Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20030808

Dossier : T-984-03

Référence : 2003 CF 965

ENTRE :

                                                    ATLANTIC YACHT & SHIP INC.

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                                   et

                                            SOVEREIGN YACHTS (CANADA) INC. et

                                LES PROPRIÉTAIRES DU NAVIRE « STATUS QUO » ,

                                                       également appelé SOVEREIGN,

                                   NUMÉRO D'ENREGISTREMENT SYCC9162001 et

                TOUTES AUTRES PERSONNES INTÉRESSÉES DANS LEDIT NAVIRE

                                                                                                                                                     défendeurs

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE HARGRAVE


[1]                 En août 1999, la demanderesse, Atlantic Yacht & Ship Inc. (Atlantic), concluait avec la défenderesse, Sovereign Yachts (Canada) Inc. (Sovereign), constructeur de navires, un accord de commercialisation, plus précisément une forme de marché de services personnels, par lequel Atlantic fournirait à Sovereign des services de commercialisation et de courtage, moyennant une commission de 5 p. 100 du prix des navires pour lesquels Atlantic trouverait un acheteur. En février 2002, Atlantic présentait à Sovereign M. Don Davis, de Floride, aux États-Unis, comme acheteur d'un yacht de 138 pieds, qui serait construit par Sovereign, un yacht appelé aujourd'hui Status Quo, le navire devant être exporté vers les États-Unis afin d'éviter la taxe canadienne sur les ventes. Le 16 février 2002, Sovereign concluait avec M. Davis un accord de construction d'une valeur de 10 925 000 dollars américains. Simultanément, Sovereign et Atlantic concluaient un accord de courtage, encore une fois un marché de services personnels, par lequel, à mesure que M. Davis verserait des acomptes et ferait d'autres paiements à Sovereign, Sovereign paierait alors, dans un délai d'une semaine, 5 p. 100 à Atlantic. L'accord de courtage renfermait d'autres clauses, mais ces clauses ne sont pas pertinentes car l'approche que j'ai adoptée pour faire droit à la présente requête, celle de M. Davis, une requête en radiation de l'action réelle d'Atlantic à l'encontre du Status Quo, est fondée sur la compétence de la Cour.

EXAMEN

[2]                 Sovereign a versé d'importantes commissions à Atlantic, puis a connu des difficultés financières, pour cesser finalement de payer la commission convenue de 5 p. 100. D'où la présente action engagée par Atlantic, action personnelle (in personam) contre Sovereign et action réelle (in rem) contre le Status Quo.


[3]                 M. Davis a tout probablement payé intégralement Sovereign pour le yacht, ne laissant qu'une hypothèque enregistrée sur le navire par Sovereign en faveur de Caterpillar Financial Services Corporation, hypothèque qui est une obligation de M. Davis. D'ailleurs, par un accord supplémentaire de septembre 2002 conclu entre M. Davis et Sovereign, Sovereign reconnaissait que M. Davis avait, et continuait d'acquérir, un droit à titre bénéficiaire sur le Status Quo, et que Sovereign continuait de détenir le droit de propriété à titre légal, en fiducie pour M. Davis.

[4]                 M. Davis, propriétaire bénéficiaire (sous réserve du paiement du droit de rachat que comportait l'hypothèque de Caterpillar) et deuxième créancier hypothécaire, voit maintenant le Status Quo en état de saisie, à l'initiative du courtier, Atlantic. Lorsque l'on examine tout cela en détail, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il est très étrange qu'un courtier, qui s'est engagé envers un constructeur à trouver un acheteur pour un navire et qui a effectivement trouvé l'acheteur, puisse ensuite faire volte-face et saisir ce même navire qui appartient à titre bénéficiaire à cet acheteur. Nous avons en effet ici une partie tierce, M. Davis, qui s'était engagé à acheter et à recevoir un yacht imposant, franc et quitte de toutes charges, si ce n'est celle de Caterpillar Financial Services, mais qui aujourd'hui prend connaissance des prétentions d'Atlantic, courtier de Sovereign, à l'encontre de Sovereign, prétentions qui prennent la forme d'une action à l'encontre du Status Quo, un navire dans lequel Sovereign n'a tout probablement qu'un intérêt juridique simple ou l'intérêt d'un simple fiduciaire.


