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Date : 19990518


Dossier : IMM-1449-98

Entre :

     ALI TALEB, OLA TALEB, YMANE TALEB

     Partie demanderesse

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION

     Partie défenderesse

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE TREMBLAY-LAMER :

[1]      Il s"agit d"une demande de contrôle judiciaire d"une décision rendue par la section du statut (le tribunal), à l"effet que les demandeurs ne sont pas des réfugiés au sens de la Convention.

[2]      Le tribunal a rejeté, en premier lieu, la revendication du demandeur principal au motif que ce dernier n"était pas crédible. Il a jugé, en second lieu, que le demandeur principal devait être exclu du bénéfice de protection accordé aux réfugiés par l"application de l"article 1(F)b) de la Convention .

[3]      Avant d"aborder la question d"exclusion, le tribunal s"est prononcé sur la crainte bien fondée de persécution du demandeur en raison de l"un des motifs de la Convention.

[4]      En l"espèce, le tribunal a relevé des contradictions, incohérences et omissions dans son témoignage quant aux faits relatés dans les deux F.R.P. déposés en preuve. En effet, dans son premier F.R.P., il déclare avoir reçu en juillet 1994, un mandat du F.B.I. d"organiser l"arrestation, l"enlèvement et la remise aux autorités américaines du terroriste Hassan Ezzedine contre une somme de deux millions de dollars ainsi que la citoyenneté américaine pour lui et sa famille. Or, dans son deuxième F.R.P., il ne parle que d"un projet de surveillance et non plus d"enlèvement.

[5]      Le tribunal a considéré que le premier F.R.P. était plus conforme à la réalité puisqu"il était appuyé d"autres preuves documentaires qui confirmaient que le demandeur avait eu la responsabilité d"organiser l"enlèvement du terroriste.

[6]      Il revient à la section du statut, comme tribunal spécialisé, d"apprécier la crédibilité du demandeur. Eu égard aux circonstances, il ne fait aucun doute que la crédibilité de celui-ci fut sérieusement compromise par ses contradictions.

[7]      Il était tout à fait approprié pour le tribunal de choisir la version qu"il trouvait la plus crédible, d"autant plus que cette version était appuyée par la preuve documentaire. En ces circonstances, la Cour n"est pas autorisée à s"ingérer dans l"évaluation du tribunal de la crédibilité du demandeur.

[8]      Quant à l"application de l"article 1(F)b) de la Convention , le tribunal a déterminé qu'il devait exclure le demandeur principal de la définition de réfugié parce qu'il a " des raisons sérieuses de penser qu'il a commis un crime grave de droit commun, en dehors du pays d'accueil "1. Cette conclusion est fondée sur l"aveu fait par le demandeur dans le premier récit joint à son F.R.P. où il rapporte tous les détails du plan d"enlèvement du terroriste Hassan Ezzedine.

[9]      L"enlèvement d'une personne est un crime sanctionné par le Code criminel à l'article 279; ce crime est punissable d"emprisonnement à perpétuité. Par ailleurs, la tentative de commettre l"infraction est elle-même une infraction2. Toute tentative de commettre une infraction qui peut être punissable d"un emprisonnement à perpétuité, est elle-même punissable d"un emprisonnement maximal de 14 ans3. Le crime d"enlèvement est également un crime donnant lieu à l"extradition aux termes de la Loi sur l"extradition4. La gravité de l"infraction ne fait donc aucun doute.

[10]      Quant au caractère politique de l"infraction, la Cour d"appel fédérale dans l"arrêt Gil v. Canada (Ministre de l"Emploi et de l"Immigration)5, a indiqué que pour décider si l"infraction avait un caractère politique, il fallait examiner le but de cette dernière et vérifier si elle a été commise pour des raisons politiques ou pour des raisons personnelles comme l"appât du gain ou un règlement de compte. Dans le présent dossier, il ressort des faits mis en preuve que l"objectif du demandeur était clairement de profiter d"une bonne occasion de faire de l"argent et de pouvoir aller habiter aux États-Unis.

[11]      Ainsi, je conclus que le tribunal n'a commis aucune erreur de droit ou de faits en déterminant que le demandeur était exclu de la définition de réfugié au motif qu"il a de sérieuses raisons de penser que le demandeur a commis un crime grave de droit commun selon l'article 1(F)b) de la Convention .

[12]      La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[13]      Le procureur du demandeur a soumis des questions pour certification lesquelles ont été rejetées par la Cour au motif qu"elles étaient non pertinentes ou qu"elles avaient déjà fait l"objet de décisions de la part de la Cour d"appel fédérale.

     "Danièle Tremblay-Lamer"

                                     JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 18 mai 1999.

__________________

1      Dossier du tribunal à la p. 10.

2      Code criminel article 24(1).

3      Code criminel, article 463(a).

4      L.R.C. 1985, c. E-21, annexe 1.

5      [1995] 1 C.F. 508.

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