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Date : 20030910

Dossier : T-876-02

Référence : 2003 CF 1055

OTTAWA (ONTARIO), le 10 septembre 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JAMES RUSSELL

ENTRE :

                                                        GLAXOSMITHKLINE INC. et

SMITHKLINE BEECHAM P.L.C.

                                                                                                                                            demanderesses

                                                                                   et

                                                                     APOTEX INC. et

LE MINISTRE DE LA SANTÉ NATIONALE

                                                                                                                                                     défendeurs

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE RUSSELL

NATURE DE LA DEMANDE


[1]                 Il s'agit d'une demande fondée sur le paragraphe 6(5) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), L.C. 1993, ch. 2, article 4 (le Règlement), par laquelle la défenderesse Apotex Inc. (Apotex) sollicite une ordonnance rejetant une demande que Glaxosmithkline Inc. et Smithkline Beecham P.L.C. (GSK) ont présentée en vertu du paragraphe 6(1) du même Règlement. Cette demande de GSK visait à obtenir une ordonnance interdisant au ministre de la Santé (le ministre) de délivrer un avis de conformité (ADC) à Apotex à l'égard de ses comprimés de chlorhydrate de paroxétine anhydre de 10, 20 et 30 mg.

[2]                 La demande fondée sur le paragraphe 6(1) a été engagée au moyen d'un avis d'allégation (ADA) daté du 6 juin 2002.

[3]                 Apotex soutient que la demande fondée sur le paragraphe 6(1) de GSK devrait être rejetée, parce que les brevets canadiens numéros 2,168,829 (le brevet 829), 2,210,023 (le brevet 023) et 2,211,522 (le brevet 522) (collectivement les brevets) sont inscrits à tort dans le registre que tient le ministre en application du Règlement (le registre).

[4]                 Le ministre de la Santé n'a déposé aucun document en réponse à la demande et n'a pas comparu non plus à l'audience.

LES FAITS À L'ORIGINE DU LITIGE

[5]                 Les principaux faits à l'origine de la présente demande fondée sur le paragraphe 6(5) du Règlement ne sont pas contestés.


[6]                 GSK commercialise des comprimés de chlorhydrate de paroxétine anhydre en dosage de 10, 20 et 30 mg. Elle a soumis un premier ADC à l'égard des comprimés de chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté le 4 mai 1993, par suite d'une présentation abrégée de drogue nouvelle (PADN) déposée le 11 juin 1990.

[7]                 Les demandes relatives aux trois brevets ont été déposées le 5 février 1996, plusieurs années après que GSK a reçu le premier ADC à l'égard des comprimés de chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté. Le brevet 829 a été délivré le 16 décembre 1997, le brevet 023, le 9 février 1999, et le brevet 522, le 7 décembre 1999.

[8]                 GSK a soumis les brevets en vue de leur ajout au registre en liaison avec un certain nombre de présentations de drogue nouvelle (PDN) supplémentaires.

[9]                 Les brevets 829 et 023 ont été ajoutés au registre le 18 octobre 1999 et le brevet 522, le 10 janvier 2000.

NATURE DU LITIGE

[10]            Apotex invoque plusieurs raisons pour demander une ordonnance portant rejet conformément au paragraphe 6(5) du Règlement :


.           les brevets n'ont pas été inscrits à l'intérieur du délai strict prévu à l'article 4 du Règlement, de sorte qu'ils n'ont pas été ajoutés à bon escient au registre et ne peuvent être utilisés pour interdire la délivrance d'un ADC en faveur d'Apotex par le ministre;

.           les brevets ne pouvaient être ajoutés au registre en raison de leur objet et ne peuvent donc être utilisés pour interdire la délivrance d'un ADC en faveur d'Apotex par le ministre;

.           même si les brevets ont été inscrits à bon escient au registre, ils ne sont pas pertinents quant à la demande d'ADC d'Apotex, de sorte que la demande de GSK fondée sur le paragraphe 6(1) du Règlement est frivole et vexatoire et constitue un abus de procédure au sens de l'alinéa 6(5)b) du même Règlement.

NORME À RESPECTER

[11]            Les parties ne s'entendent pas sur la norme à respecter pour que la Cour puisse rejeter une demande fondée sur le paragraphe 6(1) conformément à l'alinéa 6(5)a) du Règlement.

[12]            L'alinéa 6(5)b) du Règlement renvoie à une demande qui est « inutile, scandaleuse, frivole ou vexatoire ou constitue autrement un abus de procédure » , ce qui nécessite l'application du critère « évident et manifeste » énoncé dans l'arrêt Hunt c. Carey, [1990] 2 R.C.S. 959, à la page 970.

[13]            Dans Bayer Inc. c. Apotex Inc. (1998), 85 C.P.R. (3d) 334, le juge Joyal, qui était saisi d'une requête portant rejet fondée sur l'alinéa 6(5)b) du Règlement, a décidé qu'une requête de cette nature ne devrait être accueillie que lorsque l'avis de demande est manifestement irrégulier et dépourvu de toute chance de succès. Il en est ainsi parce que l'alinéa 6(5)b) accorde simplement à la Cour le pouvoir explicite d'examiner les requêtes portant rejet alors qu'auparavant, la Cour s'était fondée sur ses propres règles pour le faire. C'est pourquoi la norme restrictive énoncée dans l'arrêt Hunt, précité, devrait s'appliquer.

[14]            Les parties en l'espèce ne s'entendent pas sur la norme à appliquer en vertu de l'alinéa 6(1)a). Selon GSK, il s'agit du même critère « évident et manifeste » , compte tenu de la récente décision qu'a rendue la juge Gauthier dans Procter & Gamble Pharmaceuticals Canada, Inc. c. Canada (Ministre de la Santé), [2003] A.C.F. n ° 750, au paragraphe 9 (C.F. 1re inst.).

[15]            Pour sa part, Apotex soutient que la décision qu'a rendue la juge Gauthier dans Procter est erronée sur ce point et me demande d'appliquer la norme civile habituelle de la prépondérance de la preuve. À ce sujet, elle souligne que l'alinéa 6(5)a) n'équivaut pas aux règles de la Cour au même titre que l'alinéa 6(5)b) et nécessite l'application de facteurs sensiblement différents. Apotex cite les remarques que le juge Rothstein, de la Cour d'appel fédérale, a formulées dans Apotex Inc. et al c. Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social et al (2000), 3 C.P.R. (4th), au sujet de l'économie générale du Règlement :

22.     [...] Le Règlement prévoit expressément une procédure permettant aux fabricants de médicaments génériques d'obtenir une réparation si l'inscription au registre de brevets non admissibles leur cause un préjudice. [...]


[...]

23.     De toute évidence, en édictant l'alinéa 6(5)a) du Règlement, le gouverneur en conseil savait qu'il était possible que des brevets non admissibles soient inscrits au registre et ne puissent pas facilement en être supprimés en vertu du paragraphe 3(1) et qu'il a tenu compte de cette possibilité. L'alinéa 6(5)a) permet aux fabricants de médicaments génériques, dans le cas où une demande est présentée par le propriétaire d'un brevet à l'égard d'un avis d'allégation qui lui est signifié par un fabricant de médicaments génériques, de demander à la Cour de rejeter la demande parce qu'elle est fondée sur un brevet non admissible à l'inscription au registre.

24.     Cette forme de réparation n'est peut-être pas une solution parfaite pour les fabricants de médicaments génériques parce que, comme l'avocat des appelantes l'a signalé, la demande sera uniquement rejetée si tous les brevets en cause ne sont pas admissibles à l'inscription au registre, et parce que la procédure ne prévoit pas la délivrance d'une ordonnance judiciaire enjoignant au ministre de radier du registre les brevets non admissibles. Toutefois, le recours prévu à l'alinéa 6(5)a) vise directement le problème auquel fait face le fabricant de médicaments génériques, qui doit comparer son produit au médicament du propriétaire du brevet dont le brevet n'est pas admissible. Un tribunal peut statuer sur l'admissibilité du brevet ou des brevets en cause après avoir entendu le propriétaire du brevet ou des brevets et le fabricant de médicaments génériques qui fait concurrence à celui-ci.

[16]            Compte tenu de l'objet général que vise l'alinéa 6(5)a) et qu'a décrit le juge Rothstein dans l'arrêt Apotex, précité, il n'y a aucune raison pour laquelle, de l'avis d'Apotex, le critère « évident et manifeste » énoncé dans l'arrêt Hunt devrait s'appliquer à ce type de demande.

[17]            Dans la décision Procter, la juge Gauthier s'est exprimée comme suit à ce sujet :

9.     Avant de me pencher sur les principaux arguments soulevés par Genpharm dans sa requête, il est également important de mentionner qu'aucune décision n'a été rendue en vertu de l'alinéa 6(5)a) du Règlement depuis que cette disposition a été ajoutée en 1998; en outre, les parties ne s'entendent pas sur la norme ou les critères applicables pour évaluer le bien-fondé de la présente requête.

[...]

12.     Procter soutient que le raisonnement adopté dans Bayer s'applique aux requêtes déposées en vertu de l'alinéa 6(5)a) tandis que Genpharm prétend que cette disposition vise à éliminer les requêtes frivoles et que, par conséquent, rien ne justifie d'adopter une approche aussi restrictive.

13.     Les parties n'ont pas dit grand-chose de plus pour faire valoir leur point de vue respectif.


14.     Le régime administratif instauré par les articles 5 et 6 du Règlement s'applique seulement lorsqu'un avis de conformité est déposé concernant un médicament pouvant être comparé à un autre médicament dont le brevet a été dûment inclus au registre. Par conséquent, une requête visant à rejeter un avis de demande déposé en vertu du paragraphe 6(1) au motif que le seul brevet actuellement inscrit au registre est invalide correspond ou s'apparente à une requête en radiation de procédures au motif qu'il n'existe aucune cause d'action raisonnable.

15.     Il est bien établi en droit que si cette interprétation est correcte, la norme restrictive énoncée dans Hunt, précité, doit s'appliquer. Il appartient donc à Genpharm de prouver que clairement et manifestement, le brevet 376 ne pouvait être valablement inscrit au registre.

