Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20030227

Dossier : IMM-210-02

Toronto (Ontario), le jeudi 27 février 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE LINDEN

ENTRE :

IGOR POSTOLATI

                                                                                                                                                      demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                        défendeur

                                                                                   

                                                                     ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est rejetée, sans frais.

                                                                                                                                             « A.M. Linden »                 

                                                                                                                                                                 Juge                          

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


Date : 20030227

Dossier : IMM-210-02

Référence neutre : 2003 CFPI 251

ENTRE :

                                                                 IGOR POSTOLATI

                                                                                                                                                      demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                        défendeur

                                                                                   

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LINDEN (agissant d'office)

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire présentée par Igor Postolati (le demandeur) qui vise la décision rendue par Diane Caldwell (l'agente des visas) de l'ambassade du Canada à Moscou, en Russie. Par une lettre datée du 27 novembre 2001, l'agente des visas a refusé la demande d'immigration au Canada présentée par le demandeur en tant qu'entrepreneur.

[2]                 Depuis 1992, le demandeur exploite en Moldavie une entreprise qui vend et distribue des pièces de véhicules automobiles européens, américains et japonais, et qui fait l'entretien et la réparation de tels véhicules. L'entreprise, qui a un chiffre d'affaires de plus de 1,9 M$, génère des profits importants.

[3]                 En septembre 2000, le demandeur a présenté une demande d'immigration au Canada en tant qu'entrepreneur. Avec sa demande, il a déposé un projet d'entreprise pour un atelier de réparations de véhicules automobiles.

[4]                 Le demandeur a utilisé les services d'un interprète lors de son entrevue tenue le 20 novembre 2001 par l'agente des visas. Au cours de son entrevue, le demandeur n'a pas démontré une grande connaissance du marché des stations-service au Canada. Par conséquent, l'agente des visas a exprimé des préoccupations à l'égard du fait que le demandeur ne semblait pas avoir fait beaucoup de recherches par lui-même afin d'établir s'il pourrait exploiter l'entreprise qu'il avait l'intention d'exploiter et de quelle façon il le ferait. En réponse à ces préoccupations, le demandeur a déclaré que, pendant qu'il était à Toronto, il avait visité de nombreux garages qu'il pourrait acheter. Cependant, le demandeur semblait avoir peu des renseignements concrets relativement à des stations-service qui auraient été à vendre.   

[5]                 Le paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, (le Règlement) définit un entrepreneur comme un immigrant :


a) qui a l'intention et qui est en mesure d'établir ou d'acheter au Canada une entreprise ou un commerce, ou d'y investir une somme importante, de façon à contribuer de manière significative à la vie économique et à permettre à au moins un citoyen canadien ou résident permanent, à part l'entrepreneur et les personnes à sa charge, d'obtenir ou de conserver un emploi, et

(a) who intends and has the ability to establish, purchase or make a substantial investment in a business or commercial venture in Canada that will make a significant contribution to the economy and whereby employment opportunities will be created or continued in Canada for one or more Canadian citizens or permanent residents, other than the entrepreneur and his dependants, and

b) qui a l'intention et est en mesure de participer activement et régulièrement à la gestion de cette entreprise ou de ce commerce;

(b) who intends and has the ability to provide active and on-going participation in the management of the business or commercial venture;

[6]                 L'agente des visas a conclu que le demandeur ne remplissait pas les conditions de la définition pour les motifs suivants :

[TRADUCTION]

En me fondant sur la description que vous faites des recherches que vous avez effectuées à l'égard de votre projet d'entreprise, je ne suis pas convaincue que vous seriez capable d'établir ou d'acheter une entreprise ou un commerce au Canada ou d'y investir une somme importante. Vous n'avez pu démontrer qu'une connaissance limitée ou qu'une absence de connaissance de la situation d'ensemble du marché canadien, de la clientèle éventuelle et de la concurrence commerciale pour l'entreprise que vous voulez exploiter au Canada, ce qui démontre cette absence de capacité.

[7]                 M. Sherman, de façon toujours aussi approfondie et sérieuse, a fait valoir que l'agente des visas a commis une erreur de droit et qu'elle s'est fait une fausse idée de la preuve d'une telle manière que l'erreur commise est susceptible de contrôle.


[8]                 À l'égard de la définition d'entrepreneur, M. Sherman a fait valoir que l'agente des visas a de façon erronée utilisé le mot anglais « would » , donnant à entendre qu'elle parlait de la capacité actuelle du demandeur, au lieu d'utiliser le langage de la Loi qui vise l'établissement futur d'une entreprise et non une entreprise en particulier. À mon avis, l'agente des visas n'a pas commis une erreur de droit et elle a correctement compris la définition.

[9]                 À l'égard de la norme de contrôle, une décision prise par un agent des visas, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, sur la question de savoir si le demandeur est un entrepreneur suivant la définition du Règlement ne devrait pas faire l'objet d'un contrôle simplement parce que la Cour aurait pu tirer une conclusion différente. Le défendeur fait valoir que les décisions, prises en vertu du pouvoir discrétionnaire, qui sont fondées sur des facteurs non pertinents ou qui ont été prises arbitrairement ou illégalement sont les seules décisions qui peuvent faire l'objet d'un contrôle judiciaire.

