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Date : 20041202

Dossier : IMM-9774-03

Référence : 2004 CF 1690

Toronto (Ontario), le 2 décembre 2004

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE MACTAVISH

ENTRE :

                                                      NIURKA NIEBLA GALVEZ

                                                                                                                                    demanderesse

                                                                             et

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Niurka Niebla Galvez est citoyenne de Cuba. Elle prétend craindre d'être persécutée par les autorités gouvernementales cubaines du fait des opinions politiques qu'on lui impute et de son appartenance à un groupe social, à savoir ceux que ne désirent pas se joindre aux partis politiques. Elle prétend également être une personne à protéger.

[2]                La Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a rejeté la demande d'asile de Mme Galvez.

[3]                Elle vise maintenant à obtenir l'annulation de la décision de la Commission, alléguant que celle-ci l'a privée du droit à une audience équitable. Elle fait également valoir que plusieurs des conclusions de la Commission quant à la crédibilité étaient manifestement déraisonnables et que la Commission a omis de tenir compte d'éléments de preuve importants concernant le risque auquel elle ferait face si elle était forcée de retourner à Cuba.

La Commission a-t-elle privé Mme Galvez du droit à une audience équitable?

[4]                Mme Galvez signale plusieurs exemples tirés de la transcription où, selon elle, la commissaire a agi de manière à l'empêcher de bien exposer son point de vue. J'ai examiné avec soin la transcription et j'estime que cette observation n'est absolument pas fondée.

[5]                Le premier incident mentionné par l'avocate de Mme Galvez est constitué des paroles de la commissaire disant à Mme Galvez qu'elle devrait écouter les questions posées et essayer d'y répondre. Je ne vois rien d'inapproprié dans cette remontrance.

[6]                On constate que l'intervention de la commissaire suit immédiatement une demande de la part de la propre avocate de Mme Galvez de cesser de répéter ses réponses.


[7]                Mme Galvez réfère ensuite à un moment, lors de l'audience, où la commissaire lui demande si elle va bien et si elle a besoin d'une pause. Elle soumet que cela démontrait qu'elle était stressée lors de l'audience. Il n'y a aucun doute que le fait de témoigner dans une instance judiciaire est très stressant, en particulier lorsque les allégations en cause sont de la nature de ce que la Commission entend couramment. Toutefois, à cet égard, la transcription ne révèle rien de plus que de la sollicitude de la part de la commissaire à l'égard de Mme Galvez.

[8]                À un autre moment, la commissaire a demandé à Mme Galvez de laisser l'APR compléter ses questions avant d'essayer d'y répondre. Il s'agit d'une demande éminemment raisonnable, puisqu'il devient difficile de transcrire l'audience lorsque plusieurs personnes parlent en même temps.

[9]                Je ne suis pas non plus convaincue que le fait que Mme Galvez ait manifestement eu mal à la tête au cours de l'audience a, d'une façon ou d'une autre, compromis l'équité du processus. Mme Galvez était représentée devant la Commission par une conseillère en immigration expérimentée. Si elle avait été trop malade pour continuer, il n'y a aucun doute que celle-ci aurait sollicité un ajournement en son nom. En outre, il convient de noter que Mme Galvez n'allègue pas que la maladie ait compromis sa capacité à faire la preuve de ses prétentions.

[10]            Enfin, l'avocate de Mme Galvez signale un échange entre la demanderesse et la commissaire, au cours duquel Mme Galvez accuse cette dernière de lui dire de garder le silence. L'avocate concède que la commissaire n'a jamais dit à Mme Galvez de garder le silence, mais elle soutient que la question est de savoir si celle-ci avait le sentiment d'être restreinte dans sa capacité à présenter son histoire et si elle avait une crainte de partialité de la part de la commissaire.

[11]            Le critère quant à la question de savoir s'il existe une crainte raisonnable de partialité dans des circonstances données est bien connu. Dans l'arrêt Committee for Justice and Liberty c. Canada (L'Office national de l'énergie), [1978] 1 R.C.S. 369, la Cour suprême du Canada a décrit le critère en statuant qu'il faut se demander « à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique » . Il s'agit d'un critère objectif.

[12]            Même en examinant globalement l'ensemble des incidents mentionnés, je ne suis pas convaincue que, en l'espèce, une personne raisonnable aurait eu une crainte de partialité de la part de la commissaire. Il en serait ainsi même si j'acceptais le fait que les commentaires susmentionnés aient été formulés sur un ton cinglant. Après avoir examiné la transcription, je ne suis pas non plus convaincue que Mme Galvez a été de quelque façon que ce soit restreinte dans sa capacité à exposer son point de vue.


Les conclusions de la Commission quant à la crédibilité étaient-elles manifestement déraisonnables?

[13]            La Commission a conclu que Mme Galvez n'était pas crédible. Sa conclusion était fondée sur un certain nombre de contradictions entre le formulaire de renseignements personnels (le FRP) de Mme Galvez et son témoignage lors de l'audience. En outre, la Commission a fait remarquer que Mme Galvez avait omis de mentionner un certain nombre d'événements importants dans son FRP.

