir le consentement du conseil consultatif lorsque le fondateur voulait révoquer ou modifier la déclaration de la Fondation (paragraphe 8(1) de la déclaration constitutive de la Fondation);

 

-        il fallait obtenir l’opinion du conseil consultatif quant aux modifications à effectuer en cas de décès du fondateur (paragraphe 8(2) de la déclaration constitutive de la Fondation);

 

-        il fallait obtenir l’approbation du conseil consultatif pour liquider la Fondation (article 10 de la déclaration constitutive de la Fondation).

 

[43]         En se fondant sur une décision rendue en 2002 par la Cour supérieure autrichienne, M. Plesser a également soutenu qu’un conseil consultatif exerçant une certaine influence pourrait être constitué, mais non en tant qu’organe. Dans cette décision, la Cour supérieure a dit ce qui suit[1] :

 

[traduction]

 

[…] Cela étant, les concédants ont établi un conseil « secret » qui n’a pas de statut organisationnel pour ce qui est du § 14, article 2 de la LFP. Un conseil établi par les concédants (tel que le conseil consultatif) n’est de toute façon pas un organe de la fondation en vertu du § 14, article 2 de la LFP, si l’acte concernant la fondation renferme simplement, comme c’est ici le cas, une disposition aux fins de l’établissement d’organes additionnels et, compte tenu de l’absence complète de renseignements au sujet de la structure organisationnelle et des tâches du conseil, il n’existe aucun point de référence indiquant qu’un organe devrait être établi en vue de protéger l’objet de la fondation. Cela étant, les concédants ont créé, dans ce cas‑ci, un conseil qui peut exercer une influence sur le conseil de la fondation dans les limites du pouvoir d’approbation; toutefois, aucun statut n’est accordé à ce conseil en tant qu’organe [...]

 

[44]         Tout en niant que le conseil consultatif soit un organe ou qu’il fasse partie d’un stelle, ou qu’il soit un organisme chargé de tâches spéciales, M. Torggler a convenu qu’il pouvait exister un conseil consultatif qui n’était pas un organe, aux fins des approbations ou des consentements nécessaires, M. Torggler ayant à cet égard fait une distinction à l’égard des droits de détermination. Je retiens la thèse de M. Torggler lorsqu’il déclare que le conseil consultatif de la FPS n’est pas un stelle et ne fait pas partie d’un stelle, ou qu’il n’est pas un organisme désigné en vue d’accomplir des tâches spéciales. Je conclus qu’il s’agit simplement d’un conseil consultatif qui n’a pas le statut d’organe, bien qu’il exerce une certaine influence.

 

Les nouvelles cotisations

 

[45]         Je n’examinerai pas en détail chacune des cinq années visées par les cotisations, mais il est clair que la situation fiscale de l’appelant dépend du traitement de la disposition des actions de Vienna et de Cambrian, en 1998. L’intimée a établi de nouvelles cotisations à l’égard de M. Sommerer compte tenu du fait que le paragraphe 75(2) de la Loi s’appliquait, en émettant l’hypothèse selon laquelle il existait une fiducie en Autriche. Dans la réponse à l’avis d’appel, le ministre a invoqué un nouvel argument principal, à savoir que M. Sommerer n’avait vendu à la FPS les actions qu’il détenait dans Vienna que peu de temps avant la vente à Nokia, en 1998, de sorte qu’il avait réalisé un gain par suite d’une disposition, à la juste valeur marchande (soit la valeur que Nokia était prête à payer), entre personnes ayant entre elles un lien de dépendance. L’intimée a reconnu que cette approche entraînerait pour M. Sommerer un fardeau fiscal plus lourd, mais elle a déclaré qu’elle devait s’en tenir au résultat de la cotisation établie en vertu du paragraphe 75(2) de la Loi.

 

[46]         Les points litigieux

 

1.       À quel moment M. Sommerer a‑t‑il vendu les actions de Vienna à la FPS, en 1996 ou en 1998?

 

2.       L’arrangement par lequel M. Herbert Sommerer a fait dotation de fonds à la FPS aux fins énoncées dans les actes concernant la FPS peut‑il être considéré comme une fiducie pour l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu? Je note que les deux parties ont libellé cette question comme étant de savoir si la FPS était une société ou si elle était plutôt une fiducie. Selon moi, il ne convient pas de libeller ainsi la question. La FPS est une entité juridique distincte; or, en vertu du droit canadien, une fiducie ne l’est pas; elle crée une relation décrivant la façon dont les biens sont détenus. La FPS pourrait être un fiduciaire. Il s’agit simplement de savoir s’il existait une fiducie, et non de savoir si la FPS est une fiducie ou une société. En outre, malgré l’argument concernant la caractérisation de la FPS à titre de société, telle n’est pas la question. Si je conclus à l’existence d’une fiducie, il importe peu de savoir si la FPS est une société. Si je conclus qu’il n’existait pas de fiducie, les parties conviennent que la FPS peut être considérée comme une société, mais elles ne s’entendent pas sur l’application du régime du revenu étranger accumulé, tiré de biens (« REATB »).

 

3.       S’il existe une fiducie, le paragraphe 75(2) de la Loi s’applique‑t‑il de façon à attribuer à M. Sommerer les gains tirés de la disposition des actions de Vienna et de Cambrian par la FPS?

 

4.       S’il existe une fiducie et que le paragraphe 75(2) de la Loi s’applique, les dispositions de la Convention empêchent-elles l’intimée d’imposer les gains en capital réalisés par la FPS lors de la disposition des actions de Vienna et de Cambrian?

 

5.       La FPS était-elle un mandataire de M. Sommerer aux fins de la disposition des actions de Vienna et de Cambrian?

 

1.       À quel moment M. Sommerer a‑t‑il vendu les actions de Vienna à la FPS?

 

[47]         L’intimée soutient qu’étant donné qu’il n’est pas légalement possible de diviser les droits se rattachant aux actions ordinaires, la convention du mois d’octobre 1996 que M. Sommerer a conclue avec la FPS était fondée sur une erreur commune qui touchait l’essence même de la convention et que la convention est donc nulle. Selon l’intimée, M. Sommerer a transféré les actions à la FPS au mois de décembre 1998 seulement, lors de la vente que la FPS a conclue avec Nokia, puisque ce n’est qu’à ce moment‑là que M. Sommerer a transféré à la FPS tous les droits inséparables dont les actions étaient constituées. Étant donné qu’il s’agissait d’un transfert entre personnes ayant entre elles un lien de dépendance, le transfert a été effectué à la juste valeur marchande, cette valeur étant établie par le prix que Nokia a offert et payé.

 

[48]         En se fondant sur les remarques que la Cour suprême du Canada avait faites dans l’arrêt Sparling c. Québec (Caisse de dépôt et placement du Québec)[2], l’appelant convient que les droits dont les actions sont constituées sont inséparables, en ce sens qu’il n’est pas légalement possible de transférer des actions en excluant certains droits s’y rattachant, mais il affirme que le contrat peut être interprété d’une façon qui ne va pas à l’encontre de la notion d’inséparabilité. De plus, en se fondant sur la notion de division ainsi que sur l’intention des parties, telle qu’elle est énoncée dans la clause de division des droits de la convention du mois d’octobre 1996 elle-même, l’appelant affirme que je devrais séparer les éléments irréguliers de la convention (l’exclusion du droit aux dividendes, du droit de vote et du droit de souscription) et laisser en place la convention pour ce qui est de la vente des actions.

 

[49]         Dans la convention de vente initiale du mois d’octobre 1996, la clause prévoyant la division des droits invite les parties à modifier par écrit les parties inexécutoires de la convention. Je conclus que c’est exactement ce que les parties ont tenté de faire dans l’addenda daté du 21 mars 1997. Bien que l’addenda ait en fait été signé après cette date, il reste qu’un addenda a été signé, lequel montre clairement que la convention du mois d’octobre 1996 était une convention en vue de la vente d’actions. L’addenda vise ensuite maladroitement à remettre à M. Sommerer le droit de vote, le droit aux dividendes et le droit de souscription, mais il le fait maintenant compte tenu du fait que les actions ont été transmises à la FPS, au lieu de tenter de transmettre à la FPS des actions ne comportant pas tous les droits s’y rattachant. Le problème est que maintenant la FPS tente de rétrocéder à M. Sommerer le droit de vote, le droit aux dividendes et le droit de souscription sans transférer les actions. Cela est plus facile à interpréter. Rien n’empêche un actionnaire, tout en conservant la propriété des actions, de faire en sorte que quelqu’un d’autre ait un droit de vote à l’égard de ses actions ou de céder le revenu en dividendes qu’il reçoit sur les actions. Je souscris à l’avis que la Cour d’appel fédérale a exprimé sur ce point dans l’arrêt Sedona Networks Corporation c. la Reine[3] :

 

[…] Je ne vois pas pourquoi ce même principe ne pourrait pas s’appliquer lorsque le propriétaire d’actions avec droit de vote conclut avec une autre personne un contrat accordant à celle‑ci un droit de vote contractuel, mais sans lui conférer les autres attributs liés à la propriété des actions.

 

Telle est la seule façon sensée et légalement compréhensible d’interpréter l’addenda du 21 mars 1997. Cette approche est également conforme à l’idée exprimée par la Cour d’appel de l’Ontario dans l’arrêt Maschinenfabrik Seydelmann K-G v. Presswood Brothers Ltd. [4] :

 

[traduction]

 

[…] Malgré toute le respect que j’ai pour l’opinion du savant juge de première instance, qui a débouté la demanderesse avec une certaine réticence, il reste que le juge n’a pas tenu compte de la présomption de droit bien établie en faveur de la légalité d’un contrat; si un contrat est raisonnablement susceptible de se voir attribuer deux sens ou de comporter deux modes d’exécution, l’un étant légal alors que l’autre ne l’est pas, il faut adopter l’interprétation qui étaye le contrat et qui permet de lui donner effet.

 

Lorsque la convention de vente du mois d’octobre 1996 et l’addenda du 21 mars 1999 sont interprétés conjointement, on arrive à une interprétation légale claire qui est tout à fait conforme à l’intention des parties à la convention en ce qui concerne le transfert des actions.

 

[50]         Selon l’intimée, les faits n’étayent pas cette interprétation, compte tenu du témoignage que M. Sommerer a présenté au sujet du droit de vote afférent aux actions. Lors de l’interrogatoire préalable, les propos suivants ont été échangés, lesquels ont été confirmés par M. Sommerer à l’instruction :

 

[traduction]

 

Q.        Lors de la réunion, on a fait savoir que la société (c’est‑à‑dire Vienna Systems Corporation) était tenue, en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions, de convoquer ses actionnaires à une assemblée annuelle avant le 14 février 1997. Une telle assemblée a‑t‑elle en fait été tenue avant le 14 février 1997?

 

R.         Je l’ignore, mais je suppose qu’une telle assemblée a eu lieu.

 

Q.        Oui. Et lors de cette assemblée, je suppose que vous avez exercé de votre propre chef le droit de vote se rattachant aux actions de la Fondation que vous aviez transférées?

 

R.         C’est ce que je suppose.

 

[51]         Il convient de noter deux choses à ce sujet. En premier lieu, M. Sommerer suppose uniquement qu’il a exercé de son propre chef le droit de vote se rattachant aux actions. Or, M. Sommerer n’est pas avocat et on ne saurait s’attendre à ce qu’il comprenne les subtilités juridiques associées à la propriété d’actions. En second lieu, que devait-il supposer d’autre, au mois de février 1997, compte tenu de la façon dont la convention de vente était rédigée? La supposition que M. Sommerer a faite, à savoir qu’il avait exercé de son propre chef le droit de vote se rattachant aux actions, a peu de poids lorsqu’il s’agit de déterminer à qui appartenaient les actions. En outre, j’évalue cette preuve à la lumière de nombreuses autres déclarations que M. Sommerer a faites à l’instruction, par exemple :

 

[traduction]

 

[…] Ce que j’ai essentiellement fait, dans le cadre de la vente des actions à la Fondation, c’était de donner la possibilité d’un bénéfice personnel, si ces actions prenaient de la valeur.

 

[52]         L’intimée signale également une liste d’actionnaires de Vienna, en date du 31 décembre 1996, indiquant que les actions étaient encore enregistrées au nom de M. Sommerer. Pourtant, la chose devrait être appréciée par rapport aux éléments suivants :

 

a)       les états financiers de la FPS indiquant que celle-ci avait acquis les actions en 1996;

 

b)      les certificats d’actions délivrés au nom de la FPS;

 

c)       la résolution du 20 septembre 1996 par laquelle les administrateurs de Vienna approuvaient le transfert de 1 770 000 actions de M. Sommerer en faveur de la FPS;

 

d)      un registre non daté des actionnaires de Vienna indiquant que la FPS avait acquis les actions le 4 octobre 1996.

 

[53]         Compte tenu de ces faits et des dispositions de la convention du 4 octobre 1996 ainsi que de l’addenda du mois de mars 1997, je conclus que M. Sommerer a transféré à la FPS les actions de Vienna le 4 octobre 1996, au prix de 1,33 $ l’action. J’arrive à cette conclusion sans avoir à me fonder sur la notion de division des droits invoquée par l’appelant. Conformément aux dispositions de la convention du 4 octobre 1996, M. Sommerer et la FPS ont modifié par écrit cette convention en vue de préciser que la propriété des actions était transférée. Les administrateurs de Vienna avaient déjà approuvé le transfert et des certificats d’actions avaient été délivrés. Cela est suffisant.

