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                                                                                                                               Date : 20050916

                                                                                                                         Dossier : IMM-26-05

                                                                                                               Référence : 2005 CF 1136

ENTRE :

                                              Jorge Samuel AYLLON VALENCIA

                                              Teresa Lupe MORENO MENDIETA

                                               Sofia Manuela AYLLON MORENO

                                                 Rosa Alejandra AYLLON MORE

                                                                                                                                    demandeurs

                                                                          - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]         Les demandeurs sollicitent le contrôle judiciaire d'une décision rendue le 18 novembre 2004 par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission), par laquelle la Commission a refusé aux demandeurs la qualité de « réfugiés au sens de la Convention » et la qualité de « personnes à protéger » , expressions définies dans les articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.


[2]         Jorge Samuel Ayllon Valencia (le demandeur) est un Péruvien âgé de 43 ans. Son épouse, Teresa Lupe Moreno Mendieta et leurs deux enfants mineures, Sofia Manuela et Rosa Alejandra, se sont jointes à lui dans sa demande d'asile. Toutes les codemandeures d'asile font reposer leurs revendications sur le même fondement que le demandeur, lequel craint une menace pour sa vie et un risque de traitements ou peines cruels et inusités, ou un risque de torture.

[3]         La Commission a estimé que la crainte qu'inspirait au demandeur le Sentier lumineux ntait pas fondée objectivement et que le demandeur ntait pas crédible.

[4]         Il ressort clairement de la preuve documentaire existante que, malgré certains incidents mineurs impliquant le Sentier lumineux, celui-ci ne semble aucunement constituer une menace pour les habitants du Pérou comme ctait le cas auparavant. Se fondant sur la preuve objective, la Commission a estimé que le demandeur d'asile ne pouvait pas prétendre éprouver de la crainte à lgard de ces individus. Je suis d'avis que cette conclusion n'est pas déraisonnable.


[5]         La Commission a conclu que les demandeurs n'avaient pas réfuté la présomption selon laquelle leur État était en mesure de les protéger, ce qui est un élément essentiel pour que leur demande d'asile soit acceptée. Il appartient à un demandeur d'asile d'apporter une preuve claire et convaincante montrant l'incapacité de ltat d'apporter une protection à ses nationaux (Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689). Il doit aussi prouver qu'il a épuisé tous les recours disponibles dans son pays avant de pouvoir demander l'asile ailleurs, et il ne suffit pas à un demandeur d'asile de montrer simplement qu'il s'est adressé à des policiers et que ses démarches n'ont pas donné de résultat (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration c. Kadenko et al.(1996), 143 D.L.R. (4th) 532 (C.A.F.), autorisation de pourvoi devant la Cour suprême du Canada rejetée le 8 mai 1997). Rien ne donne à penser que la Commission a commis une erreur lorsqu'elle a dit que les demandeurs n'avaient pas réfuté cette présomption. Sur ce point, la manière dont la Commission, un tribunal spécialisé, a apprécié les faits est autorisée par la preuve, laquelle me conduit pour l'essentiel à la même conclusion que celle de mon collègue le juge Martineau dans la décision Bustamante c. Canada (M.C.I.), 2002 CFPI 499, [2002] A.C.F. no 643 (QL), au paragraphe 12 :

Je conclus que le demandeur n'a pas réussi à montrer que la Commission a commis une erreur en préférant la preuve plus récente et mieux documentée relative à la situation en cours au Pérou au moment de la présentation de la revendication. Cette preuve ne fait état d'aucune activité de la part du Sentier lumineux à Lima et précise que cette activité se limite aux régions éloignées de la jungle. La preuve documentaire versée au dossier établit sans équivoque que l'Association du Sentier lumineux a pratiquement été éliminée par les autorités péruviennes. En outre, la Commission a décidé que le demandeur n'a pas produit une preuve manifeste et convaincante de l'incapacité de ltat à le protéger, même si le Sentier lumineux était réellement à l'origine des appels de menace. À la lumière de l'ensemble de la preuve déposée au dossier, la Commission pouvait raisonnablement arriver à ces conclusions.

(Voir aussi la décision Mejia c. Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (30 juin 2004), IMM-2757-03, 2004 CF 925.)

[6]         La Commission a aussi fondé sa décision sur le fait qu'elle n'a pas cru le demandeur. Pour ce qui est de la crédibilité, la Cour ne peut substituer son opinion à celle de la Commission, à moins que le demandeur ne puisse prouver que la décision de la Commission était fondée sur une conclusion de fait erronée qu'elle a tirée d'une manière arbitraire ou sans tenir compte des éléments qu'elle avait devant elle (paragraphe 18.1(4) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7). Par ailleurs, la décision de la Commission ne sera modifiée que si elle est suffisamment déraisonnable pour justifier l'intervention de la Cour. Il a été établi que la Commission est un tribunal spécialisé, qui a pleine compétence pour apprécier la plausibilité et la crédibilité d'un témoignage, dans la mesure où les inférences qu'elle tire de ce témoignage ne sont pas déraisonnables (Aguebor c. Canada (M.E.I.) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)) et dans la mesure où ses motifs sont exposés clairement et intelligiblement (Hilo c. Canada (M.E.I.) (1991), 130 N.R. 236 (C.A.F.)).


[7]         La décision de la Commission est fondée sur la preuve et elle fait clairement ressortir toutes les incohérences et contradictions entachant cette preuve. Je ne vois aucune raison de modifier la conclusion de la Commission sur l'aspect de la crédibilité.

[8]         Pour les motifs susmentionnés, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                                                                                 _ Yvon Pinard _                            

                                                                                                                                                    Juge                                     

OTTAWA (ONTARIO)

Le 16 septembre 2005

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                             AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                              IMM-26-05

INTITULÉ:                                               Jorge Samuel AYLLON VALENCIA, Teresa Lupe MORENO MENDIETA, Sofia Manuela AYLLON MORENO, Rosa Alejandra AYLLON MORE c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                       Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                     Le 16 août 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :         Le juge Pinard

DATE DES MOTIFS :                            Le 16 septembre 2005

COMPARUTIONS:

Juliana Rodriguez                                    POUR LES DEMANDEURS

Suzon Létourneau                                    POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Juliana Rodriguez                                    POUR LES DEMANDEURS

Sherbrooke (Québec)

John H. Sims, c.r.                                     POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


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