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Date : 20030428

Dossier : IMM-2504-01

                                                                                                           Référence : 2003 CFPI 524

OTTAWA (ONTARIO), le 28 avril 2003

EN PRÉSENCE DE Monsieur le juge James Russell

ENTRE :

THANH VAN HUYNH

                                                                                                                                        demandeur

                                                                         - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire relative à la décision que l'agente des visas K. L. Tan (l'agente), de l'ambassade du Canada à Singapour, a prise en date du 28 mars 2001, dans laquelle elle a refusé la demande de résidence permanente au Canada du demandeur au motif qu'il ne satisfaisait pas à la définition d' « entrepreneur » donnée au paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration, DORS/78-172 (le Règlement).


Les faits

[2]                 Le demandeur est un citoyen du Vietnam, comme le sont également sa femme et ses cinq enfants. En juillet 2000, il a déposé une demande de résidence permanente dans la catégorie d'entrepreneur au Haut-commissariat du Canada à Singapour. Sa femme et ses enfants étaient inclus dans la demande.

[3]                 Le demandeur est engagé dans le développement immobilier et foncier au Vietnam depuis près de vingt ans et il a acquis des actions dans la Nhan Thien Company en mai 1999. L'épouse du demandeur s'occupe de la comptabilité de l'entreprise. Le demandeur a l'intention d'établir une société d'import-export à Toronto, d'abord pour l'exportation de matériaux de construction, comme du sable et du ciment, du Canada vers le Vietnam et d'autres pays de l'Asie du Sud-Est.

[4]                 Le 28 mars 2001, le demandeur a été interrogé par l'agente au Haut-commissariat du Canada à Singapour.

La décision faisant l'objet du contrôle judiciaire

[5]                 La décision de l'agente se trouve dans la lettre qu'elle a expédiée au demandeur en date du 28 mars 2001 et qui mentionne ce qui suit :

[traduction]                                                                                                                                                                                                                                                                          Étant donné que vous ne satisfaites pas à la définition d' « entrepreneur » , vous êtes donc dans la catégorie des personnes non admissibles au Canada énoncée à l'alinéa 19(2)d) de la Loi sur l'immigration de 1976.


[6]                 Elle a fourni les motifs suivants à l'appui de sa décision :

a)         Le demandeur a été incapable d'expliquer des aspects de base de ses entreprises, tant en ce qui concerne les finances qu'en ce qui concerne la gestion;

b)         Le demandeur a démontré peu de motivation ou d'initiative à l'égard de son projet de déménagement au Canada, en ce qu'il n'a pas effectué de recherche concernant la faisabilité de l'établissement de l'entreprise qu'il projette d'établir au Canada;

c)         Le manque de préparation et de connaissances du demandeur relativement aux pratiques commerciales et à la réglementation canadiennes ont confirmé qu'il n'avait pas les compétences pour établir une entreprise d'import-export ou toute autre entreprise importante économiquement au cas où son entreprise originale s'avérerait non viable.

La législation pertinente

[7]                 Les dispositions pertinentes du Règlement sont les suivantes :



2.(1) Dans le présent règlement,

[...]

« entrepreneur » désigne un immigrant

a) qui a l'intention et qui est en mesure d'établir ou d'acheter au Canada une entreprise ou un commerce, ou d'y investir une somme importante, de façon à contribuer de manière significative à la vie économique et à permettre à au moins un citoyen canadien ou résident permanent, à part l'entrepreneur et les personnes à sa charge, d'obtenir ou de conserver un emploi, et

b) qui a l'intention et est en mesure de participer activement et régulièrement à la gestion de cette entreprise ou de ce commerce;

23.1(1) Les entrepreneurs et les personnes à leur charge constituent une catégorie réglementaire d'immigrants à l'égard desquels il est obligatoire d'imposer les conditions suivantes au droit d'établissement :

a) dans un délai d'au plus deux ans après la date à laquelle le droit d'établissement lui est accordé, l'entrepreneur établit ou achète au Canada une entreprise ou un commerce, ou y investit une somme importante, de façon à contribuer d'une manière significative à la vie économique et à permettre à au moins un citoyen canadien ou un résident permanent, à l'exclusion de lui-même et des personnes à sa charge, d'obtenir ou de conserver un emploi;

b) dans un délai d'au plus deux ans après la date à laquelle le droit d'établissement lui est accordé, l'entrepreneur participe activement et régulièrement à la gestion de l'entreprise ou du commerce visé à l'alinéa a);

c) dans un délai d'au plus deux ans après la date à laquelle le droit d'établissement lui est accordé, l'entrepreneur fournit, aux dates, heures et lieux indiqués par l'agent d'immigration, la preuve qu'il s'est efforcé de se conformer aux conditions imposées aux termes des alinéas a) et b);

d) dans un délai d'au plus deux ans après la date à laquelle le droit d'établissement lui est accordé, l'entrepreneur fournit, à la date, à l'heure et au lieu indiqués par l'agent d'immigration, la preuve qu'il s'est conformé aux conditions imposées aux termes des alinéas a) et b).

