Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20031105

Dossier : T-926-01

Référence : 2003 CF 1287

Toronto (Ontario), le 5 novembre 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'KEEFE

AFFAIRE INTÉRESSANT la demande d'enregistrement

de la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT

sous le numéro de série 693 432

déposée par Anheuser-Busch Incorporated

ET les articles 56 et 59 de la

Loi sur les marques de commerce du Canada,

L.R.C. 1985, ch. T-13

ENTRE :

                                                                                   

                                                                MOLSON CANADA

                                                                                                                                                                       

demanderesse

et

ANHEUSER-BUSCH INCORPORATED

défenderesse

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE


[1]                 La Cour statue sur l'appel interjeté par Molson Canada (Molson, l'appelante ou l'opposante) en vertu de l'article 56 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi) d'une décision en date du 28 mars 2001 par laquelle le registraire des marques de commerce avait rejeté l'opposition formée par Molson à l'enregistrement, par Anheuser-Busch Inc. (Anheuser ou l'intimée), de la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT, sur le fondement de l'emploi projeté de la marque de commerce au Canada en liaison avec une liste de marchandises.

[2]                 Molson sollicite une ordonnance :

1.          faisant droit à son appel et infirmant la décision du registraire des marques de commerce et déclarant que la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT de l'intimée n'est pas enregistrable et n'est pas distinctive et que l'intimée n'est pas la personne qui a droit à l'enregistrement de cette marque de commerce;

2.          lui adjugeant les dépens du présent appel.

Contexte

Introduction

[3]                 Molson s'oppose à la demande présentée par Anheuser en vue de faire enregistrer sous le numéro 693 432 la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT.


[4]                 La demandé était fondée sur un emploi proposé au Canada en liaison avec une foule d'articles, y compris des vêtements, de l'équipement de sport, des sacs, des produits textiles, des cadeaux et des articles de fantaisie, de petits articles de bureau, des jeux, des savons, des bijoux, des grignotines pour accompagner la bière et des chocolats. La demande était également fondée sur l'emploi et l'enregistrement de la marque de commerce aux États-Unis en liaison avec [traduction] « des vêtements, à savoir des gants, des chemises, des blousons et des chapeaux » . À la suite de la procédure d'opposition, Anheuser a renoncé au droit à l'utilisation exclusive du mot GOLDEN indépendamment de sa marque de commerce.

[5]                 La demande d'Anheuser a été déposée le 12 novembre 1991. Elle a été modifiée le 17 novembre 1995. Anheuser a revendiqué et obtenu la date de priorité du 9 août 1991 sur le fondement de sa demande d'enregistrement de la marque de commerce aux États-Unis.

[6]                 La demande a été annoncée dans le Journal des marques de commerce le 3 mars 1993.

[7]                 Molson a déposé une déclaration d'opposition le 28 juillet 1993. Une déclaration d'opposition modifiée a été produite le 17 septembre 1998. L'opposante faisait valoir les moyens suivants au soutien de son opposition (ainsi que le registraire les a résumés dans sa décision) :

[traduction]

a) La présente demande ne satisfait pas aux exigences de l'article 30 de la Loi sur les marques de commerce étant donné que la requérante ne pouvait être convaincue qu'elle a le droit d'employer ou d'enregistrer sa marque de commerce au Canada compte tenu de l'existence de l'enregistrement que l'opposante a obtenu pour ses marques de commerce ci-après énumérées.

b) La présente demande ne satisfait pas aux exigences de l'article 30 de la Loi sur les marques de commerce étant donné que la requérante n'avait pas l'intention d'affecter la marque de commerce à l'usage précisé dans sa demande ou à quelque usage que ce soit. De plus, contrairement à ce qu'elle prétend, la requérante n'a pas employé la marque de commerce revendiquée aux États-Unis. Par ailleurs, la requérante n'a pas l'intention d'employer la marque de commerce revendiquée en tant que marque de commerce, mais uniquement de manière décorative.


c) La marque de commerce revendiquée n'est pas enregistrable, compte tenu de l'alinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce parce qu'elle crée de la confusion avec les marques de commerce déposées qu'elle possède déjà et qui visent des [traduction] « boissons alcoolisées fabriquées en brasserie » ou des [traduction] « boissons alcoolisées fermentées » ci-après énumérées :

Marque de commerce                                                                  Enregistrement no

MOLSON'S GOLDEN ALE & dessin                    100 941

GOLDEN ALE & dessin                                                             114 145

MOLSON GOLDEN ALE & dessin                                        161 252

MOLSON GOLDEN & dessin                                                  290 098

MOLSON GOLDEN                                                                  292 103

GOLDEN ALE & dessin                                                             293 246

MOLSON GOLDEN & dessin                                                  309 841

GOLDEN                                                                                      498 157

Au soutien du moyen qu'elle tire de l'alinéa 12(1)d), l'opposante se fonde aussi sur sa marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin, enregistrée sous le numéro 471 067 [...]

d) La requérante n'est pas la personne qui a droit à l'enregistrement de la marque de commerce revendiquée parce qu'à la date du dépôt de la présente demande et à tous les autres moments, la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT créait de la confusion avec les marques de commerce susmentionnées de l'opposante qui étaient déjà employées au Canada.

e) La marque de commerce revendiquée n'est pas distinctive de ce qui précède. De plus, l'opposante vend à grande échelle des boissons alcoolisées fermentées au Canada et les a annoncées en liaison avec les marques de commerce susmentionnées qui contiennent toutes le mot GOLDEN. Il est courant dans le commerce des brasseurs comme la requérante et l'opposante de commercialiser divers produits qui ne sont pas liés à la bière tels que les produits qui sont énumérés dans la présente demande. La commercialisation de ces produits est accessoire à l'entreprise principale du brasseur et sert à générer des recettes additionnelles et aussi à annoncer ses marques de bière. L'opposante vend à grande échelle des « produits dérivés » au Canada en liaison avec ses marques, qui contiennent toutes le mot GOLDEN. Par suite de ces ventes et de cette publicité à grande échelle de produits portant les marques de commerce en question, les consommateurs canadiens reconnaîtraient que le mot « golden » lorsqu'il est employé en liaison avec de tels produits est distinctif de l'opposante. Par conséquent, la marque de commerce revendiquée ne saurait être distinctive de la requérante. De plus, la marque de commerce GOLDEN est distinctive de l'opposante et, en conséquence, la marque de commerce revendiquée ne peut être distinctive de la requérante.


[8]                 Anheuser a produit le 5 novembre 1993 une contre-déclaration en réponse à la déclaration d'opposition.

[9]                 Devant le registraire des marques de commerce, Molson a déposé en preuve les affidavits de Katherine Davie, Blair Shier et Hui Ming Zheng. Anheuser a pour sa part déposé en preuve les affidavits souscrits par William S. Campbell, L. Jane Sargeant, Todd D. Bailey, Cynthia L. Martens, Robert W. White, Janice M. Bereskin et Isis E. Caulder.

[10]            Devant la Cour fédérale, Molson a soumis d'autres éléments de preuve en produisant les affidavits de Michael S. Downey, Kimberley Lane, Lynda Palmer et D. Jill Roberts. Anheuser a déposé des éléments de preuve complémentaires en produisant les affidavits de Frederik N. Meyer, Lloyd Potter, Sharyn Costin et David Sunday.

[11]            Aux termes de sa décision du 28 mars 2001, le registraire des marques de commerce a rejeté l'opposition formée par Molson à l'enregistrement de la marque de commerce. Les motifs du registraire sont exposés ci-après.

[12]            Le registraire a conclu que les faits allégués par Molson ne permettaient pas à cette dernière de soutenir que le paragraphe 30(1) de la Loi n'avait pas été respecté.

[13]            Le registraire a déclaré que la demande respectait sur le plan formel les exigences des alinéas 30d) et 30e) de la Loi. Le registraire a conclu que les éléments de preuve fournis par Anheuser n'étaient pas incompatibles avec son affirmation qu'elle avait l'intention d'utiliser sa marque comme marque de commerce en liaison avec les marchandises visées par la présente demande.

[14]            En ce qui concerne le moyen tiré de l'alinéa 30d), le registraire n'a pas considéré que l'absence de produits dérivés portant la marque de commerce de Anheuser dans ses catalogues contredisait « carrément » sa prétention qu'elle avait employé la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT aux États-Unis. Le registraire a de ce fait jugé mal fondé ce volet du second moyen d'opposition.

[15]            Le registraire a déclaré que les autres moyens d'opposition tournaient tous autour de la question de la confusion. Il a affirmé que le moyen le plus solide invoqué par l'opposante était celui qu'elle tirait de l'alinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, vu la marque de commerce GOLDEN de l'opposante enregistrée sous le numéro 498 157 ainsi que sa marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin enregistrée sous le numéro 471 067.


[16]            Le registraire a estimé que la marque de commerce de Anheuser possédait un caractère distinctif inhérent lorsqu'on l'examinait dans son ensemble par rapport aux marchandises visées par la présente demande. De même, le registraire a conclu que la marque de certification déposée MOLSON GOLDEN & dessin de l'opposante possédait un certain caractère distinctif inhérent lorsqu'on l'examinait dans son ensemble en fonction des marchandises visées par l'enregistrement no 471 067 et ce, même si le mot MOLSON évoque un nom de famille. Citant deux arrêts de la Cour d'appel, le registraire a conclu que la marque de commerce déposée GOLDEN de l'opposante donnait une description claire des boissons alcoolisées fermentées et qu'elle possédait donc un caractère distinctif inhérent faible.

[17]            Pour ce qui est de la mesure dans laquelle les marques de commerce étaient devenues connues et la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux avaient été en usage, le registraire a signalé que Anheuser n'avait pas encore commencé à employer sa marque de commerce au Canada et qu'il fallait donc considérer que celle-ci était encore inconnue au Canada. Dans le même ordre d'idées, le registraire a signalé que l'opposante n'avait produit aucun élément de preuve au sujet de la marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin et qu'il fallait dans ce cas également considérer que cette marque n'était pas connue au Canada. En revanche, le registraire a conclu que la marque de commerce déposée GOLDEN de l'opposante était bien connue au Canada en combinaison avec sa marque maison MOLSON ou MOLSON'S en liaison avec des boissons alcoolisées fermentées.


[18]            Pour ce qui est de la nature des marchandises des parties et de la nature du commerce associés à leurs marchandises respectives, le registraire a conclu que les marchandises de Anheuser différaient des boissons alcoolisées fermentées visées par l'enregistrement no 498 157. Cependant, comme les marchandises sont destinées à être des produits dérivés se rapportant à la bière MICHELOB GOLDEN DRAFT de Anheuser, le registraire a fait remarquer que les circuits de distribution associés aux produits dérivés de Anheuser et aux boissons alcoolisées fermentées de l'opposante étaient susceptibles de se chevaucher. Le registraire a par ailleurs conclu que les marchandises de Anheuser chevauchaient les marchandises visées par l'enregistrement no 471 067 et qu'il existait une possibilité de chevauchement des circuits de distribution associés à ces marchandises.