[18]            Il appert clairement de ces extraits que la juge Gauthier n'a pas été saisie d'arguments complets sur cette question et ne s'est pas fait demander d'examiner l'explication générale qu'a donnée le juge Rothstein dans l'arrêt Apotex au sujet de l'alinéa 6(5)a). Tel étant le cas, la décision de la juge Gauthier ne peut être considérée comme une décision ayant beaucoup de poids à cet égard et, en tout état de cause, la juge Gauthier a statué que la norme applicable en vertu de l'alinéa 6(5)a) n'était pas déterminante dans Procter, parce que la Cour « serait parvenue à la même conclusion si elle avait décidé de ne pas appliquer [la norme restrictive] » .

[19]            Dans l'arrêt Apotex, le juge Rothstein ne précise pas la norme à appliquer à la demande fondée sur l'alinéa 6(5)a); cependant, plutôt que de dire que cette demande repose sur un fondement analogue à celui de la requête portant radiation, soit l'absence de cause d'action raisonnable, il conclut comme suit : « un tribunal peut statuer sur l'admissibilité du brevet ou des brevets en cause après avoir entendu le propriétaire du brevet ou des brevets et le fabricant de médicaments génériques qui fait concurrence à celui-ci » .

[20]            Si le tribunal n'est pas appelé à conclure à l'absence de motifs raisonnables au soutien de la demande de GSK fondée sur le paragraphe 6(1), mais simplement à statuer sur l'admissibilité du brevet après avoir entendu les parties, il n'y a aucune raison, de l'avis d'Apotex, d'appliquer le critère restrictif « évident et manifeste » de l'arrêt Hunt en vertu de l'alinéa 6(5)a).

[21]            À mon avis, il demeure nécessaire de déterminer la norme à appliquer en vertu de l'alinéa 6(5)a). Dans la présente affaire, cette question n'est pas déterminante parce que, même lorsque j'applique la norme moins restrictive qu'Apotex me demande de retenir, je ne puis faire droit à la présente demande, pour les motifs exposés ci-après.

ADMISSIBILITÉ ET DÉLAI

[22]            Des différents motifs qu'Apotex invoque pour démontrer que les brevets ne sont pas valablement inscrits au registre, le plus important nécessite un examen de questions cruciales d'ordre chronologique. Ces questions mettent en cause l'ensemble du régime du Règlement et nécessitent un examen détaillé des dispositions qui suivent :



4. (1) La personne qui dépose ou a déposé une demande d'avis de conformité pour une drogue contenant un médicament ou qui a obtenu un tel avis peut soumettre au ministre une liste de brevets à l'égard de la drogue, accompagnée de l'attestation visée au paragraphe (7).

(2) La liste de brevets au sujet de la drogue doit contenir les renseignements suivants :

a) la forme posologique, la concentration et la voie d'administration de la drogue;

b) tout brevet canadien dont la personne est propriétaire ou à l'égard duquel elle détient une licence exclusive ou a obtenu le consentement du propriétaire pour l'inclure dans la liste, qui comporte une revendication pour le médicament en soi ou une revendication pour l'utilisation du médicament, et qu'elle souhaite voir inscrit au registre;

c) une déclaration portant, à l'égard de chaque brevet, que la personne qui demande l'avis de conformité en est le propriétaire, en détient la licence exclusive ou a obtenu le consentement du propriétaire pour l'inclure dans la liste;

d) la date d'expiration de la durée de chaque brevet aux termes des articles 44 ou 45 de la Loi sur les brevets;

e) l'adresse de la personne au Canada aux fins de signification de tout avis d'allégation visé aux alinéas 5(3)b) ou c), ou les nom et adresse au Canada d'une autre personne qui peut en recevoir signification avec le même effet que s'il s'agissait de la personne elle-même.

(3) Sous réserve du paragraphe (4), la personne qui soumet une liste de brevets doit le faire au moment du dépôt de la demande d'avis de conformité.

(4) La première personne peut, après la date de dépôt de la demande d'avis de conformité et dans les 30 jours suivant la délivrance d'un brevet qui est fondée sur une demande de brevet dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande d'avis de conformité, soumettre une liste de brevets, ou toute modification apportée à une liste de brevets, qui contient les renseignements visés au paragraphe (2).

(5) Lorsque la première personne soumet, conformément au paragraphe (4), une liste de brevets ou une modification apportée à une liste de brevets, elle doit indiquer la demande d'avis de conformité à laquelle se rapporte la liste ou la modification, en précisant notamment la date de dépôt de la demande.

(6) La personne qui soumet une liste de brevets doit la tenir à jour mais ne peut ajouter de brevets à une liste que si elle le fait en conformité avec le paragraphe (4).

(7) La personne qui soumet une liste de brevets ou une modification apportée à une liste de brevets aux termes des paragraphes (1) ou (4) doit remettre une attestation portant que :

a) les renseignements fournis sont exacts;

b) les brevets mentionnés dans la liste ou dans la modification sont admissibles à l'inscription au registre et sont pertinents quant à la forme posologique, la concentration et la voie d'administration de la drogue visée par la demande d'avis de conformité.

5. (1) Lorsqu'une personne dépose ou a déposé une demande d'avis de conformité pour une drogue et la compare, ou fait référence, à une autre drogue pour en démontrer la bioéquivalence d'après les caractéristiques pharmaceutiques et, le cas échéant, les caractéristiques en matière de biodisponibilité, cette autre drogue ayant été commercialisée au Canada aux termes d'un avis de conformité délivré à la première personne et à l'égard de laquelle une liste de brevets a été soumise, elle doit inclure dans la demande, à l'égard de chaque brevet inscrit au registre qui se rapporte à cette autre drogue :

a) soit une déclaration portant qu'elle accepte que l'avis de conformité ne sera pas délivré avant l'expiration du brevet;

b) soit une allégation portant que, selon le cas :

(i) la déclaration faite par la première personne aux termes de l'alinéa 4(2)c) est fausse,

(ii) le brevet est expiré,

(iii) le brevet n'est pas valide,

(iv) aucune revendication pour le médicament en soi ni aucune revendication pour l'utilisation du médicament ne seraient contrefaites advenant l'utilisation, la fabrication, la construction ou la vente par elle de la drogue faisant l'objet de la demande d'avis de conformité.

(1.1) Sous réserve du paragraphe (1.2), lorsque le paragraphe (1) ne s'applique pas, la personne qui dépose ou a déposé une demande d'avis de conformité pour une drogue contenant un médicament que l'on trouve dans une autre drogue qui a été commercialisée au Canada par suite de la délivrance d'un avis de conformité à la première personne et à l'égard de laquelle une liste de brevets a été soumise doit inclure dans la demande, à l'égard de chaque brevet inscrit au registre visant cette autre drogue contenant ce médicament, lorsque celle-ci présente la même voie d'administration et une forme posologique et une concentration comparables :

a) soit une déclaration portant qu'elle accepte que l'avis de conformité ne soit pas délivré avant l'expiration du brevet;

b) soit une allégation portant que, selon le cas :

(i) la déclaration faite par la première personne aux termes de l'alinéa 4(2)c) est fausse,

(ii) le brevet est expiré,

(iii) le brevet n'est pas valide,

(iv) aucune revendication pour le médicament en soi ni aucune revendication pour l'utilisation du médicament ne seraient contrefaites advenant l'utilisation, la fabrication, la construction ou la vente par elle de la drogue faisant l'objet de la demande d'avis de conformité.

(1.2) Si une personne visée au paragraphe (1.1) a signifié, conformément aux alinéas (3)b) ou c), un avis d'allégation à une première personne à l'égard d'un brevet inscrit au registre, elle n'est tenue de signifier un avis d'allégation à l'égard de la même demande, de la même allégation et du même brevet à aucune autre première personne.

(2) Lorsque, après le dépôt par la seconde personne d'une demande d'avis de conformité mais avant la délivrance de cet avis, une liste de brevets ou une modification apportée à une liste de brevets est soumise à l'égard d'un brevet aux termes du paragraphe 4(4), la seconde personne doit modifier la demande pour y inclure, à l'égard de ce brevet, la déclaration ou l'allégation exigées par les paragraphes (1) ou (1.1), selon le cas.

(3) Lorsqu'une personne fait une allégation visée aux alinéas (1)b) ou (1.1)b) ou au paragraphe (2), elle doit :

a) fournir un énoncé détaillé du droit et des faits sur lesquels elle se fonde;

b) si l'allégation est faite aux termes de l'un des sous-alinéas (1)b)(i) à (iii) ou (1.1)b)(i) à (iii), signifier un avis de l'allégation à la première personne;

c) si l'allégation est faite aux termes des sous-alinéas (1)b)(iv) ou (1.1)b)(iv) :

(i) signifier à la première personne un avis de l'allégation relative à la demande déposée selon les paragraphes (1) ou (1.1), au moment où elle dépose la demande ou par la suite,

(ii) insérer dans l'avis d'allégation une description de la forme posologique, de la concentration et de la voie d'administration de la drogue visée par la demande;

d) signifier au ministre une preuve de la signification effectuée conformément aux alinéas b) ou c).

DROITS D'ACTION

6. (1) La première personne peut, dans les 45 jours après avoir reçu signification d'un avis d'allégation aux termes des alinéas 5(3)b) ou c), demander au tribunal de rendre une ordonnance interdisant au ministre de délivrer un avis de conformité avant l'expiration du brevet visé par l'allégation.

(2) Le tribunal rend une ordonnance en vertu du paragraphe (1) à l'égard du brevet visé par une ou plusieurs allégations si elle conclut qu'aucune des allégations n'est fondée.

(3) La première personne signifie au ministre, dans la période de 45 jours visée au paragraphe (1), la preuve que la demande visée à ce paragraphe a été faite.

(4) Lorsque la première personne n'est pas le propriétaire de chaque brevet visé dans la demande mentionnée au paragraphe (1), le propriétaire de chaque brevet est une partie à la demande.

