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Date : 20030619

Dossier : IMM-1571-02

Référence neutre : 2003 CFPI 760

Ottawa (Ontario), le 19 juin 2003

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE HENEGHAN

ENTRE :

                                                                         HSIEN LEE

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                                   et

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

INTRODUCTION

[1]         M. Hsien Lee (le demandeur) sollicite le contrôle judiciaire de la décision rendue par un agent principal (l'agent ou l'AP) en date du 25 mars 2002. Par cette décision, l'agent a pris une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle envers le demandeur.


LES FAITS

[2]                 Le demandeur, citoyen de Singapour, est entré au Canada en mai 1999. Il détenait une autorisation d'étude. Il avait l'intention d'étudier à l'Université de Toronto. Son autorisation d'étude était valide jusqu'au 31 août 2002.

[3]                 Le 25 août 2001, le demandeur est revenu au Canada après avoir passé des vacances en Europe. Le 15 octobre 2001, il a obtenu une prorogation de son autorisation d'étude jusqu'au 31 août 2003.

[4]                 Le 6 novembre 2001, le demandeur a présenté au Canada une revendication du statut de réfugié au sens de la Convention au motif que, suivant les lois de Singapour, il pourrait en tant qu'homosexuel être emprisonné pour avoir entretenu des relations homosexuelles. Les formulaires « Avis de revendication du statut de réfugié au sens de la Convention » présentés par le demandeur ont été reçus par Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) à Etobicoke le 10 novembre 2001.


[5]                 Le dossier du tribunal comprend une lettre datée du 23 janvier 2002 adressée au demandeur. Cette lettre incluait soi-disant un « certificat de recevabilité » et une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle qu'on avait demandé au demandeur de signer et de conserver comme preuve que son dossier avait été transmis à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (CISR) pour qu'il soit tranché. La lettre mentionnait de plus qu'un Formulaire sur les renseignements personnels (FRP) était inclus et que ce formulaire devait être envoyé à la CISR dans les 28 jours.

[6]                 Il semble que le demandeur n'a jamais reçu la lettre précédemment mentionnée ni les autres documents inclus dans l'envoi puisque son avocat, le 1er février 2002, a envoyé par télécopieur au bureau de CIC, à Etobicoke, un message mentionnant qu'il n'avait jusqu'alors rien reçu relativement à la revendication du statut de réfugié entreprise par le demandeur. La réponse inscrite sur le message envoyé par télécopieur énonçait que CIC avait reçu la demande présentée par le demandeur et qu'il serait informé [TRADUCTION] « sous peu d'une date » .

[7]                 Le 6 mars 2002, le demandeur a assisté à une « entrevue d'admissibilité » . Il prétend qu'un agent responsable de l'immigration lui a demandé s'il quitterait le Canada le 31 août 2003 à l'expiration de son autorisation d'étude. Le demandeur prétend qu'il a répondu qu'il ne s'était aucunement penché sur cette question. La réponse du demandeur a amené l'agent à lui demander si ses projets à l'égard de son départ étaient indéterminés. Le demandeur a répondu affirmativement.


[8]                 Le même jour, soit le 6 mars 2002, un rapport suivant l'article 27 a été préparé et signé par un agent principal. Ce rapport mentionnait que le demandeur était une personne décrite aux alinéas 19(2)d) et 27(2)a) de l'ancienne Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2 (la Loi). Le rapport préparé suivant l'article 27 énonce que le demandeur semblait être une personne qui avait l'intention d'établir au Canada une résidence permanente et qui, en contravention du paragraphe 9(1), n'avait pas un visa d'immigrant lorsqu'il est revenu au Canada la dernière fois, soit le 25 août 2001.

[9]                 Le 25 mars 2002, un agent principal a délivré au demandeur un certificat de « détermination de la recevabilité » suivant le paragraphe 45(1) et l'article 46.02 de la Loi et a déféré à la CISR la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention présentée par le demandeur afin qu'elle soit tranchée. L'agent principal a en outre pris une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle suivant le paragraphe 28(1) de la Loi en se fondant sur l'opinion selon laquelle le demandeur était une personne décrite à l'alinéa 19(2)d).

