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Dossier : 2006-2525(IT)G

ENTRE :

GEOFFREY LAST,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

____________________________________________________________________

 

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de Geoffrey Last

(2006-2902(GST)I) du 24 octobre au 3 novembre 2011 et les 30 et 31 janvier 2012,

à Vancouver (Colombie‑Britannique)

(Observations écrites reçues subséquemment)

Devant : L’honorable juge J. M. Woods

 

Comparutions :

 

Avocats de l’appelant :

Me Alistair G. Campbell

Me Michelle Moriartey

 

Avocats de l’intimée :

Me Bruce Senkpiel

Me Christa Akey

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

L’appel interjeté à l’encontre des cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu relativement aux années d’imposition 2000, 2001 et 2002 est accueilli et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations conformément à ce qui suit :

 

a)                 les concessions de l’intimée énoncées à l’annexe aux présents motifs du jugement sont admises;

 

b)                le revenu provenant de l’entreprise de courtage automobile pour l’année d’imposition 2002 est réduit de 170 000 $;

 

c)                 20 pour 100 des dépenses associées à la résidence sont attribuées à l’entreprise de courtage automobile pour les périodes pendant lesquelles la résidence n’était pas donnée à bail;

 

d)                les revenus de location s’élevant à 5 052,80 $ et à 8 460,29 $, pour les années d’imposition 2000 et 2001 respectivement, sont additionnés au revenu de l’appelant.

 

 

       Signé à Toronto (Ontario), ce 9e jour d’octobre 2012.

 

 

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

Traduction certifiée conforme

ce 6e jour de février 2013.

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


 

 

 

 

Dossier : 2006-2902(GST)I

ENTRE :

GEOFFREY LAST,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

____________________________________________________________________

 

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de Geoffrey Last

(2006-2525(IT)G) du 24 octobre au 3 novembre 2011 et les 30 et 31 janvier 2012,

à Vancouver (Colombie‑Britannique)

(Observations écrites reçues subséquemment)

Devant : L’honorable juge J. M. Woods

 

Comparutions :

 

Avocats de l’appelant :

Me Alistair G. Campbell

Me Michelle Moriartey

 

Avocats de l’intimée :

Me Bruce Senkpiel

Me Christa Akey

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

L’appel interjeté à l’encontre d’une cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d’accise à l’égard des périodes de déclaration de 1998 à 2002, inclusivement, est accueilli et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse une nouvelle cotisation conformément à ce qui suit :

 

a)                              les concessions de l’intimée énoncées à l’annexe aux présents motifs du jugement sont admises;

 

b)                             pour établir la taxe sur les produits et services à percevoir pour les périodes de déclaration des années 2000 à 2002, inclusivement, les revenus doivent correspondre à ceux établis aux fins de l’appel interjeté en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu;

 

c)                              les pénalités pour faute lourde relatives aux périodes de déclaration des années 2000 à 2002, inclusivement, sont annulées.

 

 

       Signé à Toronto (Ontario), ce 9e jour d’octobre 2012.

 

 

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

Traduction certifiée conforme

ce 6e jour de février 2013.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


 

 

 

 

 

 

Référence : 2012 CCI 352

Date : 20121009

Dossiers : 2006-2525(IT)G

2006-2902(GST)I

 

 

ENTRE :

 

GEOFFREY LAST,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

La juge Woods

 

[1]     Il s’agit d’appels en matière d’impôt sur le revenu et de taxe sur les produits et services (« TPS ») interjetés par Geoffrey Last relativement à trois activités rémunératrices : une entreprise de courtage automobile, la négociation d’actions d’InternetStudios.com Inc. (« ISTO ») et la location temporaire de la résidence de l’appelant. Les questions litigieuses ont généralement trait à l’établissement du revenu et des dépenses pour chacune de ces activités.

 

[2]             L’appel interjeté en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») concerne les années d’imposition 2000, 2001 et 2002. L’appel interjeté en vertu de la Loi sur la taxe d’accise (la « LTA ») concerne la même période ainsi que les années 1998 et 1999.

 

[3]             Pour donner une vue d’ensemble, les tableaux ci‑dessous comparent les thèses des parties en ce qui a trait à l’appel en matière d’impôt sur le revenu. Le premier tableau donne le revenu établi par le ministre du Revenu national, qui apparaît dans la réponse modifiée. Le deuxième tableau résume la thèse de l’appelant énoncée dans ses observations écrites (paragraphes 207 à 209).

 

Le revenu selon le ministre

 

 

2000

2001

2002

Entreprise de courtage automobile

39 949,75 $

73 575,91 $

314 545,02 $

Revenu de location

 

 

69 523,99 $

Négociation d’actions d’ISTO – gains en capital

 

 

601 135,38 $

 

Le revenu selon l’appelant

 

2000

2001

2002

Entreprise de courtage automobile

1 003,64 $

Zéro

(20 095,79) $

Revenu de location

5 052,80 $

8 460,29 $

34 707,90 $

Négociation d’actions d’ISTO – gains en capital

 

 

117 414,00 $

 

[4]             Les présents appels comportent deux éléments inusités, illustrés dans les tableaux ci‑dessus, qu’il est utile de mentionner pour éclairer le contexte. Premièrement, pour établir la cotisation relativement aux gains tirés de la négociation d’actions, le ministre a tenu pour acquis qu’il s’agissait de gains en capital, mais selon l’appelant il s’agirait plutôt de revenus d’entreprise, lesquels sont imposés à un taux plus élevé. Deuxièmement, l’appelant convient qu’une cotisation devrait être établie à l’égard des revenus de location de 2000 et de 2001, même s’ils ne l’ont pas été jusqu’à maintenant. Je traiterai de ces questions plus bas.

 

[5]             Au début de l’audience, les parties semblaient avoir fait peu de progrès pour réduire le nombre des postes de revenu et de dépense contestés. Elles ont toutefois accompli des progrès importants au cours de l’audience, particulièrement en ce qui a trait aux dépenses. Un résumé des concessions, remis par la Couronne à la suite de l’audience, est donné en annexe aux présents motifs.

 

[6]             L’analyse ci‑dessous est organisée sous les titres suivants :

 

- Le contexte

- La crédibilité des témoins

- Le fardeau de la preuve

- La négociation d’actions – 2002

- L’entreprise de courtage automobile – 2000 et 2001

- L’entreprise de courtage automobile – 2002

- Le revenu de location – 2000 et 2001

- Le revenu de location – 2002

- La TPS

- Conclusion

 

I.     Le contexte

 

[7]             Pendant plusieurs années, l’appelant a exploité, sous le nom de Last Motorcar Co., une entreprise de consultation et de courtage automobile, dont il était propriétaire unique. En général, le revenu provient de deux sources : 1) les honoraires de consultation auprès des clients qui achètent des véhicules et 2) le profit tiré de l’achat et de la vente de véhicules. Les questions litigieuses relatives à cette entreprise concernent le montant des revenus gagnés et des dépenses supportées.

 

[8]             L’appelant se livre également à des activités de négociation d’actions. La seule période en cause est l’année d’imposition 2002, à propos de laquelle les parties sont en désaccord quant au revenu attribuable à la négociation d’actions d’InternetStudios.com, Inc., ou ISTO – le symbole antérieur de la société.

 

[9]             Au moment de son acquisition par trois personnes établies au Canada, en 1999, lors du boom des entreprises en démarrage spécialisées dans la technologie (le boom des « cyberentreprises »), ISTO était une société publique américaine inactive. Le projet des fondateurs, Robert MacLean, Michael Edwards et Mark Rutledge, était de créer un marché en ligne (comme eBay) pour les divertissements filmés, comme les droits sur les films.

 

[10]        ISTO a initialement réuni un capital important, mais elle a manqué de fonds au début de 2001 juste au moment où l’entreprise commençait à prendre son essor. Au 31 mars 2001, ISTO avait une perte nette cumulative de plus de 44 millions de dollars et a annoncé qu’elle cesserait ses activités si elle ne pouvait pas se procurer davantage de capitaux. À ce momentlà, la bulle des « cyberentreprises » s’était crevée et il était devenu très difficile de se procurer des capitaux.

