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Date : 20170630


Dossier : IMM-5044-16

Référence : 2017 CF 640

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 30 juin 2017

En présence de monsieur le juge Southcott

ENTRE :

THOMAS FRANCIS BYRNE

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                    Aperçu

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue le 18 novembre 2016 par un agent d’immigration (l’agent), qui a rejeté la demande de résidence permanente du demandeur à titre de membre de la catégorie de l’expérience canadienne (CEC). L’agent estimait que le demandeur ne satisfaisait pas aux exigences relatives à l’expérience de travail qualifié pour la demande étant donné qu’il était, selon lui, un travailleur indépendant.

[2]               Comme je l’expliquerai plus en détail ci-dessous, la présente demande est rejetée parce que le demandeur n’a pas établi que la décision de l’agent était déraisonnable ou qu’elle a été prise en violation des obligations d’équité procédurale.

II.                 Contexte

[3]               Le demandeur, M. Thomas Francis Byrne, est un citoyen irlandais qui a présenté une demande de résidence permanente en vertu du programme de la CEC. M. Byrne s’était auparavant vu délivrer une autorisation d’emploi à titre de « propriétaire-exploitant » de la société 2338520 Ontario Inc. (aussi appelée Dairy Queen Collingwood). Sa demande de la CEC était fondée sur son expérience de travail à Dairy Queen Collingwood.

[4]               La demande de M. Byrne était étayée par une lettre datée du 22 juin 2016 rédigée par Maurice Byrne, qui est décrit comme le président et le chef de la direction de Dairy Queen Collingwood. Le demandeur prétend que Maurice Byrne est son frère. Lors de l’audience de la présente demande de contrôle judiciaire, le défendeur a soutenu qu’aucun élément de preuve n’avait été fourni à l’agent pour établir ce fait. Comme je l’expliquerai ci-dessous dans mon analyse de l’argument d’équité procédurale du demandeur, je ne considère pas que ce fait est particulièrement pertinent à l’issue du présent contrôle judiciaire. Cependant, en fonction des certificats de naissance irlandais figurant dans le dossier certifié du tribunal, lesquels indiquent que Thomas Byrne et Maurice Byrne ont un père qui porte le même nom et qui réside à la même adresse, j’accepte l’observation du demandeur selon laquelle Maurice et lui sont frères.

[5]               Dans sa lettre du 22 juin 2016, Maurice Byrne précise que le demandeur était un employé de Dairy Queen Collingwood depuis septembre 2012, que la société avait été acquise en 2012 et que le salaire du demandeur était de 60 000 $. La lettre comprenait également les renseignements suivants sur le rôle du demandeur dans la société :

[traduction]

Depuis 2012, Thomas fait partie de l’équipe de direction qui relève du chef de la direction de la société. L’équipe de direction était responsable d’assurer la transition de l’entreprise lors du changement de propriétaire, ainsi que de la direction et de la gestion quotidiennes. Pendant toute la période, ses rôles et ses responsabilités respectaient l’orientation définitive du conseil d’administration de Dairy Queen Collingwood. À titre de membre de l’équipe de direction, Thomas était responsable de l’embauche et de la formation des employés canadiens qui travaillaient pour l’entreprise à ce moment-là. Il a aussi été responsable de l’exécution de la gestion des autres employés de l’entreprise, de la planification et de la gestion de toutes les activités quotidiennes, ainsi que de la gestion des budgets. La capacité de Thomas à titre de cadre supérieur signifie qu’il fournit suffisamment de commentaires et de renseignements pour l’établissement et l’exécution des rôles professionnels de chacun des employés; la direction de la société a toujours le dernier mot dans une telle structure organisationnelle, et ses responsabilités et les méthodes qu’il a utilisées pour l’exécution appartiennent à nos classifications. Les employés à temps plein de la société n’ont pas le droit d’occuper un emploi à l’externe sans avoir obtenu une autorisation préalable.

[6]               Le dossier certifié du tribunal, dans lequel se trouvent les documents présentés à l’agent au moment où la décision contestée a été prise, comprend aussi une lettre antérieure datée du 23 septembre 2015 et rédigée par Maurice Byrne, décrit à ce moment-là comme le directeur de Dairy Queen Collingwood. Dans cette lettre, Maurice Byrne faisait référence au demandeur comme au principal actionnaire et propriétaire-exploitant du restaurant. Comme pour la seconde lettre du 22 juin 2016, cette lettre indique que les responsabilités du demandeur comprenaient le recrutement, la formation et la gestion continus des employés du restaurant, la planification et la gestion des activités quotidiennes ainsi que la gestion des budgets. Il est indiqué dans cette lettre qu’elle sera présentée à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) pour étayer la demande de prolongation de l’autorisation d’emploi du demandeur à titre de propriétaire-exploitant de Dairy Queen Collingwood.

