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Date : 20030526

Dossier : IMM-1458-02

Référence : 2003 CFPI 648

Ottawa (Ontario), le 26 mai 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLANCHARD                                  

ENTRE :

                                                                 TANVIR AHMAD

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                 Le demandeur, M. Tanvir Ahmad, cherche à obtenir le contrôle judiciaire de la décision, rendue oralement le 19 février 2002, par laquelle la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a statué qu'il n'était pas un réfugié au sens de la Convention.

Les faits

[2]                 Le demandeur est un citoyen du Pakistan de 27 ans originaire de Gujrat. Il prétend craindre avec raison d'être persécuté par la Ligue musulmane du Pakistan (la LMP) en raison de son travail pour le Parti du peuple pakistanais (le PPP).


[3]                 Le demandeur et son père étaient des militants du PPP. En 1993, un partisan de la LMP s'est rendu à leur résidence familiale et a essayé d'intimider le père du demandeur afin que celui-ci se joigne à la LMP, un parti concurrent. Les deux hommes ont continué à travailler activement pour le PPP après l'élection de 1993.

[4]                 De nouvelles élections ont été annoncées en 1997. Le demandeur déclare que des partisans de la LMP l'ont menacé de mort, lui ainsi que son père et des bénévoles du PPP, disant qu'ils tireraient sur eux s'ils ne travaillaient pas pour la LMP. Le demandeur et son père ont rapporté les menaces à la police, dénonciation qui s'est soldée par leur détention au poste toute la nuit avant qu'ils ne soient libérés. Il déclare que la police leur a dit qu'ils devraient quitter le PPP et se joindre à la LMP.

[5]                 Le demandeur et son père ont cherché à obtenir de l'aide d'un élu local du PPP, M. Mukhtar. Le demandeur déclare que trois membres de la LMP ont néanmoins assassiné son père, le 7 février 1997, en tirant sur lui alors qu'il revenait d'une réunion politique. Il affirme que trois personnes ont été arrêtées pour ce meurtre, mais qu'elles ont été relâchées cinq mois plus tard et que personne n'a été reconnu coupable du crime.

[6]                 Après l'assassinat de son père, le demandeur a cessé de travailler pour le PPP. Il déclare n'avoir eu aucun problème avec la LMP entre 1997 et 2001 et s'être concentré sur son travail dans son entreprise de ferronnerie.


[7]                 Le demandeur déclare qu'il a recommencé à s'intéresser au travail politique en février 2001 et qu'il a commencé à préparer les prochaines élections. Il prétend avoir tenu une réunion politique chez lui en mars 2001 à laquelle ont assisté une centaine de partisans. Il affirme avoir commencé peu après à recevoir des menaces par téléphone de militants de la LMP. Ceux-ci lui ont dit qu'il pourrait subir le même sort que son père, qui a été assassiné. Le demandeur a à nouveau cherché à obtenir l'aide de M. Mukhtar, qui lui a dit de continuer son travail. Il prétend avoir décidé de quitter le pays quand sa mère a appris que la vie de son fils était en danger.

[8]                 Le demandeur déclare s'être rendu à Lahore, où il a fini par rencontrer des passeurs à l'hôtel Gateway. Le 22 mai 2001, muni d'un faux passeport pakistanais, il a quitté le Pakistan avec un passeur. Il est arrivé au Canada le 24 mai 2001 après être passé par Londres et Seattle. Le demandeur a revendiqué le statut de réfugié à son arrivée. Il a déclaré avoir appris de sa mère, lors de conversations téléphoniques avec elle, que des militants de la LMP le recherchent et se rendent tous les deux ou trois jours chez lui.


