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Date : 20031125

Dossier : IMM-2817-02

Référence : 2003 CF 1382

Ottawa (Ontario), le 25 novembre 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEFE

ENTRE :                                                                                     

                                                                GABOR SZORENYI

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O'KEEFE

[1]                 Il s'agit d'une demande présentée en vertu du paragraphe 82.1(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2, et de l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. 1985, ch. F-7, visant à obtenir le contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a décidé, le 15 mai 2002, que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention.


[2]                 Le demandeur sollicite un bref de certiorari annulant la décision de la Commission ainsi qu'un bref de mandamus obligeant un tribunal différemment constitué à examiner sa revendication du statut de réfugié.

Contexte

Introduction

[3]                 Le demandeur est citoyen hongrois. Il est arrivé au Canada le 27 octobre 2000 et il a revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention. Il invoque dans sa revendication l'appartenance à un groupe social, savoir celui des homosexuels.

[4]                 Le demandeur affirme avoir été battu après avoir parlé à un jeune homme dans une discothèque en juin 1998. Il dit ne pas avoir été sérieusement blessé et ne pas avoir signalé l'incident à la police car il ne pensait pas qu'elle s'en occuperait.

[5]                 En avril 1999, le demandeur a été congédié lorsque son patron a appris qu'il était homosexuel. Il dit qu'après avoir découvert ce fait, des habitants de sa ville natale lui ont causé beaucoup de problèmes ainsi qu'à ses parents et, après un certain temps, ils sont devenus plus agressifs. Il prétend avoir eu très peur et avoir essayé de ne sortir que lorsque cela était absolument nécessaire.


[6]                 Le demandeur soutient qu'il revenait de l'épicerie, en janvier 2000, quand il a été agressé et battu. Il a déclaré avoir été emmené à l'urgence et être allé le lendemain au poste de police avec ses parents. Il a indiqué que la police ne semblait pas vouloir faire quoi que ce soit vu l'absence de témoins. Ni le demandeur ni ses parents n'ont déposé de plainte.

[7]                 Le demandeur prétend être resté dans son appartement pendant plusieurs semaines, mais être sorti en février 2000 et avoir été encore une fois agressé puis jeté dans une rivière. Il n'a pas signalé cette agression car il ne pensait pas que cela servirait à quelque chose.

Motifs de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié

[8]                 Une audience a été tenue le 26 mars 2002. Dans des motifs datés du 15 mai 2002, la Commission a statué que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention.

[9]                 La Commission a considéré que le demandeur n'avait pas établi, selon la prépondérance des probabilités, qu'il craignait avec raison d'être persécuté. Même si elle a admis que le demandeur est homosexuel et que les homosexuels sont victimes de discrimination en Hongrie, la Commission n'était pas convaincue que les homosexuels sont persécutés en Hongrie ou qu'ils sont incapables d'obtenir la protection de l'État.


[10]            De l'avis de la Commission, les minorités sexuelles de Hongrie ont réussi lentement mais sûrement depuis 1961 à faire progresser leurs droits en ayant recours aux tribunaux et aux lois. Même si de nombreux aspects de la loi demeurent discriminatoires, la Commission a conclu que les nombreuses minorités qui luttent pour obtenir l'égalité devant la loi sont aux prises avec des difficultés similaires.

[11]            En dehors du cadre législatif, la Commission a souligné qu'il existe en Hongrie plusieurs organisations offrant divers services aux minorités sexuelles. La Commission estime que leur existence témoigne de l'émergence d'un mouvement non gouvernemental destiné à venir en aide de diverses façons aux homosexuels et aux lesbiennes.

[12]            Même si la preuve documentaire faisait état de quelques cas d'agressions physiques contre des homosexuels, la Commission a conclu que « les documents ne révèlent aucune négation récurrente et persistante des droits fondamentaux de la personne » . Elle a également estimé que la preuve indiquait que des attitudes homophobes sont observées chez certains membres de la classe politique et de la magistrature ainsi que dans la police, le corps médical et la société. Toutefois, à son avis, ces attitudes n'ont pas entraîné la persécution des homosexuels en Hongrie.