[10]            Notre jurisprudence a de façon invariable établi que les cours doivent exercer une retenue à l'égard du pouvoir discrétionnaire exercé par les agents des visas. À titre d'exemple, les arrêts Maple Lodge Farms Limited c. Le gouvernement du Canada et al., [1982] 2 R.C.S. 2, et To c. Canada, [1996] A.C.F. no 696 (C.A.F.), appuient le principe selon lequel les cours ne devraient pas s'ingérer à l'égard du pouvoir discrétionnaire prévu par la loi qu'un agent des visas exerce de bonne foi et conformément aux principes de justice naturelle s'il ne s'est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères.

[11]            Le demandeur prétend que l'agente des visas a omis de prendre en compte les facteurs ci-après énumérés ou ne leur a pas accordé l'importance appropriée :


·           le demandeur a établi et exploité avec succès une entreprise pendant un certain nombre d'années en Moldavie;

·           lors d'une visite récente à Toronto, il a assisté à un séminaire organisé par le gouvernement à l'intention des immigrants qui tentent d'exploiter des entreprises au Canada et il a visité un certain nombre de garages où il a parlé aux employés;

·           il a des avoirs d'une valeur nette de plus d'un million de dollars (canadiens);

·           il a procédé à l'enregistrement d'une société en Ontario et il a ouvert un compte bancaire;

·           il parle anglais assez couramment;

·           il a une fille de 18 ans qui est canadienne et qui vit au Canada;

·           il est associé à une société qui importe et vend des pièces canadiennes d'automobiles.

[12]            Le demandeur soumet, notamment, que l'agente des visas a commis une erreur lorsqu'elle a omis d'accorder suffisamment d'importance à l'expérience qu'il possédait relativement à l'exploitation d'une entreprise en Moldavie. En outre, le demandeur soumet que l'agente des visas a commis une erreur lorsqu'elle a omis de prendre en compte le fait qu'il avait deux ans pour établir une entreprise au Canada. Le demandeur affirme que, lors de l'entrevue, il a répondu aux questions de l'agente des visas d'une manière qui établissait clairement qu'il remplit les conditions de la définition d' « entrepreneur » .


[13]            Le défendeur soumet que l'agente des visas a examiné en détail l'expérience antérieure du demandeur à l'égard de l'exploitation d'une entreprise et qu'elle avait le pouvoir discrétionnaire approprié pour décider de l'importance qui devait être accordée à la preuve relative à cette expérience.

[14]            Le demandeur prétend que l'agente des visas n'a pas tenu compte de l'article 23.1 du Règlement qui prévoit qu'un entrepreneur admis doit remplir des conditions à l'égard du droit d'établissement, comprenant une période de deux ans pour l'établissement de son entreprise, mais le défendeur soumet que dans la décision Chiu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 121 F.T.R. 39, Madame le juge Simpson a déclaré qu'un agent des visas doit quand même être convaincu au moment de l'entrevue, même si une évaluation de suivi de l'entreprise du demandeur sera faite par la suite, que le demandeur remplit les conditions pour être considéré comme un entrepreneur.

[15]            La jurisprudence établit clairement qu'une myriade de facteurs doivent être pris en compte pour établir si un immigrant éventuel remplit les conditions de la définition d'entrepreneur et la viabilité de l'entreprise est l'un de ces facteurs (voir la décision Saadat c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] A.C.F. no 39 (C.F. 1re inst.). La Cour fédérale a en outre déclaré que l'insuffisance de recherches par un immigrant éventuel peut empêcher que soit tirée une conclusion favorable à l'égard de la viabilité de l'entreprise (voir les décisions Chiu c.Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 35 Imm. L.R. (2d) 281 (C.F. 1re inst.), et Bakhshaee c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1998), 45 Imm. L.R. (2d) 196 (C.F. 1re inst.)).

[16]            Compte tenu des paramètres d'une telle demande de contrôle judiciaire, il n'appartient pas à la Cour de refaire l'enquête effectuée par l'agente des visas. Je ne peux pas conclure, en me fondant sur la preuve contenue au dossier, qu'il était déraisonnable pour l'agente des visas de tirer une conclusion selon laquelle le demandeur n'est pas un entrepreneur suivant la définition du paragraphe 2(1) du Règlement.

[17]            La présente demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée, sans frais.

                                                                                         « A.M. Linden »             

                                                                                                             Juge                      

Toronto (Ontario)

Le 27 février 2003

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

Avocats inscrits au dossier

DOSSIER :                                            IMM-210-02

INTITULÉ :                                           IGOR POSTOLATI

                                                                                                  demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L'IMMIGRATION

                                                                                                    défendeur

DATE DE L'AUDIENCE :                 LE JEUDI 27 FÉVRIER 2003

LIEU DE L'AUDIENCE :                   TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE LINDEN (agissant d'office)

DATE DES MOTIFS :                        LE JEUDI 27 FÉVRIER 2003

COMPARUTIONS :

Irvin Sherman                                                                                  Pour le demandeur

Gary L. Segal

Stephen H. Gold                                                                             Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Irvin H. Sherman, c.r.                                                                     Pour le demandeur           

Gary L. Segal

255 Duncan Mill Road

Bureau 208

Don Mills (Ontario)

M3B 3H9

Morris Rosenberg                                                                           Pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                   Date : 20030227

          Dossier : IMM-210-02

ENTRE :

IGOR POSTOLATI

                                             demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                              défendeur

                                                   

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                   

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.