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Date : 20030212

Dossier : IMM-1575-02

Référence neutre : 2003 CFPI 152

Toronto (Ontario), le mercredi 12 février 2003

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE SNIDER

ENTRE :

                                                              NASIMBANU GILANI

                                                                                                                                                  demanderesse

                                                                                   

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                        défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision, rendue en date du 13 septembre 2001, par laquelle Nasimbaru Gilani (la demanderesse) a été informée qu'elle n'obtiendrait pas un permis ministériel l'autorisant à venir au Canada. La décision, prise par la gestionnaire du programme Nathalie Smoylnec (la gestionnaire du programme), a d'abord été communiquée à la demanderesse par l'agente des visas H. Michaud (l'agente des visas) le ou vers le 28 septembre 2001.


Les faits

[2]                 La demanderesse, Nasimbanu Gilani, est citoyenne du Kenya. Elle a d'abord présenté une demande de résidence permanente au Canada le 25 février 1998. La demanderesse a survécu au cancer du sein. Le 12 mai 1999, elle a reçu une « lettre requise par le devoir d'équité » l'informant que, en raison du cancer métastatique du sein dont elle souffrait, elle appartenait à une catégorie non admissible suivant le sous-alinéa 19(1)a)(ii) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2. Elle était invitée à [TRADUCTION] « répondre à la description qui était faite de son état de santé par les renseignements médicaux qu'elle possédait personnellement » .

[3]                 Le 28 mai 1999, la demanderesse a présenté une demande afin d'obtenir un permis ministériel. L'agente des visas a transféré la demande de la demanderesse à la gestionnaire du programme. Le 12 septembre 2001, la gestionnaire du programme, l'agente des visas et le médecin agréé ont discuté des raisons d'ordre humanitaire (CH) applicables à la situation. À la suite de cette discussion, la gestionnaire du programme a décidé que les raisons d'ordre humanitaire étaient insuffisantes pour justifier la délivrance d'un permis ministériel. La gestionnaire du programme, selon son affidavit, a pris cette décision après avoir examiné la nécessité pour la demanderesse de venir au Canada, la nature et la gravité de sa non-admissibilité, les traitements que la demanderesse devrait probablement recevoir et l'absence de motifs urgents justifiant le départ de la demanderesse et de sa famille du Kenya.

[4]                 Par une lettre datée du 13 septembre 2001 (la lettre de refus), l'agente des visas a informé la demanderesse que sa demande de résidence permanente et sa demande de permis ministériel étaient refusées. La portion de la lettre de refus qui touche le permis ministériel est rédigée comme suit :

[TRADUCTION]

Les facteurs d'ordre humanitaire qui justifieraient possiblement la délivrance d'un permis ministériel qui faciliterait votre admission au Canada ont été pris en compte. Après avoir examiné attentivement tous les facteurs pertinents à votre situation, il a été établi qu'il n'existe pas suffisamment de raisons d'ordre humanitaire justifiant un traitement spécial. Les frais d'hospitalisation et de traitement dans votre situation seront élevés et sont susceptibles de faire subir à des Canadiens un déplacement sur les listes d'attente d'hospitalisation et de consultation avec des spécialistes.

Les prétentions de la demanderesse

[5]                 La demanderesse a prétendu que l'agente des visas a commis une erreur de droit lorsqu'elle a omis de suivre les lignes directrices d'une politique obligatoire à l'égard de l'évaluation de la question de savoir si la délivrance d'un permis ministériel était justifiée.


[6]                 La demanderesse a en outre prétendu que l'agente des visas s'est fondée sur des renseignements inexacts sur la question du fardeau excessif étant donné que le permis ministériel délivré dans les cas de non-admissibilité pour des raisons d'ordre médical ne permet pas à un demandeur de bénéficier de l'assurance-maladie provinciale en Ontario. Par conséquent, l'admission de la demanderesse au Canada n'entraînerait aucuns frais pour les citoyens canadiens. La demanderesse a prétendu qu'elle n'a pas obtenu l'équité procédurale lorsqu'on a omis de lui donner la possibilité de traiter de la question des frais et du déplacement possible de Canadiens des listes d'attente des services de santé dans le contexte d'un permis ministériel. De plus, aucune explication n'a été donnée quant aux raisons pour lesquelles on n'a pas tenté d'obtenir les commentaires des autorités provinciales à l'égard de la question de savoir si un permis ministériel devrait être délivré, même si les trois agents des visas en l'espèce pensaient qu'il était nécessaire de le faire.