[19]            Dans son examen du degré de ressemblance des marques de commerce en litige, le registraire a constaté qu'il y avait peu de similitude sur le plan de la présentation, du son ou des idées suggérées entre la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT de Anheuser et la marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin de l'opposante. Le registraire a toutefois conclu que la marque de Anheuser et la marque de commerce déposée GOLDEN de l'opposante offraient certaines similitudes sur le plan de la présentation, du son et des idées qu'elles suggèrent, car la marque de Anheuser incorpore en totalité la marque de l'opposante.

[20]            Comme autre facteur permettant d'apprécier les risques de confusion entre les marques de commerce en litige, le registraire a tenu compte de l'affidavit souscrit par Mme Bereskin. Le registraire a estimé que, compte tenu du nombre élevé de marques traductionincorporant le mot GOLDEN qu'il avait repérées dans le registre (à l'exclusion des marques inscrites au nom de l'opposante) après avoir consulté la base de données du Bureau canadien des marques de commerce, on s'attendrait à ce qu'un nombre appréciable de ces marques soient utilisées et que les consommateurs soient par conséquent en mesure d'en faire la distinction sur le marché.

[21]            Le registraire a également relevé le fait que, suivant certains affidavits, outre l'opposante, deux autres brasseurs canadiens utilisent le mot GOLDEN sur leurs étiquettes de bouteilles de bière. Le registraire a constaté que la preuve ne permettait pas d'en savoir plus au sujet de l'ampleur de l'utilisation de ces marques au Canada.

[22]            En résumé, le registraire a déclaré ce qui suit :

[traduction] Pour appliquer le critère de la confusion, j'ai considéré qu'il s'agit d'une question de première impression et de souvenir imparfait. Même en considérant que les marchandises et la nature du commerce des parties sont les mêmes, je conclus malgré tout qu'il n'existe aucun risque sérieux de confusion entre la marque de commerce de la requérante et la marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin de l'opposante enregistrée sous le numéro 471 067 étant donné que la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT de la requérante et la marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin de l'opposante offrent peu de ressemblance sur le plan de la présentation, du son ou des idées suggérées qu'elles suggèrent lorsqu'on les examine dans leur ensemble. En outre, les éléments de preuve relatifs à l'état du registre qui ont été soumis par le biais de l'affidavit de Bereskin permettent de penser qu'il y a une adoption relativement commune de la marque GOLDEN en ce qui concerne plusieurs des marchandises visées par la présente demande et par la marque de certification déposée de l'opposante.

En ce qui concerne les autres marques de commerce de l'opposante et, en particulier, sa marque de commerce déposée GOLDEN, je conclus également qu'il n'existe pas de risque sérieux de confusion entre la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT de la requérante et l'une des marques en question, étant donné que les marchandises de la requérante diffèrent des boissons alcoolisées fermentées associées aux marques de l'opposante même si, comme je l'ai déjà signalé, il pourrait y avoir un chevauchement en ce qui concerne la nature du commerce associé aux marchandises de la requérante et les boissons alcoolisées fermentées de l'opposante. De plus, il n'y a qu'une certaine ressemblance en ce qui concerne la présentation, le son et les idées suggérées par la marque de commerce de la requérante et la marque de commerce GOLDEN de l'opposante, qui est une marque qui est intrinsèquement faible dont il a été démontré seulement qu'elle n'est devenue bien connue au Canada qu'en combinaison avec sa marque maison MOLSON ou MOLSON's. Qui plus est, les éléments de preuve relatifs à l'état du registre qui ont été soumis par le biais de l'affidavit de Bereskin permettent de penser qu'il y a une adoption relativement commune de la marque GOLDEN en ce qui concerne plusieurs des marchandises visées par la présente demande. Il ressort également de la preuve de la requérante qu'il y a eu un certain emploi par des tiers de marques de commerce incorporant le mot GOLDEN pour de la bière sur le marché canadien.

[23]            L'appelante Molson affirme que registraire a commis une erreur de fait et de droit en rejetant son opposition en vertu des alinéas 30d) et 30e) de la Loi et en estimant que Anheuser s'était acquittée du fardeau qui lui incombait de démontrer qu'elle avait l'intention d'employer le mot MICHELOB GOLDEN DRAFT comme marque de commerce au Canada sur les marchandises visées par la demande et qu'elle avait employé la marque de commerce aux États-Unis malgré les éléments de preuve contraires.

[24]            L'appelante affirme que le registraire a commis une erreur en jugeant que la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT ne créait pas de confusion avec la marque de commerce déposée GOLDEN de Molson et sa famille de marques de commerce déposées qui incorporent le mot GOLDEN.

[25]            L'appelante soutient que le registraire a également commis une erreur en estimant que la portée de la protection de la famille des marques de commerce de Molson qui incorporent le mot GOLDEN devait être restreinte en raison du fait que ce mot est souvent employé en compagnie de la marque maison MOLSON ou MOLSON'S.

[26]            L'appelante soutient que le registraire a également commis une erreur en considérant comme déterminants les éléments de preuve relatifs à l'état du registre produits au sujet de la question de la confusion alors que ces éléments de preuve étaient inadmissibles et qu'ils étaient sans rapport avec les questions dont il était saisi.


[27]            L'appelante soutient que le registraire a également commis une erreur de droit et qu'il a outrepassé sa compétence en contestant la validité de la marque de commerce déposée GOLDEN de Molson dans le cadre de la procédure d'opposition.

[28]            L'appelante soutient que le registraire a également commis une erreur de fait et de droit en n'examinant pas le quatrième moyen d'opposition, à savoir que la marque de commerce revendiquée dans la demande ne permet pas d'établir une distinction entre, d'une part, les marchandises pour lesquelles l'enregistrement de la marque de commerce est demandé et, d'autre part, les marchandises de Molson.

[29]            L'appelante soutient que le registraire a commis une erreur en ne faisant pas la différence entre les dates importantes pour ce qui est des moyens relatifs à l'absence d'enregistrabilité, à l'absence de droit à la marque et à l'absence de caractère distinctif, qui constituent des moyens d'opposition séparés et distincts.


[30]            L'appelante rappelle que, lorsqu'aucun nouvel élément de preuve n'est porté à la connaissance de la Cour fédérale, la norme de contrôle des décisions du registraire est celle de la décision raisonnable simpliciter et ce, que la décision soit axée sur les faits ou qu'elle soit le résultat de l'exercice du pouvoir discrétionnaire du registraire. L'appelante fait valoir que, comme de nouveaux éléments de preuve ont été présentés qui auraient pu avoir un effet sur les conclusions du registraire ou sur l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte. L'appelante précise toutefois que le défaut du registraire d'établir une distinction entre les différentes dates pertinentes sur les questions d'enregistrabilité et de droit à l'enregistrement, son défaut d'aborder la question de l'absence de caractère distinctif et son défaut de tenir compte de la famille de marques de commerce de Molson et le fait qu'il a outrepassé sa compétence en contestant l'enregistrement de la marque de commerce GOLDEN dans le cadre de la procédure d'opposition, constituent tous des erreurs de droit qui justifient l'infirmation de sa décision, peu importe la norme de contrôle appliquée.

[31]            Pour ce qui est du respect de l'article 30 de la Loi, l'appelante Molson soutient qu'elle s'est largement acquittée du fardeau de preuve limité que les alinéas 30d) et 30e) de la Loi mettaient à sa charge et que l'intimée n'a présenté aucun élément de preuve pour réfuter la présomption soulevée par les éléments de preuve en question. Elle affirme que l'intimée ne s'est pas acquittée de son fardeau de persuasion et qu'elle n'a pas établi qu'elle a jamais eu l'intention d'employer sa marque de commerce au Canada en liaison avec les marchandises visées par la présente demande.


[32]            En ce qui concerne le caractère distinctif inhérent dont il est question à l'alinéa 6(5)a) de la Loi, l'appelante fait valoir que le registraire ne disposait d'aucun élément de preuve qui lui aurait permis de conclure que sa marque de commerce déposée GOLDEN décrit clairement les marchandises qu'elle vise. Elle ajoute qu'en considérant la question du caractère distinctif inhérent de la marque de commerce GOLDEN de l'appelante comme chose jugée, le registraire a commis une erreur de droit. Elle en conclut que le mot « GOLDEN » possède un caractère distinctif inhérent en liaison avec les marchandises visées par la famille de marques de commerce déposées de Molson et que ce caractère a été renforcé par l'usage et la publicité de longue date que la société a faits de ses produits sur le marché canadien. L'appelante fait en outre valoir que, comme Molson est propriétaire de la marque de commerce déposée incorporant le mot GOLDEN, la marque doit être à la fois distinctive et valide, étant donné qu'il n'y a pas d'éléments de preuve contraires.

[33]            En ce qui a trait à la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage, l'appelante estime que l'alinéa 6(5)b) de la Loi favorise nettement Molson, car elle vend de la bière sous les marques de commerce de la famille GOLDEN à grande échelle et de façon ininterrompue depuis le milieu des années cinquante, alors que l'intimée n'a pas encore commencé à utiliser sa marque de commerce.

[34]            Sur la nature des marchandises, c'est-à-dire le critère prévu à l'alinéa 6(5)c) de la Loi, l'appelante affirme qu'il ressort à l'évidence de la preuve que les articles promotionnels que les parties vendent sous leurs marques de commerce respectives se chevauchent. De surcroît, les articles de promotion sont étroitement liés au produit principal des parties, à savoir la bière.

[35]            Suivant l'appelante, il ressort de la preuve que la nature du commerce des parties au sens de l'alinéa 6(5)d) de la Loi serait aussi identique. Elle ajoute que, lorsqu'il y a chevauchement des circuits de distribution et qu'il existe des produits qui se livrent directement concurrence, le risque de confusion est évident.


[36]            Pour ce qui est du degré de ressemblance au sens de l'alinéa 6(5)e) de la Loi, l'appelante affirme que l'intimée a pris la totalité de la marque de commerce GOLDEN de Molson et qu'elle l'a incorporée dans sa marque de commerce. Comme l'octroi d'une licence est une pratique courante dans l'industrie de la bière, il y aurait un risque évident de confusion, compte tenu de la présumée réputation de la marque de commerce GOLDEN. L'appelante ajoute que le fait que le mot MOLSON figure aussi sur l'étiquette ne modifie en rien le caractère distinctif de la marque GOLDEN. Vu la réputation dont jouiraient la marque de commerce GOLDEN et les marques de commerce de la famille GOLDEN appartenant à Molson, il existerait un risque véritable qu'en voyant la marque de commerce de l'intimée, le consommateur moyen pourrait croire soit que cette marque fait l'objet d'une licence, soit qu'elle fait partie de la série de marques de commerce appartenant à Molson. Suivant l'appelante, les éléments de preuve relatifs à l'état du registre qu'a présentés l'intimée ne changent rien à ce fait et au fait qu'en se fiant aux résultats de sa recherche sur CD-ROM, le registraire a commis une erreur de droit.

[37]            En ce qui concerne les autres circonstances de l'espèce, l'appelante affirme que, comme Molson est propriétaire d'une famille de marques de commerce, les risques de confusion sont plus élevés, étant donné que le public risque de considérer qu'une autre marque qui possède certaines caractéristiques communes aux siennes est un produit fabriqué ou licencié par Molson.