[10]            En réponse, le demandeur a soumis la présente demande de contrôle judiciaire. Par une lettre datée du 27 mai 2002, le défendeur a informé le demandeur et le greffier de la Cour qu'il n'y avait pas de motifs énoncés dans la décision faisant l'objet du contrôle.

LES PRÉTENTIONS DU DEMANDEUR

[11]            Le demandeur prétend maintenant que la mesure d'interdiction de séjour est invalide à première vue parce qu'il ne l'a jamais signée, pour confirmer qu'il en comprenait le contenu, et qu'elle était trop vague. Il déclare qu'en raison des conséquences graves qui peuvent résulter d'une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle, le défendeur doit obtenir une confirmation que la personne envers laquelle la mesure a été prise a reçu et compris cette mesure.

[12]            Ensuite, le demandeur prétend qu'il n'existe pas de motifs justifiant qu'une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle ait été prise. L'absence des motifs signifie, selon ce que prétend le demandeur, que la mesure est [TRADUCTION] « nulle au départ » . Le demandeur en l'espèce s'appuie sur l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817.

[13]            De plus, le demandeur prétend qu'il n'y a pas de fondement probant pour la mesure d'interdiction de séjour conditionnelle. Le rapport préparé suivant l'article 27, sur lequel la mesure était fondée, s'appuyait sur une hypothèse. Plus particulièrement, le demandeur affirme que ce rapport tient pour acquis qu'à son retour au Canada le 25 août 2001, environ trois mois avant qu'il ait fait connaître son intention de présenter une revendication du statut de réfugié au sens de la Convention, il avait l'intention de demeurer en permanence au Canada. Le demandeur affirme qu'il n'y avait simplement pas de preuve qui appuie la prétention à cet égard ou de preuve qu'il savait le 25 août 2001, lors de son retour de vacances en Europe, qu'il pouvait demander asile au Canada en raison de son orientation sexuelle.

[14]            Le demandeur prétend que la mesure d'interdiction de séjour conditionnelle, étant donné qu'elle est fondée sur une hypothèse et non sur de la preuve, devrait être annulée. En l'espèce, le demandeur s'appuie sur la décision Chand c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 2 Imm. L.R. (3d) 164 (C.F. 1re inst.), et sur l'arrêt Baker, précité.

[15]            Le demandeur prétend de plus que la politique du défendeur qui consiste à révoquer un statut légitime, c'est-à-dire son statut d'étudiant détenteur d'une autorisation d'étude valide, simplement parce qu'il a présenté au Canada une revendication du statut de réfugié au sens de la Convention, est incompatible avec l'alinéa 3g) de la Loi. L'alinéa 3g) prévoit que le défendeur doit mettre en oeuvre les règles canadiennes en matière d'immigration d'une façon qui permet que soit reconnue la nécessité de remplir, envers les réfugiés, les obligations imposées au Canada par le droit international.

[16]            Finalement, le demandeur sollicite les dépens de la présente demande. Il affirme que la motivation du défendeur en privant les revendicateurs du statut de réfugié de leur statut légitime de non-immigrant au Canada est une expression d'intimidation contraire à l'alinéa 3g) de la Loi et contraire également aux obligations du Canada prévues dans la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés.

LES PRÉTENTIONS DU DÉFENDEUR

[17]            Le défendeur prétend que la mesure d'interdiction de séjour conditionnelle était valide et appropriée et il affirme que le demandeur n'a fourni aucun argument convaincant qui donnerait à penser que la décision de prendre cette mesure était incompatible avec la Loi.