 

[11]        À l’été 2001, l’appelant a fait la connaissance des fondateurs d’ISTO. Au début de 2002, il a participé à la mise sur pied d’un plan dans lequel des personnes ont été recrutées expressément pour faire la promotion des actions de la société; ces personnes étaient désignées comme l’équipe des relations avec les investisseurs. Selon un rapport déposé auprès de la Securities Exchange Commission (« SEC ») des États‑Unis, au 25 juillet 2002, ISTO avait sept entrepreneurs indépendants qui lui fournissaient des [traduction] « services de développement de produit, des services de consultation en gestion et des services de mobilisation de fonds » (page 18 du rapport annuel).

 

[12]        Pendant que l’équipe des relations avec les investisseurs faisait du battage pour vanter les actions, des actions d’ISTO ont été émises à l’appelant, qui les a négociées activement. Le ministre a établi une cotisation de 601 135 $ relativement à ses gains en capital provenant de cette activité, pour cette année-là.

 

[13]        La Couronne fait valoir que l’appelant se livrait à une opération de [traduction] « manipulation du marché boursier », dans laquelle les actions d’une société moribonde sont vantées de façon à faire faire des profits aux initiés. L’appelant s’en défend avec vigueur et soutient que l’objectif était de stabiliser la société afin de réunir davantage de capitaux institutionnels et de poursuivre ses activités.

 

[14]        Que l’opération en ait été une de manipulation du marché boursier ou non, il ressort manifestement de la preuve que les déclarations faites dans les documents déposés par ISTO auprès de la SEC ayant trait aux actions émises à l’appelant n’étaient pas exactes, ce qui donne fortement à penser que les activités de négociation de l’appelant contrevenaient aux règles de la SEC.

 

[15]        Les documents déposés auprès de la SEC contiennent l’historique des négociations d’actions d’ISTO. Au trimestre s’étant terminé le 31 mars 2000, le prix le plus élevé auquel l’action a été négociée était de 448 $ (corrigé en raison d’un regroupement d’actions). Au trimestre s’étant terminé le 31 décembre 2001, soit juste avant le début des activités de négociation d’actions de l’appelant, le prix le plus élevé auquel l’action a été négociée était de 0,60 $ (rapport annuel de 2001, page 12). À la suite du travail de l’équipe des relations avec les investisseurs et des opérations dans le cadre desquelles l’appelant s’est activement livré à la négociation d’actions, le prix de l’action a augmenté. Au trimestre ayant pris fin le 31 mars 2003, le prix le plus élevé auquel l’action a été négociée était de 1,91 $. Le dernier renseignement que j’ai pu trouver dans la preuve était que le prix de l’action était de 0,55 $ le 8 avril 2004.

 

[16]        Deux questions litigieuses concernent ISTO. La première est celle de savoir si les gains provenant de la négociation d’actions d’ISTO sont imputables au revenu ou au capital. La deuxième est celle de savoir si l’appelant a droit à une déduction pour les paiements qu’il a faits à ISTO, soit directement, soit au profit de celle‑ci. La thèse de la Couronne est que ces paiements sont des prêts, qui ne sont pas déductibles relativement à l’année d’imposition 2002. Selon l’appelant, ce ne sont pas des prêts.

 

[17]        La troisième et dernière activité qui intéresse les présents appels concerne la location, pendant de courtes périodes, de la résidence personnelle de l’appelant à des personnes dans le secteur du divertissement. Cette question est d’importance relativement mineure.

 

II.      La crédibilité des témoins

 

[18]        Je tiens à formuler quelques commentaires sur la fiabilité du témoignage des témoins, car ce témoignage intéresse plusieurs des questions qui ont été soulevées.

 

[19]        L’appelant est un témoin d’importance cruciale pour sa propre cause et, pour qu’il obtienne gain de cause, son témoignage doit être jugé fiable pour ce qui est des nombreuses questions soulevées où il n’y a pas de corroboration satisfaisante. En général, je suis d’avis que le témoignage de l’appelant sur plusieurs questions n’était pas à la hauteur de cette attente et qu’il n’était pas convaincant.

 

[20]        Premièrement, la preuve objective ne donne pas une image avenante de l’appelant quant à sa crédibilité. Il a montré une insouciance flagrante pour l’obligation prévue par la LIR et par la LTA de produire en temps opportun des déclarations appropriées. Au cours de la période pertinente de 1998 à 2002, les déclarations ont été produites en retard ou n’ont pas été produites du tout, certaines sources de revenus n’ont pas été déclarées, certains des documents produits étaient incohérents et l’appelant n’a pas versé une partie de la TPS qu’il avait perçue.

 

[21]        Deuxièmement, en 2002, l’appelant s’est livré à des activités de négociation d’actions qui, selon toute apparence, ont été entreprises à la suite de fausses déclarations dans des documents déposés auprès de la SEC. L’appelant m’a semblé une personne prudente et astucieuse. Il n’est tout simplement pas plausible qu’il n’ait commis aucun acte répréhensible dans cette activité.

 

[22]        Les circonstances ne font pas nécessairement en sorte que le témoignage de l’appelant n’est pas digne de foi, mais elles donnent à penser qu’il convient d’exercer une grande prudence.

 

[23]        Quant au témoignage lui‑même, en général, j’estime qu’il n’était souvent pas assez précis pour être convaincant, qu’il était parfois évasif et qu’il était invraisemblable en ce qui avait trait à certains éléments importants.

 

[24]        Les autres témoins appelés par l’appelant étaient :

 

-         Barrie Weiner, un comptable qui a aidé l’appelant au stade des oppositions, y compris à remplir des déclarations de revenus;

-         Timothy Quocksister, un marchand d’automobiles qui traitait avec l’appelant;

-         Robert MacLean, l’un des fondateurs d’ISTO;

-         Michael Edwards, l’un des fondateurs d’ISTO;

-         John Kirk, un membre expérimenté de l’équipe des relations avec les investisseurs.

 

[25]        La Cour a appelé :

 

-         John Dunham, un comptable ayant rempli les déclarations de revenus de l’appelant avant le recrutement de M. Weiner;

-         Diana Chen, une vérificatrice au sein de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »);

-         Robert Spankie, un vérificateur auprès de l’ARC;

-         James Mise, un agent d’appels de l’ARC.

 

[26]        En ce qui concerne les témoignages de ces témoins, j’ai conclu qu’ils étaient généralement fiables, sauf les témoignages des fondateurs d’ISTO, M. MacLean et M. Edwards, et celui de l’un des comptables, M. Dunham.

 

[27]        En ce qui concerne M. MacLean et M. Edwards, ils étaient deux des trois fondateurs originels d’ISTO et ils jouaient un rôle actif similaire à celui d’un chef de la direction et d’un directeur financier, respectivement. Ils s’y connaissaient tous deux dans le domaine des finances. L’un et l’autre ont déclaré avoir une compréhension limitée des détails du plan concernant les actions d’ISTO, qui a été mis en œuvre en 2002. Je juge ce témoignage invraisemblable et malhonnête.

 

[28]        Dans une tentative pour justifier la participation des témoins au dépôt des documents auprès de la SEC qui se sont révélés incorrects, on décrivait simplement la répartition des actions comme complexe. Ce n’est pas une explication satisfaisante. La preuve donne fortement à penser que les documents déposés auprès de la SEC et signés par M. MacLean (et l’appelant) contiennent de fausses déclarations.

 

[29]        Prenons par exemple un rapport trimestriel déposé auprès de la SEC pour la période ayant pris fin le 20 juin 2001 et signé par M. MacLean en juillet 2002. Il y est déclaré qu’un prêt d’un montant de 199 159 $ avait été obtenu de neuf personnes en février 2001. La preuve révèle que ces fonds n’ont pas été fournis par neuf personnes en 2001, mais par l’appelant en 2002. Les fonds ont été utilisés pour souscrire des actions enregistrées aux noms de neuf personnes, mais le propriétaire bénéficiaire de ces actions était l’appelant. M. MacLean a caractérisé l’entente comme un [traduction] « échange de dettes ». Selon toute apparence, il s’agissait simplement d’une opération inappropriée de rétrodatation.

