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Dossier : 2010-2687(IT)G

 

ENTRE :

BRIANNE GWARTZ,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

________________________________________________________________

 

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel de Steven Gwartz (2010‑2688(IT)G), les 14 et 15 novembre 2012, à Toronto (Ontario).

 

Devant : l'honorable juge Robert J. Hogan

 

Comparutions :

 

Avocat de l'appelante :

Me Martin Sorensen

Avocates de l'intimée :

Me Brooke Sittler

Me Karen Janke‑Curliss

________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L'appel des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 2003, 2004 et 2005 est accueilli et les nouvelles cotisations sont annulées, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

          Les parties auront jusqu'au 15 mai 2013 pour parvenir à une entente sur les dépens, à défaut de quoi elles doivent déposer leurs observations écrites sur les dépens au plus tard le 31 mai 2013. Ces observations ne doivent pas dépasser cinq pages.

 

Signé à Calgary (Alberta), ce 1er jour de mai 2013.

 

 

« Robert J. Hogan »

Le juge Hogan

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 9e jour d'août 2013.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 


 

 

 

 

Dossier : 2010-2688(IT)G

 

ENTRE :

STEVEN GWARTZ,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

_______________________________________________________________

 

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel de Brianne Gwartz (2010‑2687(IT)G), les 14 et 15 novembre 2012, à Toronto (Ontario).

 

Devant : l'honorable juge Robert J. Hogan

 

 

Comparutions :

 

Avocat de l'appelant :

Me Martin Sorensen

 

Avocates de l'intimée :

Me Brooke Sittler

Me Karen Janke‑Curliss

 

________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L'appel des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 2003, 2004 et 2005 est accueilli et les nouvelles cotisations sont annulées, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

          Les parties auront jusqu'au 15 mai 2013 pour parvenir à une entente sur les dépens, à défaut de quoi elles doivent déposer leurs observations écrites sur les dépens au plus tard le 31 mai 2013. Ces observations ne doivent pas dépasser cinq pages.

 

Signé à Calgary (Alberta), ce 1er jour de mai 2013.

 

 

« Robert J. Hogan »

Le juge Hogan

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 9e jour d'août 2013.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 


 

 

 

 

Référence : 2013 CCI 86

Date : 20130501

Dossiers : 2010-2687(IT)G

2010-2688(IT)G

 

ENTRE :

BRIANNE GWARTZ,

STEVEN GWARTZ,

appelants,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Hogan

 

I.       INTRODUCTION

 

[1]             Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établi de nouvelles cotisations pour les années d'imposition 2003, 2004 et 2005 de Brianne et Steven Gwartz. Dans les nouvelles cotisations, le ministre s'est fondé sur la règle générale anti‑évitement (la « RGAÉ ») à l'article 245 de la Loi de l'impôt sur le revenu (Canada) (la « LIR ») pour requalifier à titre de dividendes certains gains en capital qui ont été réalisés par une fiducie familiale et attribués aux appelants en 2003, en 2004 et en 2005. Cela a fait en sorte que l'impôt sur le « revenu fractionné » prévu à l'article 120.4 de la LIR s'appliquait au revenu requalifié comme étant des dividendes. Les appels ont été entendus sur preuve commune.

 

[2]             Les gains en capital attribués aux appelants ont été réalisés par une fiducie familiale après que cette dernière avait vendu certaines actions d'une société de gestion qui agissait pour le compte du cabinet dentaire du père des appelants. La fiducie familiale a reçu ces actions, qui avaient un capital versé peu élevé et un prix de rachat élevé, sous la forme d'un dividende en actions versé par la société de gestion.

 

[3]             Les appelants reconnaissent l'existence d'un « avantage fiscal » et d'une « opération d'évitement »; par conséquent, l'existence d'une « opération d'évitement qui entraîne un abus » est la seule question dont la Cour est saisie. L'intimée soutient que les appelants ont contourné l'article 120.4 de manière abusive et que la RGAÉ devrait donc s'appliquer.

 

II.      LE CONTEXTE FACTUEL

 

[4]             Les parties ont déposé un exposé conjoint des faits qui est résumé ci‑dessous.

 

[5]             Monsieur Mark Gwartz, le père des appelants, est dentiste. Forest Hill Dental Management Inc. (« FHDM ») est une société de gestion qui agissait pour le compte du cabinet dentaire de M. Gwartz au cours de la période pertinente. Certaines actions de FHDM étaient détenues par la fiducie Gwartz/Ludwig Family Trust (la « fiducie »), qui a été établie en 1994 par la mère de M. Gwartz, Bernice Gwartz. Les appelants étaient, en tout temps, tous deux bénéficiaires de la fiducie, tout comme certains autres membres de la famille.

 

[6]             Avant les opérations en cause, la fiducie détenait en totalité les actions ordinaires et les actions privilégiées de catégorie C de FHDM. Le 31 décembre 2003, FHDM a émis à la fiducie 150 000 actions privilégiées d'une nouvelle catégorie, soit la catégorie D, à titre de dividende en actions versé sur les actions ordinaires détenues par la fiducie (les « actions privilégiées de catégorie D »). Les actions privilégiées de catégorie D étaient remboursables et rachetables pour un dollar, mais, conformément à la résolution de la société qui autorisait le paiement du dividende en actions, seul un dollar au total a été ajouté au compte du capital déclaré afférent à cette catégorie. Autrement dit, les actions privilégiées de catégorie D avaient un prix de rachat élevé et un capital versé peu élevé : il s'agissait d'« actions rachetables à prime ». L'effet de cette opération était de transférer une certaine valeur des actions ordinaires aux actions privilégiées de catégorie D. En conséquence, une partie du gain accumulé jusqu'alors sur les actions ordinaires détenues par la fiducie a été transférée aux actions privilégiées de catégorie D.

 

[7]             Le même jour, la fiducie a vendu 75 000 des actions privilégiées de catégorie D à M. Gwartz en échange d'un billet à ordre portant intérêt dont le capital était de 75 000 $. La fiducie a vendu ses 75 000 actions privilégiées de catégorie D restantes à M. Gwartz le 15 décembre 2004, également en échange d'un billet à ordre portant intérêt dont le capital était de 75 000 $.

 

[8]             Le 15 janvier 2005, FHDM a émis à la fiducie 150 000 autres actions privilégiées de catégorie D, qui étaient remboursables et rachetables pour un dollar, et a ajouté un dollar au total au compte du capital déclaré afférent à cette catégorie. Le 30 janvier 2005, la fiducie a vendu 75 000 des actions privilégiées de catégorie D à M. Gwartz en échange d'un billet à ordre portant intérêt dont le capital était de 75 000 $.

 

[9]             Monsieur Gwartz a par la suite vendu ses 225 000 actions privilégiées de catégorie D dans FHDM à 2062067 Ontario Inc. (« 2062067 »), une société détenue en propriété exclusive par son épouse, en échange d'un billet à ordre portant intérêt dont le capital était de 225 000 $.

 

[10]        Le 1er février 2005, FHDM a racheté les actions privilégiées de catégorie D détenues par 2062067 pour 225 000 $. Dans sa déclaration de revenus, 2062067 a déclaré un dividende réputé de 224 999 $ à l'égard de ce rachat et a déduit ce montant en vertu de l'article 112 de la LIR. 2062067 s'est servie du produit du rachat pour rembourser son billet à ordre en faveur de M. Gwartz, et ce dernier a alors utilisé les 225 000 $ pour rembourser ses billets à ordre en faveur de la fiducie (dont le principal totalisait 225 000 $).

 

[11]        Pour chacune des années d'imposition 2003, 2004 et 2005, la fiducie a déclaré un gain en capital de 74 999,50 $ sur la vente de 75 000 actions privilégiées de catégorie D dans FHDM et a attribué ces gains entièrement aux appelants. Dans les années d'imposition 2003 et 2004, ces gains en capital ont été répartis à parts égales entre les appelants, de sorte que chacun d'eux s'est vu attribuer 37 499,75 $ pour chacune des années. Dans l'année d'imposition 2005, la fiducie a attribué 24 999,83 $ à Steven et 49 999,67 $ à Brianne. Les appelants ont déclaré les gains en capital qui leur ont été attribués dans leurs déclarations de revenus.

 

[12]        Steven Gwartz a eu 17 ans en 2004. Brianne Gwartz avait moins de 17 ans pendant toute la période en cause.

 

[13]        Le ministre, invoquant la RGAÉ, a établi de nouvelles cotisations pour les appelants à l'égard des années d'imposition 2003, 2004 et 2005. Selon la lettre expliquant les nouvelles cotisations, le ministre a invoqué la RGAÉ pour imposer les gains en capital à titre de dividendes. Il en a résulté un impôt sur le « revenu fractionné », ainsi qu'il est prévu à l'article 120.4 de la LIR (communément appelé « impôt des enfants mineurs »), sur les revenus imposés à titre de dividendes.

 

III.     LES THÈSES DES PARTIES

 

A.      La thèse des appelants

 

(1)     Question de preuve : l'admissibilité des documents de l'ARC

 

[14]        Une question préliminaire a trait à deux documents internes de l'Agence du revenu du Canada (l'« ARC ») que les appelants veulent présenter en preuve. Il s'agit d'une note de service du Bureau des services fiscaux de l'ARC à Hamilton à la Section de la DGAÉ et du soutien technique de l'ARC en ce qui concerne l'applicabilité de la RGAÉ (le « renvoi au comité de la DGAÉ ») et d'un rapport sur une opposition (T401) qui a été rédigé par l'ARC à l'égard de l'avis d'opposition de Brianne Gwartz (le « T401 »). Ces deux documents sont appelés collectivement les « documents de l'ARC ». L'intimée a communiqué les documents de l'ARC au cours de l'interrogatoire préalable.

 

[15]        L'avocat des appelants soutient que les documents de l'ARC sont pertinents parce qu'ils mettent en évidence la raison pour laquelle le ministre estimait qu'il était approprié d'appliquer la RGAÉ aux opérations en cause.

