Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

                                                                                                                              Date : 20020430

                                                                                                                Dossier : IMM-4990-00

OTTAWA (ONTARIO), LE 30 AVRIL 2002

EN PRÉSENCE DU JUGE EN CHEF ADJOINT

ENTRE :

NATALIA DUQUE SANTOS

                                                                                                                                 demanderesse

                                                                            et

                                       LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

                                                              ORDONNANCE

La demanderesse ayant présenté une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle l'agent des visas a refusé, le 24 août 2000, la demande qu'elle avait soumise en vue d'obtenir un visa d'étudiant;

Les observations écrites des parties ayant été examinées et l'audience ayant eu lieu à Toronto (Ontario) le 25 avril 2002;


                                                                                                                                              Page : 2

LA COUR ORDONNE PAR LES PRÉSENTES :

1.          Cette demande de contrôle judiciaire est accueillie.

2.          Le refus de l'agent des visas en date du 24 août 2000 est annulé et l'affaire est renvoyée pour qu'un agent d'immigration différent prenne à nouveau une décision.

« Allan Lutfy »

Juge en chef adjoint

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                                                                                                              Date : 20020430

                                                                                                                Dossier : IMM-4990-00

                                                                                              Référence neutre : 2002 CFPI 494

ENTRE :

NATALIA DUQUE SANTOS

                                                                                                                                 demanderesse

                                                                            et

                                       LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

                                               MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE EN CHEF ADJOINT

[1]                 Le refus de l'agent des visas de délivrer un visa d'étudiant à la demanderesse, une citoyenne colombienne âgée de 25 ans, doit être annulé, et ce, pour au moins trois raisons.


[2]                 Premièrement, la lettre de refus type est libellée en des termes si généraux qu'elle n'a aucun sens pour la demanderesse. On a dit à la demanderesse qu'elle devait retourner à l'ambassade du Canada, à Bogota, au début de l'après-midi, le jour même où elle avait soumis sa demande. Lorsqu'elle est retournée à l'ambassade à l'heure convenue, on lui a remis une lettre de refus non datée et non signée qui disait ce qui suit [lettre traduite de l'espagnol] :

[TRADUCTION] C'est à regret que nous devons vous informer que la demande que vous avez faite en vue d'obtenir un visa d'étudiant ou de visiteur a été rejetée.

À l'heure actuelle, le Canada fait face à un gros problème à cause du grand nombre de gens qui ont obtenu tant un visa d'étudiant qu'un visa de visiteur et qui ne veulent plus quitter le Canada comme ils devaient le faire. Cela étant, il est fort difficile de prendre une décision à l'égard de votre demande. L'agent des visas qui a examiné votre demande a tenu compte des documents et déclarations qui ont été soumis à l'appui, mais compte tenu de la loi et de la situation actuelle, il n'a pas pu vous accorder de visa.

Nous aimerions vous faire remarquer qu'aucun document à lui seul ne peut garantir la délivrance d'un visa. Dans chaque cas, afin d'être en mesure de délivrer un visa d'étudiant ou un visa de visiteur, l'agent des visas doit être absolument convaincu que la personne concernée n'est pas un immigrant éventuel, et ce, après avoir minutieusement examiné la situation socio-économique et les antécédents familiaux généraux, ainsi que les voyages antérieurs qui ont été effectués et les raisons pour lesquelles la personne concernée veut séjourner au Canada.

Nous comprenons bien que la décision défavorable qui a été prise dans votre cas vous décevra énormément, et c'est à regret que nous devons vous informer que cette décision est définitive.

Veuillez agréer, Madame, l'expression de mes meilleurs sentiments.

L'ambassade

La seule mention précise de la demanderesse dans la lettre de refus figure dans la désignation du numéro de dossier.


[3]                 Dans la décision Xu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 1184 (1re inst.), Monsieur le juge Gibson a décrit les circonstances dans lesquelles une lettre type pouvait probablement être utilisée par un agent des visas (paragraphe 8) : « Il en irait différemment dans une situation où une lettre type, où des paragraphes, seraient emmagasinés en mémoire et instantanément disponibles pour être incorporés à d'autres commentaires, même brefs, qui refléteraient le contenu de l'entrevue [...] [non souligné dans l'original]. »

[4]                 À mon avis, ce principe devrait s'appliquer même si la décision est prise sans qu'une entrevue ait lieu. Dans la lettre de refus, il devrait être fait mention, ne serait-ce que brièvement, des circonstances particulières dans lesquelles s'inscrit la demande visée par la décision. Dans ce cas-ci, la lettre de refus est rédigée en des termes génériques et il n'y est absolument pas fait mention des renseignements fournis par la demanderesse dans sa demande. La lettre de refus n'indique pas non plus la raison pour laquelle une décision défavorable est prise. Au cours du contre-interrogatoire, l'agent des visas a reconnu à juste titre que le libellé de la lettre de refus n'était pas approprié et que la lettre a été remplacée par une nouvelle lettre type.

