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Date : 20181025


Dossier : IMM-1337-18

Référence : 2018 CF 1077

Ottawa (Ontario), le 25 octobre 2018

En présence de monsieur le juge LeBlanc

ENTRE :

MOLEY JWENTZ LOUISSAINT

JACCIN LOUISSAINT

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  Les demandeurs, un père (Jaccin Louissaint) et son fils de 11 ans (Moley Jwentz Louissaint), tous deux originaires de Haïti, contestent la décision d’un agent de visa [l’Agent] qui, le 7 mars 2018, rejetait la demande de visa de résidence permanente parrainée par le père au bénéfice du fils. Moley Jwentz souhaitait ainsi immigrer au Canada dans la catégorie du regroupement familial.

[2]  L’Agent a conclu que l’enfant était exclu de cette catégorie puisque contrairement à ce qu’exige l’alinéa 117(9)(d) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [le Règlement], le père a omis de le déclarer lors du traitement de sa propre demande de résidence permanente quelques années plus tôt. L’Agent a aussi conclu que les demandeurs n’avaient pas droit à une exemption aux termes de l’article 25 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la Loi], puisqu’ils avaient fait défaut d’établir l’existence de motifs d’ordre humanitaire suffisants, y compris ceux en lien avec le meilleur intérêt de l’enfant, pour faire droit à la demande de résidence permanente de Moley Jwentz malgré l’exclusion de celui-ci de la catégorie du regroupement familial.

[3]  Le paragraphe 25(1) de la Loi, il est utile de le rappeler, confère au ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration un pouvoir discrétionnaire qui lui permet de dispenser un étranger du respect des exigences habituelles de la Loi lorsqu’il estime que des considérations d’ordre humanitaire, lesquelles englobent l’intérêt supérieur de l’enfant, le justifient (Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61 au para 10 [Kanthasamy]).

[4]  Les demandeurs, qui ne remettent pas en cause la conclusion relative à l’exclusion de Moley Jwentz de la catégorie du regroupement familial pour les motifs énoncés par l’Agent, soutiennent néanmoins que la décision de celui-ci quant à l’absence de motifs d’ordre humanitaire suffisants pour justifier une exemption doit être annulée. Ils reprochent à l’Agent d’avoir omis ou négligé de prendre en compte des éléments de preuve qui contredisent ses conclusions à cet égard. Ils lui reprochent notamment de ne pas avoir appliqué le bon critère juridique dans son examen du facteur du meilleur intérêt de l’enfant.

[5]  La situation des demandeurs est quelque peu singulière. Le père, Jaccin, se marie en 1986 à celle qui est toujours son épouse aujourd’hui, Mariette Voltaire. De cette union sont issus trois garçons, Ariel, Kelly et Gaslin, nés respectivement en 1987, 1989 et 1992. Ils sont tous adultes aujourd’hui. Moley Jwentz, lui, vient au monde le 27 février 2007. Il est issu toutefois d’une liaison extra-conjugale. Malgré tout, les demandeurs soutiennent que Moley Jwentz, bien qu’il ait toujours résidé avec sa mère biologique, a été élevé comme s’il était un membre à part entière de la famille. Moley Jwentz dit d’ailleurs considérer Mariette comme sa deuxième mère et ses demi-frères, comme ses frères.

[6]  Suite au terrible tremblement de terre qui anéantit une partie du pays en janvier 2010, y compris leur résidence, Jaccin, Mariette et leurs trois enfants quittent Haïti pour le Canada aux termes d’une demande de réunification familiale produite par la sœur de Jaccin, laquelle vit au Canada. Cette demande est faite dans le cadre de l’élargissement du programme canadien de réunification familiale aux personnes sérieusement touchées par ce séisme. Jaccin, Mariette et les trois enfants arrivent au Canada le 29 février 2012 mais Moley Jwentz, lui, reste derrière, en Haïti, en compagnie de sa mère biologique puisque celle-ci, l’estimant encore trop jeune, ne veut pas s’en séparer. Elle refuse donc de donner son consentement à ce qu’il prenne la route du Canada en compagnie de son père, comme le souhaite alors ce dernier.