[9]                 Parmi les documents présentés par le demandeur figure une copie d'un courriel envoyé de l'ambassade canadienne à Islamabad, au Pakistan, à l'avocat du demandeur à Vancouver. Le demandeur déclare que l'expéditeur est une personne qu'il connaît, M. Khawar. Le courriel est signé par le secrétaire général du PPP. Le demandeur déclare que M. Khawar travaille pour le PPP et la LMP, que les renseignements contenus dans le courriel sont incorrects et que l'intention de l'expéditeur était de discréditer la revendication du statut de réfugié du demandeur.

La décision de la Commission

[10]            La Commission a rendu sa décision oralement le 19 février 2002 à la fin de l'audience et a remis ses motifs écrits le 21 mars 2002.

[11]            La Commission a reconnu que le demandeur et son père étaient des membres militants du PPP et qu'ils ont connu des problèmes avant l'élection de 1997. En ce qui concerne la revendication du demandeur suivant laquelle des fiers-à-bras ont exigé de lui et de son père qu'ils changent d'allégeance pour se joindre à la LMP, la Commission a indiqué que cela semblait être « une chose plutôt bizarre à demander à une personne d'un autre parti politique » , mais a accepté qu'il s'agissait de l'allégation du demandeur.

[12]            La Commission a indiqué qu'elle estimait que le témoignage du demandeur était très vague au sujet de la date prévue pour l'élection et a en conséquence tiré une inférence défavorable quant à la crédibilité.


[13]            En ce qui concerne l'affirmation du demandeur à l'audience suivant laquelle sa mère l'avait informé par téléphone que des fiers-à-bras de la LMP se rendaient à la résidence familiale tous les deux ou trois jours, la Commission a fait observer qu'ils devaient alors avoir effectué environ 90 visites, ce qui était invraisemblable. La Commission a indiqué que « [c]es chiffres sont nettement exagérés, par rapport à la déclaration qu'il a faite dans son FRP, selon laquelle ils sont venus à trois reprises à sa maison pour le chercher » . Concluant que le témoignage du demandeur était intéressé, exagéré et contradictoire, elle a indiqué qu'elle ne l'acceptait pas.

[14]            La Commission a conclu que la revendication, telle qu'elle est présentée, était très peu vraisemblable. Elle n'a pas cru qu'un militant de bas niveau du PPP pouvait avoir été assassiné en raison de son engagement politique. Elle a aussi noté que le demandeur a allégué avoir été menacé de subir le même sort aussi récemment qu'en février 2001, soit après le coup d'état militaire et bien après que la LMP a été chassée du pouvoir. La Commission n'a pas accepté l'affirmation du demandeur selon laquelle la LMP contrôle toujours la région de Gujrat où il habitait, malgré le fait que les militaires règnent sur le reste du pays, puisque cette déclaration contredit la preuve documentaire.


[15]            La Commission a tiré une conclusion défavorable quant à la crédibilité du fait que le demandeur n'a produit ni le rapport de police relatant les menaces reçues en janvier 1997 ni le certificat de décès de son père. Les deux documents seraient en la possession de sa famille au Pakistan. Le demandeur a déclaré que sa mère lui a envoyé par courrier recommandé des copies de ces documents neuf semaines avant l'audience, mais qu'ils ne sont pas arrivés à destination et que sa mère a perdu le reçu. La Commission a noté que le demandeur a donné des réponses contradictoires à la question de savoir pourquoi il n'avait pas produit les documents : il a d'abord dit qu'il ne savait pas qu'il en avait besoin, puis a fait des déclarations laissant entendre qu'il comprenait l'importance de la production des documents. Il n'y a par conséquent pas de preuve documentaire à l'appui du meurtre du père du demandeur en 1997.

[16]            De plus, la Commission a noté que la mère du demandeur n'a pas signé l'affidavit notarié, ce qui diminue la valeur probante du document.

