Date : 20010314
Dossier : IMM-5726-99
Référence neutre : 2001 CFPI 189
ENTRE :
SVITLANA NAUMENKO
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
[1] La demanderesse sollicite le contrôle judiciaire d'une décision datée du 28 octobre 1999 dans laquelle une agente d'immigration à l'Ambassade du Canada à Paris a conclu qu'elle n'avait pas les compétences voulues ou l'expérience nécessaire pour remplir les exigences applicables pour immigrer au Canada. Il s'agit en l'espèce de déterminer si l'agente d'immigration a commis une erreur de droit en n'évaluant pas la demanderesse au regard de la catégorie de la CNP relative à la profession de « directrice financière » , et si l'agente d'immigration a contrevenu aux principes d'équité en continuant l'entrevue de la demanderesse après qu'il fut devenu clair que la demanderesse n'était pas capable de répondre adéquatement en raison de l'absence d'interprète.
[2] Dans sa demande de visa, la demanderesse a indiqué qu'en ce moment, elle occupait un poste de directrice financière et qu'elle envisageait de trouver un emploi de directrice financière ou de comptable au Canada. À cet égard, l'agente d'immigration a affirmé :
[TRADUCTION] Même si vous avez présenté votre demande à titre de comptable, je ne pourrais pas vous évaluer au regard de cette profession parce que la lettre de recommandation que vous avez fournie et votre incapacité à décrire adéquatement vos tâches me font douter que vous soyez de fait comptable. En outre, l'offre d'emploi non validée que vous avez soumise à l'entrevue faisait référence à un poste de « teneuse de livres » . Compte tenu de vos études et du type d'offre d'emploi en cause, j'ai décidé de vous évaluer au regard des exigences applicables à la profession de teneuse de livres (catégorie 1231.0 de la CNP).
Rien dans les notes de l'agente des visas, les notes au STIDI et l'affidavit de l'agente des visas n'indiquait qu'on avait évalué la demanderesse au regard de la profession de directrice financière comme demandé. Il s'agit d'une erreur de droit.
[2] Le juge Rothstein dans la décision Issaeva c. MCI (1996), 37 Imm. L.R. (2d) 91 (1re inst), a cité avec approbation les commentaires du juge Mahoney dans l'arrêt Uy c. MEI (1991), 12 Imm. L.R. (2d) 172 (C.AF.) :
À mon avis, l'article 6 de la Loi oblige l'agent des visas à apprécier tout immigrant qui sollicite le droit d'établissement de la manière prescrite par la Loi et le Règlement. Le paragraphe 8(1) du Règlement impose, à titre obligatoire, un devoir d'apprécier. Or, je ne trouve rien dans Loi ou dans le Règlement qui permette à l'agent des visas de refuser d'apprécier l'immigrant (ou son conjoint) à l'égard de la profession principale ou des professions subsidiaires qu'il déclare avoir l'intention d'exercer au Canada. L'agent des visas a commis une erreur de droit et a excédé sa compétence en refusant d'apprécier l'appelant, aux fins de son admission au Canada, à titre de technologue médical.
Le juge Rothstein conclut ensuite :
J'estime que ce passage précise qu'un immigrant éventuel est en droit d'être apprécié dans sa profession envisagée.
Cette erreur est suffisante pour nécessiter le renvoi de l'affaire à un autre agent d'immigration de l'Ambassade du Canada à Paris afin que celui-ci procède à une évaluation.
[4] Je n'ai donc pas à déterminer si les commentaires de l'agente des visas selon lesquels la demanderesse était incapable de décrire adéquatement ses tâches étaient suffisants pour exclure la demanderesse à titre de comptable. Comme l'affaire est renvoyée, la demanderesse a droit à ce qu'un agent d'immigration statue sur la question de savoir si elle a les aptitudes requises pour exercer la profession de directrice financière ou de comptable.
[5] Je n'aurais pas renvoyé la présente affaire pour qu'elle fasse l'objet d'un réexamen en me fondant strictement sur l'absence d'interprète, parce que l'agente d'immigration a offert d'ajourner l'audience pendant une journée afin de permettre à la demanderesse de trouver un interprète et a même fourni à la demanderesse une liste d'interprètes que conserve l'Ambassade du Canada. À mon avis, il serait très malavisé de la part de la demanderesse d'assister à la nouvelle entrevue sans être accompagnée d'un interprète.
[6] J'ajoute également que je souscris à la conclusion de l'agente d'immigration selon laquelle la personne qu'a amenée la demanderesse à l'entrevue initiale pour qu'elle agisse à titre d'interprète était clairement en conflit d'intérêts. Un consultant qui aide à la préparation du formulaire d'immigration de la partie demanderesse n'a pas le droit d'agir en tant qu'interprète pour la partie demanderesse.
[7] La demande de contrôle judiciaire est accueillie et l'affaire est renvoyée à un autre agent d'immigration de l'Ambassade du Canada à Paris pour que celui-ci procède à une évaluation d'une manière conforme aux présents motifs.
« W.P. McKeown »
JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
Le 14 mars 2001
Traduction certifiée conforme
Julie Boulanger, LL.M.
Date : 20010314
Dossier : IMM-5726-99
OTTAWA (ONTARIO), LE 14 MARS 2001
EN PRÉSENCE DE : MONSIEUR LE JUGE McKEOWN
ENTRE :
SVITLANA NAUMENKO
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE CE QUI SUIT :
La demande de contrôle judiciaire est accueillie et l'affaire est renvoyée à un autre agent d'immigration de l'Ambassade du Canada à Paris pour que celui-ci procède à une évaluation d'une manière conforme aux présents motifs.
« W.P. McKeown »
JUGE
Traduction certifiée conforme
Julie Boulanger, LL.M.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
NO DU GREFFE : IMM-5726-99
INTITULÉ DE LA CAUSE : SVITLANA NAUMENKO c. MCI
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO
DATE DE L'AUDIENCE : LE 9 MARS 2001
MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE MONSIEUR LE JUGE MCKEOWN
DATE DES MOTIFS : LE 14 MARS 2001
ONT COMPARU :
M. John Grice POUR LA DEMANDERESSE
M. Greg George POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
John Grice POUR LA DEMANDERESSE
North York (Ontario)
M. Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada