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Dossier : 2013-4579(IT)APP

ENTRE :

CHARLES HAMER,

requérant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 


Requête entendue le 3 juillet 2014, à Toronto (Ontario).

Devant : L’honorable juge Woods

Comparutions :

 

Pour le requérant :

Le requérant lui‑même

Avocate de l’intimée :

Me Rita Araujo

 

ORDONNANCE

          La requête en prorogation du délai imparti pour signifier un avis d’opposition à une cotisation établie à l’égard de l’année d’imposition 2008 est accueillie, et l’avis d’opposition que le requérant a déposé à l’Agence du revenu du Canada le 29 octobre 2013 est réputé être un avis d’opposition valide, signifié à la date de la présente ordonnance. Les parties assumeront leurs propres frais.

         Signé à Toronto (Ontario), ce 8e jour de juillet 2014.

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

Traduction certifiée conforme

ce 23e jour de juillet 2014.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


Référence : 2014 CCI 218

Date : 20140708

Dossier : 2013-4579(IT)APP

ENTRE :

CHARLES HAMER,

requérant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 

La juge Woods

 

[1]             Charles Hamer a présenté à la Cour une demande de prorogation du délai imparti pour signifier un avis d’opposition à une nouvelle cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2008. Par cette nouvelle cotisation, l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») a refusé à M. Hamer une déduction pour don de bienfaisance de 18 750 $.

[2]             M. Hamer fait valoir qu’il convient d’accorder la prorogation qu’il demande parce qu’il n’a jamais reçu l’avis de nouvelle cotisation en question. Lors du contre‑interrogatoire, il a déclaré qu’il habitait dans une région rurale et qu’il avait beaucoup de problèmes relatifs à la livraison du courrier.

[3]             C’est la seconde fois que je suis saisie de cette requête. Lors de la première audience, j’ai informé M. Hamer du fait que je ne pouvais pas accéder à sa requête en partant du principe qu’il n’avait pas reçu l’avis de nouvelle cotisation. Toutefois, j’ai ajouté qu’il serait approprié qu’il demande à la Couronne de prouver qu’elle a bien posté l’avis de nouvelle cotisation en cause. Si la Couronne n’y parvenait pas, la requête pourrait être accordée. L’examen de la requête a été suspendu pour permettre à la Couronne de se préparer.

[4]             Lors de la seconde audience, la Couronne a produit des éléments de preuve relatifs à l’envoi de la nouvelle cotisation sous la forme de la déclaration sous serment de Hamza Momoh, agent des litiges chargé du dossier. M. Momoh n’a pas pu comparaître à l’audience parce qu’il travaille dans une autre ville.

Analyse

[5]             La question qui reste à trancher est de savoir si l’avis de nouvelle cotisation a été envoyé à M. Hamer à la date dont il est fait état dans l’avis.

[6]             Si c’est en raison d’un problème avec Postes Canada que M. Hamer n’a pas reçu l’avis en cause, il ne sera pas possible d’accorder à ce dernier une prorogation du délai prévu par la loi. Le délai commence à courir aussitôt que l’ARC met l’avis de nouvelle cotisation à la poste.

[7]             La loi peut certainement être rigide, en ce sens que le délai prévu pour s’opposer à un avis continue de courir même si on n’a pas reçu l’avis de nouvelle cotisation et que c’est de la faute d’un tiers, comme Postes Canada. Toutefois, la loi est claire et la Cour doit s’en tenir aux règles que le législateur a mises en place.

[8]             La Couronne affirme que la question est de savoir si le fait que l’avis ait été envoyé est plus probable que le contraire. La Couronne laisse entendre que c’est ce qu’établissent la déclaration sous serment de M. Momoh et les déclarations de M. Hamer selon lesquelles il a eu des problèmes relatifs à la livraison de son courrier. La Couronne laisse entendre qu’il est probable que le problème vienne de Postes Canada.