[38]            L'appelante estime que la question du caractère distinctif doit être dissociée de celle de la confusion. Elle soutient que le registraire a tout simplement omis d'aborder la question de l'absence de caractère distinctif et que, ce faisant, il a commis une erreur de droit. Elle ajoute que l'intimée a pris en entier la marque de commerce déposée GOLDEN de l'appelante et qu'elle l'a interpolée entre le terme géographique « Michelob » et le terme générique « draft » . L'appelante affirme par ailleurs qu'il ressort de la preuve que l'intimée ne vend pas ses articles promotionnels, mais qu'elle s'en sert exclusivement comme outil de promotion pour mousser la vente de sa bière.

[39]            Vu ce qui précède, l'intimée ne se serait, selon l'appelante, pas acquittée du fardeau constant et onéreux qui lui incombait de démontrer que sa marque de commerce est enregistrable et qu'elle est distinctive et qu'elle est la personne qui a droit à son enregistrement.

Prétentions et moyen de l'intimée

[40]            Selon l'intimée, Anheuser, les questions en litige sont celle de savoir si le registraire a commis une erreur :

a) en concluant que la preuve n'était pas clairement incompatible avec la volonté de Anheuser d'employer la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT au Canada;

b) en concluant que la preuve n'était pas clairement incompatible avec l'utilisation par Anheuser de la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT aux États-Unis;


c) en concluant qu'il n'existait pas de risque véritable de confusion entre la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT et les marques de commerce GOLDEN et MOLSON GOLDEN de Molson.

[41]            L'intimée soutient que les nouveaux éléments de preuve présentés dans le cadre du présent appel ne font que reprendre et confirmer ceux dont disposait le registraire et qu'ils n'auraient pas influencé sensiblement les conclusions de fait du registraire ou la manière dont il a exercé son pouvoir discrétionnaire. La norme de contrôle serait donc celle de la décision raisonnable simpliciter.

[42]            L'intimée soutient que les éléments de preuve présentés au sujet de l'état du registre font état d'un nombre élevé d'inscriptions pour des marques incorporant le mot GOLDEN et couvrant une vaste gamme de marchandises apparentées à celles qui sont visées par la présente demande. L'intimée est d'avis que ces éléments de preuve sont admissibles et que le registraire a le droit de tirer de ces éléments d'information des inférences au sujet de l'état du marché.


[43]            L'intimée soutient que les moyens d'opposition que Molson tire des alinéas 30d) et 30e) sont mal fondés et que le registraire n'a manifestement pas commis d'erreur en les rejetant. En ce qui a trait au moyen fondé sur l'alinéa 30d), l'intimée affirme que sa preuve ne contredit pas son affirmation qu'elle a utilisé la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT aux États-Unis. Pour ce qui est du moyen fondé sur l'alinéa 30e), l'intimée soutient que sa preuve ne contredit pas son intention d'utiliser la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT au Canada avec les articles promotionnels visés par la demande. Elle ajoute que rien ne permet de savoir comment l'intimée entend utiliser la marque au Canada, et elle rappelle qu'elle n'est nullement tenue de commencer à utiliser sa marque tant que sa demande n'aura pas été acceptée par le Bureau des marques de commerce.

[44]            Anheuser affirme que, pour que Molson obtienne gain de cause sur chacun de ses moyens d'opposition, il faudrait que le registraire conclue à l'existence d'un risque de confusion entre les marques en litige. Elle ajoute qu'une fois que le registraire avait conclu qu'il n'existait pas de risque sérieux de confusion en réponse au moyen le plus solide de Molson, les autres moyens que Molson tirait de la confusion ne pouvaient non plus prospérer.

[45]            L'intimée soutient qu'un examen des facteurs énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi démontre que la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT ne risque pas de créer de la confusion avec l'une ou l'autre des marques de commerce de Molson contenant le mot « GOLDEN » .


[46]            L'intimée soutient que sa marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT possède un caractère distinctif inhérent pour ce qui est des marchandises visées par la présente demande. Elle souligne que le premier mot de la marque, MICHELOB, est tout à fait unique et inusité et qu'il possède donc un caractère distinctif inhérent en ce qui a trait aux marchandises. L'intimée soutient que, comme la Cour d'appel fédérale l'a rappelé, le mot GOLDEN évoque clairement de la bière et une marque constituée du mot GOLDEN est par conséquent très faible, s'agissant de bière. L'intimée estime que tous les brasseurs de bière devraient pouvoir employer le terme GOLDEN. Elle ajoute qu'en ce qui concerne la question du caractère distinctif inhérent de la marque GOLDEN en liaison avec de la bière, il n'était pas nécessaire pour le registraire d'aller au-delà du sens des mots « golden » et « beer » et que c'est à juste titre qu'il a cité de la jurisprudence de la Cour d'appel fédérale à l'appui de cette conclusion.

[47]            L'intimée affirme qu'il ressort par ailleurs de la preuve que l'appelante emploie toujours le mot GOLDEN en étroite proximité avec le mot Molson. Elle soutient que l'inclusion des marques maison milite contre l'existence d'un risque de confusion.

[48]            L'intimée conteste l'argument de Molson suivant lequel ses marques de commerce déposées constituent une « famille » et elle ajoute que Molson n'a pas droit à une protection plus étendue à ce titre. Elle soutient que Molson a seulement établi qu'elle avait utilisé une série successive de variantes de sa marque MOLSON GOLDEN.

[49]            L'intimée soutient que le registraire ne s'est pas prononcé sur la validité de la marque GOLDEN enregistrée par Molson. Elle estime que le registraire n'est pas sorti de sa compétence en faisant observer que la marque GOLDEN de l'appelante possédait un caractère distinctif inhérent faible en raison de ses qualités descriptives et elle ajoute que ces propos étaient pertinents dans le cadre de la présente opposition.

[50]            L'intimée soutient que c'est souvent lorsqu'on doit déterminer si une marque projetée crée de la confusion avec une autre marque qu'on est appelé à se prononcer sur l'absence de caractère distinctif. Elle ajoute qu'il s'agit d'un moyen d'opposition distinct parce qu'il est possible de tenir compte de l'emploi de marques par d'autres personnes que l'opposante. Elle en déduit que le registraire a appliqué le bon critère en rejetant le moyen d'opposition que Molson tirait de l'absence de caractère distinctif, après avoir conclu qu'il n'existait pas de risque sérieux de confusion entre les marques en litige.

Question en litige

[51]            L'appel de la décision du registraire devrait-il être accueilli?

Dispositions législatives applicables

[52]              Voici les dispositions pertinentes de la Loi sur les marques de commerce :


2. « distinctive » Relativement à une marque de commerce, celle qui distingue véritablement les marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire, des marchandises ou services d'autres propriétaires, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi.

[...]

« marque de commerce » Selon le cas:


2. "distinctive", in relation to a trade-mark, means a trade-mark that actually distinguishes the wares or services in association with which it is used by its owner from the wares or services of others or is adapted so to distinguish them;

. . .

"trade-mark" means


a) marque employée par une personne pour distinguer, ou de façon à distinguer, les marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou les services loués ou exécutés, par elle, des marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou des services loués ou exécutés, par d'autres;


(a) a mark that is used by a person for the purpose of distinguishing or so as to distinguish wares or services manufactured, sold, leased, hired or performed by him from those manufactured, sold, leased, hired or performed by others,


b) marque de certification;

c) signe distinctif;

d) marque de commerce projetée.

6.(2) L'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

6.(5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris:

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

c) le genre de marchandises, services ou entreprises;

d) la nature du commerce;

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms

b) a certification mark,

c) a distinguishing guise, or

(d) a proposed trade-mark;

6.(2) The use of a trade-mark causes confusion with another trade-mark if the use of both trade-marks in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with those trade-marks are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.

6.(5) In determining whether trade-marks or trade-names are confusing, the court or the Registrar, as the case may be, shall have regard to all the surrounding circumstances including

(a) the inherent distinctiveness of the trade-marks or trade-names and the extent to which they have become known;

(b) the length of time the trade-marks or trade-names have been in use;

c) the nature of the wares, services or business;

d) the nature of the trade; and

e) the degree of resemblance between the trade-marks or trade-names in appearance or sound or in the ideas suggested by them.


commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent.

12. (1) Sous réserve de l'article 13, une marque de commerce est enregistrable sauf dans l'un ou l'autre des cas suivants:     

[...]

d) elle crée de la confusion avec une marque de commerce déposée;

...             

16. (1) Tout requérant qui a produit une demande selon l'article 30 en vue de l'enregistrement d'une marque de commerce qui est enregistrable et que le requérant ou son prédécesseur en titre a employée ou fait connaître au Canada en liaison avec des marchandises ou services, a droit, sous réserve de l'article 38, d'en obtenir l'enregistrement à l'égard de ces marchandises ou services, à moins que, à la date où le requérant ou son prédécesseur en titre l'a en premier lieu ainsi employée ou révélée, elle n'ait créé de la confusion :

. . .

a) soit avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne;

b) soit avec une marque de commerce à l'égard de laquelle une demande d'enregistrement avait été antérieurement produite au Canada par une autre personne;

c) soit avec un nom commercial qui avait été antérieurement employé au Canada par une autre personne.

19. Sous réserve des articles 21, 32 et 67, l'enregistrement d'une marque de commerce à l'égard de marchandises ou services, sauf si son invalidité est démontrée, donne au propriétaire le droit exclusif à l'emploi de celle-ci, dans tout le Canada, en ce qui concerne ces marchandises ou services.

12. (1) Subject to section 13, a trade-mark is registrable if it is not

...

(d) confusing with a registered trade-mark;

[...]

16. (1) Any applicant who has filed an application in accordance with section 30 for registration of a trade-mark that is registrable and that he or his predecessor in title has used in Canada or made known in Canada in association with wares or services is entitled, subject to section 38, to secure its registration in respect of those wares or services, unless at the date on which he or his predecessor in title first so used it or made it known it was confusing with

(a) a trade-mark that had been previously used in Canada or made known in Canada by any other person;

(b) a trade-mark in respect of which an application for registration had been previously filed in Canada by any other person; or

(c) a trade-name that had been previously used in Canada by any other person.

19. Subject to sections 21, 32 and 67, the registration of a trade-mark in respect of any wares or services, unless shown to be invalid, gives to the owner of the trade-mark the exclusive right to the use throughout Canada of the trade-mark in respect of those wares or services.



22. (1) Nul ne peut employer une marque de commerce déposée par une autre personne d'une manière susceptible d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage attaché à cette marque de commerce.

[...]

30. Quiconque sollicite l'enregistrement d'une marque de commerce produit au bureau du registraire une demande renfermant :


22. (1) No person shall use a trade-mark registered by another person in a manner that is likely to have the effect of depreciating the value of the goodwill attaching thereto.

....