[7]                 Selon ce que prétend la demanderesse, le fait que la décision de l'agente des visas et celle de la gestionnaire du programme aient été prises le même jour constitue une entrave à l'exercice du pouvoir discrétionnaire. L'agente des visas a en outre entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire lorsqu'elle n'a pris en compte que les possibilités de fardeau excessif pour les services de santé du Canada en modifiant sa décision antérieure de délivrer un permis ministériel. Finalement, la gestionnaire du programme a entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire lorsqu'elle s'est fondée sur la recommandation de l'agente des visas. Elle devait faire plus que simplement approuver les conclusions de l'agente des visas.

Les prétentions du défendeur


[8]                 Le défendeur a prétendu que l'omission d'avoir suivi les lignes directrices ne constitue pas une erreur susceptible de contrôle (voir les décisions Vidal c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] A.C.F. no 63 (1re inst.) (QL), et Ramoutar c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] 3 C.F. 370 (1re inst.)). En outre, la preuve démontre que la gestionnaire du programme a prêté attention aux facteurs dont, selon la demanderesse, on n'a pas tenu compte lorsque la question de savoir si un permis ministériel devait être délivré a été tranchée.

[9]                 À l'égard de la prétention de la demanderesse selon laquelle on s'est fondé sur des renseignements inexacts quant à son admissibilité à l'assurance-maladie provinciale, le défendeur a fait remarquer que la correspondance sur la question a été échangée par courrier électronique entre l'agente des visas et le médecin agréé et non entre le médecin agréé et la gestionnaire du programme. Par conséquent, cette correspondance se rapporte à la décision prise à l'égard de la demande de résidence permanente et non au permis ministériel. Bien que la demanderesse ne soit pas admissible à l'assurance-maladie provinciale si elle est admise sur le fondement d'un permis ministériel, elle est admissible à l'assurance-maladie provinciale si elle obtient un droit d'établissement suivant l'article 38 de la Loi sur l'immigration.

[10]            Le défendeur a en outre prétendu que la demanderesse a effectivement eu, dans sa réponse à la lettre requise par le devoir d'équité, la possibilité de présenter des observations au médecin agréé à l'égard de l'assurance privée qu'elle détenait et de son intention de subir des traitements aux États-Unis. L'équité procédurale n'exige pas que la demanderesse ait une autre possibilité de présenter les mêmes observations.


[11]            Selon le défendeur, la prétention de la demanderesse suppose que l'agente des visas était encline à délivrer un permis ministériel, ce qui n'est pas exact. L'agent des visas qui a suggéré qu'un permis ministériel soit délivré à la demanderesse n'était pas l'agente des visas qui a envoyé la lettre de refus. En outre, la gestionnaire du programme a procédé à une évaluation indépendante de la demande présentée par la demanderesse dans le but d'obtenir un permis ministériel et ne s'est pas fondée sur la décision de l'agente des visas. Par conséquent, la gestionnaire du programme n'a pas entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire en se fondant sur les conclusions de l'agente des visas.

Les dispositions pertinentes de la Loi

[12]            La demanderesse appartenait à une catégorie non admissible suivant le sous-alinéa 19(1)a)(ii) de la Loi sur l'immigration :

19. (1) Les personnes suivantes appartiennent à une catégorie non admissible_ :

a) celles qui souffrent d'une maladie ou d'une invalidité dont la nature, la gravité ou la durée probable sont telles qu'un médecin agréé, dont l'avis est confirmé par au moins un autre médecin agréé, conclut _:

[...]

(ii) soit que leur admission entraînerait ou risquerait d'entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé;

19. (1) No person shall be granted admission who is a member of any of the following classes:

(a) persons, who are suffering from any disease, disorder, disability or other health impairment as a result of the nature, severity or probable duration of which, in the opinion of a medical officer concurred in by at least one other medical officer,

. . .

(ii) their admission would cause or might reasonably be expected to cause excessive demands on health or social services;


[13]            Le ministre peut délivrer un permis suivant l'alinéa 37(1)a) de la Loi sur l'immigration :

37. (1) Le ministre peut délivrer un permis autorisant _:

a) à entrer au Canada, les personnes faisant partie d'une catégorie non admissible;

b) à y demeurer, les personnes se trouvant au Canada qui font l'objet ou sont susceptibles de faire l'objet du rapport prévu au paragraphe 27(2).