[17]            La Commission a remarqué que le courriel envoyé par le secrétaire général du PPP à Gujrat indique que le père du demandeur est mort en 1977 d'un choc électrique, information qui contredit l'allégation du demandeur selon laquelle son père est mort en 1997. Le demandeur a admis que l'auteur du courriel travaillait effectivement pour le PPP, mais a déclaré que le renseignement donné était incorrect et que cette personne travaillait en fait aussi pour la LMP. Il a affirmé que le secrétaire général du PPP avait « toujours » tenté de faire du tort à sa famille et qu'il a su gravir des échelons dans le parti depuis le décès de son père. La Commission a dit, à propos du courriel :

La principale contradiction [dans le courriel] vient de l'affirmation par le revendicateur que son père est décédé en 1977 en raison d'un choc électrique quand il avait deux ou trois ans. Le courriel confirme que le revendicateur a été un militant du PPP, puis mentionne que la situation au Gujarat s'est stabilisée depuis que le général Mucharraf a pris le contrôle du gouvernement. Mais encore une fois, vu que cette information contredit de manière flagrante l'allégation du revendicateur, je ne sais pas quel poids y accorder. Le revendicateur a laissé croire que le document a été falsifié afin de lui nuire. J'en doute. Son expéditeur était le secrétaire général de son propre parti. Cela est probablement faux (sic). Quoi qu'il en soit, l'affirmation que le secrétaire général de son propre parti a transmis de l'information qui va complètement à l'encontre de sa propre revendication nuit à sa crédibilité et s'ajoute aux nombreuses autres raisons que j'ai mentionnées pour lesquelles la revendication doit être rejetée pour manque de crédibilité.


Je conclus de cet extrait que la Commissioin a préféré la preuve contenue dans le courriel au témoignage du demandeur.

[18]            Enfin, la Commission s'est reportée à une évaluation psychologique portant sur le trouble de stress post-traumatique, présentée par le demandeur. Elle a indiqué que l'évaluation reposait largement sur une « auto-évaluation » et estimé que celle-ci était farcie de fausses allégations et ne lui a par conséquent accordé aucun poids.

[19]            En conséquence, la Commission a conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention.

Questions en litige

[20]            La Commission a-t-elle commis une erreur en tirant des conclusions manifestement déraisonnables au sujet de la crédibilité ou de la vraisemblance ou en ne tenant pas compte de la preuve documentaire lorsqu'elle a décidé que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention?

Norme de contrôle


[21]            On ne doit pas intervenir en matière d'appréciation de la crédibilité à moins que les conclusions tirées à cet égard n'aient été fondées sur des facteurs étrangers ou non pertinents : Ngue c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 383. Dans la mesure où les inférences tirées par la Commission ne sont pas déraisonnables au point de justifier une intervention, ses conclusions sont à l'abri du contrôle judiciaire : Aguebor c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1993] A.C.F. no 732.

Analyse

[22]            Le demandeur fait valoir que la Commission a commis une erreur en se fondant sur une appréciation déraisonnable quant à la crédibilité et à la vraisemblance et il soulève un certain nombre de points à l'appui de cette prétention : (i) la Commission a commis une erreur en préférant le contenu du courriel à son témoignage; (ii) la Commission n'a pas tenu compte de la preuve documentaire au sujet de la violence politique au Pakistan et a par conséquent commis une erreur en concluant que le récit du demandeur était invraisemblable; (iii) la Commission a commis une erreur en concluant que le demandeur « avait répondu de façon très vague » à la question sur la date prévue pour les prochaines élections au Pakistan; (iv) la Commission a commis une erreur en ne tenant pas compte de la preuve au sujet de la difficulté pour une personne d'obtenir un rapport de police au Pakistan; (v) la Commission a commis une erreur en ne mentionnant pas la carte de membre du PPP dont est titulaire le demandeur et une lettre d'appui émanant du PPP.


