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Date : 20150203


Dossier : IMM-3895-14

Référence : 2015 CF 129

Montréal (Québec), le 3 février 2015

En présence de monsieur le juge Shore

ENTRE :

NADEGE YAMDI GENU

partie demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

partie défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Introduction

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR] d’une décision de la Section de la protection des réfugiés [SPR] portée en appel devant la Section d’appel des réfugiés [SAR].


II.                Faits

[2]               La demanderesse est une citoyenne du Cameroun qui allègue une crainte de persécution par son mari, Isaac Fokou [M. Fokou], en raison de son appartenance au groupe social des femmes victimes de violence conjugale.

[3]               D’emblée, la Cour constate que les parties offrent des versions très différentes des faits entourant la demande.

[4]               D’une part, la demanderesse prétend être commerçante et avoir deux enfants, Louise Angéline Yamdjeu et Dylan Giovani Biabo, nés le 14 février 2011 et le 8 mai 2012, dont le père est Jules Nutelly Kemtcheu [M. Kemtcheu]. M. Kemtcheu aurait abandonné la demanderesse et ses enfants puisqu’il n’était plus en mesure de payer la dot et de subvenir aux besoins de sa famille.

[5]               Honteux du fait que la demanderesse ait deux enfants nés hors mariage, le père de la demanderesse l’aurait mariée de force à un homme septuagénaire et riche, M. Fokou, le 5 novembre 2012.

[6]               Depuis le début de sa vie commune avec M. Fokou, la demanderesse allègue avoir régulièrement été victime d’abus et de violence physique et sexuelle de la part de celui-ci. Entre autres, M. Fokou aurait battu la demanderesse jusqu’à lui causer une surdité permanente à l’oreille gauche et l’aurait agressée sexuellement. La demanderesse a témoigné que M. Fokou la considérait comme une « marchandise ».

[7]               La demanderesse aurait fui son domicile pour se rendre chez une amie, qui l’aurait aidée à obtenir un visa temporaire auprès des autorités canadiennes à Dakar. La demanderesse prétend que les documents soumis au soutien de sa demande de visa étaient falsifiés et qu’elle ignorait les démarches ayant mené à l’obtention de son visa.

[8]               La demanderesse prétend avoir voyagé via Addis Abeda, en Éthiopie, pour arriver au Canada le 19 octobre 2013. La demanderesse a réclamé l’asile le 6 novembre 2013.

[9]               Le 27 décembre 2013, le Ministre est intervenu afin de contester la crédibilité de la demanderesse. Le Ministre a déposé devant la SPR le dossier de demande de visa de la demanderesse et les notes tirées du Système de soutien des opérations des bureaux locaux de l’agent des visas. Ces documents présentent une version bien différente des faits allégués par la demanderesse.

[10]           Notamment, il se dégage du dossier de visa que la demanderesse serait plutôt mariée à Clément Ebong Ngole [M. Ngole]. Ce dernier serait également le père de ses deux enfants, Louise Angéline Ebong Yamdjeu et Clément Ebong Ngole, nés le 18 décembre 2005 et le 14 février 2011.

[11]           Le dossier de demande de visa contient également une attestation d’emploi, une autorisation de congé annuel et un contrat de travail démontrant que la demanderesse travaillait à titre de Directrice logistique et transport pour la compagnie Eleh Maritime & Services, S.A.

[12]           Les documents indiquent que la demanderesse et M. Ngole seraient arrivés au Canada via Paris, France. De plus, la demanderesse et M. Ngole auraient cherché à séjourner au Canada sous le prétexte de leur lune de miel.

[13]           Suite à une audience devant la SPR, la demande de statut de réfugié de la demanderesse a été rejetée le 29 janvier 2014, au motif de son manque de crédibilité.

III.             Décision contestée

[14]           Le 23 avril 2014, la SAR rejette l’appel et confirme la décision de la SPR. La SAR conclut que le récit présenté dans la demande de visa de la demanderesse reflète la réalité des faits. La SAR considère que la revendication de statut de réfugié et le témoignage oral de la demanderesse ont été fabriqués.

[15]           D’emblée, la SAR adresse les questions préliminaires relatives à sa compétence et à la portée de l’appel dont elle est saisie. S’appuyant sur la jurisprudence adressant la compétence des tribunaux administratifs d’appel, la SAR énonce que son rôle n’est pas de réévaluer la preuve, mais plutôt de faire preuve de retenue envers les conclusions de crédibilité de la SPR.

