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Date : 20180926


Dossier : IMM-4810-17

Référence : 2018 CF 950

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 26 septembre 2018

En présence de madame la juge McDonald

ENTRE :

BALJINDER KAUR KHAIRA

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  Mme Khaira est une citoyenne de l’Inde âgée de 62 ans qui demande le contrôle judiciaire de la décision de réexamen du 27 octobre 2017, qui a confirmé le rejet de sa demande de résidence permanente pour des motifs d’ordre humanitaire. Bien que la situation de Mme Khaira puisse susciter de la compassion, les éléments de preuve n’étaient pas suffisants pour appuyer sa demande de réparation. La décision de réexamen est raisonnable et l’agent a bien tenu compte de l’intérêt supérieur de l’enfant. La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée pour les motifs qui suivent.

Question préliminaire

[2]  Dans sa demande d’autorisation et de contrôle judiciaire, Mme Khaira a sollicité un contrôle judiciaire de la décision de réexamen du 27 octobre 2017.

[3]  Bien que l’ordonnance de la Cour visant à accueillir la demande d’autorisation fasse référence à [traduction] « la décision d’un agent d’immigration principal de Citoyenneté et Immigration Canada datée du 17 octobre 2017 », la mention de la date du 17 octobre 2017 est une erreur, car la décision pour laquelle l’autorisation a été demandée est la décision de réexamen du 27 octobre 2017.

[4]  Par conséquent, le présent jugement vise la demande de réexamen du 27 octobre 2017.

Énoncé des faits

[5]  Mme Khaira est âgée de 62 ans et habite avec son fils, la femme de son fils et leur fille. Mme Khaira détient un visa pour séjours multiples, qui est valide jusqu’en mars 2020. Elle est venue au Canada pour vivre avec son fils après la mort de son mari en Inde. Elle affirme dépendre entièrement de lui en raison de son âge.

Décision fondée sur des motifs d’ordre humanitaire

[6]  À l’appui de sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, Mme Khaira soutient qu’elle est veuve et qu’elle vivait seule en Inde après la mort de son mari. Mme Khaira affirme qu’elle n’a pas de famille en Inde qui peut subvenir à ses besoins et que sa seule famille est son fils, de qui elle dépend entièrement. Elle soutient qu’elle ne peut prendre soin d’elle-même et qu’elle a besoin d’assistance dans le cadre de ses activités quotidiennes en raison de son âge avancé. Elle affirme également entretenir des liens étroits avec sa petite-fille et que leur séparation pourrait entraîner des difficultés émotionnelles et psychologiques.

[7]  Mme Khaira dit qu’elle n’a nulle part où vivre en Inde et qu’elle ne peut subvenir elle-même à ses besoins. Elle soutient qu’elle ne peut vivre avec ses frères et sœurs en Inde, car ils sont tous âgés et ont besoin d’assistance.

[8]  L’agent responsable de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire a tenu compte de ses arguments et des éléments de preuve à l’appui. En ce qui concerne son allégation selon laquelle elle a besoin d’assistance en raison de son état de santé, l’agent a noté que les éléments de preuve médicale ne suffisaient pas à corroborer cette allégation. En outre, l’agent a constaté que les éléments de preuve étaient insuffisants pour conclure que la demanderesse est incapable de subvenir à ses besoins en Inde ou qu’elle ne recevra pas les soins médicaux nécessaires en Inde.

[9]  Même si l’agent a reconnu que son fils et sa belle-fille l’aidaient et qu’elle pourrait éprouver certaines difficultés à son retour en Inde, aucun élément de preuve ne permettait de confirmer qu’ils cesseraient de subvenir à ses besoins si elle retournait en Inde.

[10]  L’agent a noté que Mme Khaira détenait un visa pour séjours multiples valide jusqu’au 17 mars 2020 et qu’elle et sa famille pourraient être réunies définitivement grâce au processus habituel de parrainage familial. L’agent a également noté que la situation de la demanderesse, à savoir qu’elle est une ressortissante étrangère âgée dont les enfants vivent au Canada, est similaire à celle de nombreuses autres personnes, et que la séparation entraînée par le processus habituel de demande de résidence permanente de l’extérieur du Canada n’est pas assez exceptionnelle pour justifier une dispense pour motifs d’ordre humanitaire.

[11]  L’agent a ajouté que, bien qu’il puisse y avoir une période d’adaptation, Mme Khaira a de la famille en Inde qui pourrait lui offrir du soutien si elle devait y retourner. L’agent a noté que Mme Khaira a vécu à la même adresse en Inde depuis 1977 avant de déménager au Canada. Par conséquent, elle devrait toujours bien connaître la culture et la langue.

[12]  En ce qui a trait à l’intérêt supérieur de l’enfant, l’agent a affirmé qu’il n’était pas nécessairement déterminant, bien qu’il constitue un important facteur à prendre en considération. Mme Khaira a affirmé qu’elle était proche de sa petite-fille et qu’elles seraient exposées à des difficultés si elles étaient séparées. L’agent a admis qu’elle jouait un rôle positif dans la vie de sa petite-fille. Cependant, l’agent a conclu que l’intérêt supérieur de l’enfant pouvait être satisfait par ses parents au Canada et que le contact avec Mme Khaira pouvait être conservé grâce aux moyens de communication modernes si elle devait retourner en Inde.

[13]  L’agent a reconnu la possibilité que Mme Khaira éprouve des difficultés en quittant le Canada ainsi que son souhait de demeurer au Canada, mais cela ne constitue pas un motif suffisant pour accorder une dispense pour motifs d’ordre humanitaire. Comme l’a précisé l’agent, se séparer de ses amis et de sa famille est inévitable, mais cela ne constitue pas un motif suffisant pour justifier une intervention pour motifs d’ordre humanitaire en dehors du régime d’immigration habituel.