(5) Lors de l'instance relative à la demande visée au paragraphe (1), le tribunal peut, sur requête de la seconde personne, rejeter la demande si, selon le cas :

a) il estime que les brevets en cause ne sont pas admissibles à l'inscription au registre ou ne sont pas pertinents quant à la forme posologique, la concentration et la voie d'administration de la drogue pour laquelle la seconde personne a déposé une demande d'avis de conformité;

b) il conclut qu'elle est inutile, scandaleuse, frivole ou vexatoire ou constitue autrement un abus de procédure.

(6) Aux fins de la demande visée au paragraphe (1), lorsque la seconde personne a fait une allégation aux termes des sous-alinéas 5(1)b)(iv) ou (1.1)b)(iv) à l'égard d'un brevet et que ce brevet a été accordé pour le médicament en soi préparé ou produit selon les modes ou procédés de fabrication décrits en détail et revendiqués ou selon leurs équivalents chimiques manifestes, la drogue que la seconde personne projette de produire est, en l'absence d'une preuve contraire, réputée préparée ou produite selon ces modes ou procédés.

(7) Sur requête de la première personne, le tribunal peut, au cours de l'instance :

a) ordonner à la seconde personne de produire les extraits pertinents de la demande d'avis de conformité qu'elle a déposée et lui enjoindre de produire sans délai tout changement apporté à ces extraits au cours de l'instance;

b) enjoindre au ministre de vérifier que les extraits produits correspondent fidèlement aux renseignements figurant dans la demande d'avis de conformité.

(8) Tout document produit aux termes du paragraphe (7) est considéré comme confidentiel.

(9) Le tribunal peut, au cours de l'instance relative à la demande visée au paragraphe (1), rendre toute ordonnance relative aux dépens, notamment sur une base avocat-client, conformément à ses règles.

(10) Lorsque le tribunal rend une ordonnance relative aux dépens, il peut tenir compte notamment des facteurs suivants :

a) la diligence des parties à poursuivre la demande;

b) l'inscription, sur la liste de brevets qui fait l'objet d'une attestation, de tout brevet qui n'aurait pas dû y être inclus aux termes de l'article 4;

c) le fait que la première personne n'a pas tenu à jour la liste de brevets conformément au paragraphe 4(6).

4. (1) A person who files or has filed a submission for, or has been issued, a notice of compliance in respect of a drug that contains a medicine may submit to the Minister a patent list certified in accordance with subsection (7) in respect of the drug.

(2) A patent list submitted in respect of a drug must

(a) indicate the dosage form, strength and route of administration of the drug;

(b) set out any Canadian patent that is owned by the person, or in respect of which the person has an exclusive licence or has obtained the consent of the owner of the patent for the inclusion of the patent on the patent list, that contains a claim for the medicine itself or a claim for the use of the medicine and that the person wishes to have included on the register;

(c) contain a statement that, in respect of each patent, the person applying for a notice of compliance is the owner, has an exclusive licence or has obtained the consent of the owner of the patent for the inclusion of the patent on the patent list;

(d) set out the date on which the term limited for the duration of each patent will expire pursuant to section 44 or 45 of the Patent Act; and

(e) set out the address in Canada for service on the person of any notice of an allegation referred to in paragraph 5(3)(b) or (c), or the name and address in Canada of another person on whom service may be made, with the same effect as if service had been made on the person.

(3) Subject to subsection (4), a person who submits a patent list must do so at the time the person files a submission for a notice of compliance.

(4) A first person may, after the date of filing of a submission for a notice of compliance and within 30 days after the issuance of a patent that was issued on the basis of an application that has a filing date that precedes the date of filing of the submission, submit a patent list, or an amendment to an existing patent list, that includes the information referred to in subsection (2).

(5) When a first person submits a patent list or an amendment to an existing patent list in accordance with subsection (4), the first person must identify the submission to which the patent list or the amendment relates, including the date on which the submission was filed.

(6) A person who submits a patent list must keep the list up to date but may not add a patent to an existing patent list except in accordance with subsection (4).

(7) A person who submits a patent list or an amendment to an existing patent list under subsection (1) or (4) must certify that

(a) the information submitted is accurate; and

(b) the patents set out on the patent list or in the amendment are eligible for inclusion on the register and are relevant to the dosage form, strength and route of administration of the drug in respect of which the submission for a notice of compliance has been filed.

5. (1) Where a person files or has filed a submission for a notice of compliance in respect of a drug and compares that drug with, or makes reference to, another drug for the purpose of demonstrating bioequivalence on the basis of pharmaceutical and, where applicable, bioavailability characteristics and that other drug has been marketed in Canada pursuant to a notice of compliance issued to a first person and in respect of which a patent list has been submitted, the person shall, in the submission, with respect to each patent on the register in respect of the other drug,

(a) state that the person accepts that the notice of compliance will not issue until the patent expires; or

(b) allege that

(i) the statement made by the first person pursuant to paragraph 4(2)(c) is false,

(ii) the patent has expired,

(iii) the patent is not valid, or

(iv) no claim for the medicine itself and no claim for the use of the medicine would be infringed by the making, constructing, using or selling by that person of the drug for which the submission for the notice of compliance is filed.

(1.1) Subject to subsection (1.2), where subsection (1) does not apply and where a person files or has filed a submission for a notice of compliance in respect of a drug that contains a medicine found in another drug that has been marketed in Canada pursuant to a notice of compliance issued to a first person and in respect of which a patent list has been submitted, the person shall, in the submission, with respect to each patent included on the register in respect of the other drug containing the medicine, where the drug has the same route of administration and a comparable strength and dosage form,

(a) state that the person accepts that the notice of compliance will not issue until the patent expires; or

(b) allege that

(i) the statement made by the first person pursuant to paragraph 4(2)(c) is false,

(ii) the patent has expired,

(iii) the patent is not valid, or

(iv) no claim for the medicine itself and no claim for the use of the medicine would be infringed by the making, constructing, using or selling by that person of the drug for which the submission for the notice of compliance is filed.

(1.2) Where a person referred to in subsection (1.1) has served, in accordance with paragraph (3)(b) or (c), a notice of allegation on a first person in respect of a patent included on the register, the person is not required to serve a notice of allegation in respect of the same submission, the same allegation and the same patent on another first person.

(2) Where, after a second person files a submission for a notice of compliance but before the notice of compliance is issued, a patent list or an amendment to a patent list is submitted in respect of a patent pursuant to subsection 4(4), the second person shall amend the submission to include, in respect of that patent, the statement or allegation that is required by subsection (1) or (1.1), as the case may be.

(3) Where a person makes an allegation pursuant to paragraph (1)(b) or (1.1)(b) or subsection (2), the person shall

(a) provide a detailed statement of the legal and factual basis for the allegation;

(b) if the allegation is made under any of subparagraphs (1)(b)(i) to (iii) or (1.1)(b)(i) to (iii), serve a notice of the allegation on the first person;

(c) if the allegation is made under subparagraph (1)(b)(iv) or (1.1)(b)(iv),

(i) serve on the first person a notice of the allegation relating to the submission filed under subsection (1) or (1.1) at the time that the person files the submission or at any time thereafter, and

(ii) include in the notice of allegation a description of the dosage form, strength and route of administration of the drug in respect of which the submission has been filed; and

(d) serve proof of service of the information referred to in paragraph (b) or (c) on the Minister.

RIGHT OF ACTION

6. (1) A first person may, within 45 days after being served with a notice of an allegation pursuant to paragraph 5(3)(b) or (c), apply to a court for an order prohibiting the Minister from issuing a notice of compliance until after the expiration of a patent that is the subject of the allegation.

(2) The court shall make an order pursuant to subsection (1) in respect of a patent that is the subject of one or more allegations if it finds that none of those allegations is justified.

(3) The first person shall, within the 45 days referred to in subsection (1), serve the Minister with proof that an application referred to in that subsection has been made.

(4) Where the first person is not the owner of each patent that is the subject of an application referred to in subsection (1), the owner of each such patent shall be made a party to the application.

(5) In a proceeding in respect of an application under subsection (1), the court may, on the motion of a second person, dismiss the application

(a) if the court is satisfied that the patents at issue are not eligible for inclusion on the register or are irrelevant to the dosage form, strength and route of administration of the drug for which the second person has filed a submission for a notice of compliance; or

(b) on the ground that the application is redundant, scandalous, frivolous or vexatious or is otherwise an abuse of process.

(6) For the purposes of an application referred to in subsection (1), where a second person has made an allegation under subparagraph 5(1)(b)(iv) or (1.1)(b)(iv) in respect of a patent and where that patent was granted for the medicine itself when prepared or produced by the methods or processes of manufacture particularly described and claimed or by their obvious chemical equivalents, it shall be considered that the drug proposed to be produced by the second person is, in the absence of proof to the contrary, prepared or produced by those methods or processes.

(7) On the motion of a first person, the court may, at any time during a proceeding,

(a) order a second person to produce any portion of the submission for a notice of compliance filed by the second person relevant to the disposition of the issues in the proceeding and may order that any change made to the portion during the proceeding be produced by the second person as it is made; and

(b) order the Minister to verify that any portion produced corresponds fully to the information in the submission.

(8) A document produced under subsection (7) shall be treated confidentially.

(9) In a proceeding in respect of an application under subsection (1), a court may make any order in respect of costs, including on a solicitor-and-client basis, in accordance with the rules of the court.

(10) In addition to any other matter that the court may take into account in making an order as to costs, it may consider the following factors:

(a) the diligence with which the parties have pursued the application;

(b) the inclusion on the certified patent list of a patent that should not have been included under section 4; and

(c) the failure of the first person to keep the patent list up to date in accordance with subsection 4(6).


[23]            De l'avis d'Apotex, ce régime signifie que, conformément à l'article 4 du Règlement et aux décisions que la Cour fédérale a rendues au sujet de l'article 4, le titulaire d'un brevet est autorisé à ajouter des brevets au registre uniquement dans des cas restreints et précis.

[24]            Selon le Règlement, le fabricant qui dépose une PDN afin d'obtenir un ADC peut soumettre une liste de brevets à ajouter au registre. Ce registre, que tient le ministre, se compose des listes de brevets admissibles soumises à l'égard des drogues précises pour lesquelles un ADC a été délivré.

