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Date : 20031015

Dossier : T-2089-01

Référence : 2003 CF 1194

ENTRE :

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                       ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                                                                 VAN KY PHAN

                                                                                                                                           défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE GIBSON

INTRODUCTION


[1]                Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (le ministre) a avisé Van Ky Phan (le défendeur) qu'il avait l'intention de présenter au gouverneur en conseil, suivant le paragraphe 10(1) de la Loi sur la citoyenneté[1], un rapport recommandant que le défendeur perde sa citoyenneté canadienne. Le motif invoqué est que le défendeur, par son omission d'avoir divulgué à un fonctionnaire de la citoyenneté ou à un juge de la citoyenneté qu'il avait été inculpé d'actes criminels prévus par une loi fédérale entre le moment où il a présenté sa demande de citoyenneté et celui où il a prêté le serment de citoyenneté, a acquis la citoyenneté canadienne par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels. Comme il pouvait le faire suivant l'article 18 de la Loi sur la citoyenneté, le défendeur a demandé que son affaire soit renvoyée devant la Cour. Le sous-procureur général du Canada, au nom du ministre, a renvoyé l'affaire du défendeur devant la Cour par une déclaration. Le demandeur tente d'obtenir la mesure de redressement suivante : une déclaration, faite suivant le paragraphe 10(1) et l'alinéa 18(1)b) de la Loi sur la citoyenneté, selon laquelle le défendeur a acquis la citoyenneté canadienne par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels, avec dépens contre le défendeur.

[2]                Les présents motifs découlent de l'instruction du renvoi.

LES FAITS ADMIS

[3]                Au début de l'audition du renvoi, les avocats ont présenté à titre de pièce un exposé conjoint des faits rédigé comme suit :

[TRADUCTION]

Les parties sont d'accord sur les faits suivants :

1.              Le défendeur, Van Ky Phan, est né le 1er janvier 1974 au Vietnam.

2.              Le 17 avril 1985, le défendeur a obtenu le statut de résident permanent au Canada.

3.              Le défendeur a présenté une première demande de citoyenneté canadienne le 13 juin 1988 alors qu'il était âgé de 14 ans.

4.              La demande de citoyenneté présentée en 1988 par le défendeur contenait une mise en garde selon laquelle le demandeur de citoyenneté ne peut recevoir la citoyenneté ni prêter le serment de citoyenneté tant qu'il est inculpé pour des actes criminels prévus par une loi fédérale et selon laquelle le certificat de citoyenneté peut être révoqué en cas de fausse déclaration, de fraude ou de dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

5.              L'alinéa 5(1)b) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. 1985, ch. C-29 (la Loi sur la citoyenneté), exige qu'une personne soit âgée d'au moins dix-huit (18) ans pour que la citoyenneté lui soit attribuée.

6.              La première demande de citoyenneté présentée par le défendeur a été rejetée.

7.              Le défendeur a ensuite présenté une autre demande de citoyenneté canadienne le 5 février 1992, alors qu'il était âgé de 18 ans.

8.              La demande de citoyenneté présentée par le défendeur en 1992 contenait une mise en garde selon laquelle le demandeur de citoyenneté ne peut recevoir la citoyenneté canadienne ni prêter le serment de citoyenneté tant qu'il est inculpé pour des actes criminels prévus par une loi fédérale.

9.              Le point 18 de la demande de citoyenneté présentée par le défendeur en 1992 contenait la déclaration suivante : [TRADUCTION] « Je reconnais que si avant de prêter le serment de citoyenneté je suis inculpé pour un acte criminel prévu par une loi fédérale ou que si je suis en probation, je dois en informer un fonctionnaire de la citoyenneté. » Le demandeur de citoyenneté a fait cette déclaration assermentée devant un agent de la citoyenneté le 5 février 1992.


10.            L'alinéa 22(1)b)de la Loi sur la citoyenneté prévoit que nul ne peut recevoir la citoyenneté ni prêter le serment de citoyenneté tant qu'il est inculpé pour un acte criminel prévu par une loi fédérale.

11.            Le 18 octobre 1993, un agent de la paix de la Gendarmerie royale du Canada a délivré au défendeur une citation à comparaître qui alléguait qu'il avait commis des infractions prévues aux paragraphes 3(1) et 4(2) de la Loi sur les stupéfiants, L.R.C. 1985, ch. N-1 (la LS) (possession de stupéfiant et possession de stupéfiant en vue du trafic).

12.            La citation à comparaître datée du 18 octobre 1993 ordonnait au défendeur de se présenter à la cour le 21 décembre 1993 pour répondre à ces accusations.

13.            Le 2 décembre 1993, une juge de la citoyenneté a reçu le défendeur en entrevue. En réponse à la question de la juge de la citoyenneté quant à savoir s'il avait eu affaire à la police, le défendeur a répondu que non, alors qu'il avait eu affaire à la police, parce qu'il croyait que les accusations étaient mineures et qu'elles ne seraient pas retenues. ­

14.            Le défendeur a déclaré devant la juge de la citoyenneté, le 2 décembre 1993, qu'il n'avait pas, depuis la présentation de sa demande de citoyenneté, fait l'objet de poursuites au criminel.

15.            Le 17 décembre 1993, un agent de liaison avec la cour a fait une dénonciation contre le défendeur en l'accusant de ce qui suit :­         

(i)             de possession de stupéfiant, de l'héroïne, en vue d'en faire le trafic en contravention du paragraphe 4(2) de la LS;            

(ii)           de possession de stupéfiant, de la cocaïne, en vue d'en faire le trafic en contravention du paragraphe 4(2) de la LS;

(iii)           de possession de stupéfiant, de l'héroïne, en contravention du paragraphe 3(1) de la LS.

(iv)           de résistance à un agent de la paix dans l'exécution de ses fonctions en contravention de l'alinéa 129a) du Code criminel du Canada.

16.            La possession de stupéfiant en vue d'en faire le trafic suivant le paragraphe 4(2) de la LS constituait un acte criminel.

17.            La possession de stupéfiant suivant le paragraphe 3(1) de la LS constituait une infraction mixte pouvant faire l'objet d'une poursuite en tant qu'un acte criminel ou en tant qu'une infraction punissable par voie de déclaration sommaire de culpabilité.

18.            La résistance à un agent de la paix dans l'exécution de ses fonctions en contravention de l'alinéa 129a) du Code criminel du Canada est une infraction mixte et peut faire l'objet de poursuite en tant qu'un acte criminel ou en tant qu'une infraction punissable par voie de déclaration sommaire de culpabilité.


19.            Le 21 décembre 1993, le défendeur s'est présenté à la Cour provinciale de Colombie-Britannique, à Nanaimo, pour sa première comparution. Le dossier des procédures et du visa de la dénonciation révèle qu'il y a eu une renonciation à la lecture de la dénonciation.

20.            Avant de prêter le serment de citoyenneté, le défendeur a été informé, par un avis de convocation pour prêter le serment de citoyenneté, qu'il devait se présenter le 23 décembre 1993 pour prêter le serment de citoyenneté et recevoir son certificat de citoyenneté.

21.            Le formulaire d'avis de convocation pour prêter le serment de citoyenneté, qui porte dans le coin inférieur gauche la mention « CC 3 200 (1-91) » , contenait une mise en garde selon laquelle une personne ne peut acquérir la citoyenneté canadienne ni prêter le serment de citoyenneté pendant la période où elle est inculpée pour un acte criminel prévu par une loi fédérale, selon laquelle lorsque cette situation s'applique au demandeur de citoyenneté, il doit informer le bureau de la citoyenneté et selon laquelle la citoyenneté peut être révoquée en cas de fausse déclaration, de fraude ou de dissimulation délibérée de faits essentiels.

