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Date : 20030930

Dossier : IMM-6329-02

Référence : 2003 CF 1125

Toronto (Ontario), le 30 septembre 2003

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE LAYDEN-STEVENSON                                 

ENTRE :

JOZSEF OLAH, MARIA JOZSEFNE OLAH,

KALMAN OLAH et ZOLTAN OLAH

                                                                                                                                      demandeurs

                                                                            et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                 Un agent d'examen des risques avant renvoi (ERAR) a conclu que M. Olah, sa conjointe et leurs deux enfants ne seraient pas exposés à un risque s'ils étaient renvoyés en Hongrie. Les demandeurs sollicitent le contrôle judiciaire de cette décision.


[2]                 Les demandeurs sont des Hongrois d'origine rome. Ils ont affirmé craindre avec raison d'être persécutés pour ce motif; leur revendication a été rejetée par l'ancienne section du statut de réfugié (la SSR) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Ils ont demandé à la SSR de rouvrir leur cas après que le cousin de Mme Olah eut été tué par un policier qui n'était pas de service, à Pand, en Hongrie. Ils se sont fondés sur le fait que, lorsqu'il est retourné en Hongrie, le fils aîné de M. et de Mme Olah s'était rendu à Pand pour visiter la tombe et que le policier qui avait tué le cousin l'avait battu. Les demandeurs ont également soumis certains éléments de preuve au sujet d'autres membres de leur famille qui parlaient des difficultés auxquelles ils faisaient face en Hongrie, censément à cause du meurtre. La requête visant la réouverture de la revendication a été rejetée et l'autorisation de demander le contrôle judiciaire de cette décision a été refusée.


[3]                 Les demandeurs affirment que leur fille et son conjoint ont été reconnus à titre de réfugiés au sens de la Convention compte tenu de la preuve relative au meurtre du cousin. Une nièce et son conjoint se sont vu accorder le statut de réfugié au sens de la Convention pour la même raison. Lorsqu'ils ont demandé qu'un ERAR soit effectué, les demandeurs se sont fondés sur le meurtre en question pour étayer l'allégation selon laquelle ils étaient persécutés et étaient exposés au risque d'être soumis à la torture, ainsi qu'à une menace à leur vie et au risque de traitements ou peines cruels et inusités s'ils étaient renvoyés en Hongrie. Ils se sont également appuyés sur l'affidavit que leur fils avait établi au sujet du fait qu'on l'avait battu ainsi que sur le Formulaire de renseignements personnels (le FRP) soumis par chacun des membres de la famille qui s'était vu reconnaître le statut de réfugié. Les demandeurs ont soutenu que les membres de leur famille étaient ciblés.

[4]                 La famille Olah soutient que l'agent chargé de l'ERAR n'a pas tenu compte d'éléments de preuve touchant le coeur de la décision. Tout en reconnaissant qu'il n'est pas nécessaire que le tribunal mentionne expressément chaque élément de preuve, les demandeurs maintiennent qu'il n'a pas été tenu compte d'éléments de preuve cruciaux ou que certains éléments ont été interprétés d'une façon erronée. Il est soutenu qu'il aurait fallu tenir une audience parce que, en réalité, l'agent ne croyait tout simplement pas les demandeurs. Par conséquent, conformément à l'alinéa 113b) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR) et à l'article 167 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement), une audience aurait dû être tenue. Enfin, les demandeurs affirment que, somme toute, ils se sont vu refuser une audience équitable.


[5]                 Le défendeur affirme que la crédibilité n'était pas remise en question; la question en litige portait sur la suffisance de la preuve. En effet, le problème n'est pas attribuable au fait que l'agent n'a pas cru les demandeurs; l'agent n'était tout simplement pas convaincu qu'il existait suffisamment d'éléments de preuve pour qu'il soit possible de conclure à l'existence d'une crainte objective de persécution. Les observations ont été examinées; l'agent a soupesé la preuve, et il a rendu une décision. L'intervention de la Cour n'est pas justifiée.


[6]                 Une bonne partie des arguments des demandeurs était axée sur le fait que d'autres membres de la famille avaient été reconnus à titre de réfugiés au sens de la Convention. Je suis d'accord avec le défendeur pour dire que l'agent chargé de l'ERAR avait raison de dire que chaque cas est apprécié selon les faits qui lui sont propres. Par conséquent, l'agent n'a pas omis de tenir compte de cette « preuve » comme l'allèguent les demandeurs. Il n'a pas considéré cette preuve comme déterminante et il avait raison à cet égard. Je souscris à l'avis selon lequel il est possible que l'agent ait interprété d'une façon erronée la preuve relative au fait que l'on avait battu le fils des demandeurs. Les motifs énoncés par l'agent ne montrent pas clairement que celui-ci ne s'est pas fondé sur la déclaration des demandeurs selon laquelle le policier qui avait censément tué le cousin avait battu leur fils, alors que les arguments présentés incluaient l'affidavit que le fils avait établi sous serment sur ce point. Toutefois, je ne considère pas l'affidavit du fils selon la perspective des demandeurs. L'affidavit est au mieux squelettique et la photographie qui l'accompagnait n'a aucune valeur probante. Étant donné qu'au début de ses motifs, l'agent chargé de l'ERAR déclare expressément que [le policier] avait [TRADUCTION] « par la suite été impliqué dans une agression sur [la personne du] fils adulte, Jozef Olah fils, lorsque celui-ci était retourné à Pand pour rendre visite à la veuve et pour déposer des fleurs sur la tombe » , l'affidavit n'a probablement pas été expressément mentionné parce qu'il avait peu de valeur et qu'il ne contenait pas suffisamment d'éléments de preuve pour étayer l'allégation des demandeurs.