[18]            Suivant l'alinéa 27(2.01)b) de la Loi, des visiteurs et d'autres personnes peuvent être réputés être à un point d'entrée et ils peuvent faire l'objet d'un rapport, suivant l'alinéa 27(2)a), s'ils ne remplissent pas les conditions d'admissibilité au Canada. Le défendeur se fonde sur la Note de service sur les opérations, « EC-96-01 » , pour appuyer son interprétation des alinéas 27(2)a) et 27(2.01)b) à l'égard des revendicateurs du statut de réfugié « autorisés de séjour » .

[19]            Le demandeur reconnaît dans son mémoire que sa revendication du statut de réfugié reflète sa réticence à retourner à Singapour, le pays dont il est citoyen, mais n'élimine pas la possibilité qu'il puisse quitter le Canada pour un autre pays. Selon ce que le défendeur prétend, cette reconnaissance montre que la décision de préparer un rapport suivant l'article 27, et de prendre ensuite une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle, n'était pas manifestement déraisonnable parce qu'elle se fondait sur l'opinion selon laquelle le demandeur ne se trouvait plus au Canada à titre temporaire. Le fait de se trouver au Canada à titre temporaire est un élément essentiel de la définition de « visiteur » contenue dans la Loi.

[20]            L'agent principal a pris connaissance du rapport préparé suivant l'article 27 et il devait prendre une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle suivant le paragraphe 28(1) de la Loi. Le libellé du paragraphe 28(1) contient le verbe « prend » qui fait qu'un agent principal a l'obligation de prendre une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle dans les cas où les conditions prévues à ce paragraphe sont remplies. En l'espèce, les conditions étaient remplies.


[21]            Le défendeur fait en outre remarquer que dans la présente affaire le demandeur conteste la décision par laquelle une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle a été prise et non le rapport préparé suivant l'article 27. Le défendeur affirme qu'aucune des prétentions touchant le rapport préparé suivant l'article 27 n'est pertinente dans la présente instance.

ANALYSE

[22]            Le demandeur se trouvait légalement au Canada en tant que « visiteur » et, en plus, il détenait une autorisation d'étude lorsqu'il a présenté au Canada sa revendication du statut de réfugié au sens de la Convention. La question déterminante dans la présente demande de contrôle judiciaire est celle de savoir si une telle revendication du statut de réfugié est en soi incompatible avec la définition de « visiteur » contenue dans l'ancienne Loi, soit une personne qui se trouve au pays à titre temporaire, de même que celle de savoir si une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle devait automatiquement être prise lorsqu'il avait été décidé de la recevabilité de la revendication du statut de réfugié présentée par le demandeur.

[23]            La Loi, au paragraphe 2(1), définit « mesure d'interdiction de séjour conditionnelle » et « visiteur » comme suit :



[...]

« mesure d'interdiction de séjour conditionnelle » La mesure prévue soit au paragraphe 28(1) et qui n'est pas encore exécutoire aux termes du paragraphe 28(2), soit à l'alinéa 32.1(3)b) ou au paragraphe 32.1(5) et qui n'est pas encore exécutoire aux termes du paragraphe 32.1(6)[...]

. . .

"conditional departure order" means a conditional departure order issued under subsection 28(1), paragraph 32.1(3)(b) or subsection 32.1(5) that has not become effective under subsection 28(2) or 32.1(6);. . . [...]

« visiteur » Personne qui, à titre temporaire, se trouve légalement au Canada ou cherche à y entrer, à l'exclusion_:

a) des citoyens canadiens;

b) des résidents permanents;

c) des titulaires de permis;

d) des immigrants visés aux alinéas 14(2)b), 23(1)b) ou 32(3)b)

[...]

[Non souligné dans l'original.]

...

"visitor" means a person who is lawfully in Canada, or seeks to come into Canada, for a temporary purpose, other than a person who is

(a) a Canadian citizen,

(b) a permanent resident,

(c) a person in possession of a permit, or

(d) an immigrant authorized to come into Canada pursuant to paragraph 14(2)(b), 23(1)(b) or 32(3)(b)

....