 

(2)     Question de fond : l'application de la RGAÉ

 

[16]        Les appelants reconnaissent que : i) les opérations en cause constituaient une « série d'opérations » au sens du paragraphe 248(10) de la LIR; ii) cette série d'opérations a donné lieu à des « avantages fiscaux » au sens du paragraphe 245(1) de la LIR; iii) une ou plusieurs des opérations faisant partie de la série d'opérations constituaient des « opérations d'évitement » au sens du paragraphe 245(3) de la LIR. En conséquence, les arguments des appelants se limitaient à la question de savoir s'il y avait eu abus au sens du paragraphe 245(4) de la LIR.

 

[17]        Les appelants se fondent sur la démarche établie dans les arrêts Hypothèques Trustco Canada c. Canada[1] et Copthorne Holdings Ltd. c. Canada[2] à l'égard de l'application éventuelle du paragraphe 245(4). Ils soutiennent que les opérations en cause n'ont pas contrecarré l'objet ou l'esprit de l'article 120.4. L'avocat des appelants admet que les opérations en cause indiquent une planification fiscale délibérée, mais soutient qu'une telle planification n'est pas la même chose que l'évitement fiscal abusif.

 

[18]        En ce qui concerne le libellé de l'article 120.4, l'avocat fait observer que cette disposition ne s'applique qu'à certains types de personnes et de revenu. En ce qui concerne le contexte de l'article 120.4, il fait valoir que d'autres dispositions de la LIR traitent expressément du retrait des surplus des sociétés autrement qu'au moyen de dividendes. Par exemple, l'avocat invoque le paragraphe 15(1.1), qui, dans certaines circonstances, établit que la juste valeur marchande des dividendes en actions, dans des opérations comportant le paiement de dividendes en actions, doit être incluse dans le calcul du revenu. Sinon, ces opérations donneraient lieu à des montants qui seraient imposés à titre de capital. L'avocat des appelants soutient que, eu égard à ces autres règles précises dans la LIR, le fait que l'article 120.4 ne contenait pas de règle précise selon laquelle certaines opérations afférentes au capital, telles que celles qui sont en cause, étaient réputées donner lieu à des dividendes illustre une volonté délibérée du législateur de ne pas étendre la portée de l'article 120.4 aux opérations donnant lieu à des gains en capital qui ont notamment pour but ou résultat de dépouiller le surplus de la société.

 

[19]        En ce qui concerne l'objet de l'article 120.4, les appelants s'appuient sur certains documents extrinsèques et concluent aussi que le législateur a fait le choix conscient d'établir une règle bien précise qui excluait les gains en capital.

 

[20]        Les appelants font aussi valoir que la jurisprudence récente appuie leur thèse. Ils invoquent la décision McClarty Family Trust c. La Reine[3], où le juge Angers considérait que la RGAÉ ne s'appliquait pas à des opérations qui étaient (selon l'expression des appelants) [TRADUCTION] « pratiquement identiques » à celles en cause en l'espèce. Plus précisément, ils font observer que, dans des remarques incidentes, le juge Angers a estimé qu'il était inapproprié pour le ministre d'utiliser la RGAÉ pour combler les lacunes que peut avoir laissées le législateur en adoptant l'article 120.4. Les appelants citent un passage de l'arrêt Lehigh Cement Limited c. Canada, où le juge Sharlow considérait que « la Couronne ne peut s'acquitter du fardeau d'établir qu'une opération donne lieu à un abus dans l'application d'une exemption simplement en affirmant que l'opération n'était pas prévue ou qu'elle tire profit d'une lacune législative passée inaperçue jusqu'alors »[4].

 

[21]        Les appelants affirment que la LIR ne contient pas de politique globale contre le dépouillement du surplus. L'avocat des appelants soutient en outre que la LIR ne comporte pas non plus de politique globale contre le fractionnement du revenu. Il fait observer que la LIR favorise même le fractionnement du revenu dans certaines circonstances.

 

[22]        En outre, les appelants soutiennent que les opérations en cause n'étaient pas factices et n'ont pas donné lieu à de simples « pertes théoriques » (ou plutôt à des « gains théoriques »), comme dans l'arrêt Triad Gestco Ltd. c. La Reine[5]. Ils soutiennent plutôt que les opérations qui ont été effectuées reposaient sur une technique de planification fiscale bien connue permettant de faire en sorte qu'ils soient principalement imposés sur des gains en capital imposables réels plutôt que sur des dividendes imposables.

 

[23]        Enfin, les appelants affirment que les opérations en cause n'entraînent pas un abus des dispositions de la LIR. Ils soutiennent que les conséquences fiscales des opérations en cause découlent de règles très précises énoncées dans la LIR et que chacune des dispositions invoquées a été appliquée exactement comme prévu.

 

B.      La thèse de l'intimée

 

(1)     Question de preuve : l'admissibilité des documents de l'ARC

 

[24]        L'avocate de l'intimée admet que les documents de l'ARC sont authentiques. En outre, l'avocate consent à ce que le T401 soit admis en preuve à titre d'information (selon l'expression de l'avocate, [TRADUCTION] « la Cour peut l'examiner et constater qu'il s'agit du T401 »). En fait, l'avocate de l'intimée a fait référence au contenu du T401 lors de sa plaidoirie. Elle semble aussi accepter que le renvoi au comité de la DGAÉ est admissible aux termes de l'article 100 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale), parce qu'il a été communiqué au cours de l'interrogatoire préalable. Cela laisse entendre que l'intimée accepte que le renvoi au comité de la DGAÉ « est par ailleurs admissible », une condition qui doit être remplie préalablement à l'application de l'article 100.

 

[25]        La position de l'intimée semble être que les deux documents de l'ARC peuvent être admis comme preuve de l'analyse faite par le ministre avant de ratifier les nouvelles cotisations et de décider d'appliquer la RGAÉ, mais non comme preuve de la véracité de leur contenu. Néanmoins, l'avocate de l'intimée soutient aussi que les documents de l'ARC constituent du ouï‑dire, qu'ils ne sont pas pertinents, qu'ils n'ont aucune valeur probante et qu'il ne faudrait leur accorder aucun poids.

 

(2)     Question de fond : l'application de la RGAÉ

 

[26]        L'intimée reconnaît que la nouvelle cotisation concernant l'année d'imposition 2005 de Steven devrait être annulée. Steven a eu 17 ans en 2004; il n'était donc pas un « particulier déterminé », au sens de la définition donnée au paragraphe 120.4(1), au cours de l'année d'imposition 2005. En conséquence, l'intimée reconnaît que le gain en capital qui lui a été attribué cette année‑là par la fiducie ne peut pas être imposé à titre de dividende.

 

[27]        Selon la thèse de l'intimée, c'est à juste titre que le ministre a appliqué la RGAÉ parce que les opérations en cause (autres que les transactions relatives à l'année d'imposition 2005 de Steven) ont contourné l'application de l'article 120.4 de la LIR d'une façon qui allait à l'encontre de l'objet ou de l'esprit de cette disposition. L'intimée soutient que l'article 120.4 vise à empêcher le fractionnement du revenu avec des mineurs. L'avocate de l'intimée soutient, plus précisément, que l'article 120.4 cible le fractionnement du revenu avec des mineurs lorsque ces derniers reçoivent certains types de revenus qui peuvent faire l'objet de manipulations. L'avocate se fonde, pour appuyer cette affirmation, sur un rapport que le ministère des Finances a publié en même temps que le budget de 1999, dans lequel il est mentionné ce qui suit : « Les dividendes provenant d'actions cotées ne seront pas visés par ces règles, car il est moins probable que le mouvement de revenu fasse l'objet de manipulations »[6]. En outre, l'avocate fait valoir que la politique qui sous‑tend l'article 120.4 a toujours reflété les préoccupations du législateur à l'égard du fractionnement du revenu avec des mineurs lorsqu'il est question d'actions de sociétés fermées.

 

[28]        L'intimée soutient que les gains en capital n'étaient pas pris en compte dans la version initiale de l'article 120.4 parce qu'à l'époque, les gains en capital n'étaient pas considérés comme faisant partie des types de revenus que l'article 120.4 visait à imposer. L'avocate affirme que le législateur a conçu la disposition de manière à ce qu'elle s'applique aux techniques de fractionnement du revenu alors en vigueur, mais qu'il devait surveiller l'efficacité de la disposition et prendre les mesures appropriées si de nouvelles techniques voyaient le jour. L'intimée soutient que le législateur n'envisageait pas que des gains en capital « factices » seraient utilisés à des fins de fractionnement du revenu avec des mineurs. L'utilisation de gains en capital représente une évolution des méthodes de planification fiscale utilisées dans ce contexte.

 

[29]        L'avocate de l'intimée soutient aussi que les modifications apportées en 2011 à l'article 120.4, qui s'appliquent à certains gains en capital, ainsi qu'il est indiqué ci‑dessous, ne représentaient pas un changement d'orientation; les modifications traduisaient plutôt une initiative du législateur en vue de supprimer une « faille », soutient‑elle. L'avocate a comparé la situation à celle que la Cour d'appel fédérale a examinée dans l'arrêt Water's Edge Village Estates (Phase II) Ltd. c. Canada[7]. Dans cet arrêt, le juge Noël a affirmé que les modifications apportées ultérieurement démontraient que le « législateur fédéral est intervenu aussi rapidement que possible pour supprimer l'échappatoire »[8].

