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Date : 20031106

Dossier : T-992-92

Référence : 2003 CF 1298

ENTRE :

                                                 ALMECON INDUSTRIES LIMITED

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                              - et -

                                       ANCHORTEK LTD., EXPLOSIVES LIMITED,

                                                       ACE EXPLOSIVES ETI LTD. et

                                                       WESTERN EXPLOSIVES LTD.

                                                                                                                                              défenderesses

                                                 TAXATION DES DÉPENS - MOTIFS

Charles E. Stinson

Officier taxateur


[1]                 Le présent litige portait sur une contrefaçon de brevet concernant des cartouches de trou de protection sismique vendues dans le commerce sous la marque « King Plug » . La défenderesse Anchortek Ltd. (ci-après Anchortek) fabriquait et vendait une cartouche appelée « Energy Plug » (ci-après la « cartouche d'Anchortek » ) qui prétendument portait atteinte au brevet de la demanderesse. Les autres défenderesses (ci-après les « défenderesses distributrices » ) achetaient et vendaient la cartouche d'Anchortek. La demanderesse a d'abord introduit des actions distinctes contre chacune des défenderesses distributrices, mais ces actions (T-607-96, T-608-96 et T-610-96, dans la mesure où elles ne concernaient que la cartouche d'Anchortek) furent finalement regroupées avec la présente action, par des ordonnances datées du 27 avril 1998. Le brevet de la demanderesse était l'objet d'un litige qui a été tranché (ci-après la « décision sur la cartouche Nutron » ) avant l'instruction de la présente affaire. L'exposé conjoint des faits dans la présente affaire reconnaissait que la décision sur la cartouche Nutron interprétait les revendications 1 et 5 du brevet de la demanderesse.

[2]                 Le jugement rendu après le procès (le 19 décembre 2001) constatait que les défenderesses avaient porté atteinte au brevet de la demanderesse, il renfermait des directives pour un renvoi sur l'établissement des dommages-intérêts, il rejetait la demande reconventionnelle d'Anchortek et il reportait à un jugement supplémentaire la question des dépens. Le jugement supplémentaire relatif aux dépens (le 23 mai 2002) renfermait ce qui suit :

[traduction] ...

1.              la demanderesse, Almecon Industries Limited, a droit à ses dépens dans la présente action, y compris la demande reconventionnelle;

2.              la Cour ordonne qu'une taxation des dépens de la demanderesse ait lieu conformément aux directives suivantes :

a)              les dépens de la demanderesse seront taxés de la manière ordinaire, c'est-à-dire en conformité avec la colonne III du tableau du tarif B des Règles de la Cour fédérale (1998);

b)              la demanderesse aura droit aux dépens de deux avocats au procès, toutes les autres réclamations relatives à un second avocat étant laissées à l'appréciation de l'officier taxateur;

c)              la demanderesse aura droit à tous les frais de déplacement, d'hébergement et autres pour deux avocats au procès et, sauf indication contraire, pour un avocat au titre des interrogatoires préalables et des requêtes, toutes les autres réclamations relatives au déplacement, à l'hébergement et aux frais connexes d'un deuxième avocat étant laissées à l'appréciation de l'officier taxateur;


d)              la demanderesse aura droit aux honoraires et débours de ses témoins experts, y compris M. Anderson, notamment les frais raisonnables de préparation avant procès, de présence au procès, et de déposition durant le procès, et, dans le cas de M. Anderson, y compris les frais et débours au titre des essais exécutés au nom de la demanderesse dans la préparation du procès, et au titre de son aide dans la préparation des arguments de la demanderesse;

e)              la demanderesse aura droit à une somme raisonnable au titre de tous les débours dont ne traite pas la présente ordonnance et qui ont été raisonnablement engagés; et

3.              toutes les dispositions susmentionnées seront sujettes à une décision selon l'article 420 des Règles à l'égard de toute offre écrite de règlement qui n'a pas à ce stade été portée à la connaissance de la Cour.

L'appel des défenderesses a été rejeté, avec dépens.

[3]                 La demanderesse a présenté un seul mémoire de dépens pour les quatre procès. La demanderesse (en tant qu'intimée) a présenté un seul mémoire de dépens pour les matières soumises à la Cour d'appel fédérale (A-34-02 et A-398-02). Une copie des présents motifs est versée dans le dossier de chaque affaire et s'applique donc à chaque affaire. Devant moi, les avocats de la demanderesse et des défenderesses se sont entendus sur certains éléments. L'avocat de la demanderesse s'est également désisté de certaines prétentions portant sur certains aspects interlocutoires, parce que les ordonnances qui les concernaient ne disaient rien sur les dépens. J'ai porté les mentions appropriées sur les mémoires de dépens tels qu'ils ont été taxés et déposés.


[4]                 Pour tous les postes d'honoraires d'avocats, les défenderesses ont fait valoir de manière générale que seule la portion inférieure des barèmes possibles devrait être employée. Selon elles, le fait de séparer, suite aux ordonnances susmentionnées du 27 avril 1998, l'instruction des allégations de contrefaçon se rapportant à la cartouche d'Anchortek et l'instruction des allégations de contrefaçon se rapportant à la cartouche Nutron avait simplifié le litige relatif aux premières allégations et avait rendu hors de propos, pour les questions de dépens soulevées ici, les dépens du litige relatif aux deuxièmes allégations. Le règlement de réclamations portées contre un autre distributeur, Austin Powder Ltd. (T-609-96), est lui aussi hors de propos.


[5]                 Les défenderesses ont fait valoir, selon l'alinéa 400(3)c) des Règles, que la présente affaire n'était pas complexe par rapport à d'autres litiges en matière de brevets, parce que le mécanisme des cartouches de prospection sismique est simple, que seules les revendications 1 et 5 du brevet de la demanderesse étaient en cause, que l'exposé conjoint des faits reconnaissait que la décision sur la cartouche Nutron avait interprété lesdites revendications 1 et 5, enfin que le juge du procès ici a adopté ladite interprétation. Les défenderesses ont affirmé que la décision sur la cartouche Nutron avait examiné plusieurs cartouches sous l'angle de l'état antérieur de la technique, mais que cela était inutile ici. Les défenderesses ont fait valoir, en application des alinéas 400(3)i) et o) des Règles, que l'approche adoptée par la demanderesse contre Anchortek, c'est-à-dire introduction d'une procédure en 1992, mais absence de mesures véritables jusqu'en 1997, après la décision sur la cartouche Nutron, avait prolongé inutilement ce litige. Les défenderesses ont fait valoir que leur conduite avait permis d'abréger ce litige, en alléguant l'exposé conjoint des faits, décrit comme « assez approfondi » , au paragraphe [5] des motifs du juge du procès, l'assentiment sur les titres des témoins experts, la réduction des points soulevés dans la demande reconventionnelle durant le procès, enfin la reconnaissance, par le juge du procès, à la fin de la transcription du procès, de la conduite expéditive des parties.

