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Date : 20190122


Dossier : IMM‑3100‑18

Référence : 2019 CF 92

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 22 janvier 2019

En présence de monsieur le juge Barnes

ENTRE :

CHI KAN KWAN

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La Cour est saisie du contrôle judiciaire de la décision du 28 juin 2018 par laquelle un agent des visas a rejeté la demande de visa de résident permanent présentée par Chi Kan Kwan à titre de membre de la catégorie du démarrage d’entreprise. La décision de l’agent était fondée sur le fait que Mme Kwan avait présenté sa demande d’établissement  principalement dans le but d’obtenir un statut d’immigrant et non de participer à une activité commerciale autorisée.

[2]  Il est admis que la demande de Mme Kwan satisfaisait aux exigences techniques initiales pour être considérée comme une entreprise en démarrage selon le programme applicable. Entre autres, Mme Kwan a dû démontrer qu’elle avait l’intention d’exploiter une entreprise au Canada. Elle a également dû conclure une entente avec une entité désignée qui a accepté de fournir diverses formes d’aide à l’entreprise proposée. Dans le cas  de Mme Kwan, une entente a été conclue avec un incubateur d’entreprises situé à Vancouver, soit Empowered Startups Ltd. [Empowered]. Selon cette entente, la coentreprise proposée était une [traduction] « plateforme d’information à guichet unique (site Web financier) » payante mettant en lien des investisseurs chinois et des institutions offrant des produits financiers canadiens.

[3]  Lorsqu’il a initialement examiné la demande de Mme Kwan, l’agent des visas s’est dit préoccupé par le risque qu’il y ait  un conflit avec une autre entreprise soutenue par Empowered. L’agent des visas a noté que cela [traduction] « soulevait des préoccupations concernant la possibilité que [Empowered] aide les demandeurs à obtenir un statut ou un privilège au titre de la LIPR ». Cette préoccupation a amené l’agent à demander à la Canadian Association of Business Incubation (CABI) de procéder à un examen par les pairs du modèle d’entreprise proposé. Dans son rapport d’examen du 16 février 2018, la CABI a signalé des problèmes concernant la proposition et a indiqué que le modèle d’entreprise avait [traduction] « beaucoup changé depuis la soumission de la demande initiale ». Le rapport indiquait également que Mme Kwan [traduction] « s’était engagée à payer 300 000 $ pour un an de services d’incubation. Il ne s’agit pas d’une situation normale pour un incubateur au Canada. »

[4]  Le 28 février 2018, Mme Kwan a été priée de fournir une mise à jour sur l’établissement et l’exploitation de son entreprise. Une deuxième demande a été faite le 9 mars 2019. Mme Kwan a alors fourni un document de trois pages intitulé [traduction] « Mise à jour sur l’entreprise » qui décrivait un nouveau modèle d’entreprise visant un robot conversationnel qui met en lien des institutions financières et des clients potentiels. Elle a également expliqué que le modèle d’entreprise initial avait été abandonné en raison de problèmes liés à la réglementation en matière de finances.

[5]  La mise à jour de Mme Kwan a soulevé une nouvelle préoccupation concernant un [traduction] « manque de sérieux », comme le montre le passage suivant des notes au dossier de l’agent des visas :

[traduction]

