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Date : 20170106


Dossier : T-136-16

Référence : 2017 CF 25

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 6 janvier 2017

En présence de madame la juge McDonald

ENTRE :

GREGORY MCMASTER

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA ET LE COMMISSAIRE DU SERVICE CORRECTIONNEL ET LE DIRECTEUR DE L’ÉTABLISSEMENT DE BEAVER CREEK À SÉCURITÉ MOYENNE

défendeurs

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  Gregory McMaster est un détenu de l’Établissement de Beaver Creek à Gravenhurst, en Ontario. En décembre 2014, plusieurs incidents se sont produits qui ont entraîné la destitution de M. McMaster de son poste de président du comité chargé du bien-être des détenus et son placement en isolement. M. McMaster a déposé des plaintes internes en ce qui concerne ces événements et d’autres incidents.

[2]  Il s’agit du contrôle judiciaire de la décision concernant le grief au troisième palier du commissaire adjoint, Politiques, du Service correctionnel du Canada (SCC) qui a confirmé en partie le grief de M. McMaster.

[3]  Pour les motifs qui suivent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée sans dépens.

I.  Faits pertinents

[4]  Le 17 décembre 2014, M. McMaster a assisté à un festin inuit au gymnase de l’Établissement de Beaver Creek. Pendant le dénombrement des détenus, M. McMaster a tenté de se rendre deux fois à la salle de bains, mais le personnel lui a dit d’attendre que le dénombrement précis soit terminé. M. McMaster prend des médicaments qui entraînent le besoin fréquent d’uriner. Il en a informé le personnel et a demandé la permission d’utiliser la salle de bains. Sa demande a été refusée et il est devenu agité. À un certain moment durant l’incident, l’un des agents correctionnels a formulé un commentaire pour comparer le comportement de M. McMaster à celui de son fils de cinq ans. M. McMaster s’est offusqué de cette remarque et s’est avancé vers les agents correctionnels d’une manière agressive.

[5]  Le 18 décembre 2014, M. McMaster a été suspendu de son poste de président du comité chargé du bien-être des détenus. En tant que président du comité chargé du bien-être des détenus, M. McMaster était responsable du maintien d’une bonne communication entre les détenus et l’administration de l’Établissement de Beaver Creek. M. McMaster a appris qu’il était destitué de ce poste pour les raisons suivantes : il a insulté un autre détenu devant d’autres personnes; il a masqué une caméra de sécurité au moment où une altercation allait probablement se produire; et il a accusé le personnel de l’Établissement de Beaver Creek d’avoir dissimulé des produits de contrebande pour faire des heures supplémentaires. M. McMaster affirme que la véritable raison de sa suspension du comité chargé du bien-être des détenus était des représailles pour les événements qui se sont déroulés au gymnase la veille.

[6]  Le 19 décembre 2014, une note de service a été envoyée aux employés du SCC pour les informer que le poste au comité chargé du bien-être des détenus était vacant et que toutes les clés du bureau du comité chargé du bien-être des détenus devaient être trouvées.

[7]  Le 20 décembre 2014, des préoccupations ont été soulevées selon lesquelles un détenu avait été vu entrant dans le bureau du comité chargé du bien-être des détenus alors que M. McMaster y était. Le personnel du SCC croit que M. McMaster a conservé une clé non autorisée du bureau du comité chargé du bien-être des détenus. Une fouille de sa cellule a été effectuée. La fouille a été interrompue lorsque M. McMaster a remis la clé.

[8]  Le 21 décembre 2014, M. McMaster a été placé en isolement, conformément à l’alinéa 31(3)a) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LC 1992, c 20) (LSCMLC), lorsqu’une arme (un éplucheur à légumes modifié) a été trouvée dans son armoire. On lui a dit qu’il serait placé en isolement en raison de son comportement qui laissait de plus en plus à désirer et du risque potentiel pour la sécurité des autres détenus à l’Établissement de Beaver Creek.

[9]  Le 22 décembre 2014, un « Examen du statut du délinquant en isolement après un jour ouvrable » a été effectué, lequel indiquait en détail les incidents ayant mené au placement en isolement de M. McMaster. On a fait remarquer que M. McMaster a été placé en isolement préventif en raison d’une accumulation de renseignements concernant son comportement qui laissait de plus en plus à désirer récemment et qui laissait entendre qu’il pouvait représenter un danger pour les autres détenus, les membres du personnel ou lui-même. Ces incidents comportent ce qui suit : une attitude de confrontation affichée à l’égard d’un agent qui a entraîné la suspension de son poste de président du comité chargé du bien-être des détenus; M. McMaster a été vu à la caméra en train d’entrer dans un secteur non autorisé; et un éplucheur à légumes modifié a été trouvé dans l’unité de M. McMaster.