22.           Le défendeur n'a pas informé le fonctionnaire de la citoyenneté, avant de prêter le serment de citoyenneté, qu'il était inculpé pour des actes criminels prévus par la LS, une loi fédérale.

23.            Le défendeur, lorsqu'il a prêté le serment de citoyenneté le 23 décembre 1993, n'a dit à aucun fonctionnaire de la citoyenneté qu'il était inculpé pour un acte criminel parce qu'il croyait que les accusations étaient mineures et qu'elles ne seraient pas retenues et qu'il voulait acquérir la citoyenneté canadienne afin d'obtenir un passeport pour aller rendre visite à sa mère au Vietnam.

24.            Le 23 décembre 1993, le défendeur a prêté le serment de citoyenneté devant une juge de la citoyenneté et il a acquis la citoyenneté canadienne. Le défendeur a reçu le certificat de citoyenneté canadienne portant le numéro 5587300.

25.            Par un avis daté du 21 janvier 2000, signifié le 17 août 2000, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (le ministre) a avisé le défendeur, sans faire mention du paragraphe 10(2) de la Loi sur la citoyenneté, qu'il avait l'intention de présenter au gouverneur en conseil, suivant le paragraphe 10(1) de la Loi sur la citoyenneté,­ un rapport recommandant que la citoyenneté canadienne attribuée au défendeur soit révoquée au motif qu'il, par son omission d'avoir divulgué le fait qu'il avait été inculpé pour un acte criminel prévu par une loi fédérale entre le moment où il avait présenté sa demande de citoyenneté et celui où il avait prêté le serment de citoyenneté, avait acquis la citoyenneté canadienne par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

26.            Par une lettre datée du 24 août 2000, reçue le 30 août 2000, le défendeur a demandé que son affaire soit renvoyée devant la Section de première instance de la Cour fédérale.


27.            Par une déclaration datée du 26 novembre 2001, le ministre a renvoyé l'affaire du défendeur devant la Cour et il a sollicité, suivant le paragraphe 10(1) et l'alinéa 18(1)b) de la Loi sur la citoyenneté, une déclaration selon laquelle le défendeur a obtenu la citoyenneté canadienne par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.                                                                                                                  [Provenance des documents omise.]

[4]                Immédiatement après le dépôt de l'exposé conjoint des faits, l'avocat du ministre a remarqué que le paragraphe 15 ne mentionnait pas une cinquième accusation apparaissant dans la dénonciation datée du 17 décembre 1993, à savoir la [TRADUCTION] « possession de stupéfiant, de la cocaïne, en contravention du paragraphe 3(1) de la LS » .

TÉMOIGNAGE DEVANT LA COUR

[5]                L'avocat du ministre a convoqué deux témoins, une ancienne juge de la citoyenneté qui a exercé ses fonctions dans les basses terres de Colombie-Britannique pendant toute la période pertinente en 1993 et une agente de la citoyenneté qui a travaillé au bureau du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, à Surrey, en Colombie-Britannique, pendant toute la période pertinente au cours de laquelle la demande de citoyenneté présentée par le défendeur a été traitée à ce bureau.

[6]                La juge de la citoyenneté a témoigné à l'égard de la vaste expérience qu'elle possédait dans la tenue d'entrevues de demandeurs de citoyenneté canadienne. Elle a témoigné que dans tous les cas elle tenait les entrevues en ayant en main les demandes présentées par les demandeurs. Un exemplaire de la demande de citoyenneté présentée par le défendeur en 1992 lui a été soumis et elle a identifié cette demande comme une demande pour laquelle elle avait tenu une entrevue.

[7]                Lorsqu'on l'a questionnée à l'égard de la mise en garde contenue dans le formulaire selon laquelle un demandeur ne pouvait recevoir la citoyenneté ni prêter le serment de citoyenneté tant qu'il était inculpé pour un acte criminel prévu par une loi fédérale, l'ancienne juge de la citoyenneté a témoigné qu'elle avait l'habitude de demander aux demandeurs s'ils avaient [TRADUCTION] « des problèmes avec la police » ou [TRADUCTION] « des problèmes avec la justice » , questions auxquelles les demandeurs répondaient presque invariablement [TRADUCTION] « non » . Elle a témoigné que lorsqu'un demandeur répondait [TRADUCTION] « oui » ou hésitait à l'égard de l'une ou l'autre de ces questions, elle suspendait l'entrevue afin de permettre la tenue d'une enquête par les fonctionnaires de la citoyenneté.

[8]                Un « Avis » au ministre d'une décision rendue par un juge de la citoyenneté à l'égard du défendeur a été soumis à l'ancienne juge de la citoyenneté. Elle a identifié sa signature sur le formulaire confirmant que le défendeur, alors le demandeur de citoyenneté, avait déclaré devant elle qu'il n'avait pas fait l'objet de [TRADUCTION] « poursuites au criminel » . Par conséquent, elle a témoigné qu'elle avait recommandé que la citoyenneté canadienne soit attribuée au défendeur.


[9]                La fonctionnaire de la citoyenneté qui a été appelée comme témoin a témoigné à l'égard de la procédure suivie au bureau de la citoyenneté de Surrey, en Colombie-Britannique, dans les années 1992 et 1993, lors de la réception d'une demande de citoyenneté remplie, mais non signée. Elle a témoigné que le demandeur de citoyenneté obtenait un rendez-vous au bureau afin de revoir sa demande avec un agent de la citoyenneté. Ce n'est qu'après avoir revu sa demande que le demandeur la signait. On a montré à l'agente de la citoyenneté une photocopie de la demande présentée par le défendeur et elle l'a identifiée comme une demande pour laquelle elle avait tenu l'entrevue avec le demandeur de citoyenneté, en l'espèce le défendeur. Elle l'a identifiée au moyen de divers commentaires et modifications qui étaient écrits de sa main sur le formulaire et au moyen de ses initiales à différents endroits et de sa signature sur le formulaire.

[10]            La fonctionnaire de la citoyenneté a témoigné qu'elle aussi, comme la juge de la citoyenneté, avait attiré l'attention du défendeur sur la mise en garde selon laquelle il ne pouvait pas recevoir la citoyenneté ni prêter le serment de citoyenneté s'il était inculpé pour un acte criminel prévu par n'importe laquelle des lois fédérales.

[11]            La fonctionnaire de la citoyenneté a témoigné qu'à la suite d'une entrevue au cours de laquelle un demandeur de citoyenneté signait son formulaire de demande, la demande était transmise afin que soient effectuées les vérifications de sécurité et du dossier criminel. Après que ces vérifications étaient complétées, on établissait la date d'une entrevue avec un juge de la citoyenneté. Lorsqu'une recommandation d'attribution de citoyenneté résultait de l'entrevue, comme cela s'était produit dans le cas du défendeur, un Avis de convocation pour prêter le serment de citoyenneté était délivré. L'avis mentionnait la date, l'heure et le lieu auxquels les demandeurs comme le défendeur devaient se présenter pour prêter le serment de citoyenneté.