[Emphasis added]


[24]            Le demandeur est citoyen de Singapour. Singapour est un pays inclus dans l'annexe II de l'ancien Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172 (le Règlement). Le paragraphe 13(1) et l'article 14.1 du Règlement sont pertinents et sont rédigés comme suit :


13(1) Un visiteur visé à l'annexe II n'est pas tenu de présenter une demande de visa ou d'obtenir un visa avant de se présenter à un point d'entrée.

13(1) A visitor who is a person referred to in Schedule II is not required to make an application for and obtain a visa before he appears at a port of entry.

14.1 Sous réserve des articles 14.2 et 14.3, il est interdit à toute personne, à l'exception des citoyens canadiens et des résidents permanents, de suivre des cours à une université ou à un collège ou de suivre des cours de formation générale, théorique ou professionnelle au Canada, à moins d'être en possession d'une autorisation d'étude en cours de validité.

14.1 Subject to sections 14.2 and 14.3, no person, other than a Canadian citizen or a permanent resident, shall attend any university or college or take any academic, professional or vocational training course in Canada unless that person possesses a valid and subsisting student authorization.


[25]            Le demandeur, citoyen de Singapour, n'était pas tenu de présenter une demande de visa de visiteur pour entrer au Canada. Cependant, il devait, en tant qu'étudiant, obtenir une autorisation d'étude et c'est ce qu'il a fait.


[26]            Suivant l'ancienne Loi, lorsqu'un individu, soit à un point d'entrée canadien soit de l'intérieur du Canada, présentait une revendication du statut de réfugié au sens de la Convention et qu'un agent principal avait conclu à la recevabilité d'une telle revendication devant la CISR, une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle pouvait être prise sur le fondement du paragraphe 28(1). Ce paragraphe est rédigé comme suit :


28(1) S'il conclut à la recevabilité de la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention de la personne à l'encontre de laquelle il prendrait une mesure d'exclusion au titre des paragraphes 23(4) ou (4.01) ou une mesure d'interdiction de séjour au titre du paragraphe 27(4), l'agent principal prend contre elle une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle.

28(1) Where a senior immigration officer is of the opinion that a person who claims to be a Convention refugee is eligible to have their claim referred to the Refugee Division and is a person in respect of whom the senior immigration officer would, but for this section, have made an exclusion order under subsection 23(4) or (4.01) or a departure order under subsection 27(4), the senior immigration officer shall make a conditional departure order against the person.


[27]            De plus, le paragraphe 27(4) est pertinent. Il prévoyait ce qui suit :


27(4) Sous réserve de l'article 28, dans le cas où une personne a fait l'objet de l'ordre prévu à l'alinéa (3)a) ou a été arrêtée en vertu du paragraphe 103(2), l'agent principal doit_:

a) autoriser la personne à demeurer au Canada si l'octroi de cette autorisation ne contrevient pas à la présente loi ou à ses règlements;

b) prendre contre elle une mesure d'interdiction de séjour s'il est convaincu qu'elle est visée soit à l'alinéa (2)a), pour le motif prévu à l'alinéa 19(2)d), soit à l'alinéa (2)e), pour le motif prévu à l'alinéa 26(1)c), soit à l'un des alinéas (2)h) ou k).

27(4) Subject to section 28, where a senior immigration officer receives a report and a direction made pursuant to paragraph (3)(a) in respect of a person, or where a person has been arrested pursuant to subsection 103(2), the senior immigration officer shall

(a) allow the person to remain in Canada if it would not be contrary to this Act or the regulations to allow the person to remain in Canada; or

(b) make a departure order against the person if the senior immigration officer is satisfied that the person is a person described in

(i) paragraph (2)(a) by reason of paragraph 19(2)(d),

(ii) paragraph (2)(e) by reason of paragraph 26(1)(c), or

(iii) paragraph (2)(h) or (k).


[28]            Le libellé du paragraphe 27(4) établissait clairement qu'un agent principal devait soit autoriser une personne à demeurer au Canada s'il était convaincu que le fait de le faire ne contrevenait pas à la Loi ou au Règlement, soit prendre une mesure d'interdiction de séjour s'il était convaincu qu'une personne était visée à l'un des alinéas énumérés aux sous-alinéas 27(4)b)(i) à (iii), l'un d'eux étant l'alinéa 19(2)d).