 

[30]        L'avocate a aussi signalé que le juge Angers, dans la décision McClarty Family Trust, avait récemment formulé des remarques sur l'applicabilité de la RGAÉ à des opérations qui ressemblent à celles dont la Cour est saisie en l'espèce[9]. Après avoir conclu que la RGAÉ ne s'appliquait pas en raison de l'absence d'une opération d'évitement, le juge Angers a déclaré ceci : « Le législateur a clairement laissé une lacune lorsqu'il a édicté l'article 120.4 de la LIR. » Il a ensuite invoqué la décision Landrus c. La Reine[10] à l'appui de l'affirmation voulant qu'il soit inapproprié d'utiliser la RGAÉ pour combler ce genre de lacune[11]. L'avocate de l'intimée soutient qu'il ne faudrait pas suivre cet aspect de la décision McClarty Family Trust, notamment parce qu'il s'agissait d'une remarque incidente. En outre, l'avocate invoque l'arrêt Copthorne (qui, précise‑t‑elle, a été rendu après l'audition de l'affaire McClarty Family Trust), dans lequel, en ce qui concerne la pertinence du principe de l'« exclusion implicite » dans le cas de la RGAÉ, le juge Rothstein a écrit :

 

[...] Lorsque le ministre invoque la RGAÉ, il admet que le texte de la loi n'englobe pas la série d'opérations en cause, mais il fait valoir que sa position, bien qu'elle ne prenne pas appui sur ce texte, est fondée sur sa raison d'être, son objet ou son esprit[12].

 

[31]        Enfin, l'intimée soutient que les opérations en cause avaient créé des gains en capital factices. Lors de l'audience, l'avocate a soutenu que ces opérations étaient aussi circulaires et factices que celles en cause dans les affaires Triad Gestco[13] et 1207192 Ontario Limited c. La Reine[14]. Selon l'avocate, les opérations ne correspondent pas à une augmentation du pouvoir économique réel; elles ont simplement produit un transfert de valeur à l'intérieur de l'unité familiale. En outre, selon l'avocate, les gains en capital reçus par les appelants ont été créés en vue de convertir les dividendes en gains en capital.

 

[32]        Les arguments de l'intimée, comme en témoignent ses observations écrites et la plaidoirie de son avocate, visaient le contournement abusif de l'article 120.4. Cependant, dans la réponse de l'intimée à l'avis d'appel de chaque appelant, il est allégué ce qui suit au paragraphe 19 :

 

[TRADUCTION]

 

Il est raisonnable de considérer que les opérations entraînent, directement ou indirectement, un abus dans l'application d'une disposition de la Loi, notamment le paragraphe 84(3) et les articles 38, 39, 40, 82, 84 et 120.4 de la Loi, ou un abus dans l'application des dispositions de la Loi lues dans leur ensemble, au sens du paragraphe 245(4) de la Loi.

 

En outre, dans sa réponse, l'intimée a soutenu que la LIR, lue dans son ensemble, vise à prévenir le retrait des surplus d'une société en franchise d'impôt ou avec une réduction d'impôt[15].

 

[33]        À l'audience, l'avocate a précisé que l'intimée n'invoquait plus l'abus du paragraphe 84(3) de la LIR ou l'existence d'un objectif global de la LIR s'opposant au dépouillement de surplus[16].

 

IV.     LA QUESTION À TRANCHER

 

[34]        La question est de savoir si l'article 245 de la LIR s'applique de façon à permettre la nouvelle qualification, à titre de revenu de dividendes, des gains en capital que la fiducie a attribués à Brianne dans les années d'imposition 2003, 2004 et 2005 et à Steven dans les années d'imposition 2003 et 2004 (les « gains en capital pertinents »). Ainsi qu'il est indiqué ci‑dessus, les appelants reconnaissent l'existence d'« avantages fiscaux » au sens du paragraphe 245(1) et d'« opérations d'évitement » au sens du paragraphe 245(3). Les conditions d'application de la RGAÉ dépendent donc de la question de savoir s'il y a eu « abus » pour l'application du paragraphe 245(4).

 

V.      AnalysE

 

A.      Question de preuve : l'admissibilité des documents de l'ARC

 

[35]        Lors de l'audience, j'ai remis le prononcé de ma décision sur l'admissibilité des documents de l'ARC et sur l'importance qu'il faut y accorder. Ainsi qu'il a été mentionné, il s'agit d'une note de service à la Section de la DGAÉ et du soutien technique de l'ARC en ce qui concerne l'applicabilité de la RGAÉ et d'un rapport sur une opposition (T401) qui a été rédigé par l'ARC à l'égard de l'avis d'opposition de Brianne Gwartz. Chacun des documents de l'ARC comprend essentiellement une description des faits litigieux ainsi qu'une analyse de la RGAÉ et de son applicabilité. Le T401 aborde en outre la façon dont les opérations en cause doivent être traitées conformément aux positions administratives de l'ARC.

 

[36]        Ainsi qu'il est indiqué précédemment, l'avocate de l'intimée consent, semble‑t‑il, à admettre chacun des documents de l'ARC à titre d'information, mais elle soutient qu'ils constituent du ouï‑dire, qu'ils ne sont pas pertinents, qu'ils n'ont aucune valeur probante et qu'il ne faudrait leur accorder aucun poids[17].

 

[37]        Les éléments de preuve qui ne sont pas pertinents pour les questions en litige, comme elles ont été présentées dans les actes de procédure, sont inadmissibles[18]. En l'espèce, les parties se sont entendues sur tous les faits importants. En outre, les hypothèses formulées par le ministre au moment d'établir les nouvelles cotisations des appelants ne sont pas en cause. Par conséquent, les documents de l'ARC ne sont pas pertinents.

 

B.      Question de fond : l'application de la RGAÉ

 

(1)     La démarche en trois étapes tirée de l'arrêt Hypothèques Trustco

 

[38]        Dans l'arrêt Hypothèques Trustco[19], la Cour suprême a établi une démarche en trois étapes pour déterminer si la RGAÉ s'applique à une opération ou à une série d'opérations. Cette démarche a été reprise par la Cour suprême dans les arrêts Mathew c. Canada[20], Lipson c. Canada[21] et Copthorne[22].

 

[39]        Dans cette démarche, la première étape consiste à déterminer s'il existe un « avantage fiscal » au sens du paragraphe 245(1)[23]. Pour qu'il y ait un avantage fiscal, une opération, ou une série d'opérations dont l'opération fait partie, doit aboutir à une « [r]éduction, [un] évitement ou [un] report d'impôt ou d'un autre montant exigible » en application de la LIR ou de toute autre source pertinente de droit fiscal, ou encore à une « augmentation d'un remboursement d'impôt ou d'un autre montant » visé par la LIR ou par une autre source pertinente de droit fiscal. En l'espèce, les appelants reconnaissent l'existence d'un avantage fiscal. Il y a eu un débat à l'audience quant à la nature de l'avantage fiscal admis par les appelants — la question était de savoir si celui‑ci résultait de l'évitement de l'impôt exigible en vertu de l'article 120.4, des taux d'imposition marginaux relativement faibles des appelants ou du fait que les appelants ont reçu des gains en capital plutôt qu'un revenu — mais la réponse est finalement sans importance puisque l'existence de l'avantage a été reconnue.

 

[40]        Selon la deuxième étape de la démarche établie dans l'arrêt Hypothèques Trustco, l'opération qui génère l'avantage fiscal doit être une « opération d'évitement » au sens du paragraphe 245(3)[24]. En l'espèce, les appelants admettent l'existence d'une opération d'évitement.

 

[41]        Les appels dépendent donc de l'issue de la troisième étape de la démarche établie dans l'arrêt Hypothèques Trustco, soit que l'opération d'évitement qui génère un avantage fiscal doit être abusive aux termes du paragraphe 245(4)[25]. Selon cette démarche, pour faire l'analyse relative à l'abus, il faut d'abord interpréter les dispositions pertinentes de la LIR afin d'établir leur objet et leur esprit et, ensuite, déterminer si les opérations contestées sont conformes à l'objet de ces dispositions ou le contrecarrent[26]. Ainsi qu'il est expliqué dans l'arrêt Copthorne :

 

69        Pour conclure au caractère abusif d'une opération, la cour doit d'abord déterminer « l'objet ou l'esprit des dispositions [...] qui sont invoquées pour obtenir l'avantage fiscal, eu égard à l'économie de la Loi, aux dispositions pertinentes et aux moyens extrinsèques admissibles » (Trustco, par. 55). Un auteur assimile cet objet ou cet esprit à la [TRADUCTION] « raison d'être qui sous‑tend des dispositions particulières ou interdépendantes de la Loi » (V. Krishna, The Fundamentals of Income Tax Law (2009), p. 818).

 

70        L'objet ou l'esprit peuvent être circonscrits grâce à la méthode qu'emploie notre Cour pour toute interprétation législative, à savoir une méthode « textuelle, contextuelle et téléologique unifiée » (Trustco, par. 47; Lipson c. Canada, 2009 CSC 1, [2009] 1 R.C.S. 3, par. 26). Bien que la méthode d'interprétation soit la même dans le cas de la RGAÉ, l'analyse vise en l'espèce à dégager un aspect différent de la loi. Dans un cas classique d'interprétation législative, la cour applique l'analyse textuelle, contextuelle et téléologique pour établir le sens du texte de la loi. Dans le cas de la RGAÉ, l'analyse textuelle, contextuelle et téléologique vise à établir l'objet ou l'esprit d'une disposition. Il est alors possible que le sens des mots employés par le législateur soit suffisamment clair. La raison d'être de la disposition peut ne pas ressortir de la seule signification des mots eux‑mêmes. Il ne faut cependant pas confondre la détermination de la raison d'être des dispositions applicables de la Loi avec le jugement de valeur quant à ce qui est bien ou mal non plus qu'avec les conjectures sur ce que devrait être une loi fiscale ou sur l'effet qu'elle devrait avoir.

 

[42]        Un mécanisme est abusif s'il contourne l'application de certaines dispositions, comme des règles anti‑évitement particulières, d'une manière contraire à l'objet ou à l'esprit de ces dispositions[27].

 

[43]        L'existence d'un évitement fiscal abusif doit être évidente. Si ce n'est pas le cas, il faut laisser le bénéfice du doute au contribuable. Par ailleurs, il incombe au ministre de prouver qu'il y a eu un évitement fiscal abusif[28].

