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Dossiers : 2013-2568(IT)I

2013-2569(GST)I

 

ENTRE :

CHRISTOPHER RODERICK MACDONALD,

 

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu les 22 janvier et 23 avril 2014,
à Moncton (Nouveau-Brunswick)

Devant : L’honorable juge en chef adjoint Eugene P. Rossiter


 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelant :

Me Enrico A. Scichilone

Avocat de l’intimée :

Me Tokumbo C. Omisade

 

 

 

JUGEMENT

 

Les appels relatifs à la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, dont l’avis porte la date du 23 mai 2012 et le numéro de cotisation 1806423, ainsi qu’à la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d’accise, dont l’avis porte la date du 23 mai 2012 et le numéro de cotisation 1803477, sont accueillis, et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations, conformément aux motifs du jugement ci-joints.

 

          Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour d’octobre 2014

 

« E.P. Rossiter »

Juge en chef adjoint Rossiter

 

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour de décembre 2014.

 

M.-C. Gervais

 


Référence : 2014 CCI 308

Date : 20141020

Dossiers : 2013-2568(IT)I

2013-2569(GST)I

ENTRE :

CHRISTOPHER RODERICK MACDONALD,

 

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

[traduction française officielle]

 


MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge en chef adjoint Rossiter

 

Le contexte

[1]             Le 23 mai 2012, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établi à l’égard de l’appelant une cotisation relative à un montant de retenues à la source que devait Great Canadian Pub Inc. (« GCPI »), conformément au paragraphe 227.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu. À la même date, l’appelant s’est vu délivrer un second avis de cotisation l’obligeant de payer un montant de 18 713,77 $ à l’égard du défaut de GCPI de verser des taxes, comme l’exige le paragraphe 228(2) de la Loi sur la taxe d’accise. Des pénalités et des intérêts ont été ajoutés dans les deux cas.

[2]             L’appelant a déposé des avis d’opposition pour chacune des cotisations le 6 juillet 2012, et le ministre a établi des avis de ratification le 12 avril 2013. Les parties ont déposé par la suite des avis d’appel et des réponses à ces derniers, et les questions ont été jointes.

[3]             GCPI a exploité un bar à Moncton (Nouveau-Brunswick) du mois d’octobre 2007 et au mois de décembre 2009. Avant l’ouverture, Timothy Marney (« M. Marney »), le fondateur de GCPI, a présenté un exposé au cours de l’été 2007 devant un groupe d’investisseurs potentiels, dont faisait partie l’appelant, à l’occasion d’une réunion tenue à Moncton (Nouveau-Brunswick). Le 7 novembre 2007, l’appelant est devenu actionnaire de GCPI après avoir fait l’achat de cent (100) actions ordinaires de catégorie B de l’entreprise pour une somme de 10 000 $. Cet achat d’actions a été exécuté par le conseiller juridique de GCPI. À l’époque, l’appelant ne connaissait ni M. Marney ni aucun autre membre du personnel de direction de GCPI.

[4]             M. Marney et sa conjointe de fait, Geneviève Richard (« Mme Richard »), ont géré GCPI dès le départ. Mme Richard tenait les livres de GCPI et s’occupait de la dotation en personnel de l’entreprise. L’appelant, qui exerçait à l’époque un autre emploi, ne s’occupait pas des activités de l’entreprise, pas plus qu’il n’a travaillé pour GCPI à un moment quelconque. En fait, au début, rien n’était exigé du point de vue des activités commerciales, sinon son investissement de 10 000 $.

[5]             Peu après l’ouverture de l’entreprise, l’appelant est devenu un signataire autorisé à la banque de l’entreprise, ce qui lui accordait le pouvoir de signer des chèques. Dans son esprit, ce pouvoir ne lui avait été donné que parce qu’à l’époque il fallait que deux personnes signent les chèques. Il ne participait aucunement à l’exploitation quotidienne de l’entreprise, pas plus qu’il n’exerçait régulièrement de fonctions administratives. Les seuls rapports qu’il a eus avec les comptables de l’entreprise ont eu lieu lorsqu’il a signé des documents en vue de la production de déclarations de revenus au printemps 2008.

[6]             Peu après l’ouverture de l’entreprise, quelques-uns des actionnaires de GCPI ont demandé à l’appelant, de même qu’à M. Marney et à Mme Richard, de garantir un prêt commercial afin d’aider à maintenir l’entreprise à flot. On lui a dit que, s’il n’aidait pas à garantir le prêt, les dix actionnaires perdraient leur investissement, lui compris. Confronté à ce scénario alarmant, il a acquiescé à leur demande.

[7]             En décembre 2007, l’appelant a présenté une demande de prêt aux petites entreprises à la Banque de Nouvelle-Écosse, dont il avait appris à connaitre le personnel en raison de l’emploi qu’il exerçait. Un prêt d’un montant d’environ 225 000 $ a par la suite été approuvé et cosigné par l’appelant et Mme Richard. Selon les documents bancaires, Mme Richard était inscrite comme présidente de GCPI, et M. Marney et l’appelant, comme administrateurs de la société. Au moment de la signature du document de prêt, l’appelant ne savait pas que les noms des deux administrateurs initiaux de GCPI, M. Marney et John Bastarache, avaient été radiés du registre des administrateurs et que le nom de Mme Richard avait été ajouté en remplacement. Jusqu’à la date du prêt inclusivement, on n’a pas demandé à l’appelant de signer d’autres documents commerciaux ou organisationnels pour le compte de GCPI.