[13]            De l'avis de la Commission, le demandeur n'avait pas fourni une preuve « claire et convaincante » pour réfuter la présomption de protection de l'État. Étant donné que l'État exerce un contrôle réel sur son territoire et qu'il n'y a pas effondrement complet de l'appareil étatique, la Commission a estimé que l'État fait des efforts véritables pour assurer une protection. Elle a souligné que l'incapacité de maintenir l'ordre d'une façon efficace à l'échelle locale n'équivaut pas à l'absence d'une protection de la part de l'État. Elle a ajouté que le seul moyen utilisé par le demandeur pour obtenir une protection a consisté à signaler un incident à la police, qu'il n'a pas porté plainte à une autorité supérieure et qu'il n'a pas fait appel aux nombreuses organisations qui offrent des conseils juridiques. La Commission a estimé que, dans les circonstances de l'affaire dont elle a été saisie, il aurait été raisonnable pour le demandeur de continuer de chercher de l'aide. Elle a jugé que le demandeur n'avait fait aucun effort pour obtenir une copie de son dossier médical afin de le présenter à la police, ce qui aurait étayé ses prétentions lorsqu'il affirmait avoir été agressé. Le demandeur a déclaré qu'il ignorait l'existence des organisations dont il a été question plus haut. La Commission a jugé que son explication n'était pas satisfaisante.

[14]            Par conséquent, la Commission a jugé que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention. Il s'agit en l'espèce du contrôle judiciaire de cette décision de la Commission.

Observations du demandeur

[15]            Le demandeur prétend que la norme de contrôle de la décision de la Commission en l'espèce est celle de la décision raisonnable simpliciter.

[16]            Le demandeur soutient que les conclusions de la Commission en ce qui a trait à la possibilité d'obtenir la protection de l'État étaient déraisonnables. Il prétend qu'il a estimé subjectivement qu'il ne pouvait obtenir la protection de l'État et, objectivement, que les minorités de Hongrie, y compris les minorités sexuelles, n'arrivent souvent pas à obtenir la protection de l'État. Il est allégué que le seul moyen d'obtenir réparation que connaissait le demandeur était de porter plainte à la police, et que ses actes lorsqu'il a demandé la protection de l'État concordaient avec ce qu'il savait et étaient raisonnables. Il est en outre allégué qu'il était déraisonnable pour la Commission de s'attendre à ce que le demandeur sollicite la protection de l'État lorsque la preuve documentaire indique qu'il se peut qu'il ne puisse l'obtenir et que, selon ce qu'il savait, il ne pourrait pas l'obtenir. Le demandeur soutient que la conclusion de la Commission lui impose un fardeau déraisonnable qui excède les exigences générales de la définition de « réfugié » .

[17]            Le demandeur prétend que la conclusion de la Commission en ce qui a trait à la situation générale des homosexuels de Hongrie était déraisonnable. Il invoque la jurisprudence qui établit que le fait d'être empêché de gagner sa vie à cause de son appartenance à un groupe social constitue une atteinte à un droit fondamental de la personne. Invoquant la preuve documentaire indiquant que des homosexuels sont souvent congédiés en raison de leur orientation sexuelle, le demandeur prétend que la conclusion de la Commission selon laquelle il n'y a à l'égard des homosexuels en Hongrie aucune négation récurrente et persistante des droits fondamentaux de la personne était déraisonnable et, par conséquent, constitue une erreur susceptible de contrôle.


Observations du défendeur

[18]            Le défendeur nie que le demandeur a quitté la Hongrie pour échapper à la persécution.

[19]            Le défendeur prétend que le demandeur n'a pas produit une preuve claire et convaincante que l'État était incapable de le protéger. C'est pourquoi la conclusion de la Commission en ce qui a trait à la protection de l'État est raisonnable et que son appréciation et son évaluation de la preuve portant sur cette question ne dénotent aucune erreur susceptible de contrôle.

[20]            Le défendeur prétend que la Commission a effectué une analyse approfondie de la preuve produite pour décider si les incidents décrits par le demandeur étaient plus que du harcèlement et constituaient de la persécution. Le défendeur affirme que la conclusion de la Commission en ce qui a trait à la persécution était raisonnable.