[6]                 Les défenderesses ont fait valoir que les motifs du juge du procès confirmaient intégralement leur position, c'est-à-dire que seule l'interprétation des revendications, dans la décision sur la cartouche Nutron, serait un point à débattre. Les défenderesses ont dit que les interrogatoires préalables de la demanderesse et d'Anchortek s'étaient déroulés en même temps, et que cela minait l'affirmation selon laquelle il y avait eu surcroît de travail en raison d'interrogatoires préalables multiples. Les défenderesses ont fait valoir que les exemples donnés par la demanderesse pour justifier l'attribution de dépens plus élevés sont hors de propos parce que les circonstances dont ils font état sont différentes, c'est-à-dire présence, dans la décision sur la cartouche Nutron, de considérations sur l'état antérieur de la technique, consentements à des dépens plus élevés, ou considérations de nature pénale.


[7]                 La demanderesse a fait valoir que la suppression des questions touchant la cartouche Nutron, suppression qui avait eu lieu seulement après épuisement de toutes les voies de réformation à l'encontre de la décision sur la cartouche Nutron, n'avait pas réduit la complexité car l'interprétation du brevet était encore en suspens ici pour tous les cas présumés de contrefaçon. La demanderesse a soutenu que le recours des défenderesses distributrices à des avocats autres que celui d'Anchortek est révélateur des divergences de vues et d'intérêts parmi lesdites défenderesses. Les défenderesses distributrices n'ont engagé l'avocat d'Anchortek que juste avant le procès. Par conséquent, chaque défenderesse avait employé des mesures distinctes avant le procès, notamment ses propres actes de procédure et modifications d'actes de procédure, ses propres affidavits de documents, ses propres interrogatoires préalables, ses propres engagements et requêtes, tout cela entraînant pour la demanderesse des complications logistiques considérables. Le regroupement des diverses pièces du litige n'avait pu se faire qu'après l'application de plusieurs mesures. La demanderesse a dit que le compromis conclu avec les défenderesses distributrices, mais non avec Anchortek, rend compte également des divergences de vues parmi les défenderesses.

[8]                 La demanderesse a dit que ses experts avaient dû se préparer en vue de défenses liées à l'état antérieur de la technique, défenses qui n'avaient été abandonnées que très peu de temps avant le procès. La demanderesse a relevé que certains points de la demande reconventionnelle n'avaient été abandonnés que très peu de temps avant le procès, et selon elle le fait que le mémoire de dépens de la demanderesse ne fasse pas état de dépens au titre de la demande reconventionnelle devrait militer en faveur de l'application de la portion supérieure des barèmes. La demanderesse a indiqué que les défenderesses avaient sans cesse soutenu, au cours de requêtes interlocutoires, qu'elles ne seraient pas liées par la décision sur la cartouche Nutron, et elle dit que les défenderesses ont attendu presque jusqu'au procès avant d'accepter l'interprétation du brevet donnée dans cette décision. La demanderesse a fait valoir que sa décision d'attendre jusqu'en 1997 pour prendre des mesures, afin de permettre l'application de la décision sur la cartouche Nutron, avait été prudente et avait réduit les dépens.


[9]                 La demanderesse a fait valoir que, selon divers précédents, les dépens taxés devraient présenter un certain rapport avec les dépens réels du litige. En l'espèce, les honoraires réels d'avocat se rapportant au procès se sont chiffrés à environ 500 000 $, les débours ont été d'environ 200 000 $, et les dépens de la procédure d'appel ont atteint environ 100 000 $. La demanderesse a relevé qu'elle n'a pas présenté quatre mémoires de dépens, en dépit de la production de défenses vigoureuses et séparées. La demanderesse a dit que son succès complet au procès devrait militer en faveur d'une approbation des dépens qu'elle réclame. La demanderesse a affirmé que la décision sur la cartouche Nutron n'avait concerné qu'une seule défenderesse, or le juge a accordé les dépens du registre supérieur de la colonne III. D'autres jugements en matière de brevets ont accordé les dépens prévus par les colonnes III ou IV. L'une des ordonnances interlocutoires rendues dans la présente affaire a accordé à Anchortek les dépens de la colonne IV qui suivaient l'issue de la cause.

(Tarif)

Point n ° 1 :     Sept unités réclamées pour chaque déclaration dans les dossiers T-992-92, T-607-96, T-608-96 et T-610-96; barème possible 4 - 7 (les chiffres ci-après entre parenthèses, qui suivent les unités réclamées, représentent le barème possible)


[10]            Les défenderesses ont fait valoir que les défenderesses distributrices ne devraient supporter que la moitié de l'indemnité attribuée à Anchortek, parce que le règlement rapide du litige concernant la cartouche Nutron devrait empêcher la demanderesse d'être avantagée deux fois par les dépens. La demanderesse a fait valoir qu'il est juste et nécessaire d'ajouter et de soustraire des causes d'action sans qu'il en résulte une pénalité sous forme de dépens, c'est-à-dire à cause du règlement conclu ici à l'encontre des défenderesses distributrices. Le règlement des points litigieux de la cartouche Nutron avec les défenderesses distributrices séparément d'Anchortek n'entraîne pas un doublement des dépens. La demanderesse a fait valoir que les sommes réclamées sont négligeables par rapport aux frais réels et qu'elles sont dans les limites des critères de l'adjudication de dépens.

Taxation


[11]            Au paragraphe [7] de mes motifs dans l'affaire Starlight c. Canada [2001] A.C.F. 1376 (O.T.), j'étais arrivé à la conclusion qu'il n'est pas nécessaire d'utiliser partout le même point des barèmes figurant dans le tarif, puisque chacun des postes d'honoraires d'avocat doit être considéré selon ses propres circonstances, et je disais qu'une certaine généralisation est nécessaire parmi les valeurs figurant dans les barèmes. J'ai lu les actes de procédure, les décisions interlocutoires et les documents interlocutoires en m'arrêtant en particulier aux difficultés qu'entraînent les possibles intérêts divergents des défenderesses. L'introduction par la demanderesse de procédures séparées n'était pas fautive. L'affidavit de David M. Reive établi le 22 avril 1998 au soutien des requêtes qui ont conduit aux ordonnances susmentionnées du 27 avril 1998 confirme l'activité relative à la cartouche Nutron et ne laisse pas entendre que le travail se rapportant à la cartouche d'Anchortek avait été simplifié. Dans l'affaire Milliken & Company et al. c. Interface Flooring Systems (Canada) Inc. 2003 CF 1258 (O.T.), j'examinais l'effet, sur les dépens, de l'ajout et de la soustraction de causes d'action, et j'étais arrivé à la conclusion que la répartition, bien qu'elle fût une option, n'était pas impérative pour régler les questions connexes de dépens.