[5]                 En affirmant qu'il devrait y avoir mainlevée de la saisie du Status Quo, l'avocat de M. Davis a soulevé plusieurs points, y compris non seulement l'inexistence du droit d'un courtier de poursuivre in rem le navire de l'acheteur en conséquence d'une rupture du contrat in personam conclu entre le courtier et le constructeur, mais également le fait que, bien avant l'introduction de l'instance, la propriété à titre bénéficiaire du Status Quo était entièrement passée à M. Davis, anéantissant ainsi tout recours de nature réelle, en vertu du paragraphe 43(2) de la Loi sur la Cour fédérale : le paragraphe 43(3) prévoit que certaines actions réelles non liquidées sont empêchées dans les cas où il y a changement de véritable propriétaire. L'avocat de M. Davis a peut-être raison d'affirmer cela, mais j'ai radié l'aspect in rem de la déclaration en prenant une voie plus directe, c'est-à-dire le fait que la Cour fédérale est dépourvue, à l'égard de la chose, de la compétence en matière réelle qui lui permettrait de statuer sur la réclamation d'Atlantic.

[6]                 Je commencerai par dire qu'une procédure en matière réelle n'est recevable que s'il existe, entre la réclamation et le navire défendeur, un lien d'un genre qui ferait relever cette procédure de la compétence en matière réelle conférée par la loi à la Cour fédérale. Je reconnais ici le caractère très rigoureux du fardeau qui repose sur la partie qui voudrait faire radier un acte de procédure, puisqu'il lui incombe de prouver qu'il est manifeste, évident et hors de doute que l'action est si manifestement futile qu'elle n'a pas la moindre chance de succès.


[7]                 En adoptant cette approche fondée sur la compétence, je n'ignore pas que la Cour suprême avait fait observer, dans l'arrêt ITO-International Terminal Operators c. Miida Electronics [1986] 1 R.C.S. 752, qu' « une méthode historique peut servir à éclairer, mais ne saurait autoriser à limiter » (page 774). Monsieur le juge McIntyre avait ensuite défini le droit maritime canadien en des termes très généraux, l'expression comprenant « une compétence illimitée en matière maritime et d'amirauté... On ne saurait considérer ces matières comme ayant été figées par la Loi d'amirauté, 1934. Au contraire, les termes "maritime" et "amirauté" doivent être interprétés dans le contexte moderne du commerce et des expéditions par eau » (loc. cit.). Il avait ensuite fait une mise en garde contre tout empiétement sur des matières qui essentiellement sont des matières d'intérêt local faisant intervenir la propriété, les droits civils ou autres matières relevant de la compétence exclusive des provinces. En adoptant cette vue élargie du droit maritime canadien, qui je crois devrait être appliquée non seulement au paragraphe 22(1) en général, mais également aux divers alinéas du paragraphe 22(2), je dois quand même garder à l'esprit que, bien qu'adoptant une approche moderne, je dois tenir compte du sens naturel dans ma lecture de la disposition en question : je dois me garder de fausser la compétence attribuée par la loi à la Cour fédérale en faisant une interprétation forcée et excessive des articles de la Loi sur la Cour fédérale qui intéressent la présente affaire.

[8]                 Comme je l'ai dit, je suis arrivé à la conclusion que la Cour fédérale n'a pas la compétence qui permettrait au courtier, Atlantic, d'exercer un recours de nature réelle contre le Status Quo. Cette approche fondée sur l'incompétence a été adoptée par le juge Joyal dans l'affaire Corostel Trading Ltd. c. Catalina (1986) 6 F.T.R. 233. Il s'agissait dans cette affaire d'une réclamation qui résultait d'un contrat portant sur la vente d'un navire. La réclamation n'était pas celle du vendeur ou de l'acheteur, mais celle d'un tiers, sans doute un courtier maritime.

[9]                 Le juge Joyal avait vu dans l'action réelle un recours extraordinaire. Cependant, il avait commencé par dire que, en l'absence d'un droit réel, la Cour n'avait pas compétence pour statuer sur une revendication de nature contractuelle. Il avait examiné les sujets ou domaines particuliers énumérés au paragraphe 22(2) de la Loi sur la Cour fédérale. Selon lui, rien « ne permettait d'attribuer à la Cour la compétence requise » (page 234). Puis il avait radié l'action et annulé la saisie du navire.

[10]            Pour conclure, le juge Joyal avait fait observer que, puisqu'aucun des alinéas du paragraphe 22(2) de la Loi sur la Cour fédérale n'était source de compétence, il ne lui était pas nécessaire d'étudier l'article 43 de la Loi et de se demander qui était le véritable propriétaire au moment du fait générateur pour savoir si l'action réelle était recevable.

[11]            En l'espèce, la déclaration procède de contrats, à savoir un marché de services de commercialisation et de courtage, et un marché ultérieur distinct prenant la forme d'un accord de courtage. La déclaration ne renferme aucune réclamation à l'encontre de M. Davis. Elle n'est donc d'aucune aide car, bien qu'elle soit intitulée action réelle et personnelle, elle ne renferme ni réclamation apparente de nature réelle, ni moyen attestant un lien entre les contrats et le navire Status Quo.

