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Date : 20030313

Dossier : IMM-2112-02

                                                                                              Référence neutre : 2003 CFPI 307

OTTAWA (ONTARIO), le 13 mars 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JAMES RUSSELL

ENTRE :

                                                SIVASOTHY SIVAMOORTHY

                                                                                                                                 demanderesse

                                                                         - et -

                LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                 La demanderesse, par voie de requête écrite datée du 18 septembre 2002, a sollicité la réunion de la présente instance avec celle du dossier de la Cour no IMM-3430-02 au motif que les décisions contestées dans les deux instances ont été rendues par le même tribunal de la Commission et que l'on peut soutenir que les décisions sont contradictoires sur un point important.

[2]                 Dans une ordonnance datée du 3 octobre 2002, la requête en réunion d'instances de la demanderesse a été ajournée sine die, à n'être présentée à la Cour que dans les cas où la procédure de contrôle judiciaire serait autorisée dans ces deux instances.


[3]                 L'autorisation de présenter une demande de contrôle judiciaire a maintenant été accordée dans les deux instances.

[4]                 Dans une lettre du 3 mars 2003 adressée au greffe de la Cour fédérale du Canada, Raoul Boulakia, l'avocat des demandeurs dans les deux demandes, a souligné que les auditions des deux demandes avaient été fixées et qu'elles devaient être entendues consécutivement le même jour, devant le même juge, et il a demandé que la question de la réunion d'instances soit tranchée par la Cour.

[5]                 L'article 105 des Règles de la Cour fédérale (1998) prévoit que :


La Cour peut ordonner, à l'égard de deux ou plusieurs instances :

a) qu'elles soient réunies, instruites conjointement ou instruites successivement;

The Court may order, in respect of two or more proceedings,

(a) that they be consolidated, heard together or heard one immediately after the other;


[6]                 De façon générale, la jurisprudence donne à penser que l'objectif qui sous-tend la réunion est d'éviter la multiplicité des instances et de favoriser des décisions plus rapides rendues à moindre coût. Voir, par exemple, John E. Canning Ltd. c. Tripap Inc. (1999), 167 F.T.R. 93 (1re inst.).


[7]                 Parmi les facteurs que la cour devrait prendre en considération pour décider s'il existe une communauté suffisante de questions de droit et de fait pour que cela justifie une réunion, il y a la présence des mêmes parties, des mêmes questions de droit et de fait, de causes d'action similaires, d'éléments de preuve analogues et la probabilité que le résultat d'une affaire résoudra l'autre affaire.

[8]                 En l'espèce, la demanderesse prétend que les deux revendications ont été entendues par le même tribunal de la Commission, que le même avocat représente les deux demandeurs relativement aux demandes et que la question principale à trancher est la même dans les deux demandes, c'est-à-dire que le tribunal de la Commission a adopté des positions contradictoires concernant la valeur probante des cartes d'identité nationale du Sri Lanka, ce qui donne ouverture à la possibilité qu'il y ait eu mauvaise foi de la part du tribunal dans les deux décisions.

[9]                 En substance, la demanderesse sollicite la réunion des demandes afin que l'argument relatif à la mauvaise foi concernant les décisions contradictoires de la part du même tribunal puisse être mis au premier plan et traité d'une manière expéditive. Cela permettrait de trancher la question dans les deux demandes et préviendrait le besoin de produire des éléments de preuve et une argumentation concernant d'autres questions soulevées dans les demandes.


[10]            Dans la lettre du 3 mars 2003 adressée au greffe de la Cour, l'avocat des demandeurs propose une procédure subsidiaire à la réunion, par laquelle la question des décisions contradictoires de la Commission pourrait être traitée de manière préliminaire en présence de l'avocat qui occupe dans les deux demandes.

[11]            Ayant examiné les deux demandes ainsi que les arguments des avocats des demandeurs et du défendeur, je n'ai pas l'impression qu'il s'agit d'un cas qui se prête à la réunion ou à la procédure proposée par l'avocat des demandeurs dans la lettre datée du 3 mars 2003 adressée au greffe de la Cour.

[12]            Même sur la seule question du traitement de la part du tribunal des cartes d'identité nationale du Sri Lanka dans les deux demandes, il n'existe pas de communauté suffisante de questions de droit et de fait pour que cela justifie une réunion.

[13]            Dans le dossier de Sivamoorthy, le tribunal a conclu que la demanderesse « a obtenu sa carte d'identité nationale d'une manière inappropriée, indépendamment du fait que cette carte soit "authentique". [...] La preuve documentaire précitée indique qu'il est possible de se procurer des cartes d'identité nationale par des moyens frauduleux. »


[14]            Dans le dossier de Kathirkamu, le tribunal a conclu que le certificat de naissance et la carte d'identité postale du demandeur avaient une valeur probante restreinte et que la « pièce d'identité principale au Sri Lanka est la carte d'identiténationale (CIN) que les citoyens sont tenus d'avoir avec eux en tout temps et, par conséquent, la CIN est la pièce d'identité clé utilisée aux audiences pour la détermination du statut de réfugié dans le cas des Sri Lankais » . Le tribunal a ensuite souligné que le demandeur « a présenté un témoignage confus et incohérent sur ce qui est arrivé à sa CIN » .

[15]            Les deux décisions soulèvent la question de la valeur probante à attribuer aux CIN, mais elles le font de manières fort différentes. Dans Sivamoorthy, le tribunal a estimé que la CIN de la demanderesse, bien qu'étant un document authentique, avait été obtenue de manière inappropriée. Dans Kathirkamu, le tribunal a eu à traiter une situation où aucune CIN n'a été déposée. Il n'y a rien de fondamentalement contradictoire au sujet de ces conclusions distinctes. Il n'existe pas non plus de communauté suffisante de questions de droit et de fait pour que cela justifie une réunion.

[16]            La question du caractère approprié des décisions du tribunal dans chaque affaire et celle de la valeur probante des CIN seront abordées dans le contexte d'audiences de contrôle judiciaire distinctes. Mon seul objectif ici, c'est de mentionner qu'il n'existe pas de communauté suffisante de questions de droit et de fait pour réunir les demandes ou pour procéder par voie d'une quasi-réunion en permettant à l'avocat de plaider en même temps la question des CIN relative aux deux demandes.


[17]            Si l'avocat des demandeurs souhaite soutenir qu'il y a eu mauvaise foi de la part du tribunal de la Commission parce que ce même tribunal aurait rendu des décisions incompatibles, il doit alors chercher d'autres moyens que la réunion d'instances pour présenter des éléments de preuve d'une telle mauvaise foi et il doit soutenir ce point lors de l'audience relative à chaque demande.

[18]            Par conséquent, la requête en réunion d'instances est rejetée.

                                           ORDONNANCE

LA COUR, PAR LES PRÉSENTES, ORDONNE QUE : la requête en réunion des instances portant les numéros de dossier IMM-2112-02 et IMM-3430-02 soit rejetée.

                                                                                       « James Russell »             

                                                                                                             Juge                        

Ottawa (Ontario)

Le 13 mars 2003

Traduction certifiée conforme

Christian Laroche, LL.B.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                 IMM-2112-02

INTITULÉ :              Sivasothy Sivamoorthy c. MCI

                                                         

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE RUSSELL

DATE DES MOTIFS : Le 13 mars 2003

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Raoul Boulakia                                                     POUR LA DEMANDERESSE

Tamrat Gebeyehu                                                              POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Raoul Boulakia                                                     POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg                                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


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