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                                                                                                                                 Date : 20050221

                                                                                                                    Dossier : IMM-8869-03

                                                                                                                  Référence : 2005 CF 270

ENTRE :

                                                      ERVIN ROLAND KOVACS

                                                        SZIMONETTA KOVACS

                                                                                                                                        demandeurs

                                                                             et

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PHELAN

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES

[1]                Les demandeurs prétendent que la recevabilité de leurs demandes devrait être régie par l'ancienne Loi sur l'immigration parce que, si un agent d'immigration n'avait pas commis une erreur juridique, il aurait été statué sur leurs demandes avant l'entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR).

CONTEXTE


[2]                Le demandeur et la demanderesse sont des ressortissants hongrois qui sont venus au Canada comme visiteurs en septembre 1997 et en juin 1998 respectivement. Comme leurs demandes d'asile et leurs demandes présentées au Canada et fondées sur des raisons d'ordre humanitaire ont été rejetées, ils ont été expulsés le 2 août 2001 avec leur fils né au Canada. Il a donc été interdit aux demandeurs de revenir par la suite au Canada sans obtenir l'autorisation préalable du ministre.

[3]                Les demandeurs sont rentrés au Canada le 2 novembre 2001 sans avoir obtenu l'autorisation nécessaire. Des ordonnances d'exclusion ont été prises contre eux. Ils ont alors été renvoyés du Canada vers la Hongrie le 21 novembre 2001.

[4]                Les demandeurs ont réussi à obtenir le contrôle judiciaire de ces ordonnances d'exclusion au motif que le ministère n'avait pas fourni d'interprète au point d'entrée.

[5]                À la suite de la décision de la Cour, les demandeurs ont été ramenés au Canada en mai 2003. En raison d'erreurs administratives, les agents au point d'entrée n'ont pas suivi les formalités prescrites par l'ordonnance de la Cour à l'arrivée des demandeurs, qui ont été admis conformément à des permis de résidents temporaires. Des retards administratifs supplémentaires ont ralenti le traitement des demandes d'asile des demandeurs.

[6]                Le 28 octobre 2003, le défendeur a décidé que les demandes d'asile des demandeurs étaient irrecevables en vertu de l'alinéa 101(1)b) de la LIPR parce que leur demande antérieure du 29 novembre 2001 avait été rejetée.

[7]                L'alinéa 101(1)b) de la LIPR est rédigé comme suit :


101.1 La demande est irrecevable dans les cas suivants :

_..._

b) rejet antérieur de la demande d'asile par la Commission; . . . .

101(1) A claim is ineligible to be referred to the Refugee Protection Division if

...

(b) a claim for refugee protection by the claimant has been rejected by the Board; . . . .



[8]                Les demandeurs disent que si le défendeur n'avait pas commis une erreur de droit le 2 novembre 2001, en omettant de fournir un interprète, leurs demandes d'asile auraient été traitées sous le régime de l'ancienne Loi sur l'immigration.

[9]                L'importance de cette thèse réside dans le fait que l'alinéa 46.01(1)c) et le paragraphe 46.01(5) de l'ancienne loi (reproduits ci-dessous) permettaient aux demandeurs de présenter plusieurs demandes d'asile, même s'il y avait eu précédemment rejet de l'une ou de plusieurs d'entre elles.


46.01 (1) La revendication de statut n'est pas recevable par la section du statut si l'intéressé se trouve dans l'une ou l'autre des situations suivantes :

_..._

c) depuis sa dernière venue au Canada, il a fait l'objet :

(i) soit d'une décision de la section du statut lui refusant le statut de réfugié au sens de la Convention ou établissant le désistement de sa revendication,

(ii) soit d'une décision d'irrecevabilité de sa revendication par un agent principal;

_..._

          (5) La rentrée au Canada de l'intéressé après un séjour à l'étranger d'au plus quatre-vingt-dix jours n'est pas, pour l'application de l'alinéa (1)c), prise en compte pour la détermination de la date de la dernière venue de celui-ci au Canada.

46.01 (1) A person who claims to be a Convention refugee

is not eligible to have the claim determined by the Refugee Division if the person

...