 

[44]        Avant de procéder à l'analyse en deux étapes préconisée dans l'arrêt Hypothèques Trustco relativement à l'évitement fiscal abusif, j'examinerai certains principes relatifs à : (i) la planification fiscale en général; (ii) la pertinence d'utiliser la RGAÉ comme mesure visant à combler les lacunes; (iii) l'existence d'une politique générale dans la LIR relativement au dépouillement du surplus; (iv) l'existence d'une politique générale dans la LIR relativement au fractionnement du revenu; (v) l'importance lors d'une analyse de la RGAÉ des modifications ultérieures apportées à la disposition qui aurait fait l'objet d'un abus. Tous ces éléments ont une incidence directe sur l'analyse de la RGAÉ en l'espèce.

 

(2)     La planification fiscale n'est pas abusive en soi

 

[45]        Les arrêts Hypothèques Trustco et Copthorne réaffirment le principe selon lequel la planification fiscale n'est pas en soi abusive pour l'application du paragraphe 245(4). Dans l'arrêt Hypothèques Trustco, la Cour suprême a déclaré ce qui suit :

 

61        Une interprétation correcte du libellé des dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu ainsi que le contexte factuel pertinent d'une affaire donnée permettent d'établir un équilibre entre la nécessité de prévenir l'évitement fiscal abusif et celle de maintenir la certitude, la prévisibilité et l'équité en droit fiscal afin que les contribuables puissent organiser leurs affaires en conséquence. Le législateur souhaite que les contribuables profitent pleinement des dispositions de la Loi qui confèrent des avantages fiscaux. Il n'a pas voulu que la RGAÉ mine ce précepte fondamental du droit fiscal.

 

De même, dans l'arrêt Copthorne, la Cour suprême a affirmé que « le contribuable peut opter pour les avenues ou les opérations qui sont propres à réduire son obligation fiscale »[29].

 

[46]        En conséquence, le contribuable qui opte pour une avenue réduisant son obligation fiscale ne se livre pas nécessairement à un évitement fiscal abusif pour l'application du paragraphe 245(4).

 

(3)     Les lacunes et la RGAÉ

 

[47]        On ne peut conclure qu'il y a évitement fiscal abusif si on reproche seulement au contribuable d'avoir fait abus d'une politique générale non fondée sur les dispositions de la LIR. Voici les propos tenus par la Cour suprême dans l'arrêt Canada Trustco :

 

41        Les tribunaux ne peuvent chercher une politique prépondérante de la Loi qui n'est pas fondée sur une interprétation textuelle, contextuelle et téléologique unifiée des dispositions en cause. Premièrement, une telle recherche est incompatible avec le rôle du juge qui effectue un contrôle. La Loi de l'impôt sur le revenu est un recueil de dispositions très détaillées et souvent complexes. Demander aux tribunaux de chercher une politique globale quelconque pour ensuite se servir de cette politique pour passer outre au libellé des dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu reviendrait à confier indûment à l'appareil judiciaire l'établissement de politiques fiscales, et à demander aux juges d'accomplir une tâche à laquelle ils ne sont pas habitués et qu'ils ne sont pas en mesure d'accomplir. Le législateur a‑t‑il voulu que les juges établissent des politiques fiscales non fondées sur les dispositions de la Loi et qu'ils s'en servent pour passer outre aux dispositions précises de la Loi? Malgré les problèmes d'interprétation que pose la RGAÉ, nous ne voyons aucune raison de conclure que le législateur a voulu s'écarter à ce point des normes de justice et d'interprétation.

 

42        Deuxièmement, la recherche d'une politique prépondérante de la Loi de l'impôt sur le revenu qui n'est pas fondée sur une interprétation textuelle, contextuelle et téléologique des dispositions invoquées pour obtenir l'avantage fiscal irait à l'encontre de la politique globale du législateur voulant que le droit fiscal soit certain, prévisible et équitable afin que le contribuable puisse organiser intelligemment ses affaires. Bien qu'en édictant la RGAÉ, le législateur ait eu pour objectif général de maintenir les mécanismes de réduction maximale légitime de l'impôt, tout en interdisant l'évitement fiscal abusif, il faut également considérer qu'il recherche l'uniformité, la prévisibilité et l'équité en matière de droit fiscal. Ces trois derniers objectifs seraient contrecarrés si le ministre et les tribunaux, ou l'un ou l'autre de ceux‑ci, passaient outre aux dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu sans se fonder sur une interprétation textuelle, contextuelle et téléologique de ces dispositions.

 

Selon un principe connexe, il est inapproprié, si les opérations ne sont pas par ailleurs contraires à l'objet et à l'esprit des dispositions de la LIR, d'appliquer la RGAÉ pour supprimer un avantage fiscal résultant du fait qu'un contribuable a exploité une lacune légale passée inaperçue jusqu'alors. Ce principe est illustré dans l'arrêt Lehigh Cement[30] de la Cour d'appel fédérale. La Cour canadienne de l'impôt avait rejeté l'appel interjeté par le contribuable au sujet de l'application de la RGAÉ. Le juge Sharlow, de la Cour d'appel fédérale, a énoncé ce qui suit en concluant que la RGAÉ ne s'appliquait pas :

 

37        Lorsque le législateur ajoute une exemption à la Loi de l'impôt sur le revenu, même une exemption aussi détaillée et précise que celle du sous‑alinéa 212(1)b)(vii), il ne peut décrire toutes les opérations, qu'elles relèvent ou non du champ d'application de ladite exemption. Il est donc possible qu'une opération donne lieu à un abus dans l'application d'une exemption législative comprenant un critère ou plusieurs critères évident(s) comme, en l'espèce, le critère d'une relation sans lien de dépendance et celui des cinq années. Cependant, le fait qu'une exemption soit invoquée d'une façon qui n'avait pas été prévue ou d'une façon novatrice, comme c'était peut-être le cas en l'espèce, ne signifie pas nécessairement qu'il y a eu abus dans l'application de l'exemption. Il s'ensuit que la Couronne ne peut s'acquitter du fardeau d'établir qu'une opération donne lieu à un abus dans l'application d'une exemption simplement en affirmant que l'opération n'était pas prévue ou qu'elle tire profit d'une lacune législative passée inaperçue jusqu'alors. Selon mon interprétation de l'arrêt Hypothèques Trustco, la Couronne doit établir par des éléments de preuve et des arguments motivés que le résultat de l'opération en cause n'est pas conforme à l'objet de l'exemption, à partir d'une interprétation textuelle, contextuelle et téléologique de l'exemption.

 

[48]        Mon collègue le juge Paris a adopté un point de vue similaire dans Landrus :

 

124      Le ministre utilise donc la RGAE en l'espèce en vue de combler les lacunes laissées par le législateur au paragraphe 85(5.1). Il s'agit d'une utilisation inappropriée de la RGAE, comme l'a fait remarquer le juge en chef adjoint Bowman dans la décision Geransky v. The Queen :

 

[...] La Loi de l'impôt sur le revenu est remarquable par sa particularisation et regorge de dispositions anti‑évitement conçues pour contrecarrer tout abus particulier perçu. Lorsque le contribuable applique ces dispositions et réussit à éviter les pièges, le ministre ne peut lui dire : « Parce que vous avez su éviter les écueils et les obstacles de la Loi et que vous n'avez pas effectué votre opération commerciale de manière à payer le maximum d'impôt, je vais invoquer la RGAE pour éviter toute échappatoire que n'aurait pas prévue la multitude de dispositions anti‑évitement particulières »[31].

 

(4)     La LIR comporte‑t‑elle une politique s'opposant au dépouillement du surplus?

 

[49]        Le dépouillement du surplus consiste à retirer le surplus d'une société par un moyen autre qu'un dividende, généralement au moyen d'un gain en capital. Par exemple, au lieu de faire en sorte qu'une société distribue ses bénéfices non répartis sous forme de dividende, un actionnaire peut vendre des actions du capital‑actions de la société à une société liée. Une telle opération serait avantageuse si le gain en capital qui en résulte était assujetti à un taux d'imposition moins élevé que ne l'aurait été le dividende. Le dépouillement du surplus est [TRADUCTION] « l'une des sources de conflits les plus anciennes et les plus persistantes entre les contribuables et les percepteurs d'impôt »[32].

 

[50]        Les tribunaux ont jugé que le dépouillement du surplus ne constitue pas en soi un évitement fiscal abusif. Dans la décision Collins & Aikman Products Co. c. La Reine, le juge Boyle a écrit ce qui suit :

 

77        Dans la même veine, dans la décision Copthorne Holdings Ltd. c. The Queen, 2007 DTC 1230, la juge Campbell a dit ce qui suit au paragraphe 73 :

 

La Loi renferme de nombreuses dispositions qui visent à empêcher le dépouillement du surplus, mais l'analyse fondée sur le paragraphe 245(4) doit être fermement axée sur une interprétation textuelle, contextuelle et téléologique unifiée des dispositions pertinentes. Cela étant, il ne convient pas de se fonder sur une politique générale empêchant le dépouillement du surplus pour établir un évitement fiscal abusif.

 

78        Dans le même ordre d'idées, la juge Lamarre a dit ce qui suit au paragraphe 56 de la décision McMullen v. The Queen, 2007 DTC 286 :

 

En conclusion, l'intimée n'a pas réussi à me convaincre ou n'a pas présenté de preuve établissant qu'il y a eu abus de la Loi, si elle est lue dans son ensemble, ou que la politique de la Loi, si elle est lue dans son ensemble, vise nécessairement à imposer entre les mains des actionnaires les sommes distribuées par les sociétés au titre de dividendes. Quoi qu'il en soit, comme la Cour suprême du Canada l'a dit, « [s]'il n'est pas certain qu'il y a eu évitement fiscal abusif, il faut laisser le bénéfice du doute au contribuable » [...]

 

79        Les remarques du juge en chef Bowman, de la juge Campbell et de la juge Lamarre s'appliquent également en l'espèce[33].