[8]             L’appelant n’a jamais assisté à une réunion des administrateurs. Il n’y a pas eu non plus de réunion des actionnaires en vue de la nomination d’administrateurs ou à toute autre fin.

[9]             Indépendamment de ce qui précède, l’appelant a été nommé comme administrateur de GCPI dans divers documents relatifs à l’entreprise – dont certains signés par lui – pendant un temps prolongé. Au nombre de ces documents figuraient divers certificats bancaires, des déclarations annuelles et des listes des administrateurs en vertu de la Loi sur les corporations commerciales, la base de données du Registre corporatif du Nouveau-Brunswick ainsi que divers formulaires ou documents de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »). Jamais l’appelant n’a produit lui-même un de ces documents auprès des autorités compétentes. Selon ses dires, il apposait simplement sa signature quand les avocats ou les comptables de GCPI, la banque ou l’ARC, selon le cas, lui présentaient des documents.

[10]        L’appelant signait les documents relatifs à l’entreprise à titre de secrétaire‑trésorier, de « propriétaire » ou, parfois, d’administrateur. Il soutient toutefois qu’il n’a jamais voulu prendre part aux activités de l’entreprise à titre d’administrateur ou de dirigeant de cette dernière. Il avait simplement fait un investissement de 10 000 $, et toutes les mesures qu’il avait prises avaient pour but de protéger cet investissement. Il prétend qu’il n’a jamais réellement compris la différence qu’il y a entre les administrateurs, les dirigeants ou les actionnaires, ou leurs responsabilités respectives, et qu’il n’exerçait aucun contrôle ni aucune influence sur la direction de la société.

[11]        Pour ce qui est des renseignements financiers, M. Marney n’a pas fourni de renseignements de ce genre sur GCPI aux actionnaires de l’entreprise, y compris l’appelant, pendant toute l’année 2008. D’autres actionnaires demandaient à l’appelant des renseignements financiers, car ils étaient tous essentiellement tenus dans l’ignorance. Cependant, l’appelant soutient qu’à titre d’actionnaire, il n’était pas différent des autres, en ce sens qu’il ne recevait pas de renseignements appropriés. Son emploi à plein temps et son intervention limitée dans les affaires internes de l’entreprise l’empêchaient aussi de répondre pleinement aux préoccupations des autres actionnaires. Il avait signé des chèques en blanc, mais il affirme qu’à titre de signataire autorisé, il l’avait fait pour des raisons de commodité, une fois par semaine environ quand il s’arrêtait au pub pour boire une bière après le travail.

[12]        En septembre 2009, M. Marney a informé l’appelant que Mme Richard faisait une faillite personnelle et qu’elle serait obligée de liquider ses actions. L’avocat de GCPI a donné instruction à l’appelant de signer un document en vue de l’acquisition des actions de Mme Richard, ce qu’il a fait en présence de l’avocat de l’entreprise. Le 20 septembre 2009, ou aux environs de cette date, l’appelant a acheté les actions de Mme Richard au prix de 1 $. Sa conception de l’entente était qu’il n’interviendrait pas dans les activités de GCPI, pas plus qu’il ne prendrait part à une décision quelconque, comme c’était le cas auparavant. M. Marney et Mme Richard ont tous deux continué à travailler au pub jusqu’au 15 octobre 2009 environ, date à laquelle ils ont tous deux démissionné et ont cessé de participer aux activités de l’entreprise.

[13]        Quand l’appelant a acheté les autres actions de GCPI, son avocat a assuré les services de représentation, mais la question de la diligence raisonnable n’a jamais été abordée. Le seul document qu’il a passé en revue a été le registre des procès‑verbaux de l’entreprise. À cette époque, il ignorait que celle-ci n’avait pas versé à l’ARC les montants de retenues à la source ou de taxe sur les produits et services (« TPS ») appropriés. Il affirme n’avoir pas été au courant de l’ampleur du problème des dettes de l’entreprise avant le mois de janvier 2010, après que l’entreprise eut mis fin à ses activités.

[14]        Le 30 septembre 2009, l’appelant a appris que M. Marney ne pouvait pas acheter de fournitures pour GCPI parce que le compte bancaire de l’entreprise avait été gelé à la suite de la délivrance, par le ministre, d’une demande formelle de paiement à la Banque de Nouvelle-Écosse, relativement aux montants de TPS non versés. Cette nouvelle l’a inquiété, car il avait cosigné le prêt commercial et était cosignataire des chèques de l’entreprise. Il savait que, s’il n’agissait pas rapidement, l’entreprise fermerait.

