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Date : 20030319

Dossier : IMM-1937-02

Ottawa (Ontario), le mercredi 19 mars 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE GIBSON

ENTRE :

                                                           VAN LAP NGUYEN

                                                                                                                                        demandeur

                                                                            et

                                       LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

                                                              ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

Aucune question n'est certifiée.

« Frederick E. Gibson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


Date : 20030319

Dossier : IMM-1937-02

                                                                                              Référence neutre : 2003 CFPI 325

ENTRE :

                                                           VAN LAP NGUYEN

                                                                                                                                        demandeur

                                                                            et

                                       LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

                                               MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE GIBSON

INTRODUCTION


[1]                 Ces motifs découlent d'une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section d'appel de l'immigration (la SAI) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a rejeté l'appel que le demandeur avait interjeté contre une décision d'un agent des visas, qui avait refusé la demande que le frère du demandeur avait présentée en vue de résider en permanence au Canada. Le demandeur avait parrainé la demande de résidence permanente de son frère à titre de parent. La décision ici en cause est datée du 16 avril 2002; elle est fondée sur la décision dans laquelle la SAI a conclu qu'elle n'avait pas compétence pour entendre l'appel interjeté par le demandeur.

[2]                 Voici ce que la SAI a dit dans ses motifs :

La question de savoir si un requérant [qui demande à résider en permanence au Canada] appartient à la catégorie des parents ou non est une question juridictionnelle, ce qui signifie que cet appel ne relève de la compétence de la Section d'appel de l'immigration que s'il est déterminé que le requérant appartient à la catégorie des parents.[1]

Plus loin dans ses motifs, la SAI a dit ce qui suit :

Pour tous les motifs énoncés ci-dessus je suis convaincu que tant que la mère de l'appelant [le demandeur en l'espèce] est en vie, le frère de l'appelant ne répond pas aux critères de l'alinéa 2(1)h) du Règlement [qui constitue une partie de la définition de « parent » ].

Le requérant [le frère du demandeur en l'espèce] n'étant pas un « parent » au sens du Règlement, la requête de l'intimé [le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration] visant à rejeter l'appel pour défaut de compétence est accordée. [...][2]

LE CONTEXTE LÉGISLATIF

[3]                 Le mot « parent » est défini comme suit au paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration de 1978[3] (le Règlement) :



« parent » À l'égard d'un répondant, l'une des personnes suivantes :

a) son conjoint;

b) un fils à sa charge ou une fille à sa charge;

c) son père ou sa mère;

d) son grand-père ou sa grand-mère;

e) son frère, sa soeur, son neveu, sa nièce, son petit-fils ou sa petite-fille, orphelins âgés de moins de 19 ans et non mariés;

f) sa fiancée;

g) un enfant de moins de 19 ans qu'il a l'intention d'adopter et qui est, selon le cas :

"member of the family class", with respect to any sponsor, means

(a) the sponsor's spouse,

(b) the sponsor's dependent son or dependent daughter,

(c) the sponsor's father or mother,

(d) the sponsor's grandfather or grandmother,

(e) the sponsor's brother, sister, nephew, niece, grandson or granddaughter, who is an orphan and is under 19 years of age and unmarried,

(f) the sponsor's fiancée,

(g) any child under 19 years of age whom the sponsor intends to adopt and who is



(i) un orphelin,

(ii) un enfant abandonné dont les parents sont inconnus,

(iii) un enfant né hors mariage qui a été confié à un bureau de protection de l'enfance aux fins d'adoption,

(iv) un enfant dont les parents sont séparés et qui a été confié à un bureau de protection de l'enfance aux fins d'adoption,

(v) un enfant dont l'un des parents est décédé et qui a été confié à un bureau de protection de l'enfance aux fins d'adoption;

h) une personne apparentée, indépendamment de son âge ou de son lien de parenté avec le répondant, dans le cas où le répondant n'a pas de conjoint, de fils, de fille, de père, de mère, de grand-père, de grand-mère, de frère, de soeur, d'oncle, de tante, de neveu ou de nièce :

(i) soit qui est citoyen canadien,

(ii) soit qui est résident permanent,

(iii) soit dont il peut par ailleurs parrainer la demande d'établissement.