 

De même, dans l'arrêt Copthorne, le juge Rothstein a conclu que, pour déterminer s'il y a eu évitement fiscal abusif, « [c]e qui n'est pas permis, c'est de conclure à l'abus sur le fondement d'un énoncé de principe général — contre le dépouillement de surplus, par exemple — qui n'a aucun lien avec les dispositions en cause »[34].

 

[51]        Il convient également de noter que l'intimée a décidé d'abandonner la thèse soulevée dans les réponses aux avis d'appel voulant que les appelants contrevenaient à une politique de la LIR interdisant le dépouillement de surplus.

 

(5)     La LIR comporte‑t‑elle une politique interdisant le fractionnement du revenu?

 

[52]        La LIR prévoit le prélèvement d'un impôt sur le revenu des particuliers à des taux marginaux d'imposition qui augmentent à mesure que le revenu imposable augmente. Contrairement au régime d'impôt sur le revenu des particuliers des États‑Unis, où les couples mariés peuvent produire des déclarations conjointes, le régime d'impôt sur le revenu du Canada exige que les membres d'un couple et leurs enfants produisent chacun une déclaration de revenus des particuliers où l'obligation fiscale de chaque membre de la famille dépend généralement de la situation de ce membre[35]. Les taux d'imposition marginaux croissants et le choix du particulier en tant qu'unité de base imposable incitent les contribuables à fractionner leur revenu avec les membres de leur famille.

 

[53]        En ce qui concerne l'existence d'une politique interdisant le fractionnement du revenu, la Cour suprême du Canada a affirmé ce qui suit dans l'arrêt Neuman c. M.R.N. :

 

[...] le par. 56(2) vise à empêcher l'évitement fiscal au moyen du fractionnement du revenu; il s'agit cependant d'une disposition particulière relative à l'évitement fiscal, et non d'une disposition générale interdisant le fractionnement du revenu. En fait, dans la LIR, [TRADUCTION] « aucun mécanisme général n'empêche le fractionnement du revenu » (V. Krishna et J. A. Van Duzer, « Corporate Share Capital Structures and Income Splitting: McClurg v. Canada » (1992‑93), 21 Can. Bus. L.J. 335, à la p. 367). Le paragraphe 56(2) ne peut s'appliquer pour empêcher le fractionnement du revenu que lorsque les quatre conditions préalables à son application sont précisément remplies.

 

Deuxièmement, la présente affaire concerne un revenu touché par Ruby Neuman au cours de l'année d'imposition 1982, à l'époque où la LIR ne comportait aucune ligne directrice particulière concernant les structures de société conçues pour fractionner un revenu et réduire au minimum l'imposition. Dans un article intitulé « Share Capital Structure of Closely‑Held Private Corporations » (1996), 7 Can. Curr. Tax 7, à la p. 9, le professeur V. Krishna a fait le commentaire suivant au sujet du fractionnement du revenu dans le contexte d'une société :

 

[TRADUCTION] Sauf lorsqu'il est expressément restreint par la Loi de l'impôt sur le revenu (par exemple, par les règles d'attribution), le fractionnement du revenu comme tel n'est pas sanctionné. Ainsi, les structures de société qui facilitent le fractionnement du revenu de compagnies privées ne devraient pas être pénalisées en l'absence d'un texte et d'une intention clairs du législateur. [Je souligne[36].]

 

Bien que l'arrêt Neuman précède l'adoption du paragraphe 120.4, l'existence d'une politique générale dans la LIR interdisant le fractionnement du revenu et reposant sur des dispositions particulières de la LIR autres que le paragraphe 120.4 n'a pas été reconnue.

 

(6)     La pertinence des modifications ultérieures

 

[54]        Les tribunaux ont adopté des approches différentes lorsqu'ils se sont penchés sur la pertinence des modifications ultérieures comme indicateur de la politique sous-tendant les versions précédentes d'une disposition. Dans l'arrêt Water's Edge[37], la Cour d'appel fédérale a rejeté l'argument des appelants selon lequel l'adoption d'une modification ultérieure confirmait que la RGAÉ ne s'appliquait pas auparavant :

 

46        L'avocat des appelants invoque le paragraphe 96(8) qui a par la suite été inséré dans la Loi [...] pour soutenir que les opérations en cause ne contreviennent à aucune règle ou politique non écrite. Le paragraphe 96(8) a été ajouté à la Loi par L.C. 1994 ch. 21 [...], avec effet rétroactif au 21 décembre 1992. L'alinéa 96(8)a) s'applique directement au cas qui nous occupe. Il fait explicitement échec au résultat que les appelants ont obtenu en l'espèce en déclarant que le coût d'acquisition des biens amortissables détenus par une société de personnes étrangère pour le résident canadien qui devient l'associé de cette société correspond au moins élevé de sa juste valeur marchande ou de son coût en capital calculé selon les règles habituelles.

 

47        L'avocat des appelants affirme que l'insertion après coup du paragraphe 96(8) démontre de façon non équivoque que les opérations en litige n'allaient pas à l'encontre de l'objet et de l'esprit de la Loi au moment où elles ont été effectuées. Je crois plutôt que ces modifications démontrent que le législateur fédéral est intervenu aussi rapidement que possible pour supprimer l'échappatoire que les appelants avaient exploitée précisément en raison du fait que le résultat obtenu constituait une anomalie, compte tenu de l'objet et de l'esprit des dispositions applicables de la Loi.

 

Au bout du compte, la Cour d'appel fédérale a confirmé la décision de la Cour canadienne de l'impôt, à savoir que les pertes déduites par les appelants avaient été refusées à juste titre par suite de l'application de la RGAÉ.

 

[55]        Par contre, l'une des questions en litige dans les arrêts Triad Gestco et 1207192 avait trait à la thèse du ministre selon laquelle les règles anti‑évitement du sous-alinéa 40(2)g)(i) avaient été contournées de façon abusive[38]. Ce sous‑alinéa est une règle concernant la « limitation des pertes » qui peut être appliquée pour refuser une perte en capital qui résulte d'une opération entre « personnes affiliées ». La définition de « personnes affiliées » à l'article 251.1 a été modifiée, la modification ayant pris effet après que les opérations contestées ont eu lieu. Voici ce que le juge Noël a écrit dans l'arrêt Triad Gestco :

 

56        J'estime, comme le juge Paris, essentiellement pour les mêmes motifs que lui, que la lecture des dispositions pertinentes ne démontre pas l'existence de la politique dégagée par le juge de la CCI. Lorsque le législateur a introduit la notion de « personnes affilées » en 1995, il devait être conscient de la possibilité d'un recours aux fiducies pour échapper à l'application du sous‑alinéa 40(2)g)(i) et du paragraphe 40(3.4). Il est donc raisonnable d'inférer que le législateur a fait le choix délibéré de ne pas inclure les fiducies dans la définition. On ne peut par ailleurs déduire de la décision prise par le législateur de modifier la politique par l'ajout de manière prospective des fiducies, en 2005, l'existence avant cette modification d'une politique allant déjà en ce sens (voir l'affaire Water's Edge Village Estates (Phase II) Ltd. c. Canada, 2002 CAF 291, [2003] 2 C.F. 25, par. 47, où on a plutôt statué qu'une modification était pertinente parce qu'on l'avait adoptée afin de supprimer une échappatoire flagrante).

 

[Non souligné dans l'original.]

 

[56]        Le juge Paris, dans les motifs qu'il a prononcés dans la décision 1207192 et auxquels a fait renvoi le juge Noël dans l'arrêt Triad Gestco, a écrit :

 

76        La définition de l'expression « personnes affiliées » à l'article 251.1, tel qu'il était libellé au cours de l'année en question, fait mention d'un ensemble minutieusement formulé de relations, et je crois qu'il est raisonnable de déduire que le législateur a décidé de restreindre la portée de la définition.

 

[...]

 

78        Dans la décision Landrus, j'ai cependant conclu que les modifications « ne change[aient] rien au fait que les règles de minimisation des pertes sont des exceptions qui s'appliquent dans des cas bien précis » et que, même une fois effectuées, ces modifications n'entraînaient pas, dans tous les cas, le rejet de pertes résultant de transferts entre des personnes liées. Par conséquent, les modifications n'étaient pas importantes lorsqu'il s'agissait de déterminer la politique sous-tendant les règles de minimisation des pertes qui était en vigueur au cours de l'année visée par l'appel[39].

 

[57]        Ces décisions démontrent qu'une modification apportée ultérieurement, qui aurait fait échec à une stratégie d'évitement fiscal contestée au titre de la RGAÉ, n'indique pas en soi si la stratégie était abusive ou non. Il faut plutôt examiner la modification apportée ultérieurement en même temps que tous les autres documents pertinents pour déterminer l'objet et l'esprit de la disposition. Dans certaines circonstances, une modification ultérieure pourrait sembler indiquer que la stratégie d'évitement fiscal avait contrecarré l'objet et l'esprit de la disposition. Dans d'autres circonstances, elle pourrait sembler indiquer que le législateur s'est tout simplement ravisé et qu'il a désormais l'intention d'empêcher quelque chose qui n'était pas au départ censé être visé par la disposition.

 

(7)     Les opérations contestées contrecarrent‑elles l'esprit et l'objet de l'article 120.4?

 

(a)     Le libellé de l'article 120.4

 

[58]        Bien que le libellé de l'article 120.4 ne s'applique pas aux opérations en cause, il peut faire la lumière sur l'intention qui sous‑tend cette disposition.

 

[59]        En comparaison avec d'autres dispositions de la LIR, le libellé de l'article 120.4 est remarquable par sa brièveté et simplicité relatives. En général, le fait qu'il s'applique ou non à une opération est facile à constater. Par exemple, il est facile d'établir si une personne est un particulier déterminé ou si certains revenus de dividendes reçus directement par un particulier déterminé sont un revenu fractionné. Ces facteurs semblent indiquer que le législateur, en adoptant l'article 120.4, a voulu atténuer la complexité de la disposition et rassurer les contribuables quant à l'application de celle‑ci.

