Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20030410

Dossier : T-633-92

Référence neutre : 2003 CFPI 425

EDMONTON (ALBERTA), LE JEUDI 10 AVRIL 2003

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE HENEGHAN

ENTRE :

SOCIÉTÉ CANADIENNE DES AUTEURS,

COMPOSITEURS ET ÉDITEURS DE MUSIQUE

                                                                                                                                              demanderesse

- et -

LANDMARK CINEMAS OF CANADA LTD.,

BRIAN MCINTOSH, TOWN CINEMA THEATRES

(1975) LTD., ROKEMAY THEATRES LTD.,

COSMOPOLITAN CINEMAS LTD.

- et -

TOWNE CINEMA THEATRES (1975) LTD., CEECO

INVESTMENTS INC., ET PLACID DEVELOPMENTS

LIMITED, FAISANT AFFAIRE SOUS LE NOM DE

BANFF CINEMA PARTNERSHIP

                                                                                                                                                     défendeurs

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE


[1]                 La présente requête est un appel de l'ordonnance rendue par le protonotaire Aronovitch le 11 juillet 2002 à l'égard de la requête par laquelle la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (la SOCAN) a cherché à faire modifier sa déclaration et à ajouter des nouveaux défendeurs. Dans son ordonnance, le protonotaire Aronovitch a accueilli la requête et a constitué comme parties les nouveaux défendeurs suivants : Brian McIntosh, à titre personnel, Rokemay Theatres Limited, Towne Cinema Theatres (1975) Limited, Cosmopolitan Cinemas Ltd. (CEECO Investments Inc.) et Placid Developments Limited, faisant affaire sous le nom de Banff Cinema Partnership. Les nouveaux défendeurs interjettent maintenant appel de cette ordonnance.

LES FAITS

[2]                 La SOCAN a introduit la présente action par une déclaration, déposée le 18 mars 1992, dans laquelle elle allègue que Landmark Cinemas of Canada Ltd. (Landmark) a violé son droit d'auteur en permettant l'exécution non autorisée d'oeuvres musicales de films projetés dans les salles de cinémas exploitées par cette dernière.

[3]                 Le 7 avril 1994, on a procédé à l'interrogatoire préalable d'un représentant de Landmark, M. McIntosh. La demanderesse dit qu'il a, à ce moment-là, confirmé que Landmark exploitait des salles de cinéma et projetait des films.


[4]                 La demanderesse allègue ensuite que, le 23 juillet 1999, Landmark a adopté une position différente sur la question de l'exploitation des salles de cinéma. Elle affirme que Landmark a déclaré, en 1999, n'avoir en aucun temps, ni à ce moment-là ni à aucun autre moment dans le passé, exploité des salles de cinéma ou projeté des films.

[5]                 M. McIntosh a subi d'autres interrogatoires préalables. La demanderesse dit que depuis son revirement de position en 1999, Landmark prétend que les activités emportant contrefaçon étaient en fait exercées par les nouveaux défendeurs. La demanderesse fonde son allégation sur les réponses de M. McIntosh à l'interrogatoire préalable mené les 16 et 17 mai 2001.

[6]                 Le 26 juin 2001, la demanderesse a signifié un avis de requête visant l'ajout de parties en tant que nouveaux défendeurs et la modification de sa déclaration. Le 23 juillet 2001, le protonotaire a rendu une ordonnance fixant un délai pour le dépôt et la signification des documents relatifs à la requête de la demanderesse et fixant la date de l'audience au 17 octobre 2001. Cette ordonnance indiquait que les intimés devaient déposer et signifier leurs dossiers de requête au plus tard le 1er octobre 2001.

[7]                 La défenderesse et les nouveaux défendeurs proposés n'ont pas signifié et déposé leurs documents à l'échéance du 1er octobre 2001. Le 10 octobre 2001, notant l'absence de documents des intimés, le protonotaire a donné une directive selon laquelle toute personne souhaitant être entendue le 17 octobre 2001 devait signifier et déposer son dossier de requête au plus tard le 15 octobre 2001 en fin de journée. Le 12 octobre 2001, des documents ont été déposés pour le compte de la défenderesse et des nouveaux défendeurs proposés.