[15]        Un agent de l’ARC lui a dit que, pour dégeler le compte, il devrait signer une lettre de renonciation. Aucun agent de l’ARC n’a examiné avec lui la teneur de cette lettre et, quoi que dise le document, l’appelant n’a jamais demandé d’avis juridique avant de signer la lettre. La situation à l’époque était telle qu’il était l’unique détenteur des actions ordinaires de GCPI et qu’il fallait que les comptes bancaires soient dégelés. Il a signé le document à la hâte à titre de propriétaire et d’actionnaire, et non d’administrateur, et l’a renvoyé par télécopieur à l’ARC. Les comptes bancaires ont par la suite été dégelés et l’entreprise a pu poursuivre ses activités. L’appelant affirme qu’il s’agit là de la première fois où il a pris conscience que GCPI devait de l’argent à l’ARC. À l’époque où l’appelant avait acquis les actions de Mme Richard, les dettes de l’entreprise ne lui avaient jamais été dévoilées, pas plus qu’aux autres actionnaires.

[16]        Après la signature de la lettre de renonciation de l’ARC et le départ de M. Marney et de Mme Richard, l’appelant a tenté de trouver des investisseurs qui reprendraient l’entreprise pour la somme dérisoire de 1 $. Il avait un emploi à temps plein qui l’occupait douze heures par jour et il ne pouvait pas exploiter l’entreprise parce qu’il n’avait pas le savoir-faire requis. On lui a finalement présenté deux personnes qui souhaitaient exploiter l’entreprise, Shelley Richard et Angela Niles. Quand les deux se sont présentées au pub pour prendre en charge les activités, elles ont demandé comment fonctionnaient les lumières et le dispositif d’alarme et elles ont demandé à voir les documents administratifs de l’entreprise. L’appelant s’était si peu occupé de cette dernière qu’il n’avait même pas su leur montrer où se trouvaient les documents administratifs, comment allumer les lumières ou à quel endroit se trouvait le dispositif d’alarme.

[17]        Le 31 décembre 2009, l’appelant a reçu de Shelley Richard un appel téléphonique l’informant que le service hydroélectrique du Nouveau-Brunswick avait coupé l’électricité et que l’entreprise était fermée. L’appelant a appelé la banque et l’a avisée que l’entreprise était fermée. Il a demandé que l’on garantisse les éléments d’actif pour la banque et pour l’ARC.

[18]        L’appelant ne s’est jamais rendu compte, avant que l’entreprise ferme ses portes, qu’il était personnellement redevable de la dette de cette dernière à l’ARC. En janvier 2010, à la suite de la fermeture, il a constaté que quelqu’un le faisait passer pour un administrateur de GCPI et que des dossiers d’entreprise avaient été remis à l’ARC à cet effet. À sa requête, l’ARC a plus tard reçu de l’appelant le registre des procès-verbaux de l’entreprise.

[19]        Après la fermeture de l’entreprise, M. Marney a tenté de reprendre les activités en tant que bar-salon sous l’enseigne « Great Canadian Pub » ou « Great Canadian Pub Lounge », et ce, à quelques coins de rue de l’emplacement initial. Ce projet n’a pas eu de succès en fin de compte et l’établissement a fermé.

Les questions en litige

1.                 L’appelant était-il un administrateur de droit ou de fait de GCPI en date du 1er janvier 2009 et donc responsable, selon le paragraphe 227.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu et le paragraphe 323(1) de la Loi sur la taxe d’accise?

2.                 Dans l’affirmative, l’appelant peut-il invoquer la défense de diligence raisonnable que prévoit le paragraphe 227.1(3) et le paragraphe 323(3) de la Loi de l’impôt sur le revenu et de la Loi sur la taxe d’accise, respectivement?

3.                 Quels sont les délais de prescription applicables, et les cotisations respectives sont-elles prescrites?

La position de l’appelant

[20]        L’appelant est d’avis qu’en date du 1er janvier 2009, il n’était ni un administrateur de droit ni un administrateur de fait de GCPI. Il soutient subsidiairement que, si la Cour conclut qu’il était bel et bien un administrateur, il a fait preuve d’une diligence raisonnable, de sorte que les paragraphes 227.1(3) de la Loi de l’impôt sur le revenu et 323(3) de la Loi sur la taxe d’accise s’appliquent. En outre, il affirme qu’indépendamment de ce qui précède, chacune de ses cotisations respectives a été établie après l’expiration du délai de prescription de deux ans applicable et n’est donc pas valide.

La position de l’intimée

[21]        Contrairement à l’appelant, l’intimée affirme que ce dernier était en fait un administrateur de droit ou un administrateur de fait, et donc responsable selon les paragraphes 227.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu et 323(1) de la Loi sur la taxe d’accise. De plus, elle affirme que l’appelant n’a pas fait preuve de diligence dans les circonstances. Elle soutient donc que les paragraphes 227.1(3) de la Loi de l’impôt sur le revenu et 323(3) de la Loi sur la taxe d’accise ne s’appliquent pas. Enfin, elle affirme que les cotisations ont été établies avant l’expiration du délai de prescription de deux ans.