[12]            L'affidavit à l'origine de la délivrance du mandat est plus utile. Il ne fait pas état d'un lien factuel entre le Status Quo et le contrat de commercialisation ou le contrat de courtage, mais il renferme une simple affirmation selon laquelle :

[traduction]

3. ...

g)             Le fondement qui permet d'invoquer la compétence en matière réelle de la Cour est que la demande qui résulte du contrat de courtage est rattachée et se rapporte au produit de la vente du Status Quo, en application de l'alinéa 22(2)a) de la Loi sur la Cour fédérale. En outre, la demande qui résulte du contrat de courtage découle d'un contrat de construction et d'équipement du Status Quo, en application de l'alinéa 22(2)n) de la Loi sur la Cour fédérale.

Cette affirmation semble contenir une admission selon laquelle le contrat de courtage invoqué par Atlantic est issu du contrat de construction conclu entre Sovereign et M. Davis. Selon le paragraphe 43(2) de la Loi sur la Cour fédérale, la compétence attribuée par les alinéas 22(2)a) et n) de la Loi sur la Cour fédérale, qui sont invoqués par Atlantic et que j'aborderai bientôt, peut être exercée en matière réelle. Je dois donc examiner les alinéas 22(2)a) et n) de la Loi sur la Cour fédérale à la lumière du paragraphe 43(2) de la Loi, pour savoir si la Cour fédérale est de quelque manière compétente.

[13]            Le paragraphe 43(2) de la Loi sur la Cour fédérale prévoit ce qui suit :

43(2) Compétence en matière réelle - Sous réserve du paragraphe (3), la Cour peut, aux termes de l'article 22, avoir compétence en matière réelle dans toute action portant sur un navire, un aéronef ou d'autres biens, ou sur le produit de leur vente consigné au tribunal.

43(2) Jurisdiction in rem - Subject to subsection (3), the jurisdiction conferred on the Court by section 22 may be exercised in rem against the ship, aircraft or other property that is the subject of the action, or against any proceeds of sale thereof that have been paid into court.


Il y a ici deux notions à retenir : d'abord, l'exercice d'une action réelle contre un navire; et ensuite, l'exercice d'une action réelle contre le produit de la vente qui a été consigné au tribunal. C'est la deuxième notion qui présente des difficultés pour Atlantic : même si l'on devait présumer que les commissions payées sont d'une certaine manière un produit de la vente, aucune commission n'a été consignée au tribunal au soutien d'une action réelle. La réserve énoncée au paragraphe 43(2), qui constitue une fin de non-recevoir à une action réelle engagée en vertu de certaines rubriques du paragraphe 22(2), comporte certaines conditions touchant le véritable propriétaire, un aspect qu'il ne m'est pas nécessaire d'examiner.

Alinéa 22(2)a) de la Loi sur la Cour fédérale

[14]            Les alinéas 22(2)a) et n) de la Loi sur la Cour fédérale disposent ainsi :

22(2) Compétence maritime - Il demeure entendu que, sans préjudice de la portée générale du paragraphe (1), la Section de première instance a compétence dans les cas suivants :

22(2) Maritime jurisdiction - Without limiting the generality of subsection (1), it is hereby declared for greater certainty that the Trial Division has jurisdiction with respect to any one or more of the following:

(a) une demande portant sur les titres de propriété ou la possession, en tout ou en partie, d'un navire ou sur le produit, en tout ou en partie, de la vente d'un navire;

...

(a) any claim with respect to title, possession or ownership of a ship or any part interest therein or with respect to the proceeds of a sale of a ship or any part interest therein;

...

(n) une demande fondée sur un contrat de construction, de réparation ou d'équipement d'un navire;

(n) any claim arising out of a contract relating to the construction, repair or equipping of a ship;

[15]            Selon son sens ordinaire et naturel, l'alinéa 22(2)a) de la Loi sur la Cour fédérale traite d'une compétence en matière réelle en ce qui a trait au titre de propriété ou à la possession d'un navire, en totalité ou en partie. Puis il attribue compétence à la Cour en ce qui concerne « le produit de la vente d'un navire » ; cependant, non seulement le produit doit-il résulter de l'objectif principal de la disposition, une demande portant sur les titres de propriété ou la possession, mais encore il n'existe manifestement aucun produit, uniquement une commission, dont la quasi-totalité a été payée. Aucune somme n'a été consignée au tribunal, ainsi que le requiert le paragraphe 43(2), pour qu'une procédure réelle puisse être engagée. Il ressort de l'arrêt Antares Shipping c. Le Capricorn [1980] 1 R.C.S. 553, à la page 566, que je ne dois pas interpréter d'une manière restrictive l'alinéa 22(2)a). Cependant, cet arrêt concernait une action entre parties à un contrat portant sur la vente et l'achat d'un navire, et il ne m'est donc d'aucune aide directe dans la présente action d'Atlantic, un courtier maritime qui n'est pas partie au contrat d'achat et de vente conclu entre Sovereign et M. Davis.