[10]  Le 30 décembre 2014, devant le comité de réexamen des cas d’isolement (CRCI), M. McMaster a assumé la responsabilité liée à l’éplucheur à légumes et le CRCI a recommandé sa libération de l’isolement. Le même jour, un autre examen a été effectué : « Examen du statut du délinquant en isolement après cinq jours ouvrables », dans le cadre duquel le directeur de l’établissement a souscrit aux recommandations du CRCI de libérer M. McMaster de l’isolement. M. McMaster a été libéré de l’isolement plus tard cette journée-là.

II.  Décision concernant le grief

[11]  En raison de ces incidents, M. McMaster a déposé des griefs internes conformément à la Directive du commissaire 081 – Plaintes et griefs des délinquants (DC 081). Le présent contrôle judiciaire vise la décision tranchant le grief au troisième et dernier palier qui a été présenté au commissaire. Dans son grief, M. Master a soulevé plusieurs questions, y compris les suivantes :

  • a) l’accès à la salle de bains;

  • b) des allégations de harcèlement;

  • c) la suspension de son poste de président du comité chargé du bien-être des détenus;

  • d) la fouille exceptionnelle de sa cellule;

  • e) son placement en isolement;

  • f) l’enregistrement de son audience devant le CRCI.

[12]  Le 11 décembre 2015, Larry Motiuk, commissaire adjoint (CA), Politiques, a rendu une décision pour confirmer des parties du grief de M. McMaster et pour rejeter d’autres parties de ce dernier.

[13]  En ce qui concerne les parties de griefs qui ont été confirmées, le commissaire adjoint a conclu que le personnel aurait dû communiquer avec le gestionnaire afin de décider si M. McMaster pouvait avoir la permission d’utiliser la salle de bains pendant le festin inuit, étant donné son état de santé. La décision note également que la séquence vidéo du festin inuit, qui n’a pu être trouvée, aurait également dû être conservée.

[14]  De plus, le commissaire adjoint conclut dans sa décision que les commentaires formulés par l’agent correctionnel équivalaient à du harcèlement.

[15]  Même si le commissaire adjoint confirme la décision de placer M. McMaster en isolement, il fait remarquer que le personnel du SCC n’a pas suffisamment discuté des solutions de rechange à l’isolement avec M. McMaster.

[16]  Le commissaire adjoint a conclu que la suspension de M. McMaster de son poste de président du comité chargé du bien-être des détenus était appropriée en raison de son comportement qui laissait de plus en plus à désirer et qui contrevenait aux alinéas 62a) et c) de la Directive du commissaire 083 – Comités de détenus (DC 083).

III.  Questions préliminaires

[17]  Au début de l’audience, M. McMaster a demandé à déposer un affidavit supplémentaire qu’il a signé le 12 septembre 2016. Le défendeur s’est opposé au dépôt de cet affidavit.

[18]  Dans l’affidavit supplémentaire, M. McMaster a réaffirmé les points qu’il a déjà soulignés en détail dans l’affidavit qu’il a déposé au soutien de sa demande et qu’il a signé le 10 mars 2016. En outre, l’affidavit supplémentaire est accompagné de documents qui n’ont pas été examinés dans le cadre du processus de règlement des griefs. Enfin, l’affidavit ne contenait aucun fait dont avait eu personnellement connaissance M. McMaster et il comportait des arguments et des spéculations. Pour ces raisons, l’affidavit supplémentaire de M. McMaster n’a pas été admis en preuve (Strykiwsky c Établissement de Stony Mountain, 2000 ACF no 1404).

IV.  Questions en litige

[19]  Dans le cadre du présent contrôle judiciaire, M. McMaster soulève plusieurs questions qui reprennent essentiellement les questions soulevées dans son grief. À mon avis, les questions en litige sont les suivantes :

  1. La décision du commissaire adjoint était-elle raisonnable?
  2. Les droits à l’équité procédurale de M. McMaster ont-ils été violés?

V.  Norme de contrôle

[20]  Les parties conviennent que la norme de la décision raisonnable est la norme de contrôle devant s’appliquer à la décision du commissaire adjoint (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47).

[21]  De plus, notre Cour a reconnu qu’elle se doit de faire preuve d’un degré de déférence élevé à l’égard du SCC, du fait de son expertise en matière de gestion de détenus et d’institutions (Skinner c Canada (Procureur général), 2016 CF 57, au paragraphe 21; Fischer c Canada (Procureur général), 2013 CF 861, au paragraphe 22).