[8]                 L'audience a eu lieu le 17 octobre 2001. Le protonotaire a offert aux parties d'ajourner l'affaire, mais aucune partie n'a souhaité se prévaloir de cette possibilité et l'affaire a donc été entendue ce jour-là. Après audition des prétentions, le protonotaire a ordonné l'ajournement de la requête. Son ordonnance comprenait aussi une directive destinée à la demanderesse au sujet du caractère suffisant de la preuve à l'appui de sa requête. L'extrait suivant est tiré de l'ordonnance :

[TRADUCTION]

INSCRIPTION

N'étant pas convaincue du caractère suffisant de la preuve et des observations présentées par la demanderesse et des observations correspondantes des intimés, je dois ajourner la requête de la demanderesse visée au paragraphe 3 ci-dessus [relative à la constitution des défendeurs comme parties] pour permette à la demanderesse de déposer des affidavits additionnels et plus complets et donner aux intimés la possibilité d'y répondre.

Le projet de déclaration modifiée ne constitue pas une preuve. Par conséquent, la demanderesse fournira, à l'appui des modifications de la déclaration qu'elle propose, des éléments de preuve supplémentaires et plus complets sur les faits et ses observations à cet égard.

La demanderesse doit faire une distinction entre, d'une part, les modifications proposées en vue d'ajouter des défendeurs et les modifications corrélatives et, d'autre part, les autres modifications qu'elle cherche à obtenir. Elle doit en traiter séparément dans ses observations. Elle doit également présenter des observations juridiques concernant la portée et l'application des articles des Règles sur lesquels elle se base et le fondement de sa demande visant l'ajout de M. McIntosh comme défendeur à titre personnel.

[9]                 Le 26 octobre 2001, la défenderesse a déposé un avis de requête en vue de faire réexaminer cette ordonnance. Le protonotaire a rejeté la requête en réexamen de la défenderesse dans une ordonnance datée du 22 mars 2002.

[10]            Dans une ordonnance datée du 11 juillet 2002, le protonotaire a accueilli la requête de la demanderesse visant à constituer comme parties les nouveaux défendeurs et à modifier la déclaration. L'extrait suivant est tiré de cette ordonnance :

[TRADUCTION]

INSCRIPTION

Je souscris aux prétentions de la demanderesse et les adopte. Par conséquent, je permettrai que les nouveaux défendeurs proposés comme parties soient ajoutés dans la présente action et que les modifications corrélatives et autres modifications proposées soient effectuées.

En particulier, j'ai la conviction que les défendeurs proposés sont nécessaires pour que la Cour prenne une décision sur les questions en litige dans la présente demande et qu'ils doivent être assujettis à la décision de la Cour dans la présente instance. J'inclus dans cette catégorie l'ajout de Brian McIntosh à titre personnel. Si, comme le critère l'exige dans les circonstances, les faits importants allégués relativement aux activités de M. McIntosh sont admis comme avérés, ils sont suffisants pour constituer une cause d'action.

[11]            Les nouveaux défendeurs interjettent maintenant appel de l'ordonnance datée du 11 juillet 2002.

OBSERVATIONS DES REQUÉRANTS


[12]            Les nouveaux défendeurs font valoir que l'ordonnance datée du 11 juillet 2002 est erronée et résulte d'une procédure injuste suivie par le protonotaire lors de l'audience initiale de la requête, tenue le 17 octobre 2001. Ils soutiennent que le protonotaire est injustement et indûment descendu dans l'arène en ajournant de son propre chef l'audience le 17 octobre 2001 et en donnant des directives à la demanderesse concernant le dépôt de documents supplémentaires pour corriger les lacunes décelées dans les documents initialement produits à l'appui de sa requête.

