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     T-862-99


ENTRE :


Ed Trevena

     demandeur


et


le procureur général du Canada

     défendeur



     JE CERTIFIE PAR LES PRÉSENTES qu'à la fin des motifs de l'ordonnance qu'elle a rendue le 29 juin 2000, la Cour (le juge O'Keefe) a ordonné ce qui suit :

     Il est ordonné que la requête visant à l'autorisation de soumettre une preuve par affidavit complémentaire soit rejetée.
     Il est en outre ordonné que les dépens suivent l'issue de la cause.

CERTIFIÉ à Ottawa (Ontario), le 29 juin 2000.



                            

                                 Geneviève Payer

                                 Fonctionnaire du greffe

Traduction certifiée conforme


Martine Brunet, LL.B.




     Date : 20000629

     Dossier: T-862-99

Ottawa (Ontario), le 29 juin 2000

DEVANT : MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEFE

ENTRE :


ED TREVENA

     demandeur


et


LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

     défendeur



MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O'KEEFE

[1]      Il s'agit d'une requête présentée par Ed Trevena (le demandeur) en vue de l'obtention d'une ordonnance conformément à la règle 312a) des Règles de la Cour fédérale (1998) (les Règles) accordant à celui-ci l'autorisation de déposer un affidavit de documents complémentaire en plus de ceux visés aux règles 306 et 307. L'affidavit de documents complémentaire projeté doit être composé :

     1.      des paragraphes 5, 6, 7, 8, 9, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 29, 36, 49, 51, 53, 56 et 62 de l'affidavit d'Ed Trevena, fait sous serment le 4 février 1999;
     2.      des paragraphes 4, 5, 6 et 7 de l'affidavit de Blain Pilatzke;
     3.      des affidavits de John Reid, Patton Maclean, Mike Cooper, Don Perala, Brenda Howard, Anna Pawliw, Jim Knoblauch, Keith Brock, Rose Gould et Tim Roberts;
     4.      de l'affidavit de Mark Catterall;

qui ont tous déjà été déposés dans le cadre de la présente demande, à l'exception de l'affidavit de Mark Catterall.

[2]      Les éléments de preuve complémentaires doivent être soumis dans une demande de contrôle judiciaire présentée par le demandeur, laquelle se rapporte à une décision rendue par l'arbitre Ken Norman, qui a conclu que l'employeur du demandeur, Revenu Canada, avait congédié celui-ci pour un juste motif.

[3]      Il a été mis fin à l'emploi du demandeur le 6 juin 1997. L'arbitre Norman a entendu le grief présenté par le demandeur les 6 et 7 octobre 1998 et a rendu sa décision le 25 novembre 1998.

[4]      Le procureur général du Canada, qui est défendeur dans la demande de contrôle judiciaire, s'oppose à la présente requête visant au dépôt d'éléments de preuve complémentaires.

[5]      Dans le cadre d'une requête antérieure présentée par le défendeur dans la demande de contrôle judiciaire, il a été ordonné de radier la preuve par affidavit complémentaire que le demandeur cherche maintenant à déposer en vertu des alinéas (1)a), b) et c) de son avis de requête. Dans la requête antérieure, le juge d'appel McDonald a accueilli la requête visant à la radiation de divers alinéas des affidavits qui avaient été déposés (énumérés aux alinéas (1)a) et b) de l'avis de requête actuel) pour le motif que [TRADUCTION] « chacun de ces alinéas vise à la présentation de nouveaux éléments de preuve sans autorisation ou renferme d'une façon non appropriée une opinion, une conjecture ou un argument » . De plus, le juge McDonald a accueilli une requête visant à faire radier la preuve par affidavit mentionnée à l'alinéa (1)c) de l'avis actuel de requête parce que ces affidavits visaient [TRADUCTION] « à la présentation de nouveaux éléments de preuve qui n'avaient pas été mis à la disposition de l'arbitre et ne sont pas admissibles sans l'autorisation de la Cour » .

[6]      Dans son ordonnance, le juge McDonald énonce également les conditions qui s'appliquent au dépôt d'une preuve complémentaire ou d'une contre-preuve :

     [TRADUCTION]
     Le demandeur déposera un autre affidavit ou un affidavit complémentaire pour l'application de la règle 306 au plus tard le 31 mai 1999. S'il veut présenter de nouveaux éléments de preuve dont l'arbitre ne disposait pas, il doit demander à la Cour l'autorisation de déposer des affidavits complémentaires conformément à la règle 312a) des Règles de la Cour fédérale (1998).