30. An applicant for the registration of a trade-mark shall file with the Registrar an application containing

...


d) dans le cas d'une marque de commerce qui est, dans un autre pays de l'Union, ou pour un autre pays de l'Union, l'objet, de la part du requérant ou de son prédécesseur en titre désigné, d'un enregistrement ou d'une demande d'enregistrement sur quoi le requérant fonde son droit à l'enregistrement, les détails de cette demande ou de cet enregistrement et, si la marque n'a été ni employée ni révélée au Canada, le nom d'un pays où le requérant ou son prédécesseur en titre désigné, le cas échéant, l'a employée en liaison avec chacune des catégories générales de marchandises ou services décrites dans la demande;

e) dans le cas d'une marque de commerce projetée, une déclaration portant que le requérant a l'intention de l'employer, au Canada, lui-même ou par l'entremise d'un licencié, ou lui-même et par l'entremise d'un licencié;

...

I) une déclaration portant que le requérant est convaincu qu'il a droit d'employer la marque de commerce au Canada en liaison avec les marchandises ou services décrits dans la demande.


(d) in the case of a trade-mark that is the subject in or for another country of the Union of a registration or an application for registration by the applicant or the applicant's named predecessor in title on which the applicant bases the applicant's right to registration, particulars of the application or registration and, if the trade-mark has neither been used in Canada nor made known in Canada, the name of a country in which the trade-mark has been used by the applicant or the applicant's named predecessor in title, if any, in association with each of the general classes of wares or services described in the application;

(e) in the case of a proposed trade-mark, a statement that the applicant, by itself or through a licensee, or by itself and through a licensee, intends to use the trade-mark in Canada;

....

(I) a statement that the applicant is satisfied that he is entitled to use the trade-mark in Canada in association with the wares or services described in the application.



38. (1) Toute personne peut, dans le délai de deux mois à compter de l'annonce de la demande, et sur paiement du droit prescrit, produire au bureau du registraire une déclaration d'opposition.

(2) Cette opposition peut être fondée sur l'un des motifs suivants :

a) la demande ne satisfait pas aux exigences de l'article 30;

b) la marque de commerce n'est pas enregistrable;

c) le requérant n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement;

d) la marque de commerce n'est pas distinctive.


38. (1) Within two months after the advertisement of an application for the registration of a trade-mark, any person may, on payment of the prescribed fee, file a statement of opposition with the Registrar.

(2) A statement of opposition may be based on any of the following grounds:

(a) that the application does not conform to the requirements of section 30;

(b) that the trade-mark is not registrable;

(c) that the applicant is not the person entitled to registration of the trade-mark; or

(d) that the trade-mark is not distinctive.


56. (1) Appel de toute décision rendue par le registraire, sous le régime de la présente loi, peut être interjeté à la Cour fédérale dans les deux mois qui suivent la date où le registraire a expédié l'avis de la décision ou dans tel délai supplémentaire accordé par le tribunal, soit avant, soit après l'expiration des deux mois.


56. (1) An appeal lies to the Federal Court from any decision of the Registrar under this Act within two months from the date on which notice of the decision was dispatched by the Registrar or within such further time as the Court may allow, either before or after the expiration of the two months.          


Analyse et décision

[53]       Norme de contrôle

La Cour d'appel fédérale a déclaré ce qui suit dans l'arrêt Brasseries Molson c. John Labatt Ltd. [2000] 3 C.F. 145, (2000), 5 C.P.R. (4th) 180 (C.A.F.), autorisation d'appel à la C.S.C. refusée, [2000] C.S.C.R. no 161, à la page 196 :


Je pense que l'approche suivie dans les affaires Benson & Hedges et McDonald's Corp. est conforme à la conception moderne de la norme de contrôle. Même s'il y a, dans la Loi sur les marques de commerce, une disposition portant spécifiquement sur la possibilité d'un appel à la Cour fédérale, les connaissances spécialisées du registraire sont reconnues comme devant faire l'objet d'une certaine déférence. Compte tenu de l'expertise du registraire, et en l'absence de preuve supplémentaire devant la Section de première instance, je considère que les décisions du registraire qui relèvent de son champ d'expertise, qu'elles soient fondées sur les faits, sur le droit ou qu'elles résultent de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, devraient être révisées suivant la norme de la décision raisonnable simpliciter. Toutefois, lorsqu'une preuve additionnelle est déposée devant la Section de première instance et que cette preuve aurait pu avoir un effet sur les conclusions du registraire ou sur l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, le juge doit en venir à ses propres conclusions en ce qui concerne l'exactitude de la décision du registraire.

J'estime que la Cour a exposé dans cet extrait l'état actuel du droit.

[54]       J'ai pris connaissance des affidavits supplémentaires qui ont été produits dans le cadre de l'appel dont la Cour est saisie et j'estime que ces nouveaux éléments de preuve auraient pu avoir un effet sur les conclusions de fait du registraire. Suivant ces nouveaux éléments de preuve, la bière biologique Golden Promise, la bière Fuller's Golden Pride et l'ale Golden Promise ne se trouvaient plus sur le marché canadien et les demandes d'enregistrement des marques de commerce Golden Pride et Golden Promise avaient été abandonnées. Le registraire s'en est remis aux ouvrages et aux sites Internet qu'il a consultés et où il était question de bières dont les étiquettes comprenaient le mot GOLDEN. Or, suivant les nouveaux éléments de preuve qui ont été produits, aucune marque de commerce n'a été enregistrée pour de tels produits. La norme de contrôle applicable est donc celle de la décision correcte.


[55]       Je fais mien le résumé que Molson fait du fardeau de la preuve qui s'applique dans le cadre d'une procédure d'opposition :

[traduction] Le fardeau de persuasion qui s'applique à toutes les questions mentionnées, à savoir l'observation formelle, l'enregistrabilité, le droit à l'enregistrement et le caractère distinctif incombe carrément à celui qui sollicite l'enregistrement de la marque de commerce, en l'occurrence, l'intimée. La charge de présentation incombe à l'opposant pour ce qui est de chacun des moyens qu'il invoque. Toutefois, dès lors que l'opposant s'est acquitté de son fardeau de présentation de la preuve, la charge de la preuve est alors déplacée sur celui qui sollicite l'enregistrement de la marque de commerce, qui doit alors établir qu'il a effectivement droit à l'enregistrement. En cas de doute sur l'enregistrabilité ou le caractère distinctif, ce doute est résolu à l'encontre de celui qui demande l'enregistrement de la marque de commerce et la demande doit alors être rejetée.

[56]       Moyen tiré de l'alinéa 30e)

L'alinéa 30e) de la Loi dispose :

30. Quiconque sollicite l'enregistrement d'une marque de commerce produit au bureau du registraire une demande renfermant :

[..]

e) dans le cas d'une marque de commerce projetée, une déclaration portant que le requérant a l'intention de l'employer, au Canada, lui-même ou par l'entremise d'un licencié, ou lui-même et par l'entremise d'un licencié;

Je conviens que le fardeau probatoire qui est imposé à l'opposante relativement à l'alinéa 30e) est relativement léger et je constate aussi que l'opposante peut s'acquitter de ce fardeau en s'appuyant tant sur ses propres éléments de preuve et la transcription des contre-interrogatoires que sur les éléments de preuve de Molson. Molson soutient que l'extrait suivant du contre-interrogatoire de M. Campbell est suffisante pour lui permettre de se décharger du fardeau de présentation qui lui incombe en ce qui concerne le moyen tiré de l'alinéa 30e) :


[traduction]

Q.             Très bien. Lorsqu'on parle de l'utilisation de la marque de commerce en liaison avec des articles comme des casquettes, des tee-shirts et ainsi de suite, comment cette marque de commerce est-elle affichée sur ces produits?

R.             Le nom est très visible sur le chapeau, le tee-shirt ou le polo de golf.

Q.             Elle se trouve donc en fait sur... .

R.             L'article.

Q.             . . . l'article lui-même, sur sa surface, à un endroit bien en vue?

R.             Oui.

Q.             Pourquoi affiche-ton la marque de façon aussi visible sur ces produits?

R.             Pour faire connaître la marque... pour sensibiliser les consommateurs, les distributeurs, les détaillants.

Q.             Cette marque de commerce précise figure-t-elle sur l'étiquette elle-même? Par exemple, sur l'étiquette se trouvant dans le col du tee-shirt?

R.             Pas à ma connaissance.


[57]       Molson a soutenu devant moi que l'intimée n'avait pas l'intention de vendre les articles et qu'elle n'utilisera donc pas la marque de commerce. Elle a cité le témoignage de M. Meyer, qui a parlé de la vente d'articles arborant la marque de commerce « Michelob » et non « Michelob Golden Draft » . Les éléments de preuve avancés par Molson ne permettent pas d'affirmer que l'intimée n'a pas l'intention d'employer la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT en liaison avec les marchandises visées par la présente demande au Canada. Je prends acte du fait que la charge de présentation qui incombe à Molson est relativement légère, étant donné que Molson est bien au courant des faits qui permettraient de soutenir que l'intimée n'a pas l'intention d'employer la marque au Canada. La preuve n'est pas incompatible avec l'intention de l'intimée d'employer la marque de commerce revendiquée au Canada.

[58]       Molson a également soutenu devant le registraire que, comme Anheuser n'avait pas encore commencé à employer la marque de commerce projetée au Canada au moment du contre-interrogatoire de M. Campblell, elle n'avait donc nullement l'intention d'employer cette marque au Canada. Je suis d'accord pour dire que cela n'est pas exact et que nul n'est tenu d'utiliser la marque projetée tant qu'elle n'a pas été approuvée.

[59]       Je conclus que Molson ne s'est pas acquittée du fardeau de présentation de la preuve qui lui incombait de démontrer que l'intimée n'a pas l'intention d'employer la marque projetée au Canada. La conclusion que le registraire a tirée sur ce moyen d'opposition était donc bien fondée.

[60]       Moyen tiré de l'alinéa 30d)

L'alinéa 30d) de la Loi est ainsi libellé :

30. Quiconque sollicite l'enregistrement d'une marque de commerce produit au bureau du registraire une demande renfermant :

[..]

. . .

d) dans le cas d'une marque de commerce qui est, dans un autre pays de l'Union, ou pour un autre pays de l'Union, l'objet, de la part du requérant ou de son prédécesseur en titre désigné, d'un enregistrement ou d'une demande d'enregistrement sur quoi le requérant fonde son droit à l'enregistrement, les détails de cette demande ou de cet enregistrement et, si la marque n'a été ni employée ni révélée au Canada, le nom d'un pays où le requérant ou son prédécesseur en titre désigné, le cas échéant, l'a employée en liaison avec chacune des catégories générales de marchandises ou services décrites dans la demande;


[61]       Molson affirme que, comme on ne trouve dans les catalogues de Michelob aucune mention de marchandises promouvant la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT d'Anheuser, cette dernière n'a pas utilisé sa marque de commerce projetée aux États-Unis. J'estime que c'est avec raison que le registraire a affirmé que l'utilisation par Anheuser de la marque de commerce « GOLDEN DRAFT » aux États-Unis n'était pas incompatible avec ses prétentions. Molson soutient aussi que, comme la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT de l'intimée a été annulée le 11 janvier 1999 en raison du défaut de produire un affidavit établissant son emploi, il s'ensuit que la marque de commerce projetée n'a pas été employée aux États-Unis. Je ne suis pas de cet avis. Cet état de fait n'est pas incompatible avec l'emploi de la marque aux États-Unis dont il est question dont les autres éléments de preuve et prétentions. Le défaut de produire l'affidavit en question s'explique peut-être par un simple oubli.