[12]            La fonctionnaire de la citoyenneté a identifié un formulaire d'avis de convocation qui lui a été soumis comme étant le formulaire qui était utilisé en 1993. Ce formulaire contenait une mise en garde explicite selon laquelle « [u]ne personne ne peut acquérir la citoyenneté canadienne ni prêter le serment de citoyenneté pendant la période où [...] elle est inculpée pour [...] un acte criminel prévu par une loi du Parlement » . Le formulaire mentionne en outre que si le demandeur à qui un avis a été envoyé est dans une telle situation, il « [...] [doit] informer ce bureau de la citoyenneté » .

[13]            L'agente de la citoyenneté a témoigné que lorsqu'un demandeur de citoyenneté se présentait en réponse à un Avis de convocation pour prêter le serment de citoyenneté, il devait s'identifier à un agent de la citoyenneté et il avait ainsi la possibilité de répondre à la mise en garde contenue dans l'Avis de convocation avant qu'on lui permette de prêter le serment de citoyenneté et de recevoir son certificat de citoyenneté.

[14]            Il n'y a pas eu devant la Cour de contestations à l'égard du fait que le demandeur de citoyenneté ait, le 5 février 1992, signé sa demande de citoyenneté devant l'agente de la citoyenneté qui a témoigné devant la Cour, du fait qu'il se soit présenté devant la juge de la citoyenneté le 2 décembre 1993 et qu'il ait été reçu en entrevue et du fait qu'il ait prêté le serment de citoyenneté le 23 décembre 1993, à Surrey, en Colombie-Britannique.


[15]            Le défendeur est la seule personne appelée à témoigner en son nom. Il a parlé brièvement de son départ du Vietnam en compagnie de son frère alors qu'il était âgé de dix (10) ans, de leur voyage de quatre (4) jours en pleine mer et de son séjour d'un an dans un camp de réfugiés avant son arrivée au Canada en 1985. Le défendeur et son frère se sont d'abord rendus à Kelowna où son frère a travaillé et où lui est allé dans une école dans laquelle l'accent était mis sur les cours d'anglais langue seconde. Après trois (3) ans, le défendeur et son frère ont déménagé à Toronto où il a commencé à travailler. Le frère du défendeur a par la suite déménagé à Surrey et le défendeur est resté à Toronto.

[16]            Le défendeur a suivi son frère à Surrey, apparemment en compagnie de son amie, et, depuis leur arrivée, le défendeur et son amie, maintenant devenue son épouse, vivent avec le frère du défendeur. Le défendeur et son épouse ont deux enfants nés au Canada. À la maison, ils parlent le vietnamien. Le défendeur travaille en tant que cuisinier dans un restaurant vietnamien où la langue de travail est également le vietnamien.

[17]            Le défendeur a témoigné longuement à l'égard de ce qu'il avait vécu le 18 octobre 1993, seulement deux (2) mois avant la date de son entrevue avec la juge de la citoyenneté et la date à laquelle il a prêté le serment de citoyenneté. Ce jour-là, il avait apparemment été invité par un « ami » , qui était un client du restaurant où il travaillait, à rendre visite à cet « ami » à Nanaimo. Le défendeur a été conduit à la gare maritime, probablement à Deep Cove. Il est monté à pied sur le traversier et il est descendu à Nanaimo. « Son ami » l'y a rencontré et l'a conduit chez lui. L'ami du défendeur lui a demandé de conduire son automobile dans le stationnement d'un centre commercial de Nanaimo pour rencontrer un autre ami de l' « ami » . Le défendeur s'est plié à la demande.

[18]            Pendant que le défendeur était assis dans le véhicule dans le stationnement du centre commercial, des policiers sont arrivés sur les lieux. Deux (2) policiers, l'un en uniforme l'autre en tenue civile, sont sortis de leur véhicule avec leur arme à la main et ont ordonné au défendeur, qui avait mis l'automobile en marche et qui tentait de quitter les lieux, de s'arrêter. Les policiers se sont identifiés en tant que policiers. L'automobile que le défendeur conduisait a heurté de face une voiture de police. On a ordonné au défendeur de descendre de voiture. On lui a ordonné de se coucher sur le sol. On lui a passé les menottes. On a trouvé une certaine quantité de substances suspectes sur le sol juste à côté de la porte par laquelle le défendeur était descendu de voiture. Le défendeur a été conduit au poste de police dans une voiture de police. On l'a interrogé. On lui a donné la possibilité de faire un appel téléphonique, mais il a refusé cette offre. On lui a lu à de nombreuses reprises ses droits garantis par la Charte. On l'a placé en cellule.

[19]            On a identifié les substances suspectes comme de l'héroïne et de la cocaïne.

[20]            Une citation à comparaître ordonnant au défendeur de se présenter à la cour à Nanaimo le 21 décembre 1993 lui a été délivrée. La citation à comparaître alléguait, dans des termes très vagues, que le demandeur de citoyenneté avait violé la Loi sur les stupéfiants parce qu'il était en possession de stupéfiant et en possession de stupéfiant en vue d'en faire le trafic.

[21]            Le défendeur a été libéré de sa détention environ sept (7) heures après que sont survenus les événements dans le stationnement du centre commercial. Il est allé à la recherche de son « ami » , mais il n'a pas pu le trouver. À la date de l'audience devant la Cour, le défendeur n'a jamais revu l' « ami » .


[22]            L'entrevue du défendeur tenue par la juge de la citoyenneté a eu lieu le 2 décembre 1993. Le défendeur a reconnu que, au cours de l'entrevue, il n'a pas mentionné ce qui s'était passé le 18 octobre. Il a témoigné qu'il voyait cet incident avec les policiers comme n'étant pas important. Il savait qu'il devait se présenter à la cour, mais il n'estimait pas que les accusations portées contre lui soient sérieuses. Il croyait que les accusations ne seraient pas retenues parce que les stupéfiants ne lui appartenaient pas et qu'il ne savait rien à ce sujet. En outre, il ne savait pas quelles étaient les accusations portées contre lui. À ce moment, sa mère au Vietnam était très malade et il attendait avec impatience sa citoyenneté afin d'obtenir un passeport pour aller rendre visite à sa mère.

[23]            Une « dénonciation » faite à l'endroit du défendeur le 17 décembre 1993 alléguait que le dénonciateur avait des motifs raisonnables de croire et qu'il croyait effectivement que le défendeur avait commis les actes qui sous-tendent les cinq (5) infractions précédemment mentionnées dans les présents motifs.

[24]            Le défendeur a témoigné qu'il s'était présenté à la cour le 21 décembre 1993 comme il était requis de le faire. Il a eu une brève rencontre avec l'avocat commis d'office étant donné qu'il n'avait pas son propre avocat. Il a renoncé à la lecture des accusations. L'affaire a été remise et on a suggéré au défendeur de retenir les services d'un avocat. À la suite de cette audience, le défendeur a attendu afin de rencontrer de nouveau l'avocat commis d'office, mais cela ne s'est pas produit.

[25]            Le 23 décembre 1993, deux (2) jours après sa comparution à la cour à Nanaimo, le défendeur a assisté à la cérémonie de citoyenneté, a prêté le serment de citoyenneté et a reçu son certificat de citoyenneté. Le défendeur a témoigné qu'une fois de plus, malgré la mise en garde apparaissant sur son invitation à la cérémonie, il n'a aucunement divulgué l'incident avec les policiers et sa comparution à la cour. Il a témoigné qu'il ne savait pas qu'il avait l'obligation de le faire et qu'il ne se souvenait pas qu'on lui ait donné la possibilité de le faire.

