Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Dossier : 2012-2468(IT)I

ENTRE :

ROLANDO DAVID,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 26 août 2013, à Winnipeg (Manitoba)

Devant : L’honorable juge Judith Woods

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimée :

Me Ainslie Schroeder

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’égard de la cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2006 est accueilli, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, compte tenu du fait que : 1) l’appelant a droit à un crédit d’impôt pour un don de bienfaisance égal à 10 % de la valeur nominale du reçu ou des reçus pour don de bienfaisance délivrés par CanAfrica International Foundation; 2) les pénalités, s’il y a lieu, devraient être annulées. Les parties assumeront leurs propres frais à l’égard de l’appel.

         Signé à Ottawa (Ontario), ce 15e jour d’avril 2014.

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mai 2014.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


Dossier : 2012-2469(IT)I

BETWEEN:

DANILO MAGARRO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

Appel entendu le 26 août 2013, à Winnipeg (Manitoba)

 

Devant : L’honorable juge Judith Woods

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimée :

Me Ainslie Schroeder

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’égard de la cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2006 est accueilli, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, compte tenu du fait que : 1) l’appelant a droit à un crédit d’impôt pour un don de bienfaisance égal à 10 % de la valeur nominale du reçu ou des reçus pour don de bienfaisance délivrés par CanAfrica International Foundation; 2) les pénalités, s’il y a lieu, devraient être annulées. Les parties assumeront leurs propres frais à l’égard de l’appel.

         Signé à Ottawa (Ontario), ce 15e jour d’avril 2014.

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mai 2014.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


Dossier : 2012-2484(IT)I

BETWEEN:

RAY CASTRO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 26 août 2013, à Winnipeg (Manitoba)

Devant : L’honorable juge Judith Woods

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimée :

Me Ainslie Schroeder

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’égard de la cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2006 est accueilli, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, compte tenu du fait que : 1) l’appelant a droit à un crédit d’impôt pour un don de bienfaisance égal à 10 % de la valeur nominale du reçu ou des reçus pour don de bienfaisance délivrés par CanAfrica International Foundation; 2) les pénalités, s’il y a lieu, devraient être annulées. Les parties assumeront leurs propres frais à l’égard de l’appel.

       Signé à Ottawa (Ontario), ce 15e jour d’avril 2014.

« J. M. Woods »

Juge Woods

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mai 2014.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


Dossier : 2012-2575(IT)I

BETWEEN:

MARIA S. GRANDE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 26 août 2013, à Winnipeg (Manitoba)

Devant : L’honorable juge Judith Woods

Comparutions :

 

Pour l’appelante :

L’appelant elle‑même

Avocate de l’intimée :

Me Ainslie Schroeder

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’égard de la cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2006 est accueilli, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, compte tenu du fait que : 1) l’appelante a droit à un crédit d’impôt pour un don de bienfaisance égal à 10 % de la valeur nominale du reçu ou des reçus pour don de bienfaisance délivrés par CanAfrica International Foundation; 2) les pénalités, s’il y a lieu, devraient être annulées. Les parties assumeront leurs propres frais à l’égard de l’appel.

        

       Signé à Ottawa (Ontario), ce 15e jour d’avril 2014.

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mai 2014.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice

 

 


Dossier : 2012-2467(IT)I

BETWEEN:

RUBIROSA TIROY,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 26 août 2013, à Winnipeg (Manitoba)

Devant : L’honorable juge Judith Woods

Comparutions :

 

Pour l’appelante :

L’appelante elle‑même

Avocate de l’intimée :

Me Ainslie Schroeder

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’égard de la cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2006 est accueilli, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, compte tenu du fait que : 1) l’appelante a droit à un crédit d’impôt pour un don de bienfaisance égal à 10 % de la valeur nominale du reçu ou des reçus pour don de bienfaisance délivrés par CanAfrica International Foundation; 2) les pénalités, s’il y a lieu, devraient être annulées. Les parties assumeront leurs propres frais à l’égard de l’appel.

       Signé à Ottawa (Ontario), ce 15e jour d’avril 2014.

