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Date : 19991104

Dossier : IMM-4441-99

ENTRE :

JOSE MAURICIO JIMENEZ

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS D'ORDONNANCE

(Audience tenue dans le cadre d'une conférence téléphonique

le 1er novembre 1999, à 14h, à Ottawa (Ontario))

LE JUGE BLAIS

[1]    Le demandeur cherche à obtenir qu'il soit sursis à l'exécution d'une mesure d'expulsion qui a été prise contre lui.

[2]    Le demandeur a déposé une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire contre une décision que la Direction générale du règlement des cas a prise le 25 novembre 1998 concernant une demande d'examen de sa demande pour des motifs d'ordre humanitaire et qui lui a été communiquée le 26 août 1999.

[3]    Le ministre a envoyé une directive datée du 6 octobre 1999 au demandeur lui enjoignant de se présenter le 2 novembre 1999 afin d'être renvoyé du Canada.

[4]    Néanmoins, le demandeur a signé un affidavit le 21 octobre 1999 et il n'a présenté la présente demande en sursis que le 28 octobre 1999, demandant la tenue d'une conférence téléphonique le 1er novembre 1999.

[5]    La Cour doit se demander si le demandeur satisfait aux trois critères applicables en matière de sursis.

[6]    Le demandeur dit que sa cause est défendable vu l'absence de motifs écrits. Le demandeur fonde ses arguments sur l'arrêt Baker c. Canada (M.C.I.), [1999] J.C.S. no 39, que la Cour suprême a récemment rendu.

[7]    Le demandeur fait valoir que les notes de l'agent qui a examiné son dossier ne lui ont pas été communiquées et qu'il ignorait l'existence d'un rapport, daté du 22 octobre 1998, du Dr Esquevel, médecin désigné de l'Immigration, et du Dre Celina Miranda, de l'Association Funda Sida.

[8]    Le demandeur a une cause défendable vu qu'il ignorait l'existence du rapport sur lequel l'agent qui a examiné son dossier s'est fondé.

[9]    Le demandeur soutient que s'il était expulsé, il ne pourrait plus se procurer les médicaments qu'il prend présentement et que, selon le dernier rapport concernant son état de santé, son état pourrait [TRADUCTION] « rapidement se détériorer et il pourrait mourir prématurément » .

[10] Il subirait donc un préjudice irréparable s'il était expulsé au El Salvador.

[11] Comme il pourrait mourir prématurément s'il ne pouvait plus se procurer les médicaments qu'il prend présentement, la prépondérance des inconvénients lui est favorable.

[12] Le défendeur fait valoir qu'il a été remédié à l'absence de motifs écrits, car de tels motifs ont été communiqués au demandeur aujourd'hui même et ce dernier connaît les motifs sur lesquels la décision est fondée.

[13] Le défendeur soutient également que le demandeur a attendu « à la dernière minute » pour déposer la présente requête devant la Cour.

[14] Le défendeur se fonde également sur la décision Bertram c. Canada, [1999] J.C.F. no 1362, dans laquelle le juge Cullen a conclu qu'en appréciant le facteur du risque, l'agent pouvait se fonder sur des documents qui n'avaient pas été communiqués au demandeur.

[15] Le défendeur prétend que le demandeur n'a pas établi que sa cause était défendable.

[16] En ce qui concerne le préjudice irréparable, le défendeur soutient que le demandeur a été avisé en juillet, puis en août, qu'il serait bientôt renvoyé du Canada et qu'il devait prendre des dispositions en vue de son départ.

[17] Les notes écrites de l'agent chargé d'examiner le dossier du demandeur indiquent que les médicaments dont celui-ci a besoin sur une base quotidienne sont disponibles au El Salvador, et la Cour peut, sur le fondement de ces notes, conclure que le demandeur ne subira pas de préjudice irréparable s'il est expulsé dans ce pays.

[18] En ce qui concerne la prépondérance des inconvénients, le défendeur soutient que bien qu'il ait été reconnu coupable d'un crime au Canada et qu'il ait été condamné plusieurs fois aux États-Unis, le demandeur n'a pas mentionné ces condamnations, que le défendeur a découvertes plus tard.

[19] Le défendeur a également mentionné que le demandeur reçoit des prestations d'aide sociale, qu'il représente un fardeau pour les contribuables, et qu'il reçoit des médicaments gratuitement.

[20] Le défendeur a conclu en disant qu'il incombe au ministre d'exécuter la mesure d'expulsion dès que les circonstances le permettent, comme le prévoit la loi.

L'ANALYSE

La question grave

[21] L'agent R. Bérubé s'est fondé sur un rapport, daté du 22 octobre 1998, du Dr Esquevel, médecin désigné de l'Immigration, et du Dre Celina Miranda, de l'Association Funda Sida. Ce rapport porte sur la disponibilité et l'accessibilité de traitements pour les personnes atteintes du SIDA au El Salvador.

[22] Le rapport constitue une preuve extrinsèque qui n'a pas été communiquée au demandeur pour que celui-ci fasse des remarques, étant donné que les renseignements qu'il contient contredisent d'autres documents que le demandeur a déjà déposés.

[23] Cela constitue une question grave que la Cour devra traiter en examinant la demande d'autorisation et de contrôle judiciaire contre la décision que la Direction générale du règlement des cas a prise le 25 novembre 1998.

Le préjudice irréparable

[24] Le demandeur subira-t-il un préjudice irréparable s'il est expulsé au El Salvador?

[25] Étant donné que la seule information dont dispose la Cour est la preuve contradictoire concernant la disponibilité des médicaments au El Salvador qui découle de la preuve extrinsèque, et compte tenu des conséquences graves que l'absence de médicaments fera subir au demandeur, j'estime que ce dernier pourrait subir un préjudice irréparable s'il était expulsé au El Salvador.

La prépondérance des inconvénients

[26] En ce qui concerne la prépondérance des inconvénients, il ressort du dernier rapport concernant l'état de santé du demandeur, que le Dre Janet Gilmore, directrice du HIV Care Program et professeure adjointe à l'Université Western Ontario, a produit le 24 septembre 1999 que l'état de santé du demandeur se détériorerait rapidement et que celui-ci pourrait mourir prématurément s'il cessait d'avoir accès à des soins médicaux, en particulier à la thérapie et au traitement antirétrovirus pour soigner ses infections opportunistes.

[27] Pour ces motifs, la présente demande de sursis est accueillie et il est sursis à l'exécution de la mesure d'expulsion jusqu'à ce que soit tranchée la demande d'autorisation et de contrôle judiciaire que le demandeur a présentée.

Pierre Blais                      

                                                             juge

OTTAWA (ONTARIO)

Le 4 novembre 1999.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                                           IMM-4441-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :              JOSE MAURICIO JIMENEZ c. M.C.I.

AUDIENCE TENUE DANS LE CADRE D'UNE CONFÉRENCE TÉLÉPHONIQUE ENTRE OTTAWA, TORONTO ET LONDON (ONTARIO)

EN DATE DU :                                               1ER NOVEMBRE 1999

MOTIFS D'ORDONNANCE EXPOSÉS PAR MONSIEUR LE JUGE BLAIS

EN DATE DU :                                               4 NOVEMBRE 1999

ONT COMPARU :

M. Terry Guerriero                                                                   POUR LE DEMANDEUR

Mme Neeta Logsetty                                                                POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Terry Guerriero                                                                   POUR LE DEMANDEUR

London (Ontario)

M. Morris Rosenberg                                                                POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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