[13]            Les nouveaux défendeurs disent que cela était injuste pour eux et que cela leur a été préjudiciable. Ils font valoir que si, le 17 octobre 2001, la preuve et les observations présentées par la demanderesse étaient insuffisantes, la requête aurait dû être rejetée sans autre intervention de la Cour.

[14]            Les nouveaux défendeurs prétendent que le protonotaire a commis une erreur de principe en permettant à la demanderesse d'apporter des modifications à sa déclaration, lesquelles modifications portaient sur le fond et étaient régies par l'article 75 des Règles de la Cour fédérale (1998). Ils soutiennent que le protonotaire a commis une erreur en considérant ces modifications comme des modifications corrélatives régies par le paragraphe 104(2) des Règles. Ils affirment que les modifications ont pour effet de contourner la prescription prévue à l'article 41 de la Loi sur le droit d'auteur, L.R.C. 1985, ch. C-42 (la Loi).

OBSERVATIONS DES INTIMÉES


[15]            La demanderesse fait valoir que le protonotaire n'a pas commis d'erreur de droit et n'a pas incorrectement exercé son pouvoir discrétionnaire en accueillant la requête visant à ajouter les nouveaux défendeurs. Elle soutient que le protonotaire a correctement traité la question conformément à l'article 104 des Règles et qu'il n'était pas nécessaire d'examiner les règles générales relatives aux modifications des actes de procédure prévues à l'article 75 des Règles.

[16]            La demanderesse ajoute que ni la défenderesse ni les nouveaux défendeurs n'ont interjeté appel de l'ordonnance datée du 17 octobre 2001 et qu'ils ont reconnu la compétence de la Cour en déposant leurs défenses.

[17]            La demanderesse soutient que le protonotaire n'a pas agi de façon injuste en ajournant l'audience le 17 octobre 2001 et en lui donnant des directives concernant le dépôt d'éléments de preuve supplémentaires. Elle note aussi que les nouveaux défendeurs ont déposé des observations additionnelles en exécution de l'ordonnance datée du 17 octobre 2001.

[18]            La demanderesse fait valoir que le contexte dans lequel l'ordonnance frappée d'appel a été rendue est déterminant. Il s'agit d'une ordonnance rendue par le protonotaire dans le cadre de la gestion de l'instance. Se fondant sur la décision Microfibres Inc. c. Annabel Canada Inc. (2001), 214 F.T.R. 256, du juge Gibson, la demanderesse prétend qu'il faut faire preuve d'une grande retenue à l'égard des ordonnances discrétionnaires rendues par un juge ou un protonotaire responsable de la gestion de l'instance.


[19]            La demanderesse prétend que la question de la constitution de personnes comme parties relève essentiellement du juge responsable de la gestion de l'instance. En l'espèce, la demanderesse a à juste titre cherché à ajouter les nouveaux défendeurs conformément à l'article 104 des Règles. Il devrait y avoir ajout de parties lorsque cela est nécessaire pour assurer une instruction complète et le règlement des questions en litige dans l'instance et assujettir les nouvelles parties à la décision de la Cour. Cette dernière a seulement besoin d'être convaincue que l'ajout n'est pas complètement fallacieux et que les inconvénients causés sont justifiés. À cet égard, la demanderesse s'appuie sur la décision Eastman Kodak Co. c. Hoyle Twines Ltd. (1985), 5 C.P.R. (3d) 264 (C.F. 1re inst.). Elle ajoute que le fait de présenter tardivement une requête visant la constitution de personnes comme parties ne justifie pas qu'on rejette la requête et invoque à ce sujet la décision Canastrand Industries Ltd. c. « Lara S » (Le) (1991), 48 F.T.R. 188.