 

[54]         Telle est la conclusion à laquelle je suis arrivé au sujet de l’interprétation de la convention de vente, mais j’aimerais néanmoins parler de l’approche que l’intimée a adoptée, à savoir que la convention de vente est nulle à cause de l’erreur mutuelle fondamentale que les parties ont commise au sujet de la nature de l’actif qui était transféré. Il n’est pas tenu compte du droit contractuel de procéder à des modifications qui est inclus dans la convention du 4 octobre 1996 et du fait que M. Sommerer et la FPS se sont fondés sur ce droit pour modifier la convention au moyen de l’addenda du 21 mars 1997. L’intimée m’invite à mettre tout simplement ce fait de côté et à me concentrer uniquement sur la convention du 4 octobre 1996 et, plus précisément, sur le fait que des actions sans droit de vote, sans droit aux dividendes ou sans droit de souscription sont non existantes – cela ne peut tout simplement pas être le cas, et le contrat est donc nul, que ce soit sur la base d’une erreur commune ou par suite de l’omission de satisfaire à une condition préalable (l’existence des actifs). Ce qui est intéressant en l’espèce, c’est que ni l’une ni l’autre partie au contrat ne cherche à faire annuler le contrat; de fait, c’est plutôt le contraire. C’est le fisc qui a demandé à la Cour d’annuler le contrat en soutenant que l’actif qui y est visé n’existe pas. Pourtant, les actions ordinaires de Vienna existent. Cela est tout à fait différent des affaires que l’intimée a citées; en effet, dans ces affaires, soit il n’existait pas réellement de biens (voir par exemple Courturier v. Hastie[5]), ou il était question d’un avenant dans une police d’assurance qui avait déjà été annulée (voir Re Judgment Recovery (N.S.) Ltd. and Dominion Insurance Corp[6]), ou encore un bien-fonds avait été vendu à un acheteur, alors qu’il avait déjà été vendu à un autre acheteur (voir Centurion Investments Ltd. v. N.M. Skalbania Ltd.[7]). On ne saurait faire une analogie étant donné que, dans ces affaires, ni l’une ni l’autre partie ne pouvait récupérer l’objet en cause de façon qu’il puisse être effectivement transféré au bénéficiaire. En ce qui concerne les actions de Vienna, M. Sommerer détenait sans aucun doute les actions de Vienna et il pouvait les transférer; il ne pouvait tout simplement pas en retrancher certains droits. Cependant, les parties pouvaient facilement remédier à la situation, et c’est ce qu’elles ont fait. Les actions existaient et la propriété des actions pouvait être transférée. Le nouveau détenteur des actions, la FPS, était libre de céder de gré à gré certains de ses droits, sans renoncer à la propriété des actions. Il s’agissait peut-être bien d’une interprétation erronée de la loi, mais cela ne veut pas pour autant dire que l’objet était inexistant, ou qu’il y avait eu omission de satisfaire à une condition préalable. Dans la décision McLeod et al v. The Queen[8], le juge Bowie, de la présente cour, a adopté l’approche préconisée par le juge Steyn dans la décision Associated Japanese Bank v. Crédit du Nord[9], où ce dernier avait fait certaines remarques sur l’origine de la doctrine de l’erreur, Bell v. Lever Brothers Ltd[10] :

 

[traduction]

 

Le premier impératif est que la loi devrait confirmer plutôt que détruire des contrats apparents. Deuxièmement, les règles de common law concernant l’erreur commise au sujet de la qualité de l’objet, comme les règles de common law relatives aux contrats inexécutables, sont destinées à remédier aux conséquences qu’ont des circonstances inattendues et tout à fait exceptionnelles sur les contrats apparents. Troisièmement, pareille erreur, afin d’entraîner des conséquences juridiques, doit en bonne partie être commise par les deux parties et doit se rapporter aux faits tels qu’ils existaient au moment de la conclusion du contrat. Quatrièmement, et ce point est établi dans le jugement Bell v. Lever Bros. Ltd., l’erreur doit rendre l’objet du contrat essentiellement et radicalement différent de l’objet qui, selon ce que croyaient les parties, existait. […]

 

L’application de ce critère confirme mon point de vue, à savoir que la doctrine de l’erreur ne s’applique pas étant donné :

 

          1.       que le contrat peut être confirmé;

 

          2.       qu’il n’existe pas de circonstances exceptionnelles ou de circonstances inattendues;

 

3.       que l’objet est composé d’actions, qui existaient et qui appartenaient à M. Sommerer.

 

L’argument de l’intimée n’a pas réussi à me dissuader de considérer les événements d’une façon pratique, légalement acceptable.

 

[55]         J’aimerais également parler de l’argument de l’intimée lorsqu’elle affirme que M. Sommerer ne voulait pas simplement exercer un droit de vote à l’égard des actions de Vienna à la place de la FPS, mais qu’il voulait être considéré comme exerçant un contrôle sur les actions ou détenant les actions en vue de faire en sorte que Vienna ne perde pas son statut de SPCC, et qu’une interprétation des contrats selon laquelle il avait transféré la propriété des actions au mois d’octobre 1996 est donc inexacte. Je ne souscris pas à la façon dont l’intimée interprète les faits. L’intimée a fondé cet argument sur le passage du témoignage de M. Sommerer qui est reproduit au paragraphe 14 des présents motifs. Selon l’interprétation que je donne de son témoignage, M. Sommerer ne songeait pas, au mois d’octobre 1996, à la question de la SPCC en transférant les actions de la FPS tout en tentant de conserver le droit de vote y afférent.

 

[56]         Même si j’arrivais à une conclusion contraire, à savoir que M. Sommerer voulait de quelque façon « détenir » les actions afin de maintenir le statut de SPCC, cela n’influe pas sur la conclusion que j’ai tirée, à savoir que l’effet juridique de la convention du 4 octobre 1996 ainsi que de l’addenda du mois de mars 1997 était de transférer les actions à la FPS au mois d’octobre 1996. Dans l’addenda, M. Sommerer a expressément convenu qu’il avait transféré à la FPS le droit de vote, le droit aux dividendes et le droit de souscription : l’intention est claire. M. Sommerer devra tout simplement accepter la conséquence qui en découle, pour ce qui est du statut de SPCC de Vienna. S’il voulait maintenir le statut de SPCC, il a peut-être bien échoué.

 

[57]         Enfin, l’intimée a fait valoir que le fait de conclure que M. Sommerer avait vendu à la FPS les actions de Vienna en 1996 s’écarte d’une façon si fondamentale de l’intention des parties qu’il ne m’est pas loisible d’arriver à cette conclusion. Je ne suis pas d’accord. De fait, il serait beaucoup plus radical et contraire à l’intention des parties d’adopter la position préconisée par l’intimée, à savoir que le contrat était nul et que la FPS avait convenu de payer un montant d’un million de dollars sans obtenir quoi que ce soit en échange. La conclusion selon laquelle les actions ont été vendues, avec la rétrocession maladroite de certains droits, assure beaucoup plus le maintien de l’intégrité du marché qui a été conclu que la conclusion selon laquelle aucun marché n’a été conclu.

 

2.       L’arrangement par lequel M. Herbert Sommerer a fait dotation de fonds à la FPS aux fins énoncées dans les actes concernant la FPS peut‑il être considéré comme une fiducie pour l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu?

 

[58]         Comme je l’ai déjà mentionné, j’ai reformulé la question d’une façon qui se prête beaucoup plus facilement à une analyse. Il ne devrait pas s’agir de savoir si une fondation privée autrichienne, en vertu de la LAFP, est une fiducie, et encore moins si la FPS est une fiducie. Telle n’est pas la question. L’appelant affirme que la FPS est une société, alors que l’intimée affirme qu’il s’agit d’une fiducie. J’ai conclu que, selon la déclaration constitutive de la Fondation et la déclaration supplémentaire, une fondation privée autrichienne pourrait être considérée comme une société de fiducie, agissant à titre de fiduciaire, et en ce qui concerne la FPS, je conclus que cette désignation est la meilleure qu’il soit possible de lui donner, si on la considère sous l’angle des lois canadiennes.

 

[59]         Toutefois, ce n’est pas ce qu’est la FPS qu’il faut analyser, mais la relation qui existe entre la FPS (une personne juridique distincte), M. Herbert Sommerer, ainsi que M. Peter Sommerer et la famille Sommerer. Existetil une relation fiduciaire? M. Herbert Sommerer peutil être considéré comme un constituant? La FPS peut-elle être considérée comme un fiduciaire, et peut-être bien une société fiduciaire? M. Sommerer peut-il être considéré comme un bénéficiaire? Les trois « certitudes », la certitude quant à l’intention, la certitude quant aux biens et la certitude quant aux bénéficiaires, existent‑elles? Y a‑t‑il d’autres caractéristiques de la fiducie canadienne qui ne se trouvent pas dans l’arrangement que M. Sommerer a pris?

 

[60]         Je souscris à l’argument de l’appelant lorsqu’il affirme qu’en caractérisant un arrangement étranger, je dois me fonder sur les remarques que la Cour suprême du Canada a faites dans l’arrêt Backman c. La Reine[11], et que je dois examiner le droit privé canadien en vue de déterminer les éléments essentiels d’une fiducie, et comparer ensuite les éléments de l’arrangement étranger pour décider s’il peut être considéré comme s’apparentant à celui qui existe en droit canadien. Quels sont donc les éléments essentiels d’une fiducie selon le droit canadien? Je note, avec une certaine inquiétude, les remarques préliminaires que le professeur Waters a faites sur ce point dans un article intitulé The Concept Called "the Trust"[12] :

 

[traduction]

 

Les auteurs qui font des commentaires sur le régime de common law conviennent, et cette opinion est partagée par les tribunaux, que « la fiducie » ne peut pas être définie. Elle peut uniquement être décrite. Cela veut dire qu’il est possible d’en signaler les caractéristiques ou les éléments, mais qu’il est impossible de la définir en termes précis.

 

[61]         L’avocat de l’appelant m’a renvoyé à un certain nombre de commentaires d’auteurs, tels que Oosterhoff on Trusts[13] et Waters Law of Trusts in Canada[14]. Malgré la mise en garde que le professeur Waters a faite, j’ai trouvé les extraits suivants utiles :

 

Extrait de l’ouvrage d’Oosterhoff :

 

[traduction]

 

Une obligation équitable en vertu de laquelle une personne (« le fiduciaire ») est tenue d’administrer les biens dont elle a le contrôle (« les biens de la fiducie ») en tant que fonds séparés, pour le compte de personnes (« les bénéficiaires ou cestui que trust ») dont elle peut faire partie elle-même, et dont n’importe qui peut faire exécuter l’obligation.

 

            Extrait de l’ouvrage de Waters :

[traduction]

 

Les marques, les caractéristiques essentielles de la fiducie en common law, reflètent fortement un historique juridique particulier. Ce qui est primordial, c’est la relation fiduciaire qui existe entre le fiduciaire et le bénéficiaire. Les éléments suivants sont sans aucun doute essentiels. Dès la création de la fiducie, le bénéficiaire doit être en mesure d’obtenir une reddition de comptes ou, autrement dit, d’assurer l’exécution des obligations du fiduciaire.

 

[62]         Dans son argumentation, l’intimée énonce les particularités essentielles d’une façon plus générale :

 

[traduction]

 

En général, une fiducie est un moyen de gérer un patrimoine au profit d’une ou de plusieurs personnes. Les particularités essentielles d’une fiducie sont les suivantes : des biens précis, une personne ou des personnes faisant l’objet de la fiducie, possédant le droit exclusif d’en jouir ou d’en bénéficier, et une personne détenant le titre de propriété et administrant les biens pour le compte des bénéficiaires. Bref, une fiducie est une entente selon laquelle une personne qui détient le titre afférent à des biens est tenue d’administrer ces biens au profit d’une autre personne ou d’autres personnes.

 

[63]         Il n’existe aucun désaccord au sujet du fait que, pour qu’une fiducie soit créée, les trois « certitudes » doivent être présentes; cependant, d’une façon plutôt détournée, quoique logique, l’appelant affirme que s’il manque un élément essentiel pour que l’arrangement soit considéré comme une fiducie, l’intention requise aux fins de la création d’une fiducie ne peut pas exister. Selon l’appelant, l’élément manquant dans l’arrangement relatif à la FPS, est l’absence du droit des bénéficiaires d’assurer l’exécution d’une obligation que le fiduciaire a envers eux. Le professeur Waters tente de résoudre la question ainsi :

 

[traduction]

 

Quant aux conditions nécessaires, si l’une ou l’autre des trois « certitudes » n’est pas présente, les tribunaux ne reconnaîtront pas l’existence d’une fiducie. La présence des trois certitudes n’est toutefois pas suffisante pour qu’une fiducie soit créée; ces certitudes constituent par leur nature des éléments de preuve et représentent l’exigence préliminaire factuelle à laquelle il faut satisfaire pour que les obligations qu’un fiduciaire a envers le bénéficiaire à l’égard des biens visés par la fiducie soient reconnues en droit comme étant exécutoires.

 

[64]         Il s’agit, selon cet énoncé, de savoir ce qui vient en premier : l’œuf ou la poule. Les droits des bénéficiaires à l’exécution prennent-ils naissance en droit à cause de l’existence d’une fiducie, ou ces droits doivent-ils exister, aux termes de l’acte de fiducie par exemple, pour qu’il soit considéré qu’il existe une fiducie. L’appelant affirme que c’est le dernier cas qui s’applique.

 

[65]         C’est cet élément de responsabilité que le fiduciaire a envers les bénéficiaires, dont l’exécution peut être exigée par les bénéficiaires, qui constitue le nœud du litige opposant les parties sur ce point, c’est-à-dire, en somme, la nature et l’étendue de l’obligation fiduciaire requise.

 

[66]         En résumé, j’aimerais examiner les éléments essentiels suivants  d’une fiducie, selon le droit canadien :

 

a)       des biens distincts;

 

b)      appartenant à une personne (le fiduciaire) qui exerce un contrôle sur ces biens;

 

c)       au profit de personnes (les bénéficiaires);

 

d)      envers qui le fiduciaire a une obligation fiduciaire dont l’exécution peut être exigée.

 

Si je conclus à l’existence de ces particularités essentielles dans l’arrangement en vertu duquel la FPS détenait les actions de Vienna, il ne me sera pas difficile de conclure que les trois « certitudes » nécessaires à la création de la fiducie sont présentes. Il est selon moi tout à fait clair qu’il existe une « certitude » quant aux biens visés par la fiducie et quant aux bénéficiaires, et si les particularités essentielles d’une fiducie sont évidentes, l’intention de M. Herbert Sommerer de créer une fiducie peut être dégagée de la déclaration constitutive de la Fondation, de l’acte supplémentaire et de l’application de la LAFP. Somme toute, l’analyse ne dépend pas des trois « certitudes ».

 

[67]         Pour ce qui est de la FPS et du fait qu’elle détient les actions de Vienna, je conclus volontiers que les deux premiers éléments essentiels sont évidents dans l’arrangement ici en cause. Les biens, soit les actions de Vienna, qui ont été substitués à la dotation initiale que M. Herbert Sommerer avait faite en faveur de la FPS, étaient assujettis aux dispositions de la LAFP qui, au tout début de l’article premier, parle [traduction] d’« une dotation en vue de la réalisation d’un objet autorisé déterminé par le fondateur ». Or, aucun objet ne visait à ce que la FPS utilise la dotation pour son propre compte. En second lieu, les biens appartenaient à la FPS qui, en sa qualité de personne juridique, détenait le titre afférent aux actions de Vienna et qui exerçait un contrôle sur les biens.

 

[68]         Troisièmement, les biens étaient-ils détenus pour le compte de personnes? Sur ce point, les experts ont témoigné que la loi autrichienne fait une distinction entre les bénéficiaires actuels et les bénéficiaires éventuels. La LAFP fait également une distinction entre les bénéficiaires et les bénéficiaires ultimes. La déclaration constitutive de la Fondation et la déclaration supplémentaire ne donnent pas une description détaillée des bénéficiaires, mais compte tenu des opinions exprimées par les experts, je suppose que les bénéficiaires (M. Peter Sommerer, Mme Dawn Sommerer et leurs enfants ainsi que leurs descendants, à condition de résider en Autriche) sont uniquement bénéficiaires du revenu, et même en pareil cas, uniquement des bénéficiaires éventuels, puisqu’aucun d’eux ne résidait en Autriche et qu’aucun d’eux n’était désigné aux fins de la réception d’une subvention. De même, M. et Mme Sommerer, dans le cas d’une révocation de la part du fondateur, sont les bénéficiaires ultimes pour ce qui est du capital, quoique, encore une fois uniquement des bénéficiaires éventuels tant qu’il n’y a pas révocation. Cette classification, en ce qui concerne les bénéficiaires actuels et les bénéficiaires éventuels, ne tire pas à conséquence lorsqu’il s’agit de savoir si les biens étaient détenus pour le compte de personnes. Ils étaient bien sûr ainsi détenus; c’était la raison d’être de la FPS. La différence entre les bénéficiaires actuels et les bénéficiaires éventuels n’entre en ligne de compte que lorsqu’il est question de l’obligation fiduciaire de la FPS.

 

[69]         En ce qui concerne les bénéficiaires du revenu, la catégorie de bénéficiaire était claire; les documents de la Fondation indiquaient également clairement la façon de déterminer qui, dans cette catégorie, pouvait recevoir une subvention de la FPS. Il est clairement possible de déterminer quels étaient les bénéficiaires éventuels.

