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Date : 20171129


Dossier : T-2043-16

Référence : 2017 CF 1077

Ottawa (Ontario), le 29 novembre 2017

En présence de monsieur le juge Martineau

ENTRE :

CAROLE PRONOVOST

demanderesse

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               La demanderesse, Mme Carole Pronovost, est à l’emploi à l’Agence du revenu du Canada [l’ARC ou l’employeur] depuis 1993. Elle conteste la légalité et/ou la raisonnabilité d’une décision rendue le 28 octobre 2016 par le sous-commissaire de la région de Québec de l’ARC rejetant sa plainte de violence en milieu de travail.

[2]               La partie II du Code canadien du travail, LRC 1985, c L-2 [Code], a pour objet de prévenir les accidents et les maladies liés à l’occupation d’un emploi et s’applique notamment aux employés de l’ARC. La partie XX du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail, DORS/86-304 [Règlement], établit des mécanismes de prévention et d’enquête visant la violence dans le milieu de travail. Aux termes de l’article 20.2 du Règlement, constitue de la violence dans le milieu de travail, tout agissement, comportement, menace ou geste d’une personne à l’égard d’un employé à son lieu de travail et qui pourrait vraisemblablement lui causer un dommage, un préjudice ou une maladie. Il n’est pas contesté que peuvent entrer dans cette catégorie, tout dépendant du contexte, l’intimidation, les taquineries et les comportements injurieux ou agressifs en milieu de travail, ainsi que le harcèlement psychologique (voir notamment Canada (Procureur général) c Alliance de la fonction publique du Canada, 2015 CAF 273 au para 22; voir aussi Emploi et Développement Social Canada, Guide de Prévention de la violence dans le lieu de travail, 943‑1-IPG-081, Ottawa, Emploi et Développement social Canada – Programme du travail, 2016 au para 3.3). Rappelons au passage que le harcèlement « comprend tout acte, propos ou exhibition qui diminue, rabaisse, humilie ou embarrasse une personne, ou tout acte d’intimidation ou de menace » (voir Conseil du Trésor du Canada, Politique sur la prévention et le règlement du harcèlement au milieu de travail, Ottawa, Conseil du Trésor, 2012 [Politique sur le harcèlement]).

[3]               Le Règlement impose à l’employeur l’obligation d’élaborer une politique de prévention de la violence dans le lieu de travail énonçant, notamment, l’obligation d’offrir un lieu de travail sécuritaire, sain et exempt de violence (alinéa 20.3a) du Règlement). Dès qu’il a connaissance d’une telle violence, l’employeur doit tenter de régler la situation à l’amiable avec l’employé, et en cas d’échec, nommer une personne compétente pour faire enquête sur la situation (paras 20.9(2) et 20.9(3) du Règlement). Cette personne doit être considérée impartiale par les parties (alinéa 20.9(1)a) du Règlement). Au terme de son enquête, la personne compétente fournit à l’employeur un rapport écrit contenant ses conclusions et recommandations (para 20.9(4) du Règlement). Sur réception du rapport, l’employeur doit notamment transmettre le dossier au comité local ou au représentant, et mettre en place des mécanismes de contrôle pour éviter que la violence ne se répète (alinéas 20.9(5)b) et 20.9(5)c) du Règlement). Une fois ces mécanismes mis en place, l’employeur établit les mesures de suivi et les mesures correctives adéquates (para 20.6(3) du Règlement).

[4]               La plainte de violence de la demanderesse, qui se dit également victime de harcèlement psychologique continu dans son milieu de travail depuis l’automne 2009 à ce jour, a été formulée en vertu de l’article 20.9 du Règlement. Pour les fins des présentes, il n’est pas nécessaire de relater tous et chacun des incidents de violence et/ou de harcèlement relatés à l’annexe A de sa plainte du 30 mars 2016. Bien que la plainte fasse notamment référence à des décisions de la gérance affectant les conditions de travail de la demanderesse, il faut cependant lire celle-ci à la lumière des précisions supplémentaires fournies par la demanderesse dans plusieurs documents pertinents qui ont été transmis à l’employeur – dont la plainte de harcèlement du 2 juin 2015 et un addendum du 5 mai 2016 – soumis par la demanderesse dans le cadre de l’enquête qui a été menée au sujet de la plainte de violence. En particulier, la demanderesse dit avoir été humiliée devant ses collègues de travail, tandis que les gestionnaires en ont profité pour monter ses collègues contre elle. Ces comportements fautifs ont affecté la santé physique et morale de la demanderesse : congés de maladie prolongés; stress psychologique; atteinte à la réputation et l’intégrité; bris de sa carrière; perte de salaire; frais pour divers soins; dommages moraux; impact sur la famille et son couple; prise de poids; etc.