 

(b)     Le contexte de l'article 120.4

 

[60]        Certaines dispositions de la LIR visent à éliminer les avantages fiscaux qui peuvent être obtenus à l'aide de certaines techniques de fractionnement du revenu. Par exemple, les règles d'attribution énoncées aux paragraphes 74.1(1) et (2) de la LIR peuvent servir à annuler les avantages fiscaux découlant du transfert d'actifs générateurs de revenus à un membre de la famille. Comme le signale l'intimée, des mesures analogues remontent à la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu de 1917[40]. De même, les paragraphes 56(2) à (4) servent à réglementer certaines opérations par lesquelles un revenu est transféré d'une personne donnée à son conjoint.

 

[61]        Toutefois, d'autres dispositions de la LIR encouragent ou facilitent ce qui peut constituer un fractionnement du revenu. Par exemple, en vertu du paragraphe 146(5.1), un contribuable a droit à une déduction au titre d'une cotisation versée au régime enregistré d'épargne‑retraite du conjoint. De même, en vertu des paragraphes 146.1(5) et (6), le revenu tiré du régime enregistré d'épargne‑études d'un enfant peut généralement être attribué à l'enfant ou au souscripteur. En outre, un contribuable peut en général transférer un bien en immobilisation à son conjoint avec un report d'impôt en vertu du paragraphe 73(1) (même si tout revenu tiré du bien ou tout gain en capital qui en résulte est généralement attribué à l'auteur du transfert conformément à l'article 74.1 ou 74.2).

 

[62]        Une autre caractéristique contextuelle pertinente de la LIR a trait au dépouillement du surplus et aux dispositions de la LIR qui traitent de celui‑ci. Plusieurs dispositions de la LIR peuvent servir à éliminer les avantages fiscaux de certaines opérations de dépouillement du surplus. Les appelants invoquent les articles 84 et 84.1 de la LIR, en vertu desquels certaines opérations, qui pourraient ne pas être considérées comme des opérations sur dividendes en vertu du droit des sociétés, sont réputées avoir donné lieu à des dividendes pour l'application de la LIR. Par exemple, en vertu du paragraphe 84(3), en règle générale, une société est réputée avoir versé un dividende lorsque la société a racheté, acquis ou annulé une partie des actions de son capital‑actions et que le montant payé par la société a dépassé le capital versé des actions rachetées, acquises ou annulées.

 

[63]        De même, l'article 84.1 vise à empêcher le dépouillement des surplus des sociétés lorsque des actions sont vendues à des personnes ayant un lien de dépendance au moyen d'opérations qui s'apparentent à celles qui sont examinées en l'espèce. En termes très généraux, l'article 84.1 empêche les particuliers de dépouiller les surplus des sociétés, notamment en déclenchant la réalisation de gains en capital à l'égard desquels une exemption est demandée en vertu de l'article 110.6. Le montant du surplus de la société dépouillé directement ou indirectement par une partie ayant un lien de dépendance au moyen de l'exemption pour gains en capital est réputé être un dividende. Par exemple, si les actions ordinaires de FHDM étaient des actions admissibles de petite entreprise parce qu'il s'agissait d'actions d'une société exploitant une petite entreprise au sens de la LIR, l'article 84.1 aurait pu s'appliquer si la fiducie avait vendu des actions ordinaires et que les appelants avaient eu le droit de demander et avaient bel et bien demandé une exemption pour gains en capital en vertu de l'article 110.6 à l'égard des gains en capital qui leur avaient été attribués.

 

[64]        L'article 212.1 de la LIR s'applique de manière analogue lorsqu'un non‑résident du Canada cherche à dépouiller les surplus d'une société, notamment en déclenchant directement ou indirectement la réalisation d'un gain en capital qui est, dans la plupart des cas, exonéré d'impôt en raison d'une convention fiscale applicable.

 

[65]        Le fait que certaines dispositions anti‑évitement aient été adoptées bien avant l'adoption de l'article 120.4 m'incite à croire que le législateur était bien conscient du fait que les contribuables pouvaient s'organiser pour distribuer les surplus des sociétés sous forme de dividendes imposables ou de gains en capital, sous réserve de l'application des dispositions anti-évitement en question. Le fait que ces dispositions n'ont pas été modifiées et qu'aucune règle précise ne figurait à l'article 120.4 pour freiner le recours à des techniques bien connues m'incite à croire que le législateur a privilégié la simplicité quand il a adopté l'article 120.4. Cela va à l'encontre d'une conclusion selon laquelle l'article 120.4 traduit l'existence d'une politique générale dans la LIR qui interdit le dépouillement de surplus effectué avec l'aide de parties ayant un lien de dépendance.

 

[66]        Les appelants invoquent également l'article 15 de la LIR, en vertu duquel certaines transactions en capital entre une société et un actionnaire (c.‑à‑d. les avantages prévus à l'article 15) sont réputées être à titre de revenu. Par exemple, le paragraphe 15(1.1) peut faire qu'un actionnaire doive inclure dans son revenu un montant égal à la juste valeur marchande d'un dividende en actions dans les cas où « il est raisonnable de considérer qu'un des motifs du versement [d'un dividende en actions] est de modifier de façon sensible la valeur de la participation d'un actionnaire déterminé de la société ». Certains avantages prévus à l'article 15 sont expressément visés par la définition de « revenu fractionné » donnée au paragraphe 120.4(1). Je présume que l'intimée n'a pas invoqué cette disposition en l'espèce parce que la valeur a été transférée des actions détenues par la fiducie à d'autres actions détenues par celle‑ci plutôt que d'un contribuable à un autre.

 

[67]        Le contexte de l'article 120.4 démontre que le législateur a mis en place de nombreuses mesures dans la LIR en vue de réduire l'efficacité du dépouillement de surplus. Cela s'oppose à l'argument de l'intimée selon lequel le législateur n'avait pas prévu le recours à des opérations donnant lieu à des gains en capital pour dépouiller les surplus des sociétés lorsqu'il a adopté l'article 120.4. L'existence des mesures précises susmentionnées porte à croire que, lorsqu'il a adopté l'article 120.4, le législateur était bien au fait de la pratique.

 

(i)      Le budget de 1999 et les renseignements supplémentaires

 

[68]        Il est bien établi que les documents budgétaires sont des documents extrinsèques à prendre en considération lorsque la Cour entreprend une interprétation téléologique d'une disposition de la LIR[41]. En l'espèce, certains documents extrinsèques sont pertinents. En 1999, le ministère des Finances a publié un document intitulé Le plan budgétaire de 1999 : Comprend les renseignements supplémentaires et les Avis de motion de voies et moyens (16 février 1999) (le « plan budgétaire de 1999 ») qui contenait le commentaire suivant sur la version préliminaire du l'article 120.4 :

 

Pour accroître l'équité et l'intégrité du régime fiscal canadien, le présent budget propose une mesure ciblée visant à décourager le fractionnement du revenu avec des enfants mineurs. Cette nouvelle mesure constitue un impôt spécial, au taux marginal le plus élevé plutôt qu'aux taux progressifs normaux, appliqué au revenu de certains particuliers de 17 ans ou moins. [...]

 

Le revenu ne provenant pas de dividendes, de sociétés de personnes ou de fiducies n'est pas visé par la nouvelle mesure. Ainsi, le revenu que des enfants mineurs tirent d'un emploi ou de services personnels offerts ne sera pas assujetti à cette mesure. Les dividendes provenant d'actions cotées ne seront pas visés par ces règles, car il est moins probable que le mouvement de revenu fasse l'objet de manipulations. En outre, le revenu découlant de biens acquis au décès du père ou de la mère du particulier sera exonéré, tout comme le revenu tiré d'un bien dont a hérité un particulier admissible au crédit d'impôt pour personnes ayant une déficience ou dont a hérité un particulier inscrit à plein temps dans un établissement d'enseignement postsecondaire. Les particuliers dont ni le père ni la mère ne résident au Canada aux fins de l'impôt seront également exonérés.

 

La portée de cette nouvelle mesure est restreinte; elle vise à contrer les structures mises en place principalement pour faciliter le fractionnement du revenu avec des enfants mineurs. Le gouvernement surveillera l'efficacité de cette mesure ciblée et pourrait appliquer les correctifs pertinents si de nouvelles techniques de fractionnement du revenu étaient mises au point[42].

 

[69]        L'intimée cite ces commentaires tirés du plan budgétaire de 1999 à l'appui de la thèse selon laquelle le législateur visait à ce que l'article 120.4 empêche le fractionnement du revenu obtenu par l'utilisation de formes de revenu pouvant faire l'objet de manipulations. L'intimée s'appuie sur le fait que le ministère des Finances affirme que les dividendes provenant d'actions cotées seront exclus de l'impôt sur le revenu fractionné parce qu'il est moins probable qu'ils fassent l'objet de manipulations. Cependant, le fait qu'il puisse avoir exclu certains types de revenus parce qu'il est moins probable qu'ils fassent l'objet de manipulations ne veut pas dire qu'il avait l'intention d'inclure toutes les formes de revenu qui pourraient faire l'objet de manipulations. Par ailleurs, selon les commentaires formulés dans le plan budgétaire de 1999, lorsqu'il a adopté l'article 120.4, le législateur ne visait pas à ce que ce soit une disposition générale traitant de tous les types de fractionnement du revenu avec des mineurs. Le ministère des Finances a déclaré que la mesure proposée ne s'appliquerait qu'au revenu provenant de dividendes, de sociétés de personnes ou de fiducies et a attiré l'attention sur le fait que la portée de la disposition est « restreinte » et « ciblée ».

 

(ii)     Les modifications apportées ultérieurement à l'article 120.4

 

[70]        Ainsi qu'il est expliqué ci-dessus, les modifications apportées ultérieurement à une disposition peuvent, dans certaines circonstances, être une considération pertinente lorsqu'il s'agit d'examiner la politique qui sous‑tend l'ancienne version de la disposition.

