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Date : 20030908

Dossier : IMM-4724-02

Référence : 2003 CF 1038

Ottawa (Ontario), le 8 septembre 2003

Présent : L'honorable juge Blais

ENTRE :

                               BARRY ISMAEL

                                                                Applicant

                                   and

                      THE MINISTER OF CITIZENSHIP

                             AND IMMIGRATION

                                                               Respondent

                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire à l'encontre de la décision de Lamine Diallo [le tribunal] de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié [la CISR] de la Section de la protection des réfugiés, en date du 20 septembre 2002, dans laquelle il a été décidé que Ismael Barry [le demandeur] n'est pas un réfugié au sens de la Convention selon l'article 96 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés [la Loi] ni une personne à protéger selon l'article 97 de cette Loi.


FAITS ALLÉGUÉS

[2]                 Le demandeur est citoyen de la République de la Guinée. Il est né le 1er janvier 1977 à Conakry.

[3]                 Il allègue avoir une crainte bien fondée de persécution de la part des autorités de son pays du fait de ses opinions politiques et de son appartenance à un groupe social. Également, il prétend qu'il y aurait une menace à sa vie, qu'il risquerait d'être soumis à la torture ou à des traitements cruels et inusités s'il retournait en République de la Guinée.

[4]                 Voici les événements qui sont à la source de sa revendication du statut de réfugié au Canada.

[5]                 Après avoir obtenu son baccalauréat au cours de l'année 1996, le demandeur a décidé de se lancer en affaires. Son oncle, qui possédait de prospères commerces, a offert au demandeur de travailler pour lui en tant que superviseur de ses magasins.

[6]                 Monsieur Boubacar était alors un conseiller actif au sein du Conseil communal de l'Union pour le progrès et le renouveau [l'UPR], parti politique en opposition au Parti de l'unité et du progrès [le PUP], le parti au pouvoir.

[7]                 L'UPR a été fondé en septembre 1998, suite à la fusion de deux partis, le Parti pour le renouveau et le progrès [le PRP] et l'Union pour la nouvelle République [l'UNR].

[8]                 Le demandeur soumet être membre de l'UPR depuis 1997, ce qui logiquement cause un problème considérant que le parti a été fondé en 1998. Or, cet élément sera discuté plus loin dans cette décision.

[9]                 Au sein de l'UPR, le demandeur contribuait à la sensibilisation des militants dans le but de dénoncer les abus du PUP.

[10]            En 2001, le PUP a commencé à faire de la propagande en vue de préparer la population à la prolongation du mandat du Président Lansana Conté.

[11]            Or, le 30 septembre 2001, l'UPR a organisé une manifestation pour mobiliser et sensibiliser la population contre les manoeuvres du PUP.

[12]            Suite à cet événement, plusieurs manifestants auraient été arrêtés. Deux jours plus tard, des militaires se seraient présentés au domicile de monsieur Boubacar et du demandeur, à la recherche de l'oncle, au motif qu'il incitait les jeunes au désordre public et à la révolte à l'encontre du gouvernement.

[13]            Or, monsieur Boubacar étant absent, les militaires auraient embarqué le demandeur et l'auraient conduit à la « sûreté » , où sans aucune forme de procès, on l'aurait emprisonné pendant près de deux mois dans des conditions inhumaines.

[14]            Pendant son incarcération, le demandeur allègue avoir subi de la torture au point où il aurait accepté la proposition du commandant à l'effet qu'on le libère sous la condition qu'il leur livre son oncle.

[15]            C'est ainsi que le 15 novembre 2001, le demandeur a été libéré avec comme instructions d'entrer en contact avec son oncle et de se présenter avec lui à la « sûreté » trois jours plus tard.

[16]            Le demandeur aurait réussi à contacter son oncle et l'aurait alors informé de la mission qui lui avait été confiée. Monsieur Boubacar aurait recommandé à son neveu de ne pas se présenter à la « sûreté » et de quitter la maison afin de se réfugier chez un ami dans la commune de Ratoma.


[17]            Le matin du 20 novembre 2001, un employé de monsieur Boubacar est venu avertir le demandeur que des militaires avaient fait une descente à la maison de son oncle, alors qu'ils les recherchaient.

[18]            Le soir même, l'ami chez qui le demandeur se réfugiait l'a informé que la situation était grave et qu'il ne pouvait plus rester chez lui; monsieur Boubacar lui ayant remis de l'argent pour qu'il puisse organiser la fuite du demandeur.