[29]            La présentation par le demandeur d'une revendication du statut de réfugié au Canada a entraîné l'application de l'alinéa 27(2)a) de l'ancienne Loi. Cet alinéa prévoyait qu'un rapport devait être préparé et envoyé au sous-ministre. L'alinéa 27(2)a) et l'alinéa 27(2.01)b) sont pertinents. Ils prévoyaient ce qui suit :


27(2) L'agent d'immigration ou l'agent de la paix doit, sauf si la personne en cause a été arrêtée en vertu du paragraphe 103(2), faire un rapport écrit et circonstancié au sous-ministre de renseignements concernant une personne se trouvant au Canada autrement qu'à titre de citoyen canadien ou de résident permanent et indiquant que celle-ci, selon le cas_:

a) appartient à une catégorie non admissible, autre que celles visées aux alinéas 19(1)h) ou 19(2)c);

27(2) An immigration officer or a peace officer shall, unless the person has been arrested pursuant to subsection 103(2), forward a written report to the Deputy Minister setting out the details of any information in the possession of the immigration officer or peace officer indicating that a person in Canada, other than a Canadian citizen or permanent resident, is a person who

(a) is a member of an inadmissible class, other than an inadmissible class described in paragraph 19(1)(h) or 19(2)(c);

27(2.01) Il est entendu que_:

[...]

b) est assimilée à la personne visée à l'alinéa (2)a) la personne qui, si elle la demandait, pourrait ne pas se voir accorder l'autorisation de séjour du fait de son appartenance à une catégorie non admissible autre que celles visées aux alinéas 19(1)h) ou 19(2)c);

[...]

27(2.01) For greater certainty,

...

(b) a person described in paragraph (2)(a) includes a person who, if applying for entry, would not or might not be granted entry by reason of being a member of an inadmissible class, other than an inadmissible class described in paragraph 19(1)(h) or 19(2)(c); and

...


[30]            Sur réception du rapport, le sous-ministre pouvait alors prendre certaines mesures. Le paragraphe 27(3) était rédigé comme suit :



27(3) Sous réserve du paragraphe (3.1) et des arrêtés ou instructions du ministre, le sous-ministre, s'il l'estime justifié dans les circonstances, transmet à un agent principal un exemplaire du rapport visé aux paragraphes (1) ou (2) et_:

a) dans le cas où l'intéressé est visé soit à l'alinéa (2)a), pour le motif prévu à l'alinéa 19(2)d), soit à l'alinéa (2)e), pour le motif prévu à l'alinéa 26(1)c), soit à l'un des alinéas (2)h) ou k), il peut ordonner à l'agent principal de prendre une décision sur tel fait allégué dans le rapport;

b) dans tous les cas, le sous-ministre peut ordonner à l'agent principal de faire tenir une enquête.

27(3) Subject to subsection (3.1) and any order or direction of the Minister, the Deputy Minister, on receiving a report pursuant to subsection (1) or (2), shall, if the Deputy Minister considers it appropriate to do so in the circumstances, forward a copy of that report to a senior immigration officer and may

(a) direct that a determination be made with respect to any or all of the allegations mentioned in the report where the person is a person described in

(i) paragraph (2)(a) by reason of paragraph 19(2)(d),

(ii) paragraph (2)(e) by reason of paragraph 26(1)(c), or

(iii) paragraph (2)(h) or (k); or

(b) in any case, direct that an inquiry be held.


[31]            La « preuve » au soutien de la prétention de non-admissibilité était énoncée dans le rapport préparé suivant l'article 27, rapport dans lequel un agent principal a conclu que le demandeur était une personne non admissible suivant l'alinéa 19(2)d). Cet alinéa était rédigé comme suit :


19(2) Appartiennent à une catégorie non admissible les immigrants et, sous réserve du paragraphe (3), les visiteurs qui_:

[...]

d) soit ne se conforment pas aux conditions prévues à la présente loi et à ses règlements ou aux mesures ou instructions qui en procèdent, soit ne peuvent le faire.