2.(1) In these Regulations,

[...]

"entrepreneur" means an immigrant

(a) who intends and has the ability to establish, purchase or make a substantial investment in a business or commercial venture in Canada that will make a significant contribution to the economy and whereby employment opportunities will be created or continued in Canada for one or more Canadian citizens or permanent residents, other than the entrepreneur and his dependants, and

(b) who intends and has the ability to provide active and on-going participation in the management of the business or commercial venture;

23.1(1) Entrepreneurs and their dependants are prescribed as a class of immigrants in respect of which landing shall be granted subject to the condition that, within a period of not more than two years after the date of an entrepreneur's landing, the entrepreneur

(a) establishes, purchases or makes a substantial investment in a business or commercial venture in Canada so as to make a significant contribution to the economy and whereby employment opportunities in Canada are created or continued for one or more Canadian citizens or permanent residents, other than the entrepreneur and the entrepreneur's dependants;

(b) participates actively and on an on-going basis in the management of the business or commercial venture referred to in paragraph (a);

(c) furnishes, at the times and places specified by an immigration officer, evidence of efforts to comply with the terms and conditions imposed pursuant to paragraphs (a) and (b); and

(d) furnishes, at the time and place specified by an immigration officer, evidence of compliance with the terms and conditions imposed pursuant to paragraphs (a) and (b).



[8]                 La disposition pertinente de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 prévoit ce qui suit :


19. (2) Appartiennent à une catégorie non admissible les immigrants et, sous réserve du paragraphe (3), les visiteurs qui_:

[...]

d) soit ne se conforment pas aux conditions prévues à la présente loi et à ses règlements ou aux mesures ou instructions qui en procèdent, soit ne peuvent le faire.

19. (2) No immigrant and, except as provided in subsection (3), no visitor shall be granted admission if the immigrant or visitor is a member of any of the following classes:

[...]

(d) persons who cannot or do not fulfil or comply with any of the conditions or requirements of this Act or the regulations or any orders or directions lawfully made or given under this Act or the regulations.


La question en litige

[9]                 Est-ce que l'agente des visas a commis une erreur en rejetant la demande de résidence permanente au Canada du demandeur?

Les arguments

Le demandeur

[10]            Le demandeur soutient que l'agente lui a refusé une entrevue complète et équitable en ne lui donnant pas une occasion valable de démontrer ses compétences d'entrepreneur. L'agente a omis de discuter avec le demandeur de ses entreprises d'aménagement immobilier ou foncier ou du projet d'hôtel sur lequel il travaillait alors.


[11]            Le demandeur soutient également que l'agente a omis d'apprécier le fait qu'une bonne partie de son expérience d'entrepreneur, ainsi que les compétences qu'il a acquises avec le temps, sont transférable à l'environnement commercial canadien. Le demandeur invoque la décision Yazdanian c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 411, à l'appui de sa cause. L'agente aurait dû examiner tous les antécédents du demandeur en matière commerciale pour déterminer avec soin s'il possédait les compétences et habiletés entrepreneuriales nécessaires pour satisfaire à la définition d' « entrepreneur » .

[12]            En ce qui a trait aux doutes de l'agente concernant les dossiers financiers de la Nhan Thien Company, le demandeur soutient que l'agente aurait dû lui demander de présenter un rapport d'un comptable pour justifier ou expliquer les dossiers.

[13]            En fin de compte, le demandeur soutient que l'approche de l'agente à l'égard de sa demande n'était pas conforme au paragraphe 23.1(1) du Règlement, lequel donne deux ans à un entrepreneur pour qu'il s'établisse, achète ou investisse une somme importante au Canada. Cet article devrait guider l'agent des visas dans le processus d'entrevue et d'appréciation et devrait aussi servir de clé d'interprétation pour la définition d' « entrepreneur » qui se trouve au paragraphe 2(1).


