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Date : 20030725

Dossier : DES-4-02

Référence : 2003 CF 918

DANS L'AFFAIRE D'un certificat signé en vertu du paragraphe 77(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001., ch. 27 (la Loi);

ET DANS L'AFFAIRE DU dépôt de ce certificat à la Cour fédérale du Canada en vertu du paragraphe 77(1) et des articles 78 et 80 de la Loi;

ET DANS L'AFFAIRE DE Mohamed Harkat.

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE DAWSON

[1]         Voici mes motifs rendus oralement à Gatineau (Québec), le 25 juillet 2003.


[2]         Au cours de l'audition tenue pour donner à M. Harkat la possibilité d'être entendu en ce qui concerne son inadmissibilité, M. Harkat a présenté une requête à la Cour dans laquelle il demande deux choses. Premièrement, il demande une ordonnance obligeant un employé bien informé du SCRS à comparaître pour témoigner au sujet du résumé du rapport sur les renseignements de sécurité fourni antérieurement à M. Harkat. Deuxièmement, il demande une ordonnance annulant le certificat de sécurité en raison de ce que M. Harkat considère comme un abus de procédure découlant de ce qu'il qualifie de menace abusive de poursuites pénales. À défaut d'une annulation du certificat, M. Harkat demande, d'après ce que je comprends, que je délivre une ordonnance ou une interprétation des dispositions législatives applicables de manière à assurer au témoin éventuel de M. Harkat, M. Marchessault, que M. Marchessault ne peut pas être poursuivi pour son témoignage en Cour, ou, subsidiairement, que je délivre une ordonnance de la nature d'une prohibition interdisant au procureur général du Canada d'intenter toute poursuite contre M. Marchessault.

[3]         Je traiterai premièrement de la demande visant à faire comparaître un employé du SCRS pour témoigner au sujet du résumé.

[4]         Je pense qu'il est utile d'expliquer adéquatement ce qu'est le résumé.

[5]         La Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), a notamment pour objet, comme l'énonce l'article 3 de la Loi, premièrement, de garantir la sécurité des Canadiens, et, deuxièmement, de promouvoir la sécurité par l'interdiction de territoire aux personnes qui constituent un danger pour la sécurité. En même temps, la Loi exige que les décisions prises en vertu de la Loi soient conformes à la Charte canadienne des droits et libertés.

[6]         L'article 78, qui régit le déroulement de la procédure en l'espèce, traduit la volonté du législateur de réaliser ces deux objectifs.


[7]         L'article 78 oblige le juge désigné pour décider du caractère raisonnable du certificat de sécurité à garantir la confidentialité des « renseignements » justifiant le certificat et des « autres éléments de preuve qui pourraient lui être communiqués si, selon le juge, » la divulgation de ces renseignements ou de ces éléments de preuve « portait atteinte [...] à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui » . Le juge est également tenu de fournir à la personne qui est nommée dans le certificat de sécurité un résumé des renseignements ou de la preuve qui permet à la personne d'être « suffisamment informé[e] des circonstances ayant donné lieu au certificat » . Le juge ne doit divulguer « aucun élément dont la divulgation porterait atteinte, selon lui, à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui » .

[8]         Il s'ensuit qu'à moins que le juge conclue que la divulgation des renseignements ou de la preuve présentés au juge porterait atteinte à la sécurité nationale ou la sécurité d'autrui, la preuve ou les renseignements présentés au juge seront divulgués à la personne nommée dans le certificat. Le droit de la personne d'être suffisamment informée des circonstances ayant donné lieu au certificat est restreint seulement lorsque la divulgation porterait atteinte, selon le juge, à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui.

[9]         Voilà l'exercice auquel j'ai procédé avec soin lorsque le certificat de sécurité a été déposé à la Cour. Je n'oublie jamais que le caractère public de la procédure judiciaire constitue une des protections importantes de notre société libre et démocratique. En même temps, notre société libre et démocratique dépend de la protection de la sécurité de notre pays.


[10]       Le résumé représente donc la divulgation des renseignements justifiant le certificat, à l'exception des renseignements dont j'ai décidé qu'ils ne pouvaient pas être divulgués parce que cela porterait atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui.