 

[30]        Quant au témoignage de M. Dunham, lequel avait rempli les déclarations de revenus initiales de l’appelant, certaines de ses explications n’étaient pas plausibles. C’est ainsi qu’il a déclaré que le revenu dans les déclarations était surévalué et qu’il avait mal compris le seuil applicable au dépôt de déclarations de TPS. Selon son témoignage, il aurait cru à tort qu’il n’était pas nécessaire de produire des déclarations de TPS lorsque le revenu était inférieur à 30 000 $. Au moment où ce conseil aurait été donné, le régime en matière de TPS était en place depuis plusieurs années et le seuil applicable à la production de déclarations était généralement connu par les gens ayant les connaissances et l’expérience de M. Dunham. Son témoignage n’était dans l’ensemble pas convaincant.

 

[31]        Quant à M. Weiner, je juge son témoignage généralement fiable sauf en ce qui a trait à un parti pris compréhensible en faveur de l’appelant.

 

III.     Le fardeau de la preuve

 

[32]        Je ferai aussi un bref commentaire sur le fardeau de la preuve, parce que les avocats des deux parties ont invoqué des principes qui divergent quelque peu des décisions les plus récentes rendues par la Cour d’appel fédérale dans des arrêts comme McMillan c. Canada, 2012 CAF 126 et Newmont Canada Corporation v. The Queen, 2012 CAF 214.

 

[33]        Le principe applicable est énoncé dans l’arrêt MacMillan par la juge Dawson, au paragraphe 7 :

 

[…] À notre humble avis, il est bien établi en droit que la charge initiale dont doit s’acquitter un contribuable qui interjette appel consiste à « démolir » les présomptions (hypothèses) du ministre sur lesquelles repose la cotisation. Le contribuable s’acquitte de cette obligation initiale de « démolir » les présomptions du ministre lorsqu’il produit à tout le moins une preuve prima facie. Après que le contribuable a produit une telle preuve, le fardeau de la preuve passe au ministre, qui doit établir, selon la prépondérance des probabilités, que ses présomptions étaient justes (Hickman Motors Ltd. c. Canada, [1997] 2 R.C.S. 336, aux paragraphes 92 à 94; arrêt House c. Canada, 2011 CAF 234, 422 N.R. 144, au paragraphe 30).

 

[34]        Quant à la signification de prima facie, il en a été question dans l’arrêt House c. Canada, 2011 CAF 234, au paragraphe 57 :

 

[57]  […] Dans l’arrêt Amiante Spec Inc. c. Canada, 2009 CAF 239, 2009 ACF n603 (QL), la Cour a expliqué comme suit, au paragraphe 23, ce qu’était une preuve prima facie :

 

[23]     Une preuve prima facie est celle qui est « étayée par des éléments de preuve qui créent un tel degré de probabilité en sa faveur que la Cour doit l’accepter si elle y ajoute foi, à moins qu’elle ne soit contredite ou que le contraire ne soit prouvé. Une preuve prima facie n’est pas la même chose qu’une preuve concluante, qui exclut la possibilité que toute conclusion autre que celle établie par cette preuve soit vraie » (Stewart c. Canada, [2000] T.C.J. No. 53 au paragraphe 23).


IV.            La négociation d’actions – 2002

 

A.      Le contexte

 

[35]        L’appelant a négocié activement des actions d’ISTO en 2002. Au cours de cette période, les actions étaient négociées aux États‑Unis au moyen de services de cotation, comme NASD OTC Bulletin Board et Pink Sheets LLC.

 

[36]        Le ministre a établi une cotisation de 601 135 $ relativement aux gains en capital provenant de cette activité en 2002. Le montant du produit de disposition a été établi à partir de déclarations de courtage, principalement les déclarations d’une firme de courtage appelée Golden Capital Securities Ltd. Quant au coût des actions et à la caractérisation des gains comme des gains en capital, le ministre a accepté les observations de l’appelant.

 

[37]        L’appelant ne conteste pas avoir réalisé des gains de 601 135 $, mais il fait valoir que les gains sont des revenus ordinaires et non des gains en capital comme le ministre l’a établi. L’appelant fait cette affirmation inusitée afin de pouvoir déduire des dépenses relatives au revenu. Le montant des dépenses qui sont déduites est de 483 721 $, ce qui, selon l’appelant, donne un profit net de 117 414 $ (observations écrites de l’appelant, paragraphe 63).

 

[38]        Subsidiairement, l’appelant fait valoir que, s’il est conclu que les gains sont imputables au capital, les dépenses devraient être additionnées au prix de base rajusté des actions d’ISTO.

 

[39]        Un certain nombre de questions sont soulevées à l’égard d’ISTO : 1) À combien se sont élevés les paiements? 2) Quelle était leur nature juridique? 3) S’agissait‑il de gains imputables au revenu ou au capital? 4) Si les gains sont imputables au revenu, estil opportun que la Cour ordonne l’établissement d’une nouvelle cotisation pour ce motif?

 

B.      Le montant et la nature juridique des paiements

 

[40]        Lorsque l’appelant a commencé à s’occuper d’ISTO, il est devenu la principale source de financement d’ISTO et a payé la plupart de ses dépenses. Les dépenses comprenaient les frais juridiques et comptables ayant trait aux documents déposés auprès de la SEC, les frais de l’équipe de relations avec les investisseurs et ce qui a été décrit comme des obligations héritées, notamment les salaires qui n’avaient pas été payés.

 

[41]        L’appelant soutient avoir payé au total 483 721 $, dont 120 066 $ pour les relations avec les investisseurs. D’importants éléments de preuve documentaire ont été présentés à l’appui de ces paiements.

 

[42]        La Couronne soutient que le total n’est que de 429 572 $ et que les paiements ne constituaient pas des dépenses supportées, mais des prêts à ISTO. Cette observation est étayée par les états financiers d’ISTO au 31 décembre 2002 et par un document, présenté comme une entente conclue en octobre 2003 entre l’appelant et ISTO et aux termes de laquelle les parties convenaient d’échanger le prêt contre des actions.

 

[43]        Hormis le propre témoignage intéressé de l’appelant, très peu d’éléments de preuve ont été présentés à l’appui de la prétention de l’appelant selon laquelle les paiements n’étaient pas des prêts. Ce témoignage n’était simplement pas digne de foi.

 

[44]        L’appelant a déclaré qu’il avait conclu une entente informelle avec ISTO et que, selon ce qu’il avait compris, il serait pleinement indemnisé pour ces dépenses au sens où il recevrait une contrepartie pour avoir vendu les actions afin de financer les paiements. Il a aussi déclaré que le document fait en octobre 2003 ne se voulait pas une convention obligatoire, sauf si du financement était obtenu. L’explication dans son ensemble manquait de précision et n’était pas convaincante.

 

[45]        Les avocats de l’appelant font subsidiairement valoir que les paiements sont déductibles, car l’obligation de rembourser qui incombait à ISTO était conditionnelle. Il ne sera pas nécessaire que j’examine la question de savoir s’il s’agit là d’un principe juridique exact, car que je ne suis pas convaincue que l’obligation qui incombait à ISTO était conditionnelle. Il se peut que le recouvrement de l’argent emprunté ait été incertain en raison de la situation financière d’ISTO, mais cela ne suffit pas à rendre l’obligation elle‑même conditionnelle. Si l’appelant soutient que l’obligation elle‑même est conditionnelle, son témoignage n’est pas convaincant.

 

[46]        Je conclus que l’appelant n’a droit à aucune déduction relativement aux paiements faits dans l’année d’imposition 2002.

 

[47]        À la lumière de cette conclusion, il ne sera pas nécessaire que je tire une conclusion sur le montant des paiements. Les avocats de l’appelant m’ont demandé de le faire en tout état de cause, de manière à accélérer la demande d’une déduction dans une année subséquente. Je ne le ferai pas, faute d’éléments de preuve suffisamment fiables pour obtenir un tableau complet.

 

C.      Les paiements sontils au titre du revenu ou au titre du capital?

 

[48]        L’appelant fait valoir que les gains provenant de la négociation d’actions d’ISTO sont des revenus d’entreprise. Cette thèse semble amplement étayée par la preuve. Cependant, je ne pense pas que la Cour doive ordonner l’établissement d’une nouvelle cotisation sur ce fondement, car cela serait prescrit par une loi. Durant la plaidoirie, j’ai demandé aux parties de répondre à la question de savoir s’il serait indiqué que la Cour ordonne au ministre d’établir une nouvelle cotisation sur ce fondement et la Cour a reçu par la suite des observations écrites.