[12]            La demanderesse a droit à une taxation de ses dépens en fonction de son travail dans l'action se rapportant à la cartouche d'Anchortek pour chaque acte de procédure qui a entraîné une adjudication de dépens séparée et non dépendante de l'adjudication des dépens dans l'action se rapportant à la cartouche Nutron. À mesure que chacune des causes d'action alléguées ressortait des actes de procédure, le dossier révélait à la demanderesse une multiplicité d'intérêts et d'avocats. La position de la demanderesse concernant la multiplicité des intérêts est implicitement appuyée par les dispositions de chacune des ordonnances du 27 avril 1998, dispositions selon lesquelles le regroupement, avec les dossiers T-992-92 et T-610-96 respectivement, des réclamations touchant la cartouche d'Anchortek et la cartouche Nutron, par rapport aux défenderesses distributrices, englobe l'interrogatoire préalable qui avait déjà eu lieu pour chaque cartouche. Le régime des Règles affine les points litigieux via le processus interlocutoire. Cela comprend l'ajout et la soustraction de causes d'action. L'article 400 des Règles donne à la Cour un large pouvoir discrétionnaire en matière de dépens. L'alinéa 400(6)a) des Règles précise que la Cour peut adjuger ou refuser d'adjuger les dépens à l'égard d'une question litigieuse ou d'une procédure particulière. Les adjudications provisoire et finale de dépens dans ces matières ne donnent nullement à entendre que les dépens se rapportant à la cartouche d'Anchortek devaient être réduits par l'effet du litige concernant la cartouche Nutron.

[13]            Les actes de procédure en cause n'étaient ni les plus simples ni les plus difficiles à considérer. J'userai de mon pouvoir discrétionnaire comme dans la décision que j'ai rendue dans l'affaire Grace M. Carlile c. Sa Majesté la reine (1997) 97 D.T.C. 5284, page 5287 (O.T.), et en accord avec le sentiment du juge Russell dans l'affaire Re Eastwood (deceased) (1974) 3 All. E.R. 603, page 608, pour qui, lorsqu'il s'agit d'arriver à un résultat raisonnable en matière de dépens, la taxation de dépens relève [traduction] « d'une justice rudimentaire, c'est-à-dire d'une justice marquée par une approximation assez considérable » . Une demande reconventionnelle est essentiellement une action autonome qui appelle une décision distincte en matière de dépens. Je n'accorde aucun poids à l'absence, dans le mémoire de dépens de la demanderesse, d'une réclamation de dépens pour demande reconventionnelle. J'accorde six unités pour le dossier T-992-92 et cinq unités pour chacun des dossiers T-607-96, T-608-96 et T-610-96. J'ai tenu compte ce faisant de l'argument des défenderesses selon lequel ces travaux n'ont pas nécessairement été exécutés dans le vide.

[14]            Les défenderesses se sont opposées de manière générale à tous les postes d'honoraires d'avocat réclamés pour la somme maximale (il existe 106 postes du genre), mais elles ne les ont pas tous considérés dans des conclusions individuelles, comme par exemple les actes de procédure susmentionnés. J'ai accordé les indemnités mentionnées dans le mémoire de dépens pour les postes du genre non expressément désignés dans les présents motifs, en accord avec l'approche que j'ai adoptée pour les actes de procédure susmentionnés, et en fonction des circonstances de chaque incident du présent litige.


Poste n ° 4 :          Quatre unités réclamées pour la requête de la demanderesse dans les dossiers T-607-96, T-608-96 et T-610-96, qui a conduit aux ordonnances susmentionnées du 27 avril 1998, lesquelles prévoient que « les dépens... sont laissés à l'appréciation du juge du procès » (2 - 4)

[15]            Les défenderesses ont fait valoir qu'il n'y a pas de dépens payables parce que le jugement supplémentaire relatif aux dépens n'a pas réglé la question non résolue des dépens dans ces trois ordonnances. Suite à l'affaire Geddes c. Lamin Tech Corp. [1999] A.C.F. n ° 1745 (O.T.), qui concerne le caractère suffisant ou insuffisant d'un avis, les défenderesses se sont opposées à la tentative d'inclusion, dans l'instance antérieure, de dépens pour les requêtes incidentes. Les défenderesses ont affirmé que la demanderesse avait reçu un avis suffisant de leur intention de demander le rajustement des dépens par compensation, selon le paragraphe 408(2) des Règles, pour les ordonnances datées du 17 novembre 1998 (dépens de la requête adjugés à Anchortek) et du 25 septembre 2000 (dépens de la requête adjugés selon la colonne IV à Anchortek suivant l'issue de la cause), notamment pour le poste 24, déplacement de l'avocat. Les indemnités devraient être comparables aux résultats obtenus par la demanderesse, c'est-à-dire moitié inférieure du barème.


[16]            La demanderesse a fait valoir que cet extrait du jugement supplémentaire relatif aux dépens, « la demanderesse [...] a droit à ses dépens dans la présente action » , concerne ces dépens. Le texte de ces ordonnances équivaut à dire que les dépens suivront l'issue de la cause. La demanderesse a fait valoir que ces ordonnances se distinguent des ordonnances qui ne disent rien sur les dépens et pour lesquelles les dépens afférents ont été par conséquent retirés du mémoire de dépens. La demanderesse a demandé l'autorisation d'ajouter 440 $ pour chaque requête incidente mentionnée dans les ordonnances et elle a soutenu, s'agissant des conclusions des défenderesses en rajustement des dépens par compensation, que tous les ajouts proposés pour les deux parties devraient être ou bien acceptés ou bien refusés.