[11]       Revenant à la requête dont je suis saisie, les écrits déposés pour le compte de M. Harkat portaient à croire qu'il demandait en réalité une divulgation plus étendue des faits justifiant le certificat. Par exemple, l'avis de requête énonçait, entre autres motifs, que M. Harkat [traduction] « a le droit d'examiner le fondement et les bases factuels des allégations formulées contre lui telles que divulguées dans le résumé. »

[12]       Si M. Harkat demande effectivement une divulgation plus étendue des faits qui justifient le certificat, je conviens avec les procureurs des ministres que la requête devrait être rejetée. Elle devrait être rejetée parce que le résumé divulgue tous les faits qui, à mon avis, peuvent être divulgués, et parce que M. Harkat a déjà présenté sans succès une requête visant à obtenir une divulgation plus étendue.

[13]       Cependant, dans sa plaidoirie, le procureur de M. Harkat a insisté à plusieurs occasions pour dire qu'il ne demandait pas la divulgation de faits additionnels. Il a dit qu'il souhaite plutôt procéder à un interrogatoire fondé sur les faits divulgués dans le résumé pour obtenir des précisions quant au sens de son contenu, afin de mieux circonscrire les allégations auxquelles M. Harkat doit répondre.


[14]       Quelques exemples ont été donnés de la nature des questions qui seraient posées, et je dirais que ces questions sont de la nature d'une requête en précision ou en clarification de la portée des allégations formulées contre M. Harkat.

[15]       J'ai conclu que M. Harkat devrait au moins avoir la possibilité de soumettre de telles questions pour le cas où, au cours du processus d'élaboration du résumé, des ambiguïtés auraient été créées qui pourraient être clarifiées de manière à simplifier la procédure en bout de ligne.

[16]       Cela ne signifie pas, cependant, que ces questions devraient être posées à un seul témoin cité à comparaître pour être contre-interrogé, et ce, pour deux raisons. Premièrement, le contre-interrogatoire vérifie la fiabilité et la crédibilité de la preuve, mais ce que l'on cherche ici, comme l'a expliqué le procureur de M. Harkat dans sa plaidoirie, c'est une clarification des allégations portées contre M. Harkat. Cela ne soulève pas, au moins à ce stade-ci, une question de crédibilité. Deuxièmement, j'admets qu'un rapport sur les renseignements de sécurité n'est pas le fruit du travail d'une seule personne. Je ne suis donc pas convaincue qu'une personne serait en mesure de répondre correctement ou avec exactitude au questions fondées sur l'ensemble du résumé, qui est fondé pour sa part sur l'ensemble du rapport sur les renseignements de sécurité.


[17]       J'accueillerai donc la requête de M. Harkat en partie. Il est autorisé à soumettre des questions par écrit afin de clarifier tout élément exposé dans les résumés fournis. Si les procureurs des ministres estiment qu'une question est inadmissible parce qu'elle vise à obtenir autre chose qu'une clarification du sens des affirmations faites dans les résumés, ils peuvent signifier et déposer des objections relatives aux questions. Après avoir reçu la réponse écrite du procureur de M. Harkat à l'égard de toute objection, puis une réplique, le cas échéant, je rendrai un jugement sur l'admissibilité de la question. Par la suite, une réponse à toutes les questions n'ayant pas été jugées inadmissibles sera élaborée par écrit. Si les ministres s'inquiètent de ce que la réponse à une question puisse porter atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui, ils pourront demander à ce que la Cour entende ces renseignements en l'absence de M. Harkat et de son procureur et rende une décision en vertu de l'alinéa 78e) de la Loi. Ils pourront se prévaloir de cette procédure à toute phase de l'instance.

[18]       Les questions et les réponses correspondantes dans leur forme finale seront fournies à M. Harkat et seront versées au dossier public. Si, lors de la reprise de l'audience, les résumés ou les réponses fournies soulèvent une question de crédibilité, cette question de crédibilité pourra être tranchée à l'audience.

[19]       J'estime qu'en adoptant cette procédure, au vu du dossier dont je suis saisie, je m'acquitte du devoir qui m'est imposé par la Loi de procéder, dans la mesure où les circonstances et les considérations d'équité et de justice naturelle le permettent, sans formalisme et selon la procédure expéditive.


[20]       Après que j'aurai fini de rendre mes motifs, je discuterai avec les procureurs de délais convenables pour la remise des questions et la formulation des objections aux questions. Je fixerai ensuite d'autres délais, de concert avec les procureurs, lorsque les questions seront connues. Les délais tiendront compte de l'obligation de procéder selon la procédure expéditive.