 

[49]        Selon la Couronne, il serait indiqué que la Cour ordonne au ministre d’établir une nouvelle cotisation relativement à un revenu d’un montant de 601 135 $, pour le motif que les gains d’ISTO sont des revenus ordinaires si la nouvelle cotisation de 2002 n’augmente pas les impôts dans leur ensemble pour 2002.

 

[50]        Selon l’appelant, il ne serait pas indiqué que la Cour ordonne à la Couronne d’établir une nouvelle cotisation relativement à un revenu d’un montant de plus de 266 276,34 $, soit le gain en capital imposable qui a fait l’objet de la cotisation. (D’après ce que je comprends, ce chiffre tient compte des activités de négociation pour d’autres actions ainsi que pour les actions d’ISTO.)

 

[51]        À mon avis, il ne serait pas indiqué que la Cour ordonne une nouvelle cotisation qui changerait la caractérisation des gains, de gains au titre du capital à gains au titre du revenu, car le ministre se trouverait ainsi à établir une nouvelle cotisation après le délai prévu aux paragraphes 152(4) et (4.01) de la LIR.

 

[52]        Le principe applicable s’applique également à de nouveaux motifs de cotisation et à un nouvel argument en vertu du paragraphe 152(9). La question de savoir si la Cour devrait ordonner l’établissement d’une nouvelle cotisation qui constituerait de nouveaux motifs de cotisation a été examinée par le juge Rothstein (maintenant juge à la Cour suprême du Canada) dans l’arrêt Pedwell c. Canada, [2000] 4 CF 616; 2000 DTC 6405 (CAF) :

 

   [16] Premièrement, si la Couronne ne peut pas modifier les motifs d’une nouvelle cotisation après l’expiration du délai prévu à cette fin, la Cour de l’impôt se trouve dans la même position. Le contribuable subit le même préjudice – la privation de l’avantage tiré de ce délai. […]

 

[53]        Le même principe s’applique si la nouvelle cotisation est fondée sur un nouvel argument en vertu du paragraphe 152(9). Dans l’arrêt Canada c. Loewen, 2004 CAF 146; 2004 DTC 6321, la juge Sharlow mentionne ce qui suit :

 

   [22] Parmi les nouveaux arguments que Sa Majesté pourrait invoquer en vertu du paragraphe 152(9), on pourrait songer par exemple à un argument qui justifierait l’établissement d’une cotisation qui excède le montant imposé. Toutefois, le paragraphe 152(9) ne dispense pas le ministre des exigences du paragraphe 152(4), qui fixe une date limite pour l’établissement d’une nouvelle cotisation. En conséquence, le ministre ne peut se servir d’un argument fondé sur le paragraphe 152(9) pour établir une nouvelle cotisation après l’expiration du délai prévu au paragraphe 152(4) ou encore pour percevoir un impôt supérieur à celui qui était fixé dans la cotisation frappée d’appel.

 

[54]        La question, alors, consiste à savoir si l’établissement d’une nouvelle cotisation qui changerait la caractérisation des gains d’ISTO, de gains au titre du capital à gains au titre du revenu, serait prescrit par la loi. À mon avis, ce serait le cas. Le délai aura expiré, à moins que l’appelant ait fait une présentation erronée des faits par inattention ou négligence dans la déclaration de revenus. Il serait difficile pour la Couronne de soutenir que l’appelant a agi ainsi alors que l’argument principal de la Couronne dans le présent appel est que les gains sont au titre du capital.

 

[55]        Je conclus qu’il ne serait pas indiqué d’ordonner au ministre d’établir une nouvelle cotisation relativement aux gains d’ISTO en tenant pour acquis qu’il s’agit de revenus ordinaires.

         

V.               L’entreprise de courtage automobile – 2000 et 2001

 

A.      Le contexte

 

[56]        Pour l’établissement des cotisations de l’impôt sur le revenu pour 2000 et 2001, le ministre a établi que les revenus gagnés par l’appelant au titre de son entreprise de courtage automobile étaient de 39 948 $ et de 73 576 $ respectivement.

 

[57]        Les cotisations établies ne permettaient aucune déduction pour l’utilisation commerciale de la résidence, mais la Couronne a concédé aux audiences que 10 pour 100 des dépenses associées à la résidence étaient déductibles à titre de dépenses de l’entreprise de courtage automobile, sauf pendant les périodes où la résidence a été louée à des tiers. Les déductions qui ont été concédées sont de 5 737, 26 $ et de 10 132,49 $ pour 2000 et 2001 respectivement.

 

[58]        L’appelant allègue que le revenu provenant de l’entreprise de courtage automobile était seulement de 1 003,64 $ pour 2000 et nul pour 2001. Il soutient avoir en fait subi une perte d’un montant de 13 324, 21 $ en 2001, mais que cette perte n’est pas admise selon la LIR, car elle est attribuable aux dépenses de bureaux de la résidence.

 

[59]        Il reste deux questions en litige – le montant du revenu gagné et la question de savoir s’il convient d’accorder un montant supérieur à 10 pour 100 pour l’utilisation commerciale de la résidence.

 

B.      L’établissement du revenu

 

[60]        La première question est l’établissement du revenu provenant de l’entreprise de courtage automobile en 2000 et en 2001. Pour les cotisations en cause, le ministre a supposé des revenus s’élevant à 220 995 $ et à 201 106 $. Ces montants sont fondés sur des chiffres présentés par l’appelant dans ses déclarations de revenus initiales remplies par M. Dunham.

 

[61]        L’appelant conteste maintenant ces montants et s’appuie sur des montants qu’il a établis en collaboration avec son nouveau comptable, M. Weiner. Il fait valoir que les montants corrects des revenus sont de 180 570 $ et de 143 464 $.

 

[62]        L’appelant fait essentiellement valoir qu’il a démoli les hypothèses du ministre au moyen d’une preuve prima facie et que la Couronne n’a pas présenté de contre‑preuve.

 

[63]        Si on examine la situation dans son ensemble, la véritable question est de savoir s’il est vraisemblable que l’appelant ait perdu plus que 12 000 $ dans son entreprise de courtage automobile pendant une période de deux ans.

 

[64]        Les montants de revenus déclarés par l’appelant ont été établis par lui‑même et M. Weiner au stade des oppositions sur la base de documents de base fournis par lui‑même et présentés en preuve dans le présent appel. À la lumière de l’attitude cavalière dont l’appelant a fait preuve relativement à ses obligations fiscales, comme je l’ai mentionné ci‑dessus, je ne suis pas convaincue que l’appelant a fourni toutes les informations pertinentes. Il ne serait pas indiqué de lui donner le bénéfice du doute sur ce point.

 

[65]        Je note aussi qu’aucun document financier contemporain n’a été conservé et que les déclarations de revenus initiales ont été produites en retard et comportaient des chiffres différents que les déclarations subséquentes remplies par M. Weiner. L’appelant soutient que ses registres sont fiables parce qu’il a conservé tous les documents de base. Le problème est que je ne suis pas convaincue que la documentation remise par l’appelant est complète. Si l’appelant tenait ses registres aussi méticuleusement qu’il le prétend, pourquoi n’a‑t‑il pas produit ses déclarations de revenus en temps opportun? Une preuve prima facie n’a pas été présentée.

 

[66]        M. Weiner a témoigné qu’il n’avait aucune raison de supposer que les documents de l’appelant n’étaient pas complets. Il a également dit qu’ils étaient bien organisés. Outre le problème que M. Weiner n’a eu que ce que l’appelant lui a remis, je note aussi qu’il y a des divergences importantes pour l’année d’imposition 2002 entre ce que M. Weiner considérait comme des revenus d’honoraires (pièce A‑8) et ce que l’appelant considère maintenant comme des revenus d’honoraires (observations écrites de l’appelant, paragraphe 107). Le nombre d’éléments du revenu d’honoraires a apparemment augmenté de 10 à 24. Cela donne à penser que la documentation n’est pas aussi complète qu’il a été dit.