Les dispositions législatives applicables

[22]        Sous le régime de la Loi de l’impôt sur le revenu, un administrateur peut être tenu personnellement responsable du défaut d’une société de déduire ou de verser une somme exigée par la loi, comme le précise le paragraphe 227.1(1) :

 (1) Lorsqu’une société a omis de déduire ou de retenir une somme, tel que prévu aux paragraphes 135(3) ou 135.1(7) ou aux articles 153 ou 215, ou a omis de verser cette somme ou a omis de payer un montant d’impôt en vertu de la partie VII ou VIII pour une année d’imposition, les administrateurs de la société, au moment où celle-ci était tenue de déduire, de retenir, de verser ou de payer la somme, sont solidairement responsables, avec la société, du paiement de cette somme, y compris les intérêts et les pénalités s’y rapportant.

[23]        Les limites à cette responsabilité sont énoncées au paragraphe 227.1(2) :

227.1 (2) Un administrateur n’encourt la responsabilité prévue au paragraphe (1) que dans l’un ou l’autre des cas suivants :

a)         un certificat précisant la somme pour laquelle la société est responsable selon ce paragraphe a été enregistré à la Cour fédérale en application de l’article 223 et il y a eu défaut d’exécution totale ou partielle à l’égard de cette somme;

b)         la société a engagé des procédures de liquidation ou de dissolution ou elle a fait l’objet d’une dissolution et l’existence de la créance à l’égard de laquelle elle encourt la responsabilité en vertu de ce paragraphe a été établie dans les six mois suivant le premier en date du jour où les procédures ont été engagées et du jour de la dissolution;

c)         la société a fait une cession ou une ordonnance de faillite a été rendue contre elle en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et l’existence de la créance à l’égard de laquelle elle encourt la responsabilité en vertu de ce paragraphe a été établie dans les six mois suivant la date de la cession ou de l’ordonnance de faillite.

[24]        S’il est jugé que le paragraphe 227.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu s’applique, l’administrateur peut invoquer une défense de diligence raisonnable aux termes du paragraphe 227.1(3) :

227.1 (3) Un administrateur n’est pas responsable de l’omission visée au paragraphe (1) lorsqu’il a agi avec le degré de soin, de diligence et d’habileté pour prévenir le manquement qu’une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables.

[25]        Le pouvoir de cotisation dont dispose le ministre est généralement assujetti à un délai de prescription de deux ans, comme il est mentionné au paragraphe 227.1(4) :

227.1 (4) L’action ou les procédures visant le recouvrement d’une somme payable par un administrateur d’une société en vertu du paragraphe (1) se prescrivent par deux ans à compter de la date à laquelle l’administrateur cesse pour la dernière fois d’être un administrateur de cette société.

[26]        Sous le régime de la Loi sur la taxe d’accise, pour ce qui est de la responsabilité des administrateurs, la disposition correspondante est le paragraphe 323(1) :

 (1) Les administrateurs d’une personne morale au moment où elle était tenue de verser, comme l’exigent les paragraphes 228(2) ou (2.3), un montant de taxe nette ou, comme l’exige l’article 230.1, un montant au titre d’un remboursement de taxe nette qui lui a été payé ou qui a été déduit d’une somme dont elle est redevable, sont, en cas de défaut par la personne morale, solidairement tenus, avec cette dernière, de payer le montant ainsi que les intérêts et pénalités afférents.

[27]        Les limites concernant cette responsabilité sont énoncées au paragraphe 323(2) :

323. (2) L’administrateur n’encourt de responsabilité selon le paragraphe (1) que si :

a)      un certificat précisant la somme pour laquelle la personne morale est responsable a été enregistré à la Cour fédérale en application de l’article 316 et il y a eu défaut d’exécution totale ou partielle à l’égard de cette somme;

b)      la personne morale a entrepris des procédures de liquidation ou de dissolution, ou elle a fait l’objet d’une dissolution, et une réclamation de la somme pour laquelle elle est responsable a été établie dans les six mois suivant le premier en date du début des procédures et de la dissolution;

c)      la personne morale a fait une cession, ou une ordonnance de faillite a été rendue contre elle en application de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, et une réclamation de la somme pour laquelle elle est responsable a été établie dans les six mois suivant la cession ou l’ordonnance.

[28]        Comme dans le cas de la Loi de l’impôt sur le revenu, un administrateur peut invoquer une défense de diligence raisonnable lorsque sa responsabilité est engagée, aux termes du paragraphe 323(1) :

323. (3) L’administrateur n’encourt pas de responsabilité s’il a agi avec autant de soin, de diligence et de compétence pour prévenir le manquement visé au paragraphe (1) que ne l’aurait fait une personne raisonnablement prudente dans les mêmes circonstances.

[29]        Enfin, d’après le paragraphe 323(5), un délai de prescription de deux ans s’applique :

323. (5) L’établissement d’une telle cotisation pour un montant payable par un administrateur se prescrit par deux ans après qu’il a cessé pour la dernière fois d’être administrateur.