37. (1) The Minister may issue a written permit authorizing any person to come into or remain in Canada if that person is

(a) in the case of a person seeking to come into Canada, a member of an inadmissible class; or

(b) in the case of a person in Canada, a person with respect to whom a report has been or may be made under subsection 27(2).            

Analyse

[14]            Pour les motifs ci-après énoncés, je suis d'avis que la présente demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée.

Première question en litige : La gestionnaire du programme a-t-elle commis une erreur lorsqu'elle a décidé de ne pas délivrer un permis ministériel?

(a)        La norme de contrôle


[15]            La norme de contrôle appropriée de la décision de la gestionnaire du programme de ne pas délivrer un permis ministériel est celle de la décision raisonnable simpliciter (Wynter c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 1107, au paragraphe 20 (1re inst.) (QL)). La norme a été énoncée par Mme le juge L'Heureux-Dubé dans l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) :

Tous ces facteurs doivent être soupesés afin d'en arriver à la norme d'examen appropriée. Je conclus qu'on devrait faire preuve d'une retenue considérable envers les décisions d'agents d'immigration exerçant les pouvoirs conférés par la loi, compte tenu de la nature factuelle de l'analyse, de son rôle d'exception au sein du régime législatif, du fait que le décideur est le ministre, et de la large discrétion accordée par le libellé de la loi. Toutefois, l'absence de clause privative, la possibilité expressément prévue d'un contrôle judiciaire par la Cour fédérale, Section de première instance, et la Cour d'appel fédérale dans certaines circonstances, ainsi que la nature individuelle plutôt que polycentrique de la décision, tendent aussi à indiquer que la norme applicable ne devrait pas en être une d'aussi grande retenue que celle du caractère « manifestement déraisonnable » . Je conclus, après avoir évalué tous ces facteurs, que la norme de contrôle appropriée est celle de la décision raisonnable simpliciter.

M. le juge Iacobucci, dans l'arrêt Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748, à la page 776, a défini une décision déraisonnable comme une décision qui « dans l'ensemble, n'est étayée par aucun motif capable de résister à un examen assez poussé » .

(b)        L'omission d'avoir suivi les lignes directrices

[16]            Les lignes directrices comportent une liste de questions qui « doivent être traitées » par la gestionnaire du programme dans le contexte de son évaluation des risques. La demanderesse a prétendu que l'agente des visas a limité son analyse à la question du fardeau excessif pour les services de santé du Canada et qu'elle n'a pas traité les autres questions énoncées dans les lignes directrices.


[17]            Dans la décision Cheng c. Canada (Secrétaire d'État), [1994] A.C.F. no 1318 (1re inst.)(QL), M. le juge Cullen a déclaré, au paragraphe 7, que bien que les lignes directrices ne soient pas des dispositions à caractère législatif, « l'agent d'immigration qui prend une décision doit les respecter pour assurer une certaine uniformité au sein du ministère » . Cependant, le juge Cullen a déclaré que l'omission d'un agent d'immigration de suivre la politique énoncée dans les lignes directrices ne constituait pas une erreur qui méritait que l'affaire soit renvoyée à un autre agent pour qu'il statue à nouveau sur cette affaire (voir également la décision Vidal, précitée). Le juge Cullen a accueilli la demande de contrôle judiciaire dans la décision Cheng, précitée, pour d'autres motifs.

[18]            Dans la décision Ramoutar, précitée, M. le juge Rothstein, maintenant juge à la Section d'appel, a commenté, à la page 375, la question du statut de la politique contenue dans les guides d'immigration en déclarant que « ce n'est pas parce que les hautes instances du Ministère de l'Immigration ont formulé une politique que cela donne à cette dernière le statut d'une loi » .

[19]            Par conséquent, l'omission de la gestionnaire du programme d'avoir suivi les lignes directrices, en soi, ne constituerait pas une erreur susceptible de contrôle.


[20]            En outre, un examen de la preuve révèle que la gestionnaire du programme a, en fait, suivi les lignes directrices. La partie pertinente des lignes directrices énonce que l'agent d'immigration doit prendre en compte la gravité des besoins prévisibles du demandeur en matière de services sociaux ou de services de santé en fonction de la demande de tels services par les résidents canadiens, les frais de traitements et de soins, la question de savoir le demandeur bénéficiera de l'assurance-maladie provinciale, la question de savoir si des dispositions pour des traitements et des soins et pour de l'assurance ont été prises et la question de savoir si la personne pourra possiblement travailler et subvenir à ses besoins.