 

[67]        Par souci de complétude, je ferai aussi un bref commentaire sur la preuve présentée par la Couronne. La Couronne a présenté en preuve un document déposé auprès de la SEC consistant en un prospectus de 2004 pour une autre société en démarrage dans laquelle l’appelant exerçait un rôle, Digital Ecosystems Corp. Dans le prospectus, il est affirmé que l’entreprise de courtage automobile de l’appelant avait eu des ventes annuelles depuis sa fondation de 2 à 5 millions de dollars (pièce R‑9).

 

[68]        Si cette affirmation est exacte, elle détruit le témoignage de l’appelant quant aux revenus de l’entreprise de courtage automobile. Cependant, je n’ai pas plus de raisons d’ajouter foi à l’exactitude de cette déclaration qu’au témoignage de l’appelant à l’audience. Je n’ai accordé aucun poids à l’exactitude de la déclaration.

 

[69]        Étant donné les conclusions ci‑dessus, aucune correction ne sera apportée aux revenus de l’entreprise de courtage automobile établis par le ministre pour les années d’imposition 2000 et 2001.

 

C.      Les déductions pour l’utilisation commerciale de la résidence

 

[70]        L’appelant vit dans un condominium de 3 000 pieds carrés au centreville de Vancouver. Au cours de la période pertinente, la résidence servait aussi à l’appelant comme seul local fixe pour l’entreprise de courtage automobile.

 

[71]        L’appelant a témoigné qu’une chambre à coucher lui servait exclusivement de bureau, que la cuisine servait pour les réunions d’affaires et que ses espaces de stationnement servaient à l’entreprise. Il fait valoir qu’il serait raisonnable d’attribuer 33 pour 100 des dépenses de la résidence à l’entreprise de courtage automobile (pendant les périodes où la résidence n’était pas donnée à bail).

 

[72]        Comme cela a déjà été mentionné, la Couronne soutient que 10 pour 100 des dépenses devraient être attribuées à l’entreprise.

 

[73]        En ce qui concerne les prétentions de l’appelant, je suis troublée par le fait qu’il n’a présenté aucun élément de preuve fiable quant à la fréquence à laquelle il rencontrait des relations d’affaires à sa résidence. Je me propose toutefois de faire certains rajustements, car 10 pour 100 suppose une utilisation très légère de l’espace. Je juge le taux de 20 pour 100 comme une attribution raisonnable des dépenses à l’entreprise de courtage automobile pour les périodes pendant lesquelles la résidence n’était pas donnée à bail.

 

VI.     L’entreprise de courtage automobile – 2002

 

A.      Le contexte

 

[74]        Le ministre a d’abord établi une cotisation arbitraire pour l’année d’imposition de 2002 parce qu’aucune déclaration de revenus n’avait été produite. L’appelant a par la suite produit une déclaration de revenus selon laquelle ses revenus provenant de l’entreprise de courtage automobile s’élevaient à 29 324 $.

 

[75]        L’ARC a ensuite procédé à une analyse des dépôts dans les comptes bancaires de l’appelant et dans ses états de courtage et a conclu que les revenus provenant de l’entreprise de courtage automobile de l’appelant s’élevaient à 314 545 $ pour l’année d’imposition 2002. Une grande partie de ce montant consiste en des dépôts bancaires inexpliqués.

 

[76]        Dans le présent appel, l’appelant fait valoir que, dans la déclaration de revenus produite par lui après l’établissement de la cotisation arbitraire, ses revenus provenant de l’entreprise de courtage automobile sont surévalués. Il soutient avoir subi une perte s’élevant à 20 095,79 $ (observations écrites de l’appelant, paragraphe 58).

 

[77]        À l’audience, la Couronne a concédé certaines dépenses additionnelles qui figurent à l’annexe. Compte tenu de ces dépenses, le revenu provenant de l’entreprise de courtage automobile établi par la Couronne semble avoisiner les 275 000 $.

 

[78]        Deux questions doivent être tranchées relativement à l’entreprise de courtage automobile en 2002 : 1) Quel est le montant du revenu? et 2) Quelle est la déduction appropriée pour l’utilisation commerciale de la résidence?

 

[79]        À titre préliminaire, je fais remarquer que le ministre a supposé que les dépôts inexpliqués étaient des revenus provenant de l’entreprise de courtage automobile plutôt que d’autres sources et les actes de procédures limitaient la question à l’établissement du revenu de l’entreprise de courtage automobile.

 

[80]        La réponse de l’appelant à cet argument est que les dépôts ne sont pas des revenus provenant de l’entreprise de courtage automobile. Ses avocats font valoir qu’il devrait avoir gain de cause sur cette question même si la preuve donne à penser que le revenu provient d’une autre source de revenus non identifiée.

 

[81]        À l’audience, la Couronne a demandé l’autorisation de modifier sa réponse afin de formuler la question de manière plus large – que les dépôts inexpliqués sont des revenus provenant d’une source quelconque. La demande a été faite au quatrième jour de l’audition. J’ai conclu qu’il était trop tard pour que la Couronne fasse cette modification. L’appelant avait déjà présenté des éléments de preuve au cours des trois premiers jours et sa stratégie de procès était fondée sur les actes de procédures existants. J’ai également rejeté un autre argument formulé en même temps par la Couronne selon lequel la référence dans la réponse au terme « entreprise de courtage automobile » inclut les activités de négociation d’actions d’ISTO.

 

[82]        À la lumière de ces conclusions, la question à trancher n’est pas de savoir si les dépôts inexpliqués sont des revenus provenant d’une source quelconque, mais si ce sont des revenus provenant de l’entreprise de courtage automobile.

 

B.      Les dépôts inexpliqués sont-ils des revenus provenant de l’entreprise de courtage automobile?

 

[83]        La vérificatrice de l’ARC qui a procédé à l’analyse des dépôts a déterminé plus de 500 000 $ de dépôts qu’elle a attribués à des revenus provenant de l’entreprise de courtage automobile. La plus grande partie de ces montants étaient des dépôts dans le compte d’entreprise et le compte personnel de l’appelant auprès de TD Canada Trust.

 

[84]        L’appelant prétend que son revenu brut provenant de l’entreprise de courtage automobile en 2002 était de 214 576,56 $ (observations écrites de l’appelant, paragraphe 84). Ce montant consiste dans le produit des ventes de voitures, qui s’élève à 197 647 $, et dans les revenus d’honoraires, qui s’élèvent à 16 929 $. Il fait valoir que les dépôts inexpliqués sont principalement des transferts de compte de courtage représentant des opérations de négociation d’actions d’ISTO qui avaient déjà été assujetties à l’impôt.

 

[85]        En général, les prétentions de l’appelant sur cette question me posent les mêmes difficultés que plusieurs autres questions; ces prétentions sont fondées dans une grande mesure sur le propre témoignage de l’appelant. Je ne l’estime pas fiable.

 

[86]        Très peu d’éléments de preuve ont été présentés à l’appui de la plus grande partie du témoignage ayant trait aux dépôts inexpliqués. Peu de documents de base ont été présentés et très peu de rapprochements ont été fournis pour les prétendus transferts des comptes de courtage aux comptes bancaires.

 

[87]        L’appelant a expliqué de diverses façons le fait que de nombreux retraits des comptes de courtage ne correspondaient pas aux dépôts dans les comptes bancaires. Certaines de ces explications ne sont simplement pas vraisemblables. Par exemple, l’appelant a déclaré avoir pris de l’argent des comptes de courtage sous la forme de traites bancaires et l’avoir conservé à la maison jusqu’à ce qu’il en ait eu besoin, puis l’avoir alors déposé dans un compte bancaire. Il semble improbable que l’appelant ait fait cela.

 

[88]        L’appelant s’appuie aussi sur le témoignage de M. Weiner. Il est soutenu que, après avoir examiné les relevés bancaires, M. Weiner a conclu que le revenu déclaré par l’appelant était plausible. M. Weiner a affirmé que, bien qu’il n’eût pas procédé à une vérification, il avait la responsabilité éthique de se retirer s’il croyait que les chiffres étaient trompeurs (témoignage de Barrie Weiner, pages 103 et 104).

 

[89]        Ce témoignage est de peu de secours pour l’appelant. S’il y avait des éléments de preuve potentiels ayant convaincu M. Weiner quant à la source des dépôts dans les comptes bancaires, ces éléments de preuve auraient pu être présentés à l’audience. Leur absence donne à penser que M. Weiner s’est probablement appuyé sur les déclarations intéressées de l’appelant quant à la source des dépôts.