[7]  C’est pour cette raison, soutient Jaccin, que Moley Jwentz ne sera pas inclus dans la demande de réunification familiale présentée par la sœur de Jaccin, ce qui entrainera son exclusion de la catégorie du regroupement familial lorsque lui et Moley Jwentz, présenteront, en 2017, après avoir reçu l’aval de la mère de Moley Jwentz, la demande de résidence permanente à l’origine de la présente affaire.

II.  Discussion

[8]  Il est bien établi que la décision de refuser une dispense aux termes de l’article 25 de la Loi doit être examinée, lorsqu’on en conteste la validité par la voie d’un contrôle judiciaire, en fonction de la norme de la raisonnabilité (Kanthasamy au para 44). Il est maintenant bien établi aussi qu’en pareil cas, la Cour s’attarde « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 au para 47, [2008] 1 RCS 190). Ainsi, cette norme appelle à une « grande retenue judiciaire » (Garcia Rodriguez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 437 aux para 9-10), le rôle de la Cour étant non pas de réévaluer les éléments de preuve qui étaient devant le décideur et de substituer sa propre appréciation de la preuve à celle du décideur, mais de s’assurer que tous ces éléments ont été considérés (Montesuma c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 918 aux para 33, 38).

[9]  Le défendeur, qui estime que l’Agent s’est bien dirigé en droit, qu’il a considéré l’ensemble de la preuve soumise par les demandeurs et que sa décision est raisonnable, soulève deux moyens préliminaires. Le premier a trait à la qualité pour agir de Jaccin, qui n’a fait que parrainer la demande de visa de résidence permanente de Moley Jwentz. Le défendeur rappelle qu’en pareil cas, suivant la jurisprudence de la Cour, celui ou celle qui parraine une demande de résidence permanente n’est pas directement touché par une décision négative et n’a donc pas qualité pour agir en contrôle judiciaire. Il demande en conséquence à ce que son nom soit rayé de l’intitulé de la cause.

[10]  La procureure des demandeurs rappelle pour sa part que Moley Jwentz est mineur et vit à l’étranger et que la désignation de son père, à titre de codemandeur, se justifie dans les circonstances. Je suis d’accord avec elle. Les règles de notre Cour prévoient la nomination de représentants pour la représentation de personnes n’ayant pas la capacité d’ester en justice (règle 115 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106). Même s’il n’est pas précisé dans la demande de contrôle judiciaire que Jaccin comparait à ce titre en l’instance, une certaine souplesse s’impose dans les circonstances. Je permettrai donc qu’il demeure nommé comme partie au présent litige.

[11]  Le second moyen préliminaire a trait aux six affidavits produits par les demandeurs au soutien de la présente demande de contrôle judiciaire, soit ceux des demandeurs, de la mère de Moley Jwentz, de Mariette et des trois enfants de Jaccin et Mariette. Le défendeur soutient que les demandeurs ont tenté, ce faisant, de bonifier leur preuve, ce qui ne leur était pas permis, ledit contrôle judiciaire devant se décider en fonction de la seule preuve qui était devant l’Agent. Il soutient plus particulièrement que ces affidavits vont plus loin que les lettres signées par les affiants en appui à la demande de résidence permanente de Moley Jwentz, notamment quant à la relation que Jaccin, Mariette et leurs trois enfants auraient entretenue avec Moley Jwentz depuis sa naissance.

[12]  Le défendeur a raison de mentionner que, sauf exception, qui ne sont pas applicables ici, ce type de bonification n’est pas permis (Association des universités et collèges du Canada c Canadian Copyright Licensing Agency (Access Copyright), 2012 CAF 22 au para 20). Toutefois, le défendeur ne va pas aussi loin que de demander la radiation de ces affidavits. Il invite plutôt la Cour à faire preuve de prudence et à limiter son analyse à la preuve qui se trouvait devant l’Agent. C’est ce que la Cour va faire. À l’audience, la procureure des demandeurs a d’ailleurs été invitée à n’invoquer au soutien de ses prétentions que la preuve qui était devant l’Agent, ce qu’elle s’est employée à faire.