[21]            L'examen des documents contenus dans le dossier certifié du tribunal révèle que la gestionnaire du programme a effectivement pris en compte un grand nombre des facteurs précédemment énumérés. Notamment, il est clair que la gestionnaire du programme a pris en compte la gravité des besoins prévisibles de la demanderesse en matière de services sociaux ou de services de santé en fonction de la demande de tels services par les résidents canadiens et les frais des traitements prévisibles pour la demanderesse. En outre, la gestionnaire du programme disposait d'éléments de preuve à l'égard de l'assurance médicale privée que détenait la demanderesse, de ses actifs financiers appréciables, de l'offre qu'elle avait reçue pour un emploi au Canada et du soutien moral et affectif qu'elle obtiendrait de sa famille au Canada. Rien n'indique que la gestionnaire du programme a omis de prendre en compte ces éléments de preuve lorsqu'elle a décidé de ne pas délivrer un permis ministériel. Par conséquent, aucune erreur susceptible de contrôle n'a été commise par la gestionnaire du programme.

(c)        Les renseignements inexacts

[22]            La deuxième question à traiter est celle de savoir si la gestionnaire du programme a commis une erreur lorsqu'elle n'a pas pris en compte le fait que la demanderesse ne pouvait pas bénéficier de l'assurance-maladie provinciale.

[23]            Les frais élevés d'hospitalisation et des traitements étaient l'une des raisons pour lesquelles la gestionnaire du programme avait refusé de délivrer un permis ministériel. Cependant, si la demanderesse obtenait un permis ministériel, elle ne serait pas admissible au régime d'assurance-maladie de l'Ontario (RAMO). Par conséquent, les frais élevés des traitements de la demanderesse n'entraîneraient pas un fardeau excessif pour les services de santé du Canada. Il appartiendrait à la demanderesse, et non au RAMO, de payer les frais des traitements. En outre, la preuve révèle que la demanderesse détenait une assurance médicale privée couvrant les frais de ses traitements et qu'elle avait des actifs financiers importants (elle était disposée à investir environ 2 M$CAN dans l'entreprise de sa soeur) qui lui permettaient de payer tous les frais non couverts par l'assurance. Son admission sur le fondement d'un permis ministériel, par conséquent, n'entraînerait pas vraiment de frais pour la province à l'égard des traitements médicaux qu'elle subirait.


[24]            Même si la gestionnaire du programme était favorable à ce que les autorités provinciales fassent des commentaires à l'égard de l'admission de la demanderesse sur le fondement d'un permis ministériel, rien n'indique que des commentaires ont été effectivement obtenus. Si la gestionnaire du programme avait communiqué avec les autorités provinciales, elle aurait appris que la demanderesse ne serait pas admissible au RAMO si elle était admise sur le fondement d'un permis ministériel. À mon avis, l'admissibilité de la demanderesse au régime d'assurance-maladie provinciale est un facteur que la gestionnaire du programme aurait dû vérifier et auquel elle aurait dû faire référence de façon précise dans sa décision à l'égard des frais élevés des traitements de la demanderesse. Par conséquent, ses conclusions à l'égard des frais des traitements médicaux de la demanderesse et du lien de ces frais avec la délivrance d'un permis ministériel étaient déraisonnables et étaient fondées sur des hypothèses inexactes.

[25]            Cependant, à mon avis, l'erreur précédemment mentionnée n'est pas suffisante pour accueillir la présente demande de contrôle judiciaire. Le facteur des frais élevés des traitements, bien qu'étant un facteur important dans la décision de la gestionnaire du programme, ne constituait que l'un des facteurs pris en compte par la gestionnaire du programme lorsqu'elle a décidé de refuser la délivrance d'un permis ministériel. La décision était en outre fondée sur le déplacement éventuel de Canadiens sur les listes d'attente des services de santé et sur l'absence de nécessité impérative d'entrer au Canada. Même si les éléments de preuve médicale démontrent que le cancer du sein dont souffre la demanderesse est stationnaire, ils démontrent aussi qu'elle devra recevoir des soins d'un oncologue et qu'elle devra probablement recevoir des traitements à l'avenir. Bien que la demanderesse soit disposée à payer les frais de tous les traitements médicaux qu'elle devra recevoir, il est probable que le fait de la soigner entraînera que des Canadiens qui attendent pour recevoir des soins de santé devront être déplacés sur les listes d'attente.