[22]  Les questions d’équité procédurale sont examinées selon la norme de la décision correcte : Moodie c Canada (Procureur général), 2015 CAF 87, au paragraphe 50; Établissement de Mission c Khela, 2014 CSC 24, au paragraphe 79, Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43.

VI.  Discussion

A.  La décision du commissaire adjoint était-elle raisonnable?

[23]  Le caractère raisonnable de la décision concernant le grief sera examiné par rapport aux principales questions soulevées par M. McMaster.

1)  Incident de la salle de bains

[24]  Même si une partie de son grief a été confirmée, M. McMaster soutient que les agents correctionnels auraient dû être sanctionnés pour l’avoir empêché d’utiliser la salle de bains, en contravention des articles 69 et 70 de la LSCMLC.

[25]  Le commissaire adjoint a fait remarquer que le refus de permettre à M. McMaster de se rendre à la salle de bains était conforme à la Directive du commissaire 566-4 – Dénombrement des détenus et patrouilles de sécurité. Même si M. McMaster a demandé l’enregistrement vidéo des événements, ce dernier n’était pas disponible. Le commissaire adjoint a conclu qu’il pouvait rendre une décision sur ce qui s’était passé, en fonction des cinq rapports d’observations présentés par différents membres du personnel du SCC. En l’absence d’une preuve vidéo, il était raisonnable pour le commissaire adjoint d’examiner ces rapports d’observations, puisqu’ils étaient pertinents au grief. Même si M. McMaster fait valoir que d’autres rapports d’observations auraient dû être demandés, il était raisonnable pour le commissaire adjoint de conclure qu’il avait suffisamment de renseignements pour comprendre l’incident en question.

[26]  M. McMaster a obtenu gain de cause sur cette partie de son grief. Toutefois, M. McMaster fait valoir que les agents correctionnels auraient dû se voir imposer des mesures disciplinaires. Les mesures disciplinaires à imposer à des agents correctionnels n’étaient cependant pas un recours dont disposait M. McMaster dans le cadre du processus de règlement des griefs. En outre, le commissaire adjoint note qu’il n’y a pas eu d’incidence sur la santé de M. McMaster. Il n’y a donc pas d’autres recours possibles.

2)  Destitution en tant que président du comité chargé du bien-être des détenus

[27]  M. McMaster soutient que les motifs de sa destitution du poste de président du comité chargé du bien-être des détenus n’ont pas été justifiés et qu’il découlait d’une campagne pour [traduction] « se débarrasser » de lui. Le rôle de président du comité chargé du bien-être des détenus est un poste de confiance et de leadership au sein de l’Établissement de Beaver Creek. Pour conserver ce poste, M. McMaster devait donc conserver la confiance du personnel du SCC.

[28]  M. McMaster a été avisé des raisons pour lesquelles il a été destitué du poste et il a obtenu une audience, dans le cadre de laquelle il a présenté des observations.

[29]  Le commissaire adjoint a tenu compte des événements ayant mené à la destitution de M. McMaster en tant que président du comité chargé du bien-être des détenus et il a conclu que cette destitution était une réaction appropriée aux comportements consignés. Sa destitution était conforme à la DC 083, qui indique au paragraphe 62 que le directeur de l’établissement peut destituer un membre du comité chargé du bien-être des détenus si son comportement dans l’établissement laisse de plus en plus à désirer. Le commissaire adjoint a conclu que la décision de destituer M. McMaster de son poste était justifiée. Cette conclusion est raisonnable.

3)  Isolement préventif

[30]  M. McMaster soutient que le commissaire adjoint a omis de tenir compte du fait que les agents correctionnels auraient dû examiner des solutions de rechange à l’isolement et il fait valoir que son isolement préventif n’était pas justifié aux termes du paragraphe 31(3) de la LSCMLC.

[31]  M. McMaster a obtenu partiellement gain de cause sur cette partie de son grief. Le commissaire adjoint a reconnu que le personnel aurait dû discuter de solutions de rechange avec lui avant de le placer en isolement. Toutefois, il conclut que la décision de le placer en isolement était raisonnable parce qu’une arme a été trouvée dans son unité.

[32]  Le dossier indique que M. McMaster a été avisé des motifs de son placement en isolement. Essentiellement, M. McMaster ne reconnaît pas que son comportement justifiait l’utilisation de l’isolement comme mesure. Toutefois, après examen des circonstances, je suis d’avis que la conclusion du commissaire adjoint selon laquelle son isolement était approprié dans les circonstances est raisonnable. Son isolement était conforme aux Lignes directrices 709-1 – Lignes directrices sur l’isolement préventif (LD709-1), et à l’alinéa 31(3)a) de la LSCMLC.

