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Date : 20180309


Dossier : T-942-17

Référence : 2018 CF 283

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 9 mars 2018

En présence de monsieur le juge Fothergill

ENTRE :

BALRAJ DHESI

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  Balraj Dhesi demande le contrôle judiciaire d’une décision rendue par le directeur général intérimaire de la Sûreté de l’aviation au nom du ministre des Transports (le ministre) dans laquelle il a rejeté sa demande d’habilitation de sécurité en matière de transport. Le ministre a conclu que les antécédents de M. Dhesi, qui a proféré des menaces, méprisé l’autorité et s’est associé à un individu lié aux gangs et aux armes à feu soulevaient de graves préoccupations sur le jugement, la loyauté et la fiabilité de M. Dhesi.

[2]  Pour les motifs qui suivent, je suis d’avis que la décision appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.

II.  Résumé des faits

[3]  M. Dhesi a commencé à travailler chez Air Canada en tant que préposé d’escale à l’Aéroport international de Vancouver le 30 avril 2015. Il devait présenter une demande d’habilitation de sécurité auprès de Transports Canada comme condition d’emploi.

[4]  Le 9 juin 2016, Transports Canada a reçu un rapport de vérification des antécédents criminels (le rapport de VAC) de la Gendarmerie royale du Canada (la GRC). Le rapport de VAC faisait état de quatre incidents concernant M. Dhesi qui soulevaient des préoccupations concernant son aptitude à obtenir une habilitation de sécurité : [traduction]

  • a) Le 11 octobre 2014, le service de police de Delta a répondu à des signalements de six jeunes qui consommaient prétendument de l’alcool et de la marijuana dans un parc. Les policiers se sont présentés et ont trouvé les jeunes, dont l’un était M. Dhesi, qui buvaient de la bière; ils n’ont toutefois relevé aucune trace de drogues.

  • b) Le 6 août 2015, le service de police de Delta a mené un contrôle routier d’un véhicule dans lequel se trouvaient trois individus, dont l’un était M. Dhesi. L’un des autres occupants du véhicule avait des antécédents considérables d’affiliation à un gang, de trafic d’armes à feu et de contrôles de routine. L’interaction survenue ce jour-là n’avait toutefois rien de douteux.

  • c) En août 2015, une recherche menée auprès de sources ouvertes a indiqué que M. Dhesi était « ami » sur Facebook avec l’individu affilié à des gangs et ayant participé au trafic d’armes à feu.

  • d) Le 16 octobre 2015, le service de police de Vancouver a aidé des employés de la Pacific National Exhibition (PNE) à expulser des lieux M. Dhesi, qui était en état d’ébriété. M. Dhesi a utilisé un langage menaçant; en particulier, il a dit : [traduction] « Savez-vous qui je suis? » et « Savez-vous ce qui vous attend? »

[5]  Le 14 juillet 2016, le ministre a envoyé une lettre à M. Dhesi afin de l’informer des renseignements indiqués dans le rapport de VAC et des préoccupations concernant son aptitude à obtenir une habilitation de sécurité. M. Dhesi a eu l’occasion de présenter des renseignements supplémentaires sur les incidents, ainsi que tout autre renseignement ou explication qu’il jugeait pertinent.

[6]  M. Dhesi a répondu à la lettre de Transports Canada le 28 juillet 2016. Il a indiqué qu’il regrettait les erreurs qu’il avait commises et qu’il s’en excusait. En ce qui concerne l’incident du 11 octobre 2014, il a indiqué qu’il était le [traduction] « chauffeur désigné » des jeunes qui buvaient; il comprenait toutefois qu’il est illégal de consommer de l’alcool dans des parcs publics. En ce qui concerne l’incident du 6 août 2015, il a indiqué que l’individu affilié aux gangs et impliqué dans le trafic d’armes à feu était [traduction] « l’ami d’un ami », avec qui il n’avait pas une relation étroite. Il a indiqué que l’individu l’avait invité à être son [traduction« ami » sur Facebook et il a accepté sans rien savoir sur ses antécédents criminels. En ce qui concerne l’incident du 16 octobre 2015, M. Dhesi a indiqué qu’il avait consommé de l’alcool alors qu’il prenait aussi des médicaments, que les mots menaçants qu’il avait utilisés ne voulaient rien dire et qu’il était humilié par son comportement et disposé à présenter des excuses au personnel de la PNE.