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mai 2014.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice

 

 


Dossier : 2012-2483(IT)I

BETWEEN:

ARIS N. ANI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 26 août 2013, à Winnipeg (Manitoba)

Devant : L’honorable juge Judith Woods

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimée :

Me Ainslie Schroeder

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’égard de la cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2006 est accueilli, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, compte tenu du fait que : 1) l’appelant a droit à un crédit d’impôt pour un don de bienfaisance égal à 10 % de la valeur nominale du reçu ou des reçus pour don de bienfaisance délivrés par CanAfrica International Foundation; 2) les pénalités, s’il y a lieu, devraient être annulées. Les parties assumeront leurs propres frais à l’égard de l’appel.

         Signé à Ottawa (Ontario), ce 15e jour d’avril 2014.

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mai 2014.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice

 

 


Référence : 2014 CCI 117

Date : 20140415

Dossier : 2012-2468(IT)I

ENTRE :

ROLANDO DAVID,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

Dossier : 2012-2469(IT)I

ET ENTRE :

DANILO MAGARRO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

Dossier : 2012-2484(IT)I

ET ENTRE :

RAY CASTRO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

Dossier : 2012-2575(IT)I

ET ENTRE :

MARIA S. GRANDE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossier : 2012-2467(IT)I

ET ENTRE :

RUBIROSA TIROY,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

Dossier : 2012-2483(IT)I

ET ENTRE :

ARIS N. ANI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge Woods

 

[1]             Les présents motifs ont trait à six appels distincts relatifs au refus d’un crédit d’impôt au titre d’un prétendu don de bienfaisance à CanAfrica International Foundation (« CanAfrica »). Les appels ont été entendus l’un à la suite de l’autre au cours de la même journée, et les présents motifs valent pour les six appels.

[2]             CanAfrica a remis à chaque appelant (ou son époux ou épouse) un reçu pour don de bienfaisance, lequel constituait le fondement des crédits d’impôt que les appelants ont demandés dans leur déclaration de revenus. Dans des nouvelles cotisations établies à l’égard des appelants pour l’année d’imposition 2006 au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), les crédits ont été refusés en totalité.

[3]             Le tableau ci‑dessous précise le montant des dons inscrits sur les reçus.

APPELANT/APPELANTE

MONTANT DU REÇU

Rubirosa Tiroy

  2 500 $

Rolando David

10 000 $

Danilo Magarro

  5 000 $

Ray Castro

15 000 $

Maria S. Grande

20 000 $

Aris N. Ani

  5 000 $

 

Le contexte

[4]             En 2006, les appelants ou leur époux ou épouse ont chacun de leur côté été invités par un préparateur de déclarations de revenus, Rodigo Layco, à faire des dons à CanAfrica. À l’époque, CanAfrica était un organisme de bienfaisance enregistré au sens de la Loi, ce qui lui permettait de délivrer des reçus pour don de bienfaisance.

[5]             Bien que CanAfrica ait eu le statut d’organisme de bienfaisance enregistré en 2006, l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») menait alors une enquête à son égard, laquelle a mené à la révocation de l’enregistrement de CanAfrica comme organisme de bienfaisance en 2007. En outre, le président de CanAfrica, Ambrose Danso-Dapaah, a plaidé coupable à des accusations de vente de faux reçus pour don de bienfaisance pour les années d’imposition 2005 et précédentes.

[6]             Parmi les appelants, beaucoup semblent reconnaître le fait que les reçus d’impôt qui leur ont été remis étaient des faux, et ils demandent à obtenir réparation en partant du principe que l’ARC devrait assumer une certaine part de responsabilité. Ils laissent entendre que l’ARC a eu tort d’afficher le nom de CanAfrica dans la liste des organismes de bienfaisance enregistrés dans son site Web sans prévenir les contribuables des préoccupations qu’elle avait à l’égard de cet organisme à l’époque.

[7]             Les appelants laissent entendre que, si l’ARC avait lancé un avertissement, ils n’auraient pas conclu les opérations en cause. En général, les appelants demandent à ce qu’on leur accorde au moins une partie des crédits d’impôt qu’ils ont demandés, et qu’on annule les intérêts et les pénalités qui leur ont été imposés.