19(2) No immigrant and, except as provided in subsection (3), no visitor shall be granted admission if the immigrant or visitor is a member of any of the following classes:

...

(d) persons who cannot or do not fulfil or comply with any of the conditions or requirements of this Act or the regulations or any orders or directions lawfully made or given under this Act or the regulations.


[32]            Le demandeur était soi-disant une personne qui n'avait pas rempli les conditions prévues au paragraphe 9(1) de l'ancienne Loi. Le paragraphe 9(1) énonçait une règle générale, et certaines exceptions, selon laquelle les immigrants et les visiteurs devaient demander et obtenir un visa avant de se présenter à un point d'entrée. Étant donné qu'il a présenté une revendication du statut de réfugié au sens de la Convention après son entrée au Canada, le demandeur, selon ce que prétend le défendeur, ne pouvait pas remplir une condition prévue dans l'ancienne Loi, soit avoir l'intention de demeurer au Canada à titre temporaire et de quitter le Canada à l'expiration de son autorisation de séjour.


[33]            La Note de service sur les opérations, « EC-96-01 » , datée du 16 janvier 1996, contient des commentaires sur l'utilisation du rapport prévu à l'article 27 relativement aux demandeurs du statut de réfugié autorisés de séjour. Les portions suivantes sont pertinentes :

1. L'agent doit-il appliquer le L27(2)a) relativement au L19(2)d) et au L9(1), à l'égard d'un demandeur du statut de réfugié? Qu'en est-il du demandeur du statut de réfugié autorisé de séjour?

Le L27(2.01)a)[b)] a été adopté pour mettre fin à l'ambiguïté qui existait lorsqu'une personne faisait l'objet d'un rapport en vertu du L27(2)a), pris conjointement avec le L19(2)d). Il précise qu'une personne se trouvant au Canada peut faire l'objet d'un rapport en vertu du L27(2)a), pris conjointement avec le L19(2)d), comme si elle sollicitait une autorisation de séjour à un point d'entrée au moment où le rapport est rédigé.

La précision apportée au L27(2.01)a)[b)] permet désormais à l'agent de faire un rapport sur une personne se trouvant au Canada en se fondant sur le fait que si cette personne se trouvait à un point d'entrée au moment où le rapport a été rédigé, elle ne serait pas admissible du fait du L19(2)d). Quel que soit le statut revendiqué, le L27(2.01)[...] [b)] crée une fiction juridique de telle sorte qu'une personne se trouvant au Canada peut être réputée comme étant quelqu'un qui sollicite une autorisation de séjour à un point d'entrée. Le L27(2.01)[...] [b)] donne plus de latitude à l'agent dans la rédaction du rapport prévu au L27(2).

La personne qui se trouve au Canada et qui revendique le statut de réfugié au sens de la Convention doit faire l'objet du rapport prévu au L27(2)a) du fait de son appartenance à la catégorie non admissible énoncée au L19(2)d) parce que, si elle sollicitait une autorisation de séjour à un point d'entrée au moment où le rapport est rédigé, cette personne ne répondrait pas aux exigences relatives aux visas ou aux passeports de visiteur.

Si la personne qui revendique le statut de réfugié au sens de la Convention répond effectivement aux exigences relatives aux visas ou aux passeports de visiteur, elle doit faire l'objet du rapport prévu au L27(2)a) pour le L19(2)d) parce que cette personne ne satisfait pas aux exigences relatives aux visas ou aux passeports d'immigrant.

Le même principe s'applique aux demandeurs autorisés de séjour. Ceux-ci doivent faire l'objet du rapport prévu au L27(2)a) pour le L19(2)d) parce que, s'ils se trouvaient à un point d'entrée, ils ne satisferaient pas aux exigences relatives aux visas ou aux passeports d'immigrant.