 

[70]         Quant aux bénéficiaires ultimes, la chose est encore plus claire. Si M. Herbert Sommerer décide de révoquer la FPS, M. Peter Sommerer et Mme Dawn Sommerer reçoivent le capital. Ce sont eux qui en tireront parti. Le troisième élément essentiel est présent.

 

[71]         Par conséquent, l’avant-dernière question est de savoir si la FPS avait envers l’un de ces bénéficiaires des obligations fiduciaires dont ces derniers pouvaient demander l’exécution.

 

[72]         L’appelant signale plusieurs facteurs à l’appui de sa position, à savoir que les bénéficiaires n’avaient aucun droit exécutoire de demander à la FPS de rendre compte. J’examinerai ces facteurs, mais je veux d’abord faire une observation primordiale au sujet de cet élément essentiel. Le droit du bénéficiaire est le revers de l’obligation fiduciaire qui incombe au fiduciaire; dans ce cas-ci, c’est l’obligation de la FPS, le cas échéant, qui est en litige. S’il n’existe aucune obligation dont les bénéficiaires peuvent demander l’exécution, la FPS a‑t‑elle simplement une obligation morale et les Sommerer espèrent-ils simplement obtenir quelque chose de la FPS? La chose serait davantage assimilable à un pouvoir de nomination. J’ai l’impression que la FPS n’était pas fondée sur les sables mouvants d’une obligation morale : il n’y avait pas d’autres bénéficiaires que les Sommerer; dans le cas d’une révocation, il n’y avait pas d’autres bénéficiaires ultimes que M. et Mme Sommerer; il n’y avait des bénéficiaires ultimes que dans les cas prévus au paragraphe 3.2 de l’acte supplémentaire. L’arrangement n’est pas conçu de façon que la FPS ait une obligation morale. Par conséquent, lorsqu’il s’agit de tenter de décider si un arrangement qui est conclu en Autriche, pays dont les lois ne comportent pas la notion nord-américaine de fiducie, est assimilable à une fiducie selon le droit canadien, j’estime avant tout qu’il y a ici quelque chose qui va bien au-delà d’une obligation morale et, à coup sûr, quelque chose se rapprochant suffisamment de l’obligation fiduciaire canadienne pour qu’il soit possible de conclure que l’arrangement concernant la FPS renferme cet élément final essentiel.

 

[73]         J’examinerai maintenant les facteurs que l’appelant a mentionnés en vue de soutenir que mon impression est erronée.

 

[74]         Premièrement, l’appelant se fonde sur le témoignage de M. Torggler, qui a déclaré que le conseil exécutif ou la FPS elle-même n’avaient aucune obligation fiduciaire envers les bénéficiaires. Cependant, il faut par ailleurs tenir compte du contexte dans lequel M. Torggler a exprimé son opinion, à savoir que selon le droit autrichien, il n’y a rien qui corresponde exactement à l’obligation fiduciaire. En réponse à la question de savoir s’il existe des obligations envers les bénéficiaires, M. Torggler a déclaré ce qui suit[15] :

 

[traduction]

 

Il n’y en a pas au départ, mais lorsqu’un bénéficiaire se voit accorder une dotation, les bénéficiaires ont habituellement été désignés et, à compter de ce moment, il existe une obligation de la part du conseil de satisfaire à cet engagement.

 

M. Torggler a également déclaré ce qui suit[16] :

 

[traduction]

 

Il existe une disposition prévoyant que le conseil d’administration est tenu de faire en sorte que l’objet de la Fondation soit réalisé, et puisque l’objet de la Fondation est en général établi en faveur des bénéficiaires, il existe indirectement une obligation à cet égard, mais aucune obligation directe n’est prévue par la loi.

 

[75]         Ces opinions ne vont pas aussi loin que ce que l’appelant laisse entendre. La Fondation elle-même est implicitement obligée de réaliser l’objet pour lequel elle a été établie. En outre, l’un de ses principaux organes, le conseil exécutif, [traduction] « exerce [ses] fonctions à moindres frais avec autant de prudence que celle dont ferait preuve un gestionnaire consciencieux » (paragraphe 17(2) de la LAFP). De plus, le conseil exécutif doit tenir les livres (article 18 de la LAFP). Le tribunal tranche tout différend survenant entre le vérificateur et le conseil exécutif au sujet de l’application de la déclaration constitutive de la Fondation (paragraphe 21(4) de la LAFP). Les membres du conseil exécutif sont responsables des dommages résultant de toute négligence dans l’exercice de leurs fonctions (paragraphe 29(1) de la LAFP). Pour un ressort qui ne reconnaît pas la notion d’obligation fiduciaire, que doit‑on conclure de ce qui précède? Je conclus qu’il existe en Autriche des obligations prévues par la loi et si l’on y ajoute l’obligation d’assurer la réalisation de l’objet de la Fondation, soit, dans le cas de la FPS, d’en faire bénéficier la famille Sommerer, je conclus que l’on accorde trop d’importance à l’opinion de M. Torggler, lorsqu’il déclare qu’il n’existe pas d’obligation fiduciaire. La notion canadienne d’obligation fiduciaire d’une part, et les dispositions de la LAFP, auxquelles vient s’ajouter le libellé de la déclaration constitutive de la Fondation, d’autre part, comportent des ressemblances suffisantes pour qu’il soit possible de conclure à l’existence d’une obligation.

 

[76]         Deuxièmement, l’appelant affirme que les droits d’un bénéficiaire en vertu de la LAFP sont limités aux droits prévus à l’article 30 et, dans des circonstances fort restreintes, aux droits prévus au paragraphe 35(3) (demande de dissolution présentée par un bénéficiaire ou par un bénéficiaire ultime). En ce qui concerne le droit du bénéficiaire à des renseignements, lequel est prévu à l’article 30, l’appelant fait également valoir qu’étant donné qu’il était uniquement un bénéficiaire éventuel (puisqu’il ne résidait pas en Autriche et qu’il n’avait pas été désigné aux fins de l’obtention d’une subvention) et un bénéficiaire ultime éventuel (puisque le fondateur n’avait pas cherché à révoquer la Fondation), M. Sommerer ne peut pas se prévaloir du droit à des renseignements prévu à l’article 30. M. Torggler a témoigné que, selon une décision rendue par un tribunal autrichien, seuls les bénéficiaires actuels peuvent se prévaloir de l’article 30, ce qui donne lieu à l’intéressante situation dans laquelle la FPS est établie au profit de la famille Sommerer et au profit de personne d’autre, mais où les membres de la famille ne peuvent pas être considérés comme des bénéficiaires actuels tant que certaines conditions ne sont pas remplies; en fait, il n’y a pas de bénéficiaires. Lorsque la condition est remplie, certains droits prennent naissance. Me Taylor a reconnu que ce n’est qu’à ce moment‑là qu’il pourrait y avoir une fiducie. Selon ce raisonnement, il est à supposer que si M. Sommerer devenait un résident de l’Autriche et que le conseil exécutif décidait de lui accorder une subvention, il existerait alors une fiducie; pourtant, une fois la subvention versée, M. Sommerer deviendrait de nouveau un bénéficiaire éventuel seulement et la fiducie n’existerait plus, ce qui renforce mon opinion, apparemment partagée par d’éminents auteurs, quant à la nature illusoire de la définition d’une fiducie. Cependant, cela m’amène également à croire que cette particularité essentielle de l’exécution d’une obligation fiduciaire ne doit pas être considérée isolément, ni adoptée d’une façon stricte. De toute évidence, ces droits pourraient prendre naissance, et prendront naissance, dans les circonstances mêmes où le fondateur voulait en faire bénéficier la famille Sommerer. Jusqu’à quel point cela diffère‑t‑il d’une fiducie canadienne dans le cadre de laquelle les biens sont détenus pour un mineur jusqu’à l’âge de sa majorité, celui‑ci ayant alors droit à une distribution du capital. Quel droit le mineur possède‑t‑il de contraindre le fiduciaire à lui verser quelque chose avant d’avoir atteint l’âge de la majorité?

 

[77]         De plus, il importe de noter que le fondateur, M. Herbert Sommerer, a précisé que le conseil consultatif devait être composé de M. et Mme Sommerer, les bénéficiaires ultimes. En outre, il a prévu que le conseil consultatif aurait un rôle important et qu’il exercerait notamment des fonctions de supervision, ce qui confirme, selon moi, que le fondateur a expressément accordé aux bénéficiaires le droit d’obtenir des renseignements, et ce, malgré les dispositions de la LAFP.

 

[78]         En ce qui concerne ce que l’appelant appelle les droits restreints accordés au bénéficiaire ultime, en vertu du paragraphe 35(3) de la LAFP, de présenter une demande au tribunal s’il y a défaut par le conseil exécutif d’adopter une résolution en vue de dissoudre la Fondation une fois que le fondateur a demandé la révocation, il s’agit selon moi d’un droit important qui influe sur la distribution du capital de la FPS en faveur des Sommerer. Il ne s’agit pas d’un droit restreint. M. Herbert Sommerer décide de révoquer la Fondation et M. et Mme Sommerer reçoivent tout le capital : si le conseil exécutif n’adopte pas la résolution requise en vue de donner effet à cette distribution, les Sommerer peuvent s’adresser au tribunal. Je conclus que ce droit à lui seul est suffisant pour satisfaire à l’exigence voulant que les bénéficiaires aient un droit exécutoire de faire en sorte que le fiduciaire, la FPS, agisse au mieux de leurs intérêts.

 

[79]         L’appelant affirme ensuite que les bénéficiaires éventuels n’ont pas droit aux biens de la FPS, contrairement à ce qui est le cas pour les bénéficiaires d’une fiducie discrétionnaire de common law, lesquels pourraient exiger les biens en invoquant la règle énoncée dans la décision Saunders v. Vautier[17]. M. Torggler a encore une fois exprimé l’opinion selon laquelle même un bénéficiaire actuel n’a aucun droit de propriété sur les biens de la Fondation privée. Je crains qu’étant donné qu’elle ne bénéficie pas du traitement prévu en common law, la fondation privée autrichienne ne comporte pas les particularités essentielles de la fiducie de common law. Il importe de se rappeler le processus qui est ici en cause. Les particularités essentielles d’une fiducie de common law ont été précisées, et l’établissement de la FPS ainsi que le transfert à celle‑ci des biens au profit de la famille Sommerer est maintenant examiné aux fins de la détermination de la question de savoir si elle peut être considérée comme une fiducie de common law, et ce, bien que pareille notion n’existe pas dans le ressort la Fondation. Il ne devrait pas être surprenant que la notion de propriété effective ne soit pas évidente. Selon moi, l’absence de ce droit de propriété effective n’est pas fatale.

 

[80]         Enfin, l’appelant se fonde sur le libellé du document concernant la Fondation lui-même pour soutenir qu’il n’existe aucun droit que les bénéficiaires du revenu peuvent faire valoir. La déclaration constitutive de la Fondation prévoit ce qui suit : [traduction] « Les bénéficiaires et les personnes qui pourront le devenir compte tenu de l’objet de la Fondation n’ont aucun droit à des subventions de la Fondation. » Premièrement, j’interprète cette disposition comme s’appliquant uniquement aux bénéficiaires du revenu et non aux bénéficiaires ultimes. Cela indique simplement la nature discrétionnaire des subventions accordées sur le revenu. Ces subventions peuvent uniquement être accordées à la famille Sommerer, mais aucun membre de la famille ne peut demander, à titre personnel, à la FPS de lui verser une subvention. Cet élément de preuve n’est rien de plus, et il n’est pas suffisant pour enlever à la fiducie son caractère discrétionnaire.

 

[81]         Somme toute, on n’a pas réussi à me convaincre qu’il n’existe aucune obligation fiduciaire dont la famille Sommerer peut exiger l’exécution. À coup sûr, les droits ne sont peut-être pas aussi étendus que ceux qui pourraient exister dans un grand nombre de fiducies de common law, mais lorsque l’on tente de savoir si un arrangement concernant une fondation privée autrichienne comporte les éléments d’une fiducie de common law, il n’est pas nécessaire de conclure à l’existence de tous les droits possibles qu’un bénéficiaire pourrait faire valoir contre un fiduciaire; il convient plutôt de se demander s’il existe suffisamment de droits ressemblant d’une façon raisonnable à ceux d’une fiducie canadienne. Je conclus qu’il en existe un nombre suffisant.

 

[82]         Il devrait être clair qu’en arrivant à cette conclusion, je ne conclus pas que la FPS est une fiducie : je conclus que la relation existant entre M. Herbert Sommerer, la FPS et les bénéficiaires constitue une fiducie dont la FPS est le fiduciaire. En outre, je n’entends aucunement, au moyen de cette conclusion, dire que toutes les relations, dans une fondation privée autrichienne, sont des relations fiduciaires. Il se peut fort bien qu’une déclaration constitutive de fondation soit considérée comme s’apparentant davantage à un pouvoir de désignation, par exemple lorsque tout droit que pourrait avoir un bénéficiaire d’assurer l’exécution d’une obligation est éliminé. En l’espèce, il existe dans l’ensemble suffisamment d’indices des particularités essentielles d’une fiducie pour qu’il soit possible de considérer l’arrangement comme constituant une fiducie. Cela étant, je n’ai pas à examiner la notion de fiducie, selon le Code civil du Québec, que Me Tassé m’a également expliquée, pour décider si une fiducie, telle qu’elle existe au Québec, s’applique à l’arrangement qui a été conclu en Autriche.

 

3.       S’il existe une fiducie, le paragraphe 75(2) de la Loi s’applique‑t‑il de façon à attribuer à M. Sommerer les gains tirés de la disposition des actions de Vienna et de Cambrian par la FPS?

 

[83]         Le paragraphe 75(2) prévoit ce qui suit :

 

Lorsque, en vertu d’une fiducie créée de quelque façon que ce soit depuis 1934, des biens sont détenus à condition :

 

            a)         soit que ces derniers ou des biens qui leur sont substitués puissent :

 

                        (i)         ou bien revenir à la personne dont les biens ou les biens qui leur sont substitués ont été reçus directement ou indirectement (appelée « la personne » au présent paragraphe),

 

                        (ii)        ou bien être transportés à des personnes devant être désignées par la personne après la création de la fiducie;

 

            b)         soit que, pendant l’existence de la personne, il ne soit disposé des biens qu’avec son consentement ou suivant ses instructions,

 

tout revenu ou perte résultant des biens ou de biens y substitués, ou tout gain en capital imposable ou toute perte en capital déductible provenant de la disposition des biens ou de biens y substitués, est réputé, durant l’existence de la personne et pendant qu’elle réside au Canada, être un revenu ou une perte, selon le cas, ou un gain en capital imposable ou une perte en capital déductible, selon le cas, de la personne.

 

[84]         Un certain nombre de questions découlent de l’application de cette disposition aux faits qui ont été portés à ma connaissance :

 

[traduction]

 

(i)         Le terme « personne », tel qu’il est défini au sous‑alinéa 75(2)a)(i), s’applique‑t‑il à un bénéficiaire vendeur (c’est‑à‑dire M. P. Sommerer) qui vend des biens à la fiducie à leur juste valeur marchande?

 

(ii)        Dans l’affirmative, ces biens peuvent-ils revenir à M. Sommerer?