 

[90]        J’aimerais également formuler un commentaire sur l’observation de l’appelant au paragraphe 127 de ses observations écrites.

 

[91]        Premièrement, l’appelant fait remarquer que le revenu de 2002 qui a été établi par la Couronne excède grandement le revenu des années antérieures. Cela ne me convainc pas parce qu’il n’y a aucune preuve que l’ARC a procédé à des vérifications rigoureuses pour les années antérieures.

 

[92]        En outre, selon son témoignage, l’appelant n’aurait fait qu’un profit modeste pour chaque transaction relative à une automobile. Il soutient que, pour gagner le montant de revenus allégué par la Couronne, il aurait dû effectuer 354 transactions additionnelles en 2002.

 

[93]        Cet argument ne me convainc pas davantage. Il n’y a aucune preuve fiable qui me permettrait de déterminer le montant du revenu qui pourrait être raisonnablement gagné dans ce type d’entreprise.

 

[94]        L’appelant fait aussi valoir que les dépôts en chiffres ronds de 2 000 $, 3 000 $ et 5 000 $ ne correspondent pas à la preuve du revenu provenant de chaque transaction. Le principal problème que me pose cet argument est que je ne suis pas convaincue que la preuve présentée par l’appelant dressait un tableau complet et exact de son entreprise.

 

[95]        L’argument final formulé dans cette partie des observations écrites de l’appelant a une certaine valeur. L’argument est que le revenu provenant de l’entreprise de courtage automobile était exclusivement canadien et, cependant, plusieurs dépôts inexpliqués sont représentés par des traites bancaires libellées en dollars américains. Selon l’analyse des dépôts bancaires dans la pièce R‑18, les dépôts libellés en dollars américains représentent approximativement 150 000 $CAN.

 

[96]        J’admets que l’appelant a présenté une preuve prima facie relativement aux dépôts libellés en dollars américains. Cette conclusion n’est pas fondée seulement sur le propre témoignage de l’appelant, elle repose aussi sur la preuve dans son ensemble, qui donne à penser que les clients de l’appelant étaient généralement canadiens. Pour permettre à la Couronne de soutenir que l’entreprise avait des revenus importants en dollars américains, une preuve à l’appui serait nécessaire. Aucune preuve de ce genre n’a été présentée.

 

[97]        En ce qui concerne maintenant les observations écrites de la Couronne, celle‑ci soutient que l’appelant ne peut contester avec succès l’analyse des dépôts qu’en établissant la source réelle des dépôts inexpliqués. Les avocats s’appuient sur des arrêts tels que Lacroix c. Canada, 2008 CAF 241, 2009 DTC 5029.

 

[98]        Je ne souscris pas à cette observation. La question en l’espèce est de savoir si les dépôts inexpliqués sont des revenus provenant de l’entreprise de courtage automobile. Dans l’arrêt Lacroix, la question était simplement de savoir si les montants à l’égard desquels une cotisation avait été établie étaient des revenus provenant d’une source quelconque. Il est logique dans de telles circonstances d’affirmer qu’un contribuable ne peut avoir gain de cause qu’en établissant la source réelle.

 

[99]        Dans le présent appel, il n’est pas nécessaire que l’appelant établisse la source réelle des dépôts. Il est loisible à l’appelant d’avoir gain de cause en établissant que le montant des revenus produits par l’entreprise de courtage automobile était moindre que celui supposé par le ministre.

 

[100]   Le condominium luxueux de l’appelant suggère un style de vie qui ne correspond pas aux revenus qu’il prétend avoir gagnés au cours des années faisant l’objet de l’appel. Par exemple, les paiements hypothécaires mensuels semblent être de l’ordre de 10 000 $. L’appelant a témoigné qu’une action en forclusion avait été introduite relativement à la résidence en 2001, mais il semble que la forclusion ait été évitée.

 

[101]   Quoiqu’il soit très probable que le revenu de l’appelant ait été sous‑évalué, notre tâche consiste simplement à déterminer si l’appelant a présenté une preuve prima facie selon laquelle les dépôts inexpliqués ne proviennent pas de l’entreprise de courtage automobile. La source réelle des dépôts n’est pas révélée, mais cela ne porte pas un coup fatal à la prétention de l’appelant.

 

[102]   Je conclus que l’appelant a partiellement gain de cause sur cette question et que le revenu établi à la suite de l’analyse des dépôts devait être réduit de 170 000 $. Ce montant n’a pas été calculé avec une précision mathématique, mais il tient compte de trois éléments : des dépôts en dollars américains d’environ 150 000 $, un dépôt pour dommages éventuels d’un montant de 10 000 $, dont il est admis qu’il a trait au condominium, et divers autres éléments.

 

[103]   Avant de passer à une autre question, je tiens à formuler un bref commentaire sur le témoignage de John Kirk (consultant en matière de relations avec les clients) selon lequel l’appelant jouait un rôle à temps plein à ISTO (transcription, page 997). La question qu’il faudrait poser est celle de savoir si le travail de l’appelant à ISTO réduisait sa capacité à gagner un revenu provenant de l’entreprise de courtage automobile en 2002. Les parties n’ont ni l’une ni l’autre mentionné cela dans leurs observations.

 

[104]   La conclusion à laquelle je suis parvenue est que le témoignage de M. Kirk n’est pas assez précis pour me permettre de conclure que le travail de l’appelant à ISTO a eu une incidence importante sur les revenus provenant de l’entreprise de courtage automobile. Il est tout à fait vraisemblable que l’appelant soit souvent allé aux locaux d’ISTO, qui étaient près de son condominium, pour exercer une surveillance et donner des conseils. Il ne faut pas en conclure que sa présence réduisait sa capacité à consacrer du temps à l’entreprise de courtage automobile.

 

C.       Quelle est la déduction appropriée pour l’utilisation commerciale de la résidence?

 

[105]   L’analyse relative à l’utilisation commerciale de la résidence au cours des années 2000 et 2001 est également pertinente pour l’année d’imposition de 2002. Un montant égal à 20 pour 100 des dépenses de la résidence qui ont été supportées lorsque la résidence n’était pas donnée à bail sera admis comme déduction ayant trait à l’entreprise de courtage automobile pour 2002.

 

[106]   Une autre question ayant trait aux dépenses associées à la résidence pour 2002 concerne des montants s’élevant à 15 000 $ que l’appelant a payés à un cabinet d’avocats. L’appelant fait valoir qu’il s’agit de frais juridiques ayant trait à une action en forclusion visant son condominium et qu’un montant proportionnel devrait être alloué à l’utilisation commerciale de la résidence.

 

[107]   La Couronne soutient qu’il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve pour lier la dépense à l’action en forclusion.

 

[108]   Je signale d’abord que le cabinet d’avocats qui a reçu les fonds n’était pas celui de l’appelant, mais celui qui représentait la banque ayant introduit l’action en forclusion. Je souligne également que les fonds ont été payés au cabinet d’avocats en fiducie.

 

[109]   L’appelant n’a pas présenté une preuve prima facie que ces montants représentaient des frais juridiques. Ces montants pouvaient être des paiements relatifs à des paiements hypothécaires en souffrance qui ont peut-être déjà été déduits par l’appelant selon la méthode de la comptabilité d’exercice. Le témoignage bref et vague de l’appelant selon lequel il s’agissait de frais juridiques n’est pas crédible.

 

VII.   Le revenu de location – 2000 et 2001

 

[110]   Au cours des années d’imposition 2002 et 2001, l’appelant a gagné des revenus provenant de la location à court terme de sa résidence personnelle, qui s’élevaient à 5 052,80 $ et à 8 460,29 $.

 

[111]   L’appelant n’a pas déclaré ces revenus dans ses déclarations de revenus et le ministre ne les a pas inclus dans les cotisations en cause. Les revenus ont été admis dans l’avis d’appel modifié de l’appelant.

 

[112]   Il n’y a aucun différend entre les parties relativement à cette source de revenus. Elles conviennent que les montants ci‑dessus doivent être additionnés au revenu.

 

[113]   Malgré l’accord entre les parties, cet élément est digne de mention parce que la Cour n’est pas liée par l’accord entre les parties.