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[17]            Les dépens adjugés pour les procédures interlocutoires sont régis par les ordonnances qui en disposent. Si le texte de l'adjudication interlocutoire de dépens ne limite pas expressément ces dépens à la procédure interlocutoire, ils sont tenus pour limités dans cette mesure et peuvent être modifiés ou supprimés par voie d'appel devant la Cour d'appel fédérale, mais ils ne peuvent être modifiés ou supprimés par le jugement rendu après le procès. Si le texte du jugement sur les questions de fond soulevées dans le litige n'autorise pas expressément l'octroi de dépens depuis le début du procès, les dépens sont considérés comme des dépens ainsi autorisés sauf lorsque des ordonnances interlocutoires anticipent sur l'application du jugement, par exemple « avec les dépens quelle que soit l'issue de la cause » , « avec dépens » , « sans dépens » etc. L'expression « les dépens suivront l'issue de la cause » ne permet le recouvrement de ces dépens interlocutoires qu'après gain de cause de la partie concernée sur le fond du litige, c'est-à-dire dans le jugement rendu après le procès. Ici, Anchortek ne peut réclamer de dépens en invoquant l'ordonnance du 25 septembre 2000, parce qu'elle n'a pas obtenu gain de cause. La demanderesse n'a pas droit à des dépens au titre des ordonnances du 27 avril 1998 parce que le juge du procès n'a pas expressément et visiblement exercé le pouvoir discrétionnaire requis, c'est-à-dire à cause du texte des ordonnances : « les dépens de la requête et de la requête incidente sont laissés à l'appréciation du juge du procès » . Dans ces conditions, je refuse de rajuster les dépens par compensation pour l'ordonnance du 17 novembre 1998.

Poste n ° 13b) :    Trois unités réclamées pour la préparation du procès, pour chaque jour après le premier jour (2 - 3)

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[18]            Après quelques échanges entre les avocats sur l'opportunité d'utiliser, comme multiplicateurs, des journées entières ou des demi-journées, les parties sont convenues que le poste n ° 13b) pouvait être présenté à raison de cinq journées. Elles sont convenues également que le poste n ° 14a) (comparution au procès) pouvait être présenté à raison de 6,5 heures par jour pendant 5,5 jours. Les défenderesses ont néanmoins soutenu que seules devraient être accordées des valeurs de la moitié inférieure des barèmes possibles.


[19]            Le paragraphe 30 de l'affidavit Reive susmentionné (produit au nom de la demanderesse) contenait les mots suivants : [traduction] « [...] si le litige Anchortek et le litige Nutron sont séparés... il y aura dans les deux ensembles d'actions des questions très circonscrites en matière de contrefaçon et de validité... les procès des actions seront considérablement simplifiés, par rapport à ce que l'on observe en général dans les actions en contrefaçon de brevet [...] » Des événements ultérieurs porteurs de complications pourraient évidemment rendre hors de propos de telles affirmations. Le paragraphe [19] des motifs du juge du procès mentionnait que « en raison de jugements antérieurs des deux sections de la Cour à propos du brevet Almecon, les questions touchant la validité sont sensiblement plus étroites que ce que les actes de procédure donnaient à entendre au départ [...] » Ma réaction générale à ce litige est comparable à celle qui apparaît dans les paragraphes [83] à [90] inclusivement de l'affaire Milliken & Company, précitée, c'est-à-dire que ce litige était plus difficile à ses premières étapes que durant le déroulement du procès. J'appliquerai au poste n ° 14a) réclamé ici l'approche employée pour le poste n ° 14a) dans ladite affaire. C'est-à-dire que j'accorde le poste n ° 14a) à raison de deux unités par heure pour 3,5 jours, et à raison de trois unités par heure pour deux jours (en fonction de 6,5 heures par jour dans les deux cas). J'accorde le poste n ° 13b) tel qu'il est présenté, à raison de trois unités par jour.

Poste n ° 24 :        Cinq unités réclamées au titre des déplacements de l'avocat de la demanderesse pour l'essai effectué par l'expert Clifford J. Anderson sur la cartouche d'Anchortek (1 - 5)

[20]            Les défenderesses ont relevé que la nouvelle date fixée pour cet essai avait été l'objet de leur requête juste avant le procès. Le juge du procès avait ordonné que la requête soit ajournée sine die (le 24 juillet 2001) après avoir fortement recommandé à la demanderesse de reproduire l'essai pour les défenderesses. Les défenderesses se sont opposées à toute indemnité pour les honoraires d'avocat ainsi que pour les débours liés aux déplacements, parce que la Cour n'a jamais considéré les éléments de fond de la requête et parce que les dépens en question sont réclamés en application de l'ordonnance de la Cour, ordonnance qui ne disait rien sur les dépens. Les défenderesses ont fait valoir que le paragraphe [82] des motifs du juge du procès ne constituent pas un commentaire formel sur la valeur de cet essai.


[21]            La demanderesse a fait valoir que l'ordonnance n'est pas silencieuse sur les dépens parce qu'aucune ordonnance n'a jamais été rendue sur le bien-fondé de la requête. La demanderesse a dit que la conduite des défenderesses leur avait fait manquer le premier essai, qui faisait partie de la préparation du procès. Le fait que les défenderesses ont ensuite déposé une requête en redressement prouve qu'elles considéraient que l'essai était utile. Le paragraphe [27] des motifs de la Cour d'appel fédérale confirme l'utilité de l'essai.

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[22]            Ces dépens font partie de la préparation du procès et n'intéressaient pas l'instruction de la requête. Les articles 4 et 5.1 de la Loi sur la Cour fédérale, qui définissent la Cour, et l'article 2 des Règles de la Cour fédérale (1998), qui définit l'officier taxateur, m'empêchent d'usurper le pouvoir discrétionnaire d'adjudication de dépens qui est dévolu à la Cour par le paragraphe 400(1) des Règles. Une adjudication de dépens selon le paragraphe 400(1) donne à l'officier taxateur le pouvoir de décider quels dépens seront accordés, ainsi que leur quantum. Je n'exerce pas le pouvoir discrétionnaire réservé à la Cour pour le poste n ° 24. Les directives spéciales contenues dans le jugement supplémentaire relatif aux dépens n'abordent pas cette revendication particulière, et je rejette donc le poste n ° 24. Cependant, j'accorde automatiquement les frais de déplacement y afférents, en l'absence de directives spéciales pour le poste n ° 24, si la présence de l'avocat est essentielle à un endroit. Je considère ici que la présence de l'avocat principal était essentielle et j'accorde les frais connexes de déplacement, au titre des déplacements pour des matières antérieures au procès, à l'intérieur de la somme réduite accordée ci-dessous quant à la réclamation de 40 817,09 $.