[14]            En l'espèce, l'approche de l'agente des visas ne respectait pas l'intention du paragraphe 23.1(1) en ce qu'elle était beaucoup trop étroite et qu'elle mettait trop l'accent sur les compétences de gestion du demandeur à l'égard de l'entreprise projetée plutôt que sur ses qualifications entrepreneuriales en général. Le demandeur invoque particulièrement la décision Yazdanian, précitée, à l'appui des énoncés suivants :

a)         Le demandeur n'a pas besoin d'être engagé dans les activités d'opération quotidiennes de l'entreprise projetée pour être un participant à la gestion;

b)         Si un agent des visas a un doute précis qui pourrait avoir un effet défavorable sur la demande, le principe d'équité exige que le demandeur ait l'occasion de dissiper ce doute;

c)         Des éléments de preuve clairs d'activités et de réussites entrepreneuriales antérieures constituent l'exigence clé dans le cadre de la catégorie d'entrepreneur et le demandeur a clairement les qualités requises.

Le défendeur

[15]            Le défendeur soutient que l'agente n'a pas commis de faute dans son appréciation de la demande présentée par le demandeur en tant qu'entrepreneur.


[16]            Le défendeur soutient que le fait qu'un demandeur a ou non la capacité d'offrir une participation active et continue dans la gestion d'une entreprise, tel que le prévoit l'alinéa 2(1)b) du Règlement, n'est pas pertinent si on conclut qu'il n'a pas la capacité de s'établir, d'acheter une entreprise ou d'y investir une somme importante comme le prévoit l'alinéa 2(1)a). Le défendeur invoque Chiu c. Canada (Ministre de la Citoyeneté et de l'Immigration), [1996] A.C.F. no 1460. Le fait que le demandeur soit en affaires au Vietnam depuis vingt ans ne dissipe pas les doutes de l'agente.

[17]            Le défendeur soutient que le demandeur avait le fardeau de convaincre l'agente qu'il avait effectué une recherche approfondie concernant le commerce ou l'industrie qu'il planifiait de continuer au Canada et qu'il contribuerait de manière importante à l'économie. Le défendeur invoque les décisions Dhamee c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] A.C.F. no 109; Majeed c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 742; Saadat c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] A.C.F. no 39.

[18]            Le défendeur ajoute que l'agente a donné l'occasion au demandeur de lui montrer les plans de l'hôtel qu'il construisait à Dalat ainsi que des renseignements concernant l'évaluation des propriétés. Des copies des documents pertinents ont été conservées au dossier.


[19]            Le défendeur soutient que la prise en compte du manque d'expérience d'un demandeur dans les pratiques commerciales canadiennes comme motif pour refuser un visa au demandeur ne constitue pas une erreur en autant que le manque d'expérience n'est pas l'unique motif du refus par l'agent d'accorder un visa. En l'espèce, l'agente n'a pas fondée sa décision uniquement sur le manque d'expérience commerciale du demandeur au Canada. Le demandeur ne s'était tout simplement pas bien préparé à l'entrevue et il n'avait pas pu répondre aux questions pourtant bien simples posées par l'agente.

[20]            Le demandeur a dépeint un futur fait d'espoir plutôt que de faire la démonstration d'un projet viable. Le demandeur a le fardeau d'établir sa cause et il a eu l'occasion de le faire. En fin de compte, il n'a tout simplement pas convaincu l'agente qu'il correspondait à la définition d'entrepreneur tel que l'exige le Règlement.

[21]            En ce qui a trait à la prétention du demandeur selon laquelle l'agente aurait dû lui demander de présenter le rapport d'un comptable pour justifier ou expliquer les dossiers financiers de la Nhan Thien Company, le défendeur soutient que la question de savoir si un demandeur a la capacité de gérer une entreprise ou de participer à la gestion d'une entreprise, comme le demande le Règlement, est une décision que l'agent doit prendre en se basant sur l'ensemble des éléments de preuve alors à sa disposition. Le défendeur invoque la décision Yeung c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 792.

[22]            En fin de compte, le défendeur soutient que la norme de contrôle applicable aux décisions discrétionnaires des agents des visas est la même que celle énoncée dans l'arrêt Maple Lodge Farms Ltd. c. Canada, [1982] 2 R.C.S. 2. Le défendeur invoque également l'arrêt To c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1996] A.C.F. no 696.


Analyse

La norme de contrôle

[23]            Comme le soutient le défendeur, la norme de contrôle applicable aux décisions discrétionnaires des agents des visas a été énoncée par M. le juge McIntyre dans l'arrêt Maple Lodge Farms Ltd., précité, à la page 7 :

C'est aussi une règle bien établie que les cours ne doivent pas s'ingérer dans l'exercice qu'un organisme désigné par la loi fait d'un pouvoir discrétionnaire simplement parce que la cour aurait exercé ce pouvoir différemment si la responsabilité lui en avait incombé. Lorsque le pouvoir discrétionnaire accordé par la loi a été exercé de bonne foi et, si nécessaire, conformément aux principes de justice naturelle, si on ne s'est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères à l'objet de la loi, les cours ne devraient pas modifier la décision.