Le paragraphe 2(5) des Instructions ministérielles (IM) indique que ne peut être considéré comme appartenant à la catégorie « démarrage d’entreprise » le demandeur qui compte participer, ou qui a participé, à un accord ou à une entente à l’égard de l’engagement principalement dans le but d’acquérir un statut ou un privilège au titre de la Loi et non d’exploiter l’entreprise visée par l’engagement. Selon le certificat d’engagement fourni par Empowered Startups Ltd. et daté du 1er décembre 2016, la demanderesse principale a conclu un partenariat avec Empowered Startups Ltd. dans le but de créer un robot‑conseiller pour permettre aux investisseurs chinois de rechercher des produits financiers canadiens. Cependant, le 9 mars 2018, il a été demandé à la demanderesse principale de fournir un rapport de situation concernant l’établissement et l’exploitation de son entreprise en démarrage au Canada, et il semble que son entreprise ait beaucoup changé. Elle propose maintenant de créer le site Web « Chatwithbanks.com », qui aiderait les clients à choisir différentes banques en hébergeant et en mettant au point des « robots conversationnels » sur une seule plateforme. Je constate qu’elle a obtenu le permis de travail no W302370595 le 25 février 2017 afin de pouvoir travailler au développement de son entreprise au Canada. Elle a indiqué qu’elle a jusqu’à maintenant réussi à créer le site Web initial Chatwithbanks.com et à former une équipe chargée de la conception des robots conversationnels, mais elle n’a fourni aucune preuve documentaire à l’appui de ces affirmations. D’après l’examen des documents présentés par la demanderesse principale, celle‑ci n’a pas fourni suffisamment d’éléments de preuve pour démontrer qu’elle avait accompli des progrès importants durant la dernière année. Je constate également que Empowered Startups Ltd. a accepté la candidature d’une entreprise semblable à sa proposition initiale et a investi dans celle‑ci, et que cette entreprise aurait été en concurrence directe avec la sienne. Cela est anormal pour un investisseur de capital de risque. Le manque de sérieux dont la demanderesse principale et l’entité désignée ont fait preuve lorsqu’elles ont conclu une entente concernant la proposition m’amène à conclure que la demanderesse avait d’autres intentions que celle d’exploiter une entreprise au Canada. Je crains donc que la demanderesse principale ait conclu une entente à l’égard de l’engagement dans le but d’obtenir un statut de résidente permanente au Canada et non d’exploiter l’entreprise qui était visée par l’engagement. La lettre d’équité procédurale sera envoyée par courriel. Rappel dans 30 jours. [Non souligné dans l’original]

[6]  L’agent des visas a par la suite envoyé une lettre d’équité procédurale à Mme Kwan dans laquelle il a soulevé toutes ces préoccupations et remis en doute l’authenticité de sa demande. Dans sa lettre, l’agent des visas s’est dit particulièrement préoccupé par le manque de renseignements fournis sur  l’évolution de l’entreprise durant la dernière année.

[7]  Mme Kwan a répondu à la lettre d’équité procédurale par une lettre de quatre pages à laquelle elle a joint des copies de ses communications avec les représentants d’Empowered. Dans sa réponse, elle a expliqué les raisons pour lesquelles elle avait modifié son modèle d’entreprise et a décrit les travaux qui avaient été effectués relativement à la nouvelle proposition. Elle a soutenu avoir participé activement au processus d’incubation, y consacrant [traduction] « environ » 10 heures par semaine. Mme Kwan a également expliqué que la participation d’Empowered à la conception d’un autre robot conversationnel pour une autre entreprise ne faisait pas concurrence à son concept commercial. Elle a terminé sa lettre en reprochant à l’agent des visas de remettre en question ses décisions commerciales et en menaçant d’avoir recours aux options juridiques qui s’offraient à elle en cas de décision défavorable. Il est quand même important de mentionner que, malgré la participation considérable d’Empowered au développement de l’entreprise de Mme Kwan, rien dans la réponse de cette dernière ne provenait de cette source.

[8]  Malgré les réponses de Mme Kwan, l’agent des visas a conclu que la demande était principalement motivée par un désir d’obtenir un statut d’immigrant au Canada et non de profiter d’une occasion d’affaire légitime.

[9]  L’évaluation que l’agent des visas a faite de la preuve se trouve dans le passage suivant, consigné dans les notes au dossier :

