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Date : 20030908

Dossier : IMM-6323-02

Référence : 2003 CF 1040

Ottawa (Ontario), le 8 septembre 2003

Présent:    L'honorable juge Blais

ENTRE :

                          INDIRAWATHI RADHA

                              SHAKILAN RADHA

                                                               Demandeurs

                                    et

          LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

                                    

                                                                Défendeur

                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]              Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire à l'encontre de la décision de Sajjad Randhawa [le tribunal] de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié [la CISR] de la Section de la protection des réfugiés, en date du 14 novembre 2002, dans laquelle il a été décidé que Indirawathi Radha [la demanderesse] et son fils Shakilan Radha [collectivement, les demandeurs] ne sont pas des réfugiés au sens de la Convention selon l'article 96 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés [la Loi], ni des personnes à protéger selon l'article 97 de cette même loi.


FAITS ALLÉGUÉS

[2]                 Les demandeurs sont des tamouls, adeptes de l'hindouisme et citoyens du Sri Lanka.

[3]             La demanderesse est née le 6 mai 1954 à Inuvil, au nord du Sri Lanka, mais a grandi à Kalviankadu, situé dans la péninsule de Jaffna.

[4]                 En novembre 1995, alors que la situation se détériorait à Jaffna, la demanderesse et sa famille ont décidé de fuir la ville avec d'autres civils. Tous courraient vers différentes directions, si bien que la demanderesse aurait perdu trace de son mari. Elle n'a plus eu de nouvelles de lui depuis ce moment.

[5]                 Après un périple à travers le pays, la demanderesse est finalement arrivée à Colombo où elle a loué une chambre d'hôtel avec son fils. Dans cette ville, à chaque fois qu'un incident majeur s'y produisait, la demanderesse était saisie d'un état de peur, car les policiers se présentaient à l'hôtel pour l'interroger. Elle aurait également été frappée par eux à au moins 20 reprises.

[6]                 Le fils de la demanderesse a, lui aussi, eu des problèmes avec les policiers de Colombo. Il aurait été harcelé par ces derniers à plusieurs occasions, alors qu'il se rendait à l'école.

[7]                 Le 11 décembre 2001, le fils ainsi qu'un autre étudiant auraient été arrêtés par les policiers et amenés au poste de police. On les soupçonnait d'être des militants des LTTE.

[8]                 Pendant sa détention, le fils aurait été interrogé et battu. Durant l'arrestation, la police aurait fouillé l'hôtel, en plus de l'agresser physiquement et verbalement. Avec l'aide du directeur de son école, on aurait libéré le fils après une journée.

[9]                 Après la libération de son fils, craignant pour leur vie, la demanderesse a décidé de quitter le Sri Lanka.

[10]            Le 15 janvier 2002, les demandeurs ont quitté le Sri-Lanka pour se diriger vers la Thaïlande. Ils y sont restés environ deux mois, pour arriver finalement au Canada le 16 mars 2002 et y réclamer le statut de réfugié.

[11]            Le 14 novembre 2002, le tribunal a rejeté la revendication des demandeurs.

[12]            Cette décision fait l'objet de la présente demande en contrôle judiciaire.


ANALYSE

[13]            La partie demanderesse a demandé à la Cour, le matin de l'audience, la permission de soulever un motif qui n'avait pas été mentionné dans son mémoire, soit l'absence de transcription du témoignage des demandeurs.

[14]            Il appert du dossier que dès le 5 mai 2003 les parties ont reçu le dossier de la Cour et ont été mis au courant de l'absence de transcription de témoignage suite à des problèmes techniques lors de l'audition.

[15]            La demanderesse avait la possibilité de déposer un affidavit supplémentaire jusqu'au 15 mai 2003 et de déposer un mémoire supplémentaire jusqu'au 13 juin 2003. Elle a choisi de ne pas soulever cette question d'absence de transcription.

[16]            Dans l'arrêt Sandu c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) [2000] A.C.F. no 902, le juge Décary de la Cour d'appel fédérale énonce:

[3] Par ailleurs, s'appuyant sur l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, le procureur de l'appelant a voulu soulever, dans sa plaidoirie orale, des arguments qui n'apparaissaient pas dans son mémoire des faits et du droit et qui, par surcroît, ne concernaient pas la question certifiée.

[4] L'arrêt Baker a sans doute élargi la portée de l'appel lorsqu'il y a question certifiée, mais sûrement pas au point d'écarter les règles élémentaires de la plaidoirie en appel qui veulent qu'un avocat ne peut soulever à l'audience des arguments qu'il n'avait pas soulevés dans son mémoire des faits et du droit.

[mon soulignement]


[17]            Dans l'arrêt Lanlehin c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (C.A.F.), [1993] A.C.F. no 207, le juge Décary mentionne:

[...]Ces questions n'avaient toutefois pas été soulevées par l'appelant dans son mémoire et il se peut que l'intimée, l'eût-elle su en temps utile, aurait été en mesure d'expliquer les contradictions qui apparaissent au dossier. À ce stade, il ne nous est pas possible de supposer l'invalidité de la décision et nous sommes d'avis, dans les circonstances, de rejeter l'appel.

[18]            La partie défenderesse se basant sur une jurisprudence constante a clairement démontré qu'il n'est pas possible de soulever de nouveaux arguments à l'audience si ces arguments n'ont pas été soulevés dans les procédures écrites.

[19]            L'objection soulevée par la partie défenderesse a donc été maintenue.

[20]            Par la suite, la demanderesse a soutenu que le tribunal n'avait pas tenu compte de la preuve présentée devant lui. Cependant, il apparaît clair du dossier que les demandeurs ne sont pas personnellement ciblés par les mesures dont ils ont été victimes et le tribunal a particulièrement conclu que les demandeurs n'étaient pas crédibles. Il a noté plusieurs inconsistances entre les déclarations des demandeurs au point d'entrée et leurs déclarations écrites subséquentes. Ces incohérences n'ont pas été expliquées à la satisfaction du tribunal lors de l'audience.

[21]            Il apparaît clair de la décision que le point central est la crédibilité des demandeurs.

[22]            La jurisprudence constante de notre Cour exige que la Cour fédérale exerce une grande retenue lorsqu'il s'agit d'intervenir dans un dossier où le tribunal ayant l'avantage de voir et d'entendre les demandeurs a conclu à l'absence de crédibilité.

[23]            Les demandeurs n'ont pas réussi à convaincre la Cour que le tribunal avait commis une erreur justifiant l'intervention de cette Cour.

                                           ORDONNANCE

[1]                 En conséquence, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[2]                 Les parties n'ont soulevé aucune question sérieuse pour certification.

                       Pierre Blais                         

                             J.C.F.


                                       COUR FÉDÉRALE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                         

DOSSIER :IMM-6323-02                               

INTITULÉ :INDIRAWATHI RADHA ET AL c. MCI           

LIEU DE L'AUDIENCE :                                Montréal

DATE DE L'AUDIENCE :                              19 août 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE : Le juge Blais

DATE DES MOTIFS :                                     Le 8 septembre 2003


COMPARUTIONS :

Me Myriam Harbec                                              POUR LE DEMANDEUR

Me Patricia Deslauriers                                                     POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Myriam Harbec                                              POUR LE DEMANDEUR

Montréal, Québec

Morris Rosenberg                                                 POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


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