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Date : 20030226

Dossier : IMM-516-02

OTTAWA (ONTARIO), LE 26 FÉVRIER 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX

ENTRE :

                                                                 PAULINA YEBOAH

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                                                     ORDONNANCE

Pour les motifs exposés, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question certifiée n'a été proposée.

                                                                                                                                     « François Lemieux »                   

                                                                                                                                                                 Juge                               

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


Date : 20030226

Dossier : IMM-516-02

Référence neutre : 2003 CFPI 240

ENTRE :

                                                                 PAULINA YEBOAH

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX

LES FAITS

[1]                 Paulina Yeboah (la demanderesse) est une ressortissante ghanéenne âgée de 33 ans. Elle est arrivée au Canada le 6 décembre 2001 à la faveur d'un faux passeport enregistré au nom de Patricia Sama Ansah. Ce passeport contenait aussi un visa canadien de visiteur (VCV) délivré à Patricia Sama Ansah et valide pour six mois.


[2]                 Lorsqu'elle est arrivée à l'Aéroport international de Dorval, la demanderesse a été interrogée par l'agente d'immigration Iermieri, qui envoya le même jour à un agent principal le rapport écrit prévu par l'article 20 de la Loi sur l'immigration (la Loi), rapport dans lequel elle exprimait l'avis qu'elle ne pouvait laisser la demanderesse entrer au Canada parce qu'elle faisait partie d'une catégorie non admissible visée par l'alinéa 19(2)d) de la Loi, étant donné qu'elle ne détenait pas un passeport valide et qu'aucun visa ne lui avait été délivré.

[3]                 L'agente d'immigration donnait à l'agent principal les motifs qu'elle avait de penser ainsi, motifs qui lui étaient apparus après qu'elle se fut entretenue avec la demanderesse, qu'elle eut consulté la base de données de Citoyenneté et Immigration Canada afin d'examiner la demande de VCV présentée par Patricia Sama Ansah, et qu'elle eut comparé les réponses données alors avec les réponses données par la demanderesse au cours de sa première entrevue avec l'agente d'immigration.

[4]                 Le rapport écrit de l'agente d'immigration fut avalisé par l'agent principal, qui prononça le 6 décembre 2001 une mesure d'exclusion contre Patricia Sama Ansah en conformité avec le paragraphe 23(4) de la Loi. L'agent principal était persuadé que la demanderesse ne répondait pas aux conditions ou exigences de la Loi ou du Règlement, à savoir un passeport valide et un visa valide.

[5]                 La demanderesse fut immédiatement mise en détention. Sa détention fut réexaminée comme l'exigeait la Loi. Au cours de l'examen des motifs de sa détention, la demanderesse révéla que son vrai nom était Paulina Yeboah.


[6]                 Lorsqu'une mesure de renvoi a été prononcée contre une personne, le paragraphe 44(1) de la Loi a pour effet d'empêcher cette personne de revendiquer le statut de réfugié.

[7]                 La demanderesse affirme qu'elle est victime de violence conjugale aux mains de son compagnon, un membre de l'armée ghanéenne. Elle craint qu'on la force à subir une excision.

[8]                 Le 6 janvier 2002, la demanderesse déposait une demande d'autorisation d'appel de la mesure d'exclusion prononcée par l'agent principal. Le 22 janvier 2002, elle déposait aussi une demande fondée sur des considérations humanitaires.

[9]                 Le 29 avril 2002, M. le juge Beaudry, de la Cour fédérale, rejetait une requête de la demanderesse en suspension de son renvoi (voir Paulina Yeboah c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, [2002] CFPI 490). Selon lui, aucune question grave n'avait été soulevée et aucun préjudice irréparable n'avait été démontré.

[10]            S'agissant de l'absence d'une question grave, le juge Beaudry a exprimé l'avis que le cas de la demanderesse était semblable à l'espèce Umba c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] CFPI 582, une affaire décidée par M. le juge Blanchard, qui s'était fondé sur un arrêt de la Cour d'appel fédérale, Raman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, [1999] 4 C.F. 140.


[11]            M. le juge Beaudry a aussi exprimé l'avis que le paragraphe 44(1) de la Loi sur l'immigration avait été bien appliqué, et il avait rejeté l'allégation de la demanderesse relative à des problèmes d'interprétation qui seraient apparus à l'aéroport.