[25]            De l'avis d'Apotex, il appert clairement du texte du Règlement que les listes de brevets sont déposées à l'égard d'une drogue et non d'une demande d'ADC et qu'il ne peut y avoir qu'une seule liste de brevets se rapportant à une drogue, malgré la délivrance de plusieurs ADC (Bristol-Myers Squibb Canada Inc. c. Canada (Procureur général) (2001), 10 C.P.R. (4th) 318, aux pages 324 et 325 (C.F. 1re inst.); (2002), 16 C.P.R. (4th) 425 (C.A.F.); Toba Pharma Inc. c. Canada (Procureur général) (2002), 21 C.P.R. (4th) 232, aux paragraphes 28 et 34 (C.F. 1re inst.)).


[26]            Le paragraphe 4(3) du Règlement dispose que la personne qui soumet une liste de brevets à l'égard d'une drogue doit le faire au moment du dépôt de la demande d'ADC. Le paragraphe 4(4) énonce une exception à cette exigence selon laquelle, lorsqu'une demande de brevet a été faite avant le dépôt d'une PDN à l'égard de la drogue, mais que le brevet n'a pas été délivré au moment du dépôt de ladite PDN, la personne peut soumettre une liste de brevets dans les trente jours suivant la délivrance du brevet demandé.

[27]            De l'avis d'Apotex, les modifications apportées au Règlement en mars 1998 indiquent clairement que le délai prescrit pour le dépôt d'une liste de brevets doit être respecté à la lettre. Ces modifications ont pour effet d'ajouter le paragraphe 4(6), selon lequel la personne qui soumet une liste de brevets doit la tenir à jour, mais ne peut ajouter de brevets à une liste existante que conformément au paragraphe 4(4) (décision Bristol-Myers,précitée, aux pages 324 et 325; décision Toba Pharma Inc., précitée, aux paragraphes 28 et 34).

[28]            Apotex affirme qu'il est évident, en vertu de l'article 4, qu'une liste de brevets ne peut être soumise qu'au moment du premier dépôt d'une PDN à l'égard de la drogue ou, lorsqu'un brevet a été demandé avant ce dépôt, mais n'a pas encore été délivré, dans les trente jours suivant cette délivrance. Selon Apotex, l'intention est manifestement de restreindre les brevets pouvant être inscrits au registre à ceux qui ont été obtenus ou demandés au moment où le titulaire de brevet commence à commercialiser un produit pharmaceutique donné.


[29]            Compte tenu de l'économie du Règlement et des conséquences radicales de son application pour la seconde personne, il est important que les conditions strictes énoncées à l'article 4 quant à l'ajout de brevets au registre soient respectées et qu'aucun brevet ne soit ajouté en dehors de ces délais stricts. Comme la Cour l'a confirmé, ces exigences visaient à éviter de priver indûment les fabricants de produits génériques de l'accès au marché (Novopharm Ltd. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1998), 78 C.P.R. (3d) 54, aux pages 61 à 64 (C.F. 1re inst.); Toba Pharma, paragraphes 28 et 34; Règlement, article 4).

[30]            Dans Bristol-Myers Squibb Canada Inc. c. Canada (Procureur général), 2002 CAF 32, [2002] A.C.F. n ° 96, la Cour d'appel fédérale a récemment confirmé que, depuis l'ajout du paragraphe 4(6) au Règlement, les exigences énoncées dans celui-ci quant aux délais doivent être observées à la lettre et les titulaires de brevet ne peuvent contourner ces exigences et ajouter des brevets à une liste existante en déposant une PDN subséquente et en y joignant une liste de brevets. Lorsqu'une liste de brevets existe relativement à un produit pharmaceutique, un brevet ne peut être ajouté à la liste à l'égard de ce médicament que s'il a été demandé avant le dépôt de la PDN originale et est délivré subséquemment. La PDN postérieure menant à la délivrance d'un ADC subséquent concerne un nouveau produit pharmaceutique à l'égard duquel aucune liste de brevets n'existe.

[31]            Apotex demande à la Cour de prendre note du fait que toutes les présentations de GSK à l'égard desquelles les brevets sont inscrits concernent le chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté et que, conformément au Règlement et à la jurisprudence connexe, il ne peut y avoir qu'une seule liste de brevets se rapportant à cette drogue. Le délai prescrit à l'égard de cette liste de brevets doit être respecté. Chacun des brevets renferme une revendication relative aux formes anhydres du chlorhydrate de paroxétine.

[32]            Apotex estime qu'il est évident, eu égard à ce qui précède, que les brevets ont été ajoutés irrégulièrement au registre. Le premier ADC relatif aux comprimés de chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté a été délivré le 4 mai 1993, bien avant le dépôt des demandes relatives aux brevets. Conformément aux exigences strictes de l'article 4 du Règlement quant aux délais, les brevets n'ont pu être ajoutés en bonne et due forme au registre, parce que les demandes s'y rapportant n'avaient pas été déposées avant la demande relative à l'ADC original.


[33]            Apotex fait valoir que les quatre présentations supplémentaires à l'égard desquelles les brevets sont inscrits ne concernent pas un produit pharmaceutique différent et que, par conséquent, les délais applicables ne recommencent pas à courir à compter de la date des demandes relatives à ces ADC. Le produit pharmaceutique qui fait l'objet de chacun de ces ADC est plutôt identique au chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté de GSK qui est commercialisé au moyen de l'ADC original. C'est ce qu'indique nettement le fait qu'aucun nouveau numéro d'identification du médicament (DIN) n'a été attribué à l'égard des nouveaux ADC. Par suite de la délivrance des quatre ADC supplémentaires à l'égard desquels les brevets sont inscrits, GSK a continué à vendre des comprimés de chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté en concentrations de 10, 20 et 30 mg sous les mêmes DIN que ceux qu'elle avait utilisés précédemment.

[34]            En conséquence, Apotex estime que les délais prévus à l'article 4 du Règlement n'ont pas été respectés en ce qui concerne le produit pharmaceutique et que ces délais ne peuvent être prorogés par la délivrance d'un ADC supplémentaire à l'égard du même produit pharmaceutique.

[35]            Apotex est d'avis que le fait de permettre au titulaire de brevet d'ajouter un brevet au registre à l'égard de la même drogue pour laquelle un ADC a précédemment été délivré alors que les délais applicables à l'ajout de ce brevet ont expiré irait directement à l'encontre de l'intention du Règlement et de l'interprétation que la Cour fédérale a donnée à celui-ci. Dans les circonstances, GSK a tenté de contourner les délais stricts prévus au Règlement en ajoutant les brevets, en dehors des délais prescrits, à l'égard du même produit de chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté pour lequel un ADC avait été délivré en 1993.

[36]            Au soutien de cette interprétation, Apotex se fonde en grande partie sur la décision qu'a rendue le juge Hugessen dans Novopharm Ltd. c. Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social et al (1998), 78 C.P.R. (3d) 54 (C.F. 1re inst.).

[37]            En réponse, GSK fait valoir que les délais prévus au Règlement ont été respectés en l'espèce et que l'ajout des brevets au registre a été valablement autorisé.

[38]            Selon GSK, les exigences à respecter pour inscrire un brevet au registre conformément au Règlement sont les suivantes :

a)         une demande d'ADC doit être déposée;

b)        le brevet doit comporter une revendication à l'égard du médicament lui-même ou de son utilisation;

c)         les délais prévus au paragraphe 4(3) ou 4(4) doivent être respectés;

d)         les critères prévus à l'alinéa 4(7)b) quant à la pertinence doivent être établis.

[39]            Chacune de ces exigences constitue une condition préalable à l'inscription d'un brevet au registre.


[40]            GSK ajoute que le lien critique entre le brevet et le produit de la première personne a toujours été le médicament lui-même. Sur ce point, l'obligation selon laquelle le brevet doit comporter une revendication concernant le médicament lui-même est énoncée dans le Règlement depuis l'adoption de celui-ci. La seule exigence concernant le produit pharmaceutique lui-même est celle qui est prévue à l'alinéa 4(7)b), soit que le brevet soit pertinent quant à la forme posologique, à la concentration et à la voie d'administration de la drogue. Cette exigence a été ajoutée en 1998 (Règlement modifiant le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/98-166, 12 mars 1998).

[41]            Les brevets sont inscrits à l'égard du médicament lui-même et non du produit pharmaceutique représenté par les avis de conformité individuels. C'est ce qui ressort clairement de l'examen des produits pharmaceutiques de GSK, soit ses comprimés de 10, 20 et 30 mg représentés par les mêmes DIN pour chacun de ses ADC. Cela s'explique par le fait que les ADC subséquents relatifs au même médicament couvrent le produit pharmaceutique représenté dans tout ADC antérieur.

[42]            Apotex allègue que les brevets sont inscrits à l'égard des produits pharmaceutiques individuels et non du médicament lui-même. Pour tous les motifs exposés ci-dessus, GSK répond que cette position est inacceptable.

[43]            GSK ajoute que l'interprétation d'Apotex irait à l'encontre de l'objet du Règlement, qui vise à empêcher la violation de ses brevets. Apotex ne devrait pas être autorisée à manipuler le système afin d'éviter de devoir répondre aux revendications des brevets de GSK se rapportant au médicament en question.


[44]            Selon Apotex, une liste de brevets ne peut être soumise qu'au moment du premier dépôt d'une PDN pour la drogue, mais le Règlement sur les aliments et drogues (le Règlement A.D.) reconnaît expressément qu'un supplément à une PDN ou une PADN peut constituer le fondement de la délivrance d'un ADC :

C.08.004. (1) Sous réserve de l'article C.08.004.1, après avoir terminé l'examen d'une présentation de drogue nouvelle, d'une présentation abrégée de drogue nouvelle ou d'un supplément à l'une de ces présentations, le ministre :

a) si la présentation ou le supplément est conforme aux articles C.08.002, C.08.002.1 ou C.08.003, selon le cas, et à l'article C.08.005.1, délivre un avis de conformité;

b) si la présentation ou le supplément n'est pas conforme aux articles C.08.002, C.08.002.1 ou C.08.003, selon le cas, ou à l'article C.08.005.1, en informe le fabricant.

