Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20170116


Dossier : IMM-2446-16

Référence : 2017 CF 52

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 16 janvier 2017

En présence de madame la juge Simpson

ENTRE :

MIJIAN CAO

XUYAN PENG

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire, présentée par Mijian Cao (la demanderesse principale) et son fils Xuyan Peng (le fils), d’une décision rendue par la Section d’appel des réfugiés le 16 mai 2016 (la décision). La décision a confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés selon laquelle les demandeurs n’étaient ni des réfugiés au sens de la Convention ni des personnes à protéger. La présente demande a été présentée en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27.

[2]  La demanderesse principale et son fils vivaient dans la province du Guangdong, en Chine. La demanderesse principale est née en 1970 et elle a terminé 11 années d’études. Elle est diplômée en enseignement et elle a travaillé comme directrice des ventes et vendeuse pendant au moins dix ans. Elle a également beaucoup voyagé, elle a visité le Japon et l’Australie en 2007 et l’Europe en 2008.

[3]  La demanderesse a épousé son mari en 2000. Elle a donné naissance à son fils le 14 juin 2001. La demanderesse principale allègue qu’après la naissance de son fils, des représentants de l’agence de planification familiale l’ont obligée à porter un dispositif intra-utérin. Au fil des ans, ce dispositif lui a causé de nombreux problèmes de santé. Elle a présenté plusieurs demandes d’autorisation de retirer le dispositif intra-utérin, mais elle n’a jamais obtenu gain de cause.

[4]  En mars 2014, la demanderesse principale a appris qu’elle était enceinte.

[5]  Les représentants de l’agence de planification familiale l’ont emmenée à l’hôpital et ils l’ont obligée à subir un avortement. Au début du mois de mai 2014, la demanderesse principale a aussi été forcée de porter un dispositif intra-utérin différent. Encore une fois, le dispositif lui a causé des problèmes de santé persistants; alors, en décembre 2014, elle a fait appel à un médecin en pratique privée pour retirer le dispositif intra-utérin.

[6]  En mai 2015, la demanderesse principale est tombée enceinte une deuxième fois. Elle et son mari se sont cachés avec leur fils. Ils ont trouvé un passeur qui leur a fourni des visas pour les États-Unis. Le 28 juillet 2015, un représentant de l’agence de planification familiale s’est présenté au domicile de la famille, parce que la demanderesse principale ne s’était pas présentée à son examen médical du 27 juillet 2015. Le représentant a informé la belle-mère de la demanderesse principale que cette dernière était tenue de se présenter à l’agence dans les trois jours. Lorsqu’elle a omis de se présenter, un représentant de l’agence de planification familiale est retourné au domicile de la famille le 2 août 2015. Il a laissé un avis indiquant que l’agence de planification familiale soupçonnait la demanderesse principale d’être enceinte, qu’elle devait se soumettre à un avortement et qu’elle ou son mari seraient stérilisés. Dans un deuxième avis, l’agence de planification familiale a dressé une liste des biens qui avaient été confisqués du domicile de la demanderesse principale à titre punitif. Les deux avis seront appelés collectivement les avis de l’agence de planification familiale.

[7]  La demanderesse et son mari ont été informés qu’ils avaient été licenciés de leurs emplois.

[8]  Le 22 août 2015, la demanderesse et son fils ont quitté la Chine avec l’aide d’un passeur. Ils se sont rendus aux États-Unis et, quatre jours plus tard, ils ont illégalement traversé la frontière canadienne en Colombie-Britannique. Ils se sont ensuite rendus à Toronto, où ils ont présenté leur demande d’asile.

[9]  Le mari de la demanderesse principale est resté caché en Chine.

I.  La décision défavorable de la Section de la protection des réfugiés

[10]  La Section de la protection des réfugiés a conclu que le défaut de la demanderesse principale de demander l’asile aux États-Unis équivalait à une recherche du meilleur pays d’asile et minait la force de son argument de crainte subjective. Elle a expliqué avoir lu sur Internet que les autorités des États-Unis déportaient les femmes enceintes qui demandaient l’asile, et le passeur aurait eu la même crainte qu’elle. Elle n’a toutefois pas été en mesure d’indiquer à la Section de la protection des réfugiés les sites Web où elle avait obtenu ces renseignements.