[9]             Je conviens avec la Couronne du fait que la question est de savoir si le fait que l’avis ait été envoyé est plus probable que le contraire. Je conviens également du fait qu’il est pertinent de tenir compte du fait que M. Hamer a connu d’autres problèmes relatifs à la livraison de son courrier.

[10]        Le problème que la thèse de la Couronne me pose est que je ne suis pas convaincue qu’on peut se fier à la déclaration sous serment de M. Momoh. À moins qu’il n’y ait des éléments de preuve fiables du fait que l’avis de nouvelle cotisation a été mis à la poste, M. Hamer doit obtenir gain de cause. Il n’est pas nécessaire que les éléments de preuve soient parfaits, mais la Cour devrait avoir des motifs raisonnables de conclure que les éléments de preuve sont fiables.

[11]        Les parties pertinentes de la déclaration sous serment de M. Momoh sont reproduites ci‑dessous.

[traduction]

8.         Debra Desmarais, agente des programmes auprès de la Section du traitement initial des déclarations, Division du traitement, Direction des déclarations des particuliers de l’ARC, m’a communiqué les renseignements suivants, et je suis convaincu de la véracité de ces renseignements en ce qui a trait au processus de traitement d’une demande de préparation et d’envoi d’un avis de nouvelle cotisation :

a.         les nouvelles cotisations d’impôt sur le revenu sont traitées dans le système informatique de l’ARC et les renseignements sont acheminés électroniquement à l’imprimerie des Services des médias de la Direction des médias électroniques et imprimés, et inscrits dans un tableau quotidien des cotisations (« TQC ») en vue de l’impression des avis de nouvelle cotisation, les avis étant postdatés de façon à indiquer la date de mise à la poste;

b.         L’avis de nouvelle cotisation établi à l’égard du requérant pour l’année d’imposition 2008 a été inscrit au TQC 75 du programme 2009 et postdaté du 12 mars 2012.

9.         Christopher Hummel, chef d’équipe par intérim du service d’impression‑courrier du centre fiscal de l’ARC à Winnipeg, m’a communiqué les renseignements suivants, et je suis convaincu de la véracité de ces renseignements :

a.         les renseignements acheminés par la Section du traitement initial des déclarations et inscrits au TQC sont téléchargés pour impression et les avis de nouvelle cotisation sont imprimés et datés, les avis étant postdatés de façon à indiquer la date de mise à la poste;

b.         les machines de mise sous enveloppe insèrent les avis de nouvelle cotisation dans des enveloppes individuelles un à quatre jours avant la date de mise à la poste;

c.         les machines de mise sous enveloppe sont les machines qui mettent les avis sous enveloppe;

d.         les machines de mise sous enveloppe produisent une feuille de comptage du nombre total des avis imprimés pour mise à la poste;

e.         toutes les enveloppes sont placées dans des bacs à l’intention de Postes Canada pour être mises à la poste à la date indiquée sur les avis;

f.          avant que les avis de nouvelles cotisations soient placés dans des bacs où ils sont ramassés par Postes Canada, le compte informatique figurant sur les machines de mise sous enveloppe est comparé au compte prévu enregistré dans le TQC, et, s’il y a discordance entre les deux comptes, l’impression est annulée, les avis imprimés sont détruits, et on procède à une nouvelle impression;

g.         les comptes étaient exacts pour les deux TQC susmentionnés (auxquels il est fait référence à l’alinéa 8b) ci‑dessus), et les avis ont été mis à la poste dans les temps.

10.       En me fondant sur les renseignements qui m’ont été soumis, tels qu’ils apparaissent aux paragraphes 9 et 10 ci‑dessus, et après examen des dossiers de l’ARC, j’ai toutes les raisons de croire que l’avis de nouvelle cotisation daté du 15 mars 2012 qui avait été établi à l’égard de l’année d’imposition 2008 a été envoyé le 12 mars 2012 à l’adresse du requérant qui apparaissait au dossier de l’ARC, soit RR1, 9142, RUE STATION (ONTARIO)  NOB 1Z0, Canada.