[8]             L’intimée n’a pas abordé cet argument dans les réponses. Au lieu de cela, elle a soutenu que les crédits d’impôt devraient être refusés en partant du principe qu’aucun don n’avait été effectué.

[9]             L’intimée fait valoir que, pour qu’un don soit véritable, il doit être fait sans qu’aucun avantage ne soit conféré en retour. L’intimée laisse entendre que les reçus pour don de bienfaisance que CanAfrica a délivrés étaient gonflés, et que les appelants s’attendaient à tirer un avantage des opérations en cause en recevant des crédits d’impôt gonflés en échange de leur don. L’intimée laisse entendre que ces avantages annulent toute notion de don.

Les sommes versées à CanAfrica à titre de don

[10]        La première question à examiner a trait aux sommes qui ont été versées à CanAfrica à titre de don.

[11]        Le point de départ de l’analyse consiste à examiner les hypothèses sur lesquelles le ministre a fondé les cotisations en cause parce que le fardeau initial de la preuve incombe aux appelants et qu’il appartient à ceux‑ci de réfuter ces hypothèses, du moins à première vue. L’hypothèse pertinente reproduite ci‑dessous est extraite d’une des réponses.

[traduction]

[L]’appelante a pris part avec son préparateur de déclarations de revenus à un stratagème dans le contexte duquel l’appelante, en contrepartie d’un reçu pour don de bienfaisance délivré par CanAfrica, versait 10 % de la valeur nominale du reçu plus une commission à son préparateur de déclarations de revenus.

[12]        Le ministre s’est fondé sur l’hypothèse selon laquelle les appelants avaient payé 10 % de la valeur nominale des reçus délivrés, ainsi qu’une somme non précisée à titre de commission. Cette hypothèse sera considérée comme vraie à moins qu’un appelant démontre le contraire.

[13]        Je voudrais formuler quelques commentaires préliminaires avant d’examiner la preuve.

[14]        Premièrement, les appelants se sont tous fondés presque exclusivement sur leur propre témoignage intéressé, ou sur le témoignage intéressé de leur époux ou épouse, pour se décharger du fardeau de la preuve qui leur incombait. Aucun appelant ne disposait de documents contemporains, comme des copies de chèques, prouvant qu’ils avaient donné une somme supérieure à 10 % de la somme dont il était fait état sur les reçus.

[15]        L’absence de documents à l’appui pose problème aux appelants. À cet égard, je souscris aux commentaires formulés par la juge Sheridan dans le contexte d’une autre affaire dans laquelle il était question de CanAfrica, la décision Patel c La Reine, 2011 CCI 555, au paragraphe 16.

[16]      L’appelante a fait remarquer à la Cour qu’il n’y avait rien d’illégal à faire des dons en espèces. Cela est tout à fait vrai : l’alinéa 3501(1)e) du Règlement prévoit explicitement cette possibilité. Toutefois, lorsqu’un contribuable choisit d’effectuer ses opérations uniquement en espèces, que ce soit pour des dons de bienfaisance ou pour toute autre fin qui est susceptible d’être examinée par le ministre, il s’impose le fardeau de pouvoir justifier des opérations qu’on ne peut pas vérifier autrement. […]

[16]        En outre, pour qu’un témoignage intéressé soit concluant, il doit être détaillé et convaincant. Si le témoignage est invraisemblable, il convient de le considérer avec un scepticisme accru. Il s’agit également d’un facteur à prendre en considération dans les présents appels, où il est question de dons très importants et d’un organisme de bienfaisance qui a délivré de faux reçus pour don de bienfaisance.

[17]        Deuxièmement, certains appelants ont déclaré que les reçus étaient fondés sur le montant d’un don en espèces auquel venait s’ajouter l’évaluation de la valeur d’articles ménagers dont ils avaient fait don. Toutefois, aucun appelant n’a produit de preuve étayant l’évaluation des dons autres qu’en espèces. Si les appelants ont fait don de biens, je ne dispose pas de suffisamment d’éléments de preuve pour attribuer une quelconque valeur à ces biens.