[11]  La Section de la protection des réfugiés a conclu que les autorités provinciales du Guandong imposeraient une taxe de compensation sociale (la taxe), mais qu’elles ne forceraient ni l’avortement ni la stérilisation. La Section de la protection des réfugiés a aussi conclu que le nouveau-né de la demanderesse principale serait intégré dans les systèmes chinois de santé et d’éducation une fois la taxe payée. Enfin, la Section de la protection des réfugiés a conclu que les avis de l’agence de planification familiale étaient frauduleux.

II.  La décision défavorable de la Section d’appel des réfugiés

[12]  La Section d’appel des réfugiés a noté que le livret relatif au dispositif intra-utérin de la demanderesse indiquait qu’elle n’était pas enceinte à son examen de vérification du dispositif le 11 mars 2014. Pourtant, elle a indiqué, lors de son témoignage, qu’elle avait été forcée de subir un avortement à la mi-mars 2014. En outre, aucun dossier d’hôpital n’indiquait une admission pour un avortement. Par conséquent, la Section d’appel des réfugiés a conclu qu’elle n’avait pas été forcée de subir un avortement.

[13]  La Section d’appel des réfugiés a aussi conclu que la demanderesse avait présenté des documents frauduleux, puisque, même si les deux avis de l’agence de planification familiale avaient été prétendument produits par le même bureau, ils portaient des en-têtes et des cachets différents.

[14]  La Section d’appel des réfugiés s’est fondée sur les renseignements les plus récents pour conclure que, dans la province du Guaundong, les politiques obligeant l’avortement et la stérilisation ne sont plus appliquées depuis 2012.

[15]  Enfin, la Section d’appel des réfugiés était d’accord avec la Section de la protection des réfugiés qu’une conclusion défavorable pouvait être tirée du défaut par la demanderesse principale de demander l’asile aux États-Unis.

III.  Les questions en litige

[16]  La demanderesse a soulevé de nombreuses questions, mais, à mon avis, seules les questions suivantes peuvent être déterminantes :

  1. La conclusion défavorable sur la crédibilité était-elle raisonnable?
  2. La Section d’appel des réfugiés a-t-elle commis une erreur dans son examen de la possibilité que la demanderesse soit exposée à un risque de stérilisation ou d’avortement forcé dans la province du Guandong?
  3. La Section d’appel des réfugiés a-t-elle déraisonnablement conclu que la demanderesse aurait dû demander l’asile aux États-Unis?

IV.  Analyse et conclusions

[17]  Je suis d’avis que la conclusion de la Section d’appel des réfugiés selon laquelle la demanderesse n’était pas crédible, compte tenu de son livret relatif au dispositif intra-utérin, était raisonnable. Il est manifeste qu’elle n’a pas pu être forcée à subir un avortement à la mi-mars 2014, comme elle le prétend. En outre, la conclusion selon laquelle, du moins dans la province du Guandong, elle n’était pas exposée à un risque était aussi raisonnable, puisqu’elle était fondée sur des renseignements à jour concernant les pratiques dans cette province.

[18]  Je suis également d’avis qu’il était raisonnable de tirer une conclusion défavorable sur la crainte subjective de la demanderesse principale, puisqu’elle est scolarisée, qu’elle a voyagé et qu’elle n’a pas été en mesure de démontrer à la Section d’appel des réfugiés les raisons pour lesquelles elle n’a pas demandé l’asile aux États-Unis.

V.  Question à certifier

[19]  Aucune question n’a été posée aux fins de certification en vue d’un appel.


JUGEMENT

LA COUR rejette la présente demande de contrôle judiciaire.

« Sandra J. Simpson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 12e jour d’août 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2446-16

INTITULÉ :

MIJIAN CAO ET XUYAN PENG c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 15 DÉCEMBRE 2016

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE SIMPSON

DATE DES MOTIFS :

LE 16 JANVIER 2017

COMPARUTIONS :

Phillip J. L. Trotter

POUR LES DEMANDEURS

Suzanne M. Bruce

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Phillip J. L. Trotter

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.