[26]            Plus tôt, le défendeur avait subi un interrogatoire préalable. Des extraits de cet interrogatoire ont été déposés dans le dossier qui a été soumis à la Cour. Lors du contre-interrogatoire du défendeur, l'avocat a mentionné des incohérences importantes entre le témoignage du défendeur devant la Cour et ses réponses lors de l'interrogatoire préalable, notamment celles touchant sa connaissance de l'avis écrit qu'il avait reçu pour assister à la cérémonie le 23 décembre 1993 et celles à l'égard de ce qu'il se rappelait quant aux événements de ce jour.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[27]            La principale question du renvoi est celle de savoir si la Cour était d'avis, selon toute la preuve dont elle disposait, que le défendeur avait obtenu sa citoyenneté canadienne par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.


[28]            Une question préliminaire a été soulevée au début de l'audition du renvoi lorsque l'avocat du défendeur, par une requête de vive voix, a tenté d'obtenir une ordonnance afin que le défendeur obtienne, pour toute la durée de l'audience, les services d'un interprète aux frais de l'État. Après avoir examiné les observations faites sur cette question par l'avocat du défendeur et par celui du ministre, j'ai rendu une ordonnance selon laquelle le défendeur avait le droit d'obtenir pour toute la durée de l'audition du renvoi les services d'un interprète parlant l'anglais et le vietnamien, mais à ses propres frais étant donné que la Cour ne disposait d'aucun élément de preuve démontrant que le défendeur était démuni. J'ai mentionné au départ dans mon ordonnance que les motifs touchant cette question seraient énoncés plus tard. Je vais traiter de cette question à la suite de mon analyse et de ma conclusion de la question principale qui est soumise à la Cour.

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

[29]            Les principales dispositions législatives à l'égard du présent renvoi sont les articles 10 et 18 et l'alinéa 22(1)b) de la Loi sur la citoyenneté, les alinéas 34(1)a) et b) de la Loi d'interprétation[2] et l'article 14 de la Charte canadienne des droits et libertés[3] (la Charte). Comme l'article 14 de la Charte, l'article 93, l'alinéa 169a) et l'article 283 des Règles de la Cour fédérale (1998)[4] sont pertinents à la question du droit à un interprète.

[30]            Les dispositions précédemment mentionnées sont énoncées à l'annexe A des présents motifs.

ANALYSE

a)         L'obtention de la citoyenneté canadienne par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels

i)          Ce que la loi exige pour fonder une déclaration sur l'alinéa 18(1)b) de la Loi sur la citoyenneté?

[31]            Dans la décision Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration c. Schneeberger[5], ma collègue Mme la juge Dawson a répondu comme suit à la question précédemment énoncée :

[20]          Dans la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Odynsky (2001), 196 F.T.R. 1 (C.F. 1re inst.), le juge MacKay a examiné le sens de l'expression « dissimulation intentionnelle de faits essentiels » qui est utilisée à l'article 10 de la Loi. Il a conclu, au paragraphe 159, que cette expression exige :

[...] que la Cour conclue sur le fondement de la preuve ou par déduction raisonnable à partir de la preuve, que la personne intéressée a dissimulé des faits essentiels à la décision, qu'elle ait su ou non que ces faits étaient essentiels, avec l'intention d'induire en erreur le décideur.


                                                                   

[21]          Le caractère essentiel doit être déterminé en fonction de l'importance des renseignements qui n'ont pas été révélés par rapport à la décision visée.

[22]         Le juge MacKay a de plus conclu en s'appuyant sur la décision de la Cour suprême du Canada dans Canada (Ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration) c. Brooks, [1974] R.C.S. 850, que la représentation inexacte d'un fait essentiel englobe une déclaration contraire à la vérité, la dissimulation d'un renseignement véridique, ou une réponse trompeuse qui a pour effet d'exclure ou d'écarter d'autres enquêtes.

[23]          Le juge McKeown a également appliqué l'arrêt Brooks, précité, dans le contexte d'une révocation de la citoyenneté dans la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Baumgartner, (2001) 211 F.T.R. 197. Le juge McKeown écrit ce qui suit aux paragraphes 138 à 140 de sa décision :

138 Dans l'arrêt M.M.I. c. Brooks, [1974] R.C.S. 850, Monsieur le juge Laskin, au nom de la Cour, a statué que les déclarations contraires à la vérité ou les réponses trompeuses qui excluent en fait la tenue d'une enquête peuvent constituer de fausses déclarations essentielles, même si aucun motif indépendant d'expulsion n'était découvert par suite de cette enquête. Dans l'affaire Brooks, précitée, le demandeur avait censément donné des réponses fausses dans la demande qu'il avait présentée en vue d'être admis au Canada. Aux pages 865 et 873, le juge Laskin a dit ce qui suit :

« [...] Une réponse peut être à la fois fausse et trompeuse mais la loi ne demande pas que ces deux éléments soient réunis. Il peut s'agir de l'un ou de l'autre et l'interdiction peut s'appliquer quand même à la réponse. Aussi, puisque l'exécution des politiques d'immigration et d'expulsion au moyen d'enquêtes spéciales n'entraîne pas de peines criminelles, je ne puis me convaincre que la tromperie intentionnelle ou volontaire devrait être considérée comme une condition préalable. [...] »

« Afin d'éliminer tout doute à ce sujet résultant des motifs de la Commission, je rejetterais toute prétention ou conclusion selon laquelle, pour qu'il y ait caractère important sous le régime du sous-al. (viii) de l'al. e) du paragr. (1) de l'art. 19, la déclaration contraire à la vérité ou le renseignement trompeur donnés dans une réponse ou des réponses doivent être de nature à avoir caché un motif indépendant d'expulsion. La déclaration contraire à la vérité ou le renseignement trompeur peuvent ne pas avoir semblable effet et, cependant, avoir été des facteurs qui ont déterminé l'admission. La preuve faite en l'espèce suivant laquelle certaines réponses inexactes n'auraient eu aucun effet sur l'admission d'une personne, est évidemment pertinente quant à la question du caractère important. Mais est aussi pertinente la question de savoir si les déclarations contraires à la vérité ou les réponses trompeuses ont eu pour effet d'exclure ou d'écarter d'autres enquêtes, même si aucun motif indépendant d'expulsion n'eût été découvert par suite de ces enquêtes. »


139 Le ministre a attiré l'attention de la Cour sur diverses décisions dans lesquelles on avait suivi le principe énoncé dans l'arrêt Brooks, précité, y compris les décisions Hilario c. M.M.I., [1978] 1 C.F. 697 (1re inst.); Khamsei c. M.E.I., [1981] 1 C.F. 222 (C.A.F.); Juayong c. M.E.I. (1988), 99 N.R 78 (C.A.F.); Okwe c. M.E.I. (1991), 136 N.R. 261 (C.A.F.); et Mohammed c. Canada (M.C.I.), [1997] A.C.F. no 605 (Q.L.). En n'admettant pas qu'il avait été garde dans un camp de concentration pendant la guerre, le défendeur a effectivement empêché les responsables de l'immigration (l'agent d'immigration et l'agent de contrôle des visas) de lui demander des renseignements au sujet de son service. Il aurait donc été impossible pour les autorités de questionner le défendeur au sujet des actes qu'il avait commis à titre de garde de camp de concentration, certains de ces actes ayant pour effet de le rendre non admissible en tant que [TRADUCTION] « criminel » ou en tant que [TRADUCTION] « criminel important » selon les critères établis par le Conseil de sécurité lors de la réunion du 15 mai 1952. Je note que le défendeur soutient qu'il n'avait aucune obligation de se montrer honnête au moment de l'entrevue qu'il a eue aux fins de l'immigration, selon la décision que la Cour a rendue dans l'affaire Secrétaire d'État c. Luitjens (1991), 46 F.T.R. 267. Je souscris à cette prétention, mais je conclus que cela n'est pas pertinent en l'espèce puisque M. Baumgartner a lui-même témoigné qu'on lui avait de fait posé des questions au sujet de sa participation militaire au cours des entrevues qui ont eu lieu au mois de mars 1953.

