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Date : 20010213

Dossier : T-929-00

Référence neutre : 2001 CFPI 64

Ottawa (Ontario), le 13 février 2001

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEFE

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

demandeur

- et -

GHADA HAGGAG

défenderesse

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O'KEEFE

La procédure


[1]         Il s'agit d'un appel interjeté en vertu du paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29 (la Loi) et de l'article 21 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, à l'encontre de la décision rendue par le juge de la citoyenneté Donald Tremaine (le juge de la citoyenneté) le 29 mars 2000. Dans cette décision, le juge de la citoyenneté a accueilli la demande de citoyenneté canadienne présentée par la défenderesse. Le demandeur, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, demande à la Cour de prononcer une ordonnance annulant cette décision.

Les faits

[2]         La défenderesse, Mme Ghada Haggag, est née dans les Émirats arabes unis, mais est une Palestinienne apatride de naissance. La défenderesse est arrivée au Canada le 27 mai 1994 et a obtenu le droit d'établissement le 15 juillet 1994. La défenderesse a présenté sa demande de citoyenneté le 27 mai 1999 et son entrevue a eu lieu le 29 mars 2000. À ce moment, elle était mère d'un enfant né au Canada et a donné naissance peu après, à la fin avril, à un deuxième enfant né au Canada.

[3]         Dans sa décision, le juge de la citoyenneté a statué que la défenderesse avait satisfait au critère de résidence fixé par l'alinéa 5(1)c) de la Loi, qui exige au moins trois ans (1 095 jours) de résidence au Canada dans les quatre ans qui ont précédé la date de la demande de citoyenneté. La défenderesse s'est absentée du Canada pendant 762 jours au total dans les quatre ans qui ont précédé sa demande de citoyenneté, de sorte qu'il lui manquait 397 jours pour atteindre les 1 095 jours de résidence requis pour satisfaire au critère de résidence fixé par l'alinéa 5(1)c). Voici ce qu'a dit le juge de la citoyenneté dans ses motifs :


[Traduction] L'audition de la cliente a eu lieu aujourd'hui. Résultat de 19/20 à l'examen oral. Elle a obtenu un diplôme en dentisterie à Damas avant d'arriver au Canada. Bien que ses périodes « à l'extérieur » du Canada totalisent 762 jours, du mois d'octobre 97 au mois d'octobre 99, elle se trouvait au Japon pour poursuivre des études supérieures en dentisterie (certificat et lettre du doyen de la faculté de dentisterie versés au dossier). Elle et sa famille sont des Canadiens totalement intégrés. Selon moi : « Sa forme de présence physique indique que le Canada est et demeurera son pays. ACCUEILLI.

[4]         La demande de citoyenneté de la défenderesse fait état des absences suivantes du Canada :

Du

au

Motif

Destination

1995/11/18

1996/02/09

Mariage

É.A.U.

1997/06/18

1997/08/04

Vacances

1997/08/30

1999/03/27

Université (étudiante assistante de recherche)

Japon

1999/04/04

1999/05/29

Université (étudiante assistante de recherche)

Japon

1999/05/29

1999/06/17

Visiter la tombe de son père et recevoir les condoléances

1999/06/18

1999/10/03

Université (étudiante assistante de recherche)

Japon

[5]         Outre ses comptes bancaires, ses déclarations de revenu, son permis de conduire, son assurance-santé et son assurance sociale, son appartement et son ameublement, la défenderesse invoque les éléments suivants comme indicateurs de son lieu de résidence :

1.          Elle est apatride, n'a aucun statut ni ne mène sa vie ailleurs. Si elle n'a pas établi qu'elle a centralisé son mode de vie au Canada, elle doit être considérée comme une vagabonde, car elle n'habite nulle part ailleurs.


2.          Elle a deux enfants nés au Canada. Le fait que ses deux enfants soient Canadiens est révélateur quant à son intention et à ses agissements en qualité de Canadienne.

3.          Ses absences visaient presque exclusivement à atteindre un niveau de scolarité élevé et à s'améliorer en qualité de canadienne. Elles n'ont rien à voir avec des questions de commodité ou le désir de quitter son ancien foyer.

4.          Ses absences sont toutes appuyées par un permis de retour pour résidents permanents. Avant son départ, elle s'est présentée au ministère de l'Immigration, a révélé ses intentions et a informé les fonctionnaires que ses absences étaient temporaires et qu'elles reviendrait au Canada.