I. Analyse

[30]        Dans la décision Mosier v. R., [2001] G.S.T.C. 124, le juge en chef adjoint Bowman, plus tard juge en chef, mentionne qu’en ce qui concerne la responsabilité des administrateurs sous le régime de la Loi de l’impôt sur le revenu et de la Loi sur la taxe d’accise, un administrateur peut être un administrateur de droit ou un administrateur de fait. Un administrateur de droit est une personne qui a été nommée comme telle en vertu de la loi sur les sociétés du ressort dans lequel la personne morale a été créée ou reprise, selon le cas. Mais un administrateur de fait, comme le signale le juge en chef adjoint Bowman, peut revêtir deux formes : (i) celle d’une personne qui est apparemment élue en bonne et due forme, mais qui ne possède pas toutes les capacités nécessaires en vertu de la loi sur les sociétés pertinente, ou (ii) celle d’une personne qui assume simplement le rôle d’administrateur sans prétendre à aucune capacité juridique.

II. Administrateur de droit

[31]        Comme il est signalé ici, une personne devient et cesse de devenir un administrateur de droit en vertu de la loi sur les sociétés du ressort dans lequel la société a été créée ou reprise. En l’espèce, le ressort en question est le Nouveau‑Brunswick et la loi applicable est la Loi sur les corporations commerciales de cette province. Le texte du paragraphe 63(3) de cette loi est le suivant :

63. (3) L’élection ou la nomination d’une personne au poste d’administrateur ne devient effective que :

 

a)         si la personne était présente à la réunion au moment de son élection ou de sa nomination et n’a pas refusé d’agir en qualité d’administrateur, ou

b)         si elle était absente, lors de son élection ou de sa nomination,

(i)         elle a consenti par écrit, avant son élection ou sa nomination ou dans les dix jours de celle-ci, à agir en qualité d’administrateur, ou

(ii)        elle a agi en cette qualité conformément à l’élection ou la nomination.

[32]        Par ailleurs, l’article 74 de cette loi dispose :

74. Les actes des administrateurs ou des dirigeants sont valides nonobstant l’irrégularité de leur élection ou nomination ou leur inhabilité.

[33]        Le registre public des administrateurs pourrait amener à présumer qu’une personne est un administrateur, mais il est possible de réfuter cette présomption s’il existe une preuve que la personne n’a jamais consenti à être administrateur.

[34]        La Cour canadienne de l’impôt a conclu antérieurement qu’une personne qui n’a jamais été mise au courant qu’elle était un administrateur, et qui n’a jamais consenti à l’être, n’est pas un administrateur de droit. Dans la décision Lau v. R., [2003] G.S.T.C. 1, le juge Bowman, plus tard juge en chef, a conclu que l’une des deux contribuables en cause n’était pas un administrateur parce qu’elle avait omis de signer le consentement à agir comme tel et qu’un formulaire où elle était inscrite comme administrateur avait été signé par erreur par un tiers. Jamais elle n’avait consenti à agir comme administrateur, jamais elle n’avait été élue comme administrateur par l’unique actionnaire avec droit de vote et jamais elle ne s’était fait passer pour un administrateur.

[35]        Dans la décision Hay c. Canada, 2004 CCI 51, le ministre a fait valoir que M. Hay était administrateur de droit. Cependant, ce dernier soutenait qu’il ne l’avait jamais été parce qu’il n’avait jamais accepté d’agir en cette qualité. Il avait apparemment été nommé administrateur provisoire aux termes d’un formulaire accompagnant les statuts constitutifs, même s’il n’avait jamais autorisé le fondateur à le désigner comme tel, et il n’avait été mis au courant de cette désignation que trois ou quatre ans plus tard. Dans la décision Hay, le juge Archambault a reconnu qu’en common law il faut qu’un administrateur ait donné son consentement, soit explicitement soit implicitement, pour être considéré comme tel. Le juge a conclu qu’étant donné que la désignation de M. Hay à titre d’administrateur provisoire avait été faite par le fondateur sans son consentement, cette désignation était invalide et il ne pouvait donc pas être considéré comme un administrateur de droit.

[36]        Dans le présent appel, il ressort de la preuve qu’il n’y a eu aucune assemblée des administrateurs dans le cadre de laquelle des administrateurs ont été nommés. L’appelant n’a signé aucun dossier dans lequel il consentait à agir de quelque manière comme un administrateur. En fait, il ne savait même pas qu’il l’était, même s’il avait signé quelques documents à cet effet. Selon son propre témoignage, il ne faisait que signer des documents, dont certains exigeaient deux signatures, quand on lui en faisait la demande. Il a reconnu précisément qu’il était l’une des deux personnes habilitées à signer des chèques pour GCPI, mais il a déclaré avec fermeté et à plusieurs reprises qu’il n’avait pas consenti à être un administrateur, pas plus qu’il n’avait eu l’intention d’exercer cette fonction à un moment quelconque pour la société. La preuve présentée montrait que la nomination de l’appelant comme administrateur n’avait pas été exécutée d’une manière conforme à la loi applicable. De plus, rien dans le registre des procès‑verbaux de la société n’indiquait que sa nomination en tant qu’administrateur avait été effectuée en bonne et due forme et exécutée d’une manière conforme au paragraphe 63(3) de la Loi sur les corporations commerciales du Nouveau-Brunswick. En avril 2012, les actionnaires de GCPI ont adopté une résolution confirmant que l’appelant n’avait jamais été administrateur de la société.

