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Date : 20180111


Dossier : IMM-2079-17

Référence : 2018 CF 27

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 11 janvier 2018

En présence de madame la juge McDonald

ENTRE :

AMANDEEP

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  Le demandeur a saisi la Cour d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision d’un agent des visas (l’agent), rendue le 24 avril 2017, rejetant la demande de parrainage d’un conjoint du demandeur, au titre de la catégorie des époux ou des conjoints de fait au Canada. La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée pour les motifs qui suivent.

I.  Résumé des faits

[2]  Le demandeur et son épouse ont commencé à se fréquenter en mars 2012. Ils ont commencé à vivre ensemble le 1er avril 2014.

[3]  Dans sa demande de résidence permanente du 2 novembre 2015, au titre de la catégorie de l’expérience canadienne, le demandeur a inscrit qu’il était célibataire, sans personne à charge. Selon le demandeur et son épouse, le concept de la relation de conjoints de fait n’existe pas dans leur culture respective. En outre, leurs familles désapprouvaient leur relation.

[4]  Ils se sont mariés le 6 décembre 2015.

[5]  Le 1er janvier 2016, la demande de résidence permanente de l’épouse du demandeur, au titre de la catégorie des époux ou des conjoints de fait au Canada, a été traitée et [traduction« bloquée ».

[6]  Le 27 février 2017, l’épouse du demandeur a reçu une lettre d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada lui demandant des renseignements supplémentaires sur la chronologie de sa relation avec son époux.

[7]  Le 24 avril 2017, la demande a été rejetée parce que le demandeur n’était pas un répondant admissible pour son épouse.

II.  Décision faisant l’objet du contrôle

[8]  La décision du 24 avril 2017 est composée d’une lettre et de notes, dans le Système mondial de gestion des cas, rédigées par l’agent.

[9]  Dans la lettre, l’agent mentionne que le demandeur n’est pas un répondant admissible parce qu’il a omis de déclarer son épouse à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada dans sa propre demande de résidence permanente, lors de l’entrevue relative à son établissement ou au moment où il est devenu un résident permanent. Par conséquent, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada ne pouvait procéder à un examen concernant l’épouse. L’agent a invoqué l’alinéa 125(1)d) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés.

[10]  Dans les notes du Système mondial de gestion des cas, l’agent a indiqué qu’il était convaincu que la relation entre le demandeur et son épouse respectait la définition de [traduction] « relation conjugale avant l’obtention du droit d’établissement » parce que, [traduction] « selon la prépondérance des probabilités », ils partageaient [traduction] « le même lit, des relations personnelles, des services et des activités sociales, en plus de s’offrir mutuellement un soutien financier et d’être perçus comme un couple […] ».

[11]  À ce titre, l’agent a rejeté la demande de l’épouse du demandeur.

III.  Question en litige

[12]  Il est constant que la seule question en litige consiste à rechercher si la décision de l’agent selon laquelle le demandeur n’était pas admissible à titre de répondant est raisonnable.

IV.  Norme de contrôle

[13]  La question de savoir si la situation du demandeur respecte le critère juridique permettant de conclure à une relation de conjoints de fait est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, puisqu’il s’agit d’une question de fait et de droit (Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c Southam Inc.), [1997] 1 RCS 748, au paragraphe 35; Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 53 [Dunsmuir]).

[14]  En outre, la norme de contrôle applicable à la décision d’un agent des visas relative à la question de la cohabitation et à la catégorie des époux ou conjoints de fait est celle de la décision raisonnable (Nzau c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 74, au paragraphe 8; Rakheja c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 633, au paragraphe 16).

V.  Discussion

[15]  Le demandeur soutient que l’agent n’a pas tenu compte du critère juridique bien établi permettant de trancher s’il vivait en union de fait. Il fait valoir que l’agent s’est concentré uniquement sur le facteur de la cohabitation sans tenir compte d’autres facteurs comme l’engagement mutuel à une vie commune, l’exclusivité, la permanence, l’interdépendance et le fait de s’afficher comme couple.

[16]  Aux fins de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada, la question de savoir si l’épouse et le répondant vivent en union de fait est régie par le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés et les politiques et les lignes directrices d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.