[5]               En mai et juin 2016, il y a eu différents échanges entre l’employeur et la demanderesse concernant la nomination d’une personne compétente chargée d’enquêter au sujet des incidents de violence en milieu de travail allégués par la demanderesse. L’employeur a proposé deux candidats : Mme Kathryn Langon-Burton et M. Daniel Labrie. La demanderesse n’a formulé aucune préoccupation particulière relativement à l’impartialité du candidat Labrie. Celle-ci a toutefois soulevé des préoccupations au sujet de l’impartialité de la candidate Langon-Burton. Le 16 juin 2016, l’employeur a désigné M. Labrie [l’enquêteur] à titre de personne compétente.

[6]               Le 6 juillet 2016, l’enquêteur a rencontré la demanderesse et sa représentante syndicale. Des documents ont été remis à l’enquêteur. Néanmoins, ce dernier a accepté de recevoir uniquement les documents qui avaient été préalablement transmis par la demanderesse à l’employeur. La Cour croit comprendre que la demanderesse a pu fournir à l’enquêteur les noms de plusieurs employés à rencontrer. Après la rencontre du 6 juillet 2016, l’enquêteur a effectivement rencontré les gestionnaires faisant l’objet des allégations de harcèlement et de violence et également une employée dont le nom apparaît à la plainte de violence. Toutefois, le contenu de ces témoignages n’a jamais été divulgué à la demanderesse et les notes de l’enquêteur et/ou les enregistrements de ces témoignages n’ont pas été produits à la Cour.

[7]               Le 26 septembre 2016, l’enquêteur a remis son rapport à l’employeur dont le contenu a été entériné par le sous-commissaire. Le rapport a été communiqué le 28 octobre 2016 à la demanderesse et au comité de santé et sécurité. À aucun moment avant qu’une décision finale ne soit prise par le sous-commissaire, la demanderesse n’a-t-elle été invitée à présenter des observations concernant le rapport d’enquête.

[8]               Notons en premier lieu que le rapport ne contient aucune analyse des éléments de preuve recueillis par l’enquêteur (documents et témoignages). S’agissant des incidents précis de violence et/ou de harcèlement relatés dans la plainte, l’enquêteur ne fait pas état du contenu de la rencontre du 6 juillet 2016 avec la demanderesse et sa représentante syndicale, ni des rencontres que l’enquêteur a eues subséquemment avec les gestionnaires visés par la plainte de violence et par l’autre employée rencontrée. De manière générale, l’enquêteur note que l’ARC – comme tous les organismes gouvernementaux de juridiction fédérale – est déjà pourvue de nombreuses politiques et procédures relatives à la prévention de la violence dans le lieu de travail et à ses différentes composantes, et dont l’enquêteur effectue un bref survol dans son rapport.

[9]               Essentiellement, l’enquêteur considère qu’il ne s’agit pas d’un cas de « violence dans le lieu de travail » au sens de l’article 20.2 du Règlement. Selon l’enquêteur les actions reprochées aux personnes visées dans la plainte – principalement des gestionnaires ou des cadres – relèvent plutôt de l’exercice par l’employeur de son « droit de gérance ». Pour ce qui est des dommages subis par la demanderesse, l’enquêteur croit que la demanderesse a plutôt été fragilisée par sa situation familiale et qu’elle avait une condition personnelle de santé émotionnelle indépendante du travail et susceptible d’avoir un impact sur son comportement et ses relations interpersonnelles. Notant que des griefs ont été formulés et que la plainte de harcèlement était toujours en cours, l’enquêteur est d’avis qu’il n’y a pas lieu de prévoir de nouvelles procédures ou mesures de prévention autres que celles déjà disponibles.

[10]           La demanderesse soumet que la décision contestée est révisable sous trois chefs distincts :

a)                  L’enquêteur n’avait pas compétence puisque l’employeur n’a pas respecté le paragraphe 20.9(1) du Règlement;

b)                  L’enquêteur a manqué à son devoir d’équité procédurale dans la tenue de l’enquête; et

c)                  La décision contestée est déraisonnable.