(i) an orphan,

(ii) an abandoned child whose parents cannot be identified,

(iii) a child born outside of marriage who has been placed with a child welfare authority for adoption,

(iv) a child whose parents are separated and who has been placed with a child welfare authority for adoption, or

(v) a child one of whose parents is deceased and who has been placed with a child welfare authority for adoption, or

(h) one relative regardless of the age or relationship of the relative to the sponsor, where the sponsor does not have a spouse, son, daughter, father, mother, grandfather, grandmother, brother, sister, uncle, aunt, nephew or niece

(i) who is a Canadian citizen,

(ii) who is a permanent resident, or

(iii) whose application for landing the sponsor may otherwise sponsor;


[4]                 Le mot « répondant » est défini comme suit dans la même disposition du Règlement :



« répondant »

a) Citoyen canadien ou résident permanent âgés d'au moins 19 ans qui parrainent la demande d'établissement d'un parent et qui démontrent à l'agent d'immigration qu'ils résideront exclusivement au Canada, sans interruption, à partir de la date de leur engagement à l'égard de la demande jusqu'au moment où le parent se verra accorder le droit d'établissement au Canada et qu'ils résideront au Canada après ce moment;

b) citoyen canadien âgé d'au moins 19 ans qui parraine la demande d'établissement d'un parent visé au paragraphe 6(3) et qui démontre à l'agent des visas qu'il résidait exclusivement à l'étranger à la date de son engagement à l'égard de cette demande et qu'il résidera au Canada lorsque le parent se verra accorder le droit d'établissement au Canada.

"sponsor" means a person who

(a) is a Canadian citizen or permanent resident who is at least 19 years of age, sponsors an application for landing of a member of the family class and satisfies an immigration officer that the person will reside in Canada exclusively and without interruption beginning on the date of giving an undertaking in respect of the application for landing until the member is granted landing in Canada, and that the person will reside in Canada after that time, or

(b) is a Canadian citizen who is at least 19 years of age, sponsors an application for landing of a member of the family class referred to in subsection 6(3) and satisfies a visa officer that, at the time of giving an undertaking in respect of the application for landing, the person resided exclusively outside Canada and that the person will reside in Canada when the member is granted landing in Canada;


[5]                 Le début du paragraphe 5(2) du Règlement, avec des renvois internes qui ne sont pas ici pertinents, a été supprimé; l'alinéa a) de la disposition est ainsi libellé :


5.(2) [. . .] est autorisé à parrainer la demande d'établissement d'un parent tout citoyen canadien ou résident permanent qui satisfait aux exigences suivantes :

a) il est un répondant au sens des alinéas a) ou b) de la définition de « répondant » au paragraphe 2(1);

[...]

5.(2) . . . a person who is a Canadian citizen or permanent resident and who meets the following requirements is authorized to sponsor the application for landing of any member of the family class:

(a) the person is a sponsor within the meaning of paragraph (a) or (b) of the definition "sponsor" in subsection 2(1);

...


[6]                 Enfin, le début du paragraphe 6(1) du Règlement, avec encore une fois des renvois internes qui ne sont pas ici pertinents, a été supprimé; l'alinéa b) de cette disposition est ainsi libellé :



6. (1) [. . .] lorsqu'une personne appartenant à la catégorie de la famille présente une demande de visa d'immigrant, l'agent des visas peut lui en délivrer un ainsi qu'à toute personne à charge qui l'accompagne :

[...]

6. (1) . . . where a member of the family class makes an application for an immigrant visa, a visa officer may issue an immigrant visa to the member and the member's accompanying dependants if

...b) si le répondant et son conjoint, dans le cas où ce dernier a cosigné l'engagement visé à l'alinéa 5(2)b), satisfont aux exigences applicables énoncées à l'article 5, sous réserve de l'article 5.1 dans le cas d'un engagement donné à l'égard d'un parent qui entend résider au Québec;

[...]

(b) the sponsor and, if the sponsor's spouse has co-signed the undertaking referred to in paragraph 5(2)(b), the sponsor's spouse meet the applicable requirements set out in section 5, subject to section 5.1 in the case of an undertaking in respect of a member of the family class who intends to reside in the Province of Quebec;

...