(c) has, since last coming into Canada, been determined

(i) by the Refugee Division not to be a Convention refugee or to have abandoned the claim, or

(ii) by a senior immigration officer not to be eligible to have the claim determined by the Refugee Division;

  

          (5) A person who goes to another country and returns to Canada within ninety days shall not, for the purposes of paragraph (1)(c), be considered as coming into Canada on that return.


[10]            Les demandeurs soutiennent aussi que, vu l'iniquité de la décision, ils ont une attente légitime que leurs demandes d'asile soient traitées sous le régime de la Loi sur l'immigration.

ANALYSE


[11]            Malheureusement, je ne peux pas abonder dans le sens des demandeurs. La question en litige dans la présente demande de contrôle judiciaire n'a rien à voir avec la doctrine des attentes légitimes, qui ne concerne qu'un droit de pure procédure pour lequel des fonctionnaires doivent avoir vaguement formulé aux intéressés des assurances. Il n'y a aucun élément de preuve qui aille dans ce sens.

[12]            L'issue de la présente demande de contrôle dépend de l'application des dispositions transitoires de la LIPR. Les dispositions pertinentes sont les articles 190 et 191, qui sont rédigés comme suit :


190. La présente loi s'applique, dès l'entrée en vigueur du présent article, aux demandes et procédures présentées ou instruites, ainsi qu'aux autres questions soulevées, dans le cadre de l'ancienne loi avant son entrée en vigueur et pour lesquelles aucune décision n'a été prise.

190. Every application, proceeding or matter under the former Act that is pending or in progress immediately before the coming into force of this section shall be governed by this Act on that coming into force.

191. Les demandes et procédures présentées ou introduites, à l'entrée en vigueur du présent article, devant la Section du statut de réfugié sont, dès lors que des éléments de preuve de fond ont été présentés, mais pour lesquelles aucune décision n'a été prise, continuées sous le régime de l'ancienne loi, par la Section de la protection des réfugiés de la Commission.

191. Every application, proceeding or matter before the Convention Refugee Determination Division under the former Act that is pending or in progress immediately before the coming into force of this section, in respect of which substantive evidence has been adduced but no decision has been made, shall be continued under the former Act by the Refugee Protection Division of the Board.


[13]            Les demandeurs ne peuvent avoir gain de cause que si la Cour admet, au moins implicitement, qu'ils avaient le droit de faire une demande d'asile au Canada le 2 novembre 2001 et que des éléments de preuve de fond ont été présentés avant le 28 juin 2002.

[14]            Le 2 novembre 2001, lorsque les demandeurs sont revenus au Canada, ils n'avaient pas le droit d'être ici sans l'autorisation préalable du ministre, autorisation qu'ils n'avaient pas. Dès le départ, la thèse des demandeurs manque de rigueur.

[15]            Les demandeurs demandent en plus à la Cour de faire des conjectures sur ce qu'aurait été l'état de la preuve devant la Section du statut de réfugié (SSR) au 28 juin 2002. Rien ne permet à la Cour de se livrer à de telles conjectures.


[16]            Je suis d'avis que la présente demande de contrôle judiciaire est régie par l'article 190 de la LIPR et que les prétentions des demandeurs ne peuvent donc pas être accueillies. La présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

[17]            Vu le motif sur lequel s'est fondée la Cour pour tirer sa conclusion, il n'y apparemment pas de question à certifier. La présente cause ne porte pas sur des droits acquis vu le statut des demandeurs au 2 novembre 2001. Aucune question ne sera certifiée.

                                                                                                                           _ Michael L. Phelan _              

                                                                                                                                                     Juge                            

Traduction certifiée conforme

François Brunet, LL.B., B.C.L.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                                             

DOSSIER :                                         IMM-8869-03

INTITULÉ :                                        ERVIN KOVACS, SZIMONETTA KOVACS

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                  TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                LE 21 OCTOBRE 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE PHELAN

DATE DES MOTIFS :                       LE 21 FÉVRIER 2005

COMPARUTIONS :

Daniel M. Fine                                       POUR LE DEMANDEUR

Stephen Jarvis                                       POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Daniel M. Fine

Avocat

Toronto (Ontario)                                              POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)                                               POUR LE DÉFENDEUR

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