Poste n ° 9 :          1,5 unité (le maximum possible) par heure pour la présence d'un second avocat, à plusieurs reprises, lors de l'interrogatoire préalable

Postes nos 13a) : 2,5 unités (le maximum possible) pour le premier jour du procès, et 1,5 unité

et b)                       (le maximum possible) pour chaque jour de procès subséquent, au titre de la préparation du procès par le deuxième avocat

Poste n ° 24:         2,5 unités (le maximum possible) pour le déplacement du second avocat lors de l'interrogatoire préalable, et 2,5 unités pour le déplacement du second avocat lors du procès

[23]            Les défenderesses ont fait valoir, s'appuyant sur l'affaire Desnoes & Geddes Limited c. Hart Breweries Limited [2002] A.C.F. n ° 869 (C.F. 1re inst.), au paragraphe [25], et sur l'affaire Wong c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) 3 Imm. L.R. (3d) (O.T.), aux paragraphes 3 et 7, que les documents de la demanderesse n'attestaient pas une complexité qui justifiait un second avocat. Les défenderesses ont dit qu'elles n'avaient eu en général besoin que d'un seul avocat pour les requêtes et les interrogatoires préalables, même si la demanderesse avait un deuxième avocat à sa disposition.


[24]            Pour les divers interrogatoires préalables (poste n ° 9), la demanderesse s'en est rapportée à ses conclusions ci-dessus concernant les difficultés logistiques entraînées par l'obligation de composer avec plusieurs défenderesses représentées par plusieurs avocats. Ces interrogatoires préalables ont été compliqués par quatre ensembles de documents et par la nécessité de se préparer pour quatre défenderesses distinctes, alors que Anchortek ne devait se préparer que pour une seule demanderesse. La demanderesse a appliqué le même argument à la préparation du procès, en relevant que les défenderesses elles-mêmes avaient eu recouru à trois avocats, contre deux pour la demanderesse. Les précédents invoqués par les défenderesses doivent être écartés, parce que le jugement supplémentaire relatif aux dépens a accordé les honoraires du deuxième avocat au procès, et il s'ensuit donc que le deuxième avocat était indispensable pour la préparation du procès.

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[25]            À l'exception du poste n ° 14b) (procès) et du poste n ° 22b) (appel), le tarif ne renferme visiblement pas de dispositions concernant un deuxième avocat. En dehors de ces deux postes, le jugement supplémentaire relatif aux dépens me confère un pouvoir discrétionnaire pour le deuxième avocat. L'avocat de la demanderesse a retiré par requête l'unique réclamation concernant le deuxième avocat : je l'aurais de toute façon refusée. Comme je l'ai dit plus haut, je crois que ce litige a été plus difficile à ses premières étapes que durant le procès, en raison des circonstances individuelles des défenderesses. J'accepte le deuxième avocat pour chacun des interrogatoires préalables des défenderesses, mais je le refuse pour l'interrogatoire préalable de la demanderesse. Pour ces interrogatoires préalables, je crois que le travail successif relatif à chaque défenderesse aurait pu avoir un effet simplificateur. D'un autre point de vue, on pourrait soutenir que, parce qu'un poste est revendiqué comme propre à chaque défenderesse, chaque poste doit être considéré indépendamment, selon ses propres circonstances. J'ai accordé les indemnités du mémoire de dépens en fonction de ces considérations.


[26]            J'accorde les dépens du second avocat, tels qu'ils sont présentés, pour les postes nos 13a) et b), préparation du procès. Le mémoire de dépens renfermait trois réclamations dans le poste no 24 pour les déplacements du premier avocat vers les endroits des interrogatoires préalables. Ces réclamations n'étaient pas en cause, si ce n'est pour le nombre des unités réclamées. Le pouvoir d'inclure ces réclamations dans ce mémoire de dépens n'est pas clair. À première vue, le paragraphe 2b) du jugement supplémentaire relatif aux dépens semble ne concerner que les honoraires d'avocat du poste no 14, et le paragraphe 2c) semble ne concerner que les débours. Dans ces conditions, je refuse les réclamations annexes du poste no 24 pour un deuxième avocat. Appliquant le même raisonnement, je refuse les réclamations du poste no 24 pour le déplacement du deuxième avocat vers le lieu du procès.

Photocopies (15 474,85 $); télécopies (1 358,05 $); téléphones interurbains (258,53 $); messageries (4 485,36 $) et droits de transcription (11 766,77 $)


[27]            La défenderesse a fait valoir, invoquant l'affaire F-C Research Institute Limited et al. c. Sa Majesté la reine et al. 95 D.T.C. 5583, à la page 5584 (O.T.) que la preuve à l'appui, qui consiste essentiellement dans l'imprimé d'ordinateur du cabinet d'avocats indiquant les dates, mais non les détails, ne suffit pas, et donc que ces débours devraient être refusés. Les défenderesses ont admis que certains débours auraient été nécessaires, mais elles ont fait valoir, invoquant l'affaire Windsurfing International Inc. et al. c. Bic Sports Inc. et al. 6 C.P.R. (3d) 526 (C.F. 1re inst.) et l'affaire Diversified Products Corp. c. Tye-Sil Corp. 34 C.P.R. (3d) 267 (C.F. 1re inst.), qu'il doit exister une preuve d'objet, de nécessité et de justification. Les défenderesses ont relevé que le contre-interrogatoire de Ronald E. Dimock sur son affidavit établi le 8 mars 2002, au soutien des dépens, s'est soldé par une déclaration selon laquelle il n'existait pas d'autres dossiers pour photocopies. Les défenderesses ont indiqué que même les factures reçues de fournisseurs externes de photocopies n'offraient pas les détails qui auraient permis de mesurer l'objet, l'utilité et la justification.

[28]            Les défenderesses ont fait valoir que l'état de cette preuve empêche de confirmer que les dépens concernant la cartouche Nutron ne sont pas liés de quelque manière dans les débours revendiqués. Les défenderesses ont proposé une réduction d'un tiers pour les photocopies, les télécopies et les messageries et elles ont admis la somme de 258,53 $ pour les appels interurbains. Pour les droits de transcription, la demanderesse a supprimé 2 340,70 $ et 322,20 $ (le 13 novembre 1998 et le 30 novembre 1998 respectivement, voir page 19 de la pièce I de l'affidavit Dimock), laissant 9 103,87 $ pour les droits de transcription, somme que les défenderesses ont acceptée. Les défenderesses ont fait valoir que l'accord de la demanderesse pour la suppression de ces deux sommes montre qu'une erreur humaine peut survenir durant les inscriptions dans les journaux informatisés, et, selon elles, cela devrait être pris en compte dans la taxation des autres débours en cause.