Règlement sur les aliments et drogues, L.R.C. 1978, ch. 870, paragraphe C.08.004(1), AMR, onglet 4.

[45]            Par conséquent, GSK estime qu'un supplément constitue une demande d'ADC envisagée par l'article 4 du Règlement. De plus, la Cour fédérale a conclu que le mot « submission » (demande) aux fins des articles 4 et 5 du Règlement couvre expressément une demande supplémentaire.

[46]            Dans les circonstances, l'expression « demande d'avis de conformité » utilisée aux articles 4 et 5 du Règlement désigne une présentation de drogue nouvelle, une présentation abrégée de drogue nouvelle et un supplément à une présentation de drogue nouvelle ou à une présentation abrégée de drogue nouvelle, comme la Cour l'a établi clairement dans Apotex Inc. c. Canada (Ministre de la Santé) (1999), 87 C.P.R. (3d) 271, à la page 287 (C.F. 1re inst.), confirmé par (2001), 11 C.P.R. (4th) 538 (C.A.F.) (ci-après Apotex Inc.).

[47]            L'affaire Apotex Inc., précitée, portait sur le brevet n ° 2,178,637 (le brevet 637), qui appartient à GSK. Apotex avait demandé le contrôle judiciaire d'une décision par laquelle le ministre avait ajouté le brevet 637 au registre sur la foi d'une présentation de drogue nouvelle supplémentaire. La Section de première instance de la Cour fédérale a statué que le ministre n'avait pas commis d'erreur en ajoutant le brevet 637 au registre et la Cour d'appel a confirmé cette décision.

[48]            Il convient de souligner que la décision que la juge McGillis a rendue dans Apotex Inc. était fondée sur le Règlement qui existait avant les modifications de 1998. Cependant, la Cour a tranché cette même question en se fondant sur le Règlement modifié.

[49]            Dans Ferring Inc. c. Canada (Procureur général), [2003] A.C.F. n ° 409, la Cour a conclu que le raisonnement suivi dans l'arrêt Apotex Inc. n'a pas été modifié par l'ajout du paragraphe 4(6) au Règlement. Il est encore nécessaire qu'une demande d'ADC soit faite pour tous les changements énumérés au paragraphe C.08.003(2) du Règlement A.D. et aucune distinction n'est établie en fonction de l'importance desdits changements.


[50]            Ainsi, selon GSK, il est évident que, même si les demandes qui constituaient le fondement de l'inscription des brevets en litige au registre étaient des demandes supplémentaires, elles sont visées par le Règlement et une demande supplémentaire suffit pour constituer le fondement de la délivrance d'un ADC. Par conséquent, la question qui reste à trancher au sujet du délai est de savoir si les brevets ont été inscrits à la date de la demande d'ADC, dans le cas d'un brevet déjà délivré, ou dans les 30 jours suivant l'octroi du brevet dont la demande a été déposée avant une demande d'ADC.

[51]            GSK conclut en disant que, d'après la preuve présentée dans la présente requête, les délais prescrits ont été respectés dans le cas des brevets en litige. En effet, tel qu'il est mentionné plus haut, la liste de brevets en question a été déposée dans les 30 jours suivant la délivrance du brevet ou en même temps que la demande d'ADC elle-même, dans les cas où la délivrance du brevet était antérieure au dépôt de celle-ci. De plus, la date du dépôt de chaque brevet était antérieure à celle du dépôt de la demande.


[52]            Il convient de souligner que le raisonnement de GSK est fondé en grande partie sur la décision que la juge McGillis a rendue dans Apotex Inc., précitée, Afin de distinguer les faits de la présente affaire d'avec ceux de la décision rendue dans Novopharm, précitée, GSK fait valoir que, dans cette dernière décision, le juge Hugessen examinait la façon dont les brevets sont inscrits la première fois conformément à l'article 4 du Règlement. Dans la présente affaire, nous examinons les demandes supplémentaires qui, comme la jurisprudence l'indique clairement, sont admissibles à être inscrites au registre et couvrent la demande originale 08356 faite le 11 juin 1990. À mon avis, les questions que soulève Apotex en l'espèce en ce qui a trait au délai étaient identiques à celles dont la juge McGillis était saisie dans Apotex Inc., qui portait également sur la situation examinée dans Novopharm et sur sa pertinence quant aux demandes supplémentaires. Le raisonnement détaillé de la juge McGillis (aux pages 285-290) sur ce point a une importance vitale pour les questions que je dois trancher en l'espèce :

Dans l'argument qu'il a développé au sujet de l'interprétation qu'il convient de donner du paragraphe 4(5) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), l'avocat d'Apotex s'est d'abord et avant tout attardé à la signification du mot anglais « submission » ( « présentation » ou « demande » , selon le cas). En particulier, il a soutenu que, par « demande » , il faut entendre uniquement une présentation de drogue nouvelle ou une présentation abrégée de drogue nouvelle, à l'exclusion d'un supplément à l'une ou à l'autre. À l'appui de cet argument, il s'est reporté au libellé du paragraphe C.08.004(1) du Règlement sur les aliments et drogues, qui établit une distinction entre ces deux termes en parlant de « la présentation ou le supplément » (en anglais « submission or supplement » ). Il n'a toutefois pas mentionné le mot anglais « submission » ( « demande » ) dans le contexte dans lequel il figure aux articles 4 et 5 du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), c'est-à-dire en tant que « demande d'avis de conformité » en anglais « submission for a notice of compliance » ).

Pour interpréter le mot anglais « submission » , il faut examiner le sens que lui donnent tant le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) que le Règlement sur les aliments et drogues et l'emploi que ces deux règlements font de ce terme, notamment aux articles C.08.003 et C.08.004 de ce dernier règlement.

Il ressort d'un examen du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) que l'expression qui est employée aux articles 4 et 5 n'est pas « submission » (demande), mais « submission for a notice of compliance » (demande d'avis de conformité). L'article 2 définit l'avis de conformité en précisant que cette expression désigne l'avis délivré en vertu de l'article C.08.004 du Règlement sur les aliments et drogues . Il faut donc examiner cette disposition, de même que les articles connexes du Règlement sur les aliments et drogues.

Ainsi que je l'ai déjà précisé, le mot anglais « submission » revient constamment dans les dispositions de la section 8 du Règlement sur les aliments et drogues dans les expressions « a new drug submission » ( « présentation de drogue nouvelle » ), « abbreviated new drug submission » ( « présentation abrégée de drogue nouvelle » ) et « supplement to a new drug submission or to an abbreviated new drug submission » ( « supplément à une présentation de drogue nouvelle ou à une présentation abrégée de drogue nouvelle » ). Aux termes de l'alinéa C.08.003(1)a) du Règlement sur les aliments et drogues, lorsque certains éléments ayant trait à la drogue nouvelle diffèrent sensiblement des renseignements ou du matériel contenus dans la présentation de drogue nouvelle ou la présentation abrégée de drogue nouvelle, le fabricant de la drogue nouvelle doit déposer soit un supplément « à la présentation de drogue nouvelle » , soit un supplément « à la présentation abrégée de drogue nouvelle » . L'alinéa C.08.003(1)b) prévoit également la délivrance d'un avis de conformité à l'égard du supplément.

Qui plus est, aux termes du paragraphe C.08.003(3), le supplément à la présentation de drogue nouvelle ou à la présentation abrégée de drogue nouvelle devient le moyen qu'utilise le fabricant pour communiquer au ministre des renseignements et du matériel suffisants, « à l'égard des éléments qui diffèrent sensiblement de ce qui figure dans la présentation » pour lui permettre d'évaluer l'innocuité et l'efficacité de la drogue nouvelle « relativement à ces éléments » .


En d'autres termes, le supplément ne vicie et ne supplante pas la nouvelle présentation de drogue nouvelle ou la présentation abrégée de drogue nouvelle, mais constitue plutôt une demande indépendante présentée par le fabricant relativement à certains éléments déterminés qui diffèrent sensiblement des renseignements et du matériel se trouvant dans la nouvelle présentation de drogue nouvelle ou la présentation abrégée de drogue nouvelle. L'indépendance ou « autonomie » de la nouvelle présentation de drogue nouvelle ou la présentation abrégée de drogue nouvelle est renforcée par les alinéas C.08.003(1)b) et C.08.004(1)a), qui portent sur la délivrance d'un avis de conformité en réponse à un supplément. En particulier, l'alinéa C.08.004(1)a) renforce encore plus l'idée qu'un supplément constitue une présentation, étant donné qu'il précise dans les termes les plus nets que les trois mécanismes d'information, à savoir la présentation de drogue nouvelle, la présentation abrégée de drogue nouvelle et le supplément à l'une ou l'autre présentation donne lieu à la délivrance d'un avis de conformité dans certaines circonstances déterminées. Il ressort donc à l'évidence des dispositions applicables qu'un supplément à une présentation de drogue nouvelle ou à une présentation abrégée de drogue nouvelle constitue un type de demande ou de présentation qu'un fabricant de médicaments peut présenter pour obtenir un avis de conformité en vue de commercialiser une drogue au Canada.

Pour l'examen de l'expression anglaise « a submission for a notice of compliance » ( « une demande d'avis de conformité » ) qui se trouve aux articles 4 et 5 du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), il convient de signaler que les mécanismes qui déclenchent la délivrance d'un avis de conformité sont, en raison de la définition que l'article 2 donne de l' « avis de conformité » , ceux qui sont précisés à l'article C.08.004 du Règlement sur les aliments et drogues, à savoir une présentation de drogue nouvelle, une présentation abrégée de drogue nouvelle et un supplément à l'une ou l'autre. Dans ces conditions, l'expression anglaise « a submission for a notice of compliance » ( « une demande d'avis de conformité » ) qui est employée aux articles 4 et 5 du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) s'entend d'une présentation de drogue nouvelle, d'une présentation abrégée de drogue nouvelle ou d'un supplément à une présentation de drogue nouvelle ou à une présentation abrégée de drogue nouvelle.