[13]  Maintenant, la décision de l’Agent, dans la mesure où elle rejette la demande de dispense formulée en vertu de l’article 25 de la Loi, est-elle déraisonnable, comme le prétendent les demandeurs?

[14]  Je rappelle que l’Agent a jugé que, sauf sur le plan financier, la preuve de l’importance des liens unissant Moley Jwentz à son père, Mariette et ses trois demi-frères lui paraissait insuffisante pour justifier une dispense du respect des exigences habituelles de la Loi, en l’occurrence de l’alinéa 117(9)(d) du Règlement. En particulier, constatant que Moley Jwentz avait toujours vécu avec sa mère biologique, l’Agent a déterminé que la preuve n’étayait pas la prétention voulant que Jaccin et sa famille aient entretenu un lien étroit avec Moley Jwentz depuis la naissance de ce dernier et que Jaccin ait été en constante communication avec lui depuis son départ d’Haïti.

[15]  Quant au facteur du meilleur intérêt de l’enfant, l’Agent a noté que Jaccin souhaitait prendre charge de Moley Jwentz de façon à lui assurer une bonne éducation et un meilleur avenir et à le soustraire ainsi aux risques auxquels il est exposé à Haïti en raison des problèmes endémiques qui sévissent dans ce pays. Réitérant que Moley Jwentz n’avait jamais vraiment résidé avec son père et sa famille depuis sa naissance et que les liens qui l’unissent à son père, Mariette et ses demi-frères sont plutôt faibles, et constatant que Moley Jwentz avait toujours vécu avec sa mère biologique, qu’il avait accès à l’éducation dans son pays d’origine et qu’il n’était affligé d’aucune condition ne pouvant y être traitée, l’Agent a conclu qu’il était dans le meilleur intérêt de Moley Jwentz qu’il demeure à Haïti aux bons soins de sa mère biologique plutôt que d’aller vivre au Canada avec un père avec qui il n’avait jamais vécu auparavant. Reconnaissant que le Canada offrait à Moley Jwentz de meilleures perspectives d’avenir, l’Agent a rappelé que ce seul facteur ne constituait pas une difficulté inhabituelle.

[16]  Comme l’Agent l’a noté, la demande de dispense formulée en l’espèce repose principalement, sinon exclusivement, sur la prétention qu’il est dans l’intérêt supérieur de Moley Jwentz de quitter Haïti pour venir rejoindre son père au Canada.

[17]  Dans toutes les affaires où il est en cause, le facteur lié à l’intérêt supérieur de l’enfant, bien qu’il ne soit pas déterminant, doit se voir accorder un poids considérable (Motrichko c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 516 au para 21 [Motrichko]). Lorsque, comme ici, la loi exige expressément sa prise en compte, il « représente une considération singulièrement importante dans l’analyse » (Kanthasamy au para 40). Ainsi, lors de cette analyse, l’intérêt supérieur de l’enfant « doit être “bien identifié et défini”, puis examiné “avec beaucoup d’attention” eu égard à l’ensemble de la preuve » (Kanthasamy au para 39). Cet exercice dépendra fortement du contexte et sera dicté, notamment, par l’âge, les besoins et les capacités de l’enfant (Kanthasamy, aux para 34-36). En tout temps, l’agent du ministre saisi d’une demande où l’intérêt supérieur d’un enfant est invoqué doit être « réceptif, attentif et sensible à cet intérêt » (Kanthasamy au para 38). Il ne lui suffit d’ailleurs pas de dire qu’il a fait preuve de cette attention et de cette sensibilité ; sa décision doit le refléter (Kanthasamy au para 39).

[18]  Enfin, lorsque l’enfant lui-même est l’auteur de la demande sous examen, la notion de « difficultés inhabituelles et injustifiées » ne saurait s’appliquer aux difficultés qu’il allègue puisque, comme la Cour suprême du Canada l’a rappelé dans Kanthasamy, au para 41, les « enfants méritent rarement, sinon jamais, d’être exposées à des difficultés ».