[11]           La défenderesse rétorque que cette Cour ne devrait pas considérer le premier moyen puisque la demanderesse ne s’est pas prévalue des procédures administratives d’appel qui s’ouvraient à elle pour contester la nomination de la personne compétente. Cela dit, l’enquêteur a respecté les principes d’équité procédurale dans le déroulement de l’enquête et les conclusions de son rapport sont également raisonnables. À ce chapitre, l’employeur s’est acquitté de ses obligations de mettre en place des mesures de prévention de la violence en milieu de travail par le biais des politiques et procédures en vigueur actuellement.

[12]           Je ne m’attarderai pas longtemps sur le premier moyen de la demanderesse. Il n’est pas nécessaire aujourd’hui de décider si la demanderesse aurait dû épuiser tout recours administratif disponible pour contester la nomination de M. Labrie à titre de personne compétente. Dans les faits, son impartialité n’est pas remise en question par la demanderesse dans cette procédure de contrôle judiciaire. Il n’empêche, je suis satisfait que les principes d’équité procédurale n’ont pas été respectés et que la décision contestée – qui repose sur le rapport d’enquête – est déraisonnable.

[13]           Dans l’arrêt Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 RCS 817 aux pages 838-840, 174 DLR (4e) 193, la Cour suprême nous enseigne que cinq facteurs doivent être considérés pour déterminer le contenu de l’obligation d’équité procédurale : la nature de la décision recherchée et le processus suivi; la nature du régime législatif; l’importance de la décision pour les personnes visées; les attentes légitimes de la personne et les choix de procédure de l’organisme lui-même. Bien que le Règlement ne prévoit aucune procédure spécifique, il faut savoir que l’enquête a des conséquences importantes sur le climat des relations de travail dans le milieu visé, ainsi que sur la carrière professionnelle et la condition psychologique de la présumée victime, ainsi que toute personne visée par la plainte de violence ou de harcèlement. Ces considérations sont déterminantes en l’espèce. En effet, l’obligation d’équité procédurale est particulièrement élevée dans le contexte d’allégations de harcèlement (voir notamment Renaud c Canada (Procureur général), 2013 CF 18, conf par Renaud c Canada (Procureur général), 2013 CAF 266). Bien que l’affaire Renaud traitait d’une plainte de harcèlement en vertu de la Politique sur le harcèlement du Conseil du Trésor, la même rigueur s’applique ici, puisque le harcèlement peut constituer de la violence aux fins de la partie XX du Règlement.

[14]           En l’espèce, la demanderesse reproche notamment à l’enquêteur de ne l’avoir rencontrée qu’une seule fois, au tout début de l’enquête, et de ne pas lui avoir permis de contredire tout témoignage défavorable et/ou de présenter ses observations avant que le rapport d’enquête final ne soit transmis à l’employeur. La défenderesse avance que la rencontre initiale était suffisante : la demanderesse a pu expliquer à cette occasion sa version des faits à l’enquêteur pendant trois heures. La défenderesse précise que les témoins interviewés n’ont pas été proposés par l’employeur, mais ont plutôt été identifiés par l’enquêteur à sa lecture du dossier. D’autre part, la défenderesse soumet que le caractère confidentiel de l’enquête et la célérité à laquelle est astreint l’enquêteur justifient la non transmission à la demanderesse du contenu des témoignages et/ou d’une version préliminaire du rapport que l’enquêteur se propose de transmettre à l’employeur.

[15]           L’équité procédurale n’a pas été respectée. Il était impossible pour la demanderesse d’anticiper les témoignages des cadres et/ou employés interviewés après la rencontre du 6 juillet 2016. L’enquêteur devait lui offrir une occasion raisonnable de réfuter tout élément de preuve défavorable recueilli en son absence et de répondre à toute prétention des gestionnaires à l’effet que leur comportement sur les lieux de travail ne constituait pas de la violence ou du harcèlement. Bien que l’enquêteur doive agir avec célérité et que son enquête doive être confidentielle, il doit s’assurer que toute personne pouvant être affectée par les conclusions de son rapport ait été entendue et ait pu lui soumettre des observations.