Un examen de la version française des dispositions applicables appuie également mon interprétation du sens à donner à l'expression anglaise « a submission for a notice of compliance » ( « une demande d'avis de conformité » ). En effet, à l'alinéa C.08.004a) du Règlement sur les aliments et drogues, le ministre « après avoir terminé l'examen d'une présentation de drogue nouvelle, d'une présentation abrégée de drogue nouvelle ou d'un supplément à l'une de ces présentations [...] si la présentation ou le supplément est conforme [...] délivre un avis de conformité » . La version française et la version anglaise sont donc tout à fait compatibles et le mot « présentation » correspond au mot anglais « submission » . Il y a toutefois une différence marquée entre le libellé de la version française de l'alinéa C.08.004a) du Règlement sur les aliments et drogues et celui du paragraphe 4(5) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité). Pour bien illustrer l'importance de cette différence, il convient d'abord de citer la version anglaise de ces deux dispositions réglementaires. Dans la version anglaise du paragraphe 4(5) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), le législateur a employé l'expression « submission for a notice of compliance » sans parler de supplément, contrairement au libellé exprès de l'alinéa C.08.004a) du Règlement sur les aliments et drogues. Toutefois, dans la version française du paragraphe 4(5) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), le législateur a choisi de ne pas employer les mots « présentation » et « supplément » qui figurent à l'alinéa C.08.004a) du Règlement sur les aliments et drogues, mais plutôt l'expression plus large « une demande d'avis de conformité » . L'article 2 du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) définit « l'avis de conformité » comme un « avis délivré au titre de l'article C.08.004 [...] » du Règlement sur les aliments et drogues . Étant donné qu'il n'y a pas le moindre doute qu'une « demande d'avis de conformité » peut être présentée au moyen d'une présentation de drogue nouvelle, d'une présentation abrégée de drogue nouvelle ou d'un supplément à l'une de ces présentations, il ressort à l'évidence des termes employés dans la version française qu'un supplément est assimilé à un « avis de conformité » et qu'un supplément tombe manifestement sous le coup du paragraphe 4(5) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité).

À l'appui de sa thèse sur l'interprétation qu'il convient de donner du paragraphe 4(5) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), l'avocat d'Apotex cite le jugement Novopharm Ltd. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), (1998), 78 C.P.R. (3d) 54 (C.F. 1re inst.). Dans ce jugement, le juge Hugessen était saisi d'une demande visant à faire rayer du registre certains renseignements provenant d'une liste de brevets modifiée. Dans cette affaire, le juge Hugessen n'était pas appelé, au vu des faits portés à sa connaissance, à se pencher sur la signification de l'expression « demande d'avis de conformité » que l'on trouve au paragraphe 4(5) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) ou à examiner les dispositions applicables du Règlement sur les aliments et drogues. Toutefois, comme l'avocat d'Apotex table beaucoup sur cette décision, je vais exposer les raisons pour lesquelles ce jugement n'appuie pas, selon moi, sa thèse.

Dans l'affaire Novopharm Ltd. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (précitée), le breveté avait obtenu en 1985 un avis de conformité relativement à du chlorhydrate de térazosine en comprimés de 1, 2 et 5 mg, et un second avis de conformité en 1992 relativement aux comprimés de 10 mg. Les présentations de drogue nouvelle à l'égard desquelles les avis de conformité avaient été délivrés avaient été déposées en 1983 et en 1991 respectivement. En avril 1993, moins de trente jours après l'entrée en vigueur du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), le breveté avait déposé des listes de brevets relativement aux drogues visées par les avis de conformité. En octobre 1995, le breveté avait déposé une présentation de drogue nouvelle et obtenu un avis de conformité relativement à un « échantillon de départ » comprenant des comprimés de 1, 2 et 5 mg de chlorhydrate de térazosine qui étaient emballés de façon à ce que le patient augmente graduellement la dose sur une période de quatre semaines. La drogue était identique à celle visée par les avis de conformité antérieurs délivrés en 1985 et 1992. En juin 1997, le breveté a obtenu trois nouveaux brevets qui renfermaient des revendications portant sur le médicament chlorhydrate de térazosine. Les demandes de brevets avaient été déposées entre 1991 et octobre 1995. Dans les trente jours suivant la délivrance des brevets, le breveté a déposé des modifications aux listes de brevets qu'il avait déposées à l'égard des avis de conformité de 1985 et 1992. Le breveté n'a pas déposé de nouvelle liste de brevets relativement à l'avis de conformité délivré en octobre 1995 pour l'échantillon de départ. Le ministre a accepté les listes modifiées et a ajouté les renseignements qu'elles contenaient au registre.


Au sujet de l'interprétation à attribuer au paragraphe 4(5) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), le juge Hugessen a fait remarquer, à la page 60, que la version anglaise « exige clairement que le nouveau brevet ait été demandé avant le dépôt de la [présentation de drogue nouvelle] et n'ait pas été délivré plus de trente jours avant le dépôt de la liste de brevets modifiée (ou nouvelle) » . Le breveté soutenait toutefois, en s'inspirant du libellé de la version française, qu'une liste de brevets peut être modifiée en tout temps et sans conditions. Le juge Hugessen a conclu que le libellé de la version française était problématique et à tout le moins « ambigu » à certains égards. Il a notamment attiré l'attention sur la mention « déroutante » d'un brevet [...] qui était fondé sur une demande au tribunal et sur le dernier segment commençant par les mots « ou elle peut » . Il a toutefois jugé mal fondé l'argument du breveté suivant lequel une liste de brevets pouvait être modifiée en tout temps et sans conditions. À la lumière du contexte factuel particulier de cette affaire, le juge Hugessen a formulé les observations suivantes, à la page 61 :

[13] Enfin, il me semble qu'une interprétation contextuelle du paragraphe 4(5), en fonction de l'ensemble du Règlement, ne permet pas de soutenir l'interprétation proposée par Abbott. L'avocat n'a pas été en mesure de fournir une explication de principe rationnelle qui justifierait l'assujettissement du dépôt d'une liste de brevets nouvelle ou originale à des restrictions temporelles rigoureuses, tout en permettant l'ajout à volonté de brevets à une liste existante. Sans une telle explication logique, l'interprétation proposée est tout simplement dénuée de sens.

La seconde question examinée par le juge Hugessen concernait le bien-fondé de la décision du ministre d'accepter la liste modifiée et d'ajouter les nouveaux brevets au registre. Voici, à cet égard, les propos qu'a tenus le juge Hugessen, à la page 62 :

[18] Premièrement, en me reportant aux faits de l'espèce, je ne parviens pas à trouver un motif qui justifierait la façon dont le ministre a agi. Il a reçu un document qui était nettement désigné comme la modification d'une liste de brevets existante et qui renvoyait, tout aussi clairement, aux drogues qui avaient fait l'objet des avis de conformité délivrés à Abbott en 1985 et en 1992, au moyen de leur DIN. Le ministre pouvait soit accepter la modification telle qu'elle a été déposée, soit la rejeter parce qu'elle n'était pas conforme au Règlement. En fait, il n'a fait ni l'un ni l'autre. Ayant, à juste titre, jugé la modification non conforme (elle était très tardive selon l'interprétation juste du paragraphe 4(5)), il l'a considérée comme une liste de brevets originale, plutôt que comme la modification d'une liste existante. Puis, et cet élément est encore plus déterminant, il ne l'a pas appliquée à la seule PDN à l'égard de laquelle il serait possible de prétendre qu'elle a été déposée, soit la PDN déposée pour l'échantillon de départ en 1995, mais plutôt aux avis de conformité de 1985 et de 1992 à l'égard desquels elle ne pouvait avoir été déposée.

En d'autres termes, le juge Hugessen a conclu que la liste de brevets modifiée avait été produite après l'expiration du délai fixé par le paragraphe 4(5), étant donné que les demandes de brevets avaient été déposées entre 1991 et octobre 1995 et non avant la date du dépôt des demandes d'avis de conformité, en 1983 et 1991. Finalement, à la page 64, le juge Hugessen a réitéré que la liste « n'aurait pu être déposée » qu'à l'égard de la présentation de drogue nouvelle soumise en 1995 relativement à l'échantillon de départ.


[53]            Je ne vois pas pourquoi, compte tenu des faits de la présente affaire, l'analyse méticuleuse et approfondie de la juge McGillis dans la décision Apotex Inc., précitée, ne devrait pas s'appliquer. Le mot « demande » qui figure aux articles 4 et 5 du Règlement s'entend d'une « demande d'avis de conformité » , ce qui couvre une « présentation de drogue nouvelle, une présentation abrégée de drogue nouvelle et un supplément à l'une ou l'autre de ces présentations » .

[54]            Dans la récente décision Ferring Inc., précitée, la juge Simpson a confirmé la position que la juge McGillis avait adoptée dans Apotex Inc., précitée, et a conclu que l'ajout de l'alinéa 4b) du Règlement n'a pas touché l'analyse présentée dans cette dernière décision. La juge Simpson a également formulé les remarques suivantes au sujet de l'importance du Règlement aux fins de la reconnaissance des droits d'un innovateur :

[35]         À mon avis, si le Parlement avait voulu restreindre les droits d'un innovateur dans le cadre des paragraphes 4(1) et (3) du Règlement MB(AC), je me serais attendue à une formulation claire indiquant que les listes de brevets ne peuvent être déposées qu'à l'égard de présentations de drogue nouvelle et non à l'égard de suppléments. On ne trouve pas de formulation du genre ni dans le Règlement MB(AC) ni dans le Règlement AD.

[55]            À mon avis, le récent jugement dans lequel la Cour d'appel fédérale a infirmé, dans Ferring Inc. c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 274, [2003] A.C.F. n ° 982 (C.F. 1re inst.), la décision de la juge Simpson au motif que la présentation de drogue nouvelle supplémentaire dans cette affaire n'était rien de plus qu'un changement de nom n'est pas pertinent quant au raisonnement suivi dans Apotex Inc. et quant à l'applicabilité de ce raisonnement aux questions dont je suis saisi. Il ne s'agit pas ici d'un simple changement de nom.