[16]            Je n'ai pas connaissance de précédents publiés, et l'on ne m'en a signalé aucun (si ce n'est l'affaire Corostel, précitée), se rapportant à une demande en matière de courtage maritime, c'est-à-dire une demande qui ne concerne pas un différend portant sur la propriété ou la possession. L'affaire Corostel est certainement un précédent persuasif selon lequel l'alinéa 22(2)a) n'est pas attributif d'une compétence en matière réelle.

[17]            Également utile est l'opinion exprimée dans l'ouvrage intitulé Jackson on Enforcement of Maritime Claims, 3e édition, LLB Professional Publishing, Londres 2000, à la page 46. Selon cette opinion, la disposition correspondante de la Supreme Court Act de 1981, selon son interprétation la plus large, celle qui résulte de la compétence résiduelle de la juridiction anglaise appelée High Court of Admiralty, une disposition communément appelée la « disposition générale » et qui est aujourd'hui le paragraphe 20(1) de la Supreme Court Act de 1981, n'élargit pas la compétence en matière de propriété à un simple créancier personnel. Cette limite résulte de l'article 30 de la Merchant Shipping Act de 1894, modifiée en 1988, mais, par analogie, elle est applicable à la présente allégation de compétence. Pour le précédent à l'appui de cette opinion exprimée dans l'ouvrage de Jackson, et pour un exposé complet sur la position d'un créancier personnel, voir The Mikado [1992] 1 Lloyd's 163, un jugement du juge Sheen.

[18]            Atlantic affirme que les accords qu'elle a conclus avec Sovereign équivalent à la cession, à Sovereign, d'une partie de chaque paiement effectué par M. Davis, à mesure que le Status Quo prenait forme sur le chantier de Sovereign. Même si l'on accepte cette manière de voir, elle ne permet pas d'établir une action réelle contre le navire Status Quo.


[19]            On ne peut manifestement trouver, dans l'alinéa 22(2)a) de la Loi sur la Cour fédérale, aucune compétence en matière réelle en faveur d'Atlantic, créancier contractuel personnel de Sovereign. Je ne me demande pas ici si la Cour fédérale a compétence pour prononcer sur un litige purement contractuel entre Atlantic et Sovereign; peut-être serai-je appelé à le faire plus tard. Je me pencherai maintenant sur l'alinéa 22(2)n) de la Loi sur la Cour fédérale.

Alinéa 22(2)n) de la Loi sur la Cour fédérale

[20]            L'alinéa 22(2)n) concerne les demandes fondées sur des contrats de construction, de réparation ou d'équipement de navire. Dans la présente affaire, le contrat conclu entre Sovereign et M. Davis portait sur la construction d'un navire. Si je comprends bien la position d'Atlantic, elle repose en partie sur le fait qu'Atlantic était intervenue étroitement dans la négociation du contrat conclu entre M. Davis et Sovereign, et un contrat de construction ne serait d'ailleurs pas intervenu sans cette intervention d'Atlantic et sans l'accord conclu entre Atlantic et Sovereign en matière de commissions. Atlantic prétend donc qu'elle devrait pouvoir invoquer l'alinéa 22(2)n) de la Loi sur la Cour fédérale.


[21]            Atlantic affirme aussi qu'elle devait verser une somme de 75 000 $ sur sa dernière commission pour l'achat d'une soumission portant sur le Status Quo. Rien ne permet de supposer autre chose que ceci : la somme de 75 000 $ était une remise destinée à soulager Sovereign de cette partie de la commission qui devait être payée par Sovereign à Atlantic. Sovereign a pu consacrer cette somme à la présentation d'une soumission pour le Status Quo, mais il n'existe aucune preuve contractuelle d'une telle obligation de Sovereign envers M. Davis. Rien ne donne à entendre qu'Atlantic a fourni des équipements ou des nécessités au Status Quo, au point de donner naissance à une action réelle à l'encontre du Status Quo. En fait, puisque rien n'a été fourni au Status Quo par voie de soumission, cet argument ne saurait donner lieu à une action réelle.