ABUS DE PROCÉDURE

[21]       J'examinerai maintenant la partie de la requête de M. Harkat dans laquelle il demande une mesure de redressement par suite de ce qui est décrit comme un abus de procédure.

[22]       L'abus de procédure résiderait dans une menace abusive de poursuites pénales contre le témoin expert éventuel de M. Harkat, M. Marchessault, et contre les avocats de M. Harkat. La menace serait contenue dans une lettre envoyée par les procureurs des ministres aux procureurs de M. Harkat. Le contenu de cette lettre est crucial, et je lirai donc la lettre aux fins du dossier :

[traduction]

À la suite de l'ordonnance de la Cour du 24 avril 2003, ajournant la présente affaire pour permettre à votre client d'engager un témoin expert, nous vous écrivons en rapport avec votre choix éventuel de M. Jean-Luc Marchessault. Nous écrivons cette lettre dans l'espoir d'éviter des complications inutiles qui pourraient perturber l'audience, sans vouloir pour autant nous immiscer dans les démarches faites par votre client pour obtenir les services d'un témoin expert.

Les dispositions de la Loi sur la protection de l'information, L.R.C., ch. O-5, modifiée par L.C. 2001, ch. 41, s'appliquent au témoignage de M. Marchessault à titre d'expert pour le compte de M. Harkat. Elles s'appliquent également à toute discussion qu'il pourrait avoir avec vous à titre de procureur de M. Harkat en vue de préparer son témoignage à l'audience tenue en vertu de l'alinéa 78i) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés qui donne à M. Harkat la possibilité d'être entendu en ce qui concerne son inadmissibilité.


Monsieur Marchessault, à titre d'ancien employé du Service, est une « personne astreinte au secret à perpétuité » telle que définie à l'article 8 de la Loi sur la protection de l'information. Si le témoignage de M. Marchessault porte sur des sujets tels que les personnes visées par une enquête menée par le Service canadien du renseignement de sécurité, ou les moyens ou les méthodes employés par le Service pour mener une enquête, il révélera des « renseignements opérationnels spéciaux » tels que définis à l'article 8 de la Loi sur la protection de l'information (précitée). Nous attirons votre attention en particulier sur les alinéas c), d), e) et f) de cette définition.

Nous nous préoccupons de ce que M. Marchessault, à titre de personne astreinte au secret à perpétuité, n'ait pas nécessairement conscience que son témoignage pourrait constituer une violation des dispositions de la Loi sur la protection de l'information, surtout les articles 13 et 14. Étant donné que vous avez l'intention de retenir les services de M. Marchessault en qualité d'expert, vraisemblablement moyennant rémunération pour sa prétendue expertise (laquelle n'est ni reconnue ni appuyée par la présente lettre), nous estimons pour le compte des ministres qu'il ne pourrait pas invoquer la « défense d'intérêt public » prévue à l'article 15 de la Loi sur la protection de l'information, étant donné qu'il n'allègue aucune infraction et que la procédure prévue au paragraphe 15(5) de la Loi sur la protection de l'information n'aurait pas été suivie.

Il se peut que vous demandiez à M. Marchessault de vous fournir des renseignements ou des documents qui sont des « renseignements opérationnels spéciaux » tels que définis ci-dessus. Nous attirons donc votre attention sur l'article 23 de la Loi sur la protection de l'information. Toute demande semblable émanant de vous pourrait être interprétée comme un acte de votre part conseillant à M. Marchessault de commettre une infraction contraire aux articles 13 et 14 de la Loi sur la protection de l'information.

En outre, nous sommes tenus de conseiller les ministres en rapport avec l'article 38 de la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. ch. C-5, modifiée par L.C. 2001, ch. 41. Des parties du témoignage de M. Marchessault pourraient contenir soit des « renseignements potentiellement préjudiciables » soit des « renseignements sensibles » tels que définis à l'article 38 de la Loi sur la preuve au Canada (précitée). Si vous avez l'intention d'inviter M. Marchessault à aborder certains des domaines évoqués ci-dessus, il pourrait s'avérer nécessaire de signifier un avis au procureur général en vertu des dispositions de l'article 38.01 de la Loi sur la preuve au Canada. Veuillez noter que la présente lettre ne constitue pas l'avis prévu par cette loi. Cependant, si vous souhaitez faire témoigner M. Marchessault dans ce domaine, vous devriez donner l'avis obligatoire prévu au paragraphe 38.01(1) de la Loi sur la preuve au Canada.