[56]            Étant donné qu'il semble admis que les brevets en l'espèce n'étaient pas des présentations supplémentaires, je ne suis pas convaincu qu'ils n'ont pas été inscrits régulièrement au registre, quelle que soit la norme pertinente appliquée, du moins en ce qui a trait aux questions de délai qu'Apotex invoque. Par conséquent, il n'y a pas lieu de prononcer une ordonnance portant rejet pour ce motif.

ADMISSIBILITÉ ET OBJET

[57]            Apotex ajoute que les brevets ne sont pas admissibles à l'inscription au registre en raison de leur objet. D'abord, elle fait valoir que les seuls produits de paroxétine vendus par GSK sont des produits de chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté. Tous les ADC de GSK à l'égard de la paroxétine se rapportent à des produits de chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté. Toutefois, chacun des brevets en litige concerne des formes anhydres de paroxétine. Les formes anhydres de paroxétine et les formes semi-hydratées de paroxétine constituent des substances différentes et, par conséquent, des médicaments différents.

[58]            Le paragraphe 4(2) du Règlement énonce que, pour être admissible à l'inscription au registre, le brevet doit, notamment, comporter une revendication relative « au médicament lui-même » ou à l'utilisation du médicament pour lequel il est inscrit. Selon Apotex, les brevets ne renferment aucune revendication concernant le chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté ou l'utilisation de ce médicament, de sorte qu'ils ont été inscrits à tort au registre.

[59]            GSK répond en disant que ce motif n'est pas valable, parce que le chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté équivaut à la forme anhydre.


[60]            Il convient d'abord de souligner que l'ADC de GSK fait état uniquement du chlorhydrate de paroxétine à titre de médicament faisant partie des comprimés de celle-ci, même si la forme de chlorhydrate de paroxétine qu'elle vend est la forme semi-hydratée.

[61]            Il appert clairement de la monographie de produit de GSK à l'égard des comprimés de chlorhydrate de paroxétine de la marque PAXIL que tant la forme semi-hydratée que la forme anhydre du chlorhydrate de paroxétine peuvent être utilisées à titre de médicament dans les comprimés.

[62]            De plus, GSK a reçu d'Apotex un ADA indiquant que celle-ci avait déposé une PADN visant à comparer ses comprimés de chlorhydrate de paroxétine à ceux de GSK.


[63]            Conformément à l'article C.-08.002.1 du Règlement A.D., lorsqu'un fabricant de produits pharmaceutiques génériques comme Apotex dépose une PADN, il doit comparer le produit pharmaceutique qu'il a l'intention de commercialiser à un produit de référence canadien déjà approuvé. Dans la présente affaire, Apotex a manifestement choisi les comprimés de chlorhydrate de paroxétine de GSK comme produit de référence canadien à l'égard de ses propres comprimés du même médicament. Ce faisant, Apotex se fonde sur l'approbation du produit de GSK par Santé Canada pour faire approuver son propre produit. Effectivement, Apotex doit essentiellement démontrer simplement que son comprimé et ceux de GSK sont des médicaments bioéquivalents.

[64]            De plus, l'article C.-08.002.1 du Règlement A.D. exige que le produit d'Apotex soit l'équivalent pharmaceutique d'un produit de référence canadien. À l'article C.08.001.1 de ce même Règlement, l'expression « équivalent pharmaceutique » est définie comme une drogue nouvelle qui, par comparaison à une autre drogue, contient les mêmes quantités d'ingrédients médicinaux identiques, sous des formes posologiques comparables, mais pas nécessairement les mêmes ingrédients non médicinaux.

[65]            GSK soutient donc que tout fabricant de produits génériques qui dépose une PADN doit chercher à obtenir l'approbation d'un produit pharmaceutique qui contient les mêmes ingrédients médicinaux que son produit de référence canadien, sous des formes posologiques comparables à celui-ci. Cependant, étant donné qu'il n'est pas nécessaire que les ingrédients non médicinaux soient identiques, le fabricant de produits génériques peut chercher à obtenir l'approbation d'une formulation de comprimé différente contenant des ingrédients non médicinaux différents de ceux du produit de référence canadien. En fait, les comprimés de chlorhydrate de paroxétine d'Apotex doivent contenir le même ingrédient médicinal que celui des produits de chlorhydrate de paroxétine de GSK, mais Apotex peut chercher à obtenir l'approbation d'un comprimé différent comportant d'autres ingrédients non médicinaux.

[66]            GSK souligne que, dans la présente instance, Apotex a allégué que la forme de chlorhydrate de paroxétine qui sera utilisée dans ses comprimés sera la forme anhydre. Or, la forme que commercialise GSK est une forme semi-hydratée. En permettant à Apotex d'utiliser les comprimés sous forme semi-hydratée de GSK comme produit de référence canadien à l'égard de ses comprimés sous forme anhydre, le ministre a confirmé en réalité que ces formes constituent des équivalents pharmaceutiques et que la forme crystalline particulière ou les formes polymorphiques du produit médicinal ne sont pas pertinentes quant à l'identification de celui-ci.

[67]            GSK ajoute que, si Apotex obtient éventuellement un ADC l'autorisant à commercialiser ses comprimés de chlorhydrate de paroxétine au Canada, elle recevra également à l'égard de ceux-ci une déclaration d'équivalence comparativement à ceux de GSK, conformément à l'article C.08.004.4 du Règlement A.D. Par conséquent, les comprimés d'Apotex doivent être équivalents à ceux de GSK et doivent contenir les mêmes quantités du produit médicinal identique, en l'occurrence, le chlorhydrate de paroxétine.

[68]            GSK demande à la Cour de conclure que, étant donné qu'Apotex compare son produit anhydre à celui de GSK, elle ne peut faire valoir que le chlorhydrate de paroxétine sous forme anhydre et le chlorhydrate de paroxétine sous forme semi-hydratée sont des substances différentes et, de ce fait, des produits médicinaux différents.

[69]            Le brevet 829 concerne et revendique le chlorhydrate de paroxétine anhydre essentiellement exempt de solvant organique lié, caractérisé sous la forme A, la forme B, la forme C et la forme D. Par conséquent, il englobe les revendications relatives au médicament lui-même, en l'occurrence, le chlorhydrate de paroxétine.

[70]            Le brevet 522 concerne et revendique l'utilisation du chlorhydrate de paroxétine anhydre essentiellement exempt de solvant organique lié, caractérisé sous la forme A, la forme B, la forme C et la forme D, pour le traitement de diverses affections, dont la dépression, la névrose obsessionnelle et le trouble panique. En soi, le brevet 522 comporte manifestement des revendications concernant l'utilisation du médicament lui-même, soit le chlorhydrate de paroxétine.

[71]            Le brevet 023 concerne et revendique l'usage de procédés nouveaux pour la production de la forme A de chlorhydrate de paroxétine anhydre. La revendication 5 de ce brevet concerne le médicament chlorhydrate de paroxétine, soit le chlorhydrate de paroxétine anhydre sous la forme A, fabriqué à l'aide des procédés revendiqués. Les revendications relatives au procédé de fabrication du médicament constituent des revendications à l'égard du médicament lui-même. En soi, le brevet 023 comporte des revendications à l'égard du médicament lui-même, soit le chlorhydrate de paroxétine.

[72]            Après avoir examiné le raisonnement de GSK sur ce point, je ne puis conclure, selon l'une ou l'autre des normes applicables, que les brevets devraient être radiés du registre en raison de leur objet et que la demande de GSK fondée sur le paragraphe 6(1) devrait être rejetée en vertu du paragraphe 6(5).

ADMISSIBILITÉ ET PERTINENCE

[73]            Apotex allègue également que les brevets ne sont pas pertinents quant au médicament ou à la présentation à l'égard desquels ils sont inscrits et ne sont donc pas admissibles à l'inscription au registre.

[74]            Cet argument repose sur le fait que chacun des ADC supplémentaires se rapporte à une nouvelle indication, à un changement de méthode de manipulation vers la compression directe ou à un changement administratif. Étant donné que les brevets revendiquent le chlorhydrate de paroxétine sous la forme anhydre, ils ne sont pas pertinents quant aux présentations pour lesquelles ils sont inscrits ou quant au produit que GSK vend, soit le chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté.


[75]            GSK conteste farouchement cette allégation et souligne que, selon l'alinéa 4(7)b) du Règlement, les brevets figurant sur la liste de brevets ou dans une modification doivent être pertinents uniquement quant à la forme de posologie, à la concentration et à la voie d'administration de la drogue pour laquelle la demande d'ADC a été déposée (Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/98-166, alinéa 4(7)b)).

[76]            En plus de se demander si une présentation supplémentaire était une demande aux fins des articles 4 et 5 du Règlement, la juge McGillis s'est également attardée à la question de la pertinence dans la décision Apotex Inc., précitée, où Apotex avait soutenu que le brevet 627 n'était pas pertinent quant à la drogue pour laquelle l'avis de conformité avait été délivré. La juge McGillis a rejeté cet argument en ces termes à la page 292 :

[...] L'argument de l'avocat d'Apotex suivant lequel le brevet 637 ne se rapporte pas aux drogues relativement auxquelles les avis de conformité ont été délivrés est donc mal fondé. Qui plus est, l'argument avancé par l'avocat d'Apotex conduirait à un résultat incongru : en effet, la formulation brevetée la plus récente du médicament paroxétine ne bénéficierait pas de la protection accordée par le mécanisme prévu au Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité). Un tel résultat serait incompatible avec l'objet reconnu de ce règlement, en l'occurrence empêcher la contrefaçon de brevets par le renforcement des droits des brevetés [...].

[77]            La Cour d'appel a confirmé ce raisonnement de la juge McGillis.

[78]            La Cour d'appel fédérale a récemment affirmé qu'un brevet qui ne concerne pas la formulation commerciale d'une drogue peut être inscrit au registre à l'égard de cette drogue (Eli Lilly Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé), [2003] A.C.F. n ° 75, aux paragraphes 32 et 34 (C.A.F.)).