[7]               La demande de résidence permanente de M. Byrne au titre de la CEC comprenait aussi des feuillets T4 délivrés par Dairy Queen Collingwood, dont l’objectif était de confirmer son statut d’employé.

[8]               La décision contestée figure dans une lettre à l’intention de M. Byrne datée du 18 novembre 2016, ainsi que dans les notes du Système mondial de gestion des cas (SMGC). La détermination de l’agent selon laquelle M. Byrne ne satisfaisait pas aux exigences d’immigration au Canada était indiquée dans la lettre. Il y était noté que la demande était fondée sur l’emploi suivant, lequel faisait partie de son expérience de travail qualifié au Canada : [traduction] « SEPT 2012 – date de la demande : propriétaire-exploitant – CNP 0631 – 2338520 Ontario Inc. sous la dénomination sociale Dairy Queen Collingwood ». L’agent estimait que M. Byrne ne satisfaisait pas aux exigences relatives à l’expérience de travail qualifié parce que les documents à l’appui présentés confirmaient qu’il avait été actionnaire de la société Dairy Queen Collingwood pendant la période de travail pertinente. La lettre de l’agent renvoyait à l’alinéa 87.1(3)b) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, qui exclut toute période de travail indépendant du calcul d’une période d’expérience de travail qualifié au Canada. L’agent a donc rejeté la demande de M. Byrne.

[9]               Dans les notes du SMGC, également datées du 18 novembre 2016, l’agent a indiqué qu’un historique de recherche avait révélé que l’autorisation d’emploi initiale de M. Byrne avait été délivrée en 2012 à titre de propriétaire-exploitant de Dairy Queen Collington et qu’une lettre du directeur de l’entreprise, Maurice Byrne, confirmait que M. Byrne était le principal actionnaire de la société.

[10]           Des notes antérieures dans le SMGC, datées du 18 août 2016, démontrent qu’un analyste des cas a formulé une recommandation pour que la demande de M. Byrne fasse l’objet d’un examen par un agent. L’analyste a indiqué dans ses commentaires que le demandeur semblait être le propriétaire de la société étant donné le titre de poste déclaré (propriétaire-exploitant) et que le directeur qui avait signé la lettre d’offre avait le même nom de famille que le demandeur et pourrait être son frère. L’analyste a ensuite noté que le travail indépendant n’était pas admissible au programme de la CEC et qu’il renvoyait l’affaire pour que la demande soit examinée par un agent.

III.               Questions en litige et norme de contrôle

[11]           Le demandeur soumet à la Cour les questions suivantes aux fins d’examen :

A.     L’interprétation par l’agent du « travail indépendant » au titre de la CEC était-elle déraisonnable?

  1. Le demandeur s’est-il vu refuser l’équité procédurale dans le cadre du traitement de sa demande étant donné qu’il n’a pas été informé des préoccupations de l’agent concernant sa crédibilité?

[12]           Le défendeur soulève également une question préliminaire puisque la présente demande de contrôle judiciaire est étayée par un affidavit assermenté du demandeur qui comprend des éléments de preuve qui n’ont pas été présentés à l’agent. Le défendeur est d’avis que ces éléments de preuve ainsi que toute observation en découlant devraient être rejetés ou qu’on ne devrait pas leur accorder de poids étant donné que le contrôle judiciaire est limité au dossier de preuve présenté à l’agent. Le demandeur répond que les nouveaux éléments de preuve sont pertinents pour la question de l’équité procédurale. J’aborderai la question des éléments de preuve ci-dessous dans mon analyse des arguments relatifs à l’équité procédurale.

[13]           Les parties conviennent, et je suis d’accord, que la question qui consiste à déterminer si l’agent a pris une décision raisonnable est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, tandis que la question de l’équité procédurale est susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte (se reporter à Lazar c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 16 (Lazar), aux paragraphes 9 et 10).