[19]            Le 23 novembre 2001, avec des documents que l'ami de son oncle lui avait procurés, le demandeur a pu quitter la République de la Guinée pour arriver au Canada le 24 novembre 2001 via le Maroc et les États-Unis. Le même jour, il a revendiqué le statut de réfugié.

[20]            Le 23 juillet 2002, l'audience de la revendication du statut de réfugié du demandeur a eu lieu devant la Section de réfugié de la CISR.

[21]            Le 20 septembre 2002, le tribunal a rejeté la revendication du demandeur.

[22]            C'est cette décision qui fait l'objet de la présente demande de contrôle judiciaire.


QUESTION EN LITIGE

[23]            Le tribunal a-t-il commis une erreur justifiant l'intervention de la Cour en concluant que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention?

ANALYSE

Norme de contrôle

[24]            Dans l'arrêt Ding c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] A.C.F. n ° 1643, madame le juge Layden-Stevenson réitère que la norme de contrôle applicable lorsqu'il s'agit d'une question d'appréciation des faits est celle de manifestement déraisonnable :

[par. 5] La norme de contrôle applicable à la décision de la SSR, un tribunal spécialisé, est celle de la décision manifestement déraisonnable, exception faite de l'interprétation des lois pour laquelle la norme est celle de la décision correcte (voir Pushpanathan c. Canada, [1998] 1 R.C.S. 982). La SSR a pleine compétence pour apprécier la plausibilité d'un témoignage et, dans la mesure où les inférences qu'elle tire ne sont pas déraisonnables au point d'attirer l'intervention de la Cour, ses conclusions sont à l'abri du contrôle judiciaire. Voir Aguebor c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.). La SSR n'est pas tenue d'interroger un revendicateur sur les conclusions d'invraisemblance qu'elle a tirées (voir Matarage c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 460; Sarker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1998), 45 Imm. L.R. (2d) 209; Kahandani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 1769).

[25]            Également, cette Cour a maintes fois établi que la CISR occupe une position privilégiée dans son appréciation de la crédibilité d'un revendicateur. Ceci fut réitéré dans l'arrêt Rahaman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. n ° 1800, confirmé par la Cour d'appel fédérale, [2002] 3 C.F. 537 :

[par. 38] Il est clair en droit que la Commission a le pouvoir discrétionnaire pour évaluer la crédibilité d'un demandeur et qu'elle est la mieux placée pour le faire: Dan-Ash c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (1988), 93 N.R.33 (C.A.F.).

Le tribunal a-t-il commis une erreur justifiant l'intervention de la Cour en concluant que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention?

[26]            Afin de déterminer si le tribunal a commis une erreur en arrivant à sa conclusion que le demandeur n'était pas crédible, conclusion fondée sur les incohérences et les contradictions qu'il allègue, j'ai examiné avec soin la preuve documentaire au dossier.

[27]            J'ai lu le procès-verbal du début à la fin. À mon sens, le demandeur a répondu au mieux de ses connaissances. De plus, ses réponses sont en majorité conséquentes et claires. C'est plutôt le tribunal qui semblait ne pas comprendre et même détourner les réponses du demandeur. Pour des fins de précision, suit une liste d'éléments qui selon moi ont mal été interprétés ou contredits, et ce, sans fondement, de la part du tribunal.


[28]            Le premier élément concerne l'année à laquelle le demandeur est devenu membre de l'UPR. Dans sa décision, le tribunal a écrit 1977 plutôt que 1997. Or , il est évident que ce faisant, le tribunal a simplement fait une erreur cléricale.

[29]            Le débat porte plutôt sur ce qui suit. Il est vrai que la preuve documentaire et le témoignage oral du demandeur révèlent que l'UPR a été fondé en 1998. Or, celui-ci affirme être membre du parti depuis 1997, ce qui échappe au tribunal. Le tribunal écrit : « Lorsque confronté, monsieur n'a pas pu fournir une explication pouvant être retenue crédible » . Je ne suis pas d'accord. Le demandeur explique de façon claire le fait que l'UPR a été fondé suite à la fusion de deux partis, soit le PRP et l'UNR. Or, puisqu'il est devenu membre du PRP en 1997, et que ce dernier parti a fusionné avec l'UNR pour fonder l'UPR, le demandeur soumet qu'il est membre de l'UPR depuis 1997 :

Q. Le parti existe depuis quand?

R. Le parti UPR existe depuis 1... depuis fin 1998, avant c'était le PRP.

                                                                           . . .