[16]           Par analogie au régime de contrôle judiciaire tel qu’appliqué par la Cour fédérale envers les décisions de la SPR, la SAR conclut que la norme applicable est celle de la décision raisonnable (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, [2008] 1 RCS 9 [Dunsmuir]; Ndam c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 513; Ferencova c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 443).

[17]           Quant au fond de l’appel, la SAR conclut que la SPR n’a pas commis d’erreur dans l’appréciation de la preuve et que la SPR a fourni des motifs suffisants afin de disposer de la demande.

IV.             Point en litige

[18]           La SAR a-t-elle commis une erreur en confirmant les conclusions de la SPR quant au manque de crédibilité de la demanderesse?

V.                Législation

[19]           Les articles 96 et 97 de la LIPR énoncent le droit applicable à la détermination du statut de réfugié au Canada :

Définition de “réfugié”

Convention refugee

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

Personne à protéger

Person in need of protection

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

     (i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

     (i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

     (ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

     (ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

     (iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

     (iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

     (iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

      (iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

(2) A également qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et fait partie d’une catégorie de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de protection.

(2) A person in Canada who is a member of a class of persons prescribed by the regulations as being in need of protection is also a person in need of protection.

[20]           Les articles suivants de la LIPR énoncent les critères applicables quant au rôle de la SAR, à l’admissibilité de la preuve en appel et à la tenue d’audience :

Appel

Appeal

110. (1) Sous réserve des paragraphes (1.1) et (2), la personne en cause et le ministre peuvent, conformément aux règles de la Commission, porter en appel — relativement à une question de droit, de fait ou mixte — auprès de la Section d’appel des réfugiés la décision de la Section de la protection des réfugiés accordant ou rejetant la demande d’asile.

110. (1) Subject to subsections (1.1) and (2), a person or the Minister may appeal, in accordance with the rules of the Board, on a question of law, of fact or of mixed law and fact, to the Refugee Appeal Division against a decision of the Refugee Protection Division to allow or reject the person’s claim for refugee protection.

[…]

[…]

Fonctionnement

Procedure

(3) Sous réserve des paragraphes (3.1), (4) et (6), la section procède sans tenir d’audience en se fondant sur le dossier de la Section de la protection des réfugiés, mais peut recevoir des éléments de preuve documentaire et des observations écrites du ministre et de la personne en cause ainsi que, s’agissant d’une affaire tenue devant un tribunal constitué de trois commissaires, des observations écrites du représentant ou mandataire du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et de toute autre personne visée par les règles de la Commission.

(3) Subject to subsections (3.1), (4) and (6), the Refugee Appeal Division must proceed without a hearing, on the basis of the record of the proceedings of the Refugee Protection Division, and may accept documentary evidence and written submissions from the Minister and the person who is the subject of the appeal and, in the case of a matter that is conducted before a panel of three members, written submissions from a representative or agent of the United Nations High Commissioner for Refugees and any other person described in the rules of the Board.

[…]

[…]

Éléments de preuve admissibles

Evidence that may be presented

(4) Dans le cadre de l’appel, la personne en cause ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet de sa demande ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’elle n’aurait pas normalement présentés, dans les circonstances, au moment du rejet.

(4) On appeal, the person who is the subject of the appeal may present only evidence that arose after the rejection of their claim or that was not reasonably available, or that the person could not reasonably have been expected in the circumstances to have presented, at the time of the rejection.

[…]

[…]

Audience

Hearing

(6) La section peut tenir une audience si elle estime qu’il existe des éléments de preuve documentaire visés au paragraphe (3) qui, à la fois :

(6) The Refugee Appeal Division may hold a hearing if, in its opinion, there is documentary evidence referred to in subsection (3)

a) soulèvent une question importante en ce qui concerne la crédibilité de la personne en cause;

(a) that raises a serious issue with respect to the credibility of the person who is the subject of the appeal;

b) sont essentiels pour la prise de la décision relative à la demande d’asile;

(b) that is central to the decision with respect to the refugee protection claim; and

c) à supposer qu’ils soient admis, justifieraient que la demande d’asile soit accordée ou refusée, selon le cas.

(c) that, if accepted, would justify allowing or rejecting the refugee protection claim.

Décision

Decision

111. (1) La Section d’appel des réfugiés confirme la décision attaquée, casse la décision et y substitue la décision qui aurait dû être rendue ou renvoie, conformément à ses instructions, l’affaire à la Section de la protection des réfugiés.