 

[71]        En 2011, l'article 120.4 a été modifié de façon à ajouter les nouveaux paragraphes 120.4(4) et (5) qui s'appliquent aux dispositions effectuées après le 21 mars 2011. En termes généraux, en vertu de ces nouveaux paragraphes, un particulier déterminé qui a reçu certains gains en capital, directement ou par l'intermédiaire d'une fiducie, est réputé avoir reçu des dividendes imposables non admissibles pour l'application de la LIR (y compris le paragraphe 120.4(2)). Le paragraphe 120.4(4) s'applique généralement lorsqu'un particulier déterminé a un gain en capital provenant de la disposition d'actions d'une société privée à une personne avec laquelle ce particulier a un lien de dépendance. Le paragraphe 120.4(5) s'applique généralement lorsqu'un particulier déterminé serait tenu de comptabiliser un revenu de fiducie pouvant raisonnablement être considéré comme étant attribuable à un gain en capital provenant de la disposition d'actions d'une société privée à une personne avec laquelle le particulier déterminé a un lien de dépendance. Il semblerait que, si les modifications apportées en 2011 à l'article 120.4 avaient été en vigueur au moment où les opérations en cause ont été effectuées, les gains en capital pertinents auraient créé, en raison de l'application du paragraphe 120.4(5), une obligation fiscale en vertu du paragraphe 120.4(2).

 

[72]        Lors de la proposition visant à modifier l'article 120.4 par l'ajout des paragraphes 120.4(4) et (5), tel qu'il est indiqué ci‑dessus, le ministère des Finances a publié un document intitulé Annexe 3 : Mesures fiscales : Renseignements supplémentaires, Avis de voies et moyens et avant‑projet de modification du Règlement de l'impôt sur le revenu (6 juin 2011). Dans ce document, le ministère des Finances a formulé les commentaires suivants au sujet de la proposition, aux pages 319 et 320 :

 

Au départ, l'impôt sur le revenu fractionné ne s'appliquait pas aux gains en capital parce que les techniques de planification en usage à l'époque n'utilisaient pas les gains en capital pour fractionner un revenu avec un mineur. Or, depuis, des techniques utilisant les gains en capital pour se soustraire à l'impôt sur le revenu fractionné ont vu le jour. Ces techniques font appel à la réalisation du gain en capital au profit d'un mineur lorsqu'il est disposé d'actions d'une société en faveur d'une personne ayant un lien de dépendance avec le mineur.

 

Le budget de 2011 propose une mesure ciblée afin de maintenir l'intégrité du régime de l'impôt sur le revenu fractionné. Cette mesure étendra l'application de l'impôt sur le revenu fractionné au gain en capital réalisé par un mineur, ou inclus dans le revenu de ce dernier, lorsqu'il est disposé d'actions d'une société en faveur d'une personne ayant un lien de dépendance avec le mineur si les dividendes imposables sur les actions avaient été assujettis à l'impôt sur le revenu fractionné. Les gains en capital visés par cette mesure seront assimilés à des dividendes; par conséquent, ils ne profiteront pas des taux d'inclusion des gains en capital et ne seront pas pris en compte aux fins de l'exonération cumulative des gains en capital.

 

Cette mesure s'appliquera aux gains en capital réalisés après le 21 mars 2011 ou par la suite. En outre, le gouvernement continuera de surveiller l'efficacité du régime de l'impôt sur le revenu fractionné et prendra les mesures qui s'imposent si de nouvelles techniques de fractionnement du revenu devaient voir le jour.

 

[73]        Selon ces commentaires, l'intention qu'avait le législateur en modifiant l'article 120.4 était d'élargir la portée de la disposition. Le ministère des Finances signale que la mesure « étendra » l'application de l'impôt sur le revenu fractionné. Rien ne permet de penser que la disposition avait pour but d'empêcher tout fractionnement du revenu avec des mineurs. En fait, le ministère des Finances indique que la modification est elle‑même une « mesure ciblée ».

 

[74]        Il convient également de noter que la modification étend l'impôt sur le revenu fractionné (l'« impôt des enfants mineurs ») à un sous‑ensemble plus large d'opérations donnant lieu à des gains en capital. La modification vise les gains en capital réalisés lors de la disposition d'actions non cotées par des particuliers déterminés, peu importe si l'opération vise le dépouillement du surplus ou y donne lieu, tel qu'il est allégué en l'espèce. À mon avis, il peut être raisonnablement conclu que le législateur a décidé de ne pas inclure les gains en capital lorsque la mesure a d'abord été adoptée et a ensuite choisi de le faire de façon prospective uniquement à l'égard d'un sous‑ensemble restreint d'opérations donnant lieu à des gains en capital.

 

[75]        Contrairement à ce que soutient l'intimée, la manière dont la modification de 2011 a été proposée et adoptée ne semble pas indiquer que le législateur supprimait une échappatoire, ainsi qu'il est indiqué dans l'arrêt Water's Edge[43]. En l'espèce, le législateur a pris des mesures visant à freiner le recours à une stratégie de planification fiscale environ dix ans après que la stratégie avait été dévoilée publiquement[44]. Pour reprendre les commentaires du juge Noël dans l'arrêt Triad Gestco, lorsque le législateur a adopté l'article 120.4, il devait être conscient du fait que les gains en capital pourraient servir à déjouer l'application de la disposition.

 

[76]        L'intimée, dans ses observations écrites, soutient que les appelants ont réussi à créer des gains en capital factices et à déclencher la réalisation des gains en question en recourant comme suit à des dividendes en « actions rachetables à prime » :

 

[TRADUCTION]

 

61        En l'espèce, les appelants ont procédé à des opérations visant à créer un gain en capital et à déclencher la réalisation du gain en question à leur gré et au moment jugé propice par le truchement de dividendes en actions rachetables à prime.

 

62        Le « montant » d'un dividende en actions est défini au paragraphe 248(1) et s'entend de façon générale du montant correspondant à l'augmentation du capital versé de la société qui a versé le dividende en raison de son versement. De même, selon le paragraphe 52(3), le prix de base rajusté des actions émises au titre du dividende en actions est le montant de ce dividende. En l'espèce, le dividende en actions a été délibérément fixé à un niveau bas et la juste valeur marchande, à un niveau élevé, de sorte que le montant du dividende au titre de l'article 82 était négligeable pour la fiducie et le gain latent créé pouvait être reporté au moment choisi par le contribuable. La création d'un dividende en actions rachetables à prime ne faisait que transférer la valeur existante dans FHDM aux enfants mineurs.

 

63        La fiducie a ensuite vendu les actions au père, qui, à son tour, les a vendues à une société avec laquelle il avait un lien de dépendance. Les dispositions et les gains en capital ont été étalés sur trois ans pour garantir le taux d'imposition le plus faible, et le rachat concernait des actions de la société, ce qui donnait droit à la déduction des dividendes prévue à l'article 112. Les enfants mineurs se sont vu attribuer les fonds au moyen d'un échange de billets. Des opérations pas tellement différentes étaient également en jeu, mais pour un résultat différent, dans l'arrêt Triad Gestco et dans deux affaires récentes de « transfert de valeur » entendues par la Cour d'appel fédérale[45]. Ici, les opérations visaient à contourner l'article 120.4 par la création et la manipulation d'un gain en capital.

 

[77]        Selon l'avocate de l'intimée, les opérations en cause sont aussi circulaires et aussi factices que celles en cause dans les arrêts Triad Gestco et 1207192, et les opérations en question ne correspondaient pas à une augmentation du pouvoir économique réel. J'estime que cet argument est une fausse piste.

 

[78]        Les opérations dans les affaires Triad Gestco et 1207192, à l'instar des opérations en cause en l'espèce, reposaient sur des actions rachetables à prime, mais la ressemblance semble s'arrêter là. En l'espèce, un gain en capital s'était accumulé à l'égard des actions ordinaires. Les appelants n'ont pas eu à recourir au paiement d'un dividende en actions pour déclencher la réalisation d'un gain en capital. La fiducie aurait pu réaliser le même gain en capital en vendant un nombre approprié d'actions ordinaires de FHDM pour déclencher la réalisation du gain en capital ciblé et en attribuant le gain qui en résultait aux appelants. Le dividende en actions n'a pas créé un gain en capital comme l'a soutenu l'intimée. Le dividende en actions n'a fait que transférer une partie des gains accumulés à l'égard des actions ordinaires aux actions privilégiées de catégorie D. Je soupçonne que cela a été fait pour éviter une évaluation des actions ordinaires, ce qui aurait été nécessaire si la fiducie avait vendu, au lieu de cela, certaines des actions ordinaires de FHDM. Une évaluation n'était pas obligatoire pour les actions privilégiées de catégorie D, parce que leur prix de rachat avait été fixé et que la valeur résiduelle de FHDM s'accumule à l'égard des actions ordinaires. Alors que, dans les affaires Triad Gestco et 1207192, les contribuables avaient créé des pertes en capital factices pour mettre à l'abri des gains en capital réels, en l'espèce, les appelants ont payé de l'impôt sur leurs gains en capital. En outre, la concession faite par l'intimée quant au gain en capital déclaré par Steven pour son année d'imposition 2005 est incompatible avec la thèse selon laquelle les gains en capital pertinents étaient factices. Il n'existe aucune distinction fondée sur des principes à effectuer à cet égard entre les gains en capital pertinents et le gain en capital déclaré par Steven pour son année d'imposition 2005.

 

VI.     CONCLUSION

 

[79]        Pour toutes les raisons précisées ci-dessus, j'estime que les opérations qui ont donné lieu aux gains en capital pertinents n'ont pas contourné l'application de l'article 120.4 de manière à constituer un évitement fiscal abusif au sens du paragraphe 245(4). À tout le moins, l'intimée n'a pas prouvé que les opérations contrevenaient au paragraphe 245(4). Par conséquent, les appels sont accueillis et les cotisations sont annulées.

 

Signé à Calgary (Alberta), ce 1er jour de mai 2013.