Q. Il existe depuis quand le PRP?

R. Le PRP existe depuis 1992.

Q. Comment pouvez-vous devenir membre d'un parti qui n'existe pas encore?


R. Bon, la parti... la, L'UPR c'est la fusion de deux (2) partis INR et PRP. Maintenant c'est... lorsque les élections de 98 est arrivées, qu'ils ont fait la fusion de deux (2) partis pour faire un seul parti. Maintenant, moi j'ai adhéré dans le parti en 1997.

                                                                           . . .

[Dossier certifié, pages 141-142.]

[30]            L'historique des partis est même confirmé par la preuve documentaire, soit dans un document intitulé "Guinea - Introductory Survey", aux pages 60 à 75 du Dossier certifié (voir page 72 particulièrement).

[31]            Je ne vois pas ce qu'il y a d'invraisemblable dans le fait que le demandeur, étant membre d'un parti (PRP) depuis 1997, alors que ce parti fusionne avec un second (UNR) pour en créer un troisième (UPR) en 1998, se dise membre du troisième (UPR) depuis 1997. Il est vrai que de dire 1998 aurait été plus juste. Or, la question pertinente est « le demandeur est-il crédible » , et non « a-t-il donné la réponse la plus juste » . Je suis d'avis que le demandeur a fourni une explication crédible.

[32]            Deuxièmement, le tribunal détermine que le demandeur n'a pas répondu aux questions concernant son oncle, à savoir que selon le tribunal, l'oncle serait un membre du PUP plutôt que de l'UPR.

[33]            À cet effet durant l'audience, le demandeur mentionne ceci :

R. Mon oncle Elhaadj Boubacar Diallo, lui il fait le commerce, c'est un membre de l'UPR.

                                                                           . . .

Q. Depuis quand il est membre de l'UPR?

R. Depuis à la création du parti ce qu'il (inaudible).

Q. En 98?

R. En 92.

                                                                           . . .

R. Depuis 90, toute personne qui adhère de l'UPR avec la fusion de deux (2) partis, on leur remet la carte-là.

(Dossier certifié, pages 157-158-163)

R. ... Son nom vrai c'est Boubacar Diallo, c'est quand il est allé à la Mecque et revenu, on a, on a augmenté Elage.

                                                                           . . .

Q. Il a quitté, à votre connaissance, quand le pays?

R. Bon, à ma connaissance, lorsque son ami m'a remis le passeport, il m'a dit que mon oncle a quitté la Guinée. Il lui a dit qu'il va au Sénégal.

Q. Ça c'est quand ça?

R. Ça c'est le 20 novembre, qu'il m'a dit ça.

                                                                           . . .

R. 2001.

(Dossier certifié, pages 188-190)


Q. Est-ce que, à votre connaissance, il aurait pu se présenter aux élections de 2001 ou de 2002 là ou de 2000?

                                                                           . . .

R. Non lui il n'était pas présenté. On l'a nommé comme conseiller communal à la mairie de la ville.

                                                                           . . .

Q. Et combien il y en a des représentants du UPR aux élections à Labé, à la commune?

R. Vingt-trois (23).

Q. Pourquoi ce matin vous nous avez dit dix (10) maintenant vous nous dites vingt-trois (23)?

R. Moi, c'est dix (10) que je connais. Le nom, le nom de dix (10) personnes que je connais.

- Mais ce matin, on vous a demandé combien il y en avait, pas combien vous en connaissiez. Vous nous avez dit, j'en connais cinq (5).

R. Alors ça été une erreur de ma part.

                                                                           . . .

Q. Est-ce qu'il se pourrait que votre oncle soit du PUP?

R. Il n'a, il n'a jamais accepté d'être au côtés du PUP. Le PUP l'a proposé pour qu'il soit le représentant de la jeunesse à Labé, mais il n'a pas accepté.

Q. Est-ce qu'il pourrait que le PUP le propose à nouveau?

R. Je ne crois pas, non.

- Vous nous avez dit qu'il était au Sénégal, à votre connaissance.

                                                                          . . .