[18]        Troisièmement, certains appelants ont déclaré qu’ils avaient fait un don en espèces équivalant à environ 16 % de la valeur nominale des reçus, et qu’ils avaient également fait don d’articles ménagers.

[19]        En supposant que j’accepte le fait que certains appelants ont donné 16 % à M. Layco, cela ne suffit pas pour réfuter l’hypothèse des 10 % que le ministre a formulée, parce que ce dernier a tenu pour acquis que les appelants avaient versé 10 % plus une commission non précisée. Une partie des 16 % devrait être attribuée à la commission.

[20]        Je me penche maintenant sur le témoignage des appelants. L’intimée n’a cité aucun témoin à comparaître.

[21]        Rubirosa Tiroy – On a remis à Mme Tiroy un reçu pour don de bienfaisance de 2 500 $.

[22]        Lors de l’audience, Mme Tiroy a déclaré qu’elle n’avait donné que des espèces, et qu’elle avait donné soit 400 $ soit 800 $. Toutefois, elle est revenue sur ses déclarations lors du contre‑interrogatoire, après qu’on lui a montré une lettre qu’elle avait donnée à l’ARC. Dans cette lettre, Mme Tiroy affirmait qu’elle avait fait don de 400 $ en espèces ainsi que de certains biens (pièce R-2).

[23]        Dans l’ensemble, je conclus que le témoignage de Mme Tiroy était trop vague pour qu’on puisse s’y fier et qu’il contenait des incohérences préoccupantes. En outre, Mme Tiroy n’a pas produit de ventilation du montant payé permettant de distinguer les sommes payées à titre de commission des sommes payées à titre de don.

[24]        Je conclus que la somme dont Mme Tiroy a fait don à CanAfrica s’élevait à 250 $, soit la somme avancée par le ministre dans son hypothèse.

[25]        Rolando David – CanAfrica a remis un reçu pour don de bienfaisance de 10 000 $ à M. David.

[26]        M. David a déclaré qu’il avait fait don d’environ 2 500 $ en espèces ainsi que de certains vêtements et articles ménagers. Son témoignage était trop succinct pour être convaincant, et il n’a produit aucun document contemporain à l’appui de ses prétentions.

[27]        Je voudrais également souligner le fait que M. David n’a pas produit de description détaillée de ses dons autres qu’en espèces, et qu’il ne disposait d’aucune estimation de la valeur de ces dons. Il n’a pas non plus produit de ventilation du montant payé permettant de distinguer les sommes payées à titre de commission des sommes payées à titre de don.

[28]        Je conclus que la somme dont M. David a fait don à CanAfrica s’élevait à 1 000 $, soit la somme avancée par le ministre dans son hypothèse.

[29]        Danilo Magarro – CanAfrica a remis un reçu pour don de bienfaisance de 5 000 $ à l’épouse de M. Magarro, Elisa Magarro, somme à l’égard de laquelle M. Magarro a demandé un crédit d’impôt pour don dans sa déclaration de revenus. L’intimée ne remet pas en cause le fait que le crédit d’impôt ait fait l’objet d’un transfert à l’époux.

[30]        Mme Magarro a déclaré qu’elle s’était rendue au bureau de M. Layco afin d’y déposer une lettre pour le compte d’une connaissance. Pendant qu’elle se trouvait là‑bas, M. Layco lui a demandé si elle souhaitait faire un don de bienfaisance à CanAfrica, en échange de quoi elle recevrait un crédit d’impôt équivalant à la moitié de la somme donnée. Mme Magarro a déclaré qu’elle avait versé la somme de 5 000 $ en espèces à M. Layco, à titre de don de bienfaisance.

[31]        M. Magarro a déclaré que son épouse ne lui avait pas parlé des modalités de ce don.