111. (1) After considering the appeal, the Refugee Appeal Division shall make one of the following decisions:

(a) confirm the determination of the Refugee Protection Division;

(b) set aside the determination and substitute a determination that, in its opinion, should have been made; or

(c) refer the matter to the Refugee Protection Division for re-determination, giving the directions to the Refugee Protection Division that it considers appropriate.

VI.             Position des parties

[21]           D’une part, la demanderesse soutient que les conclusions de la SAR sont déraisonnables. La demanderesse prétend que l’entièreté de son dossier de visa a été falsifiée afin de lui permettre de fuir la persécution au Cameroun. Selon la demanderesse, la SAR et la SPR ont erré en ignorant la preuve soumise au soutien de sa demande de statut de réfugié, ainsi que les explications de la demanderesse quant à l’écart entre sa demande de visa et sa demande de protection.

[22]           De plus, la demanderesse soutient que le refus de la SAR de réévaluer la preuve au dossier devant la SPR est déraisonnable (Iyamuremye c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 494).

[23]           D’autre part, le défendeur soutient qu’il se dégage de la preuve que la demanderesse a présenté des versions contradictoires quant aux circonstances ayant précipité son départ du Cameroun, dans le but de bénéficier du statut de réfugié au Canada. Le défendeur prétend que la SAR a examiné les moyens d’appel soulevés par la demanderesse ainsi que l’ensemble de la preuve afin de confirmer la décision de la SPR. Selon le défendeur, l’intervention de la Cour n’est pas justifiée.

VII.          Norme de contrôle

[24]           En s’appuyant sur la jurisprudence provenant des cours d’appel provinciales, de la Cour fédérale et de la Cour suprême, la demanderesse soutient que la SAR a erré dans l’évaluation de sa propre compétence (Parizeau c Barreau du Québec, 2011 QCCA 1498; Dunsmuir, ci-dessus; Newton v Criminal Trial Lawyers’ Assn., 2010 ABCA 399; Halifax (Regional Municipality) c Anglican Diocesan Centre Corp., 2010 NSCA 38). Selon la demanderesse, il s’agirait d’une erreur de droit qui engendre l’application de la norme de la décision correcte (Dunsmuir, ci-dessus au para 50).

[25]           Le défendeur soutient que la Cour doit faire preuve de déférence envers les conclusions de la SAR quant à la norme appliquée envers la SPR (Budhai c Canada (Procureur général), 2002 CAF 298 au para 22; Edmonton Police Service (Chief of Police) v Furlong, 2013 ABCA 121 au para 20 [Edmonton Police Service]). De plus, les conclusions mixtes de fait et de droit doivent être contrôlées selon la norme de la décision raisonnable (Edmonton Police Service, ci-dessus au para 20; Canada (Procureur général) c Hunter, 2013 CAF 12 au para 4).

[26]           La Cour s’appuie sur les décisions récentes de cette Cour, qui s’est prononcée sur la portée du mandat de la SAR, afin de conclure que l’interprétation de la SAR de sa propre loi constitutive, ainsi que ses déterminations de fait et mixtes de fait et de droit attirent la norme de la décision raisonnable (Akuffo c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 1063 aux para 26 et 27 [Akuffo]; Bui c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 1145 au para 17; Alberta (Information and Privacy Commissioner) c Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61).

VIII.       Analyse

[27]           La question décisive soulevée en appel devant la SAR est celle de la crédibilité de la demanderesse.

[28]           Il se dégage de la jurisprudence récente de la Cour que les conclusions de crédibilité de la SPR attirent un certain degré de retenue, en appel devant la SAR (G.L.N.N. c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 859 au para 18; Akuffo, ci-dessus au para 39; Huruglica c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 799 au para 55 [Huruglica]; Allalou c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 1084 au para 20; Sajad c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 1107 au para 20).

[29]           À titre de tribunal d’appel, la SAR doit effectuer un examen de la preuve ayant été déposée devant la SPR afin de tirer ses conclusions quant aux motifs d’appel soulevés par les parties. Ce principe vaut également en l’absence de tenue d’audience devant la SAR et en l’absence de nouvelle preuve (Yin v Canada (Minister of Citizenship and Immigration), 2014 FC 1209 au para 39; voir aussi Huruglica, ci-dessus au para 3). Une retenue est également de mise lorsque la SPR jouit d’un avantage particulier pour tirer ses conclusions. Ce constat s’appuie sur l’appréciation du fait que la SPR jouit d’un avantage particulier, en tant que décideur de première instance confronté aux témoignages oraux des témoins.