[Non souligné dans l'original.]

[34]            La note de service semble être une interprétation juste de l'alinéa 27(2.01)b) de la Loi et de l'obligation de préparer un rapport suivant l'alinéa 27(2)a). Cependant, dans la mesure où cette note donne à penser que la présentation d'une revendication du statut de réfugié au sens de la Convention par un visiteur ou par d'autres demandeurs autorisés de séjour doit automatiquement conduire à une conclusion selon laquelle une telle personne n'a plus l'intention de demeurer au pays à titre temporaire et qu'elle souhaite être un « immigrant » , alors il s'agit d'une interprétation erronée de l'ancienne Loi. Il est bien établi que les guides des politiques ne sont pas des lois et qu'ils ne sont qu'une « indication utile » de ce qui constitue une interprétation raisonnable du pouvoir conféré par une disposition statutaire particulière. Voir à cet égard l'arrêt Baker, précité, au paragraphe 72.

[35]            Le paragraphe 2(1) de l'ancienne Loi définit les termes « immigrant » et « droit d'établissement » comme suit :


« immigrant » Personne qui sollicite l'établissement.

"immigrant" means a person who seeks landing;

« droit d'établissement » , « établissement » ou « droit de s'établir » Autorisation d'établir sa résidence permanente au Canada.

"landing" means lawful permission to establish permanent residence in Canada;


[36]            Le demandeur prétend que sa revendication du statut de réfugié au sens de la Convention démontre sa [TRADUCTION] « réticence » à retourner à Singapour parce qu'il craint d'être persécuté du fait de son orientation sexuelle. Il prétend de plus que sa revendication du statut de réfugié au Canada ne l'empêche pas de quitter volontairement le Canada, vers un troisième pays, à l'expiration de son autorisation d'étude.

[37]            Le critère juridique à l'égard de la délivrance d'une autorisation d'étude est celui de savoir si une personne quittera probablement le Canada à la fin de ses études; voir à cet égard la décision Liu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] A.C.F. no 1125 (1re inst.) (Q.L.). En outre, dans l'arrêt Wong c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 246 N.R. 377 (C.A.F.), la Cour d'appel fédérale a statué que lors de l'examen de la question de savoir si un demandeur a véritablement l'intention de quitter le Canada à la fin de ses études, l'objectif à long terme de la personne est pertinent, mais n'est pas déterminant dans la décision. M. le juge Létourneau a déclaré ce qui suit dans l'arrêt Wong, aux paragraphes 12 et 13 :

Ceci étant dit, il est devenu clair à l'audition de l'affaire et à l'examen de la jurisprudence [note de bas de page omise] que la question grave de portée générale qui a donné lieu à des décisions contradictoires à la Section de première instance de la Cour est la suivante : Lors d'une demande de visa d'étudiant à titre temporaire ou pour une période donnée, l'agent des visas a-t-il compétence pour rechercher l'objectif à long terme du demandeur, tel qu'exprimé par lui ou ses parents, et en tenir compte, afin de déterminer si ce dernier est un visiteur authentique au sens du paragraphe 2(1) de la Loi, à savoir une personne qui cherche à entrer au Canada à titre temporaire?

Nous sommes fermement convaincus que l'agent des visas a compétence, même dès la première demande d'un tel visa, pour examiner l'ensemble des circonstances, y compris l'objectif à long terme du demandeur. Un tel objectif est un élément pertinent, bien que non concluant, qu'il faut soupeser avec tous les autres faits et facteurs [voir la note 3 ci-après] pour déterminer si le demandeur est un visiteur au sens de la Loi.

Note 3 : Notamment : les liens avec le pays d'origine, la plausibilité des motifs présentés pour étudier au Canada, l'âge du demandeur, l'admission préalable accordée par une institution d'enseignement au Canada, ainsi que la probabilité de retour au pays d'origine.

[Non souligné dans l'original.]