[33]  Compte tenu des événements qui ont mené à l’isolement, qui auraient pu représenter un risque raisonnable pour la sécurité des autres personnes à l’Établissement de Beaver Creek, l’isolement de M. McMaster était légal et conforme aux lignes directrices de l’établissement et aux dispositions de la LSCMLC.

4)  Enregistrement des événements

[34]  Pour l’aider dans ses griefs, M. McMaster a demandé les enregistrements des différents événements à l’Établissement de Beaver Creek, y compris l’incident du gymnase et ses audiences relatives à l’isolement.

[35]  L’enregistrement des événements au gymnase n’a pas été conservé. Cette question a été abordée par le commissaire adjoint dans sa décision, et une directive a été envoyée aux membres du personnel du SCC pour qu’ils s’assurent que les enregistrements futurs soient conservés. Par conséquent, M. McMaster a obtenu gain de cause sur une partie de son grief et aucun autre recours n’est possible.

[36]  M. McMaster a également contesté la durée (deux mois) qu’il a fallu pour obtenir des copies de son audience devant le CRCI. Même si aucune politique n’indique le délai dans lequel les détenus doivent avoir accès à ces enregistrements, le commissaire adjoint fait remarquer qu’une période de deux mois était un délai déraisonnable. À ce titre, cette partie du grief de M. McMaster a également été confirmée.

[37]  De plus, M. McMaster a contesté le fait que l’enregistrement de l’audience sur l’isolement était incomplet, ce qui a ainsi nui à la préparation de son grief. Le commissaire adjoint confirme que l’enregistrement prend fin pendant l’audience. À ce titre, cette partie du grief a également été confirmée. Il convient toutefois de noter que l’ensemble des renseignements auxquels s’est fié le CRCI ont été fournis par M. McMaster.

[38]  Comme M. McMaster a obtenu gain de cause sur ces parties de son grief, il n’y a pas d’autre recours.

5)  Corrections apportées à son dossier

[39]  Dans son grief, M. McMaster a présenté diverses demandes pour que ses dossiers internes soient corrigés ou modifiés. Le commissaire adjoint a conclu que le processus de règlement des griefs n’était pas la voie appropriée pour contester l’exactitude des renseignements le concernant ou pour apporter des changements aux dossiers. Le commissaire adjoint indique le processus approprié que doit suivre M. McMaster pour que ces demandes soient prises en considération (Directive du commissaire 701 – Communication de renseignements à l’annexe B, paragraphe 3).

[40]  Le commissaire adjoint a eu raison de conclure qu’il ne pouvait pas aborder les corrections demandées du dossier au moyen du processus de règlement des griefs. (Skinner, précitée, au paragraphe 26)

6)  Harcèlement général

[41]  Dans l’ensemble, M. McMaster soutient que le comportement des agents correctionnels à l’Établissement de Beaver Creek correspond à du harcèlement général contre lui. Il fait valoir que le commissaire adjoint aurait dû ordonner une enquête sur le harcèlement aux termes des articles 26 et 27 de la DC 081.

[42]  Le commissaire adjoint a conclu que les allégations de harcèlement, à l’exception de l’incident où un agent correctionnel a formulé un commentaire pour comparer le comportement de M. McMaster à celui de son fils de cinq ans, n’étaient pas justifiées. Le commissaire adjoint a conclu que rien dans la preuve ne corroborait les allégations de harcèlement général. Il n’avait donc pas l’obligation d’effectuer une autre enquête sur les allégations de harcèlement aux termes de la DC 081. Il s’agissait d’une conclusion raisonnable et notre Cour doit faire preuve de retenue à l’égard de la décision du commissaire adjoint.

7)  Violation des articles 7 et 12 de la Charte

[43]  M. McMaster soutient que les droits que lui confèrent les articles 7 et 12 de la Charte ont été violés à la suite des incidents indiqués dans son grief. En particulier, il fait valoir que la décision de le placer en isolement contrevenait aux droits que lui garantit la Charte.

[44]  Le placement de M. McMaster en isolement a été examiné dans le cadre du grief. On a jugé cet isolement justifié dans les circonstances pour la sécurité de toutes les personnes et celui-ci a été effectué conformément aux directives de l’établissement. Par conséquent, l’argument selon lequel l’isolement a été fait en contravention des droits que lui garantit la Charte n’est pas fondé.