[20]            La demanderesse fait valoir que sa demande vise une violation persistante par les défendeurs de son droit d'auteur et que cette violation constitue une cause d'action actuelle. Par conséquent, la demanderesse dit que l'argumentation au sujet de la prescription doit être examinée au procès et devrait être soulevée en tant que moyen de défense à ce moment-là. Les défendeurs invoquent à cet égard la décision Eastman Kodak, précitée.

ANALYSE


[21]            La norme de contrôle applicable pour un appel d'une décision d'un protonotaire est examinée dans l'arrêt Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd., [1993] 2 C.F. 425 (C.A.). On ne peut toucher une telle ordonnance en appel à moins qu'elle soit clairement erronée, en ce sens que le protonotaire a exercé son pouvoir discrétionnaire en se fondant sur des principes erronés ou une mauvaise appréciation des faits, ou qu'elle soulève une question fondamentale pour l'issue de l'affaire, auxquels cas le juge qui procède à l'examen doit exercer de nouveau le pouvoir discrétionnaire dont était investi le protonotaire.

[22]            Les questions de la constitution de nouvelles parties et de la modification de l'acte de procédure ne soulèvent pas, en l'espèce, une question fondamentale pour l'issue de l'affaire. Par conséquent, la Cour ne peut pas exercer de nouveau le pouvoir discrétionnaire du protonotaire. La question qui se pose est donc de savoir si l'ordonnance datée du 11 juillet 2002 du protonotaire était « clairement erronée » .

[23]            La requête dont le protonotaire a été saisi visait à constituer comme parties à l'instance de nouvelles personnes en vertu de l'article 104 des Règles. L'alinéa 104(1)b) est pertinent :


La Cour peut, à tout moment, ordonner :

b) que soit constituée comme partie à l'instance toute personne qui aurait dû l'être ou dont la présence devant la Cour est nécessaire pour assurer une instruction complète et le règlement des questions en litige dans l'instance; toutefois, nul ne peut être constitué codemandeur sans son consentement, lequel est notifié par écrit ou de telle autre manière que la Cour ordonne.

At any time, the Court may

(b) order that a person who ought to have been joined as a party or whose presence before the Court is necessary to ensure that all matters in dispute in the proceeding may be effectually and completely determined be added as a party, but no person shall be added as a plaintiff or applicant without his or her consent, signified in writing or in such other manner as the Court may order.


[24]            L'élément d'appréciation dominant dans cet alinéa est que toutes les parties nécessaires pour assurer une instruction complète et le règlement des questions en litige dans l'action devraient être présentes devant la Cour et assujetties à sa décision.

[25]            Pour rendre une ordonnance constituant de nouvelles parties, on doit exercer un pouvoir discrétionnaire et, en l'espèce, le protonotaire était investi de ce pouvoir. Il ressort de son inscription dans l'ordonnance datée du 11 juillet 2002 qu'il a appliqué les principes appropriés pour examiner la requête dont il était saisi.

[26]            Le paragraphe 104(2) des Règles est rédigé comme suit :


L'ordonnance rendue en vertu du paragraphe (1) contient des directives quant aux modifications à apporter à l'acte introductif d'instance et aux autres actes de procédure.

An order made under subsection (1) shall contain directions as to amendment of the originating document and any other pleadings.



[27]            Dans la mesure où le protonotaire a autorisé la demanderesse à modifier sa déclaration comme suite à la constitution comme parties des nouveaux défendeurs, il s'avère qu'il avait compétence pour rendre cette ordonnance compte tenu du paragraphe 104(2). Le fait qu'on ait ajouté les nouveaux défendeurs en tant que parties dans la présente action n'empêche pas que ces derniers invoquent la prescription comme moyen de défense. Les tribunaux ont à maintes reprises répété que la question de savoir si le moyen de défense fondé sur la prescription peut être invoqué dépend de la preuve présentée. Je renvoie à cet égard aux arrêts Canastrand Industries Ltd., précité, paragraphe 8, Watt c. Canada (Transports Canada), [1998] A.C.F. no 49 (C.A.) (QL), autorisation de pourvoi devant la CSC refusée, [1998] C.S.C.R. no 118, et Kibale c. La Reine (1990), 123 N.R. 153 (C.A.F.).