[7]      Au 31 mai 1999, le demandeur n'avait toujours pas présenté de requête visant au dépôt des affidavits complémentaires; le 30 juin 1999, le défendeur a déposé sa preuve par affidavit. Étant donné que le demandeur n'avait pas déposé son dossier de requête conformément aux exigences de la règle 309, la demande a fait l'objet d'un examen de l'état de l'instance en vertu de la règle 380(1)b).

[8]      Le 16 décembre 1999, une audience relative à l'examen de l'état de l'instance a eu lieu devant le juge Lutfy (tel était alors son titre) et le demandeur a soulevé la possibilité de présenter la preuve par affidavit de Mark Catterall et a demandé au défendeur de consentir au dépôt de l'affidavit. Le défendeur n'a pas pris position étant donné qu'il n'avait pas encore vu l'affidavit. Le juge Lutfy (tel était alors son titre) a donné une directive, qui se lit en partie comme suit :

     [TRADUCTION]
     Le demandeur signifiera et déposera au besoin, et si le consentement du défendeur n'a pas par ailleurs été obtenu, une requête visant à l'obtention de l'autorisation de produire un affidavit complémentaire au plus tard le 18 janvier 2000.

[9]      Dans la présente requête, le demandeur sollicite l'autorisation de déposer non seulement l'affidavit de Mark Catterall, mais aussi l'affidavit de documents qui avait antérieurement été radié par Monsieur le juge McDonald.

Les points litigieux

[10]      1.      La requête que le demandeur a présentée en vue d'obtenir l'autorisation de déposer une preuve par affidavit complémentaire devrait-elle être accueillie?
     2.      Si le demandeur est autorisé à présenter une preuve par affidavit complémentaire, le défendeur devrait-il obtenir une prorogation du délai dans lequel il peut procéder à un contre-interrogatoire au sujet de la preuve par affidavit déposée devant la Cour?
     3.      Si le demandeur est autorisé à présenter une preuve par affidavit complémentaire, le défendeur devrait-il obtenir une prorogation du délai dans lequel il peut déposer une preuve par affidavit en réponse à la preuve par affidavit complémentaire déposée par le demandeur?

Les dispositions législatives applicables

[11]      La règle 312a) des Règles de la Cour fédérale (1998) prévoit ce qui suit :


312. With leave of the Court, a party may

(a) file affidavits additional to those provided for in rules 306 and 307;

312. Une partie peut, avec l'autorisation de la Cour:

a) déposer des affidavits complémentaires en plus de ceux visés aux règles 306 et 307;

[12]      Première question

     La requête que le demandeur a présentée en vue d'obtenir l'autorisation de déposer une preuve par affidavit complémentaire devrait-elle être accueillie?

     J'examinerai d'abord la demande visant à l'obtention de l'autorisation de déposer la preuve par affidavit, qui a été radiée par l'ordonnance rendue par le juge McDonald le 6 mai 1999. Le juge McDonald a radié la preuve par affidavit; il a dit que, si le demandeur voulait déposer d'autres affidavits ou des affidavits complémentaires, ceux-ci devaient être déposés au plus tard le 31 mai 1999. Le demandeur n'a pas respecté cette date limite et il n'a pas non plus demandé une prorogation du délai dans lequel il pouvait déposer les autres affidavits ou les affidavits complémentaires. Je note également qu'il semble que la preuve par affidavit radiée par le juge McDonald n'ait pas été examinée lors de l'audience relative à l'état de l'instance qui a eu lieu devant le juge Lutfy (tel était alors son titre).

[13]      Il est certain que la règle 312a) prévoit le dépôt d'affidavits complémentaires avec l'autorisation de la Cour. Cependant, dans cette requête, le demandeur sollicite l'autorisation de déposer la preuve par affidavit dont le juge McDonald avait ordonné le dépôt au plus tard le 31 mai 1999. Je ne suis pas prêt à accorder l'autorisation de déposer cette preuve par affidavit étant donné que dans son ordonnance, le juge McDonald fixait une date limite aux fins du dépôt de cette preuve et que cette date limite n'a pas été respectée. La Cour doit attribuer un sens à ses propres ordonnances. La question de la réparation demandée aux alinéas (1)a), b) et c) de la requête du demandeur est donc réglée.