 

(iii)       Dans la négative, ces biens peuvent‑ils être transportés aux personnes désignées par M. Sommerer (voir le sous‑alinéa 75(2)a)(ii) de la Loi?

 

(iv)       Dans la négative, peut‑il n’être disposé des biens qu’avec le consentement de M. Sommerer ou suivant ses instructions (voir l’alinéa 75(2)b) de la Loi)?

 

(i)      Qui est la « personne », telle qu’elle est définie au sous‑alinéa 75(2)a)(i) de la Loi?

 

[85]         L’intimée affirme qu’il n’existe aucune exigence voulant que la « personne » en question soit le constituant, mais qu’il pourrait s’agir de n’importe quelle personne, notamment d’un bénéficiaire vendeur de biens vendus à la fiducie à leur juste valeur marchande. L’intimée se fonde sur le bulletin IT‑369, qui indique que le ministère estime qu’une personne, autre que le constituant, peut effectuer un transfert de biens à une fiducie et être assujettie aux règles d’attribution. Avec égards, je ne souscris à la l’interprétation donnée par l’intimée du terme « personne ».

 

[86]         Il est bien établi qu’il faut interpréter la législation fiscale d’une façon textuelle, contextuelle et téléologique. Je ne veux pas me montrer dur envers les rédacteurs de lois fiscales, mais je crois qu’ils ont parfois rendu cette tâche extrêmement difficile : le paragraphe 75(2) de la Loi est un exemple de libellé pour le moins maladroit.

 

L’interprétation textuelle

 

[87]         Le début de la disposition en question est important : « en vertu d’une fiducie créée [...] les biens sont détenus à condition [...] ». En l’espèce, en insérant la date, on obtiendrait le libellé suivant : « lorsque, en vertu d’une fiducie créée le 3 octobre 1996, les biens sont détenus à condition [...] ». La disposition ne dit pas « lorsque les biens sont détenus en fiducie ou dans une fiducie à condition [...] ». Il y est expressément fait mention d’une fiducie qui est créée et du moment où la fiducie est créée. Selon moi, cela nous invite à interpréter la disposition en tenant compte des conditions relatives à la création de la fiducie, la fiducie étant créée dans ce cas‑ci par M. Herbert Sommerer, le constituant. Il faut établir la nature de la fiducie, et la question de savoir s’il s’agit d’un type de fiducie envisagé au paragraphe 75(2) de la Loi doit être déterminée au moment de la création de la fiducie. Au moment de la création de la fiducie par un constituant, il ne peut y avoir qu’une seule personne de qui les biens sont reçus : le constituant. Il n’y a personne d’autre. Toutefois, cela ne veut pas pour autant dire qu’une autre personne ne peut pas apporter des biens dans une fiducie ayant le même fiduciaire, aux mêmes conditions; toutefois, en pareil cas, une autre fiducie est selon moi créée. En fait, selon le début du paragraphe 75(2) de la Loi, seul un constituant, ou un disposant assimilable à un constituant, est considéré comme étant la personne en question.

 

[88]         L’examen des deux cas envisagés au paragraphe 75(2) de la Loi confirme cette interprétation. En premier lieu, quel est l’effet si la fiducie détient les biens initiaux? Et, en second lieu, quel est l’effet si la fiducie détient « les biens qui leur sont substitués ». À cet égard, il est clair, en ce qui concerne la FPS, que cette dernière pourrait, en sa qualité de fiduciaire, substituer des biens à la dotation initiale, et c’est ce qu’elle a fait.

 

[89]         J’examinerai donc le libellé du paragraphe 75(2) de la Loi dans le premier cas, où la fiducie détient simplement les biens initiaux dont M. Herbert Sommerer a fait dotation. Le texte du paragraphe 75(2) de la Loi serait libellé ainsi :

 

Lorsque, en vertu d’une fiducie créée au mois d’octobre 1996, des biens sont détenus à condition de revenir à la personne dont les biens ont été reçus directement ou indirectement [...]

 

Cela semble clair et il n’est pas nécessaire de se livrer à une gymnastique sémantique pour discerner ce que la disposition veut dire. Les biens en question seraient les schillings autrichiens et la personne pourrait uniquement être le constituant, M. Herbert Sommerer.

 

[90]         J’examinerai maintenant le libellé du paragraphe 75(2) de la Loi dans le second cas, où la fiducie détient les biens substitués. Le texte du paragraphe 75(2) de la Loi serait alors libellé ainsi :

 

Lorsque, en vertu d’une fiducie créée au mois d’octobre 1996, des biens (les schillings) sont détenus à condition que ces derniers (les schillings) ou des biens qui leur sont substitués (les actions) puissent revenir à la personne dont les biens auxquels les actions sont substituées (c’est‑à‑dire les schillings) ont été reçus directement ou indirectement [...]

 

Encore une fois, il ne peut s’agir que du constituant de la fiducie. Cette interprétation du paragraphe 75(2) de la Loi est une interprétation grammaticale logique et textuelle s’il est tenu compte de la différence, dans la version anglaise, entre l’alinéa a), « property substituted therefor », et le sous‑alinéa a)(i), « property for which it was substituted ».

 

[91]         Je n’irais pas jusqu’à dire que cela est tout à fait clair, mais il s’agit selon moi d’une interprétation textuelle exacte. Toute autre interprétation des mots « property for which it was substituted » dans la version anglaise serait artificielle. Le mot « it » peut uniquement vouloir dire « property substituted therefor ». L’intimée me demande d’interpréter les deux expressions comme voulant dire la même chose. Or, ces expressions ne peuvent pas et ne devraient pas être ainsi interprétées. Le mot « it », dans l’expression « property for which it was substituted » peut uniquement s’entendre des actions, de sorte que les mots « property for which it was substituted » peuvent uniquement s’entendre des schillings; seul le constituant, M. Herbert Sommerer, a fait dotation des schillings. Si l’on tentait d’interpréter le mot « it » comme se rapportant aux schillings, cela n’aurait aucun sens puisque les schillings n’ont pas été substitués à quoi que ce soit; ce sont les actions qui ont été substituées aux schillings. Je reconnais qu’il faut peut-être lire à plusieurs reprises ce qui pourrait à première vue sembler simple. Or, ce n’est pas si simple. Une fois que le sens de ces termes est démêlé d’une façon appropriée et considéré sur le plan grammatical et logique, la seule interprétation possible est que seul le constituant, ou un disposant subséquent qui pourrait être considéré comme un constituant, peut être la « personne » en question pour l’application du paragraphe 75(2) de la Loi.

 

[92]         L’autre possibilité, selon l’intimée, est que les « biens » mentionnés au début du paragraphe 75(2) de la Loi pourraient se rapporter aux biens substitués, soit dans ce cas‑ci, les actions. La disposition en question devrait alors être rédigée ainsi :

 

Lorsque, en vertu d’une fiducie créée le 3 octobre 1996, les actions de Vienna sont détenues à condition de pouvoir revenir à la personne dont les actions ou les biens qui leur sont substitués, c’est‑à‑dire les schillings, ont été reçus directement ou indirectement [...]

 

[93]         Or, cette approche est erronée. Premièrement, comme il en a déjà été fait mention, par la fiducie créée le 3 octobre 1996, les schillings faisant initialement l’objet de la dotation étaient les seuls biens assujettis à une condition. Deuxièmement, selon cette approche, il pourrait y avoir plus d’une « personne » à qui les règles d’attribution pourraient s’appliquer, soit dans ce cas‑ci, M. Sommerer et son père (s’il était Canadien). Il n’existe aucun mécanisme d’attribution en pareil cas, et ce, de toute évidence, selon moi, parce qu’il est erroné d’interpréter la disposition comme prévoyant qu’il y a plus d’une personne qui est visée par l’attribution. Troisièmement, étant donné qu’en vertu du paragraphe 248(5) de la Loi, il est présumé que des biens subséquemment substitués sont substitués aux biens initiaux, il n’y a que deux types de biens auxquels le paragraphe 75(2) de la Loi peut se rapporter : les biens initiaux et les biens substitués, ce qui est conforme au texte figurant à la fin du paragraphe 75(2) de la Loi, où il est question du revenu ou de la perte résultant « des biens ou de biens y substitués ». Le revenu ou la perte peut résulter d’un type de bien ou de l’autre, mais il peut uniquement être attribué à une personne : le donateur des biens initiaux. Le début du paragraphe 75(2) de la Loi ne dit pas que les biens substitués sont détenus sous condition, mais parle uniquement des biens, les biens initiaux.

 

[94]         Cela veut‑il dire que M. Peter Sommerer ne pourrait jamais être « la personne » en question pour l’application de cette disposition? Non. S’il a affecté les actions à la même fiducie au moyen d’un apport (celles‑ci étant détenues aux mêmes conditions), M. Peter Sommerer pourrait être considéré comme créant une nouvelle fiducie et pourrait donc être un constituant et être assujetti à l’application du paragraphe 75(2) de la Loi. Toutefois, il aurait été obligé d’être un disposant. Or, ce n’est pas ce qu’il a fait. Il n’a pas transféré des actions à la FPS à titre de constituant ou de disposant créant une fiducie. Il a vendu les actions à la FPS sans aucune condition, et celle‑ci, en sa qualité de fiduciaire des biens, a détenu les biens aux conditions imposées par M. Herbert Sommerer, en substituant ces actions aux schillings dont M. Herbert Sommerer avait fait dotation. Cela étant, M. Peter Sommerer ne pouvait pas être « la personne » en question.

 

[95]         Ayant tiré cette conclusion au sujet de l’interprétation textuelle du paragraphe 75(2) de la Loi, le fait que le libellé de la version française est différent, pour ce qui est de l’expression « property for which it was substituted » me préoccupait. En effet, dans la version française, la même expression est utilisée à l’alinéa 75(2)a) et au sous‑alinéa 75(2)a)(i), à savoir « biens qui leur sont substitués », contrairement aux expressions utilisées dans la version anglaise, à savoir « property substituted therefor », à l’alinéa 75(2)a), et « property for which it was substituted » au sous‑alinéa 75(2)a)(i). J’ai demandé aux parties de présenter des observations supplémentaires, compte tenu de cette différence importante entre le libellé de la version française et celui de la version anglaise.

 

[96]         L’appelant affirme que le texte français ne porte pas atteinte à l’argument qu’il a soumis au sujet de l’interprétation de la version anglaise, que j’ai retenue. L’appelant présente deux arguments : en premier lieu, le libellé de la version française, au sous‑alinéa 75(2)a)(i), vise à avoir le même sens que celui de la version anglaise, « property for which it was substituted »; en second lieu, les deux libellés sont tout simplement irréconciliables et la version anglaise est davantage conforme à l’intention du législateur. De fait, l’intimée est d’accord avec l’appelant sur ce point.

 

[97]         En se fondant sur une interprétation littérale de la version française, l’appelant conclut que cela permettrait au fisc d’établir qu’il y a plus d’une « personne » pour l’application du paragraphe 75(2). L’appelant a donné un exemple de la façon dont cela pourrait se produire :

 

[traduction]

 

[...] Supposons que A apporte un montant de 100 $ à une fiducie et qu’il se réserve le droit de révoquer la fiducie. La fiducie utilise ensuite les 100 $ pour acheter des actions de B (à leur juste valeur marchande au moment de l’achat). Au cours de la période où elle possède les actions, la fiducie touche des dividendes. La fiducie vend par la suite les actions à C pour 200 $ (la juste valeur marchande des actions au moment de la vente). Immédiatement après, la fiducie utilise le produit de 200 $ pour acheter un bien immeuble de D, lequel génère un revenu de location au cours de la période où la fiducie le détient. Les bénéficiaires du capital de la fiducie sont B et D.

 

Il est incontestable que les trois biens subséquents – les actions, les 200 $ et le bien immeuble – sont, en vertu du paragraphe 248(5), des biens substitués aux 100 $ initiaux. Comme l’appelant l’a antérieurement affirmé, le paragraphe 75(2) vise à attribuer à A le revenu (ou la perte), ou encore le gain en capital (ou la perte en capital), tiré de la disposition des 100 $ et des actions ainsi que des 200 $ et du bien immeuble. Le paragraphe 75(2) est fondé sur ce que, en pareil cas, A n’est pas considéré comme ayant pleinement disposé des 100 $ (à cause du droit de révoquer la fiducie) et, par conséquent, le revenu tiré de ce bien ou des biens qui lui ont été substitués, ou le gain tiré de la disposition du bien ou des biens qui lui ont été substitués, devrait être attribué à A. Toutefois, si l’on donnait effet à l’interprétation littérale de la version française, « ou les biens qui leur sont substitués », de préférence à la version anglaise, « of property for which it is substituted », le revenu ou le gain tiré des actions et du bien immeuble serait attribué à B et à D ainsi qu’à A. Comme nous l’avons dit dans nos observations antérieures, il faudrait éviter une telle interprétation parce qu’il est contraire à l’intérêt public de permettre au ministre de décider d’imputer le revenu (ou le gain) tiré des actions et du bien immeuble à A, à B et à D, à moins que le libellé de la disposition ne les rende clairement solidairement responsables d’une seule obligation fiscale. De fait, cette interprétation permettrait au ministre d’attribuer à D le revenu tiré des actions et le gain tiré de la disposition des actions (étant donné que le bien immeuble est substitué aux actions) même si D n’avait pas transféré de biens à la fiducie au cours de la période où la fiducie possédait les actions. En d’autres termes, si le sens littéral de la version française, « ou les biens qui leur sont substitués », devait déterminer la portée du sous-alinéa 75(2)a)(i), cela éliminerait tout lien temporel entre le transfert de biens par une personne en faveur de la fiducie et l’attribution à cette personne du revenu tiré des biens de la fiducie (y compris les biens de la fiducie antérieurement possédés).

 

[…]

 

[98]         Ce raisonnement est selon moi fort sensé. Ni la version française ni la version anglaise du paragraphe 75(2) de la Loi ne font mention de personnes (au pluriel); il y est uniquement fait mention d’une personne. Cette disposition s’applique à une seule personne.

 

[99]         L’appelant a attiré mon attention sur sept dispositions de la Loi dans lesquelles la version anglaise dit : « the property ... or ... property for which it was substituted »[18] et sur six dispositions dans lesquelles figure l’expression « the property ... or ... property for which the property was substituted »[19] dans un sens identique. L’appelant fait valoir que toutes ces dispositions se rapportent à une conséquence fiscale ou à un attribut fiscal à un moment particulier et comprennent des conditions applicables au cours d’une période précise avant ce moment. Presque toutes les dispositions traitent des conséquences fiscales de la disposition d’un bien et des conditions qui doivent être remplies au moment de la disposition et avant le moment de la disposition. Selon l’appelant, il ressort clairement du texte et de l’objet de toutes ces dispositions que l’expression en question doit se rapporter à des biens antérieurement détenus et non à des biens qui leur sont par la suite substitués. Par conséquent, l’emploi de l’expression « un bien qui lui est substitué » s’entend, dans ces contextes, uniquement si on l’interprète comme se rapportant aux biens antérieurement détenus. L’appelant soutient que les exemples les plus évidents figurent aux alinéas 110.6(1.2)a), 110.6(1.3)a) et 110.6(1.3)c). En fait, la version française doit être considérée comme se rapportant aux biens auxquels les biens substitués ont été substitués, et non aux biens substitués eux-mêmes.