[28]            En l'espèce, les nouveaux défendeurs ne sont pas privés du droit d'invoquer la prescription comme moyen de défense. Ce moyen doit cependant être examiné en bonne et due forme dans le contexte de l'ensemble de l'action et après l'examen de la preuve au moment du procès.

[29]            Les nouveaux défendeurs font valoir que le protonotaire a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon erronée en accueillant la requête de la demanderesse. Plus tôt, j'ai exposé le critère général applicable pour l'examen d'une décision discrétionnaire rendue par un protonotaire, mais cette question mérite d'être abordée à nouveau compte tenu du fait que la décision frappée d'appel a été rendue par le protonotaire dans le cadre de la gestion de l'instance.

[30]            Dans l'arrêt Sawridge Band c. Canada, [2002] 2 C.F. 346 (C.A.), le juge Rothstein, s'exprimant au nom de la Cour d'appel fédérale, a parlé du degré de retenue à l'égard des décisions rendues par les juges responsables de la gestion de l'instance. Il a écrit, au paragraphe 11 :

Nous tenons à profiter de l'occasion pour énoncer la position prise par la Cour dans les cas où une ordonnance rendue par le juge responsable de la gestion d'une instance a été portée en appel. Il faut donner au juge responsable une certaine latitude aux fins de la gestion de l'instance. La Cour n'intervient que dans les cas où un pouvoir discrétionnaire judiciaire a manifestement été mal exercé. Cette approche a été énoncée d'une façon juste par la Cour d'appel de l'Alberta dans l'arrêt Korte c. Deloitte, Haskins and Sells (1995), 36 Alta. L.R. (3d) 56, au paragraphe 3; elle s'applique en l'espèce. Nous adoptons les remarques ci-après énoncées :         


[TRADUCTION] Il s'agit d'un litige fort compliqué. L'instance est gérée, et ce, depuis 1993. Les ordonnances qui ont ici été rendues sont discrétionnaires. Nous avons déjà dit et nous tenons à répéter qu'il faut donner une certaine « marge de manoeuvre » au juge responsable de la gestion de l'instance dans une affaire complexe lorsqu'il s'agit de régler des questions interlocutoires interminables et de faire avancer l'affaire jusqu'au procès. Dans certains cas, le juge responsable de la gestion de l'instance doit faire preuve d'ingéniosité de façon à éviter que l'on s'embourbe dans un tas de questions procédurales. La Cour n'intervient que dans les cas où un pouvoir discrétionnaire judiciaire a manifestement été mal exercé. Les ordonnances minutieusement libellées que le juge responsable de la gestion de l'instance a rendues en l'espèce démontrent une bonne connaissance des règles et de la jurisprudence pertinente. En particulier, l'ordonnance dispose que les parties peuvent à leur gré demander au juge responsable de la gestion de l'instance d'être libérées d'une obligation trop lourde imposée par l'ordonnance. Il n'a pas été démontré qu'une erreur ait clairement été commise; nous refusons d'intervenir. La chose cause peut-être un inconvénient à certaines parties, mais cela ne veut pas pour autant dire qu'une erreur susceptible de révision a été commise. Il n'incombe pas à la Cour de fignoler les ordonnances rendues dans des procédures interlocutoires, en particulier dans un cas comme celui-ci.