[32]        Je ne trouve pas les témoignages de M. et de Mme Magarro convaincants. Si je devais ajouter foi à leur témoignage, il me faudrait conclure que les évènements improbables suivants se sont déroulés.

a)       Mme Magarro a fait don d’une somme importante à une époque où elle avait été mise à pied. Le revenu de son époux s’élevait à environ 58 000 $.

b)      Mme Magarro a fait ce don à la demande d’un préparateur de déclarations de revenus, sans avoir reçu de renseignements détaillés au sujet de l’organisme de bienfaisance.

c)       Mme Magarro a pris la somme de 5 000 $ dans un sac de billets qu’elle conservait chez elle.

d)      Mme Magarro n’a pratiquement pas parlé du don à son époux, et ce, jusqu’au jour de l’audition de son appel.

e)       Mme Magarro a fait don de cette somme sans poser quelque question que ce soit au sujet des activités de CanAfrica. Mme Magarro a déclaré qu’elle avait vérifié que CanAfrica était bien un organisme enregistré sur le site Web de l’ARC, mais qu’elle n’était pas allée voir le site Web de CanAfrica en tant que tel.

[33]        Prises dans leur ensemble, les circonstances décrites ci‑dessus sont hautement improbables. Je conclus que la somme que Mme Magarro a versée à titre de don à CanAfrica s’élevait à 500 $.

[34]        Aris Ani – CanAfrica a remis un reçu pour don de bienfaisance de 5 000 $ à M. Ani.

[35]        Dans son témoignage, M. Ani a déclaré qu’il avait versé une somme en espèces d’environ 2 200 $ à 2 700 $, et également fait don de vêtements et d’autres articles ménagers. Il n’a pas fourni de description détaillée des biens.

[36]        L’ensemble du témoignage de M. Ani est invraisemblable. M. Ani et son épouse ont quatre enfants et ils ont un revenu familial net de 53 000 $. M. Ani a déclaré qu’il avait dû financer une partie du don au moyen d’une avance obtenue avec sa carte de crédit. En l’absence d’explications additionnelles quant à la raison pour laquelle M. Ani donnerait une somme aussi importante à CanAfrica, je conclus qu’il est improbable que M. Ani ait donné une somme aussi importante à cet organisme de bienfaisance.

[37]        M. Ani a également déclaré que le remboursement d’impôt n’avait pas vraiment d’importance à ses yeux. Je ne le crois pas.

[38]        Le témoignage de M. Ani est trop invraisemblable pour qu’on y ajoute foi. Je conclus que M. Ani a fait don de 500 $ à CanAfrica, soit la somme avancée par le ministre dans son hypothèse.

[39]        Ray Castro - M. Castro et son épouse se sont vu délivrer des reçus pour don de bienfaisance d’un montant total de 15 000 $. Pour expliquer le fait qu’on ait délivré des reçus aux deux époux, on a déclaré qu’il n’était pas possible de délivrer de reçu supérieur à 10 000 $ à un particulier.

[40]        M. Castro a affirmé qu’il avait versé 2 600 $ en espèces dans le contexte de ces opérations.

[41]        Je voudrais souligner le fait que la somme en espèces que M. Castro a prétendu qu’il avait payée se rapproche du pourcentage de 16 % que les autres appelants ont déclaré qu’ils avaient donné. Vu que M. Castro n’a pas été en mesure de produire une ventilation du montant qu’il avait payé permettant de distinguer les sommes payées à titre de commission des sommes payées à titre de don, il n’a pas réfuté l’hypothèse du ministre selon laquelle seulement 10 % de la somme ont été versés à titre de don.

[42]        Je conclus que M. Castro a fait don de 1 500 $ à CanAfrica.

[43]        Maria Grande – Mme Grande et son époux se sont vu délivrer des reçus pour don de bienfaisance d’un montant total de 20 000 $.

[44]        Mme Grande a déclaré que, selon la compréhension qu’elle avait de l’entente, elle pensait qu’on lui remettrait un reçu pour don de bienfaisance de 5 000 $ pour chaque tranche de 800 $ dont elle ferait don. Cela équivaut à 16 % et cadre avec l’hypothèse des 10 % formulée par le ministre, auxquels vient s’ajouter une commission de 6 %.

[45]        Mme Grande a également demandé un crédit d’impôt au titre de biens fournis par des tiers. Elle n’a pas démontré qu’elle avait fait don de quelque bien que ce soit.