[45]  En outre, malgré la longueur des observations écrites et orales, M. McMaster a omis de faire valoir des faits importants pour appuyer la violation alléguée de la Charte (voir Mancuso c Canada (Santé nationale et Bien-être social), 2015 CAF 227, au paragraphe 21).

[46]  Comme M. McMaster n’a pas présenté d’arguments de fond pour appuyer ses prétentions, il n’est pas nécessaire que notre Cour entreprenne une analyse fondée sur la Charte.

B.  Les droits à l’équité procédurale de M. McMaster ont-ils été violés?

[47]  M. McMaster formule des allégations générales selon lesquelles on ne lui a pas accordé l’équité procédurale dans le cadre de sa destitution en tant que président du comité chargé du bien-être des détenus et de son placement en isolement.

[48]  En ce qui concerne sa destitution en tant que président du comité chargé du bien-être des détenus, M. McMaster a obtenu les motifs du Comité d’intervention correctionnelle pour le suspendre de son poste. Il a reçu un avis de suspension de détenu, qui indiquait les divers incidents pour lesquels son comportement était incompatible avec le poste de président du comité chargé du bien-être des détenus. Tous ces incidents étaient appuyés par des documents, et les raisons de sa suspension ont été abordées de façon détaillée avec lui en personne. Il a également eu la possibilité de formuler des observations.

[49]  Pour ce qui est de l’isolement, M. McMaster a été avisé des raisons pour lesquelles il y a été placé. Il a obtenu une copie du rapport d’examen après un jour ouvrable qui indiquait qu’il y avait une accumulation de renseignements au sujet de son comportement qui laissait de plus en plus à désirer. Le commissaire adjoint a reconnu qu’il aurait dû être mis au courant des solutions de rechange à l’isolement. Toutefois, ordonner au directeur de l’Établissement de Beaver Creek de respecter les exigences qui lui incombent aux termes des LD709-1 était la mesure corrective appropriée.

[50]  En outre, selon M. McMaster, le directeur de l’Établissement de Beaver Creek et certains membres du personnel du SCC étaient partiaux à son endroit et cela aurait dû être pris en compte par le commissaire adjoint. Le commissaire adjoint a évalué les arguments de M. McMaster par rapport aux comptes rendus des autres témoins et des parties impliquées, comme les agents correctionnels et les membres du personnel du SCC. Le commissaire adjoint s’est fié aux éléments de preuve à l’appui et à son évaluation de la crédibilité pour conclure que les allégations de partialité n’étaient pas étayées par la preuve. Il était donc raisonnable pour le commissaire adjoint de conclure que rien dans la preuve n’appuyait la prétention de M. McMaster selon laquelle les décideurs étaient partiaux.

[51]  Le commissaire adjoint a raisonnablement tenu compte des arguments sur l’équité procédurale et il a conclu qu’ils n’étaient pas fondés.

VII.  Conclusion

[52]  De toute évidence, M. McMaster ne souscrit pas à la décision de le destituer comme président du comité chargé du bien-être des détenus. Même si cela peut être compréhensible, les membres du personnel de l’Établissement de Beaver Creek avaient le mandat aux termes de l’article 62 de la DC 083 de prendre les mesures qu’ils jugeaient nécessaires pour protéger le personnel et les détenus. Je conclus que les étapes suivies étaient raisonnables et que le grief de M. McMaster à l’égard des diverses questions qu’il a soulevées ont fait l’objet d’un examen approprié. Il ressort clairement des faits que M. McMaster a obtenu gain de cause pour certaines parties de son grief. Dans l’ensemble, la décision concernant le grief est raisonnable et notre Cour doit faire preuve de retenue à son égard. Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[53]  Même si le défendeur a demandé les dépens, dans les circonstances, je refuse d’adjuger des dépens contre M. McMaster.


JUGEMENT

LA COUR rejette la présente demande de contrôle judiciaire sans dépens.

« Ann Marie McDonald »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 24e jour d’octobre 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-136-16

INTITULÉ :

GREGORY MCMASTER c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA ET LE COMMISSAIRE DU SERVICE CORRECTIONNEL ET LE DIRECTEUR DE L’ÉTABLISSEMENT DE BEAVER CREEK À SÉCURITÉ MOYENNE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 18 octobre 2016

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE MCDONALD

DATE DES MOTIFS :

Le 6 janvier 2017

COMPARUTIONS :

J. Todd Sloan

Pour le demandeur

Abigail Martinez

POUR LES DÉFENDEURS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

J. Todd Sloan

Avocat

Ottawa (Ontario)

Pour le demandeur

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LES DÉFENDEURS

 

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