 

[114]   Le principe applicable est qu’il convient de donner effet au consentement des parties à moins qu’il soit contraire à la LIR : Petro-Canada c. Canada, 2004 CAF 158, paragraphe 66.

 

[115]   À mon avis, il est raisonnable de conclure qu’il ne serait pas contraire à la LIR qu’une nouvelle cotisation inclue maintenant ce revenu, car l’établissement d’une nouvelle cotisation à l’égard du revenu de location ne serait pas prescrit par la loi. En particulier, il est raisonnable de conclure que l’appelant a fait dans ses déclarations de revenus une présentation erronée par négligence, inattention ou omission volontaire en ne déclarant pas le revenu.

 

VIII.  Le revenu de location – 2002

 

[116]   L’appelant a aussi gagné un revenu de location au cours de l’année d’imposition 2002, qui a été inclus dans la cotisation en cause.

 

[117]   Deux éléments sont contestés relativement à ce revenu : 1) la déductibilité des montants payés à un cabinet d’avocats, qui s’élevaient à 15 000 $, et 2) la question de savoir si un dépôt pour dommages éventuels d’un montant de 10 000 $ devrait être inclus dans le revenu.

 

[118]   En ce qui a trait aux montants payés au cabinet d’avocats, plus haut dans les présents motifs, j’ai conclu que ces paiements ne sont pas déductibles dans le calcul du revenu provenant de l’entreprise de courtage automobile. Le même raisonnement s’applique au calcul du revenu de location. Aucune correction ne sera apportée au revenu de location pour les paiements au cabinet d’avocats.

 

[119]   Quant au dépôt pour dommages d’un montant de 10 000 $, ce montant a été inclus dans le revenu provenant de l’entreprise de courtage automobile à la suite de l’analyse des dépôts à laquelle le ministre a procédé. Il est maintenant admis que le dépôt, qui n’a jamais été rendu, a trait à l’entreprise de location et non à l’entreprise de courtage automobile.

 

[120]   La Couronne fait valoir que ce montant devrait être inclus dans le revenu de location (observations présentées par l’intimée en vue de réfuter les allégations formulées, paragraphe 17). Je ne suis pas d’accord. Comme cette question n’a pas été soulevée dans les actes de procédure, je conclus qu’il est trop tard pour faire cette correction maintenant.

 


IX.     La TPS

 

A.      Le contexte

 

[121]   À l’audience, l’appel relatif à la TPS n’a pas du tout reçu la même attention que l’appel relatif à l’impôt sur le revenu. Les observations de l’appelant, en particulier, étaient relativement brèves.

 

[122]   Pour résumer les faits, l’appelant n’a produit aucune déclaration de TPS pour les années 1998 et 1999 et il n’a versé aucune taxe pour ces années, même s’il avait perçu de la TPS relativement à certaines transactions. Des déclarations ont été produites pour les années 2000, 2001 et 2002, qui faisaient état d’un modeste montant de taxe nette.

 

[123]   La vérification de l’ARC a en fait commencé par un examen de la TPS pour les années 2000, 2001 et 2002. La vérification a ensuite été élargie de manière à inclure la TPS pour 1998 et 1999 ainsi que l’impôt sur le revenu pour les années 2000, 2001 et 2002. Une cotisation de TPS a été établie en 2006, qui comprenait la taxe nette pour toutes les périodes entre 1998 et 2002.

 

[124]   Le tableau suivant compare la taxe nette déclarée par l’appelant et la taxe nette établie par le ministre.

 

Période terminée le

Taxe nette déclarée

Taxe nette établie

1998-12-31

           s.o.

   31 796,45 $

1999-12-31

           s.o.

   14 411,67 $

2000-12-31

      538,17 $

     3 276,37 $

2001-12-31

      161,46 $

   10 086,75 $

2002-12-31

      639,33 $

   23 564,64 $

Total

   1 338,96 $

   83 135,88 $

 

[125]   Pour les périodes de déclaration des années 2000, 2001 et 2002, l’établissement de la taxe nette devrait être compatible avec les conclusions ci‑dessus ayant trait à l’appel relatif à l’impôt sur le revenu. Tel n’est pas le cas pour 1998 et 1999, toutefois, car l’appel relatif à l’impôt sur le revenu ne porte pas sur ces années.

 


B.      Les périodes de déclaration de 1998 et 1999

 

[126]   La méthodologie générale utilisée par le ministre pour établir la cotisation relative à la taxe nette et aux pénalités pour 1998 et 1999 était la suivante : 1) la TPS à percevoir a été établie par le revenu déclaré dans les déclarations de revenus, 2) aucun crédit de taxe sur les intrants n’a été accordé et 3) des pénalités pour faute lourde ont été imposées.

 

[127]   Il convient de mentionner que la Couronne a concédé à l’audience qu’aucune pénalité pour faute lourde ne devait être imposée pour 1998 et 1999 parce que la disposition pertinente ne s’applique que lorsque les déclarations ont été produites : Lee c. La Reine, 2010 CCI 400.

 

[128]   Les parties ont convenu du montant des crédits de taxe sur les intrants et il est donné à l’annexe.

 

[129]   La seule question qui demeure relativement à 1998 et 1999 est le montant du revenu, ou de la TPS à percevoir (observations écrites de l’appelant, réponse, au paragraphe 34).

 

[130]   L’appelant a présenté des documents de base à l’appui du revenu provenant de l’entreprise de courtage automobile au cours de ces années. Pour les mêmes raisons exposées ci‑dessus relativement au revenu tiré de l’entreprise de courtage automobile en 2000 et en 2001, je ne suis pas convaincue que la documentation remise par l’appelant relativement à 1998 et à 1999 est complète. Aucune correction ne sera apportée à la cotisation relative à la TPS à percevoir pour 1998 et 1999.

 

C.      Les périodes de déclaration de 2000, 2001 et 2002

 

[131]   En ce qui a trait aux périodes de déclaration de 2000, 2001 et 2002, les questions qu’il reste à trancher sont le montant de la TPS à percevoir et les pénalités pour faute lourde (observations écrites de l’appelant dans la réponse, paragraphe 34).

 

[132]   En ce qui concerne la TPS à percevoir, elle devrait découler du revenu établi aux fins de l’appel relatif à l’impôt sur le revenu.

 

[133]   En ce qui concerne les pénalités pour faute lourde, le problème que me pose l’imposition de pénalités est que la preuve dans son ensemble ne donne pas un tableau très complet et le fait que la Couronne a le fardeau de la preuve. L’appel relatif à l’impôt sur le revenu reposait dans une grande mesure sur le fait que l’appelant n’a pas présenté d’éléments de preuve suffisamment fiables. Pour ce qui est des pénalités relatives à la TPS, la Couronne n’a pas présenté une preuve suffisante pour justifier des pénalités.

 

[134]   En ce qui concerne 2000 et 2001, la Couronne s’appuie sur les revenus déclarés dans les déclarations de revenus produites par l’appelant. La preuve est insuffisante pour établir la fiabilité de ces montants.

 

[135]   En ce qui concerne 2002, la Couronne s’appuie sur l’analyse des dépôts. De nouveau, la preuve est insuffisante pour établir la fiabilité de la source des dépôts inexpliqués. Par exemple, il est tout à fait possible que plusieurs de ces dépôts proviennent des négociations d’actions d’ISTO qui ne faisaient pas partie des gains en capital qui ont fait l’objet d’une cotisation. Dans ce cas, le revenu ne serait pas assujetti à la TPS. Je conclus que la Couronne a présenté une preuve insuffisante pour justifier des pénalités pour faute lourde.

 

X.      Conclusion

 

[136]   En ce qui concerne les cotisations établies en vertu de la LIR pour les années d’imposition 2000, 2001 et 2002, l’appel est accueilli et les cotisations sont déférées au ministre pour qu’il établisse de nouvelles cotisations conformément à ce qui suit :

 

a)                 les concessions faites par la Couronne qui sont énoncées à l’annexe sont admises;

 

b)                le revenu provenant de l’entreprise de courtage automobile pour l’année d’imposition de 2002 est réduit de 170 000 $;

 

c)                 20 pour cent des dépenses associées à la résidence sont attribuées à l’entreprise de courtage automobile pour les périodes pendant lesquelles la résidence n’était pas donnée à bail;

 

d)                des revenus de location s’élevant à 5 052,80 $ et à 8 460,29 $, pour les années d’imposition 2000 et 2001 respectivement, doivent être additionnés au revenu de l’appelant.