 

[100]     Cet argument est également sensé : il est conforme à l’avis que j’ai déjà exprimé au sujet de la façon d’analyser d’une façon appropriée le paragraphe 75(2) de la Loi dans les deux cas : premièrement, lorsque les biens initiaux sont détenus, et deuxièmement, lorsque les biens qui leur sont substitués sont détenus. Si j’examine la version française en appliquant le second cas, où la fiducie détient les biens substitués, le paragraphe 75(2) de la Loi est effectivement libellé ainsi :

 

Soit que des biens qui leur sont substitués puissent revenir à la personne dont les biens leur sont substitués […]

 

[101]     De toute évidence, le mot « leur » dans la dernière expression doit se rapporter aux biens substitués, de sorte que cette expression peut uniquement vouloir dire, en anglais, qu’il s’agit des biens auxquels les biens substitués ont été substitués.

 

[102]     Somme toute, malgré ce casse-tête, l’examen de la version française ne m’a pas fait changer d’idée : le paragraphe 75(2) de la Loi ne vise pas à s’appliquer à plus d’une personne et cette personne est le constituant.

 

L’interprétation contextuelle

 

[103]     Le contexte du reste du paragraphe 75(2) de la Loi étaye cette interprétation textuelle des mots « la personne ». Plus précisément, le sous-alinéa 75(2)a)(ii) se rapporte à des biens transmis à des personnes désignées par « la personne » en question à un moment postérieur à la création de la fiducie. Or, la seule personne pour qui le moment de la création de la fiducie est pertinent est le constituant, et non un bénéficiaire qui effectue une vente contre valeur. Implicitement, si le constituant conserve pareil pouvoir, c’est à lui que s’applique le paragraphe 75(2) de la Loi.

 

[104]     Ce point de vue a été favorisé dans une certaine mesure par les théoriciens. Dans l’ouvrage intitulé Maurice Cullity in Taxation and Estate Planning, l’auteur mentionne que c’est habituellement le constituant qui fait l’objet de l’attribution prévue au paragraphe 75(2), mais que cette disposition pourrait s’appliquer à l’auteur d’un transfert subséquent tel qu’un disposant. Sur ce point, je souscris aux remarques que le juge Bowie a faites dans la décision Greenberg Estate v. The Queen[20], à savoir que le mot « apporté » signifie un paiement volontaire visant à augmenter le capital de la succession : une vente conclue en faveur de la fiducie à la juste valeur marchande n’est pas une telle chose. Comme je l’ai déjà mentionné, si M. Peter Sommerer devait faire un apport à la fiducie, il pourrait être considéré comme un constituant créant une nouvelle fiducie. Or, une vente de biens à leur juste valeur marchande en faveur d’une fiducie n’est pas un apport et le vendeur n’est pas un disposant, ni par conséquent un constituant. Les biens vendus à la fiducie ne peuvent pas, comme l’a affirmé l’intimée, être considérés comme les « biens initiaux »; il peut uniquement s’agir des biens substitués, étant donné que la fiducie a versé une contrepartie à leur égard.

 

L’interprétation téléologique

 

[105]     À première vue, le paragraphe 75(2) de la Loi est une disposition anti‑évitement qui empêche le contribuable d’utiliser une fiducie pour reporter l’impôt et peut-être bien s’y soustraire. L’avocat n’a pas pu présenter les commentaires qu’auraient faits sur ce point, au moment où cette disposition a été édictée, le ministère des Finances ou tout autre organisme gouvernemental, de façon à faire la lumière sur la façon dont le fisc envisage son objet. Ni l’une ni l’autre partie n’a pu se fonder sur un tel outil d’interprétation en vue de m’aider. Contrairement à d’autres dispositions d’attribution ou à d’autres dispositions anti-évitement, le paragraphe 75(2) de la Loi ne semble pas exiger d’élément d’intention. Il a été soutenu que cette disposition pourrait être un piège pour la personne imprudente qui établit des fiducies à des fins non fiscales. Je continuerai donc à me fonder sur une interprétation textuelle et contextuelle du paragraphe 75(2) de la Loi.

 

(ii)      Si l’intimée a raison de dire que M. Sommerer peut être « la personne » dont il est question au paragraphe 75(2) de la Loi, les biens peuvent‑ils revenir à celui‑ci?

 

[106]     M. Sommerer est sans aucun doute un bénéficiaire ultime qui aurait droit aux biens dans le cas où M. Herbert Sommerer révoquerait la FPS. L’appelant invoque la décision Fraser v. The Queen[21] pour soutenir qu’un droit de réversion doit être un droit absolu pour que le paragraphe 75(2) de la Loi s’applique et qu’il n’en est pas ainsi pour M. Sommerer. Selon moi, la décision Fraser n’étaye pas fortement cette thèse. Dans l’affaire Fraser, les parties avaient convenu que si la cour concluait à l’existence d’une fiducie plutôt que d’un mandat, la fiducie était imposable. Ce n’est que le dernier jour de l’instruction qu’il a été soutenu que le paragraphe 75(2) de la Loi pourrait s’appliquer en vue d’attribuer les pertes aux investisseurs. La juge Reed règle rapidement la question :

 

En outre, la partie défenderesse fait valoir que le paragraphe 75(2) ne s’applique que si le bénéficiaire jouit d’un droit de réversion, et que ce droit n’existe pas en l’instance. Elle soutient que, même si l’entente visant G.M.S. stipule que la partie demanderesse peut réclamer la vente ou le rachat de ses unités et qu’aucun nouvel investissement ne doit avoir lieu avant le rachat des participations ayant fait l’objet d’une demande, il n’existe pas de droit de rachat absolu. Elle affirme que la documentation ne confère pas de droit de réversion absolu. J’estime que cette interprétation du paragraphe 75(2) et des faits en l’instance est correcte. À mon avis, le paragraphe 75(2) porte sur le cas où l’ensemble des biens de la fiducie peut revenir au constituant (alinéa 75(2)a)) ou demeure sous son contrôle pendant la durée de la fiducie (alinéa 75(2)b)). [...]

 

[107]     Les personnes qui avaient engagé des capitaux dans le syndicat d’hypothèques et qui voulaient cesser d’y participer pouvaient chercher à vendre leur droit ou demander au syndicat lui-même de procéder au rachat, si celui‑ci ne fonctionnait pas à perte. C’est ce que la juge Reed voulait probablement dire lorsqu’elle a déclaré que la documentation ne prévoyait aucun droit de réversion absolu. Cette affaire ne ressemble en rien à celle dont je suis ici saisi. Si M. Herbert Sommerer révoque la Fondation, M. Peter Sommerer reçoit la moitié de l’ensemble des biens de la fiducie. Contrairement à ce qui était le cas dans l’affaire dont la juge Reed était saisie, les actions de Vienna et de Cambrian étaient assujetties à une condition absolue quant à la façon dont ces actions, ou les biens qui leur étaient substitués, devaient être distribués en cas de révocation. Je ne vois vraiment pas comment la décision Fraser peut aider M. Sommerer, s’il est conclu que celui‑ci est « la personne » dont il est question au paragraphe 75(2) de la Loi.

 

[108]     Toutefois, cela confirme selon moi que M. Sommerer, en sa qualité de bénéficiaire concluant une vente à la juste valeur marchande, ne doit pas être « la personne » en question étant donné qu’un droit de réversion laisse entendre le droit de l’auteur du transfert, alors qu’en l’espèce, le droit est dévolu au constituant au moyen de son droit de révocation, et non à M. Peter Sommerer. Si le paragraphe 75(2) de la Loi s’appliquait à M. Peter Sommerer et que celui‑ci était « la personne » en question, il faudrait élargir la portée des mots tels que le mot « revenir » de façon à permettre une interprétation qui, selon moi, n’a jamais été envisagée. Dans une fiducie, les biens peuvent revenir au constituant : il s’agit d’une fiducie avec droit de retour. Or, M. Peter Sommerer n’a pas constitué une fiducie avec droit de retour, mais les biens qu’il a vendus à la fiducie, par l’effet de la fiducie, peuvent lui être remis; encore une fois, M. Sommerer ne doit pas être considéré comme étant « la personne » en question.

 

[109]     Puisque j’ai dit que je conclus encore que si M. Peter Sommerer est « la personne » de qui les biens ont été reçus par la fiducie, et je me vois obligé d’examiner la façon dont le mot « revenir » s’applique à lui, je conclus que les biens « peuvent lui revenir », étant donné qu’il suffit qu’aux termes de la fiducie en vertu de laquelle les biens sont détenus, les biens lui soient remis dans l’éventualité d’une révocation. Aucun sens technique n’a à être attribué au mot « revenir » dans le contexte de biens remis à un bénéficiaire qui détenait antérieurement ces biens. Le bénéficiaire les a détenus à un moment donné; il pourrait encore les détenir sans avoir à les payer.

 

(iii) et (iv)     Le sous-alinéa 75(2)a)(ii) et l’alinéa 75(2)b) de la Loi

 

[110]     Étant donné la conclusion que j’ai tirée, il est inutile d’examiner le sous‑alinéa 75(2)a)(ii) ou l’alinéa 75(2)b) de la Loi, mais si j’avais à trancher la question, je conclurais que ce n’était pas M. Sommerer qui pouvait décider de la personne à qui les biens de la fiducie seraient transmis, bien que le conseil consultatif ait effectivement eu un droit de veto à l’égard des distributions de revenu (paragraphe 6(1) de la déclaration constitutive de la Fondation); de plus, M. Sommerer n’avait pas à donner son consentement ou à donner des instructions au sujet de la disposition des biens de la fiducie étant donné que la déclaration constitutive de la Fondation ne prévoyait rien à cet égard. Ce pouvoir était en fin de compte dévolu au conseil exécutif, même si M. Sommerer, en sa qualité de membre dominant du conseil consultatif, exerçait une influence considérable. Je reviendrai sur ce point dans le contexte du mandat.

 

4.       S’il existe une fiducie, comme je l’ai conclu, et si M. Peter Sommerer est « la personne » dont il est question pour l’application du paragraphe 75(2) de la Loi à qui les biens peuvent revenir, et puisque j’ai conclu qu’il ne l’était pas, les dispositions de la Convention protègent‑elles M. Peter Sommerer? Étant donné la conclusion à laquelle je suis jusqu’ici arrivé, il est inutile de trancher la question, mais par souci de précision, et au cas où l’interprétation que je donne du mot « personne » serait inexacte, il convient d’aborder la question.

 

[111]     Le paragraphe XIII(5) de la Convention est ainsi libellé :

 

5. Les gains provenant de l’aliénation de tous biens autres que ceux qui sont mentionnés aux paragraphes 1, 2 et 3 ne sont imposables que dans l’État contractant dont le cédant est un résident.

 

[112]     La Convention a été incorporée dans le droit canadien conformément à la Loi sur la Convention Canada-Autriche en matière d’impôt sur le revenu de 1980, dont le paragraphe 5(2) prévoit ce qui suit :

 

(2) Les dispositions de la présente partie et de la Convention l’emportent sur les dispositions incompatibles de toute autre loi ou règle de droit.

 

[113]     L’appelant soutient que le paragraphe 75(2) de la Loi n’est pas compatible avec le paragraphe XIII(5) et que le paragraphe XIII(5) doit donc l’emporter, de sorte que les gains tirés de la vente par la FPS des actions de Vienna et de Cambrian ne sont pas imposables au Canada. Selon la position que l’intimée a prise, le paragraphe XIII(5) s’applique uniquement en vue d’empêcher la double imposition sur le plan juridique, c’est‑à‑dire d’empêcher que le même contribuable soit imposé sur le même gain dans deux ressorts différents, mais il ne s’applique pas à la double imposition sur le plan économique, lorsque la même opération est imposée entre les mains de deux personnes différentes dans deux ressorts. Cet argument pourrait donner lieu à une discussion digne d’un long exposé, mais ce n’est pas la voie que j’estime avoir à prendre. Il s’agit ici d’interpréter une disposition conventionnelle qui n’est pas ambiguë : les gains tirés de l’aliénation de biens, soit dans ce cas‑ci les actions de Vienna et de Cambrian, seront imposables uniquement dans l’État où réside le cédant, soit la FPS, c’est‑à‑dire en Autriche. À première vue, la chose a pour effet de retirer aux autorités fiscales canadiennes les mêmes gains tirés de la vente des actions.

 

[114]     Toutefois, M. Peter Sommerer est-il réputé, en vertu du paragraphe 75(2) de la Loi, être le cédant? Non, cette disposition reconnaît que c’est la fiducie qui procède à l’aliénation, mais que le gain pourrait être réalisé par M. Sommerer. Il s’agit peut-être bien d’une distinction subtile, mais il s’agit néanmoins d’une distinction, dont l’effet est qu’il n’y a qu’un seul cédant, la FPS.

 

[115]     Si les rédacteurs de la Convention avaient voulu créer une exception selon laquelle la disposition générale du paragraphe XIII(5), une disposition claire, ne devait pas s’appliquer aux règles d’attribution énoncées au paragraphe 75(2) de la Loi, ils auraient pu le faire. Sur ce point, il est intéressant de noter le paragraphe XXVIII(2) de la Convention, qui prévoit ce qui suit :

 

2. Aucune disposition de la présente Convention ne peut être interprétée comme empêchant le Canada de prélever son impôt sur les montants inclus dans le revenu d’un résident du Canada en vertu de l’article 91 de la Loi de l’impôt sur le revenu du Canada. Toutefois, cet article ne s’applique pas au revenu provenant d’une entreprise exploitée activement en Autriche par une corporation étrangère affiliée d’une personne résidente au Canada ou au revenu qui se rapporte ou est accessoire à une entreprise exploitée activement en Autriche.

 

[116]     Les rédacteurs voulaient clairement faire en sorte que les dispositions de la Convention ne l’emportent pas sur les dispositions canadiennes relatives au REATB, en vertu desquelles le Canada pourrait imposer un revenu qui a également été assujetti à l’impôt en Autriche, entre les mains d’une entité différente. Aucune disposition de ce genre renvoyant au paragraphe 75(2) de la Loi ne figure dans la Convention, bien que 56 des 88 conventions fiscales en vigueur au Canada comportent des dispositions telles que celles qui figurent à l’alinéa 29(2)a) de l’Accord fiscal entre le Canada et l’Allemagne :

 

2. Il est entendu qu’aucune disposition de l’Accord ne peut être interprétée comme empêchant

 

a) le Canada de prélever son impôt sur les montants inclus dans le revenu d’un résident du Canada en vertu de l’article 91 de la Loi de l’impôt sur le revenu du Canada;

 

[117]     L’absence d’une disposition d’exception similaire dans la Convention étaye la thèse selon laquelle le Canada n’a pas préservé, aux fins de l’impôt, sa compétence à l’égard de résidents tels que M. Sommerer pour ce qui est de la participation de celui‑ci à une fiducie autrichienne.