[6] Les questions en litige

1.          Quelle est la norme de contrôle applicable à la décision de l'agent des visas?

2.          Le juge de la citoyenneté a-t-il commis une erreur en concluant que la défenderesse satisfaisait aux exigences en matière de résidence fixées par l'alinéa 5(1)c) de la Loi?


Les prétentions du demandeur

[7]         Le demandeur fait valoir que les pièces documentaires jointes à l'affidavit de Ghada Haggag n'ont pas été signées sous serment et doivent donc être écartées. De plus, le demandeur soutient que les pièces 1, 2 et 3 n'ont pas été produites devant le juge de la citoyenneté.

[8]         Le demandeur soutient que la norme de contrôle appropriée est celle énoncée par le juge Lutfy (devenu depuis juge en chef adjoint) dans l'affaire Lam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 164 F.T.R. 177, à la page 188 (C.F. 1re inst.) et que cette norme « est une norme qui est proche de la décision correcte » .

[9]         Le demandeur soutient qu'un demandeur ne peut se contenter de rassembler les documents nécessaires (déclarations de revenu, carte bancaire, etc.) pour établir qu'il réside au Canada et cite la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Rahman (29 avril 1999), Dossier T-2161-97 (C.F. 1re inst.).


[10]       Le demandeur affirme que le critère établi dans la décision Re Papadogiorgakis, [1978] 2 C.F. 208 (C.F. 1re inst.) ne doit pas non plus être appliqué dans le cas de la défenderesse. Le demandeur fait valoir que la défenderesse n'est pas revenue fréquemment et n'a pas pris la plupart de ses vacances au Canada pendant ses études à l'étranger. De plus, la seule preuve produite pour prouver qu'elle a établi sa résidence au Canada se résume aux « documents habituels » .

[11]       Le demandeur invoque aussi l'affaire Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Arico (2 juin 1999) Dossier T-865-98 (C.F. 1re inst.), dans laquelle le ministre a interjeté appel de la décision par laquelle le juge de la citoyenneté a accueilli la demande de citoyenneté. Dans l'affaire Arico, précitée, la défenderesse avait passé de « longues périodes à l'extérieur du Canada ... pour poursuivre ses études » . La Cour a conclu que la défenderesse n'avait pas établi sa résidence au Canada.

[12]       Selon le demandeur, la décision de la défenderesse d'étudier au Japon était volontaire et aucun élément de preuve n'établit qu'elle a tenté de trouver un programme de formation similaire au Canada. Le demandeur soutient de plus que la défenderesse a mentionné à plusieurs reprises qu'elle était venue au Canada avec ses parents et avec ses frères et soeurs et que de nombreux membres de sa famille se trouvent en Nouvelle-Écosse. Le demandeur affirme donc que, si elle a des attaches avec le Canada, ce sont celles qui la relient à sa famille et non au pays. Le demandeur souligne également que le dossier ne donne aucune indication quant aux allées et venues du conjoint de la défenderesse, si ce n'est qu'elle s'est rendue dans les Émirats arabes unis en 1995 pour l'épouser. Le demandeur souligne en outre que la défenderesse n'a jamais dit que son conjoint était déjà venu au Canada.


[13]       Le demandeur invoque l'affaire Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Wu (28 juillet 1999), Dossier T-451-99 (C.F. 1re inst.) dans laquelle la demanderesse de la citoyenneté avait passé environ la moitié de son temps au Canada, était demeurée au Canada pendant les 15 premiers mois suivant le début de sa grossesse, possédait une maison au Canada et avait deux enfants qui fréquentaient l'université à Toronto. Le juge Evans a néanmoins accueilli l'appel du ministre parce qu' « on ne peut dire que son mode de vie habituel soit centralisé ici » .

[14]       Le demandeur fait valoir que la défenderesse a obtenu le droit d'établissement en juillet 1994 et qu'elle n'a présenté sa demande de citoyenneté que le 27 mai 1999. Sa période de quatre ans a donc débuté en mai 1995. Le demandeur soutient que, bien que la preuve indique que la défenderesse est demeurée au Canada 16 mois avant sa première absence, elle n'est demeurée au Canada que pendant les cinq premiers mois et demi de la période pertinente. Le demandeur soutient que, comme dans l'affaire Wu, la défenderesse n'a pas démontré qu'elle avait centralisé son mode de vie au Canada, même si elle y est demeurée 16 mois avant sa première absence.