[7]                 L'agent des visas dont la décision avait été portée en appel devant la SAI aurait, selon la SAI, notamment dit ce qui suit au frère du demandeur :

Nous avons été avisés par le Centre de traitement des cas de Citoyenneté et Immigration Canada, à Mississauga, Ontario, que la demande de parrainage présentée par [le demandeur en l'espèce] au Canada n'a pas été approuvée, pour le motif qu'il n'est pas autorisé, en vertu de l'alinéa 5(2)a) du Règlement sur l'immigration du Canada, à parrainer votre demande d'immigration à titre de parent. En conséquence, il m'est impossible en vertu de l'alinéa 6(1)b) du Règlement, de vous délivrer un visa à titre de membre de cette catégorie.[4]

LES POINTS LITIGIEUX

[8]                 Les seules questions mentionnées dans la présente demande se rapportaient, en premier lieu, à la norme de contrôle qu'il convient d'appliquer et, en second lieu, compte tenu de cette norme, à la question de savoir si la SAI avait commis une erreur dans son interprétation de l'alinéa h) de la définition du mot « parent » lorsqu'elle a conclu que tant que la mère du demandeur était vivante, le demandeur ne pouvait pas parrainer son frère en tant que « parent » .


ANALYSE

[9]                 L'interprétation du mot « parent » figurant au paragraphe 2(1) du Règlement est, j'en suis convaincu, une pure question de droit. Ceci dit, l'application des faits particuliers de la présente espèce à une interprétation appropriée de cette définition est une question de fait et de droit. Eu égard aux circonstances, je suis convaincu que la norme de contrôle qu'il convient d'appliquer à la décision en l'espèce est celle de la décision raisonnable simpliciter.

[10]            Dans la décision ExpressVu Inc. c. NII Norsat International Inc.[5], au paragraphe [35] des motifs, j'ai adopté les paragraphes suivants, ainsi que d'autres paragraphes, et j'ai modifié, comme il en est fait mention dans le passage suivant, les motifs que le juge LeGrandeur avait prononcés dans la décision R. c. Knibb[6] :

[TRADUCTION] La méthode téléologique moderne d'interprétation des lois cherche à déterminer l'objet et le but de la loi et à lui donner l'interprétation qui permettra mieux de les atteindre [...]

C'est la méthode qui doit être appliquée dans tous les cas, sans égard à la question de savoir si la ou les dispositions de la loi examinée sont ambiguës.

Le but ou l'objet de la loi doit être tiré de l'ensemble de celle-ci. L'interprétation d'une disposition doit être examinée dans le contexte de la loi dans son ensemble. Cette disposition ne peut être examinée isolément mais doit être étudiée dans le contexte de l'ensemble de la loi et de son objet et but déterminés. Driedger on the Construction of Statutes, 3e édition, à la p. 44, décrit ainsi ce processus :


"Dans l'analyse téléologique, chaque facteur [caractéristique] de la loi, de la conception d'ensemble aux menus détails linguistiques, est présumé avoir sa raison d'être. Il est présumé régler un problème, prévenir une difficulté ou, d'une quelconque façon, promouvoir les objectifs de l'assemblée législative."

À la page 34 [35] de Driedger, supra, il est dit :

"Suivant la méthode téléologique, la tâche législative définitive n'est pas la création d'un texte, mais l'adoption de principes et de buts appropriés ainsi que d'un plan de mise en _uvre. Selon cette méthode, le texte est considéré comme une carte ou un plan et l'essentiel du travail de l'interprétation ne porte pas vraiment sur la signification du texte mais plutôt sur les motifs de son adoption et les indications qu'il donne. Suivant la méthode téléologique, le tribunal s'incline devant le législateur non pas en décodant son langage mais en faisant en sorte que ses objectifs soient atteints."

L'objectif législatif peut être établi en se fondant sur une description de l'objectif émanant de sources autorisées, y compris les déclarations faites par les assemblées législatives elles-mêmes et aussi les descriptions de l'objectif figurant dans des sources extralégislatives telles que les rapports de commissions, le Hansard, les ouvrages de doctrine et d'autres sources semblables. Les tribunaux peuvent aussi déterminer l'objectif législatif en dégageant une interprétation plausible de l'objet à partir du texte de la loi lu dans son contexte (voir Driedger, Construction of Statutes, aux pages 50 et 51).