[30]           Il est à noter que l’analyse effectuée par la SAR ne s’insère pas dans la logique du régime de contrôle judiciaire (Akuffo, ci-dessus aux para 33-34; Huruglica, ci-dessus au para 34; Alyafi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 952 au para 10 [Alyafi]).

[31]           La SAR a commis une erreur en constatant que la norme applicable était celle de la décision raisonnable. Or, la Cour considère que cette erreur n’est pas, en soi, concluante. Plutôt, la Cour doit déterminer si les conclusions de la SAR en appel de la décision de la SPR, telles qu’elles se dégagent de ses motifs, sont raisonnables.

[32]           Dans sa décision, la SAR indique avoir lu l’ensemble des motifs de la SPR et les arguments de la demanderesse afin de conclure au caractère raisonnable de la décision de la SPR. Un extrait de la décision de la SAR est reproduit ci-dessous :

[50]      J’ai lu l’ensemble des motifs de la décision de la SPR. J’ai également lu les arguments de l’appelante dans son mémoire. J’en arrive à la conclusion que la SPR a pris en compte l’ensemble de la preuve, ainsi que les explications qui lui ont été fournies par l’appelante. La SPR a amplement justifié les raisons pour lesquelles elle en est arrivée à la conclusion de la SPR mettant en doute la crédibilité de l’appelante étaient suffisantes pour disposer de sa demande d’asile comme elle l’a fait.

[51]      Agir comme la SPR l’a fait dans le présent dossier est, à mon avis, en tout point conforme avec l’un des objectifs de la LIPR, à savoir de mettre en place une procédure équitable et efficace, respectueuse de l’intégrité de ce processus ainsi que des droits et des libertés fondamentales reconnus à tout être humain.

(Décision de la SAR, aux para 50 et 51).

[33]           Or, la Cour constate que la SAR n’a pas effectué d’analyse au-delà d’une simple réitération des conclusions de la SPR. Tout en reconnaissant la retenue requise par la SAR envers les conclusions de crédibilité de la SPR, il se dégage de ses motifs que la SAR s’est simplement appuyée sur les conclusions de crédibilité tirées par la SPR, sans effectuer sa propre analyse de la preuve.

[34]           La SAR a commis une erreur en omettant d’entreprendre un examen des conclusions de la SPR à la lumière de la preuve au dossier.

[35]           La Cour souscrit au raisonnement de la juge J. Gagné dans la décision récente Kurtzmalaj c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 1072 [Kurtzmalaj] aux para 37 et 38 :

[37]      La SAR a fait abstraction de ces éléments de preuve en confirmant la conclusion de la SPR et s'est plutôt contentée de répéter simplement l'analyse de cette question faite par la SPR. La SAR n'a pas expliqué pourquoi il était raisonnable pour la SPR de ne pas tenir compte d'éléments de preuve qui indiquaient que le demandeur serait peut-être exposé à des difficultés excessives s'il était forcé de se réinstaller à Tirana.

[38]      Il était déraisonnable pour la SAR d'accepter sans réserve la décision de la SPR et d'ignorer ce qui pouvait constituer des éléments de preuve pertinents à propos de la situation personnelle du demandeur mineur. Le défaut d'évaluer dûment l'analyse de la PRI constitue une erreur susceptible de contrôle.

IX.             Conclusion

[36]           La Cour conclut que la demanderesse n’a pas eu droit à un véritable appel (Alyafi, ci-dessus au para 53; Djossou c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 1080 au para 44; Meilina v Canada (Minister of Citizenship and Immigration), 2014 FC 1233 au para 12; Kurtzmalaj, ci-dessus au para 40).

[37]           La demande de contrôle judiciaire est donc accueillie.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire soit accordée et que le dossier soit retourné pour être réexaminé par un tribunal différemment constitué. Aucune question n’est certifiée.

« Michel M.J. Shore »

Juge

 

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3895-14

 

INTITULÉ :

NADEGE YAMDI GENU c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 2 février 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :

LE 3 fÉVRIER 2015XXXX

 

COMPARUTIONS :

Stéphanie Valois

 

Pour la PARTIE demanderesse

 

Edith Savard

 

Pour la PARTIE défenderesse

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Stéphanie Valois

Montréal (Québec)

 

Pour la PARTIE demanderesse

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Pour la PARTIE défenderesse

 

 

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