IV.              Analyse

A.                 L’interprétation par l’agent du « travail indépendant » au titre de la CEC était-elle déraisonnable?

[14]           Le demandeur allègue que l’agent a commis une erreur dans son interprétation de ce que constitue un « travail indépendant » au titre du programme de la CEC puisqu’il n’a pas tenu compte des facteurs énoncés dans les lignes directrices de politique publiées par IRCC, pas plus qu’il n’y a fait référence, et qu’il n’a pas tenu compte de certains éléments de preuve qu’il a présentés, précisément la lettre de Maurice Byrne datée du 22 juin 2016 et ses feuillets T4.

[15]           Les facteurs auxquels le demandeur fait référence sont énoncés dans les lignes directrices de politique d’IRCC de la façon suivante :

Pour déterminer si un demandeur au titre de la CEC était un employé ou un travailleur indépendant pendant qu’il a acquis l’expérience de travail admissible au Canada, les agents de CIC doivent tenir compte de divers facteurs :

        le degré de contrôle ou d’autonomie du travailleur par rapport à la manière d’accomplir le travail, au choix du moment pour l’accomplir et à la méthode à utiliser;

        si le travailleur possède ou fournit des outils et de l’équipement pour accomplir le travail;

        la mesure dans laquelle le travailleur doit accomplir le travail personnellement ou s’il peut donner du travail en sous-traitance ou embaucher d’autres personnes pour l’aider à effectuer le travail;

        l’ampleur du risque financier assumé par le travailleur, et notamment si ce dernier doit faire des investissements pour mener à bien le travail ou fournir les services requis et s’il est libre de prendre des décisions d’affaires influant sur sa capacité de réaliser un profit ou sur le risque de perte (par opposition à la possibilité d’obtenir une commission ou toute autre prime de productivité);

        tout autre aspect pertinent, comme les contrats écrits.

[16]           Le demandeur est d’avis que l’agent a commis une erreur puisqu’il a fondé sa décision entièrement sur le fait qu’il détenait des parts de l’entreprise et qu’il était désigné comme « propriétaire-exploitant » sur son autorisation d’emploi sans tenir compte des facteurs susmentionnés ou des éléments de preuve pertinents qui s’y rattachent. Même si le demandeur reconnaît que le fait qu’il détienne des actions de l’entreprise est pertinent pour déterminer s’il est un travailleur indépendant, il prétend que l’agent était tout de même tenu de tenir compte des facteurs énoncés dans les lignes directrices, et notamment de son niveau de contrôle, tel que le démontrent ses tâches et ses responsabilités particulières.

[17]           Après avoir examiné l’analyse de l’agent, comme en témoignent les notes du SMGC, le dossier présenté à l’agent, y compris les éléments particuliers sur lesquels se fondent les arguments du demandeur, ainsi que les lignes directrices de politique applicables, je ne suis pas en mesure de conclure que la décision de l’agent n’appartient pas aux issues possibles acceptables ni qu’elle est déraisonnable. Je suis conscient que la décision est brève et que les notes de l’agent dans le SMGC ne renvoient qu’à la possession d’actions de l’entreprise et à la désignation à titre de « propriétaire-exploitant » sur l’autorisation d’emploi. Cependant, cela ne me permet pas de conclure que l’agent a ignoré les autres éléments de preuve présentés par le demandeur. Comme l’a expliqué le juge Gleeson, qui a examiné des arguments similaires dans l’arrêt Lazar, aux paragraphes 11 à 15, un agent d’immigration est présumé avoir tenu compte de tous les éléments de preuve qui lui ont été présentés. Même si le fait que des éléments de preuve pertinents et contradictoires soient passés sous silence permet à la Cour de déduire que ces éléments de preuve ont été ignorés [voir Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), (1998) FCJ no 1425 – Cepeda-Gutierrez), les éléments de preuve sur lesquels se fonde le demandeur ne permettent pas d’en arriver à cette conclusion.

[18]           Je reconnais que l’agent ne renvoie pas aux feuillets T4 présentés par le demandeur et je peux facilement conclure que ces éléments de preuve démontrent une relation d’emploi entre la société, Dairy Queen Collingwood, et M. Byrne. Cependant, il ne s’agit pas de la question sur laquelle l’agent s’est appuyé pour prendre sa décision. Il a plutôt cherché à déterminer si cette relation d’emploi en était une de travail indépendant. Les feuillets T4 ont peu d’incidence sur cette question, et l’absence de renvoi à ces feuillets dans la décision de l’agent ne constitue pas un fondement pour invoquer l’arrêt Cepeda-Gutierrez.