[16]           De surcroît, la demanderesse conteste également la raisonnabilité des conclusions de l’enquêteur vu l’absence complète d’analyse des éléments de preuve au dossier. En effet, il n’y a aucune façon de savoir à la lecture de son rapport comment l’enquêteur peut en arriver à la conclusion que les actes reprochés aux gestionnaires ne constituent pas de la violence au sens du Règlement. L’enquêteur ne pouvait se contenter d’affirmer qu’on avait affaire à l’exercice légitime du droit de gérance de l’employeur. En somme, les motifs fournis ne permettent pas à la Cour de conclure que l’enquêteur a procédé à une analyse rigoureuse et sérieuse du dossier.

[17]           La défenderesse répond que l’enquêteur n’avait pas besoin de faire référence à toute la preuve ni à aucun acte de violence en particulier. Les motifs fournis permettent de comprendre le fondement de la décision. Il faut également présumer que l’enquêteur a tenu compte de l’ensemble de la preuve au dossier. En l’espèce, l’enquêteur pouvait conclure que les actions reprochées ont été posées dans l’exercice du pouvoir de gérance de l’employeur. L’enquêteur a également considéré le préjudice causé à la demanderesse. Il était en droit de considérer la condition personnelle de la demanderesse comme facteur affectant le lien de causalité.

[18]           La décision de l’employeur rejetant la plainte de violence en milieu de travail n’est pas une issue acceptable. Il est manifeste que l’enquêteur n’a pas procédé à une analyse rigoureuse et sérieuse du dossier et que son enquête est gravement déficiente. La plainte de la demanderesse fait référence à plusieurs faits et incidents – s’ils sont tenus pour avérés à ce stade – pourraient constituer de la violence au sens du Règlement, notamment les allégations suivantes (les noms des personnes mentionnées dans la plainte ont été omis par la Cour) :

•     Plusieurs gestionnaires ont toléré des séances de récriminations en groupe faites par d’autres employés à l’encontre de la demanderesse. Les employés ont même été invités à y participer;

•     Une gestionnaire a utilisé un ton colérique et autoritaire envers la demanderesse, et ce devant ses collègues. La demanderesse affirme que deux employées ont été témoins de cet incident;

•     Une autre gestionnaire se serait adressée à la demanderesse avec un ton violent et intimidant. Cette autre gestionnaire aurait incité ses collègues à déposer une plainte contre elle, et aurait donné l’instruction aux employés de ne pas entrer en contact avec la demanderesse;

•     Encore un autre gestionnaire aurait parlé aux employés des autres griefs que la demanderesse a déposés en disant que si elle gagnait, les employés et la gestion seraient « dans la merde »;

•     On aurait aussi laissé croire aux autres employés que la demanderesse était fautive et inappropriée.

[19]           Force est de constater que les incidents relatés au paragraphe précédent – qui ne sont pas isolés – semblent contredire la conclusion générale de l’enquêteur à l’effet que les comportements reprochés constituaient seulement des mesures administratives relatives à l’exercice du droit de gérance de l’employeur. Qui plus est, le caractère déraisonnable de la conclusion de rejet de la plainte découle de l’omission de l’enquêteur de traiter des allégations spécifiques de violence dans le contexte du lieu de travail où évoluent la demanderesse et ses co‑employés. Rappelons que l’enquêteur s’appuie sur le fait que des griefs ont été formulés et que la plainte de harcèlement est toujours en cours, pour conclure que de nouvelles mesures de prévention de la violence ne sont pas nécessaires. Certes, les mesures administratives contestées font l’objet de griefs, et les allégations de harcèlement seront effectivement examinées dans le cadre d’une enquête distincte. Il reste que l’obligation de l’employeur en vertu de la partie II du Code d’assurer un climat exempt de violence vise des comportements possiblement différents bien qu’il peut y avoir un certain recoupement. Bref, on parle ici de l’atmosphère même du milieu de travail, qui ne doit pas être contaminée par des comportements injurieux ou agressifs des gestionnaires et des employés. L’intimidation sous quelque forme que ce soit pollue les relations interpersonnelles et contribue à créer un environnement de travail malsain, autant pour l’employeur que pour ses employés. La prévention de la violence en milieu de travail vise notamment à réprimer des incidents qui ne seraient pas nécessairement jugés contraires à la convention collective – lorsque examinés isolément dans un contexte de grief, ou qui n’équivaudraient pas nécessairement à du harcèlement psychologique, mais que le législateur a tout de même jugé nécessaire de bannir de manière générale afin d’assurer un milieu de travail sécuritaire, sain et exempt de violence. L’endroit, la manière et le ton utilisé par un gestionnaire pour donner un avertissement ou réprimander un employé, sont autant d’éléments importants à considérer lorsqu’une plainte de violence en milieu de travail est faite par un employé.