[79]            De plus, elle a confirmé dans ce même jugement, aux paragraphes 35 et 36, que toute autre interprétation irait à l'encontre des objectifs du Règlement :


D'après Eli Lilly, l'interprétation du ministre irait à l'encontre des objectifs du Règlement sur les MBADC. Il est théoriquement possible qu'un fabricant de drogues génériques produise une drogue consistant en une formulation de ceftazidime et de lactose amorphe qui soit bioéquivalente à Tazidime (même si elle n'était pas exactement identique à Tazidime parce que Tazidime ne contient pas de lactose amorphe). Un tel produit pourrait contrefaire le brevet 969. Si l'on ne permet pas que le brevet 969 reste dans les listes de brevets pour Tazidime, Eli Lilly sera privée de son droit de demander au tribunal d'interdire la délivrance de l'avis de conformité pour la nouvelle drogue jusqu'à l'expiration du brevet 969. Si cela se produisait, on se trouverait à avoir empêché le Règlement sur les MBADC de s'appliquer de la manière prévue. Je note qu'un argument semblable a été accepté dans la décision Apotex Inc. c. Canada (Ministre de la Santé) (1999), 87 C.P.R. (3d) 271 (C.F. 1re inst.), mais seulement dans une remarque incidente, dans le contexte de la version du Règlement sur les MBADC antérieure aux modifications de 1998.

En somme, il me semble que l'interprétation proposée par Eli Lilly devrait être préférée à celle qui est proposée par le ministre, pour deux raisons. D'abord, elle est plus conforme à la formulation du Règlement sur les MBADC. Ensuite, elle offre au moins la possibilité de prévenir la contrefaçon du brevet 969, alors que l'interprétation du ministre ne peut avoir ce résultat.

[80]            Le paragraphe 4(7) du Règlement énonce les exigences applicables à l'heure actuelle en ce qui concerne la pertinence :

La personne qui soumet une liste de brevets ou une modification apportée à une liste de brevets aux termes des paragraphes (1) ou (4) doit remettre une attestation portant que [...] les brevets mentionnés dans la liste ... sont admissibles à l'inscription au registre et sont pertinents quant à la forme posologique, la concentration et la voie d'administration de la drogue visée par la demande d'avis de conformité.

[81]            Dans l'arrêt Eli Lilly, précité, la Cour d'appel a statué (au paragraphe 32) que la « pertinence » se limite à l'exigence d'une attestation de la pertinence quant à la forme posologique, à la concentration et à la voie d'administration :

De l'examen du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation de 1998 dans son ensemble, il ressort que l'extrait cité dans la décision Warner Lambert renvoie spécifiquement à l'alinéa 4(7)b) du Règlement sur les MBADC. J'en déduis que la « pertinence » dont fait mention cet extrait se rapporte à la nouvelle exigence d'une attestation de la pertinence quant à la forme posologique, la concentration et la voie d'administration. Si c'est le cas, on obtiendra la liste de brevets « spécifique d'un produit » que l'on recherche en respectant la conformité à l'alinéa 4(7)b). [...]

[82]            De plus, la Cour a statué que l'alinéa 4(7)b) du Règlement ne décrivait aucune relation entre la drogue désignée dans l'avis de conformité et les brevets qui peuvent être inclus dans la liste de brevets.

[83]            GSK fait valoir que, d'après la décision Apotex Inc., précitée, la véritable question qui se pose en ce qui concerne la pertinence est de savoir si un fabricant de médicaments génériques pouvait se servir d'un brevet portant sur la formulation pour produire une formulation bioéquivalente des produits pharmaceutiques vendus par le titulaire dudit brevet. Un produit générique doit contenir le même ingrédient médicinal que celui du produit innovateur, mais la formulation utilisée peut être différente. Par conséquent, si aucune formulation autre que la formulation commercialisée ne pouvait être inscrite, le Règlement ne protégerait pas le brevet revendiquant la formulation non commercialisée. Telle ne pouvait être l'intention du Règlement, ce qui a d'ailleurs été confirmé dans la jurisprudence.

[84]            Il s'ensuit, selon GSK, que les exigences énoncées au Règlement quant à la pertinence doivent être les trois exigences précises mentionnées au paragraphe 4(7) de celui-ci.


[85]            Il est donc évident que, selon les modifications apportées au Règlement en 1998, un brevet relatif à la formulation d'un comprimé doit être pertinent uniquement « quant à la forme posologique, la concentration et la voie d'administration » de la drogue contenant le médicament. Il n'est pas pertinent de savoir si un titulaire de brevet pourrait se servir d'un brevet relatif à la formulation d'un comprimé pour préparer les formulations commerciales de comprimés du médicament en question.

[86]            Les brevets en litige sont pertinents quant aux présentations à l'égard desquelles les listes de brevets se rapportant aux brevets en question ont été déposées. À cet égard, GSK souligne ce qui suit :

a)         la forme posologique indiquée dans chacune des présentations à l'égard desquelles les listes de brevets ont été déposées est un comprimé pour chacun des brevets en litige;

b)         les concentrations indiquées dans les présentations comprennent les concentrations de 10 mg, 20 mg, 30 mg et 50 mg;

c)         la voie d'administration indiquée dans chacune des présentations est la voie orale.

[87]            Chacun des brevets en litige est manifestement pertinent quant à la forme posologique parce que, selon GSK,

a)         les brevets indiquaient que le produit inventé pouvait être intégré dans des comprimés;


b)         aucun des brevets en litige n'est limité à une concentration particulière, de sorte que les produits inventés pourraient être intégrés dans des comprimés selon l'une ou l'autre des concentrations indiquées;

c)         les brevets indiquaient que les produits inventés pouvaient être administrés par la voie orale.

[88]            Compte tenu des arguments invoqués, je ne suis pas convaincu, contrairement à ce qu'Apotex soutient, que les brevets ne sont pas pertinents quant au produit médicinal ou à la demande à l'égard desquels ils sont inscrits selon la mesure exigée aux termes d'une norme applicable pour justifier le rejet en vertu du paragraphe 6(5) du Règlement.

REQUÊTE FRIVOLE ET VEXATOIRE

[89]            En dernier lieu, Apotex invoque l'alinéa 6(5)b) du Règlement pour demander le rejet de la demande de GSK fondée sur le paragraphe 6(1) au motif que celle-ci est frivole et vexatoire et constitue un abus de procédure. De l'avis d'Apotex, même si les brevets sont valablement inscrits, ils ne peuvent figurer sur les listes de la façon dont ils y figurent actuellement et ne peuvent être pertinents quant à la demande d'ADC d'Apotex.


[90]            Apotex fait valoir que, compte tenu des délais stricts imposés par le Règlement et du fait que les brevets ne peuvent être inscrits sur la liste de brevets originale en ce qui concerne le chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté en raison de l'expiration du délai applicable, ils pourraient être inscrits valablement uniquement à l'égard d'un nouveau produit pharmaceutique. En conséquence, les brevets ne pourraient s'appliquer qu'à cette nouvelle drogue et ne pourraient être inscrits à l'égard du chlorhydrate de paroxétine semi-hydraté, pour lequel une liste de brevets existe déjà.

[91]            Le paragraphe 5(1) du Règlement énonce que le fabricant de produits génériques n'est tenu de signifier un ADA que lorsqu'il fait une comparaison avec un produit pharmaceutique qui est commercialisé au Canada conformément à un ADC.

[92]            Apotex a déposé sa demande d'ADC à l'égard de ses comprimés de chlorhydrate de paroxétine bien avant le 28 mai 1998. Lorsqu'elle l'a fait, aucun des ADC de GSK se rapportant aux présentations à l'égard desquelles les brevets sont inscrits n'avait été délivré. Par conséquent, Apotex fait valoir qu'elle n'a pas comparé son produit à un produit commercialisé au Canada conformément à un ADC relativement à une présentation à l'égard de laquelle les brevets ont été inscrits.

[93]            En conséquence, soutient Apotex, le paragraphe 5(1) ne s'applique pas et Apotex n'est pas tenue de répondre aux revendications des brevets. Si les brevets sont admissibles à l'inscription, ce qui n'est pas le cas, ils ne peuvent être admissibles que pour une drogue non visée par une comparaison d'Apotex.

[94]            Par conséquent, Apotex fait valoir que la demande de GSK fondée sur le paragraphe 6(1) est frivole et vexatoire et constitue un abus de procédure, puisqu'elle vise à interdire la délivrance d'un ADC à Apotex pour une raison qui ne peut s'appliquer à la présentation de celle-ci.

[95]            GSK réplique que ces allégations d'Apotex ne sont pas fondées en droit et ne sont pas pertinentes quant aux questions à trancher en l'espèce.

[96]            La norme de rejet à appliquer en vertu de l'alinéa 6(5)b) du Règlement est le critère restreint « évident et manifeste » qui a été énoncé dans l'arrêt Hunt; à mon avis, Apotex n'a manifestement pas établi ce critère en l'espèce.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE QUE :

1.          La demande soit rejetée.

2.         Les dépens de la présente demande soient adjugés à GSK, quelle que soit l'issue de la cause.

                                                                                        « James Russell »                 

                                                                                                             Juge                        

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

Avocats inscrits au dossier

DOSSIER :                                                                      T-876-02

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                      GLAXOSMITHKLINE INC., ET AL C. APOTEX INC.ET AL

DATE DE L'AUDIENCE :                                           LE 16 JUIN 2002

LIEU DE L'AUDIENCE :                                            TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                          LE JUGE RUSSELL

DATE DES MOTIFS :                                                  LE 10 SEPTEMBRE 2003

COMPARUTIONS :

JAMES MILLS,

CHANTAL SAUNDERS                                                POUR LES DEMANDEURS

ANDREW BRODKIN                                                    POUR LES DÉFENDEURS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

JAMES MILLS

CHANTAL SAUNDERS

GOWLINGS

TORONTO (ONTARIO)                                                POUR LES DEMANDEURS

ANDREW BRODKIN

GOODMANS

TORONTO (ONTARIO)                                                POUR LES DÉFENDEURS

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