[19]  En l’espèce, je ne saurais dire que l’Agent s’est laissé guider par un critère d’analyse erroné, comme le prétendent les demandeurs, en concluant que le fait que le Canada puisse offrir à Moley Jwentz de meilleures perspectives d’avenir que son pays natal ne constituait pas, en soi, une difficulté inhabituelle (« hardship »). À mon avis, l’emploi du mot «hardship » n’est pas déterminant lorsque la décision de l’Agent est examinée dans son ensemble. Notamment, je n’y vois aucune conclusion à l’effet que la demande de dispense doive être rejetée parce que Moley Jwentz n’a pas établi faire face à des « difficultés inhabituelles et injustifiées ».

[20]  Toutefois, et bien que je sois conscient de la retenue que commande la norme de contrôle de la raisonnabilité, l’Agent n’a pas, à mon sens, comme il se devait de le faire, bien identifié et défini, puis examiné avec soin, eu égard à l’ensemble de la preuve au dossier, l’intérêt supérieur de Moley Jwentz.

[21]  En effet, l’Agent semble avoir accordé beaucoup de poids au fait que Moley Jwentz n’aurait en aucun temps (« at any point ») cohabité avec son père, Mariette et ses demi-frères et qu’il n’aurait pas développé un lien très fort avec Mariette et ses trois demi-frères. Pourtant, la preuve qui était devant l’Agent laisse entrevoir, il me semble, un portrait plus nuancé. En effet, la lettre de la mère biologique de Moley Jwentz, produite au soutien de la demande de dispense, fait état du fait que les demi-frères de Moley Jwentz venaient le chercher « à chaque week-end » pour « aller [à] leur maison » et que Moley Jwentz a pu ainsi « avoir ses deux parents et ses frères en Haïti avec lui car il a été bien gard[é] et entour[é] jusqu’à ce que tous ont quitt[é] vers le Canada ». Elle souligne l’attachement de Jaccin pour Moley Jwentz « sans aucu[n] signe de relâche » et qualifie Jaccin de « père exemplaire et responsable ». Elle souligne aussi l’attachement de Mariette pour Moley Jwentz, dès la naissance de ce dernier, n’hésitant pas à la qualifier de seconde mère pour lui. La lettre de la voisine de la mère biologique de Moley Jwentz parle de « [l’]attachement […] inconjurable » de ce dernier pour ses frères, du fait qu’il ne peut plus vivre sans eux et son père, de sa détresse face à leur absence et des conditions misérables dans lesquelles lui et sa mère sont appelés à vivre, une « petite pièce coincée en béton qui dégage une extrême chaleur, pas d’eau, pas d’électricité ».

[22]  Tenu d’examiner avec soin l’ensemble de la preuve et d’être, ce faisant, « réceptif, attentif et sensible » à la situation de Moley Jwentz, l’Agent n’explique pas en quoi, en dépit de cette preuve concrète, il pouvait néanmoins conclure comme il l’a fait sur ces deux éléments cruciaux de sa décision. Le défaut de l’avoir fait entache, selon moi, la raisonnabilité de la décision.

[23]  Cette erreur est significative à trois égards. Premièrement, elle laisse planer le doute sur la réalité du lien entre Jaccin et Moley Jwentz et son caractère suffisamment étroit pour justifier la réunification malgré une violation du Règlement (Amponsah c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 974 au para 45). Deuxièmement, elle explique peut-être pourquoi l’Agent ne s’est pas prononcé sur les répercussions, pour Moley Jwentz, d’une non-réunification, particulièrement eu égard à l’importance de la présence du père dans la vie d’un jeune garçon, un facteur pourtant invoqué et étayé par de la preuve dans la demande de dispense. Après tout, personne ne conteste que Jaccin est bel et bien le père de Moley Jwentz et il est inconstatable qu’il est considéré comme tel par Moley Jwentz. Troisièmement, cela a permis à l’Agent de conclure qu’il était dans l’intérêt de Moley Jwentz de demeurer à Haïti avec sa mère sans ainsi devoir évaluer véritablement l’autre option qui s’offrait à l’enfant, soit celle d’aller vivre au Canada avec son père, Mariette et ses demi-frères, lesquels ont tous pu accéder à l’enseignement universitaire grâce aux efforts consentis par leur père et mère.