140 Le défendeur déclare ce qui suit, à la page 24, paragraphe 50 des arguments écrits :

« [TRADUCTION] Il ne peut pas être inféré que la simple entrée de M. Baumgartner au Canada résultait d'une fraude à moins que la Cour ne soit convaincue que M. Baumgartner se serait nécessairement vu refuser l'entrée si sa situation véritable avait été connue, ce qui de son côté exige une preuve montrant que les critères de refoulement applicables, quels qu'ils aient été, exigeaient le refoulement du défendeur. »

Toutefois, comme il en a déjà été fait mention, il n'est pas nécessaire d'établir que M. Baumgartner se serait vu refuser l'entrée à cause d'une fausse déclaration, mais uniquement qu'il n'a pas divulgué des éléments essentiels d'information de sorte qu'il était peut-être impossible pour les agents d'immigration et pour l'agent de sécurité de mener une enquête qui aurait peut-être révélé que M. Baumgartner n'était pas admissible selon la politique établie par le Conseil de sécurité au mois de mai 1952 et les [TRADUCTION] « Motifs de refoulement » connexes. Comme le démontrent les arrêts qui ont été cités, et contrairement aux arguments du défendeur, le ministre n'était pas tenu de démontrer, dans ses actes de procédure, que des fausses déclarations précises avaient permis à M. Baumgartner d'obtenir le droit d'établissement. En ne divulguant pas qu'il avait servi comme garde de camp de concentration, M. Baumgartner s'est soustrait à une enquête au sujet des actes précis qu'il avait pu commettre et de la nature de son service en cette qualité. Pareille enquête aurait peut-être permis de découvrir des renseignements qui auraient eu pour effet de rendre M. Baumgartner non admissible. Par conséquent, en omettant de divulguer le rôle qu'il avait eu à titre de garde de camp de concentration lorsque les responsables canadiens lui avaient posé des questions au sujet de son service militaire pendant les entrevues au mois de mars 1953, M. Baumgartner avait fait une fausse déclaration essentielle qui lui a permis d'obtenir le droit d'établissement au Canada et d'acquérir par la suite la citoyenneté canadienne. [Non souligné dans l'original.]

[24]         Ainsi donc, en droit, une déclaration contraire à la vérité ou une réponse trompeuse qui a pour effet d'exclure ou d'écarter d'autres enquêtes constitue une fausse déclaration au sens de la Loi.

[25]          La norme de preuve qui est applicable dans un renvoi fondé sur la Loi est la norme de preuve en matières civiles, c'est-à-dire la prépondérance des probabilités. Toutefois, la preuve doit être examinée avec le plus grand soin en raison de la gravité des allégations et des conséquences graves qu'implique la révocation de la citoyenneté. Voir : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Coomar (1998), 159 F.T.R. 37 (C.F. 1re inst.), paragraphe 10.

[26]          Il faut établir davantage qu'une transgression technique de la Loi. Une fausse déclaration faite innocemment ne doit pas entraîner la révocation de la citoyenneté. Voir : Canada (Ministre du Multiculturalisme et de la Citoyenneté) c. Minhas (1993), 66 F.T.R. 155 (C.F. 1re inst.). [Non souligné dans l'original des paragraphes [20] et [22].]


[32]            Sous réserve d'une nuance, j'adopte ce qui précède. Cette nuance touche la brève mention contenue dans le dernier paragraphe de la décision Canada (Ministre du Multiculturalisme et de la Citoyenneté c. Minhas. Dans la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Copeland[6], Mme la juge McGillis a écrit ce qui suit aux paragraphes [52] et [53] de ses motifs :

[52]         Avant d'aborder la prochaine question, je tiens à trancher l'argument avancé par l'avocat de l'intimé selon lequel l'intimé n'avait pas l'obligation, en vertu de la loi ou autrement, de divulguer les accusations criminelles portées contre lui après le dépôt de sa demande de citoyenneté. Comme je l'ai mentionné plus tôt, l'avocat de l'intimé invoquait à l'appui de cet argument la décision Canada (Ministre du Multiculturalisme et de la Citoyenneté) c. Minhas, [...], dans laquelle la Cour a déclaré ce qui suit, à la page 34 :

Les faits de la cause ne permettent pas de tirer une conclusion dans ce sens. Au moment où M. Minhas fit sa demande de citoyenneté, il n'avait rien à divulguer puisqu'il n'avait pas été inculpé de l'infraction en question . . . Le jour où il se présenta à l'entrevue avec le juge de la citoyenneté, l'intimé, bien qu'inculpé d'une infraction punie par le Code criminel, n'en avait pas encore été déclaré coupable. Tant qu'un verdict de culpabilité n'est pas prononcé, notre système de justice pénale veut que l'individu soit présumé innocent et, en conséquence, le défaut de divulguer une inculpation ne peut être considéré comme une « fausse déclaration » , une « fraude » , ou la « dissimulation intentionnelle de faits essentiels » , que vise le paragraphe 10(1).

[53]          En d'autres termes, le juge a appliqué la présomption d'innocence dans le cadre du renvoi et conclu que monsieur Minhas n'était pas tenu de divulguer les accusations criminelles qui pesaient contre lui. Je ne puis souscrire au raisonnement retenu dans [...] Minhas [...] car le droit à la présomption d'innocence, constitutionnalisé dans l'alinéa 11d) de la Charte, s'applique uniquement à un « inculpé » . Dans l'arrêt R. c. Wigglesworth [...], le juge Wilson a conclu, au nom de la majorité, à la page 558, que les droits garantis par l'article 11 de la Charte constituaient des protections en matière de procédure applicables « aux plus graves infractions que nous connaissons dans notre droit, c.-à-d. les affaires criminelles et pénales » . Comme je l'ai déjà mentionné, le renvoi prévu à l'alinéa 18(1)b) de la Loi sur la citoyenneté est de nature civile; il ne s'agit pas d'une affaire criminelle ou quasi criminelle. Compte tenu de la nature du renvoi, la personne qui en fait l'objet n'est pas inculpée, au sens attribué à ce terme dans l'arrêt R. c. Wigglesworth [...]. Par conséquent, les protections en matière de procédure enchâssées dans l'article 11 de la Charte pour protéger un inculpé, et notamment la présomption d'innocence, ne s'appliquent pas dans le cadre d'un renvoi sous le régime de l'alinéa 18(1)b) de la Loi sur la citoyenneté. En outre, l'article 22 de la Loi sur la citoyenneté interdit, notamment, que la citoyenneté soit accordée à une personne accusée d'un acte criminel prévu par une loi fédérale. Dans les circonstances, je suis d'avis que la décision [...] Minhas [...] est fondée sur un raisonnement erroné et ne doit pas s'appliquer en l'espèce.                        [Références omises.]