[traduction]Le 6 juin 2018, la demanderesse principale a fourni les documents suivants en réponse à ma lettre d’équité procédurale du 15 mai 2018 : lettre d’explication, courriels échangés avec Empowered, registres de WeChat, documents de constitution en personne morale, captures d’écran du site Web, accord de recherche concertée et courriels échangés entre UBC et Empowered. Je reconnais que la demanderesse principale s’est dite préoccupée par le fait que j’ai qualifié Empowered Startups Ltd. d’investisseur de capital de risque dans ma lettre d’équité procédurale. Cependant, je suis convaincu que ce terme n’a pas d’incidence sur la clarté de mes préoccupations par rapport à la demande. La demanderesse principale a été mise au courant de la preuve à produire et a eu l’occasion de présenter tous les éléments dont elle voulait que je tienne compte. Le certificat de constitution en personne morale indique que l’entreprise de la demanderesse principale a été constituée le 1er mars 2017 en Colombie‑Britannique, après son arrivée au Canada. La demanderesse principale a obtenu le permis de travail no W302370595 le 25 février 2017 afin de travailler à la création de son entreprise au Canada. Selon les journaux de clavardage fournis entre la demanderesse principale et Chang d’Empowered Startups Ltd., la demanderesse ne se trouvait plus au Canada depuis au moins le 17 mars 2017. Dans sa lettre d’explication, la demanderesse principale a indiqué à plusieurs reprises que les discussions concernant son entreprise se sont faites par courriel, par appel WeChat et par messagerie WeChat. D’après les renseignements fournis par la demanderesse principale, je ne suis pas convaincu qu’elle se trouvait au Canada pour développer son entreprise en vertu de son permis de travail. Je ne suis pas convaincu non plus qu’elle assurera une gestion active et continue de cette entreprise à partir du Canada. Dans sa lettre d’explication, elle a mentionné que les annexes A et B étaient des éléments de preuve solides qui démontrent qu’elle a entretenu des discussions et mené des activités pour développer son entreprise. Les journaux de clavardage (annexe B) laissent entendre que Chang d’Empowered Startups Ltd. développait l’entreprise de la demanderesse principale et lui faisait parvenir des mises à jour. Selon le courriel échangé entre la demanderesse principale et Chang le 2 avril 2017 (annexe A), il semble que Chang ait créé les questions de sondage. Par ailleurs, Chang a créé le site Web de l’entreprise d’après le courriel échangé avec la demanderesse principale le 21 avril 2017. Chang a continué à apporter des modifications et à développer les sites Web, et il indiquait à la demanderesse principale à quel moment faire tester les sites par ses amis. Selon le courriel du 20 février 2018, la demanderesse principale n’avait pas eu de nouvelle de Chang concernant son entreprise. La demanderesse principale n’a pas fourni suffisamment d’éléments de preuve pour me convaincre qu’elle participe activement au développement de son entreprise. De plus, je constate que l’accord de recherche concertée a été signé par UBC et Empowered (annexe F). Il ne comportait pas le nom de la demanderesse principale ni de son entreprise. De plus, tous les échanges de courriels fournis ont eu lieu  entre UBC et Empowered. J’observe que ces courriels n’ont pas été envoyés en copie conforme à la demanderesse principale (annexe G). La réponse de la demanderesse principale à ma lettre d’équité procédurale a été examinée avec soin; toutefois, elle n’éclaircissait pas toutes mes préoccupations de manière satisfaisante. Après avoir examiné attentivement tous les renseignements au dossier, je ne suis pas convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que la demanderesse principale a participé à l’entente à l’égard de l’engagement dans le but premier d’exploiter l’entreprise visée par l’engagement. Je suis plutôt convaincu que la demanderesse principale a participé à l’entente à l’égard de l’engagement dans le but d’obtenir un statut ou un privilège au titre de la Loi, en contravention du paragraphe 2(5) des IM. Par conséquent, je ne suis pas convaincu que la demanderesse principale est membre de la catégorie du démarrage d’entreprise. La demande est rejetée en date d’aujourd’hui.

[10]  Mme Kwan conteste le caractère raisonnable de la décision et fait valoir qu’elle est entachée par un manquement à l’équité procédurale. La première question appelle une norme de contrôle empreinte de déférence et la question de l’équité doit être examinée selon la norme de la décision correcte.

I.  CARACTÈRE RAISONNABLE

[11]  Mme Kwan affirme qu’il était déraisonnable pour l’agent des visas de conclure que sa demande était motivée par un but illégitime du seul fait que la mise au point de son entreprise n’avait pas progressé. Toutefois, cet argument témoigne d’une mauvaise interprétation de la préoccupation principale de l’agent des visas.

[12]  C’est plutôt le fait que Mme Kwan n’a pas participé activement à la mise au point de son entreprise qui a mené l’agent des visas à douter de ses intentions. L’agent des visas a bien décrit cette préoccupation lorsqu’il a fait remarquer que Mme Kwan était presque immédiatement retournée à Hong Kong et n’avait pas assuré de gestion active et continue de son entreprise à partir du Canada. Ce manque de participation contraste nettement avec l’engagement que Mme Kwan avait pris à l’égard de la mise au point de son entreprise.