[19]           Il est également difficile de conclure que l’agent a ignoré les renseignements fournis par Maurice Byrne en ce qui a trait aux responsabilités du demandeur puisque les notes du SMGC font explicitement référence à une lettre au dossier du directeur de la société qui confirme que le demandeur était le principal actionnaire de la société. Même s’il semble s’agir d’un renvoi à la lettre du 23 septembre 2015, dans laquelle il est indiqué que le demandeur était le principal actionnaire ainsi que le propriétaire-exploitant du restaurant, comme il est indiqué plus haut, cette lettre fournit essentiellement la même description des responsabilités du demandeur que celle figurant dans la lettre subséquente de Maurice Byrne datée du 22 juin 2016. Bien que les notes du SMGC ne fassent pas référence à ces responsabilités, le renvoi à la lettre de Maurice Byrne ne me permet pas de conclure que la description des responsabilités a été ignorée.

[20]           En ce qui a trait à la question de déterminer si l’agent a omis de tenir compte des facteurs énoncés dans les lignes directrices de politique d’IRCC, particulièrement en ce qui concerne le niveau de contrôle, je fais remarquer une fois de plus que le juge Gleeson a tenu compte d’un argument similaire dans l’arrêt Parssian c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 304 [Parssian]. Aux paragraphes 20 à 22, le juge Gleeson a conclu que ces facteurs ne constituent pas des critères obligatoires et que les lignes directrices n’exigent pas que tous les facteurs soient examinés, ne précisent pas le degré d’importance qui devrait être accordé à l’un ou l’autre des facteurs, et n’exigent pas que l’agent prenne en compte un facteur en particulier s’il ne doute pas que le demandeur soit un employé ou un travailleur autonome aux termes de la CEC.

[21]           Je comprends, comme l’a indiqué l’avocat de M. Byrne, que le demandeur dans l’arrêt Parssian a reconnu qu’il était un travailleur indépendant dans les documents présentés à l’appui de sa demande. À cet égard, les faits énoncés dans l’arrêt Parssian se distinguent de ceux en l’espèce. Cependant, comme l’a fait remarquer le demandeur, la décision de l’agent semble avoir été grandement influencée par l’élément de preuve non contesté selon lequel le demandeur était le principal actionnaire de l’entreprise. En plus des facteurs soulignés par le demandeur, les lignes directrices d’IRCC précisent que « [...] les personnes qui sont propriétaires dans une mesure substantielle d’une entreprise par laquelle ils sont également employés, ou dont ils assurent le contrôle de gestion, sont généralement considérées comme des travailleurs indépendants ». Si je tiens compte de cette partie des lignes directrices et de l’analyse dans l’arrêt Parssian, je ne considère pas que les lignes directrices appuient l’argument du demandeur selon lequel la décision de l’agent était déraisonnable.

[22]           En ce qui concerne l’autorisation d’emploi, le demandeur affirme que l’agent était tenu de voir au-delà du titre de « propriétaire-exploitant » et insiste sur le fait que la classification nationale des professions [CNP] 0631, en vertu de laquelle l’autorisation d’emploi a été délivrée, renvoie à la possibilité que les directeurs de la restauration et des services alimentaires auxquels est liée la CNP peuvent être des employés ou des travailleurs indépendants. Je suis d’avis que cet argument est infondé puisque le dossier indique que l’activité professionnelle « propriétaire-exploitant » qui figure sur l’autorisation d’emploi n’est pas une fonction de la CNP applicable, mais plutôt la description du demandeur dans les documents présentés à l’appui de sa demande d’autorisation. Par exemple, la lettre du 23 septembre 2015 de Maurice Byrne demandait [traduction] « la prolongation de son autorisation d’emploi temporaire jusqu’au 10 novembre 2017 pour lui permettre de devenir le propriétaire-exploitant de Dairy Queen Collingwood ».

[23]           Pour conclure sur cette question, je ne vois aucun motif de conclure que la décision de l’agent était déraisonnable.

B.                 Le demandeur s’est-il vu refuser l’équité procédurale dans le cadre du traitement de sa demande étant donné qu’il n’a pas été informé des préoccupations de l’agent concernant sa crédibilité?

[24]           Je me dois donc d’examiner l’argument du demandeur selon lequel il s’est vu refuser l’équité procédurale parce que l’agent ne l’a pas informé de ses préoccupations concernant sa crédibilité et qu’il ne lui a pas donné l’occasion de les réfuter.