Plus souvent qu'autrement, la détermination du but ou de l'objet législatifs d'une loi ou d'un régime législatif se fait par l'application des deux méthodes susmentionnées.

[...]                                                                                      [certains renvois sont omis]

[11]            La Loi sur l'immigration elle-même renferme un énoncé de la politique canadienne d'immigration. Sous les titres « Politique canadienne d'immigration » et « Objectifs » , le début de l'article 3 et l'alinéa c) de cette disposition sont ainsi libellés :


3. La politique canadienne d'immigration ainsi que les règles et règlements pris en vertu de la présente loi visent, dans leur conception et leur mise en _uvre, à promouvoir les intérêts du pays sur les plans intérieur et international et reconnaissent la nécessité :

[...]

3. It is hereby declared that Canadian immigration policy and the rules and regulations made under this Act shall be designed and administered in such a manner as to promote the domestic and international interests of Canada recognizing the need

...


c) de faciliter la réunion au Canada des citoyens canadiens et résidents permanents avec leurs proches parents de l'étranger;

[...]

(c) to facilitate the reunion in Canada of Canadian citizens and permanent residents with their close relatives from abroad;

...


Je suis convaincu que la définition du mot « parent » figurant au paragraphe 2(1) du Règlement vise la reconnaissance de l'objectif susmentionné.

[12]            Dans la décision Mahmood c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[7], Monsieur le juge Evans (qui était alors juge à la Cour d'appel fédérale) a prononcé en première instance un jugement dans lequel il disait ce qui suit au paragraphe 16 :

Par contraste, la politique qui sous-tend l'alinéa 2(1)h) [du Règlement] semble viser principalement l'amélioration de la situation d'une personne qui n'a pas de parent au Canada.

Telle est la position du demandeur en l'espèce.

[13]            L'avocate du demandeur a cité deux décisions de la SAI à l'appui de la position adoptée par la Cour d'appel dans l'arrêt Mahmood. Dans la décision Mlinarich c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[8], le membre Buchanan, de la Section d'appel, a dit ce qui suit au paragraphe [20] de ses motifs :


Le tribunal est d'avis que l'alinéa 2(1)h) du Règlement présente une intention législative claire de déroger à la définition stricte du groupe familial et ce, pour de bonnes raisons : afin de soulager l'isolement auquel font face des citoyens canadiens ou des résidents permanents qui se retrouvent non seulement seuls au Canada, mais également sans aucun membre de leur famille, dont, par définition législative, ils peuvent par ailleurs parrainer la demande d'établissement. Selon le tribunal, l'intention de cette disposition est de soulager la dureté de cette situation et le fait de la restreindre, comme le propose le conseil du ministre, ne servirait qu'à amoindrir la disposition.

                                                                                         [non souligné dans l'original]

[14]            Dans la décision Sarmiento c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[9], le membre Whist, de la Section d'appel, a dit ce qui suit au paragraphe [15] :

[...] Le tribunal souscrit à l'avis de la commissaire Buchanan selon lequel l'intention du législateur était d'aider les personnes seules et sans famille au Canada. Cela ressemble à l'interprétation que le juge Evans croit qu'il faut donner à l'alinéa 2(1)h) lorsqu'il dit dans l'arrêt Mahmood que l'alinéa 2(1)h) « semble viser principalement l'amélioration de la situation d'une personne qui n'a pas de parent au Canada » . Ainsi, si un appelant a cessé d'avoir un parent au Canada qui a été initialement parrainé en vertu de l'alinéa 2(1)h), par exemple, en raison d'un décès, il devrait, de l'avis du tribunal, avoir la possibilité de parrainer un autre parent.

                                                                                                                  [Renvoi omis]

[15]            L'avocate du défendeur a attiré mon attention sur un certain nombre de décisions publiées; selon moi, la décision la plus pertinente est celle qui a été rendue dans l'affaire Rafizade c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[10] dans laquelle Monsieur le juge Cullen a fait la mise en garde suivante au paragraphe [13] :

Il n'incombe pas à la Cour d'étendre la portée de la notion de la famille, aux fins de l'immigration, au-delà de ce que le législateur a jugé opportun.