 

 

« Robert J. Hogan »

Le juge Hogan

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 9e jour d'août 2013.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 


ANNEXE A

 

Libellé de l'article 120.4 de la LIR pendant les années d'imposition 2003, 2004 et 2005

 

120.4(1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article.

 

« montant exclu » Quant à un particulier pour une année d'imposition, montant qui représente le revenu tiré d'un bien acquis par le particulier, ou pour son compte, par suite du décès d'une des personnes suivantes :

 

a) le père ou la mère du particulier;

 

b) une personne quelconque, si le particulier est :

 

(i) soit inscrit au cours de l'année comme étudiant à temps plein dans un établissement d'enseignement postsecondaire au sens du paragraphe 146.1(1),

 

(ii) soit une personne à l'égard de laquelle un montant est déductible en application de l'article 118.3 dans le calcul de l'impôt payable en vertu de la présente partie par un contribuable pour l'année.

 

« particulier déterminé » Quant à une année d'imposition, particulier qui répond aux conditions suivantes :

 

a) il n'avait pas atteint l'âge de 17 ans avant l'année;

 

b) il n'a été un non‑résident à aucun moment de l'année;

 

c) son père ou sa mère a résidé au Canada à un moment de l'année.

 

« revenu fractionné » S'agissant du revenu fractionné d'un particulier déterminé pour une année d'imposition, le total des montants (sauf les montants exclus) représentant chacun, selon le cas :

 

a) un montant à inclure dans le calcul du revenu du particulier pour l'année :

 

(i) soit au titre de dividendes imposables reçus par le particulier relativement à des actions du capital‑actions d'une société (sauf des actions d'une catégorie cotée à une bourse de valeurs visée par règlement et des actions du capital‑actions d'une société de placement à capital variable),

 

(ii) soit par l'effet de l'article 15 du fait qu'une personne est propriétaire d'actions du capital‑actions d'une société, sauf des actions d'une catégorie cotée à une bourse de valeurs visée par règlement;

 

b) une partie d'un montant inclus, par l'effet de l'alinéa 96(1)f), dans le calcul du revenu du particulier pour l'année, dans la mesure où la partie répond aux conditions suivantes :

 

(i) elle n'est pas incluse dans le montant visé à l'alinéa a),

 

(ii) il est raisonnable de considérer qu'elle est un revenu provenant de la fourniture de biens ou de services par une société de personnes ou une fiducie à une entreprise exploitée par l'une des personnes suivantes, ou à l'appui d'une telle entreprise :

 

(A) une personne qui est liée au particulier à un moment de l'année,

 

(B) une société dont une personne liée au particulier est un actionnaire déterminé à un moment de l'année,

 

(C) une société professionnelle dont une personne liée au particulier est un actionnaire à un moment de l'année;

 

c) une partie d'un montant inclus, par l'effet des paragraphes 104(13) ou 105(2) relativement à une fiducie (sauf une fiducie de fonds commun de placement), dans le calcul du revenu du particulier pour l'année, dans la mesure où la partie répond aux conditions suivantes :

 

(i) elle n'est pas incluse dans le montant visé à l'alinéa a),

 

(ii) il est raisonnable de considérer que la partie, selon le cas :

 

(A) se rapporte à des dividendes imposables reçus au titre d'actions du capital-actions d'une société (sauf des actions d'une catégorie cotée à une bourse de valeurs visée par règlement et des actions du capital‑actions d'une société de placement à capital variable),

 

(B) découle de l'application de l'article 15 au fait qu'une personne est propriétaire d'actions du capital‑actions d'une société, sauf des actions d'une catégorie cotée à une bourse de valeurs visée par règlement,

 

(C) est un revenu provenant de la fourniture de biens ou de services par une société de personnes ou une fiducie à une entreprise exploitée par l'une des personnes suivantes, ou à l'appui d'une telle entreprise :

 

(I) une personne qui est liée au particulier à un moment de l'année,

 

(II) une société dont une personne liée au particulier est un actionnaire déterminé à un moment de l'année,

 

(III) une société professionnelle dont une personne liée au particulier est un actionnaire à un moment de l'année.

 

(2) Est ajouté à l'impôt payable en vertu de la présente partie par un particulier déterminé pour une année d'imposition le montant représentant 29 % du revenu fractionné du particulier pour l'année.

 

(3) Malgré les autres dispositions de la présente loi, lorsqu'un particulier est un particulier déterminé pour une année d'imposition, son impôt payable en vertu de la présente partie pour l'année est au moins égal à l'excédent du montant visé à l'alinéa a) sur le total visé à l'alinéa b) :

 

a) le montant ajouté, en application du paragraphe (2), à son impôt payable en vertu de la présente partie pour l'année;

 

b) le total des montants représentant chacun un montant qui répond aux conditions suivantes :

 

(i) il est déductible en application des articles 121 ou 126 dans le calcul de l'impôt payable en vertu de la présente partie par le particulier pour l'année,

 

(ii) il est raisonnable de considérer qu'il se rapporte à un montant inclus dans le calcul du revenu fractionné du particulier pour l'année.

 

 


RÉFÉRENCE :                                 2013 CCI 86

 

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :        2010-2687(IT)G

                                                          2010-2688(IT)G

 

INTITULÉS :                                    Brianne Gwartz c. Sa Majesté la Reine

                                                          Steven Gwartz c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATES DE L'AUDIENCE :             Les 14 et 15 novembre 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L'honorable juge Robert J. Hogan

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 1er mai 2013

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat des appelants :

Me Martin Sorensen

Avocates de l'intimée :

Me Brooke Sittler

Me Karen Janke-Curliss

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

          Pour les appelants :

                   Nom :                   Martin Sorensen

                   Cabinet :     Bennett Jones

                                       Toronto (Ontario)

 

          Pour l'intimée :     William F. Pentney

                                       Sous-procureur général du Canada

                                       Ottawa, Canada

 



[1] 2005 CSC 54, [2005] 2 R.C.S. 601.

 

[2] 2011 CSC 63, [2011] 3 R.C.S. 721.

 

[3] 2012 CCI 80.

 

[4] 2010 CAF 124, [2011] 4 R.C.F. 66, au paragraphe 37.

 

[5] 2012 CAF 258, conf. 2011 CCI 259.

 

[6] Transcription du procès, de la page 123, ligne 13, à la page 124, ligne 8.

 

[7] 2002 CAF 291, [2003] 2 C.F. 25.

 

[8] Ibid., au paragraphe 47.

 

[9] Précité (note 3).

 

[10] 2008 CCI 274, conf. par 2009 CAF 113.

 

[11] Précité (note 3), au paragraphe 55.

 

[12] Précité (note 2), au paragraphe 109.

 

[13] Précité (note 5).

 

[14] 2012 CAF 259, conf. 2011 CCI 383.

 

[15] Réponse à l'avis d'appel de chaque appelant, au paragraphe 21.

 

[16] Transcription du procès, page 19, lignes 9 à 16, page 20, lignes 1 à 9, et page 63, lignes 5 à 15.

 

[17] Transcription du procès, de la page 49, ligne 21, à la page 51, ligne 13.

 

[18] Alan W. Bryant, Sidney N. Lederman et Michelle K. Fuerst, Sopinka Lederman & Bryant: The Law of Evidence in Canada, 3e éd. (Markham (Ontario), LexisNexis, 2009), aux paragraphes 2.40 et 2.41.

 

[19] Précité (note 1).

 

[20] 2005 CSC 55, [2005] 2 R.C.S. 643.

 

[21] 2009 CSC 1, [2009] 1 R.C.S. 3.

 

[22] Précité (note 2).

 

[23] Hypothèques Trustco, précité (note 1), au paragraphe 18.

 

[24] Ibid., au paragraphe 21.

 

[25] Ibid., au paragraphe 36.

 

[26] Ibid., au paragraphe 44.

 

[27] Ibid., au paragraphe 45.

 

[28] Ibid., au paragraphe 66.

 

[29] Précité (note 2), au paragraphe 65.

 

[30] Précité (note 4), inf. 2009 CCI 237, autorisation d'appel à la CSC refusée, no 33794, 4 novembre 2010.

 

[31] Précité (note 10).

 

[32] H. Heward Stikeman et Robert Couzin, « Surplus Stripping » (1995), 43:5 Rev. fisc. can. 1844, à la page 1845.

 

[33] 2009 CCI 299, conf. par 2010 CAF 251.

 

[34] Précité (note 2), au paragraphe 118.

 

[35] Heather Kerr, Ken McKenzie et Jack M. Mintz, réd., Tax Policy in Canada (Toronto, Fondation canadienne de fiscalité, 2012), à 4:15.

 

[36] [1998] 1 R.C.S. 770, aux pages 783 et 784.

 

[37] Précité (note 7).

 

[38] Triad Gestco, précité (note 5), au paragraphe 56; 1207192, précité (note 14), au paragraphe 21.

 

[39] 1207192, précité (note 14) (CCI).

 

[40] Observations écrites de l'intimée, paragraphes 53 et 54.

 

[41] Par exemple, les juges majoritaires et minoritaires ont fait mention de diverses publications du ministère des Finances et de l'Agence du revenu du Canada dans Cie pétrolière Impériale ltée c. Canada, Inco ltée c. Canada, 2006 CSC 46, [2006] 2 R.C.S. 447, aux paragraphes 57 à 59 et 89 à 91.

 

[42] Plan budgétaire de 1999, aux pages 210 et 211.

 

[43] Précité (note 7).

 

[44] Voir, par exemple, Kim Moody, « Income Splitting for the Year 2000 and Beyond », présenté à la Society of Trust and Estate Practitioners (1999); Timothy G. Duholke, « Kiddie Tax: The Income-Splitting Dance » (2001), Tax for the Owner‑Manager 1(2), à la page 5.

 

[45] Triad Gestco, précité (note 5), au paragraphe 41, 1207192, précité (note 14), au paragraphe 3, Canada c. Global Equity Fund Ltd., 2012 CAF 272, aux paragraphes 66 à 68.

 

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