Si vous souhaitez discuter plus avant de ces questions, avant la téléconférence de vendredi le 2 mai 2003, à 14 h, nous apprécierions votre réponse écrite par télécopieur.


[23]       J'admets qu'en droit, pour pouvoir conclure à un abus de procédure, la Cour doit être convaincue que les procédures sont devenues « à ce point viciées que leur permettre de suivre leur cours compromettrait l'intégrité du tribunal » . Ce sont les termes employés par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt R. c. Conway, [1989] 1 R.C.S. 1659 à la p. 1667, cités par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Blencoe c. Colombie-Britannique (Human Rights Commission), 2000 CSC 44 au paragraphe 119. Dans un contexte administratif, la Cour doit être convaincue que « le préjudice qui serait causé à l'intérêt public dans l'équité du processus administratif, si les procédures suivaient leur cours, excéderait celui qui serait causé à l'intérêt du public dans l'application de la loi, s'il était mis fin à ces procédures » . Voir : Blencoe au paragraphe 120.

[24]       À mon avis, la preuve en l'espèce ne démontre pas qu'il y a eu un abus de procédure, et ce, pour les motifs suivants.

[25]       Premièrement, comme l'ont affirmé les procureurs des ministres, je trouve que le ton de la lettre est mesuré et que son contenu est informatif. Les dispositions législatives mentionnées dans la lettre étaient relativement récentes, et, en effet, M. Marchessault a confirmé en contre-interrogatoire qu'il n'avait pas connaissance de la Loi sur la protection de l'information, L.C. 2001, ch. O-5, jusqu'à ce que l'avocat de M. Harkat l'informe du contenu de la lettre. Aucune menace expresse de poursuite n'est faite dans la lettre, et je ne puis raisonnablement interpréter la lettre comme une menace de poursuite par opposition à un exposé des dispositions législatives applicables.


[26]       Deuxièmement, la lettre n'a pas été envoyée au témoin éventuel. Il s'agit plutôt d'une position juridique communiquée aux avocats de M. Harkat par les procureurs des ministres. Une copie conforme de la lettre a été envoyée à la Cour, geste qui, à mon avis, ne cadre pas avec une menace abusive de poursuite.

[27]       Troisièmement, la lettre, lorsqu'elle a été montrée au témoin éventuel, n'a pas amené ce dernier à revenir sur sa décision de témoigner. M. Marchessault a clairement affirmé dans son témoignage que le procureur de M. Harkat lui avait montré la lettre le 27 juin 2003 et que M. Marchessault demeurait disposé à témoigner même après avoir vu la lettre. Le 14 juillet 2003, il a confirmé à nouveau sa disposition à témoigner. C'est seulement après que M. Marchessault a obtenu des conseils juridiques d'un tiers, sur recommandation du procureur de M. Harkat, que M. Marchessault a commencé à se préoccuper de son aptitude à témoigner. Ses préoccupations ont surgi après qu'il ait obtenu des conseils juridiques d'un tiers concernant la portée de la Loi sur la protection de l'information.

[28]       Comme seule preuve concernant l'effet de la lettre sur eux, les procureurs de M. Harkat ont déposé la réponse à cette lettre, rédigée par M. Galati en date du 23 mai 2003. Dans cette réponse, M. Galati écrit notamment :

[traduction]

8.              enfin, bien que tu affirmes que vous « [ne voulez pas] pour autant [vous] immiscer dans les démarches faites par [notre] client pour obtenir les services d'un témoin expert » , j'aimerais dire, Jim, que c'est précisément ce que tu fais, et, pour employer une de tes expressions préférées, que j'ai apprise de toi alors que tu l'employais devant le juge Cullen, ton client peut prendre sa position, telle qu'exprimée sur la forme et sur le fond dans ta lettre, et « piler du sable » avec;


9.              enfin, bien que je n'aie jamais, au cours de ma carrière, ni à titre de procureur de la Couronne ni en pratique privée, porté à l'attention du Barreau une question concernant un confrère, je me sens obligé de soulever la question de savoir, non pas à titre d'affaire personnelle, mais en ce qui concerne les limites acceptables des menaces que le procureur de la Couronne peut faire à un avocat de la défense, dans le cadre de la préparation des témoins, de même que la bonne administration de la justice et les règles d'éthique et de conduite, si nous ne devrions pas tous les deux renvoyer cette affaire au Barreau pour qu'elle fasse l'objet d'une enquête et d'une décision.