[15]       Le demandeur affirme que je devrais appliquer le raisonnement que j'ai adopté dans l'affaire Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Al Farra (28 juin 2000), Dossier T-1237-99 (C.F. 1re inst.) à la présente demande et que le demandeur a produit moins de preuve que Al Farra.


Les prétentions de la défenderesse

[16]       La défenderesse a indiqué qu'elle et l'avocat qui a reçu son serment pourraient se présenter en Cour pour attester que les pièces ont été jointes à son affidavit et ont donc été soumises régulièrement à la Cour.

[17]       De plus, la défenderesse a soulevé les questions suivantes dans son mémoire :

1.          Quelle est la norme de contrôle applicable à la décision du juge de la citoyenneté?

La défenderesse est d'accord avec le demandeur pour dire que le juge Lutfy (devenu depuis juge en chef adjoint) a bien énoncé cette norme dans l'affaire Lam, précitée.

2.          Le juge de la citoyenneté a-t-il commis une erreur de droit selon la norme de contrôle applicable?


La défenderesse n'est pas d'accord avec la façon dont le demandeur utilise la norme de contrôle et invoque le passage suivant de la page 188 de la décision Lam précitée : « le juge siégeant en révision ne devrait pas remplacer arbitrairement cette conception par une conception différente de la condition en matière de résidence. » La défenderesse fait valoir que, si la norme de contrôle est proche de celle de la décision correcte, elle ne correspond pas à celle de la décision correcte. La défenderesse soutient que la norme de contrôle consiste en un examen visant à déterminer si le juge de la citoyenneté a fourni des motifs clairs démontrant qu'il a bien compris le droit.

La défenderesse soutient que le juge de la citoyenneté a rendu sa décision en cochant toutes les cases pertinentes et en fournissant des motifs écrits revêtant la forme habituelle des décisions en matière de citoyenneté. Par conséquent, la défenderesse soutient que, si cette décision est examinée en regard de la norme de contrôle énoncée dans la décision Lam, la Cour ne devrait pas intervenir. De l'avis de la défenderesse, le juge de la citoyenneté a fait preuve d'une compréhension et d'une application claires de la loi.

De plus, la défenderesse affirme que le juge de la citoyenneté a examiné la question des absences de Mme Haggag et l'a précisé dans sa décision. Le juge de la citoyenneté s'est aussi prononcé directement sur les questions de sa présence physique au Canada et de la centralisation de son mode de vie au Canada. Par conséquent, la défenderesse soutient que le juge de la citoyenneté n'a pas commis d'erreur donnant ouverture au contrôle judiciaire selon la norme de contrôle reconnue.

3.          Un examen approfondi de la décision révèle-t-il que le juge de la citoyenneté a tiré la conclusion correcte en se fondant sur des règles de droit correctes?


La défenderesse invoque la décision Singh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (26 mai 1999), Dossier T-2040-98 (C.F. 1re inst.), dans laquelle le juge MacKay a cité l'extrait suivant de la décision du juge de la citoyenneté

La jurisprudence de la Cour fédérale exige qu'une personne, afin d'établir sa résidence, fasse preuve, en esprit et en fait, d'une centralisation de son mode de vie au Canada. Si la résidence est ainsi établie, les absences du Canada n'affectent pas cette résidence, pour autant qu'il soit démontré que la personne a quitté le Canada pour une raison temporaire et qu'elle a maintenu au Canada une forme réelle et concrète de résidence.

La défenderesse affirme que cette affirmation énonce le droit avec exactitude et diffère beaucoup des prétentions du demandeur. La défenderesse fait valoir qu'un demandeur de la citoyenneté doit démontrer qu'il a centralisé son mode de vie au Canada, et non sa présence physique, pour prouver qu'il est résident du Canada. Malgré les absences de M. Singh en sa qualité d'étudiant, dans l'affaire Singh, précitée, la défenderesse soutient que le juge MacKay a confirmé qu'il aurait dû obtenir la citoyenneté après examen « de la durée et de la qualité du temps passé au Canada » . La défenderesse plaide que la Cour a confirmé que l'article 5 de la Loi vise à vérifier si le demandeur est devenu Canadien.

[18]       La défenderesse affirme que la meilleure façon d'examiner son dossier en détail consiste peut-être à trancher les six questions suggérées par madame le juge Reed dans l'affaire Koo, Re (1992), 59 F.T.R. 27 (C.F. 1re inst.).