[62]       Je suis d'avis que c'est à bon droit que le registraire a jugé mal fondé le moyen tiré de l'alinéa 30d). Molson ne s'est pas acquittée du fardeau de présentation de la preuve.

[63]       Bien que les appels visés à l'article 56 de la Loi soient souvent qualifiés de nouveaux procès, ce qualificatif n'est pas tout à fait exact, car l'appel interjeté en vertu de l'article 56 comporte aussi un examen des conclusions du registraire.

[64]       Le registraire a-t-il commis une erreur en concluant à l'absence de confusion entre la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT d'Anheuser et les marques de commerce de l'opposante?


Le registraire a affirmé que les autres moyens d'opposition - qui concernaient l'absence d'enregistrabilité, l'absence de droit à l'enregistrement et l'absence de caractère distinctif - tournaient tous autour de la question de la confusion entre la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT d'Anheuser et les marques de commerce de l'opposante. Il a fait remarquer que le moyen le plus solide invoqué par l'opposante était celui qu'elle tirait de l'alinéa 12(1)d) de la Loi en raison de l'existence de la marque de commerce GOLDEN de l'opposante enregistrée sous le numéro 498 157 et de sa marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin enregistrée sous le numéro 471 067 qui sont ci-après reproduites.

[65]       Aux termes de l'alinéa 12(1)d), une marque de commerce est enregistrable si elle ne crée pas de confusion avec une marque de commerce déposée. Le registraire a affirmé que, pour décider s'il existe un risque véritable de confusion entre les marques, il devait tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce et notamment des facteurs énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi, qui dispose :

6.(5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris :

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;


c) le genre de marchandises, services ou entreprises;

d) la nature du commerce;

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent.

Le registraire s'est ensuite penché sur la question de savoir s'il existait ou non un risque de confusion en l'espèce.

[66]       Selon le paragraphe 6(2) de la Loi, une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés par la même personne, que ces marchandises ou ces services fassent partie ou non de la même catégorie générale.

[67]       Dans l'arrêt Miss Universe, Inc. c. Bohna, [1995] 1 C.F. 614, (1994), 58 C.P.R. (3d) 381 (C.A.F.), le juge Décary déclare ce qui suit, aux pages 387 à 389 :

Principes applicables


Pour décider si l'emploi d'une marque de commerce ou d'un nom commercial cause de la confusion avec une autre marque de commerce ou un autre nom commercial, la Cour doit se demander si, comme première impression dans l'esprit d'une personne ordinaire ayant un vague souvenir de l'autre marque ou de l'autre nom, l'emploi des deux marques ou des deux noms, dans la même région et de la même façon, est susceptible de donner l'impression que les services reliés à ces marques ou à ces noms sont fournis par la même personne, que ces services appartiennent ou non à la même catégorie générale (voir les art. 6(2),(3) et (4) de la Loi; Rowntree Company Limited c. Paulin Chambers Company Limited et al., [1968] R.C.S. 134; Oshawa Holdings Ltd. c. Fjord Pacific Marine Industries Ltd. (1981), 55 C.P.R. (2d) 39 (C.A.F.); Mr. Submarine Ltd. c. Amandista Investments Ltd., [1988] 3 C.F. 91 (C.A.), à la p. 99, juge en chef Thurlow; et Canadian Schenley Distilleries Ltd. c. Canada's Manitoba Distillery Ltd. (1975), 25 C.P.R. (2d) 1 (C.F. 1re inst.), à la p. 12, juge Cattanach.

En décidant s'il y a vraisemblance de confusion, la Cour doit tenir compte de toutes les circonstances, y compris celles visées au paragraphe 6(5) précité.

Il appartient toujours à celui qui demande à enregistrer une marque de commerce d'établir que, selon la prépondérance des probabilités, il n'y a aucune probabilité de confusion avec une autre marque de commerce déjà employée et enregistrée (voir les arrêts Sunshine Biscuits, Inc. c. Corporate Foods Ltd. (1982), 61 C.P.R. (2d) 53 (C.F. 1re inst.), à la p. 57, juge Cattanach, et Molnlycke Aktiebolag c. Kimberly-Clark of Canada Ltd. (1982), 61 C.P.R. (2d) 42 (C.F. 1re inst.), à la p. 46, juge Cattanach.

Plus la marque est solide, plus grande est l'étendue de la protection qui devrait lui être accordée et plus il sera difficile au requérant de se décharger de l'obligation qui lui incombe. Comme l'a remarqué le juge Mahoney (tel était alors son titre) dans l'arrêt Carson c. Reynolds, [1980] 2 C.F. 685 (1re inst.), à la p. 691, une marque de commerce peut être :

... si généralement associée à [une personne] que l'emploi de celle-ci avec d'autres marchandises ou services, même s'ils n'ont absolument rien à voir avec des services de divertissement, créerait de la confusion en ce que ce double emploi donnerait vraisemblablement à entendre que toutes ces marchandises et services, quels qu'ils soient, ont un rapport direct avec [cette personne] . . .

Nombreux sont les exemples, dans la jurisprudence relative aux oppositions à l'enregistrement des marques de commerce, de l'étendue de la protection à accorder à des marques qui sont solides. [...] Il en est de même dans les actions en contrefaçon [...] et les affaires relatives aux injonctions [...] dans lesquelles des marques plus faibles ont également obtenu gain de cause (voir par exemple « La Bagagerie Willy Ltée » pour la vente et la réparation des valises, par opposition à « La Bagarerie » pour les articles de cuir (Bagagerie SA c. Bagagerie Willy Ltée (1992), 97 D.L.R. (4th) 684 (C.A.F.)), une action en contrefaçon.

Les facteurs énoncés aux alinéas 6(5)a) à e) n'ont pas à être interprétés comme ayant le même poids en toutes circonstances. Lorsque par exemple, on compare une marque de commerce qui est forte et une marque de commerce projetée, les critères c) et d), c'est-à-dire le genre de marchandises, services ou entreprises et la nature du commerce, ne sont pas particulièrement déterminants. Comme l'a noté le juge Joyal dans l'arrêt Polysar Ltd. c. Gesco Distributing Ltd., (1985), 6 C.P.R. (3d) 289, aux pages 298 et 299, 36 A.C.W.S. (2d) 184 (C.F. 1re inst.) :

Le principe selon lequel les critères énumérés au paragraphe 6(5) n'ont pas tous le même poids est particulièrement pertinent en l'espèce. Chaque cas de confusion peut justifier qu'on accorde plus d'importance à l'un de ces critères. ...


Je tiens à faire une dernière observation. Il me semble qu'en ce qui concerne la nature des marchandises, le lien entre deux marques concurrentes doit faire l'objet d'un examen beaucoup plus rigoureux lorsqu'on compare une marque projetée à une marque établie depuis longtemps. La réputation d'une marque découle manifestement de son caractère distinctif, c'est-à-dire une combinaison de voyelles, de syllabes et de sons comportant une qualité inhérente qui évoque, non seulement les marchandises précises éventuellement énumérées dans l'enregistrement de la marque, mais aussi l'image qui s'attache à toutes les diverses activités exercées par son propriétaire. À mon avis, voilà ce qu'on entend essentiellement par l'expression « sens secondaire » . À l'appui de ce principe directeur, je me contenterai de citer les affaires Kodak et Vogue. J'avoue qu'aucune décision jurisprudentielle antérieure ne porte exactement sur la même question. Néanmoins, lorsqu'il s'agit d'une marque comme KODAK, en raison de son caractère distinctif inhérent, ou VOGUE, en raison de son influence prédominante dans le domaine de la mode, les tribunaux ont conféré une protection qui dépasse largement le domaine des appareils photo, d'une part, et celui des revues de mode, d'autre part. L'objet fondamental de la Loi sur les marques de commerce, de la Loi sur la concurrence déloyale, S.R.C. 1952, ch. 274 ou de l'ancien droit à l'action en passing-off en vertu de la common law, est de protéger les droits acquis, peu importe s'ils découlent de l'usage ou de l'enregistrement. Le requérant qui veut employer la marque Kodak en rapport avec des bicyclettes, ou la marque Vogue en rapport avec des bijoux de fantaisie, porte effectivement atteinte à des droits acquis. Ce requérant aura parfois gain de cause, mais pour citer les paroles de Lord Watson dans l'arrêt Eno v. Dunn, (1890), 15 App. Cas. 252, à la p. 257 :

[traduction] . . . il doit justifier l'enregistrement de sa marque de commerce en montrant de façon affirmative qu'elle n'induira pas en erreur. Il m'apparaît comme une conséquence nécessaire, en cas de doute, que sa demande doit être rejetée.

et le juge Rouleau dans l'arrêt Maple Leaf Confections Ltd. c. Maple Leaf Gardens Ltd., (1986), 12 C.P.R. (3d) 511, aux pages 519 et 520, 10 C.I.P.R. 267, 7 F.T.R. 72 :

Néanmoins, il ne fait pas de doute que lorsqu'on examine les facteurs énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi sur les marques de commerce, il n'y a pas lieu d'accorder la même importance à chacun d'entre eux. Il peut être justifié dans un cas particulier d'accorder une plus grande valeur à un critère donné. Comme je l'ai déjà précisé, j'estime que la marque et le dessin de l'intimée sont solides et qu'ils sont bien connus partout au Canada. En pareil cas, les tribunaux ont statué que la distinction entre les marchandises et la nature du commerce des deux marques concurrentes perd de l'importance.

Pour que l'on conclue à la vraisemblance de la confusion, il n'est pas nécessaire que les parties exercent dans le même domaine ou la même industrie, ni que les services soient du même genre ou de la même qualité. Les marques de commerce utilisées en liaison avec des marchandises et des services d'une certaine qualité, destinés à une catégorie d'acheteurs, peuvent causer de la confusion avec les marques de commerce désignant des marchandises et des services d'un genre ou d'une qualité différents, destinés à une catégorie différente d'acheteurs (voir l'arrêt Bagagerie SA c. Bagagerie Willy Ltée, précité).

[68]      Caractère distinctif inhérent - Alinéa 6(5)a)


Le registraire a conclu que la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT de Anheuser possédait un caractère distinctif inhérent en ce qui concerne les marchandises visées par la présente demande. Il a estimé que la marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin de l'opposante possédait un certain caractère distinctif inhérent lorsqu'on l'examinait dans son ensemble par rapport aux marchandises visées par l'enregistrement no 471 067 et ce, même si le mot « MOLSON » évoque un nom de famille. De plus, le registraire a estimé que la marque de commerce déposée « GOLDEN » de Molson décrivait clairement des boissons alcoolisées fermentées et qu'elle possédait donc un faible caractère distinctif inhérent.