Q. Est-ce qu'il est là parce que sa vie est en danger ou est-ce que c'est un voyage de tourisme?

R. Bon, selon son ami, ce que son ami m'a dit, qu'il a quitté la Guinée parce qu'il ne pourra pas rester en Guinée dans, en ce moment. Donc, il préfère d'aller au Sénégal, rester là-bas pour sauver sa vie.

                                                                           . . .

- Mais, si on vous disait aujourd'hui que votre oncle faisait partie du PUP.


Q. Qu'est-ce que vous nous répondriez?

R. Bon, je vais répondre non, il ne ferait pas partie du PUP.

Q. Mais s'il l'était est-ce que vous auriez une crainte de retourner?

R. S'il était parti du PUP, je n'aurais pas quitter la Guinée, j'allais rester encore en Guinée.

(Dossier certifié, pages 191-192-193196-198)

[34]            Le tribunal se base sur le document « Listes nationales à la proportionnelle des candidats » pour émettre la prétention que l'oncle du demandeur semble plutôt être membre du PUP. Effectivement, le 76e candidat dans la liste du PUP est

« Boubacar Diallo » .

[35]            Cependant, depuis qu'il a fait le pèlerinage à la Mecque, le nom complet de l'oncle est El Hadj Boubacar Diallo. Je ne vois pas pourquoi on aurait enlevé « El Hadj » du nom de l'oncle du demandeur sur la liste, considérant la reconnaissance du pèlerinage dans la culture.

[36]            En outre, on peut lire plusieurs autres candidats portant « El Hadj » comme nom. Il me semble donc tout à fait vraisemblable que ce soit un autre Boubacar Diallo, qui n'a pas fait le pèlerinage à la Mecque, qui soit énuméré comme membre du PUP.

[37]            Cette affirmation est encore plus pertinente lorsque l'on constate le nombre de personnes portant le même nom sur la liste, notamment :

UPR :                                                           60-Diallo Abdoulaye

74-Diallo Abdoulaye

Les « Verts » (PEG) :                67-Lamine Camara

Parti du Peuple de Guinée:     29-Lamine Camara

PUD :                                                          50-Diallo Ibrahima

                                                                                     57-Diallo Ibrahima

                                                                                      58-Barry Abdoulaye

                                                                                     70-Barry Abdoulaye

74-Barry Ibrahima

UDS :                                         1-Barry Ibrahima

Liste des Candidats Uninominaux :        12- Barry Ibrahima, UPR

[38]            De plus, cette liste date du 22 juillet 2002, alors que le demandeur et son oncle auraient quitté le pays depuis novembre 2001.

[39]            À la lecture du procès-verbal de l'audience et de la preuve documentaire (principalement, « Listes nationales à la proportionnelle des candidats » ainsi que "Guinea - Introductory Survey"), je suis d'avis que le tribunal a tiré des inférences déraisonnables du témoignage du demandeur, au point d'attirer l'intervention de la Cour.


[40]            Troisièmement, le tribunal trouve invraisemblable que le demandeur ait pu passer sans problème les contrôles de l'aéroport. Or, ce dernier affirme avoir voyagé avec un passeport français. Il aurait détruit ce passeport sous les conseils de celui qui le lui a fourni :

R. Il était au nom de Shérif Galou (phonétique).

                                                                           . . .

R. La date de naissance c'était le 15 octobre 1973, à Marseille.

                                                                           . . .

R. Bon, ça c'est le monsieur qui m'a remis le passeport, il m'a dit, même ceux qui me demandent à la frontière de ne pas donner le nom. Maintenant, une fois que je suis rentré au Canada, moi j'ai jugé nécessaire de vous dire la vérité, de ne pas dire que je connais pas le nom, parce qu'il m'avait dit, quoiqu'il arrive à la frontière, de ne pas dire... de ne pas donner aucune personne, le nom qui se figurait dans le passeport.

Q. Pourquoi?

                                                                          . . .

R. Oui, il m'a dit que pour ne pas que les autorités sachent le nom que je figurais dans le passeport, pour ne pas créer le problème au monsieur, du propriétaire du passeport, ce qu'il m'avait dit.