[5]                 Deuxièmement, le seul motif justifiant la décision défavorable qui a été mentionné dans les notes consignées dans le STIDI se rapporte au fait que la demanderesse n'avait pas suffisamment d'argent pour payer ses études au Canada, conclusion qui a été tirée sans qu'il soit tenu compte des documents mis à la disposition de l'agent et qui a été abandonnée lors du contre-interrogatoire.


[6]                 Les notes consignées dans le STIDI étaient brèves :

[TRADUCTION] DOIT RESTER AVEC SA SOEUR ET SON BEAU-FRÈRE; ÉTUDIER LA GESTION CULINAIRE; PAYÉ PAR SA SOEUR (20 000 $ EN TOUT) POUR DEUX ANS, À CONDITION QU'ELLE PRÊTE ÉGALEMENT DE L'ARGENT DANS L'AVENIR; FAIBLE REVENU DE LA FAMILLE AU CANADA; JE NE PUIS VOIR COMMENT ILS AURONT LES MOYENS DE PAYER 20 000 $ EN DEUX ANS; DEMANDE REFUSÉE.

En fait, la demanderesse avait la charge d'établir qu'elle disposait de ressources financières adéquates pour sa première année d'études. Le défendeur concède que les documents déposés par la demanderesse établissaient que cette dernière avait suffisamment d'argent pour la période en question. L'agent des visas a commis une erreur en concluant le contraire.

[7]                 Troisièmement, le défendeur a justifié le refus de l'agent des visas en se fondant sur la dernière déclaration substantielle figurant dans son affidavit :

[TRADUCTION] La demanderesse n'a pas de personnes à sa charge en Colombie; elle n'a pas de revenu, pas de biens et aucun emploi. Elle a des liens familiaux au Canada. Ces facteurs, s'ils sont considérés avec les dispositions de la Loi sur l'immigration et de son règlement d'application, ne m'ont pas convaincu que Mme Duque Santos n'avait pas l'intention de rester au Canada illégalement à la fin de ses études.


[8]                 Il existe un certain nombre de motifs permettant de ne pas accorder beaucoup d'importance à cette déclaration figurant dans l'affidavit de l'agent des visas en tant que motif de refus. Pendant le contre-interrogatoire, l'agent des visas a répondu que le lieu de résidence des membres de la famille de la demanderesse n'était pas [TRADUCTION] « [...] un renseignement qui, selon [lui], était nécessaire aux fins de la décision » . Dans les notes du STIDI, qui ont été rédigées au moment où la décision a été prise, il n'est pas fait mention des liens familiaux comme motif du refus. L'argument de l'avocat selon lequel les mots [TRADUCTION] « situation actuelle » et [TRADUCTION] « antécédents familiaux généraux » figurant dans la lettre de refus indiquent que l'agent des visas craignait que la demanderesse ne retourne pas en Colombie n'est pas convaincant. Dans son affidavit, l'agent des visas a inclus quatre paragraphes concernant le manque de fonds, position à laquelle il a renoncé lors du contre-interrogatoire. Eu égard au dossier mis à ma disposition, je ne suis pas convaincu que la situation familiale de la demanderesse en Colombie et au Canada ait constitué le motif du refus lorsque la décision a été prise.

[9]                 Par conséquent, cette demande de contrôle judiciaire sera accueillie et l'affaire sera renvoyée pour qu'un agent d'immigration différent prenne à nouveau une décision. Ni l'une ni l'autre partie n'a proposé la certification d'une question sérieuse.

   

« Allan Lutfy » »

Juge en chef adjoint

Ottawa (Ontario)

le 30 avril 2002

  

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.

  

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

  

DOSSIER :                                                                      IMM-4990-00

INTITULÉ :                                                                     NATALIA DUQUE SANTOS

c.

MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                                             TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                           LE 25 AVRIL 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                           MONSIEUR LE JUGE

EN CHEF ADJOINT

DATE DES MOTIFS :                                                  LE 30 AVRIL 2002

  

COMPARUTIONS :

M. RAVI JAIN                                                                 POUR LA DEMANDERESSE

M. STEPHEN JARVIS                                                    POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

GREEN ET SPIEGEL                                                     POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg                                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.