[33]            Je partage la préoccupation précédemment énoncée à l'égard de l'application de la décision Minhas. Je suis préoccupé par le fait que le principe tiré de cette décision par la juge Dawson selon lequel « une fausse déclaration faite innocemment ne doit pas entraîner la révocation de la citoyenneté » est trop large. Je suis convaincu qu'une fausse déclaration qu'on estime avoir été faite « innocemment » doit être examinée attentivement. L' « aveuglement délibéré » , lorsque pratiqué par un demandeur de citoyenneté canadienne dans le contexte de sa demande, ne doit pas être toléré. Le demandeur de citoyenneté tente d'obtenir un privilège important. Dans ce cas, le demandeur de citoyenneté, lorsqu'il est dans une situation de doute, devrait invariablement, au risque de se tromper, tout divulguer au juge de la citoyenneté ou au fonctionnaire de la citoyenneté.

ii)         Application des principes précédemment énoncés aux faits du présent renvoi

[34]            Selon la norme de preuve en matière civile à l'égard de la prépondérance des probabilités, je suis d'avis que l'avocat du ministre a démontré que le défendeur a acquis sa citoyenneté canadienne par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

[35]            J'accepte sans réserve le fait que le défendeur ne maîtrise pas bien l'anglais, bien qu'il ait été capable de convaincre une fonctionnaire de la citoyenneté et une juge de la citoyenneté que sa maîtrise de l'anglais était suffisante pour satisfaire au critère d' « une connaissance adéquate » de l'anglais lui permettant d'obtenir la citoyenneté canadienne. La juge de la citoyenneté et la fonctionnaire de la citoyenneté qui ont témoigné devant la Cour ont mentionné qu'elles tenaient leurs entrevues avec des demandeurs comme le défendeur dans un langage [TRADUCTION] « neutre » et [TRADUCTION] « simple » . Elles évitaient l'utilisation de termes comme « actes criminels » et elles ne montraient elles-mêmes qu'une connaissance générale du sens de cette expression. Elles parlaient plutôt de [TRADUCTION] « problèmes avec la justice » et de [TRADUCTION] « problèmes avec la police » . Il s'agit là de termes que le défendeur aurait dû comprendre lorsqu'il a répondu lors de son entrevue avec la juge de la citoyenneté au début de décembre 1993 qu'il n'avait pas de tels problèmes et qu'il a omis de divulguer l'incident d'octobre 1993 avec les policiers, et lorsqu'il a omis de divulguer, au moment où il s'est présenté pour prêter le serment de citoyenneté le 23 décembre 1993, le fait qu'il avait comparu à la cour le 21 décembre 1993.

[36]            Selon la preuve dont je dispose, je suis convaincu que le défendeur a innocemment participé à du trafic de stupéfiants lorsqu'il a aidé son « ami » en octobre 1993. Je suis convaincu que c'était ce qu'il croyait. Ceci dit, il ne lui appartenait pas de conclure qu'il avait « innocemment » participé à du trafic de stupéfiants ou que sa participation était [TRADUCTION] « mineure » et que les accusations portées contre lui, peu importe lesquelles, et il avait apparemment choisi de ne pas savoir en quoi elles consistaient, étaient [TRADUCTION] « mineures » ou qu'elles ne seraient [TRADUCTION] « pas retenues » ou qu'il serait innocenté des accusations. Plutôt, il lui appartenait de se familiariser avec le type de problèmes auxquels il était exposé et de les divulguer aux fonctionnaires ou aux juges de la citoyenneté de façon à leur permettre d'établir si ces problèmes les empêchaient légalement, du moins pour le moment, de lui attribuer la citoyenneté.


[37]            Bien qu'il ait pu être justifié, du point de vue du défendeur, de ne pas divulguer des renseignements afin d'obtenir sa citoyenneté et un passeport lui permettant de rendre visite à sa mère mourante, il n'était pas justifié de ne pas divulguer des renseignements dans le contexte d'une procédure très importante au cours de laquelle une mise en garde était faite à chaque occasion. Si le défendeur avait tout divulgué et s'il avait expliqué l'urgence à laquelle il était exposé, cela aurait constitué la sorte de communication complète qui aurait permis à un juge de la citoyenneté ou à un fonctionnaire de la citoyenneté de remplir ses obligations. Il était totalement injustifié pour le défendeur de décider par lui-même qu'il n'avait pas à divulguer les problèmes qu'il vivait, peu importe la façon selon laquelle il les qualifiait personnellement, dans des circonstances dans lesquelles il savait ou il aurait certainement dû savoir qu'il pouvait y avoir un obstacle à l'obtention de sa citoyenneté. Je suis convaincu que cela équivalait à une fausse déclaration de sa part et à une dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

[38]            Par conséquent, je déclare que je suis convaincu que le défendeur a obtenu sa citoyenneté canadienne par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

b)         Les services d'un interprète aux frais de l'État

[39]            La question des services d'un interprète aux frais de l'État a d'abord été soulevée au nom du défendeur au cours de la conférence de gestion de l'instruction tenue devant M. le protonotaire Hargrave deux (2) semaines avant l'audition du renvoi. Le protonotaire Hargrave, par une ordonnance, a rejeté la demande présentée par le défendeur afin d'obtenir les services d'un interprète aux frais de l'État et il a énoncé de courts motifs. Dans ses motifs qui constituent une directive jointe à son ordonnance, le protonotaire a écrit ce qui suit :

[TRADUCTION]

En établissant, à cette étape, que M. Phan n'a pas automatiquement droit à un interprète ou droit à un interprète selon la prépondérance des probabilités, je n'écarte pas la possibilité qu'il bénéficie des services d'un interprète, soit par un appel de la présente ordonnance, soit en raison de nouvelles circonstances résultant d'une décision, qui serait rendue par le juge de l'instance au début de l'audience, selon laquelle M. Phan devrait bénéficier des services d'un interprète payé par la Cour.                                                                                                        [Non souligné dans l'original.]

[40]            L'ordonnance du protonotaire Hargrave n'a pas fait l'objet d'un appel. Il n'y a pas eu de dépôt d'une requête officielle devant être traitée au début du renvoi ni de dépôt d'éléments de preuve démontrant qu'il y avait de « nouvelles circonstances » comme l'a mentionné le protonotaire Hargrave. Notamment, aucun élément de preuve démontrant que le défendeur était démuni n'a été fourni.

[41]            L'article 14 de la Charte canadienne des droits et libertés est reproduit dans l'annexe aux présents motifs. Étant donné que cet article est court, je le reprends ci-après pour en faciliter la lecture :


14. La partie ou le témoin qui ne peuvent suivre les procédures, soit parce qu'ils ne comprennent pas ou ne parlent pas la langue employée, soit parce qu'ils sont atteints de surdité, ont droit à l'assistance d'un interprète.

14. A party or witness in any proceedings who does not understand or speak the language in which the proceedings are conducted or who is deaf has the right to the assistance of an interpreter.



[42]            Il est intéressant de remarquer que l'article 14 se retrouve dans la portion de la Charte qui est intitulée « Garanties juridiques » . Bien que les droits consacrés sous l'intitulé « Garanties juridiques » dans la Charte visent, j'en suis convaincu, principalement les affaires criminelles, et il ne s'agit pas en l'espèce d'une affaire criminelle, je ne souhaite d'aucune façon dénigrer l'importance de la présente instance pour le défendeur et par conséquent je ne m'appuie pas sur le fait qu'il ne s'agit pas d'une affaire criminelle pour rendre une décision défavorable à l'égard du droit aux services d'un interprète aux frais de l'État.