[29]            La demanderesse a fait valoir, s'appuyant sur l'affaire Rothmans, Benson & Hedges Inc. c. Imperial Tobacco Ltd. 50 C.P.R. (3d) 59 (C.F. 1re inst.), l'affaire Allied Signal Inc. c. Du Pont Canada Inc. [1997] A.C.F. n ° 993 (O.T.) et l'affaire Red Owl Foods (Alta) Ltd. c. Red Owl Stores Inc. 12 C.P.R. (2d) 266 (C.F. 1re inst.), que les officiers taxateurs sont investis d'un large pouvoir d'appréciation pour dire si la preuve produite est acceptable plutôt qu'irréfutable. La demanderesse a fait valoir que la présence de quatre défenderesses, de quatre procédures, de quatre interrogatoires préalables et de quatre ensembles de correspondance a entraîné un grand nombre d'activités. Par conséquent, la somme de 15 474,85 $ au titre de photocopies produites au cours de plusieurs années, à raison de 0,25 $ la page pour les copies internes et à raison du tarif moins élevé de 0,11 $ la page pour les copies externes, est raisonnable. Le système informatisé de suivi des causes qui a été utilisé a minimisé l'erreur humaine parce qu'il nécessitait la saisie du numéro d'identité du client avant que l'opération de photocopie ne puisse avoir lieu. La demanderesse a dit que ce système s'appliquait également aux autres débours en cause.

[30]            La demanderesse a fait valoir que le postulat des défenderesses concernant les dépens pour la cartouche Nutron est vicié parce qu'il suppose que les dépens afférents aux actions pour lesquelles il y a eu désistement ou règlement sont empêchés, pénalisant par le fait même le règlement. La demanderesse a fait valoir que les considérations touchant la cartouche Nutron et se rapportant aux défenderesses distributrices étaient certainement pertinentes, au moins jusqu'aux ordonnances de séparation du 27 avril 1998. Ces considérations n'ont jamais été un facteur pour les dépens se rapportant à Anchortek.


Taxation

[31]            Pour résoudre ces points, je m'en remets à l'affaire Re Eastwood (deceased), précitée, ainsi qu'à la démarche que j'ai employée dans l'affaire Carlile, précitée, et dans l'affaire Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 4004 c. Air Canada [1999] A.C.F. n ° 464 (O.T.). Je vois les liens avancés par la demanderesse, mais la preuve n'est pas convaincante. Une telle preuve serait ici d'un coût prohibitif. Le contre-interrogatoire de M. Dimock sur son affidavit renfermait plusieurs commentaires de sa part où il disait que le coût d'une preuve absolue de frais se situant dans les 10 $, 20 $, 30 $, etc. dépasserait le quantum réel des débours eux-mêmes. M. Dimock est un spécialiste reconnu dans un domaine concurrentiel du droit, et j'accepte ses vues sur les réalités du seuil de la preuve dans un procès. Une certaine discipline devrait imprégner la question des dépens, mais de réelles dépenses sont nécessaires pour faire avancer un procès : un résultat de zéro dollar dans une taxation de dépens serait absurde. J'accepte jusqu'à un certain point que la demanderesse a pu connaître des difficultés logistiques. Je fais droit aux télécopies, pour la somme présentée, soit 1 358,05 $. Je ramène à 12 000 $ et à 3 700 $ respectivement les réclamations pour photocopies et messageries.

Somme de 40 817,09 $ (y compris repas, hébergement, taxis et billet d'avion) réclamée au titre de plusieurs voyages du premier avocat et du second avocat pour qu'ils se rendent aux endroits des interrogatoires préalables, des requêtes et du procès


[32]            Les défenderesses ont produit des documents indiquant des tarifs aériens en classe économique et ont dit que, d'après les sommes indiquées dans la preuve, des tarifs de classe affaires ont probablement été utilisés, contrairement au principe établi dans l'affaire Dableh c. Hydro Ontario [1994] A.C.F. n ° 1810 (O.T.), au paragraphe 20. La demanderesse devrait obtenir moins que le plein tarif de classe économique. Les défenderesses ont fait valoir que le jugement supplémentaire relatif aux dépens n'entendait pas qu'elles subventionnent un train de vie somptueux. Selon elles, le tarif d'hôtel durant le procès (environ 264 $ la nuitée) était excessif par rapport à leur propre tarif, et il devrait être ramené à quelque chose comme 169 $, le chiffre employé pour les interrogatoires préalables.


[33]            La demanderesse a fait valoir qu'une somme inférieure au plein tarif de classe économique comporte des restrictions qui ne conviennent pas à un procès, mais elle a reconnu que le tarif de la classe affaires n'est pas en principe acceptable. La demanderesse a fait valoir que les paragraphes 2c) et e) du jugement supplémentaire relatif aux dépens écartait en réalité le précédent Dableh, précité. Le second avocat a été laissé à mon appréciation. Par conséquent, les sommes de 2 823,15 $ et de 3 525,95 $ au titre des déplacements du second avocat pour qu'il se rende aux interrogatoires préalables en 1998 peuvent être réduites en conséquence. Autrement, je n'ai pas le pouvoir de modifier les dispositions du jugement supplémentaire relatif aux dépens. La demanderesse a dit que l'appel des défenderesses à l'encontre du jugement supplémentaire relatif aux dépens exposait des griefs d'appel très précis, mais, fait révélateur, n'abordait pas ces aspects de l'adjudication de dépens. Les défenderesses ne peuvent aujourd'hui tenter de rectifier cette omission. La demanderesse a admis qu'un hôtel moins cher est adéquat pour un bref séjour, mais elle a soutenu qu'un procès intensif d'une durée de dix jours nécessitait davantage d'espace de travail, voulant dire par là que la motivation réelle n'était pas le désir de séjourner dans un hôtel luxueux.

Taxation

[34]            Le jugement supplémentaire relatif aux dépens n'a pas supprimé mon pouvoir discrétionnaire ni le seuil de la nécessité raisonnable. Le dossier confirme que les tarifs aériens de la classe affaires ont été utilisés. Ces tarifs aériens ne sont toujours pas la norme. Les formules d'épargne sont trop restrictives aux fins d'un procès. Je ne suis pas convaincu dans ces conditions que les frais supplémentaires d'hôtel étaient justifiés. La taxation de ces dépens est compliquée par ma décision ci-dessus concernant les honoraires d'un second avocat; par mon sentiment que le paragraphe 2c) du jugement supplémentaire relatif aux dépens concerne les débours mais non les honoraires; par le texte général du paragraphe 2e) et par le retrait, à l'initiative de la demanderesse, d'une somme de 900,96 $ pour les frais de déplacement du principal avocat engagée afin qu'il se rende à l'endroit de la requête pour régler le différend concernant l'essai de M. Anderson. Je crois qu'ici une somme de 32 000 $ est raisonnable, et c'est celle que j'accorde.