[24]            Dans l'arrêt To, précité, la Cour d'appel fédérale a adopté cette norme de contrôle pour les décisions discrétionnaires des agents des visas à l'égard des demandes d'immigration.

Le fond de l'affaire

[25]            Le demandeur soutient que l'agente lui a refusé une entrevue complète et équitable en ne lui donnant pas une occasion valable de démontrer ses compétences d'entrepreneur. Toutefois, il ressort clairement de l'affidavit de l'agente, de même que des notes au STIDI qu'elle a discuté à fond avec le demandeur de son entreprise actuelle au Vietnam de même que de son projet d'entreprise au Canada. Le demandeur a eu l'occasion de dissiper ses doutes et de déposer des documents concernant ses projets au Vietnam. Des copies de ces documents ont été conservées au dossier.


[26]            Le demandeur ajoute que l'agente a omis d'apprécier le fait qu'une bonne partie de son expérience d'entrepreneur, ainsi que les compétences qu'il a acquises avec le temps, sont transférable à l'environnement commercial canadien et qu'elle aurait dû tenir compte de l'ensemble de ses antécédents en entreprise. L'agente a toutefois tenu compte de l'expérience du demandeur en affaires, de même que de ses projets actuels, comme elle l'a expliqué dans la première page de sa lettre :

[traduction]                                                                                                                                                                                                                                                                           Bien que vous puissiez avoir l'intention de participer activement et régulièrement à une entreprise au Canada, vous ne satisfaites pas à la définition d'entrepreneur, en raison du fait que les renseignements fournis dans votre demande et dont il a été question en entrevue n'ont pas démontré que vous en aviez les compétences. Cette conclusion a été tirée à la suite de la discussion que nous avons eue au sujet de vos fonctions et responsabilités dans vos postes tant passés qu'actuel. Il m'est apparu clairement que votre expérience et votre expertise ne me convainquent pas suffisamment que vous avez les compétences pour établir et gérer une entreprise qui constituerait un apport économique important au Canada. (Non souligné dans l'original.)

[27]            Étant donné les renseignements contenus dans l'affidavit de l'agente, les notes au STIDI et les documents dont elle disposait, il n'était pas déraisonnable (encore moins manifestement déraisonnable) pour l'agente de conclure que le demandeur n'avait pas les qualités requises pour établir une entreprise au Canada. Le demandeur a été incapable d'expliquer les incohérences dans les finances de la Nhan Thien Company ou de donner des renseignements concernant les impôts de la société. Il a aussi démontré un manque de connaissances du marché canadien et il a éludé les questions de l'agente à ce sujet. Le demandeur a affirmé qu'il passerait de six mois à un an au Canada pour se familiariser avec le marché et les lois pertinentes.


[28]            L'agent a certainement le pouvoir de demander au demandeur de démontrer qu'il possède des notions de base du marché qu'il a l'intention d'exploiter, puisque qu'il s'agit d'une indication de sa capacité de fonctionner au sein de ce marché en tant qu'entrepreneur. Voir Chiu, précitée, aux paragraphes 7 et 8; Dhamee, précitée, au paragraphe 8; Majeed, précitée, au paragraphe 11. Comme M. le juge O'Keefe l'explique dans la décision Saadat, précitée, au paragraphe 18, il est également important pour un demandeur de convaincre l'agent des visas que le projet d'entreprise sera viable :

Monsieur le juge Décary a fait les remarques suivantes dans l'arrêt Bakhshaee, [45 Imm. L.R. (2d) 196], à la page 197 :

L'agent des visa a expliqué qu'à l'entrevue, le demandeur a été vague en ce qui concernait son entreprise projetée et la viabilité de celle-ci. Le demandeur ne savait pas s'il s'exposerait à la concurrence, n'avait aucune idée des loyers actuels ni des salaires au Canada, n'avait fait aucune recherche sur les clients éventuels, attendrait jusqu'à son admission au Canada avant de faire des enquêtes sur les besoins du pays et avait fait peu de recherche, s'il en était, sur la faisabilité de l'établissement de son entreprise projetée.

Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 121 F.T.R. 39, se rapportent, dans une très grande mesure, à l'enquête menée par un agent des visas. Ma collègue s'exprime en ces termes à la page 42 :

            

le texte de la définition précise que la viabilité éventuelle est une caractéristique essentielle des propositions d'un requérant. Aucun agent ne peut être obligé de décider si une entreprise peut faire une contribution économique et employer des gens à moins que, nécessairement, l'agent conclue également que l'entreprise a une chance réaliste de succès.


Il ne fait pas de doute que le demandeur a acquis une expérience considérable en affaires dans son pays d'origine et qu'il a connu du succès au fil des ans; cependant, il doit tout de même satisfaire aux exigences du Règlement afin de pouvoir immigrer au Canada. La définition d' « entrepreneur » que contient le Règlement prévoit que le demandeur doit avoir l'intention d'établir ou d'acheter au Canada une entreprise ou un commerce, ou d'y investir une somme importante, « de façon à contribuer de manière significative à la vie économique et à permettre à au moins un citoyen canadien ou résident permanent [...] d'obtenir ou de conserver un emploi » . Il me semble que l'agent des visas doit estimer que l'entreprise paraît viable avant de trancher la question de savoir si l'entreprise projetée contribuera à la vie économique du Canada ou créera des possibilités d'emploi. L'agent des visas doit disposer de renseignements au sujet de l'entreprise projetée afin d'en déterminer la viabilité. Pour satisfaire à la définition d'entrepreneur, le demandeur doit démontrer à l'agent des visas que son projet contribuerait de manière significative à la vie économique canadienne ou créerait des possibilités d'emploi. En l'espèce, l'agente des visas n'a pas conclu que le demandeur l'avait convaincue de cela. Il s'agit-là d'une des conclusions raisonnables que l'agente des visas pouvait tirer. Il n'incombe pas à notre Cour de substituer son opinion à celle de l'agente des visas, pourvu que la décision satisfasse au critère que la Cour suprême du Canada a énoncé dans l'arrêt Maple Lodge Farms c. Gouvernement du Canada[...]

[29]            L'agente mentionne, aux paragraphes 12 et 13 de son affidavit, que le demandeur ne possède pas les notions de base du marché canadien qui sont nécessaires à l'établissement d'une entreprise viable. L'affirmation du demandeur qu'il a l'intention de sa familiariser avec le marché et les lois pertinentes après avoir déménagé au Canada ne suffit pas s'il n'a pas d'abord démontré comment il entend établir une entreprise viable ici.

[30]            En ce qui a trait aux doutes de l'agente concernant les dossiers financiers de la Nhan Thien Company, le demandeur soutient qu'on aurait dû lui demander de présenter le rapport d'un comptable pour justifier ou expliquer les dossiers. Il revenait toutefois au demandeur de convaincre l'agente qu'il satisfaisait à la définition d' « entrepreneur » . L'agente leur a donné, à sa femme et à lui, l'occasion d'expliquer les incohérences dans les dossiers, mais ils ont été incapables de le faire, malgré le fait que la femme du demandeur ait été responsable des livres de la société. L'agente avait donc le droit de prendre la décision qu'elle a prise vu les éléments de preuve dont elle disposait.


[31]            Vu les renseignements dont disposait l'agente au moment de l'entrevue, sa décision de rejeter la demande du demandeur n'était pas déraisonnable. Le demandeur ne l'a pas convaincue qu'il satisfaisait aux critères d'admission en tant qu'entrepreneur et, après examen du dossier, je n'ai trouvé aucune erreur susceptible de révision dans la décision rendue par l'agente. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                           ORDONNANCE

LA COUR PAR LES PRÉSENTES ORDONNE :

1.         La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.         Aucune question ne sera certifiée.

                                                                                       « James Russell »                 

                                                                                                             Juge                          

Traduction certifiée conforme

Christian Laroche, LL.B.


            COUR FÉDÉRALE DU CANADA

           Avocats inscrits au dossier

DOSSIER :                                            IMM-2504-01

INTITULÉ :                                           THANH VAN HUYNH

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L'IMMIGRATION

défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                                TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                              LE 7 AVRIL 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE RUSSELL

DATE DES MOTIFS :           LE 28 AVRIL 2003

COMPARUTIONS :              Mark Rosenblatt

Pour le demandeur

Michael Butterfield

Pour le défendeur

                                                                                                                   

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :      

Mark Rosenblatt

                                             Avocat

335, rue Bay, bureau 1000 Toronto (Ontario)

M5H 2R3

Pour le demandeur                               

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Pour le défendeur


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

            Date :20030428

   Dossier : IMM-2504-01

ENTRE :

THANH VAN HUYNH

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

                      défendeur

                                                           

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                            


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