[25]           J’aborderai d’abord la question des éléments de preuve. La preuve par affidavit et les pièces à l’appui auxquelles le défendeur s’oppose représentent des éléments de preuve supplémentaires qui n’ont pas été déposés devant l’agent, qui portent sur la propriété, la structure et les activités de la société, et dont l’objectif est d’appuyer la position du demandeur selon laquelle il n’a pas acquis son expérience dans le cadre d’un travail indépendant. Le demandeur reconnaît que ces éléments de preuve ne sont pas admissibles aux fins de la détermination du caractère raisonnable de la décision de l’agent, mais il allègue qu’ils sont pertinents pour la question de l’équité procédurale. Selon lui, ces éléments de preuve permettent de démontrer qu’il y a eu un manquement à l’équité procédurale. Il affirme qu’ils démontrent plutôt que s’il avait eu l’occasion de répondre aux préoccupations de l’agent, il aurait pu présenter des éléments de preuve supplémentaires.

[26]           Comme je l’expliquerai ci-dessous, ma conclusion est qu’il n’y a pas eu de manquement à l’équité procédurale puisque l’agent n’était pas tenu d’informer le demandeur qu’il pensait qu’il était un travailleur indépendant. Il n’est donc pas nécessaire que j’examine l’argument du demandeur à l’appui de l’admissibilité des nouveaux éléments de preuve.

[27]           L’argument d’équité procédurale du demandeur caractérise la décision de l’agent comme une décision fondée sur des préoccupations concernant la crédibilité. Il se fonde sur l’arrêt Hassani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2006 CF 1283, dans lequel le juge Mosley a expliqué au paragraphe 24 les principes qui s’appliquent à un tel argument de la façon suivante :

[24]      Il ressort clairement de l’examen du contexte factuel des décisions mentionnées ci-dessus que, lorsque les réserves découlent directement des exigences de la loi ou d’un règlement connexe, l’agent des visas n’a pas l’obligation de donner au demandeur la possibilité d’y répondre. Lorsque, par contre, des réserves surgissent dans un autre contexte, une telle obligation peut exister. C’est souvent le cas lorsque l’agent des visas a des doutes sur la crédibilité, l’exactitude ou l’authenticité de renseignements fournis par le demandeur au soutien de sa demande [...].

[28]           Ces principes n’aident pas le demandeur puisqu’il n’est pas possible de caractériser la décision de l’agent comme une décision fondée sur des préoccupations concernant la crédibilité. L’agent n’a pas pris cette décision parce qu’il ne croyait pas le demandeur ou l’un des éléments de preuve présentés à l’appui de sa demande. La demande a plutôt été rejetée parce que l’analyse des éléments de preuve par l’agent a mené à la conclusion que le demandeur était un travailleur indépendant. Par conséquent, l’agent n’était pas tenu à un devoir d’équité procédurale envers le demandeur et il n’avait pas à l’informer de son analyse avant de rejeter sa demande.

[29]           Je note l’argument du demandeur selon lequel l’agent a pris sa décision parce qu’il avait des doutes sur l’exactitude des renseignements sur la relation d’emploi figurant dans la lettre du 22 juin 2016, produite par son frère. Pour appuyer son argument, le demandeur fait référence aux notes de l’analyste des cas dans le SMGC selon lesquelles l’auteur de la lettre porte le même nom de famille que lui et pourrait être son frère. Je conclus que cet argument est non fondé. Rien n’indique que ce commentaire de l’analyste des cas a influencé la décision de l’agent ni, surtout, que l’agent considérait l’origine de la lettre comme une source d’inquiétude quant à son exactitude.

[30]           Puisque j’ai conclu que l’agent n’a commis aucune erreur susceptible de révision, la présente demande de contrôle judiciaire doit être rejetée. Aucune des parties n’a proposé de question aux fins de certification, et aucune question n’est mentionnée.


JUGEMENT

LA COUR rejette la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune question n’est certifiée aux fins d’appel.

« Richard F. Southcott »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5044-16

INTITULÉ :

THOMAS FRANCIS BYRNE c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 28 JUIN 2017

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE SOUTHCOTT

DATE DES MOTIFS :

Le 30 JUIN 2017

COMPARUTIONS :

Adrienne Smith

Pour le demandeur

Amina Riaz

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jordan Battista LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

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