 

[118]     L’intimée soutient qu’il n’est pas nécessaire d’énoncer ces types de dispositions d’exception dans les conventions; elle cite à cet égard une décision récente que la Cour supérieure japonaise[22] a rendue en 2009 dans le contexte du REATB, ainsi qu’un commentaire récent de 2003 de l’OCDE portant sur l’article premier du Modèle de Convention fiscale. L’appelant s’oppose à ce que l’intimée invoque le commentaire de 2003 de l’OCDE, lequel dit, aux paragraphes 22 et 22.1, que les règles internes anti-évitement telles que les règles faisant primer le fond sur la forme, les règles de « substance économique » et les « dispositions générales anti-abus (les DGAA) » « se rattachent aux dispositions fondamentales de la législation nationale qui déterminent les faits générateurs de l’impôt; ces règles ne sont pas couvertes par les conventions fiscales qui ne les affectent donc pas ». L’appelant affirme que ce commentaire est contraire au commentaire de 1977 que l’OCDE a fait lors de l’entrée en vigueur de la Convention et que seul le commentaire antérieur de l’OCDE est pertinent. Le commentaire de 1977 de l’OCDE donne à penser que si un État voulait qu’une disposition anti-évitement interne s’applique dans le contexte de la convention, il devrait l’incorporer dans la convention, comme c’est le cas pour les règles du REATB. De l’avis de l’intimée, étant donné que le commentaire de 1977 ne donnait pas beaucoup de détails, le commentaire de 2003 ne visait qu’à donner des précisions et ces deux commentaires ne se contredisent donc pas, de sorte qu’il convient de se fonder sur le dernier commentaire. Je ne suis pas d’accord. Dans l’arrêt Her Majesty the Queen v. Prévost Car Inc.[23], la Cour d’appel fédérale a dit ce qui suit :

 

10.       La reconnaissance mondiale des dispositions du Modèle de Convention et leur intégration dans la plupart des conventions bilatérales ont fait des Commentaires sur les dispositions du Modèle de Convention de l’OCDE un guide largement reconnu en matière d’application et d’interprétation des conventions fiscales bilatérales […]

 

11.       Il en va de même en ce qui concerne les Commentaires ultérieurs, lorsqu’ils représentent une interprétation juste des termes du Modèle de Convention et ne contredisent pas les Commentaires qui existaient lors de l’entrée en vigueur d’un traité déterminé et, évidemment, lorsque ni l’un ni l’autre des signataires du traité ne s’est opposé aux nouveaux Commentaires. […]

 

[119]     Un commentaire ultérieur de l’OCDE ne devrait être utile que s’il ne contredit pas le commentaire qui existait au moment de l’entrée en vigueur d’une convention. Je conclus que les deux commentaires se contredisent fortement, et je me limiterai à examiner le commentaire de 1977 en vue de m’aider. Ce commentaire étaye l’avis de l’appelant lorsque celui‑ci dit que la Convention aurait dû renfermer une mention expresse permettant l’application de règles internes anti-évitement telles que le paragraphe 75(2) de la Loi qui l’emporteraient sur l’effet du paragraphe XIII(5) de la Convention. Sinon, le paragraphe XIII(5) peut uniquement être interprété dans son sens ordinaire, qui empêcherait l’application du paragraphe 75(2) de la Loi aux fins de l’imposition du gain entre les mains de M. Sommerer au Canada.

 

[120]     Cet avis a sans aucun doute été accueilli favorablement par la juge Woods dans la décision Garron et al c. La Reine[24], où il a été conclu qu’une disposition similaire de l’Accord Canada-Barbade en matière d’impôt sur le revenu l’emportait sur l’application du paragraphe 75(2) de la Loi.

 

[121]     L’intimée a invoqué les remarques incidentes que j’avais faites dans la décision Antle c. La Reine[25], où j’ai traité de l’application des DGAE et de l’interaction entre la Loi et l’Accord Canada-Barbade en matière d’impôt sur le revenu. Or, la situation dans cette affaire‑là était tout à fait différente et la décision était fondée sur des motifs différents. Il semble qu’aucune importance n’ait été accordée aux commentaires divergents de l’OCDE et que j’appliquais peut-être le commentaire plus récent de l’OCDE en affirmant que les DGAE s’appliquent en vue de permettre de conclure qu’un résident canadien est assujetti à l’impôt sur les gains réalisés dans le cadre d’une fiducie de la Barbade, mais le raisonnement qui a été fait dans la décision Antle donne implicitement à penser que je considérais M. Antle comme celui qui avait aliéné les biens, contrairement à ce que je conclus dans le cas de M. Sommerer. De plus, en l’espèce, il n’est pas question des DGAE, mais d’une disposition anti‑évitement dont le libellé exprès empêche l’application de l’article 4.1 de la Loi sur l’interprétation des conventions en matière d’impôts sur le revenu.

 

[122]     Compte tenu du libellé clair du paragraphe XIII(5), du paragraphe 5(2) de la Convention Canada-Autriche en matière d’impôt sur le revenu de 1980, du commentaire de 1977 de l’OCDE, de l’absence dans la Convention d’une disposition semblable à l’alinéa 29(2)a) de l’Accord fiscal entre le Canada et l’Allemagne et de la décision Garron, je conclus que le paragraphe XIII(5) s’applique en vue d’empêcher le Canada d’imposer M. Sommerer à l’égard du gain réalisé lors de la disposition par la FPS des actions de Vienna et de Cambrian.

 

5.       La FPS était-elle un mandataire de M. Sommerer aux fins de la disposition des actions de Vienna et de Cambrian?

 

[123]     L’intimée se fonde sur le commentaire suivant de l’auteur américain A.W. Scott dans l’ouvrage intitulé The Law of Trusts[26], à l’appui de la thèse selon laquelle un contrôle suffisant exercé par un bénéficiaire sur un fiduciaire peut faire de ce dernier le mandataire du bénéficiaire :

 

[traduction]

 

Le mandataire agit pour son mandant et en son nom, et il est assujetti à son contrôle; le fiduciaire en tant que tel n’est pas assujetti au contrôle de son bénéficiaire, quoi qu’il soit tenu d’administrer les biens de la fiducie au profit de ce dernier et en conformité avec les termes de la fiducie, et qu’il puisse être contraint par le bénéficiaire de s’acquitter de cette obligation. Le mandataire a une obligation d’obéissance envers son mandant; le fiduciaire est tenu de se conformer aux termes de la fiducie.

 

Une personne peut être à la fois mandataire et fiduciaire d’une autre personne. Si elle entreprend d’agir pour le compte de l’autre personne et sous réserve de son contrôle, elle est un mandataire, mais si elle détient le titre des biens pour son mandant, elle est également un fiduciaire. Dans un tel cas, cependant, c’est la relation de mandataire qui prédomine, et les principes du mandat, et non ceux de la fiducie, s’appliquent.

 

[124]     Toutefois, il faut considérer cette approche avec prudence, compte tenu de la remarque suivante que le professeur Waters a faite[27] :

 

[traduction]

 

Même dans les cas où l’intention d’établir une relation fiduciaire est fort clairement exprimée, il peut y avoir des cas dans lesquels la relation pourrait également être considérée comme donnant lieu à un mandat. Il a été soutenu que plus les bénéficiaires d’une fiducie exercent un contrôle sur la gestion de l’actif fiduciaire, plus il est probable que la relation puisse également être considérée comme donnant lieu à un mandat, de sorte que les fiduciaires seront considérés comme des mandataires, alors que les bénéficiaires seront considérés comme des mandants. Les bénéficiaires sont en pareil cas personnellement responsables des actes commis par les fiduciaires dans le cadre de la gestion des biens de la fiducie.

 

[…]

 

Le professeur Waters mentionne les décisions Trident Holdings Ltd. v. Danand Investments Ltd.[28] ainsi qu’Advanced Glazing Systems Ltd. v. Frydenlund[29], et conclut ce qui suit[30] :

 

[traduction]

 

À l’exception possible de la décision Advanced Glazing Systems Ltd. v. Frydenlund, les tribunaux canadiens n’ont pas clairement appliqué un critère de contrôle en vue de conclure que les fiduciaires sont les mandataires des bénéficiaires, de sorte que ces derniers sont responsables des actes des fiduciaires. Toutefois la citation apparemment approuvée, d’un passage de l’ouvrage américain de A.W. Scott concernant les fiducies, portant sur le critère du contrôle énoncé dans la décision Trident Holdings Ltd., et l’acceptation apparente du critère du contrôle dans la décision Advanced Glazing Systems Ltd., donnent à penser que les tribunaux canadiens sont de plus en plus prêts à adopter le critère du contrôle.

 

Si le critère du contrôle était adopté, on ne sait pas trop dans quelle mesure les fiduciaires, en raison du contrôle exercé par le bénéficiaire, seraient considérés comme des mandataires des bénéficiaires. [...]

 

Dans une note de bas de page, le professeur Waters commente ensuite l’énoncé de A.W. Scott en concluant que cette possibilité est peut-être bien plus forte aux États-Unis.

 

[125]     Les décisions mentionnées par le professeur Waters ne portent pas sur des questions d’impôt, mais sur la responsabilité personnelle des mandants. Les principes applicables aux mandats l’emportent-ils sur les principes qui s’appliquent aux fiducies lorsqu’il s’agit de trancher une question de responsabilité en vertu de la Loi, compte tenu en particulier du traitement exhaustif accordé aux fiducies en vertu des dispositions de la Loi? Cela ne veut pas dire que l’application des principes relatifs aux mandats, pour suivre l’approche préconisée par A.W. Scott, entraîne l’absence d’une fiducie : il existe encore une fiducie. Il s’agit de savoir si l’État canadien, qui n’est pas partie à la fiducie ou au mandat, peut décider d’appliquer à des fins fiscales les principes relatifs aux mandats ou les principes relatifs aux fiducies. L’intimée affirme que même si je conclus à l’existence d’une fiducie, il existe en droit une relation de mandataire et que M. Sommerer devrait être imposé sur cette base. Cela ne tient pas compte des circonstances dans lesquelles les biens sont détenus au profit d’autres personnes. Même si la FPS est un mandataire et vend les biens suivant les instructions du mandant, ce dernier ne reçoit le produit de la vente que si certaines conditions sont remplies et même en pareil cas, il ne reçoit pas tout le produit. Quel genre de mandat est‑ce? Cela équivaut à dire qu’une personne est le mandataire de quelqu’un aux fins de la vente de biens, mais qu’il appartient à cette personne de décider des circonstances dans lesquelles le produit sera distribué; à coup sûr, on ne saurait omettre de tenir compte des conditions relatives à la fiducie afin de déterminer l’obligation fiscale qui existe. En fait, conclure que la FPS est le mandataire de M. Sommerer n’est pas une réponse complète; il faut se demander, si la FPS agit comme mandataire, quels sont ses pouvoirs. Ces pouvoirs comprennent-ils le droit de remettre à M. Sommerer le produit de la vente des actions au complet? La situation est tout simplement différente des affaires dans lesquelles est exprimée l’idée selon laquelle les principes qui s’appliquent au mandat l’emportent sur les principes applicables aux fiducies. La conclusion qui a été tirée dans la décision Trident était fondée sur le fait que le fiduciaire était un simple mandataire et fiduciaire dont l’objectif était de détenir le titre légal afférent au bien-fonds et de se plier à la volonté des bénéficiaires. Dans l’affaire Advanced Glazing Systems Ltd., il était question d’une fiducie d’entreprise dans laquelle les investisseurs étaient considérés comme des mandants de la fiducie. Dans cette affaire‑là, un grand nombre de documents indiquaient expressément l’existence d’un mandat et il a été conclu que le pouvoir accordé aux investisseurs était suffisant. Ces affaires ne sont pas du tout semblables à celle dont je suis ici saisi.

 

[126]     Il importe de noter que la position subsidiaire que l’intimée a prise ne constituait pas le fondement de la cotisation. Cette position a subséquemment été prise par le procureur général dans la réponse modifiée à l’avis d’appel. Il incombe à l’intimée de prouver les faits à l’appui de l’existence d’un mandat. Or, aucun mandat ne lie en tant que tel le présumé mandant (M. Sommerer) et la FPS à titre de mandataire, un mandat qui pourrait donner lieu à des relations contractuelles directes entre le mandant et un tiers. Il est clair que la FPS détenait le titre afférent aux actions de Vienna et de Cambrian de son propre chef et que la déclaration constitutive de la Fondation énonçait les paramètres dans lesquels le conseil exécutif pouvait administrer les biens. Par conséquent, même si je reconnais la thèse selon laquelle un contrôle étroit exercé par les bénéficiaires sur les actions d’un fiduciaire peut effectivement avoir pour effet de superposer un mandat à la fiducie à des fins fiscales, l’intimée doit prouver que c’est un tel mandat implicite [traduction] « [qui] prédomine, et [que] les principes du mandat, et non ceux de la fiducie, s’appliquent ». La preuve du contrôle doit être claire et non équivoque; l’influence d’un mandant ou la consultation d’un mandant n’est pas suffisante. Le mandant doit exercer un contrôle sur les biens, et je dirais qu’à des fins fiscales, il doit également exercer un contrôle sur la disposition du produit. Il doit être conclu que le mandataire n’est pas capable d’agir sans l’autorisation du mandant. De fait, le contrôle devrait correspondre au degré de contrôle qui existe lorsqu’un fiduciaire est un simple mandataire ou fiduciaire, dont l’objectif était de détenir le titre légal afférent aux biens et de se plier aux volontés du bénéficiaire.

 

[127]     Je conclus que M. Sommerer exerçait énormément d’influence en sa qualité de membre du conseil consultatif, mais je ne puis conclure à l’exercice d’un degré de contrôle qui m’amènerait à remplacer les principes applicables aux fiducies par ceux qui s’appliquent aux mandats à des fins fiscales. Je donnerai ci‑dessous des précisions.

 

[128]     Premièrement, le pouvoir de M. Sommerer en sa qualité de mandant, le cas échéant, peut uniquement découler de son rôle de membre du conseil consultatif. Comme je l’ai déjà conclu, le conseil consultatif n’était pas un organe de la FPS, et n’était pas non plus une stelle ou un organisme ayant des tâches spéciales : il s’agissait simplement d’un conseil consultatif composé de M. et de Mme Sommerer ainsi que de M. Herbert Sommerer. Je conclus que M. Sommerer était l’âme dirigeante du conseil consultatif, mais son rôle se limitait à exercer une influence plutôt qu’à détenir un pouvoir réel. Quel était le pouvoir qui conférait à M. Sommerer un contrôle sur la disposition de la masse fiduciaire et sur la disposition du produit? La déclaration constitutive de la Fondation et l’acte supplémentaire ne prévoient rien au sujet du rôle qu’a le conseil consultatif à l’égard de la disposition des biens de la fiducie et de leur distribution ultime. On demandait le consentement du conseil consultatif lorsqu’il s’agissait de décider des subventions, mais j’ai conclu que les subventions n’étaient pas des distributions de capital. Aucun consentement du conseil consultatif n’était nécessaire aux fins de la disposition du fonds fiduciaire lui-même, bien qu’en fait, le conseil consultatif eût fait des recommandations au sujet des acquisitions et des dispositions. Cependant, dans un cas, la recommandation du conseil consultatif n’a pas été suivie : lors de la réunion du conseil exécutif du 17 avril 1997, il a été décidé de reporter la vente de certaines actions de Vienna en faveur de M. Mikutta, et ce, malgré la recommandation du conseil consultatif. Dans la déclaration constitutive de la Fondation, il était bien fait mention du rôle de supervision du conseil consultatif, mais l’examen d’un grand nombre de procès‑verbaux présentés à l’instruction m’a donné l’impression que le conseil consultatif, et sans aucun doute M. Sommerer en sa qualité de représentant de ce conseil, assumait uniquement ce rôle; il donnait des conseils, comme la direction donne des conseils à un conseil d’administration, mais la décision finale relevait du conseil exécutif.