[23]            Avant de me pencher sur les arguments du demandeur, je vais mentionner brièvement les conclusions défavorables quant à la crédibilité que le demandeur ne conteste pas. La Commission a statué qu'il était invraisemblable que les fiers-à-bras de la LMP se soient présentés à la maison du demandeur deux à trois fois par semaine puisque cela équivaudrait à 90 visites depuis l'arrivée du demandeur au Canada. La Commission a aussi noté que le demandeur a donné des réponses contradictoires lorsqu'on lui a demandé pourquoi il n'avait pas produit le rapport de police et le certificat de décès de son père : il a d'abord dit qu'il ne savait pas qu'il avait besoin de les produire et a ensuite donné à entendre qu'il réalisait l'importance d'obtenir ces documents. Enfin, la Commission a conclu que le demandeur avait convenu que l'affidavit non signé relatant en détail le meurtre de son père en 1997 n'avait pas de force probante.

[24]            Vu la preuve, j'estime que ces conclusions défavorables quant à la vraisemblance et la crédibilité sont bien fondées et, par conséquent, à l'abri du contrôle judiciaire. Je me pencherai maintenant sur les prétentions du demandeur.

(i) Courriel

[25]            Le demandeur prétend qu'il serait ridicule de sa part de présenter un courriel du PPP s'il n'était pas sincère à propos de sa propre revendication. Il soutient que le courriel a été soumis dans le but d'étayer son récit et de mettre en évidence ses craintes et le danger auquel il est toujours exposé en raison de son allégeance politique au Pakistan, que son témoignage à cet égard est crédible et digne de foi et que la Commission a commis une erreur en concluant que le demandeur n'est pas crédible.


[26]            Si le demandeur a soumis le courriel dans le but d'étayer son récit, il échoue sur ce point étant donné que l'élément clé des revendications est le meurtre de son père par des bandits de la LMP. La Commission a noté que le courriel indiquait que le père du demandeur est décédé en 1977 d'un choc électrique, et non en 1997 comme allégué par le demandeur. Puisque le renseignement contenu dans le courriel contredit directement le récit du demandeur, il n'était pas déraisonnable que la Commission parvienne à une appréciation défavorable quant à la crédibilité, compte tenu particulièrement de ses autres conclusions défavorables au sujet de la crédibilité. De même, la Commission n'a pas commis une erreur en doutant de la crédibilité du récit du demandeur suivant lequel l'auteur du courriel, le secrétaire général du PPP, était en fait un agent double de la LMP et qu'il avait toujours essayé de nuire au demandeur. Me fondant sur l'ensemble de la preuve, je conclus qu'une telle conclusion de la Commission n'était pas déraisonnable et qu'elle n'est par conséquent pas susceptible de contrôle.

(ii) Preuve documentaire

[27]            Le demandeur fait valoir que la preuve documentaire étayait sa prétention selon laquelle des actes de violence politique et d'intimidation ont effectivement lieu et que ce sont souvent des intérêts politiques et criminels qui contrôlent la police. Il se reporte à un article de journal datant de juillet 2001 dans lequel on a rapporté l'assassinat d'un partisan du PPP, un « nazim » récemment élu, meurtre qu'on dit avoir probablement été perpétré par le candidat défait de la LMP. Le demandeur avance que cet incident représente un [TRADUCTION] « style de meurtre semblable visant un opposant politique de bas niveau » .


[28]            Selon le témoignage, un « nazim » est [TRADUCTION] « un gouverneur ou un administrateur de district » . Au cours de sa déposition orale, le demandeur a décrit son père comme [TRADUCTION] « le président de Mehmada à Gujrat » . Il a déclaré que son père et lui étaient des militants du PPP qui appuyaient les candidats locaux. Le témoignage n'indique pas clairement que le père du demandeur était un dirigeant élu. Le demandeur a déclaré que son père s'est présenté aux élections pour le poste de président du PPP. Il a déclaré, dans son FRP, avoir travaillé avec son père en tant que « militant ordinaire du PPP » , que son père et lui faisaient du porte-à-porte pour demander aux gens d'appuyer les candidats du PPP et que son père organisait des réunions avec l'aide de 20 militants.