[7]  M. Dhesi a aussi indiqué qu’il avait appris de ses erreurs, qu’il avait une éthique de travail solide et d’excellents antécédents d’assiduité et qu’il avait réussi tous les tests de dépistage de drogue administrés par Air Canada. M. Dhesi a fait l’éloge de ses [traduction« valeurs familiales » et a mis l’accent sur son bénévolat dans un camp de soccer pour jeunes. Il s’est dit prêt à présenter des références morales, même si aucune n’a été incluse dans sa réponse.

[8]  Le 9 novembre 2016, l’Organisme consultatif du Programme d’habilitation de sécurité en matière de transport (l’Organisme consultatif), a recommandé de rejeter la demande d’habilitation de sécurité présentée par M. Dhesi en raison d’une croyance raisonnable, fondée sur la prépondérance des probabilités, qu’il pouvait être sujet ou pouvait être incité à commettre un acte d’intervention illicite pour l’aviation civile ou à aider ou à inciter toute autre personne à commettre un acte d’intervention illicite pour l’aviation civile. L’Organisme consultatif a conclu que les observations écrites présentées par M. Dhesi ne suffisaient pas à dissiper les préoccupations.

[9]  Selon le compte rendu de la discussion, l’Organisme consultatif reconnaissait qu’une amitié sur Facebook n’indiquait pas nécessairement une association étroite entre M. Dhesi et l’individu affilié aux gangs et participant au trafic d’armes à feu; elle indiquait toutefois qu’il ne s’agissait pas simplement de [traduction] « l’ami d’un ami », comme M. Dhesi l’avait sous-entendu au départ. L’Organisme consultatif a précisé que les aéroports peuvent devenir vulnérables si ceux qui détiennent des habilitations de sécurité ont des liens avec des individus qui mènent une activité criminelle grave. L’Organisme consultatif a fait remarquer que, si M. Dhesi avait véritablement regretté d’avoir agi de la sorte à la PNE, il aurait déjà présenté ses excuses au personnel plutôt que de simplement offrir de le faire. L’Organisme consultatif a reconnu que M. Dhesi n’avait pas de casier judiciaire. Toutefois, étant donné que l’incident le plus récent était survenu moins de six mois avant que M. Dhesi présente sa demande d’habilitation de sécurité, l’Organisme consultatif s’est demandé s’il avait eu suffisamment de temps pour montrer que son comportement et que ses relations avaient changé.

III.  Décision faisant l’objet du contrôle

[10]  Le 25 mai 2017, le ministre a rejeté la demande d’habilitation de sécurité de M. Dhesi pour les motifs qui suivent :

[traduction]
[...] Les renseignements sur la participation du demandeur à une activité criminelle liée à la profération de menaces, un mépris de l’autorité et un lien avec un individu qui participe à des activités criminelles liées aux gangs et aux armes à feu ont soulevé de graves préoccupations sur son jugement, sa loyauté et sa fiabilité. Je mentionne l’incident survenu en août 2015, où le demandeur était passager d’un véhicule dans lequel se trouvait aussi un individu qui avait des antécédents considérables d’affiliation à des gangs, de trafic d’armes à feu et de contrôles de routine. Même si le demandeur a indiqué dans ses observations que cet individu n’était que l’ami d’un ami, les tribunaux ont conclu que le ministre a le droit de privilégier la sécurité du public et que l’accès à une zone réglementée est un privilège, et non un droit. Je précise que cet incident est survenu très récemment, soit quatre (4) mois après que le demandeur a signé la présente demande d’habilitation de sécurité en matière de transport. Je note que la sûreté aéroportuaire est compromise lorsque des détenteurs d’une habilitation de sécurité entretiennent des liens avec des personnes impliquées dans de graves activités criminelles. Je prends également note de l’incident survenu en octobre 2015, où le demandeur a menacé de façon voilée de blesser le personnel de la Pacific National Exhibition, qui m’a mené à remettre encore en doute son jugement, sa loyauté et sa fiabilité. Un examen approfondi des renseignements retrouvés au dossier m’amène raisonnablement à croire, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur peut être sujet ou être incité à commettre un acte d’intervention illicite pour l’aviation civile ou à aider ou à inciter toute autre personne à commettre un acte d’intervention illicite pour l’aviation civile. J’ai examiné la déclaration fournie par le demandeur, mais les renseignements fournis ne suffisent pas à dissiper mes inquiétudes.

En conséquence, je souscris à la recommandation de l’Organisme consultatif et je refuse d’accorder à M. Dhesi l’habilitation de sécurité en matière de transport.