[69]       J'estime par ailleurs que c'est à juste titre que le registraire a conclu que la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT possède un caractère distinctif inhérent. La marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT comprend le mot « MICHELOB » ce qui, à mon sens, confère à la marque un caractère distinctif inhérent et milite contre la confusion. Je tiens par ailleurs à signaler que les marques de deux parties sont comprises dans leurs « marques maison » . L'emploi du mot « GOLDEN » par Molson a toujours été principalement associé au mot « MOLSON » et depuis 1969, « MOLSON » a toujours fait partie de l'étiquette de la « MOLSON GOLDEN » (contre-interrogatoire de Michael S. Downey, questions 36 à 44). Le mot « Golden » est nettement descriptif. Molson avance que le registraire ne disposait d'aucuns éléments de preuve tendant à démontrer que la marque de commerce GOLDEN de Molson décrivait clairement le produit. Je tiens toutefois à signaler que, dans l'arrêt John Labatt Ltd. c. Molson Cos. Ltd., (1987), 19 C.P.R. (3d) 88 (C.A.F.), la Cour d'appel fédérale déclare ce qui suit, à la page 89 :

.... « golden » est un terme dont l'un des sens premiers désigne une couleur. Cette couleur s'applique à la plupart des bières [...] (il y a même des éléments de preuve en ce sens, mais nous estimons que la couleur de la bière est un fait dont nous pouvons prendre connaissance d'office).


De plus, dans l'arrêt Molson Companies Ltd. c. John Labatt Ltd., (1994), 58 C.P.R. (3d) 527 (C.A.F.), la Cour d'appel déclare, aux pages 528 et 529 :

. . . Les mots anglais « gold » (or) et « golden » (doré) [...] sont des adjectifs qui, tout comme « blond » , « ambré » , « pâle » , « brun » et « foncé » , ne font que décrire des catégories dans lesquelles peut entrer une marque de bière donnée [...] Cela se rapproche d'ailleurs de l'emploi des adjectifs qualificatifs « rouge » , « blanc » , « rosé » et « jaune » pour décrire les vins. Chacune de ces épithètes est d'usage courant et sert à préciser la nature et la catégorie du produit; elles ne constituent pas la marque de commerce du producteur.

Je suis convaincu que le registraire n'a pas commis d'erreur en concluant que le mot GOLDEN était nettement descriptif.

[70]       Je souscris également à la conclusion finale du registraire au sujet des facteurs énumérés à l'alinéa 6(5)a) de la Loi.

[71]       Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage - Alinéa 6(5)b)

La marque de commerce de Anheuser n'a pas été employée au Canada. Ce facteur favorise donc la marque de Molson.

[72]       Genre de marchandises, services ou entreprises - Alinéa 6(5)c)

Le registraire a conclu que les marchandises de Anheuser différaient de celles de Molson (boissons alcoolisées fermentées) en ce qui concerne la marque de commerce GOLDEN. Il a conclu que les marchandises de Anheuser chevauchaient celles de Molson en ce qui a trait à la marque de commerce MOLSON GOLDEN & dessin. Je souscris à ces deux conclusions.


[73]       Nature du commerce - Alinéa 6(5)d)

Le registraire a conclu qu'il existait une possibilité de chevauchement des circuits de distribution des marchandises de Anheuser et des boissons alcoolisées fermentées de Molson parce que les marchandises de Anheuser sont destinées à être des produits dérivés se rapportant à la bière MICHELOB GOLDEN DRAFT. Il a également conclu qu'il y avait un chevauchement entre les circuits de distribution des marchandises de Anheuser et ceux des marchandises visées par l'enregistrement relatif à la marque MOLSON GOLDEN & dessin. Je suis du même avis.

[74]       Degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent - Alinéa 6(5)e)

Voici ce que le registraire a déclaré au sujet de ce facteur :

[traduction] Pour ce qui est du degré de ressemblance entre les marques de commerce en litige [alinéa 6(5)e)], je constate qu'il existe peu de similitudes sur le plan de la présentation, du son ou des idées suggérées entre la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT de la demanderesse et la marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin de l'opposante lorsqu'on examine ces marques dans leur ensemble en s'en tenant à la première impression. La marque de la demanderesse et la marque de commerce déposée GOLDEN de l'opposante offrent toutefois certaines similitudes sur le plan de la présentation, du son et des idées qu'elles suggèrent, car la marque de la demanderesse incorpore en totalité la marque de l'opposante.

[75]       Dans l'arrêt Park Avenue Furniture Corp. c. Wiches/Simmons Bedding Ltd., (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.), la Cour d'appel dit ce qui suit, à la page 426 :

Je suis d'accord avec l'appelante pour dire que les marques doivent être examinées dans leur ensemble. Sur ce point précis, voici ce que déclare H. G. Fox :


[traduction] Pour appliquer ces critères, le premier principe à invoquer est celui selon lequel les marques doivent être examinées dans leur ensemble et non en tant qu'éléments distincts. Il faut analyser l'idée qu'évoque chaque marque, c'est-à-dire l'impression nette qu'elle laisse globalement dans l'esprit. C'est la marque en son entier qu'il faut examiner pour en arriver ensuite à une décision sur la question de savoir si cette marque est susceptible de créer de la confusion avec une marque déjà enregistrée [...] Le véritable critère est celui de savoir si l'ensemble de la marque dont on projette l'enregistrement risque de causer une erreur, de tromper ou de créer de la confusion dans l'esprit des personnes habituées à la marque de commerce existante. C'est la combinaison des marques dans leur ensemble qu'il faut examiner, et c'est leur effet ou idée générale qu'il faut comparer.

Dans le jugement British Drug Houses, Ltd. v. Battle Pharmaceuticals, (1944), 4 C.P.R. 48, [1944] 4 D.L.R. 577, [1944] Ex. C.R. 239; affd 5 C.P.R. 71, [1946] 1 D.L.R. 289, [1946] S.C.R. 50, la Cour de l'Échiquier du Canada était saisie d'une requête présentée en vertu de la Loi sur la concurrence déloyale, 1932, S.C. 1932, ch. 38, dans sa rédaction alors en vigueur, en vue de faire radier l'enregistrement de la marque de commerce MULTIVIMS au motif qu'elle était similaire à la marque de commerce MULTIVITE de la requérante. Voici les propos qu'a tenus le juge Thorson en examinant le risque qu'une confusion soit créée dans l'esprit des négociants ou des utilisateurs des marchandises si les deux marques étaient employées en même temps et dans la même région :

[traduction] Il est, je crois, de jurisprudence constante que lorsqu'une marque de commerces est composée d'une combinaison d'éléments, on ne doit pas, dans le but de décider si elles sont semblables, les diviser selon leurs éléments constitutifs, concentrer son attention sur les éléments qui sont différents et conclure que, parce que ces éléments sont différents, les marques sont différentes en leur entier. Les marques de commerce peuvent être semblables lorsqu'on les examine dans leur ensemble, même si des différences peuvent ressortir de certains de leurs éléments, si on les examine isolément. C'est la combinaison des éléments qui constitue la marque de commerce et lui confère son caractère distinctif, et c'est l'effet de la marque de commerce dans son ensemble, plutôt que l'un de ses éléments particuliers, qu'il y a lieu d'examiner.

[76]       Dans le même ordre d'idées, dans l'affaire United Artists Corp. c. Pink Panther Beauty Corp., (1998), 80 C.P.R. (3d) 247 (C.A.F.), le juge Linden s'est penché sur l'application de l'alinéa 6(5)e) de la Loi aux pages 263 et 264 :

Bien sûr, il est inutile de procéder à cette analyse lorsque les marques sont identiques. Toutefois, lorsqu'elles sont similaires, le registraire ou le tribunal doivent évaluer l'impression qu'elles font sur le public. Même s'il faut examiner la marque comme un tout (et non la disséquer pour en faire un examen détaillé), il est tout de même possible d'en faire ressortir des caractéristiques particulières susceptibles de jouer un rôle déterminant dans la perception du public. Dans la décision Ikea Ltd/Ikea Ltée c. Idea Design Ltd., (1987), 13 C.P.R. (3d) 476 (C.F. 1re inst.), le juge Dubé a conclu que, même si les marques IKEA et IDEA se ressemblaient phonétiquement, il n'existait pas de risque de confusion. Il a déclaré :

Une seule lettre diffère dans les deux noms mais la lettre « K » dans IKEA se remarque d'une façon frappante et donne à la marque une forte allure scandinave alors que la marque IDEA évoque surtout un concept ou une pensée [...]


[77]       Lorsqu'on examine dans leur ensemble la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT et la marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin de Molson, force est de constater qu'elles offrent peu de ressemblances sur le plan de la présentation lorsqu'on les examine de la manière prescrite. C'est bien ce que montrent les annexes C et D de l'affidavit de Michael S. Downey.

[78]       Dans le jugement Knirps International GMB H c. S.R.O. Apparels (Canada) Inc., (1990), 28 C.P.R. (3d) 434 (C.F. 1re inst.), le juge Rouleau déclare, à la page 439 :

La situation en l'espèce est semblable à celle d'une décision très récente rendue par le juge Dubé dans l'affaire Molson Cos. Ltd. c. John Labatt Ltd. (T-404-89, décision non publiée rendue le 18 janvier 1990 [publiée depuis : 28 C.P.R. (3d) 457, 19 A.C.W.S. (3d) 1369]), dans laquelle le juge a confirmé la décision du registraire, qui avait statué que l'emploi des mots WINCHESTER GOLD en liaison avec de la bière ne créait pas de confusion avec les mots GOLDEN ou MOLSON GOLDEN, étant donné qu'en soit, le mot « golden » est une marque faible qui est descriptive des marchandises et qui apparaît souvent dans le registre. On a fait remarquer dans cette décision qu'en faisant une comparaison, la première partie de la marque de commerce mérite qu'on lui accorde une plus grande signification (citant Cantine Torresella S.r.l. c. Carbo, (1987), 16 C.P.R. (3d) 137, 14 C.I.P.R. 234 (C.F. 1re inst.) et qu'on doit examiner la marque de commerce dans son ensemble et en tenant compte de l'usage qu'en ont fait les parties, au lieu de se limiter à une comparaison entre, dans cette affaire, les mots GOLD et GOLDEN.

Les mêmes considérations valent dans le cas qui nous occupe dans lequel le premier mot de la marque de commerce projetée de l'intimée est « MICHELOB » .


[79]       Le registraire a estimé qu'il n'existait qu'une certaine ressemblance sur le plan de la présentation, du son et des idées suggérées par la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT de Anheuser et la marque de commerce déposée GOLDEN de l'opposante et il a déclaré que la marque de l'intimée incorporait en totalité la marque de commerce déposée de Molson mais qu'il ne s'agissait que d'un élément relativement mineur. Mes observations m'amènent à conclure que les conclusions que le registraire a tirées sur ce facteur étaient bien fondées.

[80]       Circonstances de l'espèce

L'intimée a présenté des éléments de preuve au sujet de l'état du registre en produisant les affidavits de L. Jane Sargeant et de Janice M. Bereskin et l'appelante a pour sa part déposé l'affidavit de Lynda Palmer.