Décision concernant le réexamen de l’affaire

[14]  Après avoir rendu la décision relative aux considérations d’ordre humanitaire, l’agent a reçu une demande de réexamen datée du 24 octobre 2017. L’agent a examiné les arguments et a noté qu’aucun nouveau document n’avait été fourni et que les arguments en faveur du réexamen étaient les mêmes que les arguments initiaux. Pour ces motifs, l’agent a donc maintenu le rejet de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire relative au réexamen.

Questions en litige

[15]  Mme Khaira a soulevé diverses questions, qui peuvent être abordées comme suit :

La décision de réexamen est-elle raisonnable?

L’intérêt supérieur de l’enfant a-t-il été pris en compte de façon raisonnable?

Norme de contrôle

[16]  La norme de contrôle à appliquer pour l’examen d’une décision de réexamen est celle de la décision raisonnable (Kaur c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 674, au paragraphe 32).

[17]  Lors d’un examen selon la norme de la raisonnabilité, la Cour détermine si la décision est justifiée, transparente et intelligible, et si elle appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47).

Discussion

La décision de réexamen est-elle raisonnable?

[18]  Mme Khaira soutient que l’agent n’a pas tenu compte de sa situation de veuve âgée et qu’il n’a pas pleinement saisi les difficultés qu’elle rencontrerait à son retour en Inde. Elle affirme qu’elle dépend entièrement de son fils et qu’elle ne sera pas capable de s’en sortir toute seule en Inde. Elle soutient également que l’agent aurait dû la convoquer en entrevue pour mieux comprendre sa situation.

[19]  En ce qui concerne la demande de réexamen, Mme Khaira s’est appuyée sur les mêmes arguments et éléments de preuve qu’elle a présentés à l’appui de sa demande initiale pour motifs d’ordre humanitaire. Dans le rejet de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, l’agent a conclu que les éléments de preuve étaient insuffisants pour appuyer les allégations de la demanderesse à l’égard de sa santé et de son besoin d’assistance. L’agent a également conclu que son fils continuerait à subvenir à ses besoins même si elle retournait en Inde. Enfin, l’agent a noté qu’aucun élément de preuve n’indiquait que sa famille en Inde ne lui offrirait aucun soutien.

[20]  Dans le cas d’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, il incombe au demandeur ou à la demanderesse de fournir tous les éléments de preuve pertinents pour étayer les allégations. De plus, l’agent n’est aucunement tenu de mener une entrevue (Owusu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 38, au paragraphe 8). La seule question en litige est de savoir si la décision de réexamen est raisonnable. Même s’il s’agissait d’un réexamen de sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, le fardeau de la preuve reposait toujours sur Mme Khaira; c’est-à-dire qu’elle devait fournir des éléments de preuve à l’appui de sa demande.

[21]  L’agent s’attendait raisonnablement à ce que des éléments de preuve médicale ou financière soient présentés à l’appui des affirmations formulées par Mme Khaira. Dans ce cas-ci, elle ne s’est tout simplement pas acquittée de son fardeau d’établir qu’elle avait le droit de bénéficier d’une dispense pour motifs d’ordre humanitaire. Étant donné qu’aucun élément de preuve n’a été présenté pour le réexamen, il était raisonnable que sa demande de dispense soit rejetée pour les mêmes motifs que la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire.

[22]  Mme Khaira n’a pas été en mesure d’identifier un élément de preuve ou un argument qui n’a pas été pris en compte de manière adéquate par l’agent dans le cadre du réexamen. Par conséquent, rien ne justifie l’intervention de la Cour.

Intérêt supérieur de l’enfant

[23]  Mme Khaira soutient que, en application de Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, au paragraphe 75, l’agent devait être « réceptif, attentif et sensible » à l’intérêt supérieur de sa petite-fille.

[24]  Bien que l’agent ait convenu que Mme Khaira jouait un rôle dans la vie de sa petite-fille et qu’elle avait une influence positive, il a noté qu’aucun détail n’avait été fourni sur leur relation. L’agent a conclu que l’intérêt supérieur de la petite-fille serait satisfait si elle demeurait avec ses parents au Canada,

[25]  À défaut d’autres éléments de preuve, la Cour a conclu que le fait qu’une enfant soit séparée d’un membre de la famille éloignée, comme une grand-mère, n’était pas suffisant pour accorder une dispense pour motifs d’ordre humanitaire. Une telle difficulté est propre aux situations où les membres d’une même famille habitent dans deux pays (Tran c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 210, au paragraphe 11).

[26]  Ici, l’analyse et la conclusion relatives à l’intérêt supérieur de l’enfant sont raisonnables.

Conclusion

Mme Khaira n’a fait ressortir aucune erreur susceptible de révision dans cette décision de réexamen. En conséquence, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-4810-17

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

1.  La demande de contrôle judiciaire de la décision de réexamen du 27 octobre 2017 est rejetée.

2.  Aucune question sérieuse n’est certifiée.

« Ann Marie McDonald »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-4810-17

INTITULÉ :

BALJINDER KAUR KHAIRA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 28 août 2018

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE MCDONALD

DATE DES MOTIFS :

Le 26 SEPTEMBRE 2018

COMPARUTIONS :

Baljinder Kaur Khaira

Pour la demanderesse

Nicholas Dodokin

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour son propre compte

Scarborough (Ontario)

Pour la demanderesse

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

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