IV.  Questions en litige

[11]  La présente demande de contrôle judiciaire soulève les questions suivantes :

  1. La décision du ministre était-elle raisonnable?

  2. Les motifs invoqués par le ministre étaient-ils adéquats?

  3. La décision du ministre était-elle équitable sur le plan procédural?

V.  Discussion

[12]  Une décision de refuser d’accorder une habilitation de sécurité en matière de transport est susceptible de révision par la Cour selon la norme de la décision raisonnable (Clue c Canada (Procureur général), 2011 CF 323, au paragraphe 14 [Clue]). La décision est de nature hautement discrétionnaire. La Cour n’interviendra que si la décision n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47).

[13]  Les questions de procédure sont susceptibles de révision par notre Cour selon la norme de la décision correcte (Clue, au paragraphe 14).

[14]  Au départ, M. Dhesi avait présenté des affidavits afin de compléter les renseignements dont disposait le ministre quand ce dernier a refusé d’accorder l’habilitation de sécurité. Son avocat a toutefois reconnu que les nouveaux éléments de preuve ne sont pas admissibles dans la présente demande de contrôle judiciaire (Henri c Canada (Procureur général), 2014 CF 1141, au paragraphe 21; Christie c Canada (Transport), 2015 CF 210, au paragraphe 20 [Christie]).

A.  La décision du ministre était-elle raisonnable?

[15]  M. Dhesi affirme que les éléments de preuve présentés au ministre ne suffisaient pas à soutenir la conclusion selon laquelle il pouvait être sujet ou être incité à commettre un acte d’intervention illicite pour l’aviation civile ou à aider ou à inciter toute autre personne à commettre un acte d’intervention illicite pour l’aviation civile. M. Dhesi précise qu’il n’a aucun casier judiciaire et il indique que rien dans ses antécédents personnels ou professionnels ne pourrait constituer un fondement à cette conclusion. Il conteste le fait que les incidents décrits dans le rapport de VAC soulèvent de graves préoccupations à l’égard de son jugement, de sa loyauté et de sa fiabilité.

[16]  Aux termes de la politique sur le Programme d’habilitation de sécurité en matière de transport aérien (la politique sur le PHST), la norme de preuve requise afin de soutenir la décision du ministre est celle de la croyance raisonnable, selon la prépondérance des probabilités, qu’une personne puisse être sujette ou être incitée à commettre un acte d’intervention illicite pour l’aviation civile (Christie, au paragraphe 23). Le ministre n’est pas tenu de croire, selon la prépondérance des probabilités, qu’une personne commettra effectivement un acte d’intervention illicite pour l’aviation civile. Autrement dit, la politique sur le PHST est prospective; le ministre est donc tenu de faire une prédiction (MacDonnell c Canada (Procureur général), 2013 CF 719, au paragraphe 29).

[17]  En exerçant son pouvoir discrétionnaire pour accueillir ou rejeter une demande d’habilitation de sécurité, le ministre peut prendre en considération tout facteur qu’il juge pertinent (Fontaine c Canada (Transports), 2007 CF 1160, au paragraphe 78 [Fontaine]). Transports Canada n’est pas tenu de mener une enquête ou une vérification indépendante sur un rapport de VAC et il peut se fonder sur un vaste éventail de renseignements concernant le respect des lois pour déterminer s’il doit accorder une habilitation de sécurité au demandeur ou refuser de le faire (Fontaine, aux paragraphes 75 et 81). L’absence d’un casier judiciaire ne peut pas être déterminante (Thep-Outhainthany c Canada (Procureur général), 2013 CF 59, au paragraphe 20).

[18]  Lorsqu’il se demande s’il est approprié d’accorder une habilitation de sécurité à un demandeur, le ministre peut choisir de privilégier la prudence vu la possibilité de conséquences graves (Sargeant c Canada (Procureur général), 2016 CF 893, aux paragraphes 28 et 34 [Sargeant]). Le seuil est bas; en fait, un seul cas de conduite douteuse peut suffire à justifier le refus d’accorder une habilitation de sécurité (Sargeant, au paragraphe 34). Il y a un large éventail de décisions acceptables et justifiables (Sidhu c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 34, au paragraphe 16 [Sidhu]).