[81]       Le registraire n'a accordé aucune valeur à l'affidavit de Mme Sargeant, surtout parce que lors de son contre-interrogatoire, il a été révélé que les résultats de ses recherches comprenaient des enregistrements radiés, des demandes abandonnées ou des demandes en cause dans des procédures d'opposition en cours. Le registraire n'a commis aucune erreur à cet égard.

[82]       Voici l'analyse que le registraire a faite de l'affidavit de Mme Bereskin :


[traduction] Dans son affidavit, Mme Bereskin affirme qu'elle a effectué des recherches dans la base de données CD-NAMESEARCH sur un CD-ROM compilé à partir des dossiers du Bureau canadien des marques de commerce en vue de repérer toutes les demandes actives et tous les enregistrements entrant dans les catégories internationales 3, 6, 8, 9, 12, 14, 16, 18, 20, 21, 24, 25, 26, 28, 30 et 34 et dont la marque de commerce renferme le mot GOLDEN, à l'exclusion bien sûr des marques inscrites au nom de l'opposante. Mme Bereskin a annexé à son affidavit les pages qu'elle a imprimées à la suite de sa consultation de base de données CD-NAMESEARCH et qui renferment les renseignements informatisés générés par l'ordinateur. L'opposante affirme qu'il ne faut accorder aucune valeur aux imprimés informatisés annexés à l'affidavit de Mme Bereskin étant donné qu'elle n'a pas vérifié l'exactitude des renseignements contenus dans ces relevés en les comparant aux dossiers réels du Bureau des marques de commerce [contre-interrogatoire de Bereskin, aux pages 5 et 6]. Toutefois, les renseignements stockés dans le système CD-NAMESEARCH proviennent du Bureau des marques de commerce. À cet égard, dans la décision Amway Corporation c. Nutravite Pharmaceutical Inc., une décision non encore publiée rendue par la Commission d'opposition des marques de commerce le 17 février 2001 au sujet de la marque de commerce NUTRAVITA (demande no 790,667), le commissaire Martin a tenu les propos suivants au sujet de l'admissibilité des résultats de recherches dans la base de données CD-NAMESEARCH :

[traduction] L'opposante s'est opposée à l'admissibilité des résultats de la recherche effectuée par Mme Harris au motif qu'ils constituent du ouï-dire inadmissible puisque la base de données dans laquelle Mme Harris a fait ses recherches appartient à un tiers, CDName Search Corp. En principe, l'objection de l'opposante n'est pas sans fondement. Toutefois, compte tenu du fait que le Bureau des marques de commerce fournit les renseignements qui sont versés dans la base de données du tiers en question et qu'elle s'en sert elle-même dans ses salles de recherche publiques, il y a tout lieu de penser que ces renseignements correspondent fidèlement à ceux qui se trouvent dans les archives du Bureau. Je considère donc comme fiables et admissibles les résultats des recherches de Mme Harris.

J'estime pareillement qu'en l'absence d'éléments de preuve permettant de penser que les imprimés informatiques renferment des inexactitudes en ce qui concerne les résultats des recherches dans la base de données, les imprimés sont admissibles en preuve dans le cadre d'une procédure d'opposition.

Si l'on fait abstraction des demandes en instance et des enregistrements des marques de commerce qui comprennent des mots qui équivalent sur le plan phonétique au mot « GOLDEN » , tels que notamment GOLD'N, les résultats des recherches de Mme Bereskin ont révélé l'existence de plus de 250 enregistrements de marques de commerce visant une vaste gamme de marchandises apparentées à celles qui sont visées par la présente demande. Compte tenu du nombre élevé de marques révélées par ces résultats de recherches, je m'attendrais à ce qu'un nombre passablement élevé de marques soient en usage et que les consommateurs soient par conséquent en mesure de faire la distinction entre ces marques sur le marché. Je suis d'avis que le registraire a bien évalué ces circonstances de l'espèce.

[83]       Le même raisonnement vaut pour l'affidavit de Patricia MacFarlane.

[84]       J'ai examiné les autres circonstances de l'espèce énumérées par le registraire et je souscris aux conclusions qu'il a dégagées à ce sujet.


[85]       En appel, Molson affirme que le registraire a commis une erreur en ne considérant pas les incidences de l'existence de sa « famille » de marques de commerce GOLDEN comme une des circonstances de l'espèce. Molson est d'avis que le public est susceptible de considérer qu'une autre marque qui présente la caractéristique commune d'appartenir à la même famille comme une marque désignant un autre des produits fabriqués par le propriétaire de la famille de marques de commerce.

[86]       La liste de marques de commerce de Molson qui comprennent le mot GOLDEN se trouve au paragraphe 2 de l'affidavit que Kimberley Anne Lane a souscrit le 18 avril 2001. Il ressort de l'examen de cette liste que le seul mot qui est commun à toutes les marques de commerce est le mot GOLDEN, mot qui a été jugé descriptif. La Cour d'appel fédérale a statué que le mot GOLDEN est un adjectif qui « tout comme « blond » , « ambré » , « pâle » , « brun » et « foncé » , ne [fait] que décrire des catégories dans lesquelles peut entrer une marque de bière donnée [...] (voir l'arrêt Molson Companies Ltd. c. John Labbatt Ltd., précité). Je ne suis pas convaincu que la liste de marques de commerce de Molson constitue une famille de marques de commerce.

[87]       Le registraire a tiré la conclusion suivante au sujet de la confusion :

[traduction] Pour appliquer le critère de la confusion, j'ai considéré qu'il s'agit d'une question de première impression et de souvenir imparfait. Même en considérant que les marchandises et la nature du commerce des parties sont les mêmes, je conclus malgré tout qu'il n'existe aucun risque sérieux de confusion entre la marque de commerce de la requérante et la marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin de l'opposante enregistrée sous le numéro 471 067, étant donné que la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT de la requérante et la marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin de l'opposante offrent peu de ressemblances sur le plan de la présentation, du son ou des idées suggérées qu'elles suggèrent lorsqu'on les examine dans leur ensemble. En outre, les éléments de preuve relatifs à l'état du registre qui ont été soumis par le biais de l'affidavit de Bereskin permet de penser qu'il y a une adoption relativement commune de la marque GOLDEN en ce qui concerne plusieurs des marchandises visées par la présente demande et par la marque de certification déposée de l'opposante.


En ce qui concerne les autres marques de commerce de l'opposante et, en particulier, sa marque de commerce GOLDEN déposée, je conclus également qu'il n'existe pas de risque sérieux de confusion entre la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT de la requérante et l'une des marques en question, étant donné que les marchandises de la requérante diffèrent des boissons alcoolisées fermentées associées aux marques de l'opposante même si, comme je l'ai déjà signalé, il pourrait y avoir un chevauchement en ce qui concerne la nature du commerce associé aux marchandises de la requérante et les boissons alcoolisées fermentées de l'opposante. De plus, il n'y a qu'une certaine ressemblance en ce qui concerne la présentation, le son et les idées suggérées par la marque de commerce de la requérante et la marque de commerce GOLDEN de l'opposante, qui est une marque qui est intrinsèquement faible dont il a été démontré seulement qu'elle n'est devenue bien connue au Canada qu'en combinaison avec sa marque maison MOLSON ou MOLSON's. Qui plus est, les éléments de preuve relatifs à l'état du registre qui ont été soumis par le biais de l'affidavit de Bereskin permet de penser qu'il y a une adoption relativement commune de la marque GOLDEN en ce qui concerne plusieurs des marchandises visées par la présente demande. Il ressort également de la preuve de la requérante qu'il y a eu un certain emploi par des tiers de marques de commerce incorporant le mot GOLDEN pour de la bière sur le marché canadien. Vu ce qui précède, je rejette le dernier moyen d'opposition invoqué par l'opposante.

Je suis d'avis que c'est à bon droit que le registraire a conclu qu'il n'existait pas de risque sérieux de confusion entre les marques de commerce en litige.

[88]       Le registraire a-t-il commis une erreur de droit et a-t-il outrepassé sa compétence en contestant la validité de la marque de commerce déposée GOLDEN de Molson dans le cadre de la procédure d'opposition?


Molson semble prétendre qu'en considérant la marque de commerce GOLDEN comme une marque descriptive, le registraire a en fait contesté la validité de son enregistrement. Bien que je convienne que, dans le contexte d'une procédure d'opposition, le registraire n'a pas compétence pour radier une marque de commerce du registre, je n'irais pas jusqu'à souscrire à l'interprétation que Molson fait de la décision du registraire en l'espèce. La Cour d'appel fédérale a rejeté un argument semblable à celui qu'invoque Molson dans l'arrêt Canada Games Co. c. Llumar Star Kites Inc. (1995), 64 C.P.R. (3d) 1 (C.F. 1re inst.), conf. : (1996), 69 C.P.R. (3d) 454 (C.A.F.). Ainsi que le juge Simpson l'a jugé dans l'affaire Canada Games, le registraire est tenu, aux termes de l'alinéa 6(5)a), d'examiner le caractère distinctif inhérent et acquis pour apprécier les risques de confusion entre les marques de commerce. La conclusion que le mot « golden » est descriptif a trait au caractère distinctif inhérent et à la force de la marque et non à sa validité en soi. C'est donc à bon droit que le registraire a estimé que la marque de commerce GOLDEN est descriptive, et il n'a pas outrepassé sa compétence ni statué sur la validité de l'enregistrement de la marque GOLDEN de Molson.

[89]      Absence de caractère distinctif en tant que moyen d'opposition distinct

Molson soutient que le registraire a commis une erreur de fait et de droit en ne tenant pas compte du quatrième moyen d'opposition qui était articulé à l'alinéa 3d) de la déclaration d'opposition modifiée et qui était fondé sur l'alinéa 38(2)d) de la Loi sur les marques de commerce, en l'occurrence l'argument que la marque de commerce revendiquée dans la demande ne distingue pas véritablement les marchandises en liaison avec lesquels la marque est employée et qu'elle n'est pas adaptée à les distinguer de celles de Molson. Molson affirme que les moyens tirés de la confusion et de l'absence de caractère distinctif sont des moyens d'opposition distincts et que c'est ainsi que le registraire aurait dû les traiter.

[90]       Il est de jurisprudence constante que la confusion avec une marque de commerce déposée et l'absence de caractère distinctif d'une marque de commerce dont on demande l'enregistrement sont deux motifs de contestation distincts. Ainsi, dans l'arrêt Miss Universe, Inc. c. Bohna, précité, la Cour d'appel fédérale déclare, à la page 387 :


Il y a lieu de se rappeler, dès le départ, que si l'on combine les alinéas 12(1)d), (2)b) et 38(2)d), la confusion avec une marque de commerce enregistrée et l'absence de caractère distinctif d'une marque de commerce dont on demande l'enregistrement sont deux motifs de contestation distincts, bien qu'en vertu de l'alinéa 6(5)a), le caractère distinctif inhérent d'une marque de commerce est un facteur à considérer lorsqu'il s'agit de déterminer s'il y a confusion.