[12]        Je formule les observations suivantes à l’égard de la déclaration sous serment.

[13]        Premièrement, les faits essentiels dont il est fait état dans la déclaration sous serment de M. Momoh ne relèvent pas de la connaissance de celui‑ci. Il se fonde plutôt sur les renseignements que Debra Desmarais et Christopher Hummel lui ont fournis. Quel est l’intérêt de disposer d’une déclaration sous serment si les personnes qui disposent des renseignements qui y sont contenus n’ont pas à attester de l’exactitude de leurs déclarations?

[14]        Deuxièmement, la déclaration sous serment n’offre qu’une description sommaire de la mise à la poste de l’avis de nouvelle cotisation en cause. Elle manque de détails sur de nombreux points importants. Par exemple, M. Momoh déclare que Mme Desmarais a conclu que l’avis de nouvelle cotisation avait été inscrit au TQC 75, mais il ne précise pas comment celle‑ci est parvenue à cette conclusion. La conclusion de M. Hummel selon laquelle les comptes étaient exacts pose un problème similaire. En outre, la conclusion à laquelle M. Momoh parvient au paragraphe 10 n’est accompagnée d’absolument aucun détail, en dehors de la mention [traduction] « après examen des dossiers de l’ARC ». Ces conclusions succinctes ne font rien pour me convaincre du fait que les déclarations sont exactes.

[15]        Cette absence de détails peut être mise en parallèle avec les éléments de preuve exhaustifs qui ont été produits dans la décision Abraham c La Reine, 2004 CCI 380. Je ne veux pas dire par là qu’il est à chaque fois nécessaire de fournir la même quantité de détails que dans la décision Abraham. Toutefois, il convient de fournir des éléments de preuve plus probants que ceux qui sont contenus dans la déclaration sous serment de M. Momoh.

[16]        Troisièmement, il se peut que la déclaration sous serment de M. Momoh soit fondée sur un formulaire normalisé. Je vois notamment qu’elle est très similaire à la déclaration sous serment qui a été produite dans la décision Nicholls c La Reine, 2011 CCI 39.

[17]        En d’autres termes, je n’ai pas de motifs suffisants d’avoir confiance dans la diligence dont M. Momoh, Mme Desmarais ou M. Hummel ont fait preuve dans cette affaire.

[18]        Quatrièmement, je note qu’aucun fonctionnaire de l’ARC n’était disponible pour participer au contre‑interrogatoire. Je ne trouverais pas cela déterminant si j’étais par ailleurs convaincue du fait que je peux me fier de la déclaration sous serment, mais j’ai des réserves en l’occurrence.

[19]        Pour ces motifs, je conclus que la Couronne n’a pas fourni suffisamment d’éléments de preuve fiables selon lesquels elle avait mis l’avis de nouvelle cotisation pour 2008 à la poste à l’intention de M. Hamer. En l’absence de tels éléments de preuve, il ne suffit pas que la Couronne renvoie aux problèmes que M. Hamer avait avec Postes Canada.

[20]        La requête sera accueillie.

         Signé à Toronto (Ontario), ce 8e jour de juillet 2014.

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

Traduction certifiée conforme

ce 23e jour de juillet 2014.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


RÉFÉRENCE :

2014 CCI 218

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2013-4579(IT)APP

INTITULÉ :

Charles Hamer c. Sa Majesté la Reine

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 3 juillet 2014

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

L’honorable juge Woods

DATE DE L’ORDONNANCE :

Le 8 juillet 2014

COMPARUTIONS :

 

Pour le requérant :

Le requérant lui‑même

Avocate de l’intimée :

Me Rita Araujo

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour le requérant :

Nom :

s.o.

 

Cabinet :

 

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 

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