[14]            La Commission a fait remarquer que dans son FRP, Mme Galvez a mentionné avoir organisé une « manifestation » à la mémoire de voisins qui s'étaient noyés alors qu'ils tentaient de s'échapper de Cuba. Dans son témoignage, Mme Galvez a décrit l'événement comme une « veillée » . L'avocate du défendeur a concédé que, situés dans leur contexte, les deux mots n'étaient pas réellement contradictoires. Toutefois, elle a soumis que cela ne constituait pas, en soi, un fondement suffisant pour annuler la décision de la Commission. Je suis d'accord.

[15]            L'autre erreur alléguée par Mme Galvez relativement aux conclusions de la Commission quant à la crédibilité concerne sa prétention selon laquelle elle aurait été arrêtée et torturée psychologiquement par les autorités cubaines en 1999. La Commission a fait remarquer qu'il s'agissait d'un incident important qui n'avait pas été mentionné dans son FRP, pour conclure que Mme Galvez enjolivait son récit sur ce point.


[16]            Mme Galvez signale une mention dans son FRP comme quoi elle a été arrêtée, soumettant que cela démontre que la Commission a eu tort sur ce point. Toutefois, un examen du FRP de Mme Galvez révèle que la mention citée par l'avocate porte sur une arrestation qui a eu lieu en 2002. La Commission avait tout à fait raison de faire remarquer que Mme Galvez n'avait pas fait état dans son FRP d'une arrestation en 1999.

La Commission a-t-elle omis de tenir compte d'éléments de preuve concernant le risque auquel Mme Galvez ferait face à Cuba?

[17]            Le dernier argument avancé par Mme Galvez porte sur le risque auquel elle ferait face, selon elle, si elle était forcée de retourner à Cuba, vu qu'elle a prolongé son séjour au-delà de ce qui était prescrit dans son permis de sortie. À cet égard, Mme Galvez invoque un document de la CISR, daté du 1er juin 2001, traitant du traitement réservé par les autorités cubaines aux gens qui avaient prolongé leur séjour au-delà de ce qui était prescrit dans leur visa de sortie. Ce document mentionne que les gens dont on a conclu qu'ils avaient prolongé leur séjour au-delà de ce qui était prescrit dans leur visa de sortie pouvaient perdre leur résidence, leurs biens, leur travail et leurs rations alimentaires.


[18]            La Commission a appliqué l'arrêt de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Valentin c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1991] 3 C.F. 390, et elle a conclu qu'une loi portant sur les sorties ou les prolongations de séjour non autorisées est une loi d'application générale et non une forme de persécution. La Commission a fait remarquer qu'il ne faudrait pas permettre aux gens qui n'ont pas subi de persécution dans leur pays d'origine de se fabriquer un fondement à une demande d'asile en transgressant une telle loi.

[19]            La Commission a également cité la décision dans l'affaire Castaneda c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] A.C.F. no 1090, qui a conclu que les peines encourues à Cuba pour la transgression des lois régissant les sorties ou les prolongations de séjour non autorisées n'étaient pas plus excessives que celles en cause dans l'arrêt Valentin.

[20]            Je ne suis pas convaincue que la Commission a commis une erreur à cet égard. D'abord, l'omission de la part d'un arbitre de mentionner des documents en particulier ne signifie pas qu'il n'a pas tenu compte des documents pour rendre sa décision : voir les arrêts Woolaston c. Canada (Ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration), [1973] R.C.S. 102, et Hassan c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1992] F.C.J. no 946.


[21]            De plus, le rapport cité par Mme Galvez fait également remarquer que la répression à l'encontre des défenseurs des droits de l'homme est en déclin à Cuba et qu'une sortie illégale n'est plus considérée comme un crime politique. En outre, bien que notant qu'un certain nombre de facteurs déterminent la façon dont une personne est traitée lors de son retour à Cuba, le document mentionne également que, en général, la peine infligée n'est pas l'emprisonnement, mais qu'il y a [traduction] « une possibilité de perte d'emploi et de différents embêtements mineurs de nature administrative » .

Conclusion

[22]            Pour ces motifs, la demande est rejetée.

Certification

[23]            Aucune question n'a été proposée par les parties en vue de la certification et le dossier n'en soulève aucune.


                                                                ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.          La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.          Aucune question grave de portée générale n'est certifiée.

    « A. Mactavish »

                                                                                                                                                     Juge                        

Traduction certifiée conforme

Christian Laroche, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                 IMM-9774-03

INTITULÉ :                                                                NIURKA NIEBLA GALVEZ

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

DATE DE L'AUDIENCE:                                         LE 1er DÉCEMBRE 2004

LIEU DE L'AUDIENCE :                                          TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE:                                                 LA JUGE MACTAVISH

DATE DES MOTIFS :                                               LE 2 DÉCEMBRE 2004

COMPARUTIONS :

Christina Gural                                                   POUR LA DEMANDERESSE

Catherine Vasilaros                                                        POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Christina Gural

Avocate

Toronto (Ontario)                                                          POUR LA DEMANDERESSE

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                                POUR LE DÉFENDEUR


                               COUR FÉDÉRALE

Date : 20041202

Dossier : IMM-9774-03

ENTRE :

NIURKA NIEBLA GALVEZ

                                                                        demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                               défendeur

                                                                      

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE

                                                                      


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