[13]  En tant que demanderesse voulant obtenir un visa au titre de la catégorie du démarrage d’entreprise, Mme Kwan était tenue de fournir un certificat d’engagement décrivant le rôle qu’elle avait l’intention de jouer dans l’entreprise. Le certificat d’engagement de Mme Kwan indiquait qu’elle était [traduction] « essentielle » à l’entreprise et qu’elle serait directrice, principale actionnaire et première dirigeante de l’entreprise à constituer en personne morale. Il décrivait également le rôle opérationnel de Mme Kwan avec beaucoup de détails et indiquait qu’elle occuperait un poste à temps plein à Vancouver, dans les bureaux d’Empowered. Un permis de travail avait aussi été demandé pour des [traduction] « raisons d’affaires urgentes » afin que Mme Kwan puisse exercer ses responsabilités professionnelles au Canada.

[14]  Il vaut également la peine de mentionner qu’Empowered a fourni une lettre de soutien au projet, indiquant que Mme Kwan [traduction] « serait présente et demeurerait à Vancouver » entre janvier 2017 et décembre 2017.

[15]  Malgré ces garanties et la délivrance d’un permis de travail le 25 février 2017, Mme Kwan est venue au Canada pour une semaine seulement entre le 28 février 2017 et le 7 mars 2017, après quoi elle est retournée à Hong Kong et y est restée. Durant son court séjour à Vancouver, elle a constitué en personne morale son entreprise et s’est réunie deux fois avec les représentants d’Empowered. Après ce séjour, la participation de Mme Kwan aux activités de son entreprise s’est limitée à l’envoi de courriels pour la plupart superficiels et à des échanges WeChat avec des représentants d’Empowered.

[16]  Ces éléments démontrent que Mme Kwan est presque immédiatement revenue sur son engagement ferme de vivre à Vancouver et de consacrer son temps et son énergie à son entreprise au Canada. Elle n’a fait aucun effort pour informer les autorités des visas qu’elle avait quitté le Canada et qu’elle travaillait à partir de Hong Kong. De même, elle a négligé d’informer les représentants du programme en temps opportun de la modification importante qui avait été apportée à son modèle d’entreprise. Tout cela est surprenant compte tenu des échanges WeChat entre Mme Kwan et les représentants d’Empowered à propos de ces questions et compte tenu du conseil qui lui avait été donné (voir le dossier certifié du tribunal, aux pages 158 et 163).

[17]  Je rejette l’argument de Mme Kwan selon lequel l’agent des visas a commis une erreur en évaluant ses intentions après le dépôt de sa demande. À mon avis, une obligation de bonne foi continue d’exister après le dépôt d’une demande dans le cadre de ce programme. Autrement, il ne servirait à rien d’exiger un engagement de la part du demandeur, des rapports d’étapes réguliers et un examen par les pairs après le dépôt de la demande.

[18]  J’ajouterais que rien dans la décision de l’agent des visas ne laisse entendre que les intentions de Mme Kwan ont été confirmées à un moment donné après le dépôt de sa demande. Les intentions antérieures d’une personne peuvent raisonnablement être évaluées par un examen de son comportement subséquent, et c’est manifestement ce qui s’est passé en l’espèce. Les intentions initiales de Mme Kwan ont été remises en doute parce qu’elle a presque immédiatement laissé tomber l’engagement clair qu’elle avait pris concernant les détails de sa participation dans les activités de son entreprise.

[19]  Enfin, l’instruction ministérielle no 7 prévoit que ne peut être considéré comme appartenant à la catégorie du démarrage d’entreprise le demandeur « qui compte participer, ou qui a participé, à un accord ou à une entente à l’égard de l’engagement principalement dans le but d’acquérir un statut [d’immigrant] ». Ce libellé démentit l’argument de Mme Kwan selon lequel l’évaluation de ses intentions est limitée dans le temps.

[20]  Je suis convaincu que l’agent des visas a eu raison de conclure que les intentions de Mme Kwan n’étaient pas de bonne foi. Bien qu’il soit loisible aux demandeurs dans la même situation que Mme Kwan de retarder le lancement d’une entreprise jusqu’à ce qu’ils obtiennent le statut de résident permanent, ce n’est pas ce que Mme Kwan a fait. Elle a pris des engagements clairs qu’elle n’a pas honorés et son niveau de participation dans les activités de l’entreprise était minime, tout au plus. Le problème n’était pas qu’Empowered participait activement à l’entreprise, mais plutôt que Mme Kwan ne le faisait pas. Au vu du dossier, il était loisible à l’agent des visas de conclure que Mme Kwan n’était pas sérieuse relativement à son entreprise et qu’elle cherchait principalement à obtenir le statut d’immigrant.