[16]            Selon moi, le paragraphe susmentionné de la décision Mlinarich, précitée, en particulier le passage de ce paragraphe que j'ai souligné, ainsi que la mise en garde que le juge Cullen a faite dans la décision Rafizade constituent des remarques particulièrement utiles en ce qui concerne la définition du mot « parent » et en particulier l'alinéa h) de cette définition, s'il est interprété à la lumière du principe primordial de la réunion des familles.

[17]            La définition du mot « parent » fait mention, aux alinéas a) à g), des parents d'un répondant éventuel et de la fiancée d'un répondant éventuel que le répondant éventuel peut parrainer en vertu du paragraphe 5(2) du Règlement. Je conclus que l'alinéa h) est un « mécanisme de dernier ressort » visant à assurer qu'un répondant éventuel qui a un parent, indépendamment de son âge ou de son lien de parenté, aura la possibilité de parrainer un parent lorsqu'il n'y a aucune personne mentionnée aux alinéas a) à g) de la définition qu'il « [...] peut par ailleurs parrainer » . Cette interprétation est conforme au principe de la réunion des familles sans fournir au répondant éventuel la possibilité de parrainer un parent qui n'appartient pas aux catégories mentionnées aux alinéas a) à g). Je suis convaincu que lorsqu'un répondant a recours aux alinéas a) à g), la solution de dernier ressort ne peut pas être adoptée simplement parce que toutes les personnes mentionnées aux alinéas a) à g) préfèrent ne pas rejoindre le répondant éventuel au Canada.


[18]            Je suis convaincu que l'interprétation que je retiens est conforme à une interprétation fondée sur l'objet du contexte législatif dans son ensemble, aux motifs énoncés par le juge Evans dans la décision Mahmood, à la mise en garde que le juge Cullen a faite dans la décision Rafizade et à la mention par le membre Buchanan, de la Section d'appel, dans la décision Mlinarich, d'un répondant éventuel qui n'a pas de membres de la famille qu'il pourrait par ailleurs, selon la définition législative, parrainer.

[19]            L'avocate du demandeur a soutenu que l'interprétation que je favorise a pour effet de n'attribuer aucun sens aux mots « dont il peut par ailleurs parrainer la demande d'établissement » qui figurent au sous-alinéa (iii) de l'alinéa h) de la définition du mot « parent » , et qu'il faut présumer que le législateur voulait que ces mots aient un sens. Je rejette cet argument. Je suis convaincu que les mots sur lesquels l'avocate attire mon attention sont tout à fait compatibles avec l'interprétation que j'ai donnée à la définition du mot « parent » , interprétée en tant qu'élément constitutif du régime législatif dans son ensemble, comme elle devrait l'être.

[20]            Eu égard aux faits de la présente espèce, le demandeur avait, au moment où la décision ici en cause a été rendue, un « parent » au sens des alinéas a) à g) de cette définition qu'il pouvait parrainer. Sa mère était vivante. La preuve que le demandeur a soumise devant la Cour, laquelle ne comprenait pas d'éléments de preuve émanant directement de sa mère, indiquait que la mère ne voulait pas venir au Canada et que sa santé lui avait posé des problèmes. La SAI a conclu que ces obstacles, lorsqu'il s'agissait pour le demandeur de parrainer sa mère avec succès, n'étaient pas déterminants. Elle a en outre conclu que la preuve relative aux obstacles était loin d'être convaincante et que, même si elle avait été tout à fait convaincante, elle n'aurait pas influé sur le résultat.

[21]            À mon avis, il était avec raison loisible à la SAI de tirer la conclusion à laquelle elle est arrivée et cette conclusion était en outre correcte.

CONCLUSION

[22]            Compte tenu de l'analyse qui précède, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

CERTIFICATION D'UNE QUESTION

[23]            L'avocate du demandeur a recommandé la certification de la question ci-après énoncée :

[TRADUCTION] Afin d'invoquer le droit d'un répondant de se fonder sur le sous-alinéa 2(1)h)(iii) du Règlement sur l'immigration pour parrainer un parent, les autres demandeurs éventuels doivent-ils prendre des mesures en soumettant une demande en vue de résider en permanence au Canada avant d'être exclus de la liste des parents qui peuvent être parrainés ou le simple refus de soumettre une demande de résidence permanente est-il suffisant, ou encore l'agent des visas peut-il déterminer s'il peut être fait droit à la demande du demandeur possible en tant que probabilité plutôt qu'en tant que possibilité?

