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Date : 20030401

Dossier : IMM-2061-02

Référence neutre : 2003 CFPI 389

Toronto (Ontario), le mardi 1er avril 2003

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE SNIDER

ENTRE :

JIAN WU

                                                                                                                                                      demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                        défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE


[1]              M. Jian Wu (le demandeur), un citoyen de la République populaire de Chine (la Chine), est arrivé au Canada le 31 décembre 2000 en tant que membre d'une délégation commerciale et il a revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention. Un tribunal de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté sa revendication dans une décision datée du 28 mars 2002. Il demande maintenant le contrôle judiciaire de cette décision.

Contexte

[2]              Le demandeur a notamment présenté les arguments suivants à la Commission.

·            Il a prétendu craindre avec raison d'être persécuté en raison de ses opinions politiques, comme il était un dissident au début des années 1980. Sa dissidence lui a valu d'être arrêté en 1981, prétend-il, ainsi qu'en 1983, alors qu'il a été détenu, interrogé, victime de mauvais traitements et condamné à séjourner dans un camp de travail.

·            Il prétend qu'une fois sorti du camp de travail, il a été placé sous surveillance.

·            En 1999, il a commencé à exprimer des opinions favorables au Falun Gong, ce qui lui a valu des menaces de la part des autorités.


[3]        La crédibilité a été la question déterminante dans cette revendication. La Commission a conclu que le témoignage du demandeur était ni fiable ni crédible, en raison de contradictions, d'invraisemblances et d'omissions dont il était entaché. En plus d'être incertaine de l'identité du demandeur, en résumé, la Commission ne croyait pas que les autorités chinoises l'avaient détenu parce qu'il aurait exprimé à l'adolescence des opinions antigouvernementales. La Commission a conclu qu'aucune preuve crédible ou digne de foi n'étayait la prétention du demandeur selon laquelle il était un réfugié au sens de la Convention.

Questions en litige

[4]        On peut énoncer comme suit la question soulevée par le demandeur :

1.         Les conclusions de fait et quant à la crédibilité de la Commission étaient-elles manifestement déraisonnables?

Analyse

[5]        Je rejetterais la présente demande pour les motifs que je vais maintenant énoncer.


[6]        Le demandeur soutient que la Commission a mal interprété la preuve dont elle était saisie et a tiré des conclusions de fait erronées, ce qui a donné lieu à des inférences déraisonnables relativement à des éléments clés de sa revendication. La Commission a tiré nombre de ses conclusions quant à la crédibilité en se fondant sur ces conclusions de fait erronées. Le demandeur prétend qu'il s'agit dans tous ces cas d'erreurs susceptibles de révision (Moagi c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1986] A.C.F. n ° 326 (C.A.) (QL); Attakora c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1989] A.C.F. n ° 444 (C.A.) (QL); Madelat c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] A.C.F. n ° 49 (C.A.) (QL); Tung c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] A.C.F. n ° 292 (C.A.) (QL); Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) c. Satiacum, [1989] A.C.F. n ° 505 (C.A.) (QL)).

[7]        Le demandeur soutient que la Commission a également commis une erreur en omettant de prendre en compte des éléments de preuve pertinents (Banque Canadienne Impériale de Commerce c. Rifou, [1986] 3 C.F. 486 (C.A.); Padilla c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] A.C.F. n ° 71 (C.A.) (QL)) et en fondant sa décision sur des facteurs non pertinents (Mehe c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1990] A.C.F. n ° 967 (C.A.) (QL)). Le demandeur prétend en outre que la Commission a commis une erreur en omettant de prendre en compte la totalité de la preuve non contestée dont elle était valablement saisie.

[8]        Il faut faire preuve de beaucoup de retenue à l'endroit des décisions de la Section du statut de réfugié se fondant sur une conclusion quant à la crédibilité, puisque la Section a l'avantage d'entendre la déposition des témoins. Par suite, la norme de contrôle judiciaire qu'il convient d'appliquer est celle de la décision manifestement déraisonnable, ce qui veut dire que les conclusions quant à la crédibilité doivent être étayées par la preuve et ne pas être tirées de façon arbitraire ou sur le fondement de conclusions de fait erronées (Aguebor c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1993] A.C.F. n ° 732, au paragraphe 4 (C.A.)).