[91]       Dans l'ouvrage Hughes on Trade Marks, édition à feuilles mobiles (Markham (Ontario: Butterworths, 1984), _ 32, les auteurs Hughes, Roger T. et T.P. Ashton déclarent ce qui suit au sujet du caractère distinctif (à la page 458) :

[traduction]Une demande qui a été approuvée et qui a été publiée aux fins d'opposition peut faire l'objet d'une opposition au motif qu'elle ne possède pas un caractère distinctif suffisant. Bien que le caractère distinctif d'une marque de commerce soit très souvent apprécié lors de l'examen de la question de savoir si la marque de commerce projetée crée de la confusion avec une autre marque de commerce au sens de l'article 6 de la Loi, il est possible de rejeter une demande d'enregistrement au motif qu'elle n'est pas distinctive, indépendamment de la question de la confusion, parce qu'il n'y a pas que l'opposant qui fait partie de ceux qui sont susceptibles d'employer la marque [...]

[92]       Dans le jugement Clarco Communications Ltd. c. Sassy Publishers Inc., (1994), 54 C.P.R. (3d) 418 (C.F. 1re inst.), le juge Denault déclare, à la page 428 :

Le moyen d'opposition en cause est énoncé à l'alinéa 38(2)d) de la Loi sur les marques de commerce : « la marque de commerce n'est pas distinctive. » Le terme « distinctive » est défini à l'article 2 de la façon suivante :

Relativement à une marque de commerce, celle qui distingue véritablement les marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire, des marchandises ou services d'autres propriétaires, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi.


Bien que le caractère distinctif d'une marque de commerce soit très souvent apprécié lors de l'examen de la question de savoir si la marque de commerce projetée crée de la confusion avec une autre marque de commerce au sens de l'article 6 de la Loi, il est possible de rejeter une demande d'enregistrement au motif qu'elle n'est pas distinctive, indépendamment de la question de la confusion, à condition que ce moyen soit invoqué dans une opposition. Il en est ainsi en raison des mots « autres propriétaires » figurant dans la définition, qui peuvent s'appliquer à toute autre personne, et en raison de l'écart entre les dates pertinentes pour l'examen de ces questions. L'appelante a soutenu que le paragraphe 17(1) s'appliquait au moyen fondé sur le caractère non distinctif, de façon que l'opposante ne pouvait s'appuyer sur la preuve relative aux « autres propriétaires » qui ne seraient pas ses prédécesseurs en titre. Je ne peux souscrire à cet argument. Le caractère distinctif est une caractéristique fondamentale et essentielle d'une marque de commerce. Le moyen fondé sur l'absence de caractère distinctif peut donc être soulevé en opposition par quiconque et s'appuyer sur le défaut de distinguer ou d'être adapté à distinguer la marque de commerce projetée des marchandises de tous les autres propriétaires.

Une demande d'enregistrement peut faire l'objet d'une opposition et peut être refusée pour cause d'absence de caractère distinctif indépendamment de la question de la confusion.

[93]       Molson affirme que le registraire n'a pas examiné et tranché le quatrième moyen d'opposition suivant lequel la marque de l'intimée n'est pas distinctive (alinéa 38(2)d) de la Loi). Or, le registraire a statué sur tous les moyens d'opposition car il précise bien dans sa décision qu'il [traduction] « rejette les autres moyens d'opposition de l'opposante » . La question qui se pose est celle de savoir s'il a tranché correctement le moyen tiré de l'alinéa 38(2)d).

[94]       Il ressort de l'examen des moyens d'opposition que l'argument tiré par Molson de l'absence de caractère distinctif était fondé sur la confusion. Voici en effet comment est libellé le moyen d) dans la déclaration d'opposition modifiée :

[traduction] L'opposante fonde son opposition sur le moyen énoncé à l'alinéa 38(2)d), en l'occurrence que la marque de commerce revendiquée dans la demande n'est pas distinctive eu égard aux faits articulés dans la présente déclaration d'opposition et aussi parce qu'elle n'est pas adaptée de manière à distinguer les marchandises en liaison avec lesquelles elle serait employée aux États-Unis ou que la requérante se propose d'employer des marchandises d'autres personnes, y compris celles de l'opposante, et la marque de commerce de la requérante n'est pas adaptée de manière à les distinguer ainsi.


Sans restreindre la portée de ce qui précède, compte tenu des faits articulés en l'espèce, la marque de commerce n'est pas distinctive de la requérante. L'opposante vend à grande échelle des boissons alcoolisées fermentées au Canada et les a annoncées en liaison avec les marques de commerce susmentionnées qui contiennent toutes le mot GOLDEN. Il est courant dans le commerce des brasseurs comme la requérante et l'opposante de commercialiser divers produits qui ne sont pas liés à la bière tels que les produits qui sont énumérés dans la présente demande. La commercialisation de ces produits est accessoire à l'entreprise principale du brasseur et sert à générer des recettes additionnelles et aussi à annoncer ses marques de bière. L'opposante vend à grande échelle des « produits dérivés » au Canada en liaison avec ses marques, qui contiennent toutes les mot GOLDEN. Par suite de ces ventes et de cette publicité à grande échelle de produits portant les marques de commerce en question, les consommateurs canadiens reconnaîtraient que le mot « golden » lorsqu'il est employé en liaison avec de tels produits est distinctif de l'opposante. Par conséquent, la marque de commerce revendiquée ne saurait être distinctive de la requérante. De plus, la marque de commerce GOLDEN est distinctive de l'opposante et, en conséquence, la marque de commerce revendiquée ne peut être distinctive de la requérante.

[95]       Le moyen d'opposition invoqué est que la marque de commerce n'est pas distinctive compte tenu des faits articulés par Molson dans la présente déclaration d'opposition, qui ont tous trait à la confusion. Les seuls éléments de preuve avancés par Molson au sujet du moyen tiré de l'absence de caractère distinctif est l'emploi qu'elle fait de ses propres marques de commerce, avec lesquelles elle affirme que la marque de Anheuser crée de la confusion.


[96]       En l'espèce, le registraire a examiné les arguments invoqués par Molson au sujet de la confusion en fonction de l'argument le plus solide, c'est-à-dire le moyen d'opposition tiré de l'absence d'enregistrabilité. C'était le moyen le plus solide qui permettait de conclure à la confusion parce que l'affaire serait jugée en fonction des éléments de preuve produits à la date pertinente de la décision du registraire au sujet de l'enregistrabilité. À cette date, Molson pouvait invoquer l'enregistrement de sa marque GOLDEN ainsi que sa marque de certification MOLSON GOLDEN & dessin. Elle ne pouvait les invoquer au moment de l'évaluation des deux autres moyens d'opposition tirés des alinéas 38(2)c) et d) étant donné que les marques de Molson n'étaient pas enregistrées lors de l'examen de ces moyens. La marque de commerce GOLDEN a été enregistrée le 30 juillet 1998 et la marque de certification MOLSON GOLDEN a été enregistrée le 13 février 1997. Le registraire a examiné la marque de commerce GOLDEN et l'emploi fait du mot « golden » jusqu'à la date de la décision et a conclu que la marque de Anheuser ne créait pas de confusion avec les marques de Molson.

[97]       Ainsi que je l'ai déjà dit, Molson s'est fondée sur les faits allégués au soutien des autres moyens d'opposition pour établir l'absence de caractère distinctif. En l'absence de conclusion de risque de confusion sur le fondement des éléments de preuve qui existaient à la date de la décision (on pouvait tenir compte d'un plus grand nombre d'éléments de preuve à ce moment précis qu'aux dates retenues pour se prononcer sur l'absence de droit à l'enregistrement et sur l'absence de caractère distinctif), le registraire ne pouvait conclure à la confusion lors des dates retenues pour se prononcer sur l'absence de droit à l'enregistrement et sur l'absence de caractère distinctif). La date pertinente pour évaluer l'absence de droit à l'enregistrement était la date de la demande d'enregistrement et, dans le cas de l'absence de caractère distinctif, la date applicable était celle du dépôt de l'opposition.

[98]       Comme aucun risque de confusion n'a été établi par les éléments de preuve présentés au sujet du moyen tiré de l'absence d'enregistrabilité, je suis d'accord avec le registraire pour dire qu'il est impossible de conclure à l'existence d'un risque de confusion pour appuyer le moyen tiré de l'absence de caractère distinctif. La confusion était le seul moyen invoqué par Molson au soutient de son argument que la marque de Anheuser n'est pas distinctive.


[99]       Comme nul n'a laissé entendre que la marque de commerce de Anheuser ne permettait pas de distinguer les marchandises de celle-ci de celles d' « autrui » qui étaient distinctes de celles de Molson, le moyen tiré de l'absence de caractère distinctif pouvait être jugé en même temps que la question de la confusion. En conséquence, le registraire n'a pas commis d'erreur en se prononçant comme il l'a fait sur le moyen d'opposition tiré par Molson de l'absence de caractère distinctif.

[100]     Le registraire a retenu la bonne date pour ce qui est de l'examen de la question de l'enregistrabilité et il a signalé que les autres moyens d'opposition devaient être examinés en fonction de dates différentes.

[101]     Molson a également invoqué comme moyen d'opposition l'absence de droit à l'enregistrement en vertu de l'alinéa 38(2)c) de la Loi. La date à retenir pour se prononcer sur la question de l'absence de droit à l'enregistrement est celle à laquelle est présentée la demande d'enregistrement de la marque. Or, le registraire a bien dit qu'il rejetait les autres moyens d'opposition de Molson, lesquels comprenaient de toute évidence le moyen tiré de l'absence de droit à l'enregistrement. La confusion est également le motif qui a été avancé pour justifier ce moyen d'opposition. J'appliquerais à ce moyen le même raisonnement que celui que j'ai suivi pour me prononcer sur le moyen tiré de l'absence de caractère distinctif et, comme les éléments de preuve présentés à l'appui du moyen tiré de l'absence d'enregistrabilité n'ont pas permis d'établir qu'il existait un risque de confusion, je suis d'accord avec le registraire pour dire qu'on ne pouvait conclure qu'il existe un risque de confusion qui justifie le moyen tiré de l'absence de droit à l'enregistrement.


[102]     Je suis d'avis que l'appel de Molson doit être rejeté, car les conclusions du registraire étaient bien fondées.

[103]     Les dépens de l'appel sont adjugés à Anheuser.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.          L'appel de Molson est rejeté;

2.          Les dépens de l'appel sont adjugés à Anheuser.

                                          « John A. O'Keefe »

ligne

                                                                                                             Juge                          

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                            T-926-01

INTITULÉ :                                          MOLSON CANADA

demanderesse

et

ANHEUSER-BUSCH, INCORPORATED

défenderesse

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                 LE 6 MAI 2003           

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                         LE JUGE O'KEEFE

DATE DES MOTIFS :                        LE 5 NOVEMBRE 2003         

COMPARUTIONS :              Adele Finlayson

John S. Macera            

Pour la demanderesse

Mark L. Robbins

Pour l'intimée

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Macera & Jarzyna

Ottawa (Ontario)

Pour la demanderesse

Bereskin & Parr

Toronto (Ontario)         

Pour l'intimée


COUR FÉDÉRALE

         Date : 20031105

Dossier : T-926-01

ENTRE :

MOLSON CANADA

                 demanderesse

et

ANHEUSER-BUSCH, INCORPORATED

                défenderesse

                                                                                         

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE

                                                                                                                                                                                


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.