[37]        Au vu de la preuve, il est évident que l’appelant n’a pas consenti à être un administrateur. Il a ignoré qu’il l’était jusqu’en 2010, il n’a pas signé les documents requis pour être administrateur, et la société n’a pas pris de mesures appropriées pour nommer l’appelant au poste d’administrateur. D’après la Loi sur les corporations commerciales du Nouveau-Brunswick, l’appelant n’aurait pas pu être et n’a pas été administrateur de droit.

III. Administrateur de fait

[38]        Dans l’arrêt Wheeliker v. R., [1999] 2 C.T.C. 395, la Cour d’appel fédérale a déclaré : « […] en utilisant le terme ‟administrateurs” sans restrictions au paragraphe 227.1(1), le législateur a voulu qu’il recouvre tous les genres d’administrateurs reconnus en droit des sociétés, notamment les administrateurs de droit et de fait. » En conséquence, la Cour d’appel fédérale a conclu que l’on peut imposer la responsabilité à l’égard du défaut d’une société de verser des montants de taxe à des personnes qui agissent comme administrateurs, même sans une nomination valide.

[39]        Cependant, le concept de l’administrateur de fait devrait se limiter à ceux qui se font passer pour des administrateurs. L’ancien juge en chef Bowman, dans la décision Scavuzzo v. R., [2005] G.S.T.C. 199, a mis la Cour en garde contre le fait d’élargir la portée de ce concept. Dans cette affaire, M. Scavuzzo avait démissionné comme administrateur de l’entreprise mais, après sa démission, il avait continué de signer des chèques en sa qualité de directeur général. Malgré cela, et ainsi que l’indique le passage qui suit, l’ancien juge en chef Bowman a conclu que l’appelant n’avait pas pris part aux décisions importantes de l’entreprise et qu’il ne s’était pas fait passer pour un administrateur auprès de tiers.

27        Je crois qu'il sera évident qu’il faut employer l’expression « administrateur de fait » avec prudence. Cette expression n’a pas une portée aussi étendue que celle qui lui est parfois attribuée. Ainsi, elle ne s’applique pas, du moins pas pour ce qui est de la responsabilité dérivée des administrateurs en vertu de la LIR et de la LTA, à quiconque exerce un pouvoir au sein de la société. Elle peut s’appliquer à des personnes qui, bien qu’elles soient élues à titre d’administrateurs, ne le sont peut-être pas à cause de certaines exigences techniques. Elle peut également inclure des personnes qui se présentent comme des administrateurs, de sorte que les tiers se fondent sur leurs pouvoirs à titre d’administrateurs. Tel est essentiellement le principe sur lequel le juge Noël a fondé sa conclusion au paragraphe 20 de l’arrêt Wheeliker.

[40]        Il convient de signaler que l’ancien juge en chef Bowman a cité en ces termes la directive RCD‑95‑12 de l’ARC, au sujet de la responsabilité de l’administrateur : « [i]l faut être très prudent avant d’établir une cotisation à l’égard d’un administrateur “de fait”. Le fait qu’une personne signe les chèques au nom de la compagnie n’est pas suffisant pour la considérer comme administrateur “de fait”. Règle générale, il ne faut pas établir de cotisation à l’égard d’un administrateur “de fait” si aux dates visées d’autres administrateurs étaient légalement nommés. Il ne faut envisager d’établir de cotisation à l’encontre d’un administrateur de fait que dans les cas où la personne se comporte comme un administrateur. Il doit y avoir une preuve écrite de ce comportement ».

[41]        Dans la décision Perricelli v. R., 2002 G.T.C. 244, le juge Miller fait remarquer que le facteur qui permet de conclure qu’une personne ne peut pas être considérée comme un administrateur de fait est qu’elle « ne se [considère] plus comme un administrateur et ne [croit] en aucun moment disposer du pouvoir nécessaire pour donner des conseils ou exercer une influence ou un contrôle relativement à la gestion ou l’administration de la société ».

[42]        Dans la décision Hay c. Canada, 2004 CCI 51, le juge Archambault, se reportant à la décision Perricelli c. R., précitée, a fait remarquer que M. Hay n’était pas un administrateur de fait parce qu’il n’avait jamais agi à ce titre ni signé un document à cet effet et qu’il n’avait jamais siégé à une réunion du conseil d’administration. Le juge Archambault a déclaré aussi que les mesures prises afin de satisfaire aux exigences de la Loi sur la taxe d’accise, comme l’établissement de factures, les rencontres avec la vérificatrice, l’embauche d’un avocat et la signature de chèques, ne constituaient pas en soi des actes accomplis par un administrateur. Il a de plus conclu que Hay n’avait jamais exercé un contrôle sur les autres dirigeants de l’entreprise. Il suivait simplement les instructions du vice‑président de l’entreprise, agissant comme un homme de paille.