Questions en litige

[21]            Les questions en litige sont les suivantes :

1.          La Commission a-t-elle commis une erreur dans sa conclusion concernant la possibilité d'obtenir la protection de l'État?

2.          La Commission a-t-elle commis une erreur dans sa conclusion relative à la situation générale des homosexuels en Hongrie?


Disposition législative pertinente

[22]            Le paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2, et ses modifications, prévoit ce qui suit :

« réfugié au sens de la Convention » Toute personne :

a) qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques:

(i) soit se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(ii) soit, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ou, en raison de cette crainte, ne veut y retourner;

b) qui n'a pas perdu son statut de réfugié au sens de la Convention en application du paragraphe (2).

Sont exclues de la présente définition les personnes soustraites à l'application de la Convention par les sections E ou F de l'article premier de celle-ci dont le texte est reproduit à l'annexe de la présente loi.

"Convention refugee" means any person who

(a) by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

(i) is outside the country of the person's nationality and is unable or, by reason of that fear, is unwilling to avail himself of the protection of that country, or

(ii) not having a country of nationality, is outside the country of the person's former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, is unwilling to return to that country, and

(b) has not ceased to be a Convention refugee by virtue of subsection (2),

but does not include any person to whom the Convention does not apply pursuant to section E or F of Article 1 thereof, which sections are set out in the schedule to this Act;


Analyse et décision

[23]            Les questions soulevées par le demandeur exigent que la Cour examine la décision de la Commission en appliquant la norme de la décision raisonnable simpliciter (voir Yousaf c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CFPI 475). Le rôle de la Cour ne consiste donc pas à réévaluer les facteurs en cause ni à substituer son opinion à celle de la Commission, mais plutôt à examiner si la décision est « manifestement erronée » ou déraisonnable compte tenu des circonstances (voir Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748, quant au sens de décision raisonnable simpliciter).

[24]            Question 1

La Commission a-t-elle commis une erreur dans sa conclusion concernant la possibilité d'obtenir la protection de l'État?

Le demandeur affirme avoir été battu en juin 1998, mais ne pas avoir signalé l'incident à la police parce qu'il ne pensait pas qu'elle s'en occuperait. En janvier 2000, il a été agressé et battu et il a dû recevoir des soins médicaux. Le lendemain, il s'est présenté au poste de police avec ses parents pour signaler l'incident et il a dit que la police ne semblait pas intéressée à faire quoi que ce soit en raison de l'absence de témoins. Ensuite, en février 2000, il a été agressé puis jeté dans la rivière. Il n'a pas signalé l'incident à la police parce qu'il croyait que cela ne servirait à rien.

[25]            Pour établir l'absence d'une protection de la part de l'État, le demandeur doit satisfaire à un fardeau de preuve. Dans Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) c. Villafranca, [1992] A.C.F. no 1189 (C.A.) (QL), autorisation de pourvoi devant la C.S.C. refusée, [1993] 2 R.C.S. xi, la Cour d'appel fédérale a écrit :

Il n'est pas facile de se décharger de l'obligation de prouver que l'on ne peut pas se réclamer de la protection de son propre pays. Le test applicable est objectif, le demandeur étant tenu de démontrer qu'il lui est physiquement impossible de rechercher l'aide de son gouvernement [...] ou que le gouvernement lui-même ne peut d'une façon quelconque la lui accorder.

Aucun gouvernement qui professe des valeurs démocratiques ou affirme son respect des droits de la personne ne peut garantir la protection de chacun de ses citoyens en tout temps. Ainsi donc, il ne suffit pas que le demandeur démontre que son gouvernement n'a pas toujours réussi à protéger des personnes dans sa situation [...]