 

[129]     Il est également utile de prendre du recul et de considérer la Fondation à plus long terme. De toute évidence, la Fondation avait été établie au profit de la famille Sommerer, mais cet objet doit s’inscrire dans le contexte des autres objectifs mentionnés par M. Sommerer, soit l’établissement de liens familiaux plus étroits avec l’Autriche, le retour de capitaux en Autriche, la mise de capitaux à la disposition de la famille en cas d’urgence, l’investissement de capitaux dans les entreprises commerciales des bénéficiaires et la réalisation de certaines fins caritatives. Il semble y avoir eu un arrangement comportant deux phases, la Fondation acquérant les actions et réalisant un gain important sur ces actions en vue d’être en mesure d’atteindre les objectifs susmentionnés. Une fois qu’elle avait atteint ce niveau de capital, la Fondation consentait des dons de bienfaisance. En examinant la Fondation sous cet angle, il est évident qu’elle existait d’une façon tout à fait indépendante de M. Sommerer. M. Sommerer exerçait sans aucun doute une certaine influence, mais dans ces conditions, la FPS était loin d’agir comme canalisateur pour se plier à ses volontés.

 

[130]     En résumé :

 

i)        aucun élément de preuve ne donnait à penser que M. Sommerer serait responsable des actions de la FPS;

 

ii)       M. Sommerer agissait comme conseiller, bien qu’il ait eu une certaine influence, mais les décisions relatives au fonds de fiducie relevaient du pouvoir discrétionnaire du conseil exécutif;

 

iii)      la FPS, qui avait une existence distincte et assumait ses propres responsabilités continues, en conservant expressément le revenu afin de réaliser ses fins, n’agissait pas comme canalisateur de M. Sommerer.

 

La FPS n’agissait pas comme mandataire de M. Sommerer.

 

Conclusion

 

[131]     Il n’est pas surprenant que le fisc s’intéresse aux activités de M. Sommerer; en effet, comme l’appelant l’a reconnu, si M. Herbert Sommerer avait révoqué la Fondation peu de temps après la vente des actions de Vienna et s’il avait distribué les fonds à M. Sommerer et à l’épouse de celui‑ci, aucun impôt n’aurait été payable par les Sommerer au Canada, si la distribution était considérée comme étant faite par une fiducie non-résidente. Et de fait, j’ai conclu que la FPS agissait comme fiduciaire d’une fiducie non-résidente, mais non d’une fiducie visée par le libellé du paragraphe 75(2) de la Loi. Il est regrettable que ni l’une ni l’autre partie n’ait pu donner plus de précisions au sujet de l’objet du paragraphe 75(2) de la Loi malgré les recherches excellentes et approfondies qu’elles ont faites sur tous les aspects de cette affaire à multiples facettes. J’ai conclu que le paragraphe 75(2) de la Loi ne s’applique pas à un bénéficiaire qui vend des biens à une fiducie à leur juste valeur marchande, mais uniquement à un constituant, qui vend des biens à une fiducie ou à un disposant subséquent qui pourrait être considéré comme un constituant. Si cette interprétation du paragraphe 75(2) de la Loi n’est pas exacte, et si cette disposition vise à s’appliquer à des bénéficiaires tels que M. Sommerer, je conclus que la Convention l’emporte sur cette disposition dans le cas de M. Sommerer.

 

[132]     Les appels sont accueillis et les nouvelles cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations pour les motifs suivants  :

 

          i)        M. Sommerer a vendu 1 770 000 actions de Vienna Systems Corporation à la Fondation privée Sommerer au mois d’octobre 1996;

 

          ii)       la Fondation privée Sommerer agissait comme fiduciaire d’une fiducie constituée par M. Herbert Sommerer au mois d’octobre 1996, mais le paragraphe 75(2) de la Loi ne s’applique pas en vue d’attribuer à M. Sommerer le gain tiré de la vente des actions de Vienna ou le gain tiré de la vente des actions de Cambrian, étant donné que M. Sommerer ne peut pas être considéré comme étant « la personne », telle qu’elle est définie au paragraphe 75(2) de la Loi; et même si le paragraphe 75(2) s’appliquait, le paragraphe XIII(5) de la Convention empêche le Canada d’imposer M. Sommerer sur ces gains;

 

          iii)      la Fondation privée Sommerer n’agissait pas à titre de mandataire de M. Sommerer à l’égard de la vente des actions de Vienna et de Cambrian.

 

          Les dépens sont adjugés à l’appelant.

 

          Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de mai 2011.

 

 

 

« Campbell J. Miller »

Juge C. Miller

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 6e jour d’octobre 2011.

 

 

 

 

François Brunet, réviseur

 


[traduction]

 

ANNEXE A

 

GAZETTE OFFICIELLE

 

de l’Agence autrichienne du revenu
publiée par le ministre fédéral du Revenu
[Bundesminister fьr Finanzen]

 

Article premier


Loi sur les fondations privées


Définition

 

Article 1       (1)     Dans la présente loi fédérale, une fondation privée est une entité juridique à laquelle le fondateur fait une dotation en vue de la réalisation d’un objet autorisé déterminé par le fondateur au moyen de l’affectation, de la gestion et de l’utilisation du fonds de dotation; la fondation a une personnalité juridique et son siège social est situé en Autriche.

 

(2)     Il est interdit à une fondation privée :

1.       d’exercer des activités commerciales autres que de simples activités secondaires;

2.       d’assumer la gestion d’une société commerciale;

3.       d’être inscrite à titre d’actionnaire assumant une responsabilité personnelle à l’égard d’une société de personnes ou d’une société commerciale constituée en personne morale.

 

Nom de la fondation privée

Article 2 Le nom d’une fondation privée doit être distinctement différent de celui de toute autre fondation privée inscrite au registre des sociétés; il ne doit pas prêter à confusion et doit renfermer les mots « Fondation privée », sans abréviation.

 

Fondateurs

 

Article 3       (1)     Une fondation privée peut être créée par un ou plusieurs particuliers ou par une personne morale. Une fondation privée à cause de mort ne peut avoir qu’un seul fondateur.

                   (2)     S’il y a plusieurs fondateurs, le droit que possèdent les fondateurs ou qui leur est réservé ne peut être exercé que conjointement par tous les fondateurs, sauf disposition contraire de la charte de la fondation.

                   (3)     Les droits des fondateurs d’établir la fondation ne sont pas transférés à leurs ayants droit.

                   (4)     Les personnes qui affectent des actifs à une fondation privée après sa création (les donateurs subséquents) n’acquièrent pas automatiquement le statut de fondateur.

 

Dotation

 

Article 4       La dotation en faveur de la fondation privée s’élève à au moins un million de schillings.

 

Bénéficiaire

 

Article 5       Le bénéficiaire est la personne désignée en tant que telle dans la déclaration constitutive de la fondation. À défaut de désignation, le bénéficiaire est la personne désignée en tant que telle par une personne autorisée à cette fin par le fondateur (article 9, paragraphe 1, numéro 3) ou par les administrateurs de la fondation.

 

Bénéficiaire ultime

 

Article 6       Le bénéficiaire ultime est la personne qui reçoit les actifs qui restent après la dissolution de la fondation privée.

 

Établissement et création d’une fondation privée

 

Article 7       (1) La fondation privée est établie au moyen d’une déclaration constitutive; elle est créée du fait de son inscription au registre des sociétés;

                   (2) Les personnes agissant pour le compte de la fondation avant son inscription au registre des sociétés assument une responsabilité solidaire.

 

Déclaration constitutive

 

Article 9       (1)     La déclaration constitutive de la fondation indique :

 

          1.       les actifs affectés;

          2.       l’objet de la fondation;

          3.       le nom du bénéficiaire ou d’une personne autorisée à désigner le bénéficiaire, sauf dans le cas où la fondation est créée au profit du grand public;

          4.       le nom et le siège social de la fondation;

          5.       le nom et l’adresse (aux fins de la signification de documents) du fondateur, ainsi que sa date de naissance dans le cas d’un particulier, ou le numéro d’inscription de la société le cas échéant;

          6.       la durée de la fondation (pour une période définie ou pour une période indéfinie).

 

                    (2) La déclaration constitutive de la fondation peut en outre inclure :

 

          1.       les conditions de nomination et de destitution des administrateurs de la fondation, la durée de leur mandat et le nom des administrateurs qui sont autorisés à représenter la fondation;

          2.       des dispositions concernant la nomination, la destitution et la durée du mandat du vérificateur de la fondation;

          3.       des dispositions concernant le choix du vérificateur de la fondation;

          4.       des dispositions concernant la constitution d’un conseil de supervision ou d’autres organes chargés d’assurer la réalisation de l’objet de la fondation (article 14, paragraphe 2), et la nomination des personnes assumant des responsabilités spéciales;

          5.       dans le cas où il est nécessaire de constituer un conseil de supervision ou si la constitution d’un conseil de supervision est par ailleurs prévue, des dispositions concernant la nomination de ses membres, leur destitution ainsi que la durée de leur mandat;

          6.       des dispositions concernant la modification de la déclaration;

          7.       une indication qu’un document supplémentaire concernant la fondation a été établi ou peut être établi;

          8.       des dispositions concernant l’assujettissement de la fondation privée à une révocation (article 34);

          9.       des dispositions concernant la rémunération des membres des organes de la fondation;

          10.     une définition plus précise du bénéficiaire ou des bénéficiaires additionnels;

          11.     une stipulation indiquant la quantité minimum d’actifs que la fondation doit détenir pour que des fonds puissent être versés aux bénéficiaires;

          12.     la désignation d’un bénéficiaire ultime;

          13.     des dispositions concernant l’ordre interne des organes collégiaux de la fondation;

14.     des dispositions concernant l’affectation et la description d’autres actifs de la fondation, en sus de la quantité minimum (article 4).

 

Charte de la fondation; charte supplémentaire

 

Article 10     (1)     La déclaration constitutive de la fondation est établie sous la forme d’un document officiel (charte de la fondation, charte supplémentaire de la fondation).

 

                   (2)     Si la charte de la fondation prévoit qu’une charte supplémentaire a été ou peut être établie (article 9, paragraphe 2, numéro 6), des dispositions peuvent être consignées dans une charte supplémentaire, en sus de celles prévues à l’article 9, paragraphe 1, sauf dans le cas d’une disposition prévue à l’article 9, paragraphe 1, numéros 1 à 8. La charte supplémentaire n’a pas à être présentée au tribunal responsable du registre des sociétés.

 

Vérification

 

                   (3)     Le rapport de vérification est présenté au fondateur et aux administrateurs de la fondation. Le tribunal règle tout différend entre le vérificateur et les administrateurs de la fondation, à la demande du vérificateur ou des administrateurs.

 

Demande d’inscription au registre des sociétés

 

Article 12     (1)     Le conseil d’administration initial demande l’inscription de la fondation au registre des sociétés.

 

Inscription au registre des sociétés

 

Article 13     (1)     Les fondations privées sont inscrites au registre des sociétés.

 

                   (2)     Le tribunal (article 120, paragraphe 1, numéro 1, Normes relatives à la compétence) dans le district duquel le siège social de la fondation est situé a compétence à cet égard.

 

                   (3)     L’article 3 de la Loi sur le registre des sociétés s’applique avec les adaptations nécessaires. Les renseignements suivants sont en outre inscrits au registre :

 

          1.       une brève description de l’objet de la fondation;

          2.       la date de la charte et de chaque modification de la charte;

          3.       le cas échéant, la date de la charte supplémentaire et de toute modification;

          4.       le cas échéant, les noms et dates de naissance du président, du vice‑président et des autres membres du conseil de supervision.

 

Organes de la fondation privée

 

Article 14     (1)     Le conseil d’administration, le vérificateur et, le cas échéant, le conseil de supervision sont les organes de la fondation privée.

 

                   (2)     Les fondateurs peuvent constituer des organes additionnels en vue d’assurer la réalisation de l’objet de la fondation.

 

Conseil d’administration de la fondation

 

Article 15     (1)     Le conseil d’administration est composé d’au moins trois membres, dont deux ont leur résidence permanente en Autriche.

 

                   (2)     Les bénéficiaires, leur époux ou épouse, les personnes liées à un bénéficiaire en ligne directe ou jusqu’au troisième degré en ligne indirecte, et les personnes morales ne peuvent pas être membres du conseil d’administration de la fondation.

 

                   (3)     Si le bénéficiaire est une personne morale dans laquelle un particulier, selon la définition figurant à l’article 244, paragraphe 2 du Code commercial, a une participation, ce particulier, son époux ou épouse, ou les personnes liées au particulier en ligne directe ou jusqu’au troisième degré en ligne indirecte ne peuvent pas être membres du conseil d’administration de la fondation.

 

                   (4)     Les membres du conseil d’administration initial de la fondation sont nommés par le fondateur ou par le curateur de la fondation (article 8, paragraphe 2, numéro 1).

 

                   (5)     Les noms des membres du conseil d’administration de la fondation, les pouvoirs qui leur sont conférés de représenter la fondation ainsi que les dispositions relatives à leur destitution ou à la modification de leur pouvoir de représentation sont communiqués sans délai en vue d’être inscrits au registre des sociétés. Le rapport est accompagné d’une preuve de nomination ou de modification présentée selon un formulaire certifié conforme par un officier public. Les membres du conseil d’administration présentent en même temps leur signature certifiée conforme par un officier public.

 

Signatures

 

Article 16               Les membres du conseil d’administration signent leur nom de telle façon qu’ils ajoutent leur signature au nom de la fondation privée.

 

Responsabilités du conseil d’administration;

représentation de la fondation privée

 

Article 17     (1)     Le conseil d’administration de la fondation administre et représente la fondation et veille à ce que l’objet de la fondation soit réalisé conformément aux dispositions de la déclaration constitutive.

 

                   (2)     Les membres du conseil d’administration de la fondation exercent leurs fonctions à moindres frais et avec autant de prudence que celle dont ferait preuve un gestionnaire consciencieux. Le conseil d’administration peut fournir des services aux bénéficiaires conformément à l’objet de la fondation, dans la mesure où il n’est pas porté atteinte aux créances des créanciers de la fondation.

 

                   (3)     Sauf disposition contraire de la déclaration constitutive, les membres du conseil d’administration de la fondation sont uniquement autorisés conjointement à faire des déclarations d’intention et à signer pour le compte de la fondation privée. Le conseil d’administration de la fondation peut autoriser des membres du conseil d’administration à conclure à titre personnel des opérations commerciales ou certains types d’opérations commerciales. Dans le cas où une déclaration d’intention doit être signifiée à la fondation privée, la signification à un membre du conseil d’administration est suffisante.

 

                   (4)     Le président, le vice-président ou les administrateurs, à la majorité des deux tiers, peuvent convoquer une réunion du conseil d’administration de la fondation.

 

                   (5)     Si aucun conseil de supervision n’a été constitué, les opérations juridiques conclues entre la fondation privée et un membre du conseil d’administration sont approuvées par tous les autres membres du conseil d’administration et par le tribunal.

 

Reddition de comptes

 

Article 18              Le conseil d’administration tient les livres de la fondation privée en appliquant avec les adaptations nécessaires les dispositions suivantes : articles 189 à 216 et 222 à 226, paragraphe 1, article 226, paragraphe 3, à 234 et articles 236 à 239 du Code commercial, article 243 du Code commercial, en ce qui concerne le rapport annuel, ainsi que les articles 244 à 267 du Code commercial, en ce qui concerne les états annuels et le rapport annuel collectifs. Le rapport annuel indique la façon dont l’objet de la fondation a été réalisé.