[26]            À l'égard de la question du déplacement de Canadiens sur les listes d'attente, rien dans le dossier certifié du tribunal n'est mentionné quant à l'intention de la demanderesse d'obtenir des traitements aux États-Unis. Si la demanderesse avait effectivement l'intention d'obtenir des traitements médicaux aux États-Unis, elle aurait dû soumettre ce renseignement. La décision de la gestionnaire du programme, fondée sur les autres éléments de preuve, est étayée par des motifs qui peuvent résister à un examen assez poussé.

(d)        L'entrave du pouvoir discrétionnaire de la gestionnaire du programme

[27]            La dernière question est celle de savoir si la gestionnaire du programme a entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. La question, formulée autrement, est celle de savoir si la gestionnaire du programme, en tant que représentante du ministre dans ce processus décisionnel, a vraiment pris la décision ou si elle a laissé l'agente des visas la prendre. La preuve, quoique quelque peu déroutante, m'amène à conclure que la gestionnaire du programme a pris sa décision en prenant en compte les commentaires des autres parties associées au processus. Elle n'a pas entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire.

[28]            Selon la demanderesse, l'agente des visas et la gestionnaire du programme avaient convenu de faire une recommandation favorable à la demanderesse pour qu'elle obtienne un permis ministériel, mais ont modifié leur décision après avoir reçu par courrier électronique un message du médecin agréé qui déclarait que la demanderesse serait probablement non admissible en raison du fardeau excessif. Selon la demanderesse, il s'agit là d'une entrave à l'exercice du pouvoir discrétionnaire.


[29]            Cependant, rien dans le dossier certifié du tribunal n'indique que la gestionnaire du programme avait auparavant décidé qu'un permis ministériel devrait être délivré. L'avocate de la demanderesse attire l'attention sur un message envoyé par courrier électronique par la gestionnaire du programme à l'agente des visas le 23 août 2001, message dans lequel la gestionnaire du programme a déclaré [TRADUCTION] « je suis aussi d'avis que nous devrions obtenir les commentaires des autorités provinciales sur la question de savoir si un permis ministériel peut être délivré » . À mon avis, cette déclaration ambiguë quelque peu énigmatique n'équivaut pas à une décision favorable à la délivrance d'un permis ministériel. Par conséquent, la gestionnaire du programme ne peut pas avoir commis une erreur en modifiant sa décision favorable antérieure parce qu'il n'existe pas de preuve d'une telle décision.

[30]            Finalement, comme précédemment mentionné, il existe des éléments de preuve selon lesquels la gestionnaire du programme a pris en compte d'autres facteurs en plus du fardeau excessif éventuel lorsqu'elle a pris sa décision à l'égard du permis ministériel. Par conséquent, contrairement à la décision de l'agente des visas, la décision de la gestionnaire du programme n'est pas seulement fondée sur la question du fardeau excessif.

Conclusion

[31]            La demanderesse a proposé la question suivante aux fins de la certification :

[TRADUCTION]

Une représentante du ministre devrait-elle, dans les cas où elle décide de refuser la délivrance d'un permis ministériel, pouvoir se fonder sur la preuve soumise dans un autre processus sans permettre à la demanderesse de commenter une telle preuve?


Étant donné que cette question n'était pas déterminante à l'égard des questions qui m'étaient soumises et étant donné que la présente affaire dépend très étroitement des faits, je refuse de certifier cette question.

[32]            La présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée et aucune question ne sera certifiée.

                                                                     ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Judith A. Snider »

Juge

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

Avocats inscrits au dossier

DOSSIER :                          IMM-1575-02

INTITULÉ :                           NASIMBANU GILANI

demanderesse

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

DATE DE L'AUDIENCE :                LE MARDI 4 FÉVRIER 2003

LIEU DE L'AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                 LE JUGE SNIDER

DATE DES MOTIFS :              LE MERCREDI 12 FÉVRIER 2003

COMPARUTIONS :                      Elizabeth Jaszi

                                                                                                            Pour la demanderesse

Kareena R. Wilding

                                                                                                                Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     Mary Lam

Avocate

206, rue Bloor Ouest

Bureau 3

Toronto (Ontario) M5S 1T8   

Pour la demanderesse

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Pour le défendeur


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                                       Date : 20030212

                                                        Dossier : IMM-1575-02

ENTRE :

NASIMBANU GILANI

demanderesse

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                                                          

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

                                                                          

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