[26]            Dans l'arrêt Ward c. Canada (Procureur général), [1993] 2 R.C.S. 689, la Cour suprême du Canada a écrit aux pages 724 à 726 :

Il s'agit donc de savoir comment, en pratique, un demandeur arrive à prouver l'incapacité de l'État de protéger ses ressortissants et le caractère raisonnable de son refus de solliciter réellement cette protection. D'après les faits de l'espèce, il n'était pas nécessaire de prouver ce point car les représentants des autorités de l'État ont reconnu leur incapacité de protéger Ward. Toutefois, en l'absence de pareil aveu, il faut confirmer d'une façon claire et convaincante l'incapacité de l'État d'assurer la protection. Par exemple, un demandeur pourrait présenter le témoignage de personnes qui sont dans une situation semblable à la sienne et que les dispositions prises par l'État pour les protéger n'ont pas aidées, ou son propre témoignage au sujet d'incidents personnels antérieurs au cours desquels la protection de l'État ne s'est pas concrétisée. En l'absence d'une preuve quelconque, la revendication devrait échouer, car il y a lieu de présumer que les nations sont capables de protéger leurs citoyens. La sécurité des ressortissants constitue, après tout, l'essence de la souveraineté. En l'absence d'un effondrement complet de l'appareil étatique, comme celui qui a été reconnu au Liban dans l'arrêt Zalzali, il y a lieu de présumer que l'État est capable de protéger le demandeur.

[...]


... Une crainte subjective de persécution conjuguée à l'incapacité de l'État de protéger le demandeur engendre la présomption que la crainte est justifiée. Le danger que cette présomption ait une application trop générale est atténué par l'exigence d'une preuve claire et convaincante de l'incapacité d'un État d'assurer la protection [...]

[27]            Le demandeur doit fournir une preuve claire et convaincante de l'incapacité de l'État d'assurer la protection. Comme on l'a vu précédemment, le demandeur n'a pas signalé à la police deux des trois incidents au cours desquels il a été agressé.

[28]            Pour l'essentiel, le demandeur a fondé sur deux éléments l'incapacité de l'État d'assurer une protection :

1.          Des personnes qui sont dans une situation semblable à la sienne et que l'État n'a pas protégées.

2.          Son propre témoignage au sujet d'incidents personnels antérieurs au cours desquels la protection de l'État ne s'est pas concrétisée.

[29]            Le demandeur dit aux paragraphes 3 et 4 de son affidavit :

[Traduction] Je me rappelle qu'on m'a demandé à l'audience si j'avais cherché à obtenir l'aide de la police. J'ai répondu au tribunal que je m'étais adressé à elle après avoir été sévèrement battu, mais qu'elle était restée indifférente à ma plainte. J'ai aussi déclaré au tribunal que j'avais entendu d'autres hommes dans ma situation affirmer que la police ne les aiderait jamais. J'avais aussi pu constater qu'il avait été très difficile pour d'autres personnes d'obtenir la protection de la police, même si elles ne sont pas homosexuelles.

C'est pourquoi, lorsque j'ai essayé d'obtenir l'aide de la police et que je n'ai reçu aucune réponse, tout ce que m'avaient dit d'autres personnes a été confirmé et je n'ai vu aucune raison d'essayer encore. Toutes ces personnes ayanrt essayé sans succès d'obtenir de l'aide, pourquoi moi devrais-je réussir. J'ignorais comment dans ma situation obtenir l'aide des autorités, si ce n'est en m'adressant à la police. Cette démarche ayant échoué, je ne savais plus quoi faire.


Bien qu'il soit possible pour un revendicateur du statut de réfugié de présenter le témoignage de personnes qui sont dans une situation semblable à la sienne pour établir l'absence de protection de l'État (voir Ward, précité), il n'était pas « manifestement erroné » pour la Commission de conclure que le demandeur n'avait pas établi l'absence d'une telle protection à l'aide de la preuve produite. Les déclarations faites par le demandeur dans son FRP et son affidavit au sujet « d'autres hommes dans [sa] situation » ne constituent pas une preuve claire et convaincante de l'incapacité de l'État de protéger les homosexuels.

[30]            Le demandeur affirme que son témoignage fait état d'incidents personnels antérieurs au cours desquels la protection de la police ne s'est pas concrétisée. Comme nous l'avons indiqué précédemment, le demandeur a déclaré n'avoir signalé qu'un seul des incidents à la police, un incident qui s'était produit sans témoins. Il prétend que la police ne semblait pas intéressée à faire quoi que ce soit en raison de l'absence de témoins. Il semble que le demandeur n'ait rien fait d'autre que de déposer la plainte initiale. Il n'a pas cherché à obtenir l'aide d'autres organisations. Il a déclaré ne pas être au courant de l'existence d'autres organisations, mais la Commission n'a pas retenu cette explication.