[24]  Il est vrai que la preuve produite au soutien de la demande de dispense sous forme d’états de compte de la compagnie de services téléphoniques cellulaires avec laquelle Jaccin faisait affaire ne permet pas de constater l’affirmation faite dans ladite demande à l’effet que depuis leur arrivée au Canada, Jaccin et ses fils gardent contact avec Moley Jwentz en lui parlant trois fois par semaine puisque l’échantillonnage d’états de compte ne couvre qu’une brève période. À l’audition du présent contrôle judiciaire, la procureure des demandeurs a indiqué que les communications téléphoniques entre Jaccin et Moley Jwentz se faisaient surtout à partir de cartes d’appel afin de limiter les coûts de ces communications. Toutefois, le dossier est muet à cet égard.

[25]  Quoi qu’il en soit, comme j’en ai déjà fait état, l’Agent se devait néanmoins d’examiner la question de l’intérêt supérieur de l’enfant à partir de l’ensemble de la preuve. En particulier, l’Agent n’explique pas en quoi cet échantillonnage limité permettait d’écarter le reste de la preuve relative au maintien d’un lien avec Moley Jwentz depuis que Jaccin et sa famille sont au Canada, soit :

  1. l’apport indéfectible et constant de Jaccin aux besoins matériels de Moley Jwentz;
  2. les deux voyages faits par Jaccin à Haïti, malgré des moyens qu’on peut raisonnablement supposer de modestes – lui est préposé sanitaire dans une entreprise d’alimentation, Mariette est préposée aux bénéficiaires dans une résidence pour personnes âgées, pour rendre visite à Moley Jwentz, dont le second a servi à convaincre la mère de Moley Jwentz de donner son aval à ce que Moley Jwentz puisse venir le rejoindre au Canada;
  3. les voyages annuels d’Ariel à Haïti où il rend visite à chaque fois à Moley Jwentz;
  4. le témoignage de Moley Jwentz sur les appels qu’il reçoit de son père et de ses demi-frères, sur le chagrin qui l’envahit lorsque ces appels se terminent et sur la désolation qui l’envahit aussi lorsque Ariel repart pour le Canada ou lorsque son père a regagné le Canada, particulièrement au terme de son deuxième voyage; et
  5. la preuve de la mère biologique sur la réaction de Moley Jwentz à chaque fois que Jaccin a regagné le Canada après lui avoir rendu visite.

[26]  L’Agent me paraît en outre avoir ainsi négligé de procéder à l’examen de l’intérêt supérieur de l’enfant du point de vue de Moley Jwentz alors qu’il se devait, encore là, de le faire (Etienne c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 937 au para 9).

[27]  En somme, bien que le pouvoir exercé par l’Agent en l’espèce soit hautement discrétionnaire, il n’a pas, selon moi, fait l’exercice rigoureux que requiert la jurisprudence lorsque le facteur de l’intérêt supérieur de l’enfant est en jeu. J’estime donc que sa décision doit être annulée et l’affaire retournée à un autre agent pour qu’une nouvelle décision soit prise.

[28]  Ni l’une ni l’autre des parties n’a proposé la certification d’une question en vue d’un appel. Je suis aussi d’avis qu’il n’y a pas ici matière à certification.


JUGEMENT dans IMM-1337-18

LA COUR STATUE que

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie;

  2. La décision de l’agent du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, datée du 7 mars 2018, rejetant la demande de visa de résidence permanente de Moley Jwentz Louissaint, parrainée par Jaccin Louissaint, est annulée et l’affaire est renvoyée pour jugement à un autre agent du ministre;

  3. Aucune question n’est certifiée.

« René LeBlanc »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1337-18

 

INTITULÉ :

MOLEY JWENTZ LOUISSAINT, JACCIN LOUISSAINT c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ, ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

MONTRÉAL (QUÉBEC)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 17 octobre 2018

 

JUGEMENT et motifs :

LE JUGE LEBLANC

 

DATE DES MOTIFS :

LE 25 octobre 2018

 

COMPARUTIONS :

Me Yasmine Guillaume

 

Pour les demandeurs

 

Me Caroline Doyon

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Yasmine Guillaume

Avocate

Montréal (Québec)

 

Pour les demandeurs

 

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Pour le défendeur

 

 

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