[19]  Les incidents communiqués dans le rapport de VAC indiquent plus d’un cas de conduite douteuse. Les menaces proférées par M. Dhesi au personnel de la PNE [traduction] « Savez-vous qui je suis? » et « Savez-vous ce qui vous attend? » sont les plus troublantes. On ne peut attribuer son choix de mots aux radotages insignifiants d’un homme en état d’ébriété. Ces mots impliquaient clairement une menace, rendue encore plus inquiétante par l’association passée de M. Dhesi, aussi ténue soit-elle, avec un individu affilié aux gangs et participant au trafic d’armes à feu. Le fait que l’incident soit survenu après que M. Dhesi a commencé son emploi à Air Canada et après avoir présenté une demande d’habilitation de sécurité le rend encore plus grave. Je suis donc convaincu que le ministre avait un motif raisonnable d’être préoccupé par le jugement, la loyauté et la fiabilité de M. Dhesi.

B.  Les motifs invoqués par le ministre étaient-ils suffisants?

[20]  M. Dhesi se plaint que le ministre n’a pas indiqué s’il croyait que M. Dhesi était personnellement sujet à commettre un acte d’intervention illicite pour l’aviation civile ou s’il pouvait être incité par d’autres à le faire. Il affirme, en citant la décision rendue par le juge Henry Brown dans Britz c Canada (Procureur général), 2016 CF 1286 [Britz], qu’un demandeur peut être sujet ou être incité, ou peut être sujet et être incité (au paragraphe 40) et que l’emploi de la conjonction « ou » par le ministre constituait une conclusion équivoque qui rendait la décision inintelligible.

[21]  On trouve les mots « sujet ou incité » dans la politique sur le PHST. Dans Ng c Canada (Procureur général), 2017 CF 376, le juge Peter Annis a conclu que l’analyse que l’on trouve dans Britz n’est pas valable en droit parce qu’elle « impose au ministre une structure de raisonnement analytique fondée sur la Politique allant à l’encontre de la jurisprudence qui commande d’accorder une très grande déférence envers tous les aspects du vaste pouvoir décisionnel discrétionnaire du ministre [...] » (au paragraphe 32). Je souscris à l’opinion du juge Annis selon laquelle la prépondérance de la jurisprudence de la Cour confirme qu’il est loisible au ministre de conclure qu’un demandeur peut être sujet ou incité à commettre un acte d’intervention illicite pour l’aviation civile et qu’il n’est pas nécessaire que le ministre précise laquelle de ces deux considérations sous-tend la décision (voir, par exemple, Sargeant, au paragraphe 34; Sylvester c Canada (Procureur général), 2013 CF 904, au paragraphe 19; Varadi c Canada (Procureur général), 2017 CF 155, au paragraphe 38).

[22]  M. Dhesi conteste aussi la déclaration vague du ministre qui suit : [traduction] « [j]’ai examiné la déclaration fournie par le demandeur au sujet de ses liens récents; cependant, les renseignements présentés n’ont pas suffi à atténuer mes préoccupations ». M. Dhesi se fonde sur la décision rendue par le juge Sean Harrington dans Ho c Canada (Procureur général), 2013 CF 865 [Ho], au paragraphe 28, afin de proposer qu’une simple affirmation que les explications du demandeur ne renferment pas suffisamment de renseignements est insuffisante et opaque. Il affirme que le ministre ne semble pas avoir examiné entièrement les explications qu’il a offertes dans sa lettre du 28 juillet 2016. En outre, rien n’indique dans le compte rendu de la discussion que l’Organisme consultatif avait pris en considération sa solide éthique de travail, ses excellents antécédents d’assiduité, le résultat des tests de dépistage de drogue administrés par Air Canada, le fait qu’il était le [traduction] « chauffeur désigné » pour le groupe de jeunes qui consommaient de l’alcool dans un parc public le 11 octobre 2014 ou qu’il prenait des médicaments quand il a proféré les menaces en état d’ébriété le 16 octobre 2015.

[23]  Dans Ho, le demandeur avait présenté une explication très détaillée qui répondait aux préoccupations relevées précisément par le ministre. Je ne suis pas convaincu que les explications présentées par M. Dhesi atteignent le même niveau. Je précise que Ho a souvent fait l’objet d’une distinction dans les décisions subséquentes de la Cour pour des motifs semblables (voir, par exemple, Doan c Canada (Procureur général), 2016 CF 138, au paragraphe 27; Wu c Canada (Procureur général), 2016 CF 722, au paragraphe 65; Bonnick c Canada (Procureur général), 2016 CF 1187, aux paragraphes 28 à 31).