[31]            Dans la décision postérieure Microfibres Inc., précitée, le juge Gibson a adopté ce raisonnement et a conclu qu'on devrait faire montre du même degré élevé de retenue à l'égard des décisions rendues par les protonotaires dans le cadre d'une gestion d'instance. Il a dit ce qui suit, aux paragraphes 11 et 12 :

J'arrive à la conclusion que les observations du juge Rothstein devraient s'appliquer par analogie à la décision discrétionnaire rendue par un protonotaire dans le cadre de la gestion d'une instance complexe comme celle visée par les présentes. Le protonotaire chargé de la gestion de l'instance doit avoir la même marge de manoeuvre que le juge exerçant les même fonctions. Pour reprendre les propos de la Cour d'appel de l'Alberta cités par le juge Rothstein :

[...] il faut donner une certaine « marge de manoeuvre » au juge responsable de la gestion de l'instance [et, aux fins de la présente espèce, au protonotaire chargéde la gestion de l'instance] dans une affaire complexe lorsqu'il s'agit de régler des questions interlocutoires interminables et de faire avancer l'affaire jusqu'à l'étape du procès.


À l'instar du juge chargé de la gestion de l'instance, le protonotaire appelé à exercer la même fonction connaît bien la procédure en cause, alors que le juge de première instance siégeant en appel de la décision discrétionnaire rendue par le protonotaire dans ce contexte ne peut généralement pas avoir le même degré de familiarisation.

Pour résumer, je considère la sagesse dont sont empreints les propos tenus par le juge Rothstein au nom de la Cour d'appel, par analogie, comme une clarification de la norme de contrôle applicable, suivant la décision Aqua-Gem, précitée, à l'ordonnance discrétionnaire d'un protonotaire.

[32]            Vu ce qui précède et compte tenu des observations des avocats des requérants, je ne suis pas convaincue que la décision du protonotaire était fondée soit sur un principe erroné soit sur une mauvaise appréciation des faits ou qu'elle constituait de toute autre façon une mauvaise utilisation du pouvoir judiciaire discrétionnaire.

[33]            L'appel est rejeté. Les dépens suivront l'issue de la cause.

                                           ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que l'appel soit rejeté. Les dépens suivront l'issue de la cause.

« E. Heneghan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Sandra Douyon de Azevedo, LL.B.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                             T-633-92

INTITULÉ :                           SOCIÉTÉ CANADIENNE DES AUTEURS, COMPOSITEURS ET ÉDITEURS DE MUSIQUE c. LANDMARK CINEMAS OF CANADA ET AL

LIEU DE L'AUDIENCE :                 EDMONTON (Alb.)

DATE DE L'AUDIENCE :              LE 8 AVRIL 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :                     LE 10 AVRIL 2003

COMPARUTIONS :

Charles E. Beall                        POUR LA DEMANDERESSE

George H. Akers                      POUR LE DÉFENDEUR

(Brian MacIntosh)

Howard J. Sniderman              POUR LES DÉFENDERESSES

(Placid Developments, Ceeco Investments)

Allan J. Sattin                           POUR LA DÉFENDERESSE

(Towne Cinema Theatres)

Mark Lindskoog                       POUR LA DÉFENDERESSE

(Landmark Cinemas, agissant à titre de mandataire de M. W. Patrick, avocat de Cosmopolitan Cinemas)

Michael Jamison                        POUR LA DÉFENDERESSE

(Rokemay Theatres)


- 2 -

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Gowling Lafleur Henderson s.r.l.                        POUR LA DEMANDERESSE

Avocats

Toronto (Ont.)

Nicholl & Akers                        POUR LES DÉFENDEURS

Avocats                                     (Brian MacIntosh et Landmark

Edmonton (Alb.)                       Cinemas)

Witten s.r.l.                                POUR LES DÉFENDERESSES

Avocats                                     (Placid Developments, Ceeco

Edmonton (Alb.)                       Investments)

Spier Harben                           POUR LA DÉFENDERESSE

Avocats                                     (Towne Cinema Theatres)

Calgary (Alb.)

Patrick & Patrick                      POUR LA DÉFENDERESSE

Avocats                                     (Cosmopolitan Cinemas)

Edmonton (Alb.)

Michael Jamison                        POUR LA DÉFENDERESSE

Avocat                                       (Rokemay Theatres)

Edmonton (Alb.)

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.