[46]        Lors des plaidoiries, la Couronne a fait valoir qu’il ne convenait pas d’accorder quelque crédit d’impôt que ce soit parce que Mme Grande n’avait pas effectué le paiement avant le mois de janvier de l’année suivante. Bien qu’il existe des éléments de preuve à l’appui de cet argument, je ne pense pas qu’il serait juste de trancher l’appel sur ce fondement parce qu’il n’a pas été fait mention de cet argument dans la réponse.

[47]        Je conclus que Mme Grande a fait don de 2 000 $ à CanAfrica.

[48]        Conclusion – Pour résumer, en ce qui concerne les sommes dont il été fait don à CanAfrica, je conclus que chaque appelant (son époux/épouse) a fait don à CanAfrica de 10 % de la valeur nominale des reçus pendant l’année d’imposition 2006.

Les sommes pouvant donner droit à un crédit d’impôt

[49]        Comme le prévoit le paragraphe 118.1(3) de la Loi, un particulier peut demander un crédit d’impôt au titre d’un don fait à un organisme de bienfaisance enregistré. Le montant du crédit d’impôt est établi en fonction du montant du don.

[50]        Certains appelants ont laissé entendre qu’on devrait leur accorder un crédit d’impôt fondé sur la valeur nominale du reçu délivré par CanAfrica, en dépit du fait que ce montant est supérieur au montant de leur don. Ils font valoir que l’ARC aurait dû les prévenir des préoccupations qu’elle avait à l’égard de CanAfrica.

[51]        Cet argument n’aide en rien les appelants. Même si je devais convenir avec eux que l’ARC aurait dû lancer un avertissement, un crédit d’impôt ne peut être accordé que conformément aux dispositions de la loi applicable. Vu que la loi prévoit que le crédit d’impôt est calculé en fonction du montant du don, il est impossible d’accorder un crédit d’impôt supérieur à ce que cette disposition prévoit.

[52]        Il reste à établir si les sommes données sont bien des dons, dans le sens où ce terme a été interprété dans la jurisprudence.

[53]        L’intimée a fait valoir que les montants que les appelants avaient versés à titre de don n’étaient pas de vrais « dons » parce que les appelants s’attendaient à recevoir un avantage en retour. L’avantage, comme l’intimée le laisse entendre, consiste à s’attendre à bénéficier d’un crédit d’impôt gonflé fondé sur un reçu pour don de bienfaisance gonflé.

[54]        L’intimée ajoute que le montant de l’avantage n’est pas pertinent, et que tout avantage, si minime soit‑il, aura pour effet d’annuler la totalité du don : voir l’arrêt The Queen v Friedberg, 92 DTC 6031 (CAF)[1].

[55]        La question centrale consiste à établir si le fait de s’attendre à recevoir un crédit d’impôt gonflé au titre d’un reçu pour don de bienfaisance gonflé constitue un avantage annulant le don.

[56]        La Cour a eu à se pencher sur cette question à plusieurs reprises et aucun principe clair ne ressort des décisions antérieures. Par exemple, dans la décision Berg c La Reine, 2012 CCI 406, le juge Bocock a conclu qu’un reçu gonflé n’annulait pas le don (au paragraphe 33), alors que le juge Webb, tel était alors son titre, avait rendu la conclusion contraire dans la décision Van Le c La Reine, 2011 CCI 292 (au paragraphe 13).

[57]        Au moment de l’audition des présents appels, la Cour d’appel fédérale était saisie d’un appel interjeté à l’égard de la décision Berg. Vu l’état incertain du droit relatif à cette question, j’ai décidé de mettre les présents appels en suspens en attendant l’arrêt Berg. Le 31 janvier 2014, la cour d’appel a rendu sa décision (2014 CAF 25), et les parties ont alors été invitées à présenter leurs observations à l’égard de ces conclusions, que ce soit oralement ou par écrit.