[24]  Qui plus est, un décideur n’est pas tenu de mentionner chacun des éléments de preuve présentés par un demandeur (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, au paragraphe 16). Les décideurs sont plutôt présumés avoir examiné tous les éléments de preuve dont ils sont saisis (Quan c Canada (Procureur général), 2016 CF 1181, au paragraphe 27). Selon le compte rendu de la discussion, l’Organisme consultatif a effectivement tenu compte des observations écrites de M. Dhesi, y compris son affirmation selon laquelle l’individu lié aux gangs et au trafic de drogues est [traduction] « l’ami d’un ami », sans plus (une affirmation douteuse), le fait de savoir s’il avait appris de ses erreurs (il était trop tôt pour le dire) et son offre visant à présenter ses excuses au personnel de la PNE (ce qu’il n’a pas fait). M. Dhesi demande essentiellement à la Cour de soupeser de nouveau les éléments de preuve, mais cela n’est pas le but d’un contrôle judiciaire (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 61).

C.  La décision du ministre était-elle équitable sur le plan procédural?

[25]  M. Dhesi affirme qu’il ignorait que le ministre pouvait être préoccupé par son jugement, sa loyauté et sa fiabilité. Le ministre ne l’a pas indiqué de façon explicite dans la lettre du 14 juillet 2016 et ces termes précis ne sont pas indiqués dans la politique sur le PHST. Il soutient donc qu’il n’a pas été informé de la preuve à réfuter ou qu’il n’a pas eu une possibilité raisonnable d’y répondre.

[26]  Selon moi, le jugement, la loyauté et la fiabilité d’une personne sont inévitablement impliqués dans l’examen visant à déterminer s’il est approprié pour cette personne d’avoir une habilitation de sécurité. Il ne peut y avoir de question grave quant au fait que le ministre a le droit de tenir compte de ces facteurs (Mangat c Canada (Procureur général), 2016 CF 907, au paragraphe 30; Sargeant, au paragraphe 29; Sidhu, au paragraphe 19).

[27]  Le ministre n’est pas obligé d’informer un demandeur de chaque motif particulier sur lequel il peut fonder son refus de lui accorder une habilitation de sécurité (Sattar c Canada (Transports), 2016 CF 469, aux paragraphes 22, 24 et 31). Il incombe au demandeur d’aborder suffisamment chacune des préoccupations (Sargeant, au paragraphe 32). Ni l’Organisme consultatif ni le directeur général n’étaient tenus d’offrir à M. Dhesi une deuxième possibilité de répondre (Salmon c Canada (Procureur général), 2014 CF 1098, au paragraphe 60).

[28]  Je conclus donc que M. Dhesi a reçu un avis suffisant de la preuve à réfuter et qu’il s’est vu offrir une possibilité raisonnable d’y répondre. La décision du ministre était équitable sur le plan procédural.

VI.  Conclusion

[29]   M. Dhesi est un jeune homme de 22 ans. On pourrait dire que les incidents qui ont donné lieu au refus de lui accorder une habilitation de sécurité, surtout lorsqu’on les examine isolément, n’étaient pas exceptionnellement graves; pourtant, les conséquences pour son emploi sont très graves. Il affirme qu’il espérait avoir une carrière à long terme chez Air Canada. Il est possible que ces écarts de jugement ne correspondent pas à son tempérament et que M. Dhesi ait réellement appris de ses erreurs.

[30]  C’est toutefois au ministre que l’on confie la lourde responsabilité de garantir la sûreté et la sécurité des voyageurs. Lorsqu’il se demande s’il est approprié d’accorder une habilitation de sécurité à un demandeur, le ministre peut choisir de privilégier la prudence. Je conclus que les incidents indiqués dans le rapport de VAC, dont le dernier est survenu après que M. Dhesi a commencé son emploi à Air Canada et présenté une demande d’habilitation de sécurité, font en sorte que la décision du ministre appartient aux issues possibles acceptables.

[31]  La demande de contrôle judiciaire est par conséquent rejetée, avec dépens.


JUGEMENT

LA COUR rejette la demande de contrôle judiciaire, le tout avec dépens.

« Simon Fothergill »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 29e jour d’octobre 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

T-942-17

 

INTITULÉ :

BALRAJ DHESI c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L’AUDIENCE :

VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 5 mars 2018

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE FOTHERGILL

DATE DES MOTIFS :

Le 9 mars 2018

COMPARUTIONS :

Gurleen Randhawa

POUR LE DEMANDEUR

Malcolm Palmer

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Panorama Legal LLP

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

Pour le défendeur

 

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