[20]           Donc, pour résumer, l’enquêteur devait s’assurer que le milieu de travail chez l’employeur était sécuritaire, sain et exempt de violence. Toutefois, rien dans son rapport n’indique qu’un tel exercice d’enquête a effectivement eu lieu. Or, les multiples incidents allégués par la demanderesse et énumérés plus haut pourraient, à tout le moins, indiquer la présence d’un certain climat de violence, et auraient donc mérité un examen plus approfondi. L’enquêteur aurait, bien sûr, été libre dans son rapport de rejeter, ultimement, les allégations de la demanderesse – advienne que l’enquête ait révélé qu’elles étaient non fondées et que le milieu de travail était par ailleurs sain et exempt de violence.

[21]           Un dernier point : il ne faut surtout pas banaliser le harcèlement et la violence en milieu de travail. Comme l’a reconnu cette Cour dans l’affaire Alliance de la fonction publique du Canada c Canada (Procureur général), 2014 CF 1066 au paragraphe 29, « l’intimidation psychologique peut constituer au fil du temps une des pires formes de dommage qui puissent être infligées à une personne ». Naturellement, l’expérience et les qualifications des personnes compétentes nommées pour faire enquête participent à créer le niveau de confiance requis du côté de la direction et des employés. Une bonne sensibilisation à la problématique complexe du harcèlement et de ses composantes pernicieuses va de soi. Aussi, on peut se demander comment l’enquêteur – dont le curriculum vitae n’a jamais été fourni à la demanderesse – pouvait écarter, au terme d’une enquête somme toute très sommaire, le préjudice psychologique subi par la demanderesse en raison des actes de violence et/ou de harcèlement allégués, en se fondant sur la fragilité émotionnelle de la demanderesse, alors qu’il n’avait, semble-t-il, aucune expertise médicale ou qualifications particulières pour donner cette opinion.

[22]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision du sous-commissaire rejetant la plainte de violence de la demanderesse est infirmée et l’affaire est renvoyée à la défenderesse pour redétermination après qu’une nouvelle enquête sur les lieux de travail par une autre personne compétente considérée impartiale par les parties aura eu lieu et que la demanderesse aura eu l’occasion d’être entendue et de faire des représentations sur toute preuve recueillie en son absence et de commenter les conclusions de la personne compétente avant que son rapport d’enquête ne soit transmis à l’employeur.

[23]           Après avoir considéré les représentations des procureurs, la demanderesse a droit à un montant forfaitaire de 2 500 $ à titre de dépens.


JUGEMENT au dossier T-2043-16

LA COUR STATUE que :

1.         La demande de contrôle judiciaire est accueillie;

2.         La décision du sous-commissaire rejetant la plainte de violence de la demanderesse est infirmée et l’affaire est renvoyée à la défenderesse pour redétermination après qu’une nouvelle enquête sur les lieux de travail par une autre personne compétente considérée impartiale par les parties aura eu lieu et que la demanderesse aura eu l’occasion d’être entendue et de faire des représentations sur toute preuve recueillie en son absence et de commenter les conclusions de la personne compétente avant que son rapport d’enquête ne soit transmis à l’employeur; et

3.         La demanderesse a droit à un montant forfaitaire de 2 500 $ à titre de dépens.

« Luc Martineau »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-2043-16

 

INTITULÉ :

CAROLE PRONOVOST c AGENCE DU REVENU DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 22 novembre 2017

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MARTINEAU

 

DATE DES MOTIFS :

LE 29 novembre 2017

 

COMPARUTIONS :

Me Jean-Michel Corbeil

 

Pour la demanderesse

Me Simon Deneau

Me Karl Chemsi

 

Pour la défenderesse

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Goldblatt Partners LLP

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

Pour la demanderesse

Procureur générale du Canada

 

Pour la défenderesse

 

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