[31]            Le demandeur soutient qu'il était déraisonnable de la part de la Commission de s'attendre à ce qu'il cherche à obtenir l'aide d'organisations dont il ignorait l'existence à l'époque. Je ne suis pas d'accord avec cet argument.

[32]            Dans de nombreuses décisions, la Cour a jugé raisonnable pour la Commission d'exiger qu'en plus de s'adresser à la police, les revendicateurs utilisent tous les moyens qui existent pour obtenir protection et réparation (voir Pal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2003 CFPI 698). Contrairement à ce que prétend le demandeur, il n'est pas déraisonnable d'exiger que le revendicateur prenne toutes les mesures raisonnables pour s'assurer une protection. Compte tenu des faits de la présente espèce, je suis convaincu que la conclusion de la Commission selon laquelle « le revendicateur aurait très bien pu continuer à rechercher de l'aide » ne justifie pas mon intervention.

[33]            Par conséquent, je suis d'avis que la Commission n'a pas commis une erreur susceptible de contrôle à cet égard. Elle pouvait rendre la décision qu'elle a rendue en s'appuyant sur la preuve dont elle avait été saisie et, par conséquent, sa décision était raisonnable.

[34]            Question 2

La Commission a-t-elle commis une erreur dans sa conclusion relative à la situation générale des homosexuels en Hongrie?

La Commission a conclu que les homosexuels sont victimes de discrimination en Hongrie, mais elle n'était pas convaincue qu'ils y sont persécutés ou que l'État ne leur assure pas une protection. Compte tenu de mon analyse de la question 1 et après un examen de la transcription et des documents produits, je suis d'avis que la conclusion de la Commission en ce qui a trait à la situation générale des homosexuels en Hongrie était raisonnable.


[35]            La Commission a examiné dans sa décision l'argument du demandeur concernant la négation récurrente et persistante des droits fondamentaux de la personne. Elle a dit qu'après un examen des documents, elle n'était pas convaincue qu'il y avait en Hongrie une telle négation récurrente et persistante des droits fondamentaux de la personne. La Commission pouvait tirer une telle conclusion compte tenu de la preuve dont elle avait été saisie et cette conclusion ne justifie pas l'intervention de la Cour.

[36]            La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[37]            Le demandeur a proposé la question grave de portée générale suivante en vue de sa certification :

Lorsqu'il décide si les mesures prises par un revendicateur pour chercher à obtenir la protection des autorités de son pays étaient objectivement raisonnables, le décideur devrait-il examiner ces mesures en tenant compte de toutes les circonstances ainsi que de ce que savait le revendicateur au moment où il a pris ces mesures, ou le décideur devrait-il examiner si ces mesures étaient raisonnables compte tenu de l'ensemble de la preuve, documentaire et autre, dont disposait le tribunal au moment où s'est déroulée l'instance?

Je ne suis pas disposé à certifier cette question. Pour qu'une question puisse être certifiée, elle doit porter sur une question grave et de portée générale qui est aussi déterminante quant à l'issue d'un appel (voir Samoylenko c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 116 F.T.R. 144 (1re inst.) et Liyanagamage c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1994), 176 N.R. 4 (C.A.F..)). Je ne suis pas convaincu que la question proposée satisfait à ces critères.


ORDONNANCE

[38]            LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée; aucune question n'est certifiée.

          « John A. O'Keefe »         

             Juge

Ottawa (Ontario)

25 novembre 2003

Traduction certifiée conforme :

Suzanne Bolduc, LL.B.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                   IMM-2817-02

INTITULÉ :                 GABOR SZORENYI

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                         

LIEU DE L'AUDIENCE :                               TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                           LE MARDI 27 MAI 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                      LE JUGE O'KEEFE

DATE DES MOTIFS :                                    LE MARDI 25 NOVEMBRE 2003

COMPARUTIONS :

Wennie Lee

POUR LE DEMANDEURESSE

David Tyndale

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Wennie Lee

North York (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

Morris Rosenberg, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR


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