[22]            L'affaire Atlantic Sandblasting & Coatings Inc. c. Marine Industries Limited [1982] 2 C.F. 883 est également instructive. Dans cette affaire, un contrat de réparation de navire avait été négocié et conclu entre Atlantic Sandblasting, d'une part, et Marine Industries, de l'autre, pour la réparation du Gulf MacKenzie, qui appartenait à la défenderesse Gulf Canada Limited. Gulf Canada Limited n'avait pris aucune part aux négociations. Il n'avait pas été établi que le réparateur comptait sur le navire (ni d'ailleurs sur ses propriétaires) pour être payé, ni que les propriétaires du navire avaient de quelque manière poussé à l'exécution du contrat de réparation : ce cas est analogue à la situation présente, M. Davis n'ayant pris aucune part aux contrats conclus entre Atlantic et Sovereign. Dans l'affaire Atlantic Sandblasting, la Cour s'en était remise à la fois à l'alinéa 22(2)m), qui concerne la fourniture de nécessités, et à l'alinéa 22(2)n), pour savoir si elle était investie d'une compétence en matière réelle. Le juge en chef adjoint Jerome avait écrit : « J'écarte tout de suite l'alinéa 22(2)n) puisqu'on n'a allégué aucun engagement contractuel de la part des propriétaires » (page 885). C'est le cas ici. Il n'est nullement allégué dans la déclaration que M. Davis ait joué un quelconque rôle dans l'un ou l'autre des deux contrats conclus entre Atlantic et Sovereign. Bien sûr, Atlantic a pu traiter antérieurement avec M. Davis et a pu lui offrir des incitations afin de l'amener à contracter avec Sovereign pour la construction du navire. Cependant, il n'est nulle part prouvé ni allégué que M. Davis a joué un rôle dans le contrat conclu entre Atlantic et Sovereign, et donc l'alinéa 22(2)n) de la Loi sur la Cour fédérale doit être écarté comme source possible de compétence en matière réelle.

CONCLUSION

[23]            La norme à laquelle M. Davis doit satisfaire pour réussir à faire radier tout aspect in rem de la déclaration est très rigoureuse. Il doit montrer qu'il est manifeste, évident et indubitable que l'action réelle (ou in rem) est si manifestement futile qu'elle n'a pas la moindre chance de succès. M. Davis a clairement satisfait à cette norme. L'action se déroulera donc sans aucun élément in rem, lequel élément est ici radié.

[24]            Comme le faisait observer la Cour d'appel dans l'arrêt Paramount Enterprises International Inc. c. An Xin Jiang [2001] 2 C.F. 551, à la page 566 :

Dès lors qu'il est décidé que l'action in rem n'était pas permise, il s'ensuit que le mandat ne pouvait pas être émis et qu'il est nul ab initio. La Cour, au stade d'une requête en radiation de la procédure in rem, ne fait que constater que l'accessoire, soit le mandat de saisie, doit suivre le sort du principal, soit la procédure in rem.

L'action réelle contre le Status Quo est rejetée. En application de l'arrêt Paramount Enterprises, le mandat, étant nul ab initio, n'a aucun effet, et la saisie du navire est donc levée.

[25]            Les dépens suivent en principe l'issue de la cause. Cependant, l'avocat de la demanderesse voudrait qu'il soit statué sur les dépens plus tard. Si l'avocat d'Atlantic et celui de M. Davis ne peuvent s'entendre, la question des dépens pourra être débattue à une date acceptable pour tous.

                                                                                 « John A. Hargrave »          

                                                                                                Protonotaire                 

Le 8 août 2003

Vancouver (Colombie-Britannique)

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                    T-984-03

INTITULÉ :                   Atlantic Yacht & Ship Inc. c. Sovereign Yachts (Canada) Inc. et autres

                                                         

LIEU DE L'AUDIENCE :                                Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :                              le 31 juillet 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :              le protonotaire Hargrave

DATE DES MOTIFS :                                     le 8 août 2003

COMPARUTIONS :

M. Stephen D. Gill                                                POUR LA DEMANDERESSE

Mme Lilac Bosma

M. Peter Bernard                                                 POUR DON DAVIS, CRÉANCIER HYPOTHÉCAIRE ET ACHETEUR DU NAVIRE « STATUS QUO »

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Edwards, Kenney & Bray                                                 POUR LA DEMANDERESSE

Vancouver (C.-B.)

Bernard et Associés                                              POUR DON DAVIS, CRÉANCIER

Vancouver (C.-B.)                                               HYPOTHÉCAIRE ET ACHETEUR DU NAVIRE « STATUS QUO »


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.