(Dossier certifié, pages 133-155)

[41]            Je pense que le passage suivant de la décision de la Cour d'appel fédérale Attakora c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), (1989) 99 N.R. 168; [1989] A.C.F. no 444, au paragraphe 7, écrit sous la plume du juge Hugessen, est applicable :


Finalement, la Commission a conclu que la crédibilité du témoignage du requérant était affaiblie par sa déclaration que, dans l'avion le conduisant au Canada, il avait détruit un passeport, un visa de visiteur canadien ainsi qu'un billet d'avion qui portaient tous le nom d'un ami et avaient été utilisés par le requérant pour lui permettre de s'enfuir. Après avoir noté que le requérant avait dit qu'il avait détruit les documents en question parce qu'il avait peur que, fussent-ils découverts, il soit arrêté et renvoyé, la Commission a conclu tout simplement que cette partie du témoignage du requérant manquait de crédibilité.

La conclusion tirée par la Commission sur ce point est, pour le moins, intriguante. Il n'y a certainement rien en soi d'incroyable dans la déclaration d'un réfugié que, pour éviter d'être repéré et arrêté, il a détruit des faux documents de voyage après que ceux-ci eurent rempli leur objet. Dans les circonstances de la présente affaire, la destruction de tels documents n'aurait pu d'aucune manière être conçue comme pertinente à quelque question devant être tranchée par la Commission [Note: Sur ce point, voir l'arrêt Moustafat Salamat c. Commission d'appel de l'immigration et autres, No de greffe A-223-87, jugement en date du 8 mars 1989]. Je puis seulement conclure que l'insistance mise par la Commission sur son importance est fondée sur une conception erronée du droit. La Commission croit-elle que seules les personnes qui arrivent au pays avec des documents de voyage en règle peuvent être des réfugiés? Ou que les personnes arrivant avec de faux documents ont quelque obligation de les préserver?

[42]            En ce qui a trait à la conclusion du tribunal que le demandeur « n'est pas exposé ni une menace à sa vie ni au risque de subir des traitements ou peines cruels et inusités » et qu'il n'y a « aucun risque qu'il soit soumis à de la torture en République de la Guinée » , je suis d'avis que les passages suivants du U.S. Department of States Report, émis le 4 mars 2002, démontrent le contraire :

The Government's human rights record was poor; although there were some improvements in a few areas, serious problems remained in many others. The Government's tight and sometimes partisan control of the electoral process, both in the 1998 presidential election and the deeply flawed 2000 municipal elections, its refusal to create an independent electoral oversight mechanism; and its prohibition of nongovernmental broadcast media, effectively restricted citizen's right to change their government. Serious human rights abuses include: Extrajudicial killings; disappearances; use of torture, beatings, and rape by police and military personnel; and police abuse of prisoners and detainees. ...

                                                                            ...


No action was taken against the security forces who killed six persons, including a university professor, in Conakry in November 2000. There was no investigation into the clashes between security forces, ruling party militants, and opposition party supporters during the 2000 municipal elections, which resulted in the deaths of eight persons and injuries to several others. ...

                                                                            ...

Security forces regularly used arbitrary arrest and detention, despite procedural privisions in the Penal Code designed to safeguard detainees. ...

                                                                            ...

(Dossier certifié, pages 44-45-47)

[43]            Pour toutes ces raisons, je suis d'avis que la présente demande de contrôle judiciaire devrait être accordée.

                                           ORDONNANCE

[1]                 La Cour accueille la présente demande de contrôle judiciaire, le dossier est retourné à la CISR afin qu'il soit reconsidéré par un tribunal différemment constitué, à la lumière de la présente décision.

[2]                 Aucune question pour certification.

                    Pierre Blais                     

                         J.C.F.


                                       COUR FÉDÉRALE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                         

DOSSIER :                 IMM-4724-02

INTITULÉ :              BARRY ISMAEL v. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                                Montréal

DATE DE L'AUDIENCE :                              6 août 2003

MOTIFS ET ORDONNANCE : Monsieur le Juge Blais

DATE DES MOTIFS :                                     8 septembre 2003

COMPARUTIONS:

Monsieur Ismael Barry                                                     POUR LE DEMANDEUR

Me Suzon Létourneau                                           POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

                                                                            

Monsieur Ismael Barry                                                     POUR LE DEMANDEUR

1825, Sainte-Rose

Appartement 621

Montréal (Québec) H2K 4M1

Téléphone: (514) 527-4630                                             

Ministère de la Justice Canada                                        POUR LE DÉFENDEUR

Complexe Guy-Favreau

200, boul. René-Lévesque Ouest

Tour Est, 5e étage

Montréal (Québec) H2Z 1X4                                          


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