[38]            À mon avis, le critère qui guide l'évaluation de l'agent des visas à l'égard de la question de savoir si la personne est un visiteur authentique, entrant au Canada à titre temporaire avec l'intention de quitter à l'expiration de son autorisation, devrait également guider l'analyse de la question de savoir si une telle personne conserve cette intention au cours de la validité de son séjour au Canada. Le fait d'entreprendre une revendication du statut de réfugié au sens de la Convention peut être jugé de façon appropriée comme un « objectif à long terme » d'un demandeur, un objectif qui doit être apprécié parmi d'autres facteurs par un agent principal lorsqu'il tranche la question de savoir s'il doit prendre une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle suivant le paragraphe 27(4) de l'ancienne Loi.

[39]            L'ancienne Loi ne prévoyait pas que la présentation d'une revendication du statut de réfugié au sens de la Convention entraînerait automatiquement qu'une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle soit prise, indépendamment de la situation personnelle et du statut d'immigration d'un demandeur. À mon avis, l'agent principal aurait commis une erreur s'il avait traité de cette façon la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention présentée par le demandeur. Cependant, à mon avis, la décision en l'espèce de prendre une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle était fondée sur d'autres faits que le fait qu'un demandeur « autorisé de séjour » avait présenté une revendication du statut de réfugié au sens de la Convention.

[40]            Le demandeur s'est présenté à une entrevue le 6 mars 2002. Il prétend qu'à ce moment un employé du défendeur lui a demandé s'il quitterait le Canada le 31 août 2003 à l'expiration de son autorisation d'étude. Le demandeur prétend qu'il a répondu qu'il ne s'était aucunement penché sur la question. Sa réponse a entraîné la question suivante : [TRADUCTION] « Est-ce que vos projets sont indéterminés? » et il a répondu [TRADUCTION] « oui » .


[41]            Lorsque le demandeur a donné cette réponse lors de l'entrevue du 6 mars 2002, il a mis en doute son intention de quitter le Canada. Sa déclaration selon laquelle il n'avait pas formé le projet de quitter le Canada à l'expiration de son autorisation d'étude ou qu'il n'avait pas l'intention de le faire constituait un fondement légitime sur lequel les employés ou les représentants du défendeur pouvaient évaluer le désir du demandeur de demeurer au Canada à titre temporaire. Le demandeur, non le défendeur, a mis en doute ses intentions.

[42]            Dans ces circonstances, la décision de l'agent principal était fondée sur un facteur autre que la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention entreprise par le demandeur. La décision était fondée sur l'intention qu'il avait exprimée lors de l'entrevue du 6 mars 2002. Il n'existe pas de crainte raisonnable que le défendeur ait omis de prendre en compte des facteurs pertinents ou qu'il ait pris en compte des facteurs étrangers lorsqu'il a décidé de prendre une mesure d'interdiction de séjour conditionnelle envers le demandeur. Il n'existe pas de fondement d'intervention et la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Bien que le demandeur ait soulevé plusieurs questions aux fins de la certification, la présente affaire, à mon avis, ne soulève pas une question grave de portée générale et aucune question ne sera certifiée.

                                           ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il ne résulte de l'affaire aucune question aux fins de la certification.

« E. Heneghan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                 IMM-1571-02

INTITULÉ :              HSIEN LEE c. MCI

                                                         

LIEU DE L'AUDIENCE :                                TORONTO

DATE DE L'AUDIENCE :                              Le jeudi 13 mars 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                     Le juge Heneghan

DATE DES MOTIFS :                                     Le 19 juin 2003

COMPARUTIONS :

Hsien Lee                                                              POUR LE DEMANDEUR

Greg G. George                                                    POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Hsien Lee

5734, rue Yonge

Bureau 509

Toronto (Ontario)    M2M 4E7                                           DEMANDEUR

Greg G. George         

Ministère de la Justice

130, rue King Ouest

Bureau 3400, C.P. 36

Toronto (Ontario)    M5X 1K6                                           DÉFENDEUR


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