[29]            Je m'interroge à savoir si le meurtre d'un nouveau dirigeant public élu par le candidat perdant est un cas « semblable » à celui décrit dans le récit du demandeur. Vu l'ensemble de la preuve, je suis convaincu que le père du demandeur était soit un militant du parti soit son président, ou les deux, et non un dirigeant élu. La Commission a énoncé qu'il y avait un « [...] manque de vraisemblance important d'un meurtre sans ménagement résultant de rien de plus que, présumément, des activités politiques ordinaires au profit d'un des partis concurrents [...] » . Elle a conclu que le récit du demandeur était invraisemblable étant donné que son père et lui étaient des militants du parti. J'estime que la Commission était raisonnablement en droit de tirer cette conclusion en ce qui concerne la vraisemblance.


[30]            De plus, le demandeur plaide que la Commission n'a pas tenu compte d'éléments de preuve pertinents puisqu'elle a indiqué que les demandes de changement d'allégeance politique semblaient être « une chose plutôt bizarre à demander à une personne d'un autre parti politique » . Le demandeur prétend que la Commission a commis une erreur en insinuant que les menaces proférées par les fiers-à-bras étaient invraisemblables, ce qui s'est traduit par une inférence négative au sujet de la crédibilité. Le demandeur signale un bon nombre d'articles de la preuve documentaire qui indique que le parti au pouvoir au Pakistan cherche à [TRADUCTION] « affaiblir les opposants politiques par de fausses inculpations, de la torture, de l'intimidation et des leurres ou des menaces pour les faire changer d'allégeance » et que la police est souvent impliquée dans de tels abus. Ces éléments de preuve ont été présentés au tribunal lors de l'audience.

[31]            Dans sa décision, la Commission a de fait déclaré qu'une demande de changement d'allégeance était « une chose plutôt bizarre à demander » , mais a ajouté : « quoi qu'il en soit, voilà l'allégation » .

[32]            La preuve ne permet pas de conclure que la Commission n'a pas tenu compte de la preuve documentaire. Étant donné ses conclusions quant à la crédibilité et à la vraisemblance, qu'elle était, selon moi, en droit de tirer, je suis d'avis que la Commission n'a pas commis d'erreur en appréciant la preuve documentaire comme elle l'a fait.


(iii) Le « caractère vague » du témoignage du demandeur quant aux élections

[33]            Le demandeur plaide que la Commission a commis une erreur en concluant qu'il avait « répondu de manière très vague » quand on lui a demandé la date prévue pour les prochaines élections au Pakistan. Il soutient que sa réponse était « vague » parce que [TRADUCTION] « les dates des élections n'avaient pas encore été annoncées » et il renvoie à un article de journal daté de janvier 2002 dans lequel on disait que [TRADUCTION] « [le général Musharraf] a l'intention de déclencher des élections générales, élections qui auraient dû se tenir en octobre [2001] [...] » .

[34]            Après examen de la preuve, j'estime que le témoignage du demandeur au sujet de ses activités en 2001 n'était pas vague. Par conséquent, je conclus que la Commission a commis une erreur en tirant cette conclusion. Au moment où le demandeur a repris ses activités politiques, il n'existait aucune réponse claire à la question de savoir quand les prochaines élections devaient avoir lieu. Des preuves plus récentes indiquent cependant clairement que l'élection a été reportée. En tout état de cause, vu les autres conclusions négatives au sujet de la crédibilité tirées par la Commission, j'estime que cette erreur n'est pas importante.

(iv) Preuve concernant la difficulté pour une personne d'obtenir un rapport de police


[35]            Le demandeur prétend que la Commission n'a pas tenu compte de la preuve documentaire au sujet de la difficulté pour une personne d'obtenir un rapport de police et qu'elle n'a pas correctement examiné les déclarations du demandeur au sujet des documents qu'il ne pouvait pas fournir à l'audience. De plus, il dit qu'il ne devrait pas subir de préjudice parce que le paquet n'est pas arrivé ou que sa mère a égaré le reçu d'expédition.