[58]        Les motifs que la Cour d’appel fédérale a prononcés dans l’arrêt Berg confirment que le fait de recevoir un avantage annule un don. Toutefois, la Cour d’appel fédérale n’a pas formulé de commentaires au sujet de la conclusion à laquelle la Cour était parvenue, à savoir qu’un crédit d’impôt gonflé ne constituait pas un avantage. Au lieu de cela, le juge Near a conclu que M. Berg n’avait pas fait de don parce qu’il avait reçu un avantage sous la forme de documents de transaction visant à induire les agents du fisc en erreur (voir l’arrêt Berg, aux paragraphes 27 et 28). Compte tenu de cette conclusion, la Cour d’appel fédérale ne s’est pas penchée sur la question de savoir si un reçu gonflé constituait un avantage.

[59]        Vu que la Cour d’appel fédérale n’a pas donné d’éclaircissement à l’égard de cette question dans l’arrêt Berg, il est utile d’examiner d’autres décisions judiciaires. L’intimée a renvoyé à plusieurs décisions de la Cour, et je me suis également appuyée sur l’arrêt Canada c Doubinin, 2005 CAF 298.

[60]        Bien que les faits de l’arrêt Doubinin soient très différents des faits de l’espèce, il est utile d’examiner les commentaires que la Cour d’appel fédérale a formulés à l’égard de la question de savoir si un reçu pour don de bienfaisance gonflé constituait un avantage. À cet égard, le juge Sexton s’est ainsi exprimé :

[14]      L’appelante soutient que la réception d’un « reçu aux fins de l’impôt gonflé » constitue un avantage. Nous ne sommes pas de cet avis.

[15]      Il était impossible pour l’intimé de retirer un avantage du crédit d’impôt gonflé compte tenu des faits particuliers de la présente affaire, parce que même si PPF avait fait un don à ABLE, ABLE ne pouvait valablement remettre un reçu de don de bienfaisance au nom de l’intimé pour le montant du don de PPF. L’article 118.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu ne permet pas à un particulier de réclamer un crédit d’impôt pour un don fait par une autre personne.

[16]      On ne saurait donc prétendre que le « reçu aux fins de l’impôt gonflé » a procuré un avantage réel à l’intimé. En fait, on pourrait fort bien qualifier ce reçu de fardeau. En effet s’il ne l’avait pas reçu, l’intimé n’aurait pas éprouvé les difficultés auxquelles il a par la suite été confronté lorsqu’il a réclamé un crédit de 6 887 $, somme dont il avait effectivement fait don à un organisme de charité enregistré.

[17]      L’appelante invoque également le jugement Webb c. La Reine, 2004 CCI 619 dans lequel le contribuable s’est vu refuser toute déduction fiscale. Cette affaire portait sur un don fait au même organisme de bienfaisance, ABLE. La Cour de l’impôt a toutefois estimé que le contribuable avait sciemment participé à la remise de faux reçus et, de plus, que le contribuable avait fait ce don en vue d’en recouvrer plus tard une grande partie soit de la part d’ABLE, soit par un moyen indirect. Ce n’est pas le cas en l’espèce. Dans le cas qui nous occupe, rien ne permet de penser que l’intimé ait été au courant de quelque acte répréhensible que ce soit. D’ailleurs, Revenu Canada l’avait informé que ABLE était un organisme de charité enregistré au moment de sa contribution. De plus, contrairement à ce que la Cour de l’impôt a conclu dans l’affaire Webb, le contribuable ne s’attendait pas à obtenir un avantage en l’espèce.

[61]        En me fondant sur ces commentaires, je conclus que, habituellement, un reçu gonflé ne devrait pas être considéré comme un avantage annulant un don.

[62]        Dans l’arrêt Doubinin, la Cour d’appel fédérale a semblé laisser la porte ouverte à cette possibilité; toutefois, il se peut que, dans une affaire particulière, il existe des circonstances extraordinaires dont il convient de tenir compte.

[63]        En l’espèce, existe-t-il des circonstances particulières qui justifieraient que je rende une conclusion selon laquelle les reçus gonflés constituent un avantage ayant pour effet d’annuler le don? Je suis d’avis que ce n’est pas le cas.