Je suis certain, cependant, qu'en bout de ligne, ces questions, si jamais elles deviennent des questions, peuvent et seront tranchées par les soins compétents de la Cour fédérale et d'autres tribunaux, et ne devraient pas faire l'objet de menaces préliminaires de poursuites pénales contre les procureurs de M. Harkat lors de la préparation de son « droit d'être entendu » dans le cadre d'une procédure déjà oppressive et discutable qui n'a pas encore été examinée, sur le fond, par la Cour suprême du Canada.

[29]       Je ne déduis pas de cette réponse que M. Galati a été tellement paralysé par la lettre qu'il y a eu un abus de procédure.

[30]       Enfin, aucun élément de preuve n'a été présenté quant à la pertinence d'aucun témoignage que M. Marchessault pourrait être en mesure de livrer. M. Marchessault a affirmé dans son témoignage que « pas grand chose » n'avait été fait au titre de l'engagement de ses services, qu'il avait avisé les procureurs qu'il ne discuterait pas de questions opérationnelles, et qu'il avait l'intention de témoigner en des « termes généraux » .

[31]       Je suis d'avis que les procureurs des ministres n'ont pas posé un geste déplacé en envoyant la lettre. La lettre n'a pas vicié la procédure.

[32]       Étant donné que la preuve n'a révélé aucun abus de procédure, cette partie de la requête de M. Harkat est rejetée.


[33]       Ayant entendu, cependant, les préoccupations exprimées par M. Marchessault en rapport avec son témoignage, je dirai qu'en raison des mesures de protection applicables pour prévenir la divulgation indésirable de renseignements lors de l'audition de la présente affaire, je serais très surprise si un témoignage sincère livré dans l'enceinte de cette Cour dans la présente instance pouvait entraîner une poursuite. On compte parmi ces mesures de protection la présence des procureurs des ministres, qui, je présume, seraient en mesure d'objecter qu'une réponse risquerait d'impliquer la divulgation de renseignements opérationnels spéciaux, selon la définition de ce terme, ou risquerait d'impliquer la divulgation de renseignements préjudiciables à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui. En outre, la Cour peut, à la requête de l'une ou l'autre des parties, entendre des éléments de preuve à huis clos, et l'alinéa 78e) de la Loi permet aux procureurs des ministres de demander à n'importe quel moment que la Cour entende des éléments de preuve en l'absence de M. Harkat et de ses procureurs. De plus, le tribunal est tenu de garantir la confidentialité des éléments de preuve communiqués au juge si leur divulgation portait atteinte, selon le juge, à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui. Des réponses sincères données dans ce contexte ne risquent pas, à mon avis, d'entraîner des poursuites.


[34]       Maintenant que j'ai exposé ces motifs, je demande leurs avis aux procureurs concernant le délai à accorder pour soumettre des questions et le temps à prévoir pour la formulation d'objections relatives à l'admissibilité des questions, puis pour une réponse et une réplique.

            « Eleanor R. Dawson »         

Juge

Ottawa (Ontario)

25 juillet 2003

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

NOMS DES PROCUREURS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                    DES-4-02

INTITULÉ DE LA CAUSE :DANS L'AFFAIRE D'UN CERTIFICAT SIGNÉ EN VERTU DU PARAGRAPHE 77(1) DE LA LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

et

MOHAMED HARKAT

LIEU DE L'AUDIENCE :          GATINEAU (QUÉBEC)

DATES DE L'AUDIENCE :      Les 21, 23 et 25 juillet 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE : MADAME LA JUGE DAWSON

DATE DES MOTIFS :              Le 25 juillet 2003

COMPARUTIONS :

DONALD RENNIE                       REPRÉSENTANT LE MINISTÈRE DE LA JUSTICE

JAMES MATHIESON et              REPRÉSENTANT LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU

MICHAEL DALE                          CANADA

ROCCO GALATI et                      REPRÉSENTANT MOHAMED HARKAT

BRUCE ENGEL et

M. BAUM

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

MORRIS ROSENBERG              POUR LE MINISTÈRE DE LA JUSTICE ET LE

SOUS-PROCUREUR                    SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA

GÉNÉRAL DU CANADA

GALATI, RODRIGUES,              POUR MOHAMED HARKAT

AZEVEDO & ASSOCIATES

TORONTO (ONTARIO)

BRUCE ENGEL                           POUR MOHAMED HARKAT

OTTAWA (ONTARIO)


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