[9]         J'ai examiné avec soin le dossier et je suis convaincue que la décision de la Commission n'était pas manifestement déraisonnable.

[10]       Dans ses motifs écrits, la Commission a expliqué en termes clairs et non ambigus pourquoi elle ne croyait pas le témoignage du demandeur. Il était loisible à la Commission de tirer des conclusions défavorables quant à la crédibilité en raison de contradictions et d'incohérences dans le récit du demandeur et entre ce récit et les autres éléments de preuve dont elle était saisie (Aguebor, précitée), et elle a tiré de telles conclusions.

[11]       Il y avait matière pour la Commission, au vu des réponses vagues et évasives du demandeur, de tirer les conclusions qui ont été les siennes relativement au visa de sortie, à l'exigence de déclaration ainsi qu'aux permis de sortie du Sri Lanka.

[12]       Je ne suis pas d'accord avec les prétentions du demandeur selon lesquelles la Commission a tiré des conclusions déraisonnables en se fondant sur des spéculations. À la lumière particulièrement de ses conclusions relatives à la crédibilité du demandeur, il était raisonnable pour la Commission de conclure comme elle l'a fait au sujet de l'attestation d'études frauduleuse, du passeport chinois du demandeur et de son absence d'activités politiques au Canada.


[13]       La Commission n'est pas tenue d'accepter toutes les explications qui lui sont offertes. Pour ce qui est de ses conclusions relativement au défaut du demandeur de présenter l'original des documents à l'audience, au temps qu'il a mis pour quitter la Chine et à l'absence de sa carte de résident, je suis convaincue que la Commission a pris en compte de manière raisonnable les explications du demandeur. La Commission n'a tout simplement pas été persuadée par ces explications.

[14]      Malgré les arguments contraires du demandeur, je ne puis conclure que la Commission a tiré une conclusion défavorable quant à la crédibilité en tenant compte de facteurs non pertinents.

[15]       Le demandeur soutient, finalement, que la Commission a conclu qu'il était un faux revendicateur uniquement parce qu'il était membre d'une délégation commerciale de quatre personnes, et que ces quatre personnes ont revendiqué le statut de réfugié. Je suis convaincue que la Commission n'a pas omis de prendre en compte la totalité de la preuve et a interprété et appliqué correctement Wei c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. n ° 2143 (1re inst.) (QL).

[16]      Dans Wei, précitée, le juge Simpson a déclaré, au paragraphe 9 : « à mon avis, la Commission pouvait conclure que la revendication du statut de réfugié du demandeur n'était pas fondée étant donné qu'il faisait partie d'une délégation dont tous les membres ont revendiqué ce statut » . Le juge Simpson a également conclu que les contradictions admises dans les déclarations du demandeur dans cette affaire auraient suffi à elles seules à justifier la conclusion défavorable que la Commission a tirée en matière de crédibilité.


[17]       Je suis d'avis que la Commission a interprété et appliqué Wei correctement. En outre, les nombreuses contradictions, incohérences et invraisemblances dans le récit du demandeur suffisaient à elles seules à justifier la conclusion défavorable quant à la crédibilité de la Commission. Celle-ci, par suite, n'a pas rejeté la revendication du demandeur uniquement parce qu'il était membre d'une délégation commerciale bidon, mais plutôt après avoir pris en compte la totalité de la preuve dont elle était saisie.

[18]       Ni l'une ni l'autre partie ne propose la certification d'une question grave de portée générale.

ORDONNANCE

La Cour ordonne le rejet de la présente demande. Aucune question n'est certifiée.

                                                                                                                                        « Judith A. Snider »            

                                                                                                                                                                 Juge                         

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                            IMM-2061-02

INTITULÉ :                                           JIAN WU

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                   TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                 LE MARDI 1er AVRIL 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                        LE JUGE SNIDER

DATE DES MOTIFS ET DE

L'ORDONNANCE :              LE MARDI 1er AVRIL 2003

COMPARUTIONS :

M. John Lee                                                                                   Pour le demandeur

M. David Tyndale                                                                          Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

John Lee                                                                                         Pour le demandeur

Avocat

5, promenade Fairview Mall

Bureau 365

North York (Ontario)

M2J 2Z1

Morris Rosenberg                                                                          Pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                                              Date : 20030401

                                                  Dossier : IMM-2061-02

ENTRE :

JIAN WU

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                                                             

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

                                                                             

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