[19]       La défenderesse soutient que ses attaches avec le Canada sont beaucoup plus importantes qu'avec tout autre pays. Elle n'a pas le droit de vivre dans un autre pays et n'a aucune attache réelle avec un autre pays. En conclusion, la défenderesse soutient qu'elle a établi en esprit et en fait la centralisation de son mode de vie au Canada.

Les dispositions législatives pertinentes

[20]             Voici ce que disent les dispositions pertinentes de la Loi sur la citoyenneté :



5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who

(a) makes application for citizenship;

(b) is eighteen years of age or over;

(c) has been lawfully admitted to Canada for permanent residence, has not ceased since such admission to be a permanent resident pursuant to section 24 of the Immigration Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

(i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and

(ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;

(d) has an adequate knowledge of one of the official languages of Canada;

(e) has an adequate knowledge of Canada and of the responsibilities and privileges of citizenship; and

(f) is not under a deportation order and is not the subject of a declaration by the Governor in Council made pursuant to section 20.

5. (1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois_:

a) en fait la demande;

b) est âgée d'au moins dix-huit ans;

c) a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent, n'a pas depuis perdu ce titre en application de l'article 24 de la Loi sur l'immigration, et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante_:

(i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent,

(ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent;

d) a une connaissance suffisante de l'une des langues officielles du Canada;

e) a une connaissance suffisante du Canada et des responsabilités et avantages conférés par la citoyenneté;

f) n'est pas sous le coup d'une mesure d'expulsion et n'est pas visée par une déclaration du gouverneur en conseil faite en application de l'article 20.

(5) The Minister or the applicant may appeal to the Court from the decision of the citizenship judge under subsection (2) by filing a notice of appeal in the Registry of the Court within sixty days after the day on which

(a) the citizenship judge approved the application under subsection (2); or

(b) notice was mailed or otherwise given under subsection (3) with respect to the application.

(5) Le ministre et le demandeur peuvent interjeter appel de la décision du juge de la citoyenneté en déposant un avis d'appel au greffe de la Cour dans les soixante jours suivant la date, selon le cas_:

a) de l'approbation de la demande;

b) de la communication, par courrier ou tout autre moyen, de la décision de rejet.


Analyse et décision

[21]             Première question

Quelle est la norme de contrôle applicable à la décision de l'agent des visas?

J'estime qu'en l'espèce, la norme de contrôle décrite par le juge Lutfy (devenu depuis juge en chef adjoint) dans l'affaire Lam, précitée, savoir « une norme qui est proche de la norme de la décision correcte » , s'applique.


[22]       J'ai examiné la décision du juge de la citoyenneté Tremaine et, bien qu'il n'ait pas précisé clairement quel critère légal il a décidé d'appliquer pour déterminer si la défenderesse avait satisfait aux exigences en matière de résidence fixées par l'alinéa 5(1)c) de la Loi, j'ai conclu, à partir de sa décision, qu'il a utilisé un critère semblable à celui appliqué soit dans Re Papadogiorgakis, précité, soit dans Koo, Re, précité, et non le critère énoncé dans Pourghasemi, Re (1993), 62 F.T.R. 122 (C.F. 1re inst.), qui exige au moins trois ans de présence physique au Canada.

[23]       Madame le juge Reed a énoncé six facteurs à prendre en compte pour déterminer si un demandeur de la citoyenneté a satisfait aux exigences concernant la résidence fixées par l'alinéa 5(1)c) de la Loi. Je résumerai maintenant ces facteurs et je les appliquerai aux faits de l'espèce.

[24]             J'appliquerai maintenant les facteurs dégagés dans la décision Koo, précitée :

1.          Le requérant était-il physiquement présent au Canada durant une période prolongée avant de s'absenter juste avant la date de sa demande de citoyenneté?

La défenderesse est résidente permanente depuis six ans. Ses absences sont survenues exactement au milieu de la période pertinente. La défenderesse a obtenu le droit d'établissement au Canada le 15 juillet 1994 et s'est absentée du Canada pour la première fois le 18 novembre 1995. Au cours de cette période, elle habitait en Nouvelle-Écosse.

2.          Où résident la famille proche et les personnes à charge (ainsi que la famille étendue) du requérant?

Les frères, les soeurs, la mère et la fille de la défenderesse vivent en Nouvelle-Écosse.