[17]  Dans le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, la définition de « conjoint de fait » est rédigée ainsi :

[...] Personne qui vit avec la personne en cause dans une relation conjugale depuis au moins un an. (common-law partner)

[18]  Dans leur définition d’une relation conjugale, les procédures opérationnelles (guide OP 2 – Traitement des demandes présentées par des membres de la catégorie de la famille) (procédures opérationnelles) du défendeur citent la décision de la Cour suprême dans l’arrêt M. c H., [1999] 2 RCS 3 [M. c H.]  pour trancher si des demandeurs entretiennent une relation conjugale. Les procédures opérationnelles indiquent que plusieurs facteurs sont pris en considération, y compris le partage d’un toit, les activités sociales, le soutien financier et l’image sociétale du couple. Les procédures opérationnelles indiquent qu’une relation conjugale suppose une certaine permanence, où il existe une interdépendance financière, sociale, émotionnelle et physique.

[19]  La Cour a adopté cette définition de « conjoint de fait » aux fins du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés : Deheza c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2016 CF 1262, au paragraphe 27 (Deheza); Cai c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 816, au paragraphe 12. Est manifestement absente de cette définition la croyance subjective des époux quant à leur statut, qui représente selon le demandeur un facteur déterminant qui milite en faveur de ses arguments.

[20]  En l’espèce, la décision indique que l’agent a tenu compte des facteurs pertinents et qu’il a appliqué le critère approprié pour les conjoints de fait. Il a évalué la chronologie de la relation et il s’est fondé sur plusieurs événements pour appuyer sa conclusion de l’existence d’une relation conjugale, à savoir : la signature d’un bail en occupation conjointe, des comptes bancaires conjoints, [traduction] le « caractère public » de la relation et la participation à des activités sociales ensemble. Ces événements ont eu lieu avant que le demandeur indique dans sa demande de résidence permanence qu’il était célibataire.

[21]  Malgré ces faits, le demandeur soutient qu’en raison des antécédents culturels du couple, il n’y avait pas de [traduction] « relation conjugale », puisqu’ils [traduction] « ne pouvaient que se fréquenter », et ce, pour des raisons culturelles et familiales.

[22]  Toutefois, la croyance subjective des époux n’est pas un élément de la définition d’une relation conjugale, comme elle est définie dans l’arrêt M. c H., lequel a été intégré dans les procédures opérationnelles et interprété par notre Cour. Les éléments de preuve présentés à l’agent appuyaient sa conclusion que, [traduction] « selon la prépondérance des probabilités », le demandeur et son épouse partageaient le même lit, des activités sociales et ainsi de suite.

[23]  Par conséquent, l’espèce se distingue de la décision Deheza. Dans cette affaire, l’agent a conclu que les deux demandeurs vivaient sous le même toit. La conclusion de fait de l’agent selon laquelle les demandeurs vivaient ensemble en mars 2010 a été faite « sans reconnaissance ou prise en compte de la définition de [“]conjoint de fait[”] dans le Règlement, le guide opérationnel ou la jurisprudence, et sans aucune analyse de la façon dont les éléments de preuve satisfaisaient aux critères pertinents ». En l’espèce, l’agent a analysé les éléments de preuve objectifs présentés et il a tenu compte des facteurs appropriés établis dans l’arrêt M. c H.  et intégrés dans les procédures opérationnelles.

[24]  Comme l’agent est présumé avoir tenu compte de tous les renseignements qui lui ont été présentés, notre Cour ne peut pas réexaminer les éléments de preuve (Flores c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 723, au paragraphe 15).

[25]  Dans l’ensemble, l’agent s’est penché sur les éléments de preuve et il a appliqué le critère approprié. Par conséquent, sa décision est justifiable, transparente et intelligible selon le libellé de l’arrêt Dunsmuir, au paragraphe 47.

[26]  Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-2079-17

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire de la décision de l’agent des visas est rejetée.

  2. Aucune question n’est certifiée.

« Ann Marie McDonald »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 12e jour d’août 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2079-17

INTITULÉ :

AMANDEEP c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 7 DÉCEMBRE 2017

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE MCDONALD

DATE DES MOTIFS :

LE 11 JANVIER 2018

COMPARUTIONS :

Wennie Lee

POUR LE DEMANDEUR

Nicholas Dodokin

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lee & Company

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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