[24]            L'avocate du demandeur affirme que la question susmentionnée est une question grave de portée générale qui serait déterminante dans le cadre de l'appel de la décision qui est ici rendue. Par contre, l'avocate du défendeur affirme qu'il ne s'agit pas d'une question grave de portée générale.

[25]            Je retiens la position de l'avocate du défendeur. Je conclus que la question proposée n'est pas une question grave de portée générale qui serait déterminante. Mon analyse n'accorde aucune importance quelle qu'elle soit au fait que la mère du demandeur n'était pas parrainée et qu'elle n'a pas demandé le droit d'établissement au Canada en se fondant sur un parrainage. L'essence de mon analyse est plutôt que lorsqu'un répondant a un parent qui vit à l'étranger et qui appartient à l'une des catégories de personnes visées aux alinéas a) à g) de la définition du mot « parent » figurant dans le Règlement, le répondant n'est pas autorisé à décider de parrainer une personne qui est visée à l'alinéa h) de cette définition. Tels étaient les faits mis à ma disposition.

[26]            À l'audience, l'avocate du demandeur a soutenu qu'il faudrait tenir compte du texte législatif établi en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés[11] et de son règlement d'application. Bien sûr, la SAI n'avait pas ce texte à sa disposition lorsque la décision ici en cause a été rendue. En outre, ce texte législatif ne constituait pas une simple modification du texte qui était à la disposition de la SAI, ce dernier ayant plutôt été complètement abrogé et remplacé. Dans ces conditions, et j'ai tiré cette conclusion à l'audience, je suis convaincu qu'il ne conviendrait absolument pas de tenir compte du nouveau texte législatif et réglementaire à ma décision.


[27]            En outre, étant donné qu'un nouveau texte législatif et réglementaire complet a été établi depuis que la décision ici en cause a été rendue, je conclus que la décision que je rends en l'espèce peut difficilement être considérée comme ayant une « portée générale » . En effet, il se peut fort bien que ce soit la dernière décision à être rendue sur des faits tels que ceux dont j'ai été saisi, selon un texte législatif et réglementaire qui n'est plus en vigueur.

[28]            Eu égard aux circonstances, je refuse de certifier la question qui a été proposée pour le compte du demandeur ou en fait toute autre question.

« Frederick E. Gibson »

Juge

Ottawa (Ontario),

le 19 mars 2003.

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                      IMM-1937-02

INTITULÉ :                                                                     VAN LAP NGUYEN

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                                             TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                           LE 4 MARS 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                           MONSIEUR LE JUGE GIBSON

DATE DES MOTIFS :                                                  LE 19 MARS 2003

COMPARUTIONS :

Mme Mary Lam                                                                  POUR LE DEMANDEUR

Mme Angela Marinos                                                          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Cecil L. Rotenberg, c.r.                                               POUR LE DEMANDEUR

Avocat

North York (Ontario)

Tél. : (416) 368-0900

Sous-procureur général du Canada                                  POUR LE DÉFENDEUR

(Urszula Kaczmarczyk)

Toronto (Ontario)

(416) 954-8324



[1]              Dossier du tribunal, page 3.

[2]              Dossier du tribunal, page 7.

[3]              DORS/78-172.

[4]              Dossier du tribunal, page 2.

[5]              [1998] 1 C.F. 245 (C.F. 1re inst.); confirmé en appel (1997), 81 C.P.R. (3d) 345.

[6]            [1997] A.J. no 513 (C. prov.) (Q.L.), publié à [1997] 8 W.W.R. 115, confirmé en appel [1998] A.J. no 628.

[7]              [2001] 1 C.F. 563 (1re inst.).

[8]              [2002] I.A.D.D. no 1887 (QL).

[9]              [2002] D.S.A.I. no 911 (QL).

[10]              (1995), 30 Imm.L.R. (2d) 261 (C.F. 1re inst.).

[11]              L.C. 2001, ch. 27.

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