 

Vérificateurs de la fondation

 

Article 20     (1)     Le vérificateur de la fondation est nommé par le tribunal ou, le cas échéant, par le conseil d’administration.

 

Vérification

 

Article 21     (1)     Le vérificateur de la fondation vérifie les états annuels, et notamment les livres et le rapport annuel, dans les trois mois suivant leur présentation. L’article 269, paragraphe 1, du Code commercial s’applique avec les adaptations nécessaires à l’objet et à la portée de la vérification, et l’article 272 du Code commercial s’applique avec les adaptations nécessaires au droit à des renseignements qui y est prévu.

 

                   (2)     Le vérificateur n’est pas tenu d’assurer la confidentialité envers d’autres organes de la fondation et envers les personnes autorisées, selon la déclaration constitutive de la fondation, à exercer des fonctions de vérification. L’article 275 du Code commercial s’applique avec les adaptations nécessaires à ces fonctions.

 

                   (3)     Les articles 273 et 274 du Code commercial, en ce qui concerne le rapport de vérification et l’agrément du vérificateur, s’appliquent avec les adaptations nécessaires. Le rapport de vérification est présenté aux autres organes de la fondation privée.

 

                   (4)     Le tribunal tranche sur demande tout différend survenant entre le vérificateur et les autres organes de la fondation au sujet de l’interprétation et de l’application des dispositions légales et de la déclaration constitutive de la fondation.

 

Conseil de supervision

 

Article 22     (1)     Un conseil de supervision est constitué dans l’un ou l’autre des cas suivants :

                   1.       la fondation privée compte plus de trois cents employés;

                   2.       la fondation privée gère uniformément des sociétés internes d’investissement ou des coopératives internes (article 15, paragraphe 1, Loi sur les sociétés de 1965) ou exerce un contrôle sur pareilles sociétés ou coopératives au moyen d’une participation directe de plus de 50 p. 100, si, dans les deux cas, pareilles sociétés ou coopératives comptent en moyenne plus de trois cents employés, et si l’activité de la fondation privée n’est pas uniquement limitée à la gestion des actions des sociétés contrôlées.

 

                   (2)     Le nombre moyen d’employés est déterminé par le nombre d’employés au dernier jour de chaque mois de l’année civile précédente.

 

                   (3)     Dans le cas où le paragraphe 1 s’applique et conformément aux dispositions suivantes, le conseil d’administration de la fondation détermine au plus tard le 1er janvier le nombre moyen d’employés qui travaillaient au cours de l’année antérieure. Si la moyenne est de plus de trois cents employés, le tribunal doit en être avisé; la détermination suivante du nombre d’employés est effectuée trois ans après la date limite du 1er janvier susmentionnée. Un changement du nombre d’employés au cours d’une période de trois ans n’influe pas sur la nécessité d’avoir un conseil de supervision. S’il est établi que le nombre moyen est de plus de trois cents employés, la détermination suivante est effectuée le 1er janvier de chacune des années suivantes tant que le nombre d’employés est de plus de trois cents. Les organismes chargés de représenter les sociétés ou les coopératives mentionnées au paragraphe 1, numéro 2, fournissent en temps et lieu sur demande au conseil d’administration de la fondation les renseignements nécessaires à cette détermination.

 

                   (4)     L’article 110 de la Loi sur l’assurance des travailleurs s’applique avec les adaptations nécessaires aux fondations privées, de la même façon qu’aux sociétés à responsabilité limitée.

 

Nomination et destitution des membres d’organes

de la fondation par le tribunal

 

Article 27     (1)     Dans le cas où le nombre de membres des organes de la fondation requis par la loi ou par la déclaration constitutive de la fondation n’est pas suffisant, le tribunal nomme des membres sur demande ou d’office.

 

                   (2)     Le tribunal destitue un membre d’un organe de la fondation sur demande ou d’office si la déclaration constitutive de la fondation le prévoit ou pour tout autre motif important, notamment dans les cas suivants :

                   1.       faute lourde dans l’exercice des fonctions;

                   2.       incapacité de s’acquitter de sa tâche d’une façon appropriée;

                   3.       introduction de procédures d’insolvabilité contre les actifs du membre, rejet de pareilles procédures fondé sur l’insuffisance d’actifs couvrant les frais et exécution réitérée sur les actifs du membre.

 

Ordre interne

 

Article 28     (1)     Tout organe de la fondation composé d’au moins trois membres :

                   1.       élit un président et au moins un vice-président parmi ses membres;

                   2.       sauf disposition contraire de la déclaration constitutive de la fondation, et malgré l’article 35, paragraphe 2, adopte les résolutions de la fondation à la majorité simple, le président ayant une voix prépondérante;

                   3.       peut adopter des résolutions par écrit si aucun membre ne s’y oppose.

 

Responsabilité des membres des organes de la fondation

 

Article 29     (1)     Malgré la dernière phrase de l’article 21, paragraphe 2, concernant la responsabilité du vérificateur, les membres d’un organe de la fondation privée sont responsables des dommages résultant de toute négligence commise dans l’exercice de leurs fonctions.

 

Droit du bénéficiaire à des renseignements

 

Article 30     (1)     Un bénéficiaire peut demander à la fondation privée de lui fournir des renseignements au sujet de la question de savoir si l’objet de la fondation est atteint et peut demander l’inspection des états annuels, du rapport annuel, du rapport du vérificateur, des livres, de la déclaration constitutive de la fondation et de toute déclaration supplémentaire.

 

                   (2)     Si la fondation privée ne fait pas droit à la demande dans un délai raisonnable, le tribunal peut, sur demande du bénéficiaire, ordonner pareille inspection, au besoin, par un expert en comptabilité. Les articles 385 à 389 du Code de procédure civile s’appliquent avec les adaptations nécessaires à ce processus.

 

Vérification spéciale

 

Article 31     (1)     La fondation privée et chacun de ses membres peuvent demander au tribunal d’ordonner qu’une vérification spéciale soit effectuée en vue de déterminer si l’objet de la fondation est atteint.

 

                   (2)     Le tribunal ordonne la vérification spéciale s’il est convaincu que des actes malhonnêtes ou des violations flagrantes de la loi ou de la déclaration constitutive de la fondation ont été commis.

 

Modification de la déclaration constitutive de la fondation

 

Article 33     (1)     La déclaration constitutive de la fondation peut être annulée ou modifiée par le fondateur avant l’établissement de la fondation privée; la déclaration constitutive de la fondation ne peut pas être annulée en cas d’élimination de l’un des fondateurs; elle peut uniquement être modifiée lorsque l’objet de la fondation est maintenu. Si le seul fondateur ou le dernier fondateur est éliminé, le conseil d’administration de la fondation peut effectuer des modifications tout en maintenant l’objet de la fondation, compte tenu de tout obstacle à l’inscription et d’un changement de circonstances qui peut être survenu dans l’intervalle.

 

                   (2)     Une fois la fondation privée établie, le fondateur peut modifier la déclaration constitutive de la fondation uniquement s’il l’avait établie sous réserve de modifications. S’il est impossible d’effectuer une modification par suite de l’élimination d’un fondateur ou de l’absence d’entente entre les fondateurs ou parce que la déclaration n’a pas été établie sous réserve de modifications, le conseil d’administration peut, aux fins de la réalisation de l’objet de la fondation, modifier la déclaration en vue de l’adapter au changement de circonstances. Le tribunal doit approuver la modification.

 

                   (3)     Le conseil d’administration de la fondation présente une demande en vue de l’inscription au registre des sociétés de toute modification apportée à la déclaration constitutive de la fondation; une copie certifiée conforme par un officier public de la résolution par laquelle la modification est approuvée, indiquant que la charte supplémentaire de la fondation a été modifiée, est jointe à la demande. La modification prend effet au moment de l’inscription.

 

Révocation de la fondation privée

 

Article 34     (1)     La fondation privée peut être révoquée par le fondateur uniquement si la déclaration constitutive de la fondation a été établie sous réserve d’une révocation. Aucune révocation ne peut être faite si le fondateur est une personne morale.

 

Dissolution

 

Article 35     (1)     La fondation privée est dissoute dans les circonstances suivantes :

 

                   1.       la durée de la fondation, telle qu’elle est prévue dans la déclaration constitutive de la fondation, est expirée;

                   2.       les actifs de la fondation privée font l’objet de procédures de faillite;

                   3.       la décision par laquelle une demande de protection en matière de faillite est rejetée en raison de l’insuffisance d’actifs couvrant les frais prévus des procédures de faillite a pris effet;

                   4.       le conseil d’administration a adopté à l’unanimité une résolution en vue de la dissolution de la fondation privée;

                   5.       le tribunal a décidé de dissoudre la fondation.

 

                   (2)     Le conseil d’administration adopte à l’unanimité une résolution en vue de la dissolution de la fondation privée dans les circonstances suivantes :

 

                   1.       le conseil d’administration a reçu une révocation admissible du fondateur;

                   2.       l’objet de la fondation a été atteint ou ne peut plus être atteint;

                   3.       une fondation privée à but non caritatif dont le principal objet est établi au profit de personnes individuelles dure depuis plus de 100 ans, à moins que les bénéficiaires ultimes ne résolvent à l’unanimité que la fondation doit être prorogée pour une période additionnelle d’au plus de 100 ans;

                   4.       pour tout autre motif prévu par la déclaration constitutive de la fondation.

 

                   (3)     Si la résolution prévue au paragraphe 2 n’est pas adoptée, mais qu’il existe un motif de dissolution, chaque membre d’un organe de la fondation, chaque bénéficiaire ou chaque bénéficiaire ultime, chaque fondateur et chaque personne autorisée par la déclaration constitutive de la fondation peut présenter au tribunal une demande de dissolution. En outre, le tribunal dissout la fondation si elle a violé l’article premier, paragraphe 2, et si elle ne s’est pas conformée dans un délai raisonnable à une ordonnance légalement exécutoire de cesser et de s’abstenir.

 

                   (4)     Toute personne désignée au paragraphe 3 peut demander la révocation d’une résolution en vue de la dissolution adoptée à l’unanimité, sans motif valable, par le conseil d’administration de la fondation.

 

                   (5)     Dans les cas où le paragraphe 1, numéros 1 et 4, s’applique, le conseil d’administration de la fondation demande que la dissolution de la fondation soit inscrite au registre des sociétés. La dissolution prend effet au moment de l’inscription.

 

                   (6)     Dans le cas où la fondation privée est dissoute par suite d’une ordonnance judiciaire, le tribunal avise le tribunal responsable du registre des sociétés. La dissolution est inscrite d’office au registre.

 

Liquidation

 

Article 36     (1)     Le conseil d’administration avise les créanciers de la fondation de la dissolution et leur demande de faire inscrire leurs créances au plus tard un mois après la publication de l’avis. L’avis est publié sans délai dans la Gazette officielle, à Vienne [« Amtsblatt zur Wiener Zeitung »]

 

                   (2)     L’article 213 de la Loi sur les sociétés de 1965 s’applique aux fins de la protection des créanciers. Les actifs qui restent après la dissolution sont transférés au bénéficiaire ultime.

 

                   (3)     S’il n’existe aucun bénéficiaire ultime ou en cas de refus du bénéficiaire ultime de recevoir les actifs qui restent, et en l’absence de quelque autre disposition de la déclaration constitutive de la fondation, les actifs qui restent sont dévolus à la République d’Autriche.

 

                   (4)     En cas de dissolution de la fondation privée et en l’absence d’une disposition de la déclaration constitutive de la fondation, le fondateur est le bénéficiaire ultime.

 

                   (5)     Sauf disposition contraire de la déclaration constitutive de la fondation, les bénéficiaires ultimes partagent à parts égales les actifs qui restent

 

Radiation

 

Article 37     (1)     Une fois la fondation liquidée et la reddition de comptes finale effectuée, le conseil d’administration de la fondation demande l’inscription de la liquidation au registre des sociétés. La liquidation est inscrite et la fondation est radiée.

 

                   (2)     Les livres et documents de la fondation privée sont déposés et conservés pendant sept ans dans un lieu sûr fixé par le tribunal.

 

                   (3)     S’il est par la suite conclu que d’autres mesures de liquidation sont nécessaires, le tribunal désigne l’ancien conseil d’administration de la fondation ou un liquidateur à cette fin.

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2011 CCI 212

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2007-2583(IT)G

 

 

INTITULÉ :                                       PETER SOMMERER c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Ottawa (Ontario)

 

 

DATES DE L’AUDIENCE :               Les 6, 7, 8, 9 et 10 décembre 2010,

                                                          les 25 et 26 janvier 2011, et

                                                          les 7 et 8 février 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge Campbell J. Miller

 

DATE DU JUGEMENT MODIFIÉ : Le 13 mai 2011

 

COMPARUTIONS :

 

Avocats de l’appelant :

Mes Roger Taylor, Daniel Sandler et Louis Tassé

Avocats de l’intimée :

Mes Luther P. Chambers, c.r., et

Ryan Hall

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Noms :                    Roger Taylor, Daniel Sandler et

                                                          Louis Tassé

 

                          Cabinet :                  Couzin Taylor s.r.l./s.e.n.c.r.l.

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1]           OGH 31.01 2002 6 06 305/01y, Cour suprême autrichienne, 31 janvier 2002.

 

[2]           [1988] 2 R.C.S. 1015.

 

[3]           2007 CAF 169.

 

[4]           1965 CarswellOnt 220.

 

[5]           [1856] UKHL J3.

 

[6]           (1978), 79 D.L.R. (3d), 648.

 

[7]           (1981), 12 Sask. R. 79 (C.A. Sask.).

 

[8]           97 DTC 777.

 

[9]           [1988] 3 All E.R., 902.

 

[10]          [1931] All E.R. 1.

 

[11]          [2001] 1 R.C.S. 367.

 

[12]          (1999) LIII Bulletin for International Bureau of Fiscal Documentation 118.

 

[13]          7e éd. (Toronto, Carswell, 2009), pages 18 à 23, 36 à 42, 99 et 100, 328 à 335 et 1159 à 1209.

 

[14]          3e éd. (Toronto, Carswell, 2005), pages 9 à 14, 353 à 356, 929 à 935 et 1351 à 1352.

 

[15]          Page 415 de la transcription.

 

[16]          Page 416 de la transcription.

 

[17]          49 E.R. 282 (Rolls Ct).

 

[18]          Alinéas 70(9.1)a), 70(9.3)a), 95(2)(f.1), 110.6(1.2)a), 110.6(1.3)a) et 110.6(1.3)c) et sous‑alinéa 107(4.1)c)(i),

 

[19]          Alinéas 83(2.2)d), 83(2.4)d), 83(2.4)e) et 107(6)a) et paragraphes 89(1), compte de dividendes en capital, et 129(4).

 

[20]          97 DTC 1380.

 

[21]          91 DTC 5123 (C.F. 1re inst.).

 

[22]          Requête en rescision de la disposition modifiant l'impôt sur les sociétés 2008 (GYO.HI) 91, 29 octobre 2009.

 

[23]          2009 DTC 5053 (C.A.F.).

 

[24]          2009 CCI 450.

 

[25]          2009 CCI 465.

 

[26]          4e éd. Boston, Little Brown, 1987, vol. 1, p. 88 et 95.

[27]          3e éd. (Toronto, Carswell, 2005), précité, p. 58.

 

[28]          (1988), 64 O.R. (2d) 65.

 

[29]          [2000] C.L.R. 3d, 241.

 

[30]          3e éd. (Toronto, Carswell, 2005), précité, p. 60.

 

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