[36]            À l'audience, le demandeur a déclaré que le rapport d'incident/rapport de police se trouvait dans sa maison au Pakistan :

                                 [TRADUCTION]

Président de l'audience : Mais avez-vous un rapport de police?

R : Le rapport d'incident était au poste de police.

Président de l'audience : Bon. En avez-vous, Monsieur, une copie que je puisse voir?

R : Elle est à la maison, au Pakistan

[...]

Président de l'audience : Alors avez-vous un certificat de décès?

R : Il devrait être à la maison.

Président de l'audience : Où est « la maison » ? Que veut dire « maison » ?

R : Ma maison au Pakistan.

[37]            Comme le rapport de police se trouve à la maison du demandeur au Pakistan, il appert que la preuve documentaire au sujet de la difficulté pour une personne d'obtenir un rapport de police n'est pas pertinente. La Commission a noté que certains documents envoyés par fax du Pakistan ont été produits à l'audience et s'est demandée pourquoi le rapport de police et le certificat de décès n'ont pas pu être envoyés de la même façon, par fax. Je note aussi que la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a avisé le demandeur, dans une lettre en date du 20 novembre 2001 (trois mois avant l'audience), que [TRADUCTION] « le président de l'audience demande au revendicateur de fournir les documents de la police et le certificat de décès de son père » . Je conclus que les inférences négatives tirées par la Commission en raison du défaut de production de ces documents ne sont pas déraisonnables au point de justifier une intervention.


(v) Autre preuve documentaire

[38]            Le demandeur fait valoir que la Commission a commis une erreur en ne mentionnant pas les éléments de preuve documentaire suivants : la carte de membre du PPP du demandeur et une lettre d'appui du parti PPP indiquant que le parti d'opposition essaye de torturer le demandeur et demandant la protection du gouvernement du Canada. La Commission n'a pas paru contester le fait que le demandeur était un membre du PPP. L'absence de mention de la carte de membre dans ses motifs n'a par conséquent aucune importance.

[39]            Au sujet du deuxième document, la Commission n'a pas mentionné la lettre d'appui dans ses motifs. Il aurait été préférable qu'elle le fasse. Cependant, étant donné sa décision au sujet de la crédibilité du demandeur et sa conclusion suivant laquelle le demandeur n'a pas produit à l'audience les documents importants - le certificat de décès et le rapport de police -, je suis d'avis que l'omission de mentionner la lettre du PPP n'est pas déterminante.

Conclusion

[40]            Le demandeur ne m'a pas convaincu que la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle lorsqu'elle a rendu sa décision et la demande de contrôle judiciaire sera par conséquent rejetée.


[41]            Les parties ont eu la possibilité de soulever une question grave de portée générale conformément à l'alinéa 74d) la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, et ne l'ont pas fait. Je ne propose pas de certifier une question grave de portée générale.

                                                                     ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.                    La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                    Aucune question grave de portée générale n'est certifiée.

« Edmond P. Blanchard »

Juge

Traduction certifiée conforme

Sandra Douyon de Azevedo, LL.B.


                                                    COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                               SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                 AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                        IMM-1458-02

INTITULÉ :                                                     Tanvir Ahmad c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :                           le 5 février 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                 LE JUGE BLANCHARD

DATE DES MOTIFS ET DE

L'ORDONNANCE :                                       le 26 mai 2003

COMPARUTIONS :

Mme Maureen Kirkpatrick                                  POUR LE DEMANDEUR

Mme Pauline Antoine                                            POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Larson Boulton Sohn Stockholder                     POUR LE DEMANDEUR

C.P. 26, - 6e étage

609, rue West Hastings

Vancouver (C.-B.) V6B 4W4

Morris Rosenberg                                               POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ministère de la Justice

840, rue Howe, bureau 900

Vancouver (C.-B.) V6Z 2S9

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