[43]        Dans la décision Mikloski c. R., 2004 CCI 253, le ministre a fait valoir que l’appelante, dans les documents de l’entreprise, s’était fait régulièrement passer pour un administrateur et avait donc agi comme un administrateur de fait de l’entreprise. Ces documents comprenaient un bail relatif à des locaux qu’elle avait signé comme témoin, un formulaire d’inscription de la société auprès de Revenu Québec où son nom apparaissait dans le champ réservé aux dirigeants et aux administrateurs de l’entreprise, des déclarations de revenus de la société où elle avait apposé sa signature dans des sections réservées aux administrateurs, ainsi que des déclarations de TPS et de taxe de vente du Québec et les chèques les accompagnant qu’elle avait signés. Malgré tout cela, elle niait avoir eu l’intention de se faire passer pour un administrateur. Le juge Paris a souscrit à sa position, disant qu’il n’était pas persuadé que les documents établissaient qu’elle avait l’intention de se présenter comme administrateur ou qu’elle avait même apposé sa signature en cette qualité, à l’exception des déclarations de revenus de la société. Il a ajouté que le poste de secrétaire, titre qu’elle s’était donné sur le formulaire de Revenu Québec, ou celui de tout autre dirigeant, n’équivalait pas à celui d’administrateur. Il a déclaré que le rôle d’administrateur était de gérer les affaires de la société et de prendre des décisions importantes à son égard. Il a conclu que le rôle de Mme Mikloski était très limité et ne concordait pas avec celui d’un administrateur.

[44]        Dans la présente affaire, il ressort des faits que l’appelant n’était qu’actionnaire. Il a déclaré de façon non équivoque que sa participation à GCPI n’était qu’un investissement pour lui. Il avait assisté à une réunion d’éventuels investisseurs à l’invitation d’autres personnes et il ne connaissait pas vraiment les dirigeants qui exploitaient l’entreprise. Il est ressorti clairement de son témoignage qu’il n’avait à aucun moment consenti à être administrateur. Il ne s’est rendu compte que très tard qu’il était en fait inscrit comme administrateur auprès de la Division des corporations du Nouveau-Brunswick et, une fois qu’il en a eu connaissance, il a tout fait pour que son nom soit radié de la liste. Il n’a signé aucun document ni pris aucune des mesures requises pour être nommé comme administrateur, et il n’existe dans le registre des procès-verbaux de la société aucune mention qui dénote qu’il a jamais occupé ce poste. De plus, toutes les décisions importantes concernant l’entreprise ont été prises par des personnes autres que lui.

[45]        Certes, l’appelant a effectivement signé quelques documents bancaires et certificats l’identifiant comme dirigeant ou administrateur, mais ces documents ont été signés par lui à la requête d’autres personnes, comme des avocats, des banquiers, des comptables, etc. Il a cosigné des chèques de l’entreprise parce qu’il fallait deux signatures. Il a signé automatiquement des chèques en blanc afin de payer le loyer et des achats et de verser les payes, et il s’est servi de sa carte de crédit pour payer des fournitures commerciales et des factures. Il a signé les documents relatifs au prêt commercial, à l’instigation des autres actionnaires, parce qu’à l’époque, l’entreprise avait des problèmes et qu’on lui avait dit que, s’il ne signait pas ces documents, tous les actionnaires perdraient leur investissement, lui compris. Il ignorait qui étaient les administrateurs, pas plus qu’il ne savait qu’il avait été désigné par d’autres comme administrateur, ni quand ou si des administrateurs avaient été retirés ou remplacés. Il n’y avait eu aucune assemblée des administrateurs ou des actionnaires, ni aucune proposition destinée à valider des nominations d’administrateurs ou même à discuter des affaires de l’entreprise.

[46]        L’appelant a déclaré qu’il avait simplement pris à sa charge les actions de Mme Richard sans savoir dans quel état se trouvaient les comptes de l’entreprise à cette époque. Lorsque les comptes de l’entreprise avaient été gelés, il n’avait pas pris connaissance de l’ampleur des dettes de cette dernière avant qu’il ne fût trop tard, en janvier 2010. Il affirme que la lettre de renonciation de l’ARC, qu’il a signée à titre de « propriétaire », n’a été signée que pour dégeler les comptes de l’entreprise. Cette mesure a peut-être été prise d’urgence, mais certainement en état de choc et sans vraiment connaître la situation de l’entreprise, au point où il a signé la lettre sans même l’examiner. Quand il a tenté de trouver quelqu’un d’autre pour exploiter l’entreprise, il ne savait même pas où se trouvaient les livres comptables, ni comment allumer ou éteindre les lumières.