Somme de 5 094,18 $ (sur laquelle une somme de 73 $ pour les taxis a été admise) réclamée au titre de plusieurs déplacements de personnes qui n'étaient pas avocats pour qu'elles se rendent aux endroits des interrogatoires préalables

Somme de 1 102,34 $ réclamée au titre du déplacement d'une personne qui n'était pas avocat pour qu'elle se rende à l'endroit de l'essai de M. Anderson


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[35]            Les défenderesses ont fait valoir, invoquant l'article 1(4) du tarif B et l'affaire Archambault c. Canada [2002] A.C.F. n ° 649 (O.T.), que l'insuffisance de la preuve ici fait obstacle à toute indemnité. La demanderesse a tenté d'introduire certaines factures récemment trouvées, mais les défenderesses ont élevé des objections contre la brièveté de l'avis. La demanderesse a retiré les factures, mais a soutenu qu'une somme devrait être accordée puisque, selon le dossier, ces gens (les représentants de la demanderesse) étaient requis de se présenter. La demanderesse a accepté les propositions des défenderesses pour la suppression de certaines sommes si je rejette les arguments des défenderesses sur le caractère insuffisant de la preuve, et c'est ce que je fais. J'ai inscrit sur le mémoire de dépens les ententes auxquelles sont arrivées les parties.

Somme de 14 026,78 $ réclamée au titre du déplacement d'une personne qui n'était pas avocat pour qu'elle se rende à l'endroit du procès

Taxation

[36]            La demanderesse a admis les doutes des défenderesses concernant les frais d'hôtel (le même hôtel que celui où avaient séjourné les avocats du procès). Les parties m'ont laissé le soin de rajuster l'indemnité en tenant compte du résultat auquel je suis arrivé ci-haut pour les frais d'hôtel des avocats du procès. J'accorde une somme ramenée à 12 200 $.


Somme de 86 722,26 $ réclamée au titre de l'expert Clifford Anderson

[37]            Les défenderesses ont fait valoir que les honoraires de M. Anderson sont excessifs par rapport aux frais bien moindres de 5 350 $ réclamés par chacun des deux autres experts de la demanderesse. Les défenderesses ont admis qu'il était le principal expert de la demanderesse, mais ont relevé que certains de ses témoignages avaient été rejetés par le juge du procès en dépit des observations de la Cour d'appel fédérale. Le seuil exposé dans l'affaire Camp Robin Hood Limited c. Sa Majesté la reine [1982] 1 C.F. 19, à la page 38 (C.F. 1re inst.), ainsi que le principe exposé dans l'affaire Apotex Inc. c. Syntex, 2 C.P.R. (4th) 368, à la page 377 (C.F. 1re inst.), principe selon lequel un plaideur qui échoue ne devrait pas être tenu d'assumer les frais d'une « Cadillac » d'experts, devraient ici restreindre l'indemnité à accorder. Les défenderesses ne disent pas que l'indemnité au titre de M. Anderson doit se limiter à la somme de 5 350 $ indiquée ci-dessus, mais que cette somme devrait être prise en compte pour déterminer l'indemnité de M. Anderson. Les défenderesses ont exprimé des doutes sur la pertinence de certaines factures, c'est-à-dire que les numéros 5107, 5473 et 128 comprennent les frais du litige de la cartouche Nutron, qui ne sont pas ici recouvrables. Les dates indiquées sur les factures 5107 et 5473 recoupent la date du litige en question.


[38]            La demanderesse a fait valoir que, d'après le paragraphe 2d) du jugement supplémentaire relatif aux dépens, le juge du procès avait une opinion assez favorable du travail de M. Anderson pour que tous ses éléments soient approuvés. Les paragraphes [27] et [36] des motifs de la Cour d'appel fédérale en font un éloge marqué. Les explications de M. Anderson atteignent le niveau de preuve exposé dans l'affaire Camp Robin Hood Limited et dans l'affaire Diversified Products Corp. L'idée d'une « Cadillac » d'experts évoquée par les défenderesses ne saurait s'appliquer à un travail qui s'est étalé sur six ans et qui a été exécuté plus efficacement que dans des affaires comparables.


[39]            La demanderesse a dit que la ligne de référence [traduction] « Almecon c. Nutron... » , dans la facture 5107, était une erreur parce que les travaux énumérés dans le texte de la facture mentionnent [traduction] « analyse détaillée du jugement » , voulant dire par là le jugement relatif à la cartouche Nutron. Cette facture concerne le travail postérieur à son travail relatif au jugement en question et elle est propre à la cartouche d'Anchortek. La demanderesse a dit que la ligne de référence [traduction] « Almecon c. Nutron... » , dans la facture 5473, était elle aussi une erreur parce que les travaux énumérés dans la facture intéressent explicitement la cartouche d'Anchortek, l'examen, par M. Anderson, de la décision concernant la cartouche Nutron, ainsi que l'examen, par M. Anderson, du témoignage qu'il avait produit dans le procès concernant la cartouche Nutron, tout cela en prévision du procès relatif à la cartouche d'Anchortek. La demanderesse a appliqué le même argument à la facture 128, en affirmant que ces trois factures, ainsi que la facture 6130, concernent le stade préparatoire du procès durant la période 1995-1998. La demanderesse a dit que les factures 1027, 1913 et 2045 représentent environ la moitié du compte total de M. Anderson et portent sur la conception et la reproduction de son essai de la cartouche d'Anchortek. Les factures restantes concernaient sa préparation en vue du procès, son rapport d'expert et son contre-rapport. La demanderesse a fait valoir qu'il avait été raisonnable et nécessaire de recourir à M. Anderson parce qu'il avait témoigné au procès concernant la cartouche Nutron. Le juge du procès, dans cette affaire, s'en était abondamment rapporté à lui, et il aurait été beaucoup plus coûteux de repartir de zéro avec un nouvel expert.