[14]      À l'alinéa (1)d) de sa requête, le demandeur sollicite l'autorisation de la Cour en vue de déposer l'affidavit de Mark Catterall. Le droit qui s'applique dans cette cour en ce qui concerne les affidavits complémentaires a été énoncé par le protonotaire Hargrave dans la décision Fogal et al c. Canada et al (1999), 161 F.T.R. 121 (C.F. 1re inst.), aux pages 124 et 125 :

     Mme le juge Reed n'est pas restée longtemps la seule à autoriser le dépôt d'affidavits complémentaires dans un recours en contrôle judiciaire; voir par exemple Unitel Communications Inc. c. Bell Canada (1995), 82 F.T.R. 298 (C.F. 1re inst.), et Adria Laboratories of Canada Ltd. c. Canada (1995), 182 N.R. 313 (C.A.F.). À mon avis, la règle générale en matière d'affidavits complémentaires pose qu'il s'agit au premier chef de savoir si les documents complémentaires sont dans l'intérêt de la justice, s'ils serviront à éclairer le juge et s'ils ne causent pas un grave préjudice à la partie adverse; voir par exemple Eli Lilly and Company c. Apotex Inc. (1998), 137 F.T.R. 226, page 228, décision rendue par le juge Teitelbaum sous le régime des anciennes règles.
     Si la jurisprudence Nguyen pose que les cas où des documents peuvent être déposés par affidavit complémentaire sont exceptionnels, il ressort des nouvelles règles que les affidavits complémentaires peuvent être admissibles. Je pense cependant qu'ils ne doivent être admis que dans les cas exceptionnels, sinon ce serait contraire à l'esprit du contrôle judiciaire qui vise à produire une réparation à bref délai par une procédure sommaire.
     En l'espèce, il y a des facteurs qui justifient le dépôt de l'affidavit complémentaire, car celui-ci, joint aux documents produits par les défenderesses, n'introduit pas des documents qui auraient pu être produits auparavant.

[15]      Le droit applicable a également été énoncé par le juge Rothstein dans la décision Gitxsan Treaty Society c. Hospital Empl. Union [2001] 1 C.F. 135 (C.A.), aux pages 144 et 145 :

     Avec égards, je suis d'avis que le même principe est applicable devant la Cour. Le but premier du contrôle judiciaire est de contrôler des décisions, et non pas de trancher, par un procès de novo, des questions qui n'ont pas été examinées de façon adéquate sur le plan de la preuve devant le tribunal ou la cour de première instance. C'est cette dernière thèse qui est plaidée à tort par la demanderesse dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire. La nécessité à laquelle faisait référence lord Sumner dans l'arrêt Nat Bell Liquors, précité, n'a pas été démontrée. La Cour n'examinera pas de nouveaux éléments de preuve dans les circonstances.

[16]      Il est donc évident que même si la règle 312a) permet le dépôt d'une nouvelle preuve par affidavit dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire, la Cour ne devrait pas autoriser le dépôt d'un élément de preuve qui aurait pu ou qui aurait dû être soumis (ou être disponible) devant l'arbitre ou devant un autre tribunal administratif.

[17]      J'ai examiné l'affidavit de Mark Catterall et j'estime que la preuve aurait pu être fournie devant l'arbitre. Je fais cette remarque malgré la déclaration qui figure dans l'affidavit du demandeur selon laquelle les renseignements divulgués dans l'affidavit Catterall n'ont été communiqués au demandeur qu'après l'audience. Il aurait été possible d'obtenir cette preuve simplement en parlant à Mark Catterall puisque ce dernier était l'un des contribuables à qui la lettre en question avait été envoyée. De plus, lors de l'audience, le demandeur aurait été au courant de la participation de M. Catterall à ce moment-là étant donné qu'une note de service concernant une réunion qui avait eu lieu le 2 mai 1997 avait été admise en preuve. Le demandeur avait en outre assisté à la réunion en question. Par conséquent, puisqu'une demande de contrôle judiciaire ne doit pas être transformée en un procès de novo au moyen de la présentation d'éléments de preuve qui auraient pu être fournis au tribunal, je refuse d'accorder l'autorisation de déposer l'affidavit de Mark Catterall.

[18]      Étant donné la décision que je rends à l'égard de la requête, je n'ai pas à trancher les deuxième et troisième questions.

[19]      Les dépens suivront l'issue de la cause.


ORDONNANCE

[20]      IL EST ORDONNÉ que la requête visant à l'obtention de l'autorisation de soumettre une preuve par affidavit complémentaire soit rejetée.

[21]      IL EST EN OUTRE ORDONNÉ que les dépens suivent l'issue de la cause.

                                         « John A. O'Keefe »

                                     J.C.F.C.

Ottawa (Ontario),

le 29 juin 2000.

Traduction certifiée conforme


Martine Brunet, LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


No DU GREFFE :      T-862-99

    

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Ed Trevena c. Le procureur général du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :      Regina (Saskatchewan)

DATE DE L'AUDIENCE :      le 23 mars 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE du juge O'Keefe en date du 29 juin 2000


ONT COMPARU :

Tom Waller      POUR LE DEMANDEUR

Richard Fader      POUR LE DÉFENDEUR


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Olive Waller Zinkhan & Waller      POUR LE DEMANDEUR

Regina (Saskatchewan)

Morris Rosenberg      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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