 

[137]   En ce qui concerne la cotisation établie en vertu de la LTA relativement aux années d’imposition 1998, 1999, 2000, 2001 et 2002, l’appel est accueilli et la cotisation est déférée au ministre pour qu’il établisse une nouvelle cotisation conformément à ce qui suit :

 

a)                 les concessions faites par la Cour et énoncées à l’annexe sont admises;

 

b)                pour établir la TPS à percevoir pour les périodes de déclaration des années 2000 à 2002, inclusivement, les revenus sont les montants établis aux fins de l’appel en vertu de la LIR;

 

c)                 les pénalités pour faute lourde relativement aux périodes de déclaration des années 2000 à 2002, inclusivement, sont annulées.

 

[138]   L’appelant a demandé d’avoir la possibilité de présenter des observations écrites relativement aux dépens. La Cour doit recevoir les observations écrites de l’appelant dans les dix prochains jours, l’intimée aura dix jours supplémentaires pour répondre et l’appelant aura ensuite encore dix jours pour présenter une réplique.

 

 

       Signé à Toronto (Ontario), ce 9e jour d’octobre 2012.

 

 

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 6e jour de février 2013.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


ANNEXE

[traduction]

 

Geoffrey O. Last c. Sa Majesté la Reine

2006-2525(IT)G et 2006‑2902(GST)I

 

Liste des concessions de l’intimée

 

Appel no 2006‑2525(IT)G

 

A.        En ce qui concerne l’année d’imposition 2000, l’intimée déclare ce qui suit :

 

            Revenu de location

a)      Les parties ont convenu que l’appelant a gagné un revenu de location s’élevant à 62 000 $.

b)      L’appelant a le droit de déduire des dépenses de location de 56 947,20 $.

c)      En conséquence, le revenu de location net de l’appelant est de 5 052,80 $.

Revenu de l’entreprise de courtage automobile

d)     Si les chiffres du revenu brut de l’intimée sont admis par la Cour, les montants de dépense admis par le ministre devraient demeurer à 181 045,92 $, selon ce qui a été établi pour l’année 2000.

e)      Si, toutefois, les chiffres du revenu brut de l’appelant sont admis par la Cour, chiffres que l’intimée ne concède pas, les dépenses d’entreprise (sans compter les dépenses pour l’utilisation commerciale de la résidence) devraient être réduites à 160 442,35 $ en 2000, comme cela a été concédé par l’appelant.

Dépenses pour l’utilisation commerciale de la résidence

f)       L’appelant a supporté des dépenses s’élevant à 57 372,64 $ relativement au condominium pendant la période en 2000 où il a exploité l’entreprise de courtage automobile dans le condominium.

g)      L’appelant a le droit de déduire 10 pour 100, soit 5 737,26 $, des dépenses relatives à l’utilisation commerciale de la résidence en 2000.

B.        En ce qui concerne l’année d’imposition de 2001, l’intimée déclare ce qui suit :

            Revenu de location

a)      Les parties ont convenu que l’appelant a gagné des revenus de location s’élevant à 9 300 $.

b)      L’appelant a droit à une déduction de 839,71 $ relativement aux dépenses de location.

c)      En conséquence, le revenu de location net de l’appelant est de 8 460,29 $.

Revenu de l’entreprise de courtage automobile

d)     Si les chiffres du revenu brut de l’intimée sont admis par la Cour, les montants de dépense admis par le ministre devraient demeurer à 127 530,15 $, selon ce qui a été établi en 2001.

e)      Si, toutefois, les chiffres du revenu brut de l’appelant sont admis par la Cour, chiffres que l’intimée ne concède pas, les dépenses d’entreprise (sans compter les dépenses pour l’utilisation commerciale de la résidence) devraient être réduites à 123 013,89 $ en 2001, comme cela a été concédé par l’appelant.

Dépenses pour l’utilisation commerciale de la résidence

f)       L’appelant a supporté des dépenses s’élevant à 101 324,85 $ relativement au condominium pendant la période en 2001 où il a exploité l’entreprise de courtage automobile dans le condominium.

g)      L’appelant a le droit de déduire 10 pour 100, soit 10 132,49 $, des dépenses relatives à l’utilisation commerciale de la résidence en 2001.

En ce qui concerne l’année d’imposition 2002, l’intimée déclare ce qui suit :

Revenu de location

a)      L’appelant a loué le condominium pendant 28 jours sur un total de 365 jours au cours de l’année 2002.

b)      Les parties ont convenu que l’appelant a gagné un revenu de location s’élevant à 42 250 $.

c)      L’appelant a droit à une déduction d’au moins 9 391,46 $ relativement aux dépenses de location.

Revenu de l’entreprise de courtage automobile

d)     L’appelant a le droit de déduire les dépenses additionnelles suivantes (sans compter les dépenses pour l’utilisation commerciale de la résidence) relativement à l’entreprise de courtage automobile :

I.       le montant de 1 070 $ relativement à une Mazda 323;

II.    le montant de 18 000 $ relativement à une 96 GMC 1 Ton;

III. le montant de 6 500 $ relativement aux montants payés pour une Silver Arrow;

IV. le montant de 12 500 $ relativement aux charges à payer pour une Silver Arrow;

ce qui donne des dépenses totales (sans compter les dépenses pour l’utilisation commerciale de la résidence) de 234 287 $ relativement à l’entreprise de courtage automobile.

           


Dépenses pour l’utilisation commerciale de la résidence

e)      L’appelant a supporté des dépenses s’élevant à 110 125,58 $ relativement au condominium (montant qui inclut l’intérêt de 4 118,82 $ payés sur les appareils électroménagers) en 2002.

f)       L’appelant a exploité l’entreprise de courtage automobile dans son condominium pendant 337 jours sur 365 jours en 2002.

g)      L’appelant a le droit de déduire 10 pour 100, soit 10 167,76 $, des dépenses relatives à l’utilisation commerciale de la résidence en 2002.

Les actions d’Internetstudios.com Inc.

h)      Le coût total des actions d’InternetStudios.com Inc. (ISTO) que l’appelant a achetées et vendues en 2002 en son propre nom était de 335 158,70 $.

i)        Le produit total des actions d’ISTO que l’appelant a achetées et vendues en 2002 en son propre nom était de 936 294 $.

j)        L’appelant a prêté de l’argent à ISTO et en a payé pour le compte d’ISTO en 2002, les sommes s’étant élevées à au moins 273 543 $US (soit 429 571,93 $, selon un taux de change annuel moyen de 1,5704).

Appel no 2006-2902 (GST)I

En ce qui concerne les appels relatifs à la TPS, l’intimée a fait les concessions suivantes :

a)      Les parties ont convenu que l’appelant avait le droit de demander les crédits de taxe pour intrants suivants :

I.       pour la période de déclaration se terminant le 31 décembre1998, le montant de 6 323,99 $

II.    pour la période de déclaration se terminant le 31 décembre 1999, le montant de 7 975,51 $

III. pour la période de déclaration se terminant le 31 décembre 2000, le montant de 12 473,93 $

IV. pour la période de déclaration se terminant le 31 décembre 2001, le montant de 4 106,80 $

V.    pour la période de déclaration se terminant le 31 décembre 2002, le montant de 13 824,09 $.

b)      Les pénalités pour faute lourde imposées relativement aux périodes de déclaration se terminant le 31 décembre des années 1998 et 1999 devraient être annulées.

 

 

 


RÉFÉRENCE :                                 2012 CCI 352

 

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :       2006-2525(IT)G

                                                          2006-2902(GST)I

 

INTITULÉ :                                      GEOFFREY LAST c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

DATES DE L’AUDIENCE :            Du 24 octobre au 3 novembre 2011 et

                                                          les 30 et 31 janvier 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L’honorable juge J. M. Woods

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 9 octobre 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelant :

Me Alistair G. Campbell

Me Michelle Moriartey

 

Avocats de l’intimée :

Me Bruce Senkpiel

Me Christa Akey

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                     Alistair G. Campbell

 

                          Cabinet :                 Legacy Tax + Trust Lawyers

                                                          Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

       Pour l’intimée :                          Myles J. Kirvan

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa (Ontario)

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