3.          La forme de présence physique du requérant au Canada dénote-t-elle que ce dernier revient dans son pays ou, alors, qu'il n'est qu'en visite?

La défenderesse n'a aucun autre endroit qu'elle pourrait considérer comme son pays. Elle est une Palestinienne apatride. Tout ce qu'elle possède se trouve en Nouvelle-Écosse - sa famille et son logement situé au 6028, chemin Lady Hammond, Halifax (Nouvelle-Écosse).

4.          Quelle est l'étendue des absences physiques (lorsqu'il ne manque à un requérant que quelques jours pour atteindre le nombre total de 1 095 jours, il est plus facile de conclure à une résidence réputée que lorsque les absences en question sont considérables)?

Selon le juge Tremaine de la citoyenneté, la défenderesse s'est absentée du pays pendant 762 jours au cours de la période pertinente, mais elle s'est absentée principalement pour fréquenter l'université.

5.          L'absence physique est-elle imputable à une situation manifestement temporaire (par exemple, avoir quitté le Canada pour travailler comme missionnaire, suivre des études, exécuter un emploi temporaire ou accompagner son conjoint, qui a accepté un emploi temporaire à l'étranger)?


La défenderesse soutient que la majorité de ses absences du Canada étaient nettement temporaires et reliées à un programme d'études temporaire qu'elle a maintenant terminé. Elle a séjourné au Japon pour étudier le diagnostic et le traitement en art de la prothèse dentaire du 1er octobre 1997 au 31 mars 2000.

6.          Quelle est la qualité des attaches du requérant avec le Canada : sont-elles plus importantes que celles qui existent avec un autre pays?

La défenderesse a vécu en Nouvelle-Écosse environ 15 mois avant de quitter le Canada pour la première fois. Elle a obtenu un permis de retour pour résident permanent au moment de son départ. Elle a loué un logement au Japon. Elle a payé l'impôt sur le revenu au Canada, conservait un compte bancaire au Canada, a entreposé son ameublement au Canada pendant son absence, est couverte par l'assurance-santé de la Nouvelle-Écosse et avait une fille au Canada au moment de son entrevue.

[25]       Je suis convaincu que le juge Tremaine de la citoyenneté disposait de ces renseignements, car il avait en sa possession la demande de citoyenneté de la défenderesse et il a lui-même procédé à l'entrevue de la défenderesse. Il aurait été préférable qu'il expose plus en détail le critère qu'il a appliqué, mais je suis convaincu qu'il a appliqué le critère approprié.


[26]       Après avoir examiné les facteurs dégagés dans la décision Koo, précitée, je suis convaincu que la défenderesse a centralisé son mode de vie au Canada pendant les quelque 15 mois au cours desquels elle a vécu au Canada avant son départ. Je suis aussi convaincu que ses attaches sont plus importantes avec le Canada qu'avec tout autre pays. Enfin, j'estime que la défenderesse a satisfait aux exigences en matière de résidence fixées par l'alinéa 5(1)c) de la Loi et, par conséquent, que la décision du juge Tremaine de la citoyenneté est correcte parce que les périodes de ses absences du Canada peuvent être utilisées pour établir qu'elle répond aux conditions de résidence.

[27]       Ma décision dans l'affaire Al Farra, précitée, peut être distinguée du fait que le demandeur de la citoyenneté n'est demeuré au Canada que 7 jours avant sa première absence du pays.

[28]       L'appel du demandeur est donc rejeté.

ORDONNANCE

[29]       LA COUR STATUE QUE l'appel est rejeté.

                                                                            « John A. O'Keefe »              

                                                                                               J.C.F.C.                     

Ottawa (Ontario)

13 février 2001

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :                     T-929-00         

INTITULÉ DE LA CAUSE :    Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

c. Ghada Haggag          

LIEU DE L'AUDIENCE :                     Halifax (Nouvelle-Écosse)        

DATE DE L'AUDIENCE :                   17 janvier 2001            

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR MONSIEUR LE JUGE O'KEEFE

EN DATE DU :                                     13 février 2001

ONT COMPARU :

Me Lori Rasmussen                                            POUR LE DEMANDEUR

Me Scott Sterns                                                 POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris Rosenberg                                              POUR LE DEMANDEUR

Sous-procureur du Canada

Ottawa (Ontario)

Jamieson Sterns                                                 POUR LA DÉFENDERESSE

Halifax (Nouvelle-Écosse)

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