[64]        Contrairement à beaucoup d’autres affaires dans lesquelles il était question de ce qu’on appelle des dons de bienfaisance financés par emprunt, les opérations ici en cause ne sont pas complexes et ne font pas intervenir une série d’opérations inter reliées associées aux espèces en cause. Les appelants ont simplement fait don d’espèces, et peut-être d’articles ménagers, à CanAfrica, et on leur a remis des reçus d’impôt très gonflés. Vraisemblablement, les appelants savaient qu’ils demandaient des crédits d’impôt gonflés, mais cela ne constitue pas une raison suffisante pour leur refuser complètement les crédits d’impôt.

[65]        Selon moi, compte tenu des faits de l’espèce, les appelants n’ont pas reçu un avantage annulant les dons.

[66]        Avant de tirer une conclusion à l’égard de cette question, je voudrais souligner le fait que l’intimée a soulevé à l’audience un autre argument, dont elle n’avait pas fait mention dans ses réponses. Elle a soutenu que les appelants (à l’exception peut-être de M. David) n’avaient pas établi qu’ils avaient l’intention de faire un don. La décision que la Cour d’appel fédérale a rendue dans l’arrêt Berg confirme qu’il s’agit d’une exigence à satisfaire pour que le don soit valide (au paragraphe 29).

[67]        Je suis d’avis qu’il ne serait pas juste de trancher les appels en se fondant sur cet argument. Les appelants n’en ont pas été avisés préalablement, et, par conséquent, ils n’ont pas eu l’occasion de se préparer et de produire des éléments de preuve sur ce point.

La renonciation aux intérêts

[68]        La plupart des appelants ont également demandé qu’on renonce aux intérêts. Je ne peux pas accéder à leur requête parce que la Cour n’a pas la compétence voulue pour accorder ce type de réparation. Bien que ce point ne soit pas mentionné dans les réponses, le juge Angers l’a abordé lors d’une audience de gestion de l’instance.

La renonciation aux pénalités

[69]        Les appelants demandent également qu’on renonce aux pénalités, compte tenu du fait que l’ARC aurait dû lancer un avertissement à l’égard des dons à CanAfrica.

[70]        La question des pénalités est déroutante parce que l’intimée fait valoir qu’aucune pénalité n’a été imposée et que la plupart des appelants contredisent cette affirmation. Malgré les positions divergentes, aucune des parties n’a produit suffisamment d’éléments de preuve pour appuyer sa position.

[71]        Vu que les appelants ont clairement soulevé cette question dans leur avis d’appel, et que je ne dispose pas de suffisamment d’éléments de preuve pour établir si des pénalités ont été imposées, je me prononcerai en faveur de l’annulation de toute pénalité qui aurait été imposée.

Conclusion

[72]        En l’espèce, il ressort des faits qu’il convient d’accorder aux appelants un crédit d’impôt pour don de bienfaisance équivalant à 10 % de la valeur nominale des reçus d’impôt, et d’annuler toute pénalité qui leur aurait été imposée.

        

       Signé à Ottawa (Ontario), ce 15e jour d’avril 2014.

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mai 2014.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice

 


RÉFÉRENCE :

2014 CCI 117

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :

 

2012-2468(IT)I, 2012-2469(IT)I,
2012-2484(IT)I, 2012-2575(IT)I,
2012-2467(IT)I, 2012-2483(IT)I

 

INTITULÉS :

Rolando David c. Sa Majesté la Reine; Danilo Magarro c. Sa Majesté la Reine;  Ray Castro c. Sa Majesté la Reine;  

Maria S. Grande c. Sa Majesté la Reine;  

Rubirosa Tiroy c. Sa Majesté la Reine;

Aris N. Ani c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

 

Winnipeg (Manitoba)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 26 août 2013

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge J.M. Woods

DATE DES JUGEMENTS :

Le 15 avril 2014

COMPARUTIONS :

Pour les appelants :

Les appelants eux‑mêmes

Avocate de l’intimée :

Me Ainslie Schroeder

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

  Pour les appelants :

 

s.o.

   

    Pour l’intimée :

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 



[1] L’intimée a également fait référence aux récentes modifications apportées à la Loi au sujet des dons partiels, mais elle n’a pas présenté d’observations détaillées à l’égard de ces nouvelles dispositions législatives. Compte tenu des conclusions que j’ai tirées en l’espèce, il n’est pas nécessaire que j’examine ces dispositions.

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