Taxation

[40]            Dans la mesure où elle est applicable ici, je m'en remets, pour ce compte d'expert, à l'approche que j'avais adoptée dans l'affaire Merck & Co. Inc. et al. c. Apotex Inc., [2002] A.C.F. n ° 1116 (O.T.), confirmé [2002] A.C.F. n ° 1357 (C.F. 1re inst.), et dans l'affaire Bayer A.G. et al. c. Apotex Inc. et al. [2002] A.C.F. n ° 1693 (O.T.). C'est l'avocat coordonnateur qui établit, et rajuste au besoin, les paramètres du travail des experts, dans le cadre d'un avis juridique professionnel sur l'assistance technique nécessaire pour aider la Cour à rendre une décision. L'avocat coordonnateur doit être prudent, mais non excessif, lorsqu'il décide quel travail non juridique peut être assigné à l'expert de renfort. Il y a un certain degré d'imprécision dans ce partage du travail, et un plaideur qui obtient gain de cause ne devrait donc pas être indûment pénalisé a posteriori. De même, ce plaideur ne devrait pas échapper aux limites d'une indemnité partielle en recourant à des experts pour des travaux qui relèvent de la capacité de l'avocat coordonnateur, ce dernier étant assujetti à une indemnité partielle.


[41]            Les experts sont une réalité dans les procès en matière de brevets. Il était raisonnable ici de recourir à quelqu'un qui avait déjà une bonne connaissance des objets du litige. Le juge du procès a pu être sceptique sur certains aspects de l'ensemble de la preuve d'expert, mais il s'en est remis à son « intégralité » (paragraphe [83] de ses motifs). Le paragraphe [28] des motifs de la Cour d'appel fédérale évoquait cette « intégralité » sans critiquer M. Anderson. Je relève, dans les factures, que durant la période 1995 - 1998, diverses choses ont été examinées et analysées : il est difficile de dire si ce travail recoupait des responsabilités qui relevaient davantage de l'avocat coordonnateur. Le travail se rapportant à l'essai paraît légitime. Un expert qui examine le travail d'un autre expert appelé par la même partie, c'est-à-dire la facture 2109, s'expose parfois, mais pas nécessairement, au risque de brouiller la ligne de démarcation entre le travail d'un avocat et le travail d'un non-avocat, sans compter le risque pour lui d'être redondant. L'inscription [traduction] « discussions postérieures au procès » , sur la facture 2371, révèle une attention à l'intégralité de la liste des travaux exécutés, mais à première vue elle dépasse les limites de l'adjudication de dépens. Dans ces conditions, j'accorde une somme réduite, soit 74 000 $.

Poste n ° 5 :          Sept unités réclamées au titre de la réponse à la requête des défenderesses en annulation de ma décision datée du 23 décembre 2002, concernant le retard de cette taxation de dépens : rejetée par ordonnance datée du 5 février 2003, avec dépens pour la demanderesse (3 - 7)

Poste n ° 6:           Trois unités réclamées au titre de la comparution (1 - 3)

Poste n ° 26:         Six unités réclamées au titre de la taxation des dépens (2 - 6)

Taxation


[42]            Les défenderesses ont admis que la demanderesse pouvait ajouter ces postes nos 5 et 6 au mémoire de dépens, mais seulement selon la moitié inférieure des barèmes possibles. Après que j'eus indiqué qu'il est courant pour des parties de ne préciser le montant réclamé pour le poste no 26 qu'après l'audition de la taxation des dépens eu égard au fait que, au moment de la préparation du mémoire de dépens, ce poste concernerait une activité future et que par conséquent la réclamation légitime ne peut pour l'instant être évaluée, les défenderesses ont admis qu'il pouvait être ajouté, mais, encore une fois, seulement selon la moitié inférieure du barème. Dans ces conditions, j'accepte les postes nos 5 et 6 à raison de quatre unités et de une unité par heure (pour 1,5 heure) respectivement. Le poste no 26 concerne des honoraires globaux regroupant à la fois la préparation et la comparution : j'accorde cinq unités.

Somme de 9 244,48 $ réclamée au titre d'honoraires d'avocat et de débours pour les dossiers A-34-02 et A-398-02

Taxation

[43]            Les défenderesses ne se sont opposées qu'au maximum réclamé pour le poste no 19 (exposé des faits et du droit) dans chaque dossier et pour les postes nos 22a) et b) (honoraires de comparution du premier avocat et du second avocat) et ont proposé la moitié inférieure des barèmes possibles au motif que ces matières n'étaient pas complexes. Les défenderesses ont exprimé les mêmes doutes que ci-dessus pour le caractère suffisant de la preuve, mais ont admis les débours présentés (2 170,71 $), sans préjudice de leurs oppositions ci-dessus pour le mémoire de dépens du procès. La demanderesse s'en est remise à ses conclusions ci-dessus pour son mémoire de dépens du procès.


[44]            Je ramène à cinq unités chacun des postes no 19. Ainsi qu'il est mentionné dans l'affaire Bruce Starlight, précitée, d'importantes distinctions sont parfois requises lorsqu'on choisit une valeur selon des barèmes restreints tels que 2 - 3 pour le poste no 22a). J'accorde le poste no 22a) tel qu'il est présenté, à raison de trois unités par heure pour 9,8 heures. Le jugement n'autorisait rien pour le second avocat : je refuse le poste no 22b).

[45]            Le mémoire de dépens de l'intimée dans chacun des dossiers A-34-02 et A-398-02, présenté selon la somme de 9 244,48 $, est taxé et accordé à 7 043,49 $. Le mémoire de dépens de la demanderesse dans chacun des dossiers T-992-92, T-607-96, T-608-96 et T-610-96, présenté selon la somme de 285 633,42 $, est taxé et accordé selon la somme de 224 718,81 $.

        « Charles E. Stinson »        

Officier taxateur

Vancouver (C.-B.)

le 6 novembre 2003

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                       COUR FÉDÉRALE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                            T-992-92

INTITULÉ :                                           ALMECON INDUSTRIES LIMITED

- et -

ANCHORTEK LTD. et autres

LIEU DE L'AUDIENCE :                   TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                 LE 12 MAI 2003

MOTIFS DE LA TAXATION DES DÉPENS :        CHARLES E. STINSON

DATE DES MOTIFS :                        LE 6 NOVEMBRE 2003

COMPARUTIONS :

Henry Lue                                                POUR LA DEMANDERESSE

Jeremy E. Want                                       POUR LES DÉFENDERESSES

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Dimock Stratton Clarizio LLP                 POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

Smart & Biggar                                       POUR LES DÉFENDERESSES

Ottawa (Ontario)


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