[43]            Cela dit, il est bien établi que le droit prévu à l'article 14 de la Charte n'est pas un droit absolu. Dans l'arrêt Roy c. Hackett[7], M. le juge Lacourcière, au nom de la cour, a souligné ce point à la page 426. En même temps, il a fait remarquer ce qui suit à la page 425 :

Il ne fait aucun doute que le droit à un procès équitable n'est pas limité aux instances pénales, mais qu'il s'applique aussi aux instances où la procédure est quasi judiciaire, comme en l'espèce [...].                                                                [Référence omise.]

Je suis convaincu que le présent renvoi est une instance « quasi judiciaire » au sens où le juge Lacourcière a employé ce terme.

[44]            Dans la décision Wyllie c. Wyllie[8], M. le juge Skipp, après avoir renvoyé à l'alinéa 2g) de la Déclaration canadienne des droits et à l'article 14 de la Charte, a conclu ce qui suit :

[TRADUCTION]

Je suis d'avis que suivant l'article 14 de la Charte, les parties à un litige dans une instance en matière civile « ont droit à l'assistance d'un interprète » . Je suis en outre d'avis que la principale obligation d'une partie à un litige qui requiert les services d'un interprète est celle de payer les honoraires de cet interprète et, par conséquent, je refuse d'accorder l'ordonnance que le demandeur tentait d'obtenir.

La question qui reste sans réponse est celle de savoir s'il existe une obligation de la cour ou de la Couronne de payer les honoraires d'un interprète dans une instance en matière civile lorsque la cour est convaincue que la partie au litige ne peut pas payer les frais applicables. Le libellé de l'article 14 est tranchant et non équivoque et il est fort possible que la cour rende une ordonnance à cet égard en se fondant sur le fait que la partie au litige est démunie.

[45]            Je fais mienne la conclusion du juge Skipp. Je ne disposais d'aucun élément de preuve démontrant que le défendeur était démuni. Dans les circonstances, la question restée sans réponse à la suite de la décision Wyllie c. Wyllie, reste toujours sans réponse.


[46]            Je suis conforté dans ma conclusion à cet égard par les dispositions suivantes des Règles de la Cour fédérale (1998)(les Règles). L'alinéa 169a) prévoit que la partie des Règles traitant des actions s'applique aux renvois de la nature de celui visé à l'article 18 de la Loi sur la citoyenneté. L'article 283 qui se trouve dans la partie des Règles touchant les actions incorpore par référence l'article 93, avec les adaptations nécessaires, à l'utilisation d'interprètes lors de l'instruction et, bien que j'aie mentionné que la présente instance soit un renvoi, je reconnais qu'elle est de la nature d'une instruction. Le paragraphe 93(1) prévoit que si la personne soumise à un interrogatoire oral ne comprend ni le français ni l'anglais ou si elle est sourde ou muette, la partie qui interroge s'assure de la présence et paie les honoraires et débours d'un interprète indépendant et compétent chargé d'interpréter fidèlement les parties de l'interrogatoire oral. Ainsi, par l'application de l'article 283, le paragraphe 93(1) s'étend à un interrogatoire oral lors de l'instruction.

[47]            Le défendeur a été interrogé au cours du présent renvoi à la demande de son propre avocat et il a été contre-interrogé par l'avocat du ministre. Par conséquent, aux fins de cet interrogatoire, les Règles de la Cour montrent clairement que les services d'un interprète devaient être aux frais du défendeur.

[48]            Le défendeur a utilisé les services d'un interprète non seulement durant son propre interrogatoire et son contre-interrogatoire, mais aussi durant la déclaration préliminaire faite au nom du ministre et durant l'interrogatoire et le contre-interrogatoire des témoins du ministre. Il n'a pas utilisé les services d'un interprète durant les plaidoiries des avocats. Le paragraphe 93(1) est muet sur la question de savoir qui devrait payer les honoraires d'un interprète durant l'interrogatoire et le contre-interrogatoire des témoins de la partie adverse, mais je suis d'avis que, par analogie, on peut déduire du paragraphe 93(1) qu'une telle utilisation d'un interprète devrait également être aux frais du défendeur.

[49]            Comme je l'ai mentionné plus tôt, je ne disposais d'aucun élément de preuve à l'égard du fait que le défendeur était démuni.

[50]            Compte tenu de tout ce qui précède, j'ai conclu que, bien que le défendeur ait droit aux services d'un interprète durant toute l'audition du renvoi, ces services devraient être à ses frais et c'est ce que j'ordonne.

CONCLUSION

[51]            En résumé, il sera déclaré conformément au paragraphe 10(1) et à l'alinéa 18(1)b) de la Loi sur la citoyenneté que la Cour a statué que le défendeur a obtenu la citoyenneté canadienne par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

DÉPENS


[52]            Comme précédemment mentionné dans les présents motifs, le ministre sollicite les dépens contre le défendeur. Étant donné que le présent renvoi est de la nature d'une action, les dépens devraient normalement suivre l'issue en l'espèce et être adjugés au ministre. Cela dit, suivant le paragraphe 400(1) des Règles, la Cour conserve entière discrétion pour déterminer le montant des dépens, les répartir et désigner les personnes qui doivent les payer. Durant tout le renvoi, j'ai observé attentivement le comportement du défendeur. J'ai en outre remarqué les circonstances entourant son arrivée au Canada, le fait que, avec un dérapage important, il s'est intégré avec succès dans la collectivité vietnamienne au Canada et, notamment, je reconnais que depuis l'incident malheureux avec les policiers en 1993, il n'a pas eu d'autres problèmes de nature criminelle. Dans les circonstances, j'exerce mon pouvoir discrétionnaire de n'adjuger aucuns dépens.

                                                                       _ Frederick E. Gibson _            

                                                                                                     Juge                          

Ottawa (Ontario)

Le 15 octobre 2003


                                         ANNEXE « A »


              Loi sur la citoyenneté

                   Citizenship Act

10. (1) Sous réserve du seul article 18, le gouverneur en conseil peut, lorsqu'il est convaincu, sur rapport du ministre, que l'acquisition, la conservation ou la répudiation de la citoyenneté, ou la réintégration dans celle-ci, est intervenue sous le régime de la présente loi par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels, prendre un décret aux termes duquel l'intéressé, à compter de la date qui y est fixée :

a) soit perd sa citoyenneté;

b) soit est réputé ne pas avoir répudié sa citoyenneté.

10. (1) Subject to section 18 but notwithstanding any other section of this Act, where the Governor in Council, on a report from the Minister, is satisfied that any person has obtained, retained, renounced or resumed citizenship under this Act by false representation or fraud or by knowingly concealing material circumstances,

(a) the person ceases to be a citizen, or

(b) the renunciation of citizenship by the person shall be deemed to have had no effect,

as of such date as may be fixed by order of the Governor in Council with respect thereto.

(2) Est réputée avoir acquis la citoyenneté par fraude, fausse déclaration ou dissimulation intentionnelle de faits essentiels la personne qui l'a acquise à raison d'une admission légale au Canada à titre de résident permanent obtenue par l'un de ces trois moyens.

[...]

(2) A person shall be deemed to have obtained citizenship by false representation or fraud or by knowingly concealing material circumstances if the person was lawfully admitted to Canada for permanent residence by false representation or fraud or by knowingly concealing material circumstances and, because of that admission, the person subsequently obtained citizenship.