[47]        Comme il a été signalé plus tôt, l’appelant a signé divers documents concernant l’entreprise, dont la pièce R‑1, une convention de crédit concernant GCPI, signée par l’appelant à titre de garant et de secrétaire-trésorier de l’entreprise; la pièce R‑2, un certificat d’administrateur et de dirigeant adressé à la Banque de Nouvelle-Écosse et dans lequel l’appelant est inscrit comme secrétaire‑trésorier de l’entreprise ainsi que comme administrateur; la pièce R‑3, une résolution bancaire que l’appelant a signée en sa qualité d’administrateur, de dirigeant ou de membre; la pièce R‑4, un document bancaire et une déclaration concernant l’entreprise, eux aussi signés à titre de secrétaire-trésorier, avec Mme Richard; la pièce R‑5, un certificat semblable à la pièce R‑2, daté du 24 février 2009; la pièce R‑6, une version révisée de la pièce R‑5, où l’appelant figure à titre d’unique dirigeant et administrateur de l’entreprise; la pièce R‑8, un autre certificat d’administrateur et de dirigeant adressé à la Banque et daté du 5 novembre 2009, où le nom de Christopher MacDonald apparaît là encore comme administrateur et dirigeant, mais signé cette fois-ci à titre de « propriétaire ». Dans le même ordre d’idées, la pièce A‑1, onglet 1, est un formulaire RC59 (Consentement de l’entreprise) que l’appelant a signé à titre d’administrateur de la société le 12 décembre 2008, et la pièce A‑1, onglet 4, est la lettre de renonciation signée en faveur de l’ARC en vue d’obtenir le déblocage des comptes de l’entreprise qui avaient été gelés à la suite de la délivrance, par le ministre, d’une demande formelle de paiement à la banque de l’entreprise.

[48]        L’intimée signale qu’il y a cinq pièces que l’appelant a signées pour le compte de l’entreprise et sur lesquelles des tiers, dont la Banque de Nouvelle‑Écosse, des comptables d’entreprise, l’ARC et KPMG, se sont peut-être fondés pour affirmer que l’appelant était bel et bien administrateur. Ces pièces comprennent, par exemple, la pièce R‑16, la déclaration de revenus de société de l’entreprise, que l’appelant a censément produite le 4 novembre 2008 et qu’il a signée à titre d’administrateur. Une autre de ces pièces est la pièce R‑10, un courriel de l’appelant aux comptables de l’entreprise, daté du 6 avril 2009 et faisant état de problèmes de taxe de vente harmonisée causés par les administrateurs précédents de l’entreprise.

[49]        Malgré tous les documents qui précèdent, l’appelant a déclaré avec fermeté qu’il n’était pas un administrateur de l’entreprise, qu’il avait toujours ignoré qu’il l’était et qu’il n’avait jamais consenti à l’être. Certains documents de l’entreprise désignent publiquement l’appelant comme administrateur de la société, mais il n’y a jamais consenti. Il a semblé être une personne quelque peu naïve. Sa conduite dénote qu’il tentait simplement de protéger son investissement et celui des autres actionnaires. Pour ce qui est des documents bancaires et des autres documents où son nom apparaît comme administrateur, il s’est fié entièrement aux auteurs de ces documents, qui étaient essentiellement des avocats d’entreprise qui n’avaient donné que peu d’explications, voire aucune explication, quant à la nature des documents en question ou à la situation financière de l’entreprise.

[50]        J’ai trouvé que l’appelant était une personne franche et honnête, qui a témoigné de manière claire et concise et qui, en contre-interrogatoire, n’a pas fléchi. Il a fait les admissions appropriées quand il le fallait, relativement aux signatures fournies et à sa connaissance des documents en question. Dans l’ensemble de son témoignage, il a mentionné de manière claire, cohérente et explicite qu’il n’avait jamais eu l’intention d’agir comme administrateur, qu’on ne lui avait jamais demandé de le faire, qu’il ignorait qu’il l’était et qu’en tout temps il n’était intervenu qu’à seule fin de protéger son investissement.

[51]        Au vu de l’ensemble de la preuve, je conclus que l’appelant n’était pas un administrateur de fait. Comme j’ai décidé qu’il n’était ni un administrateur de droit ni un administrateur de fait, sa responsabilité n’est pas engagée et il n’est pas nécessaire de traiter des autres questions soulevées en l’espèce. L’appel est accueilli et l’affaire est déférée au ministre pour nouvel examen, conformément aux motifs qui précèdent.

          Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour d’octobre 2014.

 

 

 

« E.P. Rossiter »

Juge en chef adjoint Rossiter

 

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour de décembre 2014.

 

M.-C. Gervais


 

 


RÉFÉRENCE :

2014 CCI 308

 

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :

 

2013-2568(IT)I et 2013-2569(GST)I

 

INTITULÉ :

 

CHRISTOPHER RODERICK MACDONALD ET SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

 

Moncton (Nouveau-Brunswick)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

 

Le 22 janvier 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

 

L’honorable juge en chef adjoint Eugene P. Rossiter,

 

DATE DU JUGEMENT :

 

Le 20 octobre 2014

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelant :

Me Enrico A. Scichilone

 

Avocat de l’intimée :

 

Me Tokumbo C. Omisade

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour l’appelant :

Nom :

Enrico A. Scichilone

 

Cabinet :

Actus Law Droit

Moncton (Nouveau-Brunswick)

 

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 

 

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