[12]            Se fondant sur les réponses données par la demanderesse à l'aéroport, le juge Beaudry a estimé que la demanderesse ne l'avait pas convaincu qu'elle subirait des sévices physiques et sexuels si elle devait retourner au Ghana.

[13]            L'avocat de la demanderesse a soulevé devant moi deux aspects :

(1)        le paragraphe 44(1) de la Loi, qui fait obstacle à la présentation d'une revendication du statut de réfugié après qu'a été prononcée une mesure de renvoi, est-il compatible avec la Charte et avec les obligations du Canada selon le droit international. Selon lui, je devrais y insérer une exception et faire droit aux revendications du statut de réfugié en ce qui concerne les femmes présentant le syndrome de la femme battue, et cela en dépit du texte même de cette disposition de la Loi sur l'immigration;

(2)        puisqu'aucun interprète n'était présent durant la première entrevue ni durant la deuxième, peut-on dire que la justice naturelle a été observée?

[14]            J'examinerai d'abord la question de l'absence d'un interprète. Il s'agit de savoir si la demanderesse, qui n'a pas demandé un interprète, a été bien comprise durant la première entrevue et la deuxième entrevue, et si elle a eu la possibilité de revendiquer le statut de réfugié.

[15]            J'ai examiné, comme l'a fait le juge Beaudry, les notes d'entrevue de l'agente d'immigration. Lues dans leur intégralité, ces notes révèlent à mon avis que, pour certaines questions, la demanderesse ne les a pas parfaitement saisies, mais elle a compris les questions essentielles suivantes et elle y a répondu clairement :

(i)         « Comprenez-vous l'anglais? » « Oui » ;

(ii)        « Connaissez-vous des difficultés dans votre pays? » « Non » ; et

(iii)       « Aurez-vous des difficultés si vous retournez au Ghana? » « Non, je n'aurai pas de difficultés » .

[16]            Je suis persuadé que la demanderesse a eu amplement l'occasion de revendiquer le statut de réfugié et qu'elle ne l'a pas fait parce qu'elle voulait entrer au Canada grâce au passeport et au visa d'une autre personne. Les propos du juge Linden, dans l'arrêt Raman, précité, sont ici pertinents :

[14] . . . En l'espèce, le dossier n'indique pas qu'on a exercé une contrainte sur l'appelant, l'empêchant ainsi de prendre une décision libre et indépendante concernant la possibilité de revendiquer le statut de réfugié. Bien que l'on puisse soutenir que l'appelant a été mal informé concernant le moment le plus approprié pour revendiquer le statut de réfugié, je ne vois pas comment cela peut le décharger de son obligation de dire la vérité quand il se présente à la frontière d'un pays. Un agent principal n'a aucunement l'obligation de reconsidérer les déclarations de personnes qui refusent de se prévaloir de la possibilité de revendiquer le statut de réfugié.


[17]            L'avocat de la demanderesse n'a pas insisté sur la présumée contravention de la Charte et sur l'éventuelle réparation, parce qu'aucun avis n'avait été signifié ainsi que le requiert l'article 57 de la Loi sur la Cour fédérale. Sans cette contravention et cette réparation, je n'ai pas le loisir de soustraire la demanderesse, comme elle le voudrait, au texte explicite du paragraphe 44(1) de la Loi.

[18]            Pour tous ces motifs, cette demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question certifiée n'a été proposée.

                                                                                                                        « François Lemieux »                   

                                                                                                                                                    Juge                               

OTTAWA (ONTARIO)

le 26 février 2003

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                              COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                       SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                           AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                            IMM-516-02

INTITULÉ :                                           PAULINA YEBOAH c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Montréal

DATE DE L'AUDIENCE :                 le 30 janvier 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

OU DU JUGEMENT :                       M. le juge François Lemieux

DATE DES MOTIFS :                        le 26 février 2003

COMPARUTIONS :

Me Stewart Istvanffy                                                          POUR LA DEMANDERESSE

514-876-9776

Me Daniel Latulippe                                                           POUR LE DÉFENDEUR

514-283-648

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Stewart Istvanffy                                                          POUR LA DEMANDERESSE

1070, rue Bleury, bureau 503

Montréal (Québec) H2Z 1N3

Me Daniel Latulippe                                                           POUR LE DÉFENDEUR

Ministère de la Justice du Canada

Complexe Guy-Favreau

200, boul. René-Lévesque Ouest

Tour est, 5e étage

Montréal (Québec) H2Z 1X4

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