...

18. (1) Le ministre ne peut procéder à l'établissement du rapport mentionné à l'article 10 sans avoir auparavant avisé l'intéressé de son intention en ce sens et sans que l'une ou l'autre des conditions suivantes ne se soit réalisée :

18. (1) The Minister shall not make a report under section 10 unless the Minister has given notice of his intention to do so to the person in respect of whom the report is to be made and

a) l'intéressé n'a pas, dans les trente jours suivant la date d'expédition de l'avis, demandé le renvoi de l'affaire devant la Cour;

(a) that person does not, within thirty days after the day on which the notice is sent, request that the Minister refer the case to the Court; or

b) la Cour, saisie de l'affaire, a décidé qu'il y avait eu fraude, fausse déclaration ou dissimulation intentionnelle de faits essentiels.

(b) that person does so request and the Court decides that the person has obtained, retained, renounced or resumed citizenship by false representation or fraud or by knowingly concealing material circumstances.


(2) L'avis prévu au paragraphe (1) doit spécifier la faculté qu'a l'intéressé, dans les trente jours suivant sa date d'expédition, de demander au ministre le renvoi de l'affaire devant la Cour. La communication de l'avis peut se faire par courrier recommandé envoyé à la dernière adresse connue de l'intéressé.

(2) The notice referred to in subsection (1) shall state that the person in respect of whom the report is to be made may, within thirty days after the day on which the notice is sent to him, request that the Minister refer the case to the Court, and such notice is sufficient if it is sent by registered mail to the person at his latest known address.(3) La décision de la Cour visée au paragraphe (1) est définitive et, par dérogation à toute autre loi fédérale, non susceptible d'appel.

(3) A decision of the Court made under subsection (1) is final and, notwithstanding any other Act of Parliament, no appeal lies therefrom.


22. (1) Malgré les autres dispositions de la présente loi, nul ne peut recevoir la citoyenneté au titre de l'article 5 ou du paragraphe 11(1) ni prêter le serment de citoyenneté :

[...]

22. (1) Notwithstanding anything in this Act, a person shall not be granted citizenship under section 5 or subsection 11(1) or take the oath of citizenship

...

b) tant qu'il est inculpé pour une infraction prévue aux paragraphes 29(2) ou (3) ou pour un acte criminel prévu par une loi fédérale, autre qu'une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions, et ce, jusqu'à la date d'épuisement des voies de recours;

(b) while the person is charged with, on trial for or subject to or a party to an appeal relating to an offence under subsection 29(2) or (3) or an indictable offence under any Act of Parliament, other than an offence that is designated as a contravention under the Contraventions Act;

                                Loi d'interprétation

                                  Intrepretation Act

34. (1) Les règles suivantes s'appliquent à l'interprétation d'un texte créant une infraction :

a) l'infraction est réputée un acte criminel si le texte prévoit que le contrevenant peut être poursuivi par mise en accusation;

b) en l'absence d'indication sur la nature de l'infraction, celle-ci est réputée punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire;

[...]

34. (1) Where an enactment creates an offence,

(a) the offence is deemed to be an indictable offence if the enactment provides that the offender may be prosecuted for the offence by indictment;

(b) the offence is deemed to be one for which the offender is punishable on summary conviction if there is nothing in the context to indicate that the offence is an indictable offence; and

...

                Charte canadienne des droits et libertés

             Canadian Charter of Rights and Freedoms

14. La partie ou le témoin qui ne peuvent suivre les procédures, soit parce qu'ils ne comprennent pas ou ne parlent pas la langue employée, soit parce qu'ils sont atteints de surdité, ont droit à l'assistance d'un interprète.

14. A party or witness in any proceedings who does not understand or speak the language in which the proceedings are conducted or who is deaf has the right to the assistance of an interpreter.

Règles de la Cour fédérale (1998)

                          Federal Court Rules, 1998


93. (1) Si la personne soumise à un interrogatoire oral ne comprend ni le français ni l'anglais ou si elle est sourde ou muette, la partie qui interroge s'assure de la présence et paie les honoraires et débours d'un interprète indépendant et compétent chargé d'interpréter fidèlement les parties de l'interrogatoire oral qui sont enregistrées selon le paragraphe 89(4).

93. (1) Where a person to be examined on an oral examination understands neither French nor English or is deaf or mute, the examining party shall arrange for the attendance and pay the fees and disbursements of an independent and competent person to accurately interpret everything said during the examination, other than statements that the attending parties agree to exclude from the record.(2) Lorsqu'une partie désire procéder à l'interrogatoire oral d'une personne dans une langue officielle et que cette dernière désire subir l'interrogatoire dans l'autre langue officielle, la partie peut demander à l'administrateur, au moins six jours avant l'interrogatoire, d'assurer la présence d'un interprète indépendant et compétent. Dans ce cas, l'administrateur paie les honoraires et les débours de l'interprète.

(2) Where an interpreter is required because the examining party wishes to conduct an oral examination for discovery in one official language and the person to be examined wishes to be examined in the other official language, on the request of the examining party made at least six days before the examination, the Administrator shall arrange for the attendance and pay the fees and disbursements of an independent and competent interpreter.

(3) Avant de fournir des services d'interprétation, l'interprète prête le serment, selon la formule 93, de bien exercer ses fonctions.

[...]

(3) Before aiding in the examination of a witness, an interpreter shall take an oath, in Form 93, as to the performance of his or her duties.

...

169. La présente partie s'applique aux instances, autres que les demandes et les appels, et notamment :

a) aux renvois visés à l'article 18 de la Loi sur la citoyenneté;

[...]

169. This Part applies to all proceedings that are not applications or appeals, including

(a) references under section 18 of the Citizenship Act;

...

283. La règle 93 s'applique, avec les adaptations nécessaires, à l'utilisation d'interprètes lors de l'instruction.

283. Rule 93 applies, with such modifications as are necessary, to the use of an interpreter at trial.



                         COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                    SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                T-2089-01

INTITULÉ :               LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L'IMMIGRATION c. VAN KY PHAN

                                                     

LIEU DE L'AUDIENCE :                              VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 23 SEPTEMBRE 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE GIBSON

DATE DES MOTIFS :                                   LE 15 OCTOBRE 2003

COMPARUTIONS :

Esta Resnick                                                      POUR LE DEMANDEUR

Peter Bell                                                                                 

Vance Goulding                                                 POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris Rosenberg                                              POUR LE DEMANDEUR

Sous-procureur général du Canada

Esta Resnick, avocate

Ministère de la Justice

840, rue Howe, bureau 900

Vancouver (Colombie-Britannique)

Vance Goulding, avocat                                                 POUR LE DÉFENDEUR

73 Water Street, bureau 700

Vancouver (Colombie-Britannique)



[1]         L.R.C. 1985, ch. C-29.

[2]         L.R.C. 1985, ch. C-21.

[3]         Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982 (L.R.C. 1985, appendice II, no 44), qui constitue l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, ch. 11.

[4]         DORS/98-106.

[5]         [2003] A.C.F. no 1252.

[6]         (1997), 43 Imm. L.R. (2d) 297 (C.F. 1re inst.).

[7]         (1987), 45 D.L.R. (4th) 415 (C.A. Ont.).

[8]         (1987), 37 D.L.R. (4th) 376 (C.S.C.B.).


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