[7]                 En fin de compte, j'estime ne pas avoir à déterminer si l'affaire portait sur la suffisance ou sur la crédibilité de la preuve parce que même si je concluais à l'existence d'une erreur (ce que je n'ai pas fait), l'agent a conclu que l'État offrait une protection. Les demandeurs soutiennent que la décision que Madame la juge Tremblay-Lamer a rendue dans l'affaire Molnar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] 2 C.F. 339 (1re inst.), s'applique directement aux faits de la présente espèce. Or, ce n'est pas le cas. Dans ce cas-ci, l'agent chargé de l'ERAR a expressément reconnu que les Roms continuent à être victimes d'une discrimination générale en Hongrie et que la police omet de fait d'intervenir pour prévenir les actes de violence contre les Roms. L'agent a également procédé à un long examen de la preuve documentaire indiquant les efforts que font le gouvernement et les autorités pour résoudre les problèmes des Roms. L'agent a ensuite procédé à l'examen des circonstances qui s'appliquaient au cas particulier des demandeurs, de sorte qu'il a fait une distinction entre la présente espèce et l'affaire Molnar, précitée. L'agent a conclu que les demandeurs avaient peut-être été persécutés par le passé, mais que cela ne constituait pas de la persécution.


[8]                 En ce qui concerne la crainte découlant du meurtre du cousin, l'agent a noté que les demandeurs n'étaient pas en Hongrie au mois de juin 2000, lorsque le meurtre s'était produit; ils n'avaient jamais vécu à Pand; il n'existait pas suffisamment d'éléments de preuve pour indiquer que la personne qui avait tué le cousin voudrait maintenant leur faire du mal; il n'était pas établi que l'on eût cherché à connaître les allées et venues des demandeurs ou à en savoir davantage sur eux; il n'était pas établi que l'assassin avait accès ou pouvait avoir accès à un mouvement nationaliste d'envergure nationale pour faire du mal aux demandeurs ou pour les tuer; les demandeurs ont des parents qui peuvent les aider à leur retour à Budapest, et s'il se pose des problèmes, les demandeurs peuvent solliciter la protection de l'État, et notamment celle de la police. Si la police omet de répondre, les demandeurs peuvent s'adresser au bureau du ministère public ainsi qu'au service de supervision et de contrôle du ministère de l'Intérieur.

[9]                 La conclusion que l'agent chargé de l'ERAR a tirée au sujet de la possibilité de se réclamer de la protection de l'État est convaincante, compréhensible et raisonnable. Elle ne justifie pas l'intervention de la Cour. La conclusion que je tire à ce sujet est suffisante pour qu'il soit possible de statuer sur la demande.


[10]            L'avocat des demandeurs a proposé trois questions à certifier, lesquelles se rapportent toutes aux dispositions de la LIPR et à son règlement d'application au sujet de la tenue d'une audience. Je suis d'accord avec le défendeur lorsqu'il dit que les questions proposées ne se posent pas eu égard aux faits de la présente espèce. Il se peut bien qu'il faille examiner les questions se rapportant à l'interprétation de ces dispositions ainsi qu'à l'omission de l'agent de tenir une audience, mais il est préférable de les examiner dans le cadre d'affaires où les faits justifient la chose.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE QUE la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n'est certifiée.

« Carolyn Layden-Stevenson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                  IMM-6329-02

INTITULÉ :                                                 JOZSEF OLAH, MARIA JOZSEFNE OLAH

KALMAN OLAH et ZOLTAN OLAH

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

DATE DE L'AUDIENCE :                      LE 17 SEPTEMBRE 2003

LIEU DE L'AUDIENCE :                         TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

DATE DES MOTIFS :                               LE 30 SEPTEMBRE 2003

COMPARUTIONS :

Rocco Galati                                                                      pour les demandeurs

Lisa Hutt                                                                            pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Galati, Rodriques et associés                                             pour les demandeurs

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg                                                              pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                                           Date : 20030930

                                              Dossier : IMM-6329-02

ENTRE :

JOZSEF OLAH, MARIA JOZSEFNE OLAH

KALMAN OLAH et ZOLTAN OLAH

                                                                    demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                       défendeur

                                                                                  

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE

                                                                                  

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