II.  ÉQUITÉ

[21]  L’argument de Mme Kwan concernant l’équité est fondé sur le fait que, dans son rapport d’examen par les pairs, la CABI a mentionné l’engagement atypique de Mme Kwan à verser 300 000 $ à Empowered pour son soutien durant la première année de démarrage de son entreprise. Mme Kwan allègue que l’agent des visas doit avoir pris cet élément de preuve extrinsèque en considération et que, par conséquent, il avait l’obligation de le porter à son attention. En effet, Mme Kwan fait valoir que c’est plutôt parce que l’agent des visas avait des préoccupations concernant les intentions d’Empowered, et non concernant les siennes, qu’il a rejeté sa demande. Selon elle, l’agent des visas a également manifesté cette préoccupation dans ses notes au dossier du 12 septembre 2017, et sa lettre d’équité procédurale ne répondait pas adéquatement à cette préoccupation.

[22]  J’accepte l’argument de Mme Kwan selon lequel l’agent des visas avait initialement des préoccupations concernant le modèle d’entreprise et les motivations d’Empowered. Il est également évident que Mme Kwan n’a pas été mise au courant de cette préoccupation. L’argument de Mme Kwan selon lequel elle aurait dû être informée de cette préoccupation est toutefois complètement affaibli par le fait que rien dans la décision de l’agent des visas n’indique que la conduite d’Empowered a en fin de compte été prise en compte dans le rejet de sa demande. La décision était plutôt fondée sur le fait que Mme Kwan n’avait pas participé de façon significative aux activités de démarrage de son entreprise, ce qui, en soi, constitue une justification raisonnable. Au vu du dossier, il n’y a tout simplement aucun fondement pour conclure que l’agent des visas avait une intention déguisée derrière cette décision. En effet, s’il y a une conclusion à tirer, ce serait que l’agent des visas a accepté l’explication de Mme Kwan concernant l’aide qu’Empowered a offerte à une entreprise similaire et que sa crainte de conflit d’intérêts a été dissipée.

[23]  En l’absence de preuve démontrant que les préoccupations initiales de l’agent des visas concernant Empowered ont été un facteur déterminant dans sa décision, l’agent n’était pas tenu de porter cette question à l’attention de Mme Kwan. Cette situation est très différente de l’affaire Sapojnikov c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 964, 285 ACWS (3d) 153, où il était question d’un défaut de divulguer une « lettre empoisonnée » reçue un jour avant l’envoi d’une lettre d’équité procédurale.

[24]  Dans cette affaire,  la crédibilité du demandeur était contestée directement dans la lettre, et la juge Anne Mactavish a conclu que celle‑ci avait dû être un facteur déterminant dans la décision d’envoyer la lettre d’équité procédurale. Par conséquent, il y avait une obligation de divulguer la lettre au demandeur.

[25]  En l’espèce, les réserves que l’agent des visas a exprimées concernant Empowered n’avaient rien à voir avec l’évaluation des intentions de Mme Kwan ou de sa crédibilité. En fait, il n’est pas étonnant que l’agent des visas n’ait jamais considéré le fait que la CABI ait mentionné le montant de 300 000 $ que Mme Kwan a versé à Empowered comme un point d’intérêt par la suite.

[26]  Pour les motifs qui précèdent, la demande est rejetée.

[27]  Aucune des parties n’a proposé de question à certifier et la présente affaire ne soulève aucune question de portée générale.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑3100‑18

LA COUR STATUE que la présente demande est rejetée.

« R.L. Barnes »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 28e jour de février 2019

Mélanie Vézina


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑3100‑18

INTITULÉ :

CHI KAN KWAN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (COLOMBIE‑bRITANNIQUE)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 JANVIER 2019

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BARNES

DATE DES MOTIFS :

LE 22 JANVIER 2019

COMPARUTIONS :

Steven Meurrens

POUR LA DEMANDERESSE